Sommaire
Présidence de M. Hervé Marseille
Secrétaires :
Mme Corinne Bouchoux, M. Jean-Pierre Leleux.
2. Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Articles additionnels après l'article 2
Amendement n° 850 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 99 rectifié bis de M. Philippe Adnot. – Non soutenu.
Amendement n° 125 rectifié de M. Philippe Dominati. – Non soutenu.
Amendement n° 124 rectifié de M. Philippe Dominati. – Non soutenu.
Amendement n° 9 de M. Olivier Cigolotti. – Non soutenu.
Amendement n° 237 rectifié bis de M. Olivier Cadic. – Retrait.
Amendement n° 93 rectifié ter de M. Philippe Mouiller. – Retrait.
Amendement n° 381 rectifié bis de M. Didier Marie. – Non soutenu.
Amendement n° 42 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 570 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 882 rectifié de M. Jacques Mézard. – Rectification.
Amendement n° 882 rectifié bis de M. Jacques Mézard. – Adoption.
Amendement n° 301 de Mme Dominique Gillot. – Adoption.
Amendement n° 571 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 302 de M. Jean-Louis Tourenne. – Adoption.
Amendement n° 573 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 575 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 576 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 578 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 579 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 592 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 590 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 497 rectifié bis de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 580 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 584 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 581 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 585 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 583 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 587 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 586 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 589 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 588 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 593 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 591 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 1024 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 595 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 594 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 995 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 993 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 994 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 996 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 596 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 597 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 997 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 998 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 999 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1002 de la commission. – Adoption.
Adoption, par scrutin public, de l’article modifié.
Adoption de l’article.
Amendement n° 43 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 28 rectifié bis de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
Amendement n° 254 rectifié ter de Mme Catherine Deroche. – Adoption par scrutin public.
Amendement n° 1000 de la commission. – Adoption.
Amendement n° 1001 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 303 de Mme Nicole Bricq. – Retrait.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 5
Amendement n° 304 de Mme Nicole Bricq. – Rectification.
M. le président
Amendement n° 601 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Adoption de l’article.
Articles additionnels avant l'article 7 A
Amendement n° 838 rectifié de M. Dominique Watrin. – Devenu sans objet.
Amendement n° 605 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Adoption, par scrutin public, de l’article.
Amendement n° 607 de M. Dominique Watrin. – Retrait.
Amendement n° 1012 de la commission. – Rejet.
Amendement n° 251 rectifié bis de M. Olivier Cadic. – Précédemment retiré.
Adoption, par scrutin public, de l’article.
Amendement n° 609 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Adoption, par scrutin public, de l’article.
Article additionnel après l'article 7 C
Amendement n° 982 du Gouvernement. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 44 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 611 rectifié de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 960 rectifié de M. Jérôme Durain. – Rejet.
Amendement n° 410 de M. Jean Desessard. – Rejet.
Amendement n° 860 rectifié de M. Michel Canevet. – Retrait.
3. Mise au point au sujet d’un vote
M. Jean-Claude Requier ; M. le président.
4. Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Amendement n° 957 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 613 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Amendement n° 612 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 411 de M. Jean Desessard. – Retrait.
Amendement n° 305 de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Retrait.
Amendement n° 614 de M. Dominique Watrin. – Rejet par scrutin public.
Adoption, par scrutin public, de l’article modifié.
Articles additionnels après l'article 7
Amendement n° 77 rectifié de M. Jean-François Husson. – Retrait.
Amendement n° 738 rectifié de M. Dominique Watrin. – Retrait.
Amendement n° 79 rectifié de M. Jean-François Husson. – Rejet.
Amendement n° 617 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 11 rectifié de Mme Pascale Gruny. – Retrait.
Amendement n° 618 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 620 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 451 rectifié de Mme Annick Billon. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 622 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 623 de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 634 rectifié de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Amendement n° 635 rectifié de M. Dominique Watrin. – Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
6. Convocation du Parlement en session extraordinaire
7. Retrait d’une question orale
8. Communication du Conseil constitutionnel
compte rendu intégral
Présidence de M. Hervé Marseille
vice-président
Secrétaires :
Mme Corinne Bouchoux,
M. Jean-Pierre Leleux.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s (projet n° 610, texte de la commission n° 662, rapport n° 661).
Nous poursuivons la discussion du texte de la commission.
Titre ier (suite)
Refonder le droit du travail et donner plus de poids à la négociation collective
Chapitre II (suite)
Une nouvelle architecture des règles en matière de durée du travail et de congés
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre II du titre Ier, à l’examen des amendements portant articles additionnels après l’article 2.
Articles additionnels après l'article 2
M. le président. L'amendement n° 850, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 1221-22 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À défaut, la durée de la période d’essai est présumée être d'un mois. »
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi est ainsi faite que son principe est de donner sens à cette notion si propre à notre corpus législatif qu’est l’intérêt général. Il est en effet d’intérêt général que certaines règles soient exactement les mêmes pour tout le monde, sauf à créer des abus de droit inacceptables.
La question de la période d’essai, quand on commence à travailler dans telle ou telle entreprise ou à occuper tel ou tel emploi, fait partie de ces règles dont il vaut mieux qu’elles soient les mêmes à Paris, à Lyon, à Marseille, dans la zone d’activité économique de La Chênaie à Rouvroy ou dans celle d’Aix-les-Milles.
Par principe, une période d’essai est une période pendant laquelle, sans formalités majeures en cas de séparation mutuelle, le salarié vérifie qu’il a fait le bon choix en répondant à l’offre d’emploi pour le poste qu’il occupe et l’entreprise s’assure de la qualité de la personne recrutée. Il y a lieu de faire en sorte que les règles soient simples, lisibles et directement applicables.
Si l’on prend une convention collective comme celle du commerce de détail en fruits et légumes, il est évident que les règles ne peuvent venir que de la loi. Le secteur compte en effet plus de 91 % d’entreprises de moins de dix salariés et moins de 2 % de plus de vingt salariés.
De fait, s’agissant de la période d’essai, la convention collective de la profession s’en tient aux règles en vigueur, avec un mois pour les postes ouvriers, deux pour les postes d’agent de maîtrise et trois pour les cadres. La profession est féminisée – plus de 56 % des emplois –, relativement peu qualifiée – quelque 90 % des postes sont occupés par des ouvriers et employés de base – et, surtout, assez mal payée. Autant dire que la structure de la profession, que l’on peut sans doute retrouver dans bien des branches du commerce, dispense a priori de rechercher par la voie des accords d’entreprise la panacée pour régler la question de la période d’essai.
Au-delà de cet exemple, il y a lieu que la loi définisse clairement l’amplitude de la période d’essai et que, à défaut, celle-ci soit présumée d’un mois.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur de la commission des affaires sociales. La durée d’un mois qui est proposée ici est trop courte. Pour mémoire, la période d’essai est de deux mois pour les ouvriers, trois mois pour les agents de maîtrise, quatre mois pour les cadres, et elle peut être renouvelée. En outre, elle est uniforme. La différence de durée selon les catégories peut se justifier et être plus protectrice pour certaines catégories que pour d’autres.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. La durée de la période d’essai ne se présume pas : elle doit figurer expressément dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail. C’est ce que prévoit la loi. Toutefois, l’absence de mention n’est pas opposable au salarié.
Cet amendement vise à instaurer une présomption systématique quant à l’existence d’une période d’essai et de prévoir que sa durée serait d’un mois. En d’autres termes, vous revenez sur une règle qui est aujourd'hui plus favorable pour le salarié, vous fixez une durée systématique. Qui plus est, les accords collectifs peuvent encadrer cette durée. L'adoption de cet amendement pourrait remettre en cause le dispositif existant…
Le Gouvernement émet donc, lui aussi, un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 252 rectifié bis, présenté par Mme Gruny, M. Retailleau, Mme Deroche, MM. Allizard, Bignon, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cantegrit et Cardoux, Mme Cayeux, M. César, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Commeinhes, Cornu, Dallier, Danesi et Dassault, Mmes Debré, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et P. Dominati, Mmes Duchêne et Duranton, M. Emorine, Mme Estrosi Sassone, MM. Falco, Fontaine, B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa, J. Gautier, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grand, Gremillet, Grosperrin, Guené, Houel et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré et Husson, Mme Imbert, MM. Karoutchi, Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Malhuret, Mandelli, A. Marc, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Panunzi, Paul, Perrin, Pierre, Pillet, Pinton, Pointereau et Portelli, Mmes Primas et Procaccia et MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Trillard, Vaspart, Vasselle, Vendegou, Vial, Vogel et Baroin, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 1242-2 du code du travail, il est inséré un article L. 1242-2-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1242-2-1. Un contrat de travail à durée déterminée dont l’échéance est la réalisation d’un objet défini, d’une durée minimale de dix-huit mois et maximale de quarante-huit mois, peut être conclu.
« Ce contrat est régi par le titre IV du livre II de la première partie du code du travail, à l’exception des dispositions spécifiques fixées par le présent article.
« Ce contrat prend fin avec la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu, après un délai de prévenance au moins égal à deux mois. Il peut être rompu par l’une ou l’autre partie, pour un motif réel et sérieux, au bout de dix-huit mois puis à la date anniversaire de sa conclusion. Il ne peut pas être renouvelé. Lorsque, à l’issue du contrat, les relations contractuelles du travail ne se poursuivent pas par un contrat de travail à durée indéterminée, le salarié a droit à une indemnité d’un montant égal à 10 % de sa rémunération totale brute.
« Le contrat à durée déterminée à objet défini est établi par écrit et comporte les clauses obligatoires pour les contrats à durée déterminée, sous réserve d’adaptations à ses spécificités, notamment :
« 1° La mention “contrat à durée déterminée à objet défini” ;
« 2° Une clause descriptive du projet et mentionnant sa durée prévisible ;
« 3° La définition des tâches pour lesquelles le contrat est conclu ;
« 4° L’événement ou le résultat objectif déterminant la fin de la relation contractuelle ;
« 5° Le délai de prévenance de l’arrivée au terme du contrat et, le cas échéant, de la proposition de poursuite de la relation de travail en contrat à durée indéterminée ;
« 6° Une clause mentionnant la possibilité de rupture à la date anniversaire de la conclusion du contrat par l’une ou l’autre partie pour un motif réel et sérieux et le droit pour le salarié, lorsque cette rupture est à l’initiative de l’employeur, à une indemnité égale à 10 % de la rémunération totale brute du salarié. »
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Lors de la signataire de l’Accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008 sur la modernisation du marché du travail, les partenaires sociaux ont lancé une formule expérimentale avec le CDD à objet défini, lequel avait pour particularité de s'achever lorsque la mission pour laquelle il avait été conclu prenait fin.
Il était notamment réservé au recrutement d'ingénieurs et de cadres et devait être prévu par un accord de branche étendu ou, à défaut, par un accord d'entreprise. Ce contrat devait respecter une durée minimum de dix-huit mois et ne pas dépasser trente-six mois. Il ne pouvait pas être renouvelé.
Expérimenté depuis 2008, ce contrat a pu faire ses preuves dans des secteurs comme la recherche, où il sécurise les parcours professionnels des chercheurs et leurs débuts de carrière en leur permettant de faire leurs preuves sur un projet précis. Le CDD à objet défini a finalement été pérennisé, sur proposition du Sénat, dans la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives.
Pour répondre au problème de l’emploi, il convient désormais d’aller plus loin et, pour apporter une réponse concrète aux employeurs, notamment de TPE-PME, qui hésitent à employer, et pour fluidifier le marché du travail, il faut mettre en place un contrat de mission, qui devrait respecter une durée minimale de dix-huit mois, ne pourrait excéder quarante-huit mois et serait rattaché à la réalisation d’une mission en particulier.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Je rappelle qu’il s’agit là d’une expérimentation qui a été engagée par les partenaires sociaux et reprise par le législateur dans la loi du 25 juin 2008. Ces contrats de mission ou contrats de projet ont été pérennisés, d'ailleurs sur l’initiative du Sénat, en particulier celle de Mme Procaccia, dans le cadre de la loi du 20 décembre 2014.
Il s’agit aujourd’hui de donner encore un peu plus d’ambition à ce dispositif, d’une part en ouvrant ce contrat à tous les salariés, de l’autre en portant sa durée maximale de trente-six mois à quarante-huit mois. Nous savons que cela peut répondre à un certain nombre de problématiques et être de nature à favoriser l’entrée sur le marché du travail de certaines personnes.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, ce dispositif a été créé sur la base d’un accord interprofessionnel, donc de la négociation des partenaires sociaux, pour un objet très précisément défini. Si cet amendement était adopté, ce type de contrat serait étendu et généralisé par la loi. On sort donc à la fois de l’objet et des circonstances dans lesquelles les partenaires sociaux s’étaient mis d’accord.
En outre, cette généralisation se fait sans l’accord des partenaires sociaux.
Enfin, cela conduit à banaliser un outil qui avait une fonction précise dans un cadre spécifique. Ce faisant, il est porté atteinte au fait que le CDI reste le contrat de référence en droit du travail. Le Gouvernement ne le souhaite pas.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. J’essaie de comprendre ce qui anime une grande partie des membres du groupe Les Républicains. Nous savons qu’un débat existe et divise – surtout les organisations patronales, du reste – sur le CDI à rupture programmée, si je puis dire. Peut-être est-ce l’amorce de ce nouveau contrat qui est proposé dans cet amendement, c’est-à-dire le CDI unique, qui en définit à l’avance sa durée, les conditions de sa rupture, etc.
Cet amendement vise en en effet à créer un nouveau type de contrat, très différent des CDD et CDI actuels. C’est la raison pour laquelle nous voterons contre. Cette démarche n’est pas animée des meilleures intentions. L’adoption de cet amendement serait très grave et déstabiliserait le monde du travail et les salariés.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Il ne s’agit pas ici de ce que l’on appelle le « CDI à rupture précausée », qui est dans le débat public, pour lequel employeur et employé se mettraient à l’avance d’accord sur les conditions dans lesquelles le CDI tomberait de lui-même. Il est question du contrat de mission, ou contrat de projet, qui existe déjà et que cet amendement vise à élargir sur deux de ses aspects : la durée, portée de trois ans à quatre ans, et le public concerné.
Dans le BTP existent les contrats de chantier. Nous sommes dans une logique similaire et non dans celle du CDI à rupture précausée ; c’est encore un autre débat.
Mme Nicole Bricq. Vous franchissez un pas de plus, reconnaissez-le !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. C’est différent par nature.
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Notre idée est la suivante : pour mener à bien un projet, il faut parvenir à assembler les bonnes compétences. D’ailleurs, les auditions l’ont confirmée. Aujourd’hui, l’entreprise qui arrive à s’en tirer, c’est celle qui, à un moment donné, assemble les bonnes compétences pour aller conquérir un marché. Je le répète, on n’est donc pas du tout dans la logique du CDI à rupture précausée. C’est autre chose.
Mme Nicole Bricq. Assumez vos choix !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Nous assumons tout, madame Bricq ! En ce qui concerne l’article 2, nous avons eu la réforme assumée et pas honteuse, contrairement aux contournements que l’on a pu évoquer concernant la modulation de trois ans, mais je n’y reviens pas.
Je veux que l’on ait les idées claires sur l’objet de cet amendement.
M. Le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Je soutiens la démarche présentée par Catherine Deroche. C’est ce qu’attendent les entreprises et les entrepreneurs, on le ressent. La délégation sénatoriale aux entreprises l’a constaté, à chaque fois, on nous dit : « Faites-nous confiance ! »
Le contrat de mission permet de donner de la flexibilité à la fois aux entreprises et aux salariés pour définir un contrat, dont l’objectif est non pas forcément une durée, mais l’atteinte d’un objectif. Avec ce contrat, une compétence vient renforcer l’entreprise pour l’aider à atteindre un résultat. Cette pratique est répandue ailleurs, dans d’autres pays limitrophes. Il est temps de s’ouvrir : à force d’édicter des règles trop ténues, les entreprises ne peuvent pas répondre de façon pertinente aux appels et aux demandes.
Depuis l’étranger, quand les entreprises françaises ne peuvent pas créer les contrats de mission depuis la France, elles exportent : soit elles n’ont pas le marché, soit elles le refusent, soit elles trouvent une solution de portage, afin que le salarié accomplisse la mission avec un contrat à l’étranger.
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Nous sommes résolument contre cet amendement. Nous ne comprenons pas bien : l’idée depuis longtemps sous-jacente à nos travaux, c’est de simplifier le code du travail et de le rendre plus lisible. Or vous créez un nouveau type de contrat.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Non, il existe déjà !
M. Yves Daudigny. Mais vous le généralisez.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. C’est différent ! Cela ne veut pas dire la même chose.
M. Yves Daudigny. C’est un contrat qui s’appliquera dans des conditions différentes de celles qui existent aujourd'hui. Il s'agit donc bien d’une nouvelle forme de contrat, et cela ne va pas dans le sens d’une meilleure compréhension du code du travail, à moins que l’idée ne soit d’entrouvrir la porte pour d’autres amendements, plus tard.
M. Le président. Je mets aux voix l'amendement n° 252 rectifié bis.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
M. Jean Desessard. Cela nous manquait ! (Sourires.)
M. le président. Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 305 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 187 |
Contre | 153 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 2.
L'amendement n° 99 rectifié bis, présenté par MM. Adnot, Husson, Türk, Lefèvre, Vial et Doligé et Mme Deromedi, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 125 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Commeinhes, Magras, Houel, Cambon, Vasselle, Longuet et Doligé, Mme Duranton, MM. Laménie et Gilles, Mme Deromedi et MM. Karoutchi, G. Bailly, Charon, Pointereau et Poniatowski, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 124 rectifié, présenté par MM. P. Dominati, Commeinhes, Magras, Houel, Cambon, Vasselle, Longuet et Doligé, Mme Duranton, MM. Laménie et Gilles, Mme Deromedi et MM. Karoutchi, Bouchet, G. Bailly et Charon, n'est pas non plus soutenu.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 9, présenté par M. Cigolotti, n'est pas soutenu.
L'amendement n° 237 rectifié bis, présenté par MM. Cadic et Canevet, Mme Billon et MM. Bockel, Delahaye, Guerriau et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 3132-25-3 du code du travail, il est inséré un article L. 3132-25-3-… ainsi rédigé :
« Art. L. 3132-25-3-… – I. – À défaut de conclusion de l’accord prévu à l’article L. 3132-25-3, et à condition que l’employeur ait engagé sérieusement et loyalement des négociations tenant à la conclusion d’un tel accord, la faculté de donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel, prévue aux articles L. 3132-24, L. 3132-25, L 3132-25-1 et L. 3132-25-6, bénéficie aux établissements couverts par une décision unilatérale de l’employeur, prise après avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel lorsqu’ils existent.
« Afin de tenir compte du caractère dérogatoire du travail accompli le dimanche, la décision de l’employeur fixe les contreparties, en particulier salariales, accordées aux salariés privés du repos dominical ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées. Chaque salarié privé du repos du dimanche perçoit pour ce jour de travail une rémunération supérieure à celle normalement due pour une durée équivalente.
« La décision de l’employeur prévoit les mesures destinées à faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés privés du repos dominical et fixe les contreparties pour compenser les charges induites pour les salariés privés du repos dominical.
« Lorsqu’un accord collectif est régulièrement négocié postérieurement à la décision unilatérale, cet accord s’applique dès sa signature en lieu et place des contreparties prévues par cette décision.
« II. – Seuls les salariés volontaires ayant donné leur accord par écrit à leur employeur peuvent travailler le dimanche.
« Une entreprise ne peut prendre en considération le refus d’une personne de travailler le dimanche pour refuser de l’embaucher. Le salarié qui refuse de travailler le dimanche ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire dans le cadre de l’exécution de son contrat de travail. Le refus de travailler le dimanche pour un salarié ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement.
« La décision de l’employeur détermine les modalités de prise en compte d’un changement d’avis du salarié privé du repos dominical. »
La parole est à M. Olivier Cadic.
M. Olivier Cadic. Cet amendement tend à prévoir des dispositions supplétives en matière de repos dominical en cas de défaut d’accord collectif applicable au sein de l’entreprise.
Ainsi l’employeur pourrait-il, à défaut d’accord, et à condition d’avoir engagé sérieusement et loyalement des négociations, déroger au repos dominical sur le fondement d’une décision unilatérale prise après avis du comité d’entreprise. Pour pallier l’absence d’accord collectif, la loi prévoit un niveau minimum de contreparties accordé aux salariés.
La décision de l’employeur devra également comporter des garanties en matière de volontariat ; des engagements en termes d’emploi et des mesures destinées à faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés privés du repos dominical ; des contreparties pour compenser les charges induites par la garde des enfants pour les salariés privés du repos dominical.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 237 rectifié bis ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Je comprends les difficultés soulevées par le régime juridique institué par la loi Macron, mais, en cas d’échec de la négociation ou d’opposition des syndicats à ce type de dispositif, ne faudrait-il pas tout simplement consulter plus directement les salariés pour trancher le différend ? À cet égard, les outils mis en place à l’article 10 seront peut-être de nature à constituer une réponse.
Le régime supplétif qui nous est proposé ne nous paraissant pas devoir être retenu aujourd'hui, je prie notre collègue de bien vouloir retirer son amendement, sachant que les équilibres existants sur le travail dominical ont été conservés dans le texte.
Il nous faudra néanmoins revenir sur ce sujet, car les évolutions de la société suscitent de nouvelles attentes de la part à la fois des salariés, qui sont aussi des consommateurs, et des employeurs.
La commission demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Cadic, l'amendement n° 237 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Olivier Cadic. Je remercie M. le rapporteur d’avoir eu, lui, l’amabilité de commenter cet amendement…
La loi Macron, dont l’objectif était de libérer notre économie et de lui donner un peu d’air, a porté de cinq à douze le nombre d’ouvertures possibles le dimanche. Elle a toutefois conditionné cette possibilité à la signature d’un accord majoritaire dans un délai de deux ans.
Or on se rend compte depuis un an que, pour des raisons idéologiques, dogmatiques, des syndicats refusent catégoriquement de signer un tel accord. Certains commerces sont donc bloqués et devront, à la fin du mois d’août 2018, cesser d’ouvrir le dimanche, alors qu’ils pouvaient le faire auparavant.
Mme Laurence Cohen. Comme c’est grave ! (Sourires sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. Olivier Cadic. Il y a là un véritable enjeu. Je vous remercie, monsieur le rapporteur, d’avoir indiqué qu’il allait falloir remettre ce sujet sur le tapis dans quelques mois. C’est important, car un retour en arrière n’est pas imaginable.
L’objet de cet amendement était d’aider à corriger ce point. Comme je comprends néanmoins la position de la commission, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 237 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 93 rectifié ter, présenté par MM. Mouiller, Mandelli, Vial et Morisset, Mme Billon, M. J.P. Fournier, Mmes Morhet-Richaud et Cayeux, MM. de Legge, Houel, Pointereau et Guerriau, Mme Lopez, MM. Mayet, Dallier et Cambon, Mme Canayer, MM. Bouchet, Trillard, Longeot, Masclet, Commeinhes, Lefèvre, Laménie et Chasseing, Mme Deroche, MM. Revet, Pellevat, Huré, Charon, César, Grand et L. Hervé et Mme Gruny, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le dernier alinéa de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statuaires relatives à la fonction publique territoriale est supprimé.
II – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 93 rectifié ter est retiré.
L'amendement n° 381 rectifié bis, présenté par MM. Marie, Néri, Labazée, Cabanel, Duran, Gorce, Madrelle, Durain et Anziani, Mme Tocqueville et M. Masseret, n'est pas soutenu.
Article 3
I. – Le chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° La section 1 est ainsi rédigée :
« Section 1
« Congés d’articulation entre la vie professionnelle et la vie personnelle et familiale
« Sous-section 1
« Congés pour événements familiaux
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-1. – Le salarié a droit, sur justification, à un congé :
« 1° Pour son mariage ou pour la conclusion d’un pacte civil de solidarité ;
« 2° Pour le mariage d’un enfant ;
« 3° Pour chaque naissance survenue à son foyer ou pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption. Ces jours d’absence ne se cumulent pas avec les congés accordés pour ce même enfant dans le cadre du congé de maternité ;
« 4° Pour le décès d’un enfant, du conjoint ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur.
« Art. L. 3142-2. – Les congés mentionnés à l’article L. 3142-1 n’entraînent pas de réduction de la rémunération et sont assimilés à du temps de travail effectif pour la détermination de la durée du congé payé annuel.
« La durée de ces congés ne peut être imputée sur celle du congé payé annuel.
« Art. L. 3142-3. – En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-4. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié défini à l’article L. 3142-1, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine la durée de chacun des congés mentionnés au même article qui ne peut être inférieure à :
« 1° Quatre jours pour son mariage ou pour la conclusion d’un pacte civil de solidarité ;
« 2° Un jour pour le mariage d’un enfant ;
« 3° Trois jours pour chaque naissance survenue à son foyer ou pour l’arrivée d’un enfant placé en vue de son adoption ;
« 4° Cinq jours pour le décès d’un enfant ;
« 5° Deux jours pour le décès du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité, du père, de la mère, du beau-père, de la belle-mère, d’un frère ou d’une sœur.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-5. – À défaut de convention ou d’accord, le salarié a droit au congé mentionné à l’article L. 3142-4, dont la durée ne peut être inférieure à celle prévue au même article.
« Sous-section 2
« Congé de solidarité familiale
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-6. – Le salarié dont un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou une personne partageant le même domicile souffre d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou est en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable a droit à un congé de solidarité familiale.
« Ce droit bénéficie, dans les mêmes conditions, au salarié ayant été désigné comme personne de confiance, au sens de l’article L. 1111-6 du code de la santé publique.
« Art. L. 3142-7. – Le congé débute ou est renouvelé à l’initiative du salarié. La durée du congé est fixée par le salarié, dans la limite prévue au 1° de l’article L. 3142-25 ou, à défaut d’accord, dans la limite prévue au 1° de l’article L. 3142-26.
« En cas d’urgence absolue constatée par écrit par le médecin, le congé débute ou peut être renouvelé sans délai.
« Le congé prend fin soit à l’expiration de la durée mentionnée au premier alinéa, soit dans les trois jours qui suivent le décès de la personne assistée, sans préjudice du bénéfice des dispositions relatives aux congés pour événements personnels et aux congés pour événements familiaux, soit à une date antérieure choisie par le salarié.
« Art. L. 3142-8. – Le salarié peut, avec l’accord de son employeur, transformer ce congé en période d’activité à temps partiel ou le fractionner.
« Art. L. 3142-9. – Le salarié bénéficiant des droits prévus aux articles L. 3142-6 à L. 3142-8 ne peut exercer aucune autre activité professionnelle.
« Art. L. 3142-10. – À l’issue du congé ou de la période d’activité à temps partiel mentionnée à l’article L. 3142-8, le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
« Art. L. 3142-10-1 (nouveau). – Avant et après son congé, le salarié a droit à l’entretien professionnel mentionné au I de l’article L. 6315-1.
« Art. L. 3142-11. – La durée de ce congé ne peut être imputée sur celle du congé payé annuel.
« Elle est prise en compte pour la détermination des avantages liés à l’ancienneté.
« Le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages qu’il avait acquis avant le début du congé.
« Art. L. 3142-12. – En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-13. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-6, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée maximale du congé ;
« 2° Le nombre de renouvellements possibles ;
« 3° Les conditions de fractionnement du congé ou de sa transformation en période d’activité à temps partiel ;
« 4° Les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise du congé, sa durée prévisible, son renouvellement et la durée du préavis en cas de retour du salarié avant le terme prévu du congé ;
« 5° Les mesures permettant le maintien d’un lien entre l’entreprise et le salarié pendant la durée du congé et les modalités d’accompagnement du salarié à son retour.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-14. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-13, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° La durée maximale du congé est de trois mois, renouvelable une fois ;
« 2° Les modalités de fractionnement du congé et de sa transformation en période d’activité à temps partiel sont définies par décret ;
« 3° Les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise du congé, sa durée prévisible, son renouvellement ainsi que les conditions du retour du salarié avant le terme prévu sont fixés par décret.
« Sous-section 3
« Congé de proche aidant
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-15. – Le salarié ayant au moins deux ans d’ancienneté dans l’entreprise a droit à un congé de proche aidant lorsque l’une des personnes suivantes présente un handicap ou une perte d’autonomie d’une particulière gravité :
« 1° Son conjoint ;
« 2° Son concubin ;
« 3° Son partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;
« 4° Un ascendant ;
« 5° Un descendant ;
« 6° Un enfant dont il assume la charge au sens de l’article L. 512-1 du code de la sécurité sociale ;
« 7° Un collatéral jusqu’au quatrième degré ;
« 8° Un ascendant, un descendant ou un collatéral jusqu’au quatrième degré de son conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité ;
« 9° Une personne âgée ou handicapée avec laquelle il réside ou avec laquelle il entretient des liens étroits et stables, à qui il vient en aide de manière régulière et fréquente, à titre non professionnel, pour accomplir tout ou partie des actes ou des activités de la vie quotidienne.
« Art. L. 3142-16. – La personne aidée doit résider en France de façon stable et régulière.
« Art. L. 3142-17. – Le salarié ne peut exercer aucune autre activité professionnelle pendant la durée du congé.
« Toutefois, il peut être employé par la personne aidée dans les conditions prévues au deuxième alinéa des articles L. 232-7 ou L. 245-12 du code de l’action sociale et des familles.
« Art. L. 3142-18. – Le congé débute ou est renouvelé à l’initiative du salarié.
« Il ne peut excéder, renouvellement compris, la durée d’un an pour l’ensemble de la carrière.
« En cas de dégradation soudaine de l’état de santé de la personne aidée, de situation de crise nécessitant une action urgente du proche aidant ou de cessation brutale de l’hébergement en établissement dont bénéficiait la personne aidée, le congé débute ou peut être renouvelé sans délai.
« Le salarié peut mettre fin de façon anticipée au congé ou y renoncer dans les cas suivants :
« 1° Décès de la personne aidée ;
« 2° Admission dans un établissement de la personne aidée ;
« 3° Diminution importante des ressources du salarié ;
« 4° Recours à un service d’aide à domicile pour assister la personne aidée ;
« 5° Congé de proche aidant pris par un autre membre de la famille.
« Art. L. 3142-19. – Le salarié peut, avec l’accord de son employeur, transformer ce congé en période d’activité à temps partiel ou le fractionner. Dans cette hypothèse, le salarié doit avertir son employeur au moins quarante-huit heures avant la date à laquelle il entend prendre chaque période de congé. Cette transformation ou ce fractionnement est accordé sans délai dans les cas mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 3142-18.
« Art. L. 3142-20. – La durée de ce congé ne peut être imputée sur celle du congé payé annuel. Elle est prise en compte pour la détermination des avantages liés à l’ancienneté. Le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages qu’il avait acquis avant le début du congé.
« Art. L. 3142-21. – À l’issue du congé ou de la période d’activité à temps partiel mentionnée à l’article L. 3142-19, le salarié retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
« Art. L. 3142-22. – Avant et après son congé, le salarié a droit à l’entretien professionnel mentionné au I de l’article L. 6315-1.
« Art. L. 3142-23. – Un décret détermine les conditions d’application du présent paragraphe, notamment les critères d’appréciation de la particulière gravité du handicap ou de la perte d’autonomie de la personne aidée.
« Art. L. 3142-24. – En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-25. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-15, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée maximale du congé ;
« 2° Le nombre de renouvellements possibles ;
« 3° (Supprimé)
« 4° Les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise du congé et son renouvellement ainsi que la durée du préavis en cas de retour du salarié avant la fin du congé ;
« 5° Les délais de demande du salarié et de réponse de l’employeur sur le fractionnement du congé ou sa transformation en période d’activité à temps partiel.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-26. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-25, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° La durée maximale du congé est de trois mois, renouvelable dans la limite mentionnée à l’article L. 3142-18 ;
« 2° (Supprimé)
« 3° Les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise du congé et son renouvellement, la durée du préavis en cas de retour du salarié avant le terme prévu du congé, ainsi que les délais de demande du salarié et de réponse de l’employeur sur le fractionnement du congé ou sa transformation en période d’activité à temps partiel sont fixés par décret.
« Sous-section 4
« Congé sabbatique
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-26-1. – Le salarié a droit à un congé sabbatique pendant lequel son contrat de travail est suspendu.
« Le droit à ce congé est ouvert au salarié justifiant, à la date de départ en congé, d’une ancienneté minimale dans l’entreprise, cumulée, le cas échéant, sur plusieurs périodes non consécutives, ainsi que de six années d’activité professionnelle et n’ayant pas bénéficié depuis une durée minimale, dans la même entreprise, d’un congé sabbatique, d’un congé pour création d’entreprise ou d’un congé individuel de formation d’une durée d’au moins six mois. L’ancienneté acquise dans toute autre entreprise du même groupe, au sens de l’article L. 2331-1, est prise en compte au titre de l’ancienneté dans l’entreprise.
« Art. L. 3142-26-2. – L’employeur peut différer le départ en congé dans la limite de six mois à compter de la demande, en fonction de la proportion de salariés absents dans l’entreprise au titre du congé ou en fonction du nombre de jours d’absence prévus au titre du même congé. Dans les entreprises de moins de trois cents salariés, cette limite est portée à neuf mois.
« L’employeur peut également différer ce congé sur le fondement de l’article L. 3142-104 et, pour les entreprises de moins de trois cents salariés, le refuser sur le fondement du 1° de l’article L. 3142-103 selon les modalités prévues aux deux derniers alinéas du même article L. 3142-103.
« Art. L. 3142-26-3. – L’employeur informe le salarié soit de son accord sur la date de départ choisie par l’intéressé, soit du report de cette date, soit de son refus.
« Art. L. 3142-26-4. – À l’issue du congé, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente et bénéficie de l’entretien professionnel mentionné au I de l’article L. 6315-1.
« Il ne peut invoquer aucun droit à être réemployé avant l’expiration du congé.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-26-5. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-26-1, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° Les durées minimale et maximale du congé et le nombre de renouvellements ;
« 2° La condition d’ancienneté requise dans l’entreprise pour ouvrir droit à ce congé ;
« 3° La durée minimale dans l’entreprise durant laquelle le salarié ne doit pas avoir bénéficié des dispositifs mentionnés au second alinéa de l’article L. 3142-26-1 ;
« 4° Les plafonds mentionnés aux articles L. 3142-26-2, L. 3142-104 et L. 3142-105 ;
« 5° Les conditions et délais d’information de l’employeur par le salarié de sa demande de congé ainsi que de la date de son départ et de la durée envisagée de ce congé.
« Art. L. 3142-26-6. – Cette convention ou cet accord détermine également les modalités de report des congés payés dus au salarié qui bénéficie du congé.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Sous-paragraphe 1
« Règles générales de prise du congé
« Art. L. 3142-26-7. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-26-5, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° La durée minimale du congé est de six mois et sa durée maximale est de onze mois ;
« 2° Le droit à ce congé est ouvert au salarié justifiant, à la date de départ en congé, d’une ancienneté dans l’entreprise d’au moins trente-six mois, consécutifs ou non, et n’ayant pas bénéficié dans l’entreprise, au cours des six années précédentes, des dispositifs mentionnés au second alinéa de l’article L. 3142-26-1 ;
« 3° Les conditions et délais mentionnés au 5° de l’article L. 3142-26-5 sont fixées par décret ;
« 4° Les plafonds mentionnés à l’article L. 3142-26-2 sont fixés par décret.
« Sous-paragraphe 2
« Report de congés payés
« Art. L. 3142-26-8. – À défaut de stipulations dans la convention ou l’accord mentionné à l’article L. 3142-26-5, les articles L. 3142-110 à L. 3142-114 s’appliquent. » ;
2° La section 2 est ainsi modifiée :
a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Congés pour engagement associatif, politique ou militant » ;
b) Les sous-sections 1 à 7 sont ainsi rédigées :
« Sous-section 1
« Congé mutualiste de formation
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-27. – Tout administrateur d’une mutuelle, d’une union ou d’une fédération, au sens de l’article L. 114-16 du code de la mutualité, a droit, chaque année, à un congé de formation.
« Art. L. 3142-28. – La durée du congé ne peut être imputée sur la durée du congé payé annuel. Elle est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés ainsi que pour l’ensemble des autres droits résultant pour l’intéressé de son contrat de travail.
« Art. L. 3142-29. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente sous-section, notamment :
« 1° Les conditions dans lesquelles l’employeur peut différer le congé en raison des nécessités propres de l’entreprise ou de son exploitation ;
« 2° Les conditions dans lesquelles est établie la liste des stages ouvrant droit au congé mutualiste de formation et des organismes susceptibles de dispenser ces stages ;
« 3° Les conditions dans lesquelles le congé est attribué aux agents des services publics et des entreprises publiques ;
« 4° Les conditions dans lesquelles le congé est attribué au salarié bénéficiant d’un régime de congé plus avantageux que celui qui résulte du chapitre Ier.
« Art. L. 3142-30. – En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-31. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-27, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée totale maximale du congé ;
« 2° Le délai dans lequel le salarié informe l’employeur de sa demande de congé ;
« 3° Les règles selon lesquelles est déterminé, par établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier de ce congé au cours d’une année.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-32. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-31, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° Le nombre maximal de jours pouvant être pris au titre du congé est de neuf jours ouvrables par an ;
« 2° Le délai dans lequel le salarié informe l’employeur de sa demande de congé est fixé par décret ;
« 3° Les règles selon lesquelles est déterminé, par établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier de ce congé au cours d’une année sont définies par décret en Conseil d’État.
« Sous-section 2
« Congé de participation aux instances d’emploi et de formation professionnelle ou à un jury d’examen
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-33. – Lorsqu’un salarié est désigné pour siéger dans une commission, un conseil ou un comité administratif ou paritaire appelé à traiter des problèmes d’emploi et de formation, l’employeur lui accorde le temps nécessaire pour participer aux réunions de ces instances.
« La liste de ces instances est fixée par arrêté interministériel.
« Lorsqu’un salarié est désigné pour participer à un jury d’examen ou de validation des acquis de l’expérience, l’employeur lui accorde une autorisation d’absence pour participer à ce jury.
« Art. L. 3142-34. – La participation du salarié aux réunions et jurys mentionnés à l’article L. 3142-33 n’entraîne aucune réduction de la rémunération.
« La durée des congés correspondants ne peut être imputée sur celle du congé payé annuel.
« Art. L. 3142-35. – Un décret détermine les conditions dans lesquelles les dépenses afférentes au maintien du salaire et au remboursement des frais de déplacement sont supportées par les instances et jurys mentionnés à l’article L. 3142-33 ou par l’entreprise.
« Dans ce dernier cas, le salaire ainsi que les cotisations sociales obligatoires et, s’il y a lieu, la taxe sur les salaires qui s’y rattachent sont pris en compte au titre de la participation des employeurs au financement de la formation professionnelle prévue à l’article L. 6331-1.
« Art. L. 1342-36. – Le bénéfice du congé peut être refusé par l’employeur s’il estime que cette absence est susceptible d’avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.
« Le refus de l’employeur intervient après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent. Il est motivé.
« En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-37. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-33, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine les délais dans lesquels le salarié adresse sa demande de congé.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-38. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-37, un décret fixe les délais dans lesquels le salarié adresse sa demande de congé.
« Sous-section 3
« Congé pour catastrophe naturelle
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-39. – Le salarié résidant ou habituellement employé dans une zone touchée par une catastrophe naturelle a droit à un congé, pris en une ou plusieurs fois, pour participer aux activités d’organismes apportant une aide aux victimes de catastrophes naturelles.
« Art. L. 3142-40. – En cas d’urgence, le congé peut être pris sous préavis de vingt-quatre heures.
« Art. L. 3142-41. – La durée du congé ne peut être imputée sur la durée du congé payé annuel.
« Art. L. 3142-42. – Le bénéfice du congé peut être refusé par l’employeur s’il estime que cette absence est susceptible d’avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.
« Le refus de l’employeur intervient après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent. Il est motivé.
« En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-43. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-39, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée totale maximale du congé ;
« 2° Les délais dans lesquels le salarié adresse sa demande de congé.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-44. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-43 :
« 1° La durée maximale du congé est de vingt jours par an ;
« 2° Les délais dans lesquels le salarié adresse sa demande de congé sont fixés par décret.
« Sous-section 4
« Congés de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-45. – Le salarié âgé de moins de vingt-cinq ans souhaitant participer aux activités des organisations de jeunesse et d’éducation populaire et des fédérations et associations sportives agréées par l’autorité administrative destinées à favoriser la préparation et la formation ou le perfectionnement de cadres et animateurs a droit, chaque année, à un congé de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse pouvant être pris en une ou deux fois à la demande du bénéficiaire.
« Art. L. 3142-46. – La durée du congé ne peut être imputée sur la durée du congé payé annuel et est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés ainsi que pour l’ensemble des autres droits résultant pour l’intéressé de son contrat de travail.
« Art. L. 3142-47. – Un décret en Conseil d’État détermine, pour l’application de la présente sous-section :
« 1° Les conditions dans lesquelles l’employeur peut différer le congé en raison des nécessités propres de l’entreprise ou de son exploitation ;
« 2° Les conditions dans lesquelles les salariés âgés de plus de vingt-cinq ans peuvent être exceptionnellement admis à bénéficier du congé ;
« 3° Les conditions dans lesquelles le congé est attribué aux agents des services publics et des entreprises publiques ;
« 4° Les conditions dans lesquelles le congé est attribué au salarié bénéficiant d’un régime de congés payés plus avantageux que celui qui résulte du chapitre Ier.
« Art. L. 3142-48. – En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-49. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-45, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée totale maximale du congé et les conditions de son cumul avec le congé de formation économique, sociale et syndicale prévu aux articles L. 2145-5 à L. 2145-13 ;
« 2° Le délai dans lequel le salarié adresse sa demande de congé à l’employeur ;
« 3° Les règles selon lesquelles est déterminé, par établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier de ce congé au cours d’une année.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-50. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-49, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° Le nombre maximal total de jours pouvant être pris au titre du congé est de six jours ouvrables par an ;
« 2° Le congé ne peut se cumuler avec le congé de formation économique, sociale et syndicale qu’à concurrence de douze jours ouvrables pour une même année ;
« 3° Le délai dans lequel le salarié adresse sa demande de congé à l’employeur est fixé par décret ;
« 4° Les règles selon lesquelles est déterminé, par établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier de ce congé sont fixées par un décret en Conseil d’État.
« Sous-section 5
« Congé de représentation
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-51. – Lorsqu’un salarié est désigné représentant d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou inscrite au registre des associations en application du code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ou d’une mutuelle au sens du code de la mutualité pour siéger dans une instance, consultative ou non, instituée par une disposition législative ou réglementaire auprès d’une autorité de l’État ou d’une collectivité territoriale, l’employeur lui accorde le temps nécessaire pour participer aux réunions de cette instance.
« Art. L. 3142-52. – Le salarié bénéficiant du congé de représentation qui subit, à cette occasion, une diminution de rémunération reçoit de l’État ou de la collectivité territoriale une indemnité compensant, en totalité ou partiellement, le cas échéant sous forme forfaitaire, la diminution de sa rémunération.
« L’employeur peut décider de maintenir cette rémunération en totalité ou en partie, au-delà de l’indemnité compensatrice. Dans ce cas, les sommes versées peuvent faire l’objet d’une déduction fiscale, dans les conditions fixées à l’article 238 bis du code général des impôts.
« Art. L. 3142-53. – Le congé de représentation peut être fractionné en demi-journées.
« Sa durée ne peut être imputée sur la durée du congé payé annuel et est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés ainsi que pour l’ensemble des autres droits résultant pour l’intéressé de son contrat de travail.
« Art. L. 3142-54. – Le bénéfice du congé peut être refusé par l’employeur s’il estime que cette absence est susceptible d’avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.
« Le refus de l’employeur intervient après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent. Il est motivé.
« En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil des prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 3142-55. – Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application de la présente sous-section, notamment les conditions d’indemnisation du salarié par l’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-56. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-51, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée totale maximale du congé ;
« 2° Le délai dans lequel le salarié adresse sa demande de congé à l’employeur ;
« 3° Le nombre maximal par établissement de salariés susceptibles de bénéficier du congé au cours d’une année.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-57. – À défaut de conventions ou d’accord conclu en application de l’article L. 3142-56, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° La durée totale maximale du congé est de neuf jours ouvrables par an ;
« 2° Le délai dans lequel le salarié adresse sa demande de congé à l’employeur et les règles selon lesquelles est déterminé, par établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier du congé au cours d’une année sont fixés par décret.
« Sous-section 6
« Congé de solidarité internationale
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-58. – Le salarié participant à une mission hors de France pour le compte d’une association à objet humanitaire régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ou inscrite au registre des associations en application du code civil local applicable aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, ou pour le compte d’une organisation internationale dont la France est membre, a droit à un congé de solidarité internationale.
« La liste des associations et organisations mentionnées au premier alinéa est fixée par l’autorité administrative.
« Art. L. 3142-59. – La durée du congé ne peut être imputée sur la durée du congé payé annuel et est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des avantages légaux et conventionnels liés à l’ancienneté.
« Art. L. 3142-60. – Le bénéfice du congé peut être refusé par l’employeur s’il estime que cette absence est susceptible d’avoir des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise.
« Le refus de l’employeur intervient après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent. Il est motivé.
« En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil des prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« À défaut de réponse de l’employeur dans un délai fixé par décret, son accord est réputé acquis.
« Art. L. 3142-61. – En cas d’urgence, l’employeur n’est pas tenu de motiver son refus et son silence ne vaut pas accord.
« Art. L. 3142-62. – À l’issue du congé de solidarité internationale ou à la suite de son interruption pour cas de force majeure, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
« Art. L. 3142-63. – À l’issue du congé, le salarié remet à l’employeur une attestation constatant l’accomplissement de la mission, délivrée par l’association ou l’organisation concernée.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-64. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-58, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée maximale du congé ;
« 2° L’ancienneté requise pour bénéficier de ce congé ;
« 3° En fonction de l’effectif de l’établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier simultanément du congé de solidarité internationale ;
« 4° Les délais dans lesquels le salarié adresse sa demande de congé à son employeur ;
« 5° Les mesures permettant le maintien d’un lien entre l’entreprise et le salarié pendant la durée du congé et, le cas échéant, les modalités d’accompagnement du salarié à son retour.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-65. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-64, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° La durée maximale du congé est de six mois. Elle est de six semaines en cas d’urgence ;
« 2° L’ancienneté requise dans l’entreprise pour ouvrir droit au congé est de douze mois, consécutifs ou non ;
« 3° Les règles selon lesquelles est déterminée, en fonction de l’effectif de l’établissement, le nombre maximal de salariés susceptibles de bénéficier simultanément du congé et les délais mentionnés au 4° de l’article L. 3142-64 dans lesquels le salarié adresse sa demande de congé à son employeur sont fixés par décret.
« Sous-section 7
« Congé pour acquisition de la nationalité
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-66. – Le salarié a le droit de bénéficier, sur justification, d’un congé pour assister à sa cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française.
« La durée de ce congé ne peut être imputée sur celle du congé payé annuel.
« Art. L. 3142-67. – En cas de différend, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le salarié devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-68. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-66, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche déterminent la durée de ce congé.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3142-69. – À défaut de convention ou d’accord mentionné à l’article L. 3142-68, la durée du congé est d’une demi-journée. » ;
c) Les articles L. 3142-56 à L. 3142-64 deviennent les articles L. 3142-70 à L. 3142-78 et l’article L. 3142-64-1 devient l’article L. 3142-79 ;
d) La sous-section 9 est ainsi modifiée :
– au paragraphe 1, les articles L. 3142-65 à L. 3142-70 deviennent les articles L. 3142-80 à L. 3142-85 ;
– au paragraphe 2, les articles L. 3142-71 à L. 3142-77 deviennent les articles L. 3142-86 à L. 3142-92 ;
e) La sous-section 10 est abrogée ;
f) La sous-section 11 devient la sous-section 10 et est ainsi modifiée :
– l’article L. 3142-108 devient l’article L. 3142-93 ;
– l’article L. 3142-112 devient l’article L. 3142-94 ;
– l’article L. 3142-115 devient l’article L. 3142-95 ;
g) La sous-section 12 est abrogée.
II. – Le même chapitre II est complété par une section 3 ainsi rédigée :
« Section 3
« Congé et période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d’entreprise
« Sous-section 1
« Congé et période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d’entreprise (Division et intitulé supprimés)
« Paragraphe 1
« Ordre public
« Art. L. 3142-96. – Le salarié qui crée ou reprend une entreprise a droit, sous réserve d’une condition d’ancienneté dans l’entreprise et dans les conditions fixées à la présente sous-section :
« 1° Soit à un congé ;
« 2° Soit à une période de travail à temps partiel.
« L’ancienneté acquise dans toute autre entreprise du même groupe, au sens de l’article L. 2331-1, est prise en compte au titre de l’ancienneté dans l’entreprise.
« Art. L. 3142-97. – L’article L. 3142-96 s’applique également au salarié qui exerce des responsabilités de direction au sein d’une entreprise répondant, au moment où il sollicite son congé, aux critères de jeune entreprise innovante définie à l’article 44 sexies-0 A du code général des impôts.
« Art. L. 3142-98. – L’employeur peut différer le départ en congé ou le début de la période de travail à temps partiel dans la limite de six mois à compter de la demande du salarié, sans préjudice de l’application des articles L. 3142-103 et L. 3142-104.
« Art. L. 3142-99. – À l’issue du congé, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente.
« Art. L. 3142-99-1. – À l’issue du congé ou de la période de travail à temps partiel, si le salarié souhaite mettre fin à la relation de travail, les conditions de la rupture sont celles prévues par son contrat de travail, à l’exception de celles relatives au préavis. Le salarié est, de ce fait, dispensé de payer une indemnité de rupture.
« Le salarié ne peut invoquer aucun droit à être réemployé avant l’expiration du congé.
« Art. L. 3142-100. – Le salarié qui reprend son activité dans l’entreprise à l’issue de son congé bénéficie en tant que de besoin d’une réadaptation professionnelle, notamment en cas de changement de techniques ou de méthodes de travail. Il n’est pas comptabilisé dans le plafond de salariés pouvant bénéficier simultanément d’un congé individuel de formation prévu à l’article L. 6322-7.
« Art. L. 3142-101. – Lorsqu’il est envisagé une période de travail à temps partiel, un avenant au contrat de travail fixe la durée de cette période conformément à l’article L. 3123-6.
« Toute prolongation de la période de travail à temps partiel à la demande du salarié donne lieu à la signature d’un nouvel avenant dans les mêmes conditions.
« Art. L. 3142-102. – Le salarié dont un avenant au contrat de travail prévoit le passage à temps partiel ne peut invoquer aucun droit à être réemployé à temps plein avant le terme de cet avenant.
« À l’issue de la période de travail à temps partiel, le salarié retrouve une activité à temps plein assortie d’une rémunération au moins équivalente à celle qui lui était précédemment servie.
« Art. L. 3142-103. – Dans les entreprises de moins de trois cents salariés, l’employeur peut refuser le congé ou le passage à temps partiel :
« 1° S’il estime, après avis du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s’ils existent, que ce congé ou cette activité à temps partiel aura des conséquences préjudiciables à la bonne marche de l’entreprise ;
« 2° Si le salarié demande ce congé ou cette période d’activité à temps partiel moins de trois ans après une précédente création ou reprise d’entreprise ou après le début de l’exercice de précédentes responsabilités de direction au sein d’une entreprise répondant aux critères de jeune entreprise innovante.
« L’employeur précise le motif de son refus et le porte à la connaissance du salarié.
« Ce refus peut être contesté par le salarié directement devant le conseil de prud’hommes, statuant en la forme des référés, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 3142-104. – L’employeur peut différer le départ en congé du salarié lorsque ce départ aurait pour effet de porter l’effectif de salariés simultanément absents ou le nombre de jours d’absence au titre de ce congé et au titre du congé sabbatique à un niveau excessif au regard, respectivement, de l’effectif total et du nombre de jours travaillés dans l’entreprise.
« Art. L. 3142-105. – Dans les entreprises d’au moins trois cents salariés, l’employeur peut différer le début de la période de travail à temps partiel lorsque celle-ci aurait pour effet de porter l’effectif de salariés employés simultanément à temps partiel au titre de la présente sous-section à un niveau excessif au regard de l’effectif total de l’entreprise.
« Art. L. 3142-106. – L’employeur informe le salarié de sa décision relative à la date de départ choisie par ce dernier.
« À défaut de réponse de la part de l’employeur dans un délai fixé par décret, son accord est réputé acquis.
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3142-107. – Pour mettre en œuvre le droit à congé du salarié mentionné à l’article L. 3142-96, une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche détermine :
« 1° La durée maximale du congé ou de la période de travail à temps partiel ;
« 2° Le nombre de renouvellements possibles de ce congé ou de cette période ;
« 3° La condition d’ancienneté requise pour avoir droit à ce congé ou à cette période ;
« 4° Les délais d’information de l’employeur par le salarié de la date à laquelle il souhaite partir en congé ou, en cas de passage à temps partiel, de la date de début de la période de travail à temps partiel et de l’amplitude de la réduction souhaitée de son temps de travail, ainsi que de la durée envisagée de ce congé ou de cette période ;
« 5° Les conditions et délais de la demande de prolongation de ce congé ou de cette période de travail à temps partiel ;
« 6° Les conditions dans lesquelles le salarié informe l’employeur de son intention de poursuivre ou de rompre son contrat de travail à l’issue de son congé ou de sa période de travail à temps partiel ;
« 7° Les plafonds ou niveaux mentionnés à l’article L. 3142-104 et, pour les entreprises d’au moins trois cents salariés, le niveau mentionné à l’article L. 3142-105 ;
« 8° Les conditions permettant le maintien d’un lien entre l’entreprise et le salarié pendant la durée du congé et, le cas échéant, les modalités d’accompagnement et de réadaptation professionnelle à son retour.
« Art. L. 3142-108. – Cette convention ou cet accord détermine également les modalités de report des congés payés dus au salarié qui bénéficie du congé.
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives
« Sous-paragraphe 1
« Règles générales de prise du congé et de passage à temps partiel
« Art. L. 3142-109. – À défaut de convention ou d’accord mentionnés à l’article L. 3142-107, les dispositions suivantes sont applicables :
« 1° La durée maximale du congé ou de la période de travail à temps partiel est d’un an. Elle peut être prolongée au plus d’un an ;
« 2° L’ancienneté requise pour ouvrir droit au congé ou à la période de travail à temps partiel est de vingt-quatre mois, consécutifs ou non, dans l’entreprise ;
« 3° Les conditions et délais d’information mentionnés aux 4° à 6° de l’article L. 3142-107 sont fixés par décret ;
« 4° Le niveau de salariés absents au titre du congé dans l’entreprise ou de jours d’absence prévus au titre de ce congé au titre duquel l’employeur peut différer le départ en congé ou le début de la période de travail à temps partiel sont fixés par décret.
« Sous-paragraphe 2
« Report de congés payés
« Art. L. 3142-110. – À défaut de stipulations dans la convention ou l’accord mentionnés à l’article L. 3142-107, les congés payés annuels dus au salarié en plus de vingt-quatre jours ouvrables peuvent être reportés, à sa demande, jusqu’au départ en congé, dans les conditions prévues au présent sous-paragraphe.
« Le cumul de ces congés payés porte au maximum sur six années.
« Art. L. 3142-111. – Une indemnité compensatrice est perçue par le salarié lors de son départ pour l’ensemble des congés payés dont il n’a pas bénéficié.
« Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque l’employeur est tenu d’adhérer à une caisse de congés payés mentionnée à l’article L. 3141-32.
« Art. L. 3142-112. – En cas de renonciation au congé, les congés payés du salarié reportés en application de l’article L. 3142-110 sont ajoutés aux congés payés annuels.
« Ces congés payés reportés sont ajoutés chaque année aux congés payés annuels, par fraction de six jours et jusqu’à épuisement, à compter de la renonciation.
« Jusqu’à épuisement des congés payés reportés, tout report au titre de l’article L. 3142-110 est exclu.
« Art. L. 3142-113. – En cas de rupture du contrat de travail, le salarié perçoit une indemnité compensatrice pour les droits à congés payés reportés.
« Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque l’employeur est tenu d’adhérer à une caisse de congés payés mentionnée à l’article L. 3141-32.
« Art. L. 3142-114. – Les indemnités compensatrices prévues au présent sous-paragraphe sont calculées conformément aux articles L. 3141-24 à L. 3141-27.
« Sous-section 2
« Congé sabbatique (Division et intitulé supprimés)
« Paragraphe 1
« Ordre public (Division et intitulé supprimés)
« Art. L. 3142-115 à L. 3142-118. – (Supprimés)
« Paragraphe 2
« Champ de la négociation collective (Division et intitulé supprimés)
« Art. L. 3142-119 et L. 3142-120. – (Supprimés)
« Paragraphe 3
« Dispositions supplétives (Division et intitulé supprimés)
« Sous-paragraphe 1
« Règles générales de prise du congé (Division et intitulé supprimés)
« Art. L. 3142-121. – (Supprimé)
« Sous-paragraphe 2
« Report de congés payés (Division et intitulé supprimés)
« Art. L. 3142-122. – (Supprimé) »
III. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa de l’article L. 1222-5, la référence : « à l’article L. 3142-82 » est remplacée par les références : « aux articles L. 3142-101, L. 3142-107 et L. 3142-109 » ;
2° Au dernier alinéa de l’article L. 6313-1, la référence : « à l’article L. 3142-3-1 » est remplacée par la référence : « au dernier alinéa de l’article L. 3142-33 » ;
3° Au second alinéa du I de l’article L. 6315-1, les mots : « congé de soutien familial » sont remplacés par les mots : « congé de proche aidant » ;
4° Au 5° de l’article L. 7211-3 et au 4° de l’article L. 7221-2, les références : « par les articles L. 3142-1 et suivants » sont remplacées par la référence : « à la section 1 du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie ».
IV. – (Supprimé)
V. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au 1° de l’article L. 168-1, les références : « L. 3142-16 à L. 3142-21 » sont remplacées par les références : « L. 3142-6 à L. 3142-14 » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 161-9-3, la référence : « L. 3142-16 » est remplacée par la référence : « L. 3142-6 » ;
3° À la première phrase de l’article L. 241-3-2, les mots : « visé à l’article L. 3142-16 » sont remplacés par les mots : « prévu au chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie », les mots : « mentionné à l’article L. 3142-22 » sont remplacés par les mots : « mentionné à l’article L. 3142-6 » et la référence : « L. 3141-22 » est remplacée par la référence : « L. 3142-15 » ;
4° L’article L. 412-8 est ainsi modifié :
a) Au 7°, les références : « L. 3142-3 à L. 3142-6 » sont remplacées par les références : « L. 3142-33 à L. 3142-38 » ;
b) Au 9°, les références : « L. 3142-7 à L. 3142-11 et R. 3142-1 » sont remplacées par les références : « et L. 2145-5 à L. 2145-9 » ;
c) Au 12°, les références : « L. 3142-55 et R. 3142-29 » sont remplacées par la référence : « L. 3142-57 ».
VI. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L’article L. 2123-9 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les références : « L. 3142-60 à L. 3142-64 » sont remplacées par les références : « L. 3142-74 à L. 3142-78 » ;
b) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 3142-61 » est remplacée par la référence : « L. 3142-75 » ;
c) À l’avant-dernier alinéa, la référence : « L. 3142-62 » est remplacée par la référence : « L. 3142-76 » ;
2° L’article L. 3123-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les références : « L. 3142-60 à L. 3142-64 » sont remplacées par les références : « L. 3142-74 à L. 3142-78 » ;
b) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 3142-61 » est remplacée par la référence : « L. 3142-75 » ;
c) À l’avant-dernier alinéa, la référence : « L. 3142-62 » est remplacée par la référence : « L. 3142-76 » ;
3° L’article L. 4135-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les références : « L. 3142-60 à L. 3142-64 » sont remplacées par les références : « L. 3142-74 à L. 3142-78 » ;
b) Au deuxième alinéa, la référence : « L. 3142-61 » est remplacée par la référence : « L. 3142-75 » ;
c) À l’avant-dernier alinéa, la référence : « L. 3142-62 » est remplacée par la référence : « L. 3142-76 » ;
4° Aux articles L. 7125-7 et L. 7227-7, les références : « L. 3142-60 à L. 3142-64 » sont remplacées par les références : « L. 3142-74 à L. 3142-78 ».
VII. – À la fin du cinquième alinéa de l’article L. 114-24 du code de la mutualité, les références : « L. 3142-60 à L. 3142-63 » sont remplacées par les références : « L. 3142-74 à L. 3142-77 ».
VIII. – À l’article L. 423-14 du code de l’action sociale et des familles, les références : « des articles L. 3142-68 à L. 3142-97 » sont remplacées par les mots : « du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie ».
IX. – Le code des transports est ainsi modifié :
1° À l’article L. 5544-25, les références : « des articles L. 3142-78 à L. 3142-98 et L. 3142-100 à L. 3142-107 » sont remplacées par la référence : « du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie » et le mot : « relatifs » est remplacé par le mot : « relatives » ;
1° bis La section 3 du chapitre IV du titre IV du livre V de la cinquième partie est complétée par un article L. 5544-25-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5544-25-1. – En cas de différend entre un marin et son employeur relatif aux congés mentionnés au chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie du code du travail, le refus de l’employeur peut être directement contesté par le marin devant le tribunal d’instance. » ;
2° À l’article L. 6525-5, les références : « L. 3142-78 à L. 3142-99 » sont remplacées par la référence : « du chapitre II du titre IV du livre Ier de la troisième partie ».
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. L’article 3 prévoit une régression grave pour les salariés en matière de congés. Le Gouvernement et la droite sénatoriale sont d’accord pour permettre à l’avenir à l’employeur d’imposer à un salarié le changement de la date de ses congés au dernier moment.
Aujourd’hui, la loi prévoit que l’employeur doit prendre en compte la situation familiale des salariés pour définir les dates des congés payés. Un mois avant le départ du salarié, l’employeur n’a plus le droit de modifier l’ordre et les dates de départ.
Demain, la prise en compte de la situation de famille et le délai d’un mois avant le départ en deçà duquel l’employeur ne peut modifier l’ordre et les dates de départ ne seront plus que des dispositions supplétives. Désormais, les dates de congés payés pourront être remises en cause par voie d’accord d’entreprise ou de branche, sans prise en compte de la situation des salariés.
Concrètement, un salarié ayant posé ses congés estivaux au 1er juillet pourra voir ses vacances annulées si l’accord d’entreprise prévoit un délai de modification de quinze jours par exemple. Il s’agit là d’un véritable recul social pour les droits des salariés et d’une remise en cause du droit à bénéficier de congés et à profiter de sa vie de famille.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous sommes opposés à l’article 3, qui inscrit l’inversion de la hiérarchie des normes en matière de congés et de délais de prévenance.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’allongement de la durée du congé exceptionnel auquel a droit un salarié en cas de décès d’un enfant est très certainement la seule avancée de cet article, le Gouvernement ayant reculé sur cette question. En effet, le texte initial ne modifiait pas les conditions actuelles et prévoyait un congé exceptionnel de deux jours, soit autant que pour un déménagement, si vous me pardonnez cette comparaison.
Cette mesure marque, il faut le saluer, une grande avancée pour l’ensemble des salariés qui vivent ce type de deuil particulièrement lourd, d’autant plus que les possibilités de recours sont très limitées et que l’inversion de la hiérarchie des normes organisée par le texte pouvait laisser craindre le pire.
Je rappelle en effet qu’un salarié, à condition d’être en état de le faire compte tenu du deuil qui le frappe, peut saisir le conseil des prud’hommes en référé, lequel statue ensuite dans un délai allant de deux mois à six mois.
L’allongement du délai du congé exceptionnel prévu à l’article 3 permettra, nous l’espérons, de répondre à un double objectif.
Tout d’abord, il doit permettre aux parents concernés de commencer à faire leur deuil et d’organiser les funérailles.
Ensuite, il constituera une sécurisation des salariés concernés. Ces derniers sont bien souvent en effet dans l’obligation soit de reprendre leur poste, au mépris parfois de leur sécurité et alors qu’ils préféreraient être auprès de leurs proches, soit de se priver d’une part non négligeable de leur salaire dans un moment pourtant compliqué et difficile.
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. L’article 3 inverse la hiérarchie des normes dans le domaine des congés hors congés payés. Chers collègues, vous donnez ainsi la priorité à la négociation collective au niveau de l’entreprise, laquelle primera sur la négociation de branche. Par ailleurs, vous permettez aux entreprises de créer leurs propres règles et instaurez, pour vous donner bonne conscience, des planchers au-delà desquels les négociateurs ne pourront pas aller.
Laisser les entreprises créer leurs propres règles témoigne tout d’abord d’une réelle méconnaissance de la négociation syndicale, particulièrement en entreprise. En effet, les négociations requièrent de la technicité et de solides connaissances en droit du travail, qu’il n’est pas simple d’acquérir lorsque l’on ne dispose que de quelques heures de délégation par semaine.
Or, quand on est informaticien, ouvrier de maintenance, hôtesse de caisse ou responsable marketing, il est indispensable d’acquérir de telles connaissances. Les délégués syndicaux au niveau de l’entreprise sont ainsi plus fragilisés dans les négociations, leurs interlocuteurs étant souvent des directeurs des ressources humaines, qui, eux, du fait de leur formation et de leur métier, maîtrisent le droit du travail.
Surtout, le chantage à l’emploi, si présent lors des négociations, est encore plus fort à l’échelon de l’entreprise : ce sont les collègues et les territoires où l’on vit qui sont l’objet du chantage, si bien que les délégués syndicaux locaux arrivent souvent à la table des négociations en se sentant pieds et poings liés.
Ces dispositions traduisent ensuite une méconnaissance de la réalité des petites et moyennes entreprises : seuls 15 % des entreprises de moins de quinze salariés disposent d’une représentation syndicale. De ce fait, comment prévoir que des dispositions aussi importantes que le nombre de jours de congé en cas de décès d’un proche puissent varier d’une entreprise à l’autre, particulièrement entre les grandes et les petites entreprises ?
Votre proposition revient à créer un code de la route différent dans chaque commune en pensant que cela permettra de simplifier les règles de circulation et de réduire le nombre d’accidents ! Tout cela paraît bien improbable et donc irréaliste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a approuvé la philosophie générale du texte, c'est-à-dire la primauté des accords d’entreprise et de branche dans un certain nombre de domaines, notamment celui-ci.
J’ajoute que, en matière supplétive, les règles qui sont inscrites sont à droit constant. À défaut d’accord, il n’y aura donc pas de régression pour les salariés.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Encore une fois, comme Mme la ministre l’a déjà dit un certain nombre de fois, il s’agit non pas d’inverser la hiérarchie des normes, mais simplement de donner une place plus importante à l’accord d’entreprise.
Par ailleurs, les droits des salariés sont préservés, à la fois par les dispositions d’ordre public et par les règles supplétives. À défaut d’accord, nous serons à droit constant. Tel sera le cas pour toutes les dispositions prévues à l’article 3.
Enfin, je rappelle que le texte renforce le rôle de la branche grâce aux commissions paritaires de branche. L’équilibre est donc maintenu.
L’avis du Gouvernement, comme celui de la commission, est donc défavorable.
Mme Laurence Cohen. Dommage !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 42.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 306 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 29 |
Contre | 312 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 570, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 5 à 27
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement de suppression vise à maintenir le droit dans son état actuel.
La version initiale du texte concernant le congé pour événement familial faisait primer l’accord d’entreprise sur la loi, la durée minimale de ce congé ne figurant que dans les dispositions supplétives. Face au tollé suscité par ce projet, qui rendait ce droit hypothétique, le Gouvernement a reculé.
Pour autant, nous ne pouvons nous satisfaire de la nouvelle rédaction du texte, qui fait, elle aussi, primer les accords d’entreprise sur les conventions collectives et les accords de branche. Le risque est toujours le même : faire reculer les protections conventionnelles par la concurrence et la course au moins-disant social.
Pourtant, les dispositions conventionnelles sur les événements familiaux sont, dans de nombreux cas, plus favorables que la loi. À titre d’exemple, les salariés des agences de voyage et de tourisme bénéficient d’un congé de six jours lors du décès d’un enfant, congé que le présent projet de loi réduit à quatre jours. Les salariés des cabinets d’avocats ont un congé de huit jours lorsqu’ils se marient et de deux jours pour le mariage d’un enfant, soit des congés d’une durée deux fois plus longue que ceux qui sont garantis dans le projet de loi.
Notre amendement vise donc à supprimer cette modification du droit, afin de préserver les droits des salariés et le mieux-disant social contenu dans des conventions plus favorables.
M. le président. L'amendement n° 882 rectifié, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le mot :
conjoint
insérer les mots :
, du concubin
II. - Alinéa 24
Après le mot :
conjoint
insérer les mots :
, du concubin
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement tend à reprendre une disposition que notre groupe avait fait adopter le 1er avril 2015 lors de l’examen par la Haute Assemblée de la proposition de loi tendant à allonger les congés exceptionnels accordés aux salariés lors du décès d’un enfant ou d’un conjoint.
Je rappelle également que, en 2006, le Sénat avait adopté une proposition de loi du groupe de l’Union centriste prévoyant d’étendre l’octroi du congé en cas de décès du concubin. Nicolas About, alors président de la commission des affaires sociales, avait expliqué que la situation du salarié qui perd son concubin ne se distingue guère de celle d’un salarié dont le conjoint ou le partenaire de PACS décède.
Le grand nombre de couples qui vivent en union libre rend nécessaire une telle adaptation de nos règles, qui ne représente d’ailleurs pas une grande innovation sur le plan juridique, puisque la législation sociale assimile déjà souvent les concubins à des époux.
Aussi, par cet amendement, nous proposons tout naturellement d’étendre le bénéfice du congé au décès du concubin du salarié.
M. le président. L'amendement n° 301, présenté par Mmes D. Gillot, Campion, Guillemot, Perol-Dumont et Tocqueville, MM. Kaltenbach, Lalande, Godefroy, Daudigny, Masseret, J.C. Leroy, Marie, Vincent et Assouline, Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mme Claireaux, M. Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Jeansannetas et Labazée, Mmes Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant.
II. – Après l’alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° Deux jours pour l’annonce de la survenue d’un handicap chez un enfant.
La parole est à Mme Catherine Génisson.
Mme Catherine Génisson. La Haute Assemblée s’est toujours beaucoup investie sur le sujet du handicap, quelles que soient les sensibilités politiques.
Cet amendement, sur l’initiative de Mmes Dominique Gillot et Claire-Lise Campion, tend à faire en sorte qu’à l’annonce du handicap d’un enfant le salarié puisse disposer d’un congé de deux jours. En effet, l’annonce du handicap d’un enfant est un bouleversement dans la vie familiale, dans la fratrie. Souvent, après une période de déni, une longue adaptation sera nécessaire pour accompagner le handicap de cet enfant.
Bien évidemment, quarante-huit heures ne suffisent pas à déterminer toutes les solutions appropriées à cet accompagnement ; néanmoins, ce congé permet d’intégrer une nouvelle très lourde à supporter, notamment dans l’organisation future de la vie professionnelle.
Il nous semble donc très important que cet amendement soit adopté.
M. le président. L'amendement n° 571, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement vise à protéger les salariés et les entreprises receveuses d’ordres du dumping social qu’entraînerait la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche. Il s’agit de ne pas inverser la hiérarchie des normes en matière de congés pour événements familiaux.
Nous saluons la révision à la hausse des minima de certains congés, l’augmentation des congés en cas de décès d’un enfant, d’un parent, d’un beau parent, d’une sœur ou d’un frère. Ces avancées sont indéniables. Toutefois, cela semble bien insuffisant. Sans entrer dans un calcul indécent pour savoir combien « vaut » la mort d’un proche ou une heureuse nouvelle, les très faibles minima sont problématiques à plus d’un titre.
Il se pose un problème de sécurité, tout d’abord. Comment imaginer qu’un salarié ayant perdu un proche puisse, dans un délai de cinq jours, reprendre en pleine sécurité son emploi ?
La solution que vous proposez revient au final à fixer par la loi des minima particulièrement bas, en laissant les entreprises décider. Le lien de subordination biaisant les négociations et la concurrence entre les entreprises s’accroissant, il y a fort à parier que les accords d’entreprise tireront vers le bas les droits des salariés. De fait, les salariés bénéficieront de leurs jours de congé réglementaires, soit avant de reprendre le travail sans être en pleine capacité, soit en soldant leurs congés payés, voire en prenant des congés non rémunérés.
Un problème de logistique apparaît dans d’autres cas. À l’heure où la mobilité géographique est de plus en plus forte, ne prévoir qu’un jour de congé pour le mariage d’un enfant revient à empêcher nombre de parents d’assister en pleine sérénité au mariage de leur enfant lorsqu’ils ont déménagé. À cet égard, je rappelle que, selon l’INSEE, quelque 3,6 millions de personnes ont déménagé d’une région à une autre entre 2001 et 2006.
Ainsi, donner la primauté à l’accord d’entreprise renforcera encore la faiblesse du dispositif législatif.
M. le président. L'amendement n° 302, présenté par MM. Tourenne, Vaugrenard, M. Bourquin, Lalande et Mazuir, Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret, Génisson et Schillinger, M. Vergoz, Mmes Yonnet, Meunier et Riocreux, MM. Labazée, Jeansannetas, Godefroy et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Remplacer le mot :
Deux
par le mot :
Trois
et, après le mot :
solidarité,
insérer les mots :
du concubin
La parole est à M. Jean-Louis Tourenne.
M. Jean-Louis Tourenne. Cet amendement ne va pas bouleverser l’économie générale du projet de loi. Il vise simplement à humaniser et à harmoniser les différentes autorisations de congés.
Il s’agit d’accorder à ceux qui sont dans la misère et le malheur, à ceux qui souffrent du décès d’un parent, naturel ou par alliance, la possibilité de pourvoir à toutes les démarches et de rassembler les membres de leur famille afin que les obsèques puissent se dérouler dans les meilleures conditions.
Or, trois jours, c’est la période minimale entre le moment du décès et celui des obsèques ; il paraît donc naturel d’accorder cette période à ceux qui sont en deuil.
J’ajoute les concubins, rejoignant en cela M. Requier, car ils ne se distinguent pas, en termes d’affection et d’intérêt, des pacsés ou des mariés.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 572 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 911 rectifié est présenté par MM. Requier, Amiel, Bertrand, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 24
Remplacer le mot :
Deux
par le mot :
Trois
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l'amendement n° 572.
Mme Laurence Cohen. Au sein de la commission à l’Assemblée nationale, plusieurs députés socialistes ont présenté un amendement relevant de deux à cinq jours la durée du congé pour événement familial en cas de décès d’un enfant.
Cette disposition s’inspire pour l’essentiel d’une proposition de loi déposée par la députée Michèle Delaunay, qui a été modifiée par notre Haute Assemblée lors de son adoption, le 1er avril 2015. Cette proposition de loi est d’ailleurs toujours en discussion, me semble-t-il.
Elle tend à allonger les congés exceptionnels accordés aux salariés lors du décès d’un enfant - disposition réintroduite dans le présent projet de loi - ou d’un conjoint - cela avait été modifié en séance publique par un amendement de Gilbert Barbier -, et à étendre le bénéfice de trois jours de congé en cas de disparition du concubin, et pas seulement en cas de décès du conjoint ou du partenaire lié par un PACS.
Un nouvel amendement tendant à allonger de deux à trois jours la durée du congé pour décès du conjoint a malheureusement été rejeté en commission.
Le corollaire à l’augmentation du nombre de jours de congé en cas de décès d’un enfant est l’augmentation des congés pour les proches. Il s’agit d’une mesure humaniste. Comme le rappelait notre collègue Jean-Louis Tourenne, la durée de trois jours correspond à une réalité, puisque c’est la durée qui sépare généralement le décès des obsèques.
Le rapporteur, Jean-Baptiste Lemoyne, craignait, en commission, que le congé ne soit porté dans quelques années à quatre ou à cinq jours, tout en reconnaissant que l’intention est louable. Si tel était le cas dans trois ou quatre ans, mes chers collègues, je pense que, tous ici, nous nous en féliciterions ! Il s’agit d’une mesure de progrès social, mais avant tout, je le répète, d’humanisme.
J’invite donc le Sénat à adopter cet amendement à l’unanimité.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l'amendement n° 911 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. L’amendement a été fort bien défendu par Mme Cohen.
Mes chers collègues, je vous invite bien entendu à l’adopter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L’amendement n° 570 de M. Watrin et des membres du groupe CRC vise à supprimer l’ensemble des dispositions relatives aux congés pour événements familiaux.
Dans cette partie de la réécriture du code du travail, je tiens à souligner que le régime de faveur est maintenu, puisque les dispositions des accords ne pourront qu’être plus favorables que les dispositions existantes, à savoir d’un à quatre jours de congé selon les cas de figure et les configurations.
Autant, sur d’autres dispositions du texte, l’accord peut effectivement atteindre des équilibres différents éventuellement moins-disant, dès lors qu’il existe des contreparties, autant ce n’est pas le cas pour les congés pour événements familiaux. Les craintes peuvent être dissipées. La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 882 rectifié, présenté par M. Mézard et les membres de son groupe, vise à étendre au concubin le bénéfice du congé lors du décès du conjoint. Le concubin est d’ores et déjà visé dans les congés de proches aidants et de solidarité familiale ; il y a donc une logique. La commission appelle donc à l’adoption de cet amendement.
L’amendement n° 301, de Mme Gillot et des membres du groupe socialiste et républicain, vise à attribuer des jours de congé en cas d’annonce d’un handicap chez un enfant. La commission a donné un avis défavorable, non pas tant sur le fond que pour des raisons techniques. Ce congé s’applique-t-il à tous les handicaps ? Comment s’impute-t-il si on l’apprend à la naissance, des jours de congé étant également prévus à cette occasion ?
Toutefois, à titre personnel, et le président Milon partage cette position, je pense que nous pourrions adopter cet amendement dans un bel élan, quitte à parachever sa rédaction juridique en commission mixte paritaire.
L’amendement n° 571 de M. Watrin et des membres du groupe CRC vise à donner la priorité aux accords de branche pour définir les congés spécifiques. Il se situe clairement dans une philosophie totalement divergente de celle du projet de loi. Nous nous en sommes expliqués à plusieurs reprises : l’avis de la commission est défavorable.
L’amendement n° 302, comme les amendements identiques nos 572 et 911 rectifié, vise à étendre la durée du congé en cas de décès du conjoint de deux à trois jours. La commission y est favorable. Notre assemblée avait adopté, le 1er avril 2015, une proposition de loi allant en ce sens, à l’unanimité des présents. Profitons donc de ce véhicule pour concrétiser cette proposition de loi.
La commission a donc émis un avis favorable sur les amendements identiques nos 572 et 911 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. S'agissant des amendements nos 570 et 571 du groupe CRC, le raisonnement est le même que précédemment : nous souhaitons favoriser l’accord d’entreprise, afin que les décisions soient prises au plus près du terrain. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Notre avis est en revanche favorable sur l’amendement n° 301 de Mme Gillot, au regard du motif qui est exposé. Nous saluons la position du rapporteur et nous y associons.
Par ailleurs, nous émettons un avis favorable sur les amendements nos 882 rectifié et 302, ainsi que sur les amendements identiques nos 572 et 911 rectifié. Il s’agit, je le rappelle, d’étendre le bénéfice du congé au cas de décès du concubin et la durée de deux à trois jours pour le décès des proches.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Vous l’avez compris lors des interventions précédentes, Jean Desessard a exprimé les très fortes réserves que nous avons sur le texte, tel qu’il nous est arrivé de l’Assemblée nationale. Il a également dit notre insatisfaction quant à la libéralisation accrue qui est intervenue en commission.
Nous voterons en faveur de l’ensemble des amendements en discussion. Si l’on peut être favorable, dans certaines conditions, à des assouplissements du droit du travail et à des réflexions approfondies sur son évolution, et c’est mon cas à titre personnel, nous ne saurions prendre le risque d’aggraver des situations dramatiques touchant au décès et au handicap. Il ne s’agit pas de confort !
Un vote favorable et unanime de la Haute Assemblée sur ces amendements serait donc bienvenu. Concernant le décès de proches, nos nuances idéologiques pourraient être mises de côté.
Enfin, concernant la tonalité générale du texte, puisque je ne reprendrai pas la parole sur les amendements suivants, si tous les chefs d’entreprise étaient aussi humanistes et sympathiques que M. Cadic, je n’aurais pas franchement d’inquiétude. Cependant, si l’on se réfère à ce qui se passe généralement dans les entreprises, notamment pour les femmes à temps partiel dans les grandes surfaces, j’ai vraiment l’impression que nous ne vivons pas tous dans le même monde. C’est ce qui motivera notre position sur les amendements suivants.
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Je souhaite formuler une remarque d’ordre légistique, monsieur le président.
Afin que les dispositions des amendements nos 302 et 882 rectifié puissent s’articuler au mieux, monsieur Requier, il conviendrait de ne conserver que le I de votre amendement, le II étant satisfait par l'amendement n° 302.
M. le président. Monsieur Requier, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. le rapporteur ?
M. Jean-Claude Requier. M. Mézard étant dans les cimes du Cantal ou dans le creux d’Aurillac, je m’exprime au nom de mon groupe. (Sourires.)
Monsieur le président, j’accepte de rectifier l’amendement puisqu’il s’agit d’une simple question de coordination.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 882 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Requier et Vall, et ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le mot :
conjoint
insérer les mots :
, du concubin
La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote sur l'amendement n° 570.
M. Dominique Watrin. Monsieur le rapporteur, madame la secrétaire d'État, vous essayez de nous mettre en contradiction, mais vos arguments ne s’appliquent pas à nos propos.
L’article 3 comporte un paragraphe 1, intitulé « Ordre public », qui définit des règles générales. Au paragraphe 2, intitulé « Champ de la négociation collective », vous ouvrez la possibilité pour l’employeur de déterminer par une convention, un accord collectif d’entreprise ou un accord de branche une durée de congé qui ne peut être inférieure au nombre de jours fixé par la loi. Or j’avais cité le cas des agences de voyage, qui appliquaient des dispositions plus avantageuses que ce seuil minimum.
En fait, vous ouvrez la possibilité pour l’employeur de remettre en cause un accord plus favorable aux salariés. C’est cette situation que je dénonçais.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Pour ce qui me concerne, c’est un peu Noël avant l’heure ! (Sourires.) Je voudrais remercier ma collègue Corinne Bouchoux de ses mots qui me touchent, mais aussi Jean-Claude Requier d’avoir rappelé la position partagée par l’UDI-UC sur l’union libre lors de la présentation de son amendement.
Lorsque l’on fit observer à Napoléon, rédigeant le code civil, qu’il ne prévoyait pas les cas d’union libre, celui-ci répondit : « Les concubins ignorent la loi, la loi ignore les concubins ! ». Je suis heureux que ceux-ci soient aujourd'hui reconnus.
Nous suivrons donc la recommandation du rapporteur sur ces amendements et nous l’en remercions.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 572 et 911 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatorze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 573, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 28 à 58
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement vise à supprimer les dispositions relatives au congé de solidarité familiale. En effet, l’article L. 3142-16 de l’actuel code du travail prévoit un congé de solidarité familiale, qui permet à un salarié de s’absenter pour assister un proche souffrant d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou s’il est en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause.
À l’heure actuelle, le salarié doit informer l’employeur de son intention d’utiliser ce congé au moins quinze jours avant son départ, et ce par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en mains propres contre décharge, accompagnée, dans l’un et l’autre cas, d’un certificat médical attestant que le proche souffre effectivement d’une pathologie risquant d’entraîner sa disparition. Ce congé est de droit : il ne peut être ni reporté ni refusé.
Les dispositions en vigueur sont donc à l’avantage du salarié, puisqu’elles lui permettent d’accompagner dignement un proche en fin de vie.
Or, une fois de plus, une inversion de la hiérarchie des normes nous est proposée, au travers d’une disposition qui réduit considérablement le droit des salariés au profit de l’employeur. Nous refusons que les délais d’information de l’employeur par le salarié sur la prise de congé soient déterminés par une convention ou un accord collectif d’entreprise.
Dans les faits, nous pourrions être confrontés à la situation suivante : un salarié dont le conjoint est victime d’une maladie foudroyante et un délai d’information qui aurait été fixé à un mois par accord d’entreprise. Le salarié serait ainsi contraint de travailler, alors que son conjoint aurait besoin de tout son soutien.
Cette disposition d’inversion de la hiérarchie des normes nous semble très contestable, car ce salarié, absorbé par d’autres préoccupations que son travail en ces moments particulièrement difficiles, pourrait se mettre lui-même en danger et mettre en danger la santé de ses collègues.
M. le président. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 109 rectifié ter est présenté par Mme Canayer, MM. de Legge, Houel, Bonhomme, D. Laurent, Pellevat, César, Husson et Savin, Mmes Garriaud-Maylam, Imbert et Deseyne, MM. Masclet, Gilles, D. Robert, Commeinhes et Lefèvre, Mmes Gruny et Keller, MM. Revet, Longuet, Mouiller et Grand, Mmes Micouleau et Primas et M. Laménie.
L'amendement n° 110 rectifié bis est présenté par Mmes Cayeux et Hummel, M. Huré, Mme Duchêne, MM. Pierre et Nougein, Mme Lamure et MM. Magras et Legendre.
L'amendement n° 158 rectifié bis est présenté par MM. Vasselle, Laufoaulu et B. Fournier.
L'amendement n° 273 est présenté par M. Courteau.
L'amendement n° 574 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 45 à 58, 91 à 104 et 242 à 252
Supprimer ces alinéas.
Les amendements nos 109 rectifié ter, 110 rectifié bis, 158 rectifié bis et 273 ne sont pas soutenus.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 574.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le problème que pose cet article 3, dans les différentes situations de congé évoquées par notre amendement, est qu’il s’agirait de débattre des conditions d’application de congés non rémunérés, aujourd’hui simplement régies par accord entre employeurs et salariés.
Le problème, aussi, est que la question du soutien familial, de l’assistance et de la présence auprès des personnes âgées en perte d’autonomie fait depuis plusieurs années l’objet de négociations dans les entreprises et les branches, y compris sur le maintien de la rémunération des salariés concernés.
Nombre d’accords ont comme objet d’organiser le don de jours de repos au bénéfice des salariés dont un membre de la famille a besoin d’une présence particulière – enfant malade ou descendant frappé d’une affection grave. On pourrait, pour illustrer nos débats, examiner le cas de la convention collective de la restauration rapide, ou encore l’exemple de nombre d’entreprises des secteurs de la banque, de la mutualité et des assurances.
Dans ce contexte, il nous est apparu bienvenu de maintenir en l’état les procédures en vigueur pour bénéficier des congés non rémunérés que sont le congé de solidarité familiale, le congé pour proche aidant et le congé de représentation, c’est-à-dire la simple passation d’un accord entre le salarié et l’employeur.
Le code du travail, tel qu’il est aujourd’hui rédigé, donne suffisamment de garanties pour un juste exercice de ces droits, d’autant qu’il est toujours préférable de laisser la négociation collective intégrer progressivement ces problématiques et procéder à l’évaluation des accords déjà existants, pour avancer sur le champ de la qualité des dispositions d’ordre public que nous pourrions conserver.
Il y va tout de même des efforts que la société dans son ensemble doit faire face au vieillissement et de la place que nous souhaitons donner, en particulier, à l’engagement collectif et associatif. Ne compliquons pas les choses, mes chers collègues !
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 575, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 47
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement vise, au fond, à permettre l’effectivité de l’égalité de traitement entre les salariés en matière de congés de solidarité familiale. De fait, donner un cadre au niveau de la branche, auquel ne peut déroger que positivement l’accord d’entreprise, permet tout à la fois d’assurer cette égalité de traitement et de garantir des minima suffisamment solides aux salariés.
Cet amendement ne vise d’ailleurs pas n’importe quel congé. La solidarité familiale relève d’une logique tant humaniste qu’économique. Peut-on réellement penser qu’un salarié dont un proche est en fin de vie soit en capacité d’effectuer son travail en toute sécurité et efficacité ? Nous ne le pensons pas.
De fait, placer cette question si personnelle à l’échelle de l’entreprise, c’est prendre le risque que des conflits de personnes, comme il en existe dans toutes les entreprises, viennent nuire à un traitement digne de la question. La loi et la branche ont en commun le fait d’être impersonnelles. La structuration actuelle de la négociation collective oblige l’entreprise à être plus avantageuse que la branche en cas de dérogation. Il nous semble que maintenir le droit actuel en l’état est la meilleure solution.
M. le président. L’amendement n° 576, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 59 à 104
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les dispositions prévues aux alinéas 59 à 104 de cet article 3 modifient les textes concernant les congés de proches aidants. Il s’agit ici, comme dans le reste du texte, de créer trois dimensions de normes applicables, en favorisant l’accord d’entreprise ou de branche.
Pour rappel, ce type de congé exceptionnel est pris par les salariés pour assurer une assistance et un dévouement total à un proche en perte d’autonomie ou en situation de handicap grave. Il correspond, dans la vie du salarié, comme dans celle de toute sa famille, à un choix lourd : il s’agit tout à la fois d’assurer au proche aidé des conditions de vie les plus correctes possible, ce qui représente un engagement de tous les instants, a fortiori quand la dépendance est mentale, et, en même temps, de se familiariser avec un environnement tout à fait nouveau pour l’aidant, sans même compter la dégradation de son niveau de vie.
Ainsi, et paradoxalement, le congé du proche aidant correspond à une période de fragilité pour ce dernier : les dispositifs d’aide et d’accompagnement pour les aidants sont rares, mal connus et, par là même, peu accessibles.
Dans ces conditions, le fait de renvoyer la définition du cadre légal entourant le congé de proche aidant à des négociations d’entreprises ou de branche créera une multitude de cadres légaux, compliquant d’autant la lisibilité du droit pour les salariés. Ainsi, à la difficulté de se priver de revenus, cette inversion de la hiérarchie des normes ajoute une insécurité législative pour les salariés.
C’est pourquoi nous souhaitons que ces alinéas soient retirés de l’article 3.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 577 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 902 rectifié est présenté par MM. Collombat, Amiel, Bertrand et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 63
Remplacer les mots :
deux ans
par les mots :
un an
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 577.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à rendre effectif le droit au congé de proche aidant pour les salariés.
Permettre l’exercice d’une solidarité, notamment familiale, dans les moments les plus difficiles est évidemment positif. Mais, pour être efficace et surtout équitable, cette mesure devrait s’accompagner d’une obligation d’ancienneté minimale. Or, établir à deux ans l’ancienneté nécessaire pour « débloquer » cette possibilité est selon nous une vraie limite, discriminante, à l’égard notamment des centaines de milliers de salariés qui, dans la précarité, ne bénéficieront jamais de ce congé.
Le salarié précaire, c’est celui qui enchaîne stage, CDD et intérims, contrat précaire sur contrat précaire ; c’est le jeune diplômé qui galère pendant dix ans pour trouver un emploi stable ; c’est le salarié âgé qui, victime des plans de licenciement à quelques années de la retraite, ne parvient pas à retrouver un emploi.
En définitive, c’est toute cette population de précaires, qui représente aujourd’hui l’essentiel des embauches, puisque 90 % d’entre elles sont réalisées dans le cadre de CDD et intérims. Dans de nombreuses entreprises, notamment dans les domaines de l’assistance téléphonique ou de la restauration, le turn-over est extrêmement important.
Subissant des contrats courts, précaires, mal payés et des conditions de travail difficiles, les salariés abandonnent très facilement ces emplois : dans le domaine de la restauration rapide, ce sont, dans certains cas, plus de la moitié des effectifs qui sont renouvelés chaque année. Ce critère d’ancienneté écarte en conséquence toute cette population, et pourtant ils ne sont pas les moins touchés par les maladies des proches.
Ce critère doit donc être élargi, pour réellement permettre à tous les salariés de bénéficier de l’une des seules avancées prévues par ce texte. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. L’amendement n° 902 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Bertrand et Guérini, Mmes Jouve et Malherbe et M. Vall, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 578, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 77
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. L’article 3 de ce projet de loi prévoit de maintenir la durée des congés pour les proches aidants à un an sur l’ensemble de la carrière. C’est méconnaître la réalité des proches aidants que de limiter leur possibilité de congé à une durée prédéfinie, qui plus est d’une année.
Comment imaginer qu’un salarié accompagnant un proche en fin de vie puisse se voir dans l’obligation de reprendre son travail avant le décès de ce proche, le laissant ainsi sans possibilité d’accompagnement ?
Il en va de même pour les personnes aidant des proches en situation de handicap, pour qui une durée d’un an de congé ne satisfait en aucun cas aux obligations d’accompagnement que nécessite une telle situation. Limiter les congés de proches aidants au travers de durées maximums constitue donc une réponse inadéquate à des situations de vie difficiles.
C’est la responsabilité du législateur d’agir afin de mettre tout en œuvre pour faciliter la vie des proches aidants. C’est aussi l’intérêt des entreprises, car, sans cela, celles-ci continueront à constater absentéisme et désinvestissement au travail. Or mieux vaut un congé dont les termes sont clairement définis que des arrêts à répétition.
Dans un contexte de vieillissement de la population, les cas de dépendance des personnes âgées vis-à-vis de leurs proches augmentent. Il est donc nécessaire d’adapter notre droit du travail en conséquence.
M. le président. L’amendement n° 579, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 93
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous proposons, au travers de cet amendement, de tenter de sauver le congé de proche aidant. C’est un dispositif innovant, répondant à un besoin particulier, et qui va se révéler de plus en plus utile compte tenu du vieillissement de la population.
Malheureusement, comme toutes les précédentes dispositions que nous avons examinées jusqu’ici, le congé de proche aidant n’échappe pas à la règle de la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche. Cette logique est mortifère pour les droits des salariés. Nous le répétons inlassablement, mais le projet de loi n’a de cesse de vouloir modifier le code du travail en ce sens.
Comment peut-on imaginer qu’un salarié doive batailler – il n’y a pas d’autre mot – auprès de son employeur pour obtenir ce congé spécifique ? Il faut bien voir le contexte quelque peu délicat dans lequel se trouve ce salarié, qui est en demande de temps pour s’occuper de l’un de ses proches.
Il est particulièrement anxiogène, dans ce cas précis, d’être soumis au bon vouloir de l’employeur, et cela risque également d’entraîner des disparités de situation d’une entreprise à l’autre, sur la durée de ce congé de proche aidant, sur le nombre de renouvellements possibles, etc.
Pour nous, ces sujets ne doivent pas être négociables par convention ou par accord collectif d’entreprise, mais, a minima, par accord de branche. Tel est le sens de cet amendement.
Mes chers collègues, vous avez enrichi ce congé spécifique à l’occasion de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement. Ne réduisez pas cette avancée à peau de chagrin !
M. le président. L’amendement n° 592, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 229 à 252
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Au travers de cet amendement, nous souhaitons intervenir sur l’un des aspects les plus contradictoires du texte.
Le congé de représentation est de création relativement récente et il a la particularité de permettre au salarié le faisant jouer de participer pleinement aux activités des organismes où se trouvent appelées ses compétences et qualités.
La liste des organismes où ces compétences sont appelées est strictement déterminée par voie réglementaire, dans le cadre de l’application du dispositif législatif en vigueur. Et voici donc que, après avoir défini des critères d’ordre public pour le moins généraux, le projet de loi propose de soumettre à la négociation et, à défaut, aux décisions de l’employeur la participation effective de ces salariés aux activités des organismes où ils sont appelés à siéger.
Pour un projet de loi qui en appelle au développement du dialogue social, c’est, à n’en point douter, une belle avancée ! Voilà en effet que les « impératifs » de la production de telle ou telle PME pourraient priver d’un représentant des usagers un comité régional de l’organisation sanitaire et sociale…
Le congé de représentation est pourtant un élément essentiel de l’évolution de la concertation en matière sociale et hospitalière. Soumettre son exercice à l’arbitraire d’un accord d’entreprise ou de branche revient, en fait, à donner à ces dispositifs un poids plus important que celui conféré à toute décision administrative.
Je le rappelle, lorsque l’on est appelé à siéger dans un tel organisme, c’est parce que l’on a été choisi par une association, une mutuelle ou un autre type d’organisation, et parce que cette disposition a été validée par un acte émanant de l’autorité de l’État. En un sens, l’intérêt particulier d’une entreprise pourrait primer sur l’expression de l’intérêt général.
Nous ne pouvons donc que vous inviter, mes chers collègues, à adopter cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 590, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 244
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Actuellement, tout salarié du privé ou agent public peut bénéficier d’une autorisation spéciale pour représenter une association aux réunions d’une commission ou d’une instance placée auprès des pouvoirs publics. Ce congé est appelé congé de représentation.
La loi prévoit que les droits à congé de représentation sont de neuf jours ouvrables par personne et par année civile. Ces droits peuvent être utilisés de façon fractionnée, par journée entière ou par demi-journée. Ainsi, pour chaque réunion, le salarié réalise sa demande de congé à son employeur par écrit au moins quinze jours à l’avance. Ce dernier doit indiquer la date, la durée de l’absence envisagée et l’instance au sein de laquelle il siège. La convocation doit être jointe.
La décision de l’employeur est communiquée dans les quatre jours qui suivent la réception de la demande. S’il y a refus, celui-ci doit être motivé par l’une au moins des deux raisons suivantes : l’absence du salarié serait préjudiciable à la bonne marche de l’entreprise ; trop de salariés ont déjà bénéficié d’un congé de représentation dans l’année en cours.
Le premier motif de refus n’est d’ailleurs recevable que si le comité d’entreprise ou les délégués du personnel, s’ils existent, ont été consultés pour donner leur avis.
Le second motif n’est admis, quant à lui, que si la part de salariés de l’établissement dans lequel travaille le demandeur bénéficiaire d’un congé de représentation excède les proportions définies par la loi.
Vous le voyez, mes chers collègues, ce type de congés est donc déjà extrêmement encadré par la loi, et il ne nous apparaît pas nécessaire de faire en sorte qu’une convention ou un accord collectif d’entreprise prime sur un accord de branche et puisse ainsi mettre en danger la dynamique de ces instances, qu’elles soient ou non consultatives, alors même qu’elles ont été instituées par des dispositions législatives ou réglementaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements restant en discussion ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L’amendement n° 573 vise à supprimer la disposition relative au congé de solidarité familiale.
Sans revenir sur le débat de fond, je rappelle que nous avons, en commission, collectivement ajouté un droit à l’entretien individuel au retour dans l’entreprise, mesure favorable au salarié selon nous. Ce droit existe déjà pour le congé de proche aidant, mais pas pour le congé de solidarité familiale, qui peut être amené à durer trois mois, voire six mois. Il est donc opportun qu’un échange puisse avoir lieu entre l’employeur et le salarié pour prévoir les modalités de réinsertion de ce dernier dans cette communauté humaine qu’est l’entreprise.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable sur cet amendement.
En ce qui concerne l’amendement n° 574, qui vise à supprimer du champ de la négociation les dispositions relatives aux congés de solidarité familiale, de proche aidant et de représentation, la commission est défavorable, pour des raisons de fond.
Je rappelle qu’un accord sera nécessaire et j’imagine que les organisations représentatives qui signeront un tel accord seront, tout de même, attentives à ne pas porter atteinte aux droits des salariés. Chacune et chacun aura à cœur, lors des négociations, d’avoir un comportement humaniste. Bien sûr, on ne peut pas préjuger de l’avenir, mais le fait que l’accord doive être conclu avec une majorité relativement importante empêchera toute révision drastique à la baisse des droits des salariés.
C’est en tout cas le pari que nous faisons, avec le Gouvernement d’ailleurs !
En ce qui concerne les amendements nos 575 et 576, l’avis de la commission est défavorable.
Je voudrais dire quelques mots de l’amendement n° 577, pour lequel la commission souhaite recueillir l’avis du Gouvernement. Cet amendement vise à abaisser à un an, au lieu de deux, la condition d’ancienneté requise pour pouvoir bénéficier du congé de proche aidant.
Madame la ministre, madame la secrétaire d’État, je pense que le Gouvernement devrait regarder attentivement cet amendement. En effet, aucune condition d’ancienneté n’est requise pour le congé de solidarité familiale. Or le congé de proche aidant s’inscrit dans une philosophie similaire.
Certes, les conditions qui permettent d’y prétendre sont distinctes, en ce sens que le congé de solidarité familiale s’adresse à un proche souffrant d’une pathologie mettant en jeu son pronostic vital, c’est-à-dire à un moment critique. Cela étant, au regard de la philosophie du congé de proche aidant, le fait de devoir attendre deux ans nous paraît peut-être excessif.
Si le Gouvernement acceptait de considérer cet amendement d’un œil favorable, la commission en serait fort aise.
Mme Laurence Cohen. C’est quasiment un avis favorable… Et c’est joliment dit ! (Sourires.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Chère collègue, vous voyez que nous essayons de faire les choses correctement…
En revanche, je ne pourrai pas avoir la même souplesse pour les amendements qui suivent ! (Sourires.)
Notre avis est ainsi défavorable sur les amendements nos 578, 579, 592 et 590. Les raisons peuvent facilement se comprendre, puisque nous sommes, là, dans le même débat que celui que nous avons depuis le début de l’examen de ce texte.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Pour ma part, je vais distinguer deux groupes d’amendements.
En ce qui concerne les amendements nos 573, 574, 575, 576, 592 et 590, l’argumentation globale a déjà été développée par Mme la ministre et par moi-même, puisqu’ils concernent la place que nous voulons donner, à travers ce texte, à l’accord d’entreprise, c’est-à-dire à la négociation au plus près du terrain. Vous comprendrez donc que nous leur donnons un avis défavorable.
Les dispositions des amendements nos 577, 578 et 579, qui visent la situation des proches aidants, appellent en revanche quelques précisions, en particulier à la suite de l’argumentation du rapporteur.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous posez la question, importante, de la durée d’ancienneté nécessaire pour bénéficier d’un congé. Nous connaissons tous la problématique de ces aidants, qui soutiennent des personnes âgées ou handicapées. Cependant, le Parlement a adopté, en décembre dernier, la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement. L’ensemble du dispositif a été rebâti à cette occasion, ce qui a permis une amélioration de la situation des aidants.
C’est pour cette raison que le Gouvernement ne souhaite pas remettre en cause, aujourd’hui, des dispositions qui ont été adoptées par le Parlement au mois de décembre dernier, et cela sur des questions qui dépassent les clivages.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. La commission mixte paritaire a été très positive, en effet !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 573.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 307 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 29 |
Contre | 311 |
Le Sénat n’a pas adopté.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’amendement n° 574.
Mme Laurence Cohen. Le moins que l’on puisse dire est que nous n’avons pas l’originalité du dépôt de cet amendement, puisque plusieurs parlementaires, de sensibilités diverses, ont déposé les mêmes dispositions, en les motivant de manière identique.
Je dois avouer que nous avons été quelque peu perplexes devant l’apparente contradiction, qui anime certains, entre la prise en compte, et pour tout dire, l’acceptation, de la philosophie générale du texte et cette subite poussée d’égalité législative, illustrée par l’existence de ces propositions alternatives.
D’une manière plus ou moins confuse, ce qui est finalement ressenti est bel et bien que l’inversion de la hiérarchie des normes et cette ouverture, quasi sans limites, du champ de la négociation d’entreprise, ainsi « privatisée », ne vont pas avoir d’autres effets durables que de créer des distorsions de traitement injustifiées dans des situations comparables.
Finalement, mes chers collègues, de quoi parlons-nous ici ?
Avant tout, de l’attention que des parents peuvent accorder à la maladie, notamment quand elle présente un caractère évident de gravité et qu’elle touche des enfants en bas âge. On se souviendra que le principe des jours de congé pour enfant malade accordés aux agents de la fonction publique le fut, entre autres mesures, après le grand mouvement social de 1968.
La mesure s’inscrivait dans l’évolution normale des choses, notamment en raison de la progression de l’emploi féminin, si présent aujourd’hui dans un secteur public où il est largement majoritaire. Que nous soyons en 2016 et que nous n’ayons pas encore tout à fait avancé dans l’extension de ces dispositifs aux salariés du secteur privé n’est pas forcément pour nous surprendre !
Certes, nous avons noté que la question était appréhendée dans de nombreuses entreprises sous des formes diverses et variées. Mais il n’est pas possible – tel est d’ailleurs le sens de cet amendement – que la même situation soit traitée de manière différenciée à raison de la qualité du dialogue social dans telle ou telle entreprise.
Si tant est que l’on reconnaisse quelques vertus à la solidarité familiale ou que l’on donne quelque sens à la présence des usagers du service public dans les instances de consultation mises en place par la loi, il faut faire en sorte que rien ne puisse être opposé à l’exercice de ces qualités.
C’est pourquoi j’insiste sur l’adoption de cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 574.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 308 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 30 |
Contre | 311 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 575.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’amendement n° 577.
Mme Laurence Cohen. Je veux remercier M. le rapporteur de l’avis favorable qu’il a donné à cet amendement et insister à nouveau sur l’importance de ce dernier, comme je l’ai fait lors de sa présentation : il s'agit vraiment de rétablir un principe d’égalité pour les plus précaires.
J’espère que cet avis favorable de la commission va faire réfléchir l’ensemble de l’hémicycle et nous conduire à l’adoption de cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 497 rectifié bis, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 105 à 136
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise les dispositions de cet article qui concernent le congé sabbatique. Nous demandons la suppression des dispositions que nous combattons depuis le début de l’examen de ce projet de loi : inversion de la hiérarchie des normes et caducité du principe de faveur.
Le congé sabbatique correspond à une véritable respiration pour les salariés, un droit utile qui apporte une certaine forme de déconnexion, si je puis m’exprimer ainsi. Demain, avec cette loi, les durées minimale et maximale du congé ainsi que le nombre de renouvellements seront strictement du domaine de la convention collective.
La négociation collective devra également définir l’ancienneté requise, ainsi que les conditions et délais d’information des employeurs. À défaut d’accord collectif, les règles resteront, heureusement, identiques au droit positif en matière de durée, qui reste comprise entre six et onze mois. Toutefois, à l’inverse, s’il y a négociation collective, ces règles pourront être plus défavorables.
Par ailleurs, nous sommes inquiets : les conditions et les délais d’information de l’employeur seront définis par décret, s’il n’y a pas négociation collective. Actuellement, ce délai est de trois mois, et nous serons extrêmement vigilants sur le contenu des décrets, pour qu’il ne soit pas réduit.
Nous sommes également très inquiets, car rien n’empêchera demain les conventions collectives de définir des conditions plus défavorables aux salariés, revenant ainsi sur des années d’acquis faisant suite à des luttes et à des lois.
Alors que les conditions de travail sont de plus en plus difficiles, que la pression du chômage, la peur du déclassement taraudent une partie importante du corps social, il est important que notre droit garantisse à tous des périodes de respiration.
C’est tout le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, pour des raisons clairement orthogonales à celles qui viennent d’être exposées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Notre avis est également défavorable, en raison de notre volonté de donner la primauté à l’accord d’entreprise sur les thèmes les plus structurants de la négociation, notamment le temps de travail et l’articulation entre les vies professionnelle et privée. Le congé sabbatique fait partie de ces questions.
Néanmoins, vous avez exprimé une inquiétude s’agissant du décret. Aussi, je m’engage devant vous à maintenir le droit constant dans le décret, ce qui est un élément déterminant. Par ailleurs, je vous rappelle que tous les décrets que prend le ministre du travail, celui-ci comme les autres, sont élaborés en concertation avec les partenaires sociaux.
L’avis du Gouvernement est tout de même défavorable, en cohérence avec la philosophie du projet de loi.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 497 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 580, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 140 à 163
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous abordons à présent une autre catégorie de congé, à savoir le congé mutualiste de formation. Une nouvelle fois, la même logique d’inversion de la hiérarchie des normes est déclinée, ce qui va bien évidemment avoir des conséquences sur le quotidien des salariés, contrairement à ce que vous affirmez, madame la ministre.
La nouvelle architecture mise en place réduit considérablement le périmètre du droit existant et ouvre la porte à des situations disparates d’une entreprise à l’autre. Les salariés ne pourront plus invoquer la loi, le code du travail, mais seront bel et bien soumis à des règles locales. Et il faudrait être naïf pour croire que celles-ci seront plus favorables que ce qui était prévu jusqu’ici par la loi.
Le congé mutualiste de formation n’échappe pas à cela, puisque, très concrètement, ni la durée maximale de ce congé ni le nombre de salariés pouvant en bénéficier, par exemple, ne seront à présent encadrés par la loi. On devine aisément les conséquences de cette situation.
C’est donc bien la répartition au sein de ce nouveau triptyque ordre public-négociation collective-dispositions supplétives qui pose problème, la loi n’étant plus la référence qui prime. Vous le savez, nous sommes opposés de manière générale à cette nouvelle logique, et cela vaut bien évidemment pour le congé mutualiste de formation.
C’est pourquoi nous proposons de supprimer les alinéas qui s’y réfèrent.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 582 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 903 rectifié est présenté par MM. Requier, Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol et Fortassin, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et M. Mézard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 144
Après le mot :
mutualité,
insérer les mots :
et toute personne, non-administrateur, apportant à une mutuelle, union ou fédération, en dehors de tout contrat de travail, un concours personnel et bénévole, dans le cadre d’un mandat pour lequel elle a été statutairement désignée ou élue
La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 582.
M. Dominique Watrin. Si cet amendement vise un sujet qui ne fait pas couler beaucoup d’encre, à savoir le congé mutualiste de formation, il est néanmoins important.
Le code du travail précise actuellement que tout administrateur d’une mutuelle, d’une union ou d’une fédération bénéficie chaque année d’un congé de formation. Cela fait partie des droits qui permettent d’améliorer le fonctionnement de ces instances, la formation étant indispensable pour améliorer leur efficacité sur des sujets complexes.
Avec cet amendement, nous proposons d’étendre ce congé aux personnes bénévoles n’ayant pas la qualité d’administrateur ou d’administratrice, mais qui sont particulièrement impliquées dans le fonctionnement des mutuelles. En effet, au-delà des administrateurs et des administratrices, il nous semble nécessaire et complémentaire que d’autres salariés susceptibles d’intervenir dans le cadre d’un mandat pour lequel ils ont été statutairement désignés ou élus aient également le droit à un congé de formation, afin d’assurer une égalité de traitement et d’améliorer leurs connaissances dans l’intérêt général du bon fonctionnement de ces instances.
Bien entendu, en toute cohérence, ce droit doit, selon nous, figurer dans l’ordre public social. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour présenter l’amendement n° 903 rectifié.
M. Jean-Claude Requier. Cet amendement vise à étendre le congé mutualiste de formation aux bénévoles, particulièrement impliqués dans le fonctionnement des mutuelles, mais qui n’ont pas la qualité d’administrateurs.
Ne seront concernés que les bénévoles titulaires d’un mandat prévu par la loi, notamment les délégués siégeant aux assemblées générales, ou par les statuts des organismes, tels que les délégués de territoires ou les membres des commissions départementales.
Cette modification est cohérente avec la réflexion en cours sur l’évolution du code de la mutualité, dont l’une des orientations est la définition du statut de mandataire mutualiste, tel qu’il est défini dans le présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 584, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 144
Compléter cet alinéa par les mots :
de neuf jours ouvrables pour les administrateurs mutualistes et quatre jours ouvrables pour les autres personnes
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Nous souhaitons que la durée de neuf jours du congé de formation mutualiste figure bien dans l’ordre public, et non uniquement dans les dispositions supplétives, comme il est proposé. Le risque, dans le cas contraire, est de voir diminuer la durée de ce congé, ce qui serait, là aussi, une régression en termes de droits des salariés.
C’est un élément supplémentaire du détricotage du code du travail, que nous dénonçons depuis le début du débat. Tous les acquis des salariés sont fragilisés, remis en cause, laissés au bon vouloir des employeurs. Pour nous, la loi est une garantie de l’égalité de traitement.
Par ailleurs, avec cet amendement, dans la continuité du précédent, nous proposons que les personnes bénévoles puissent bénéficier d’un congé de formation de quatre jours chaque année, ce temps de formation étant indispensable pour maîtriser des sujets de plus en plus complexes et en évolution constante.
M. le président. L'amendement n° 581, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 154
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous suivons toujours la même logique de préservation des droits des salariés qui sont concernés par un congé mutualiste de formation.
Chers collègues, pensez-vous sérieusement qu’un employeur mettra en place un tel congé d’une durée plus longue que celle qui existe jusqu’à présent dans le droit, à savoir neuf jours ? Il y a fort à parier que la durée sera, au contraire, plus courte, ce qui constituera donc un recul pour les salariés.
Bien sûr, nous savons que quelques entreprises sont vertueuses, exemplaires et soucieuses du bien-être de leurs salariés, mais l’expérience nous montre que, dans la majorité des cas, malheureusement, les droits des salariés sont sans cesse rognés et remis en cause.
Quant à l’exercice d’un mandat, tel que celui d’administrateur ou administratrice au sein d’une mutuelle, s’il relève d’un véritable droit, il doit pouvoir s’exercer au mieux. Le droit à la formation, en l’occurrence le congé mutualiste de formation, y contribue pleinement. Or il sera complètement affaibli avec votre projet de loi si celui-ci arrive au bout de son parcours.
Les négociations au sein des entreprises n’étant pas de tout repos, ajouter des thèmes essentiels, tels que le droit à la formation, au champ de la négociation collective est une charge supplémentaire pour les salariés, qui risquent d’y renoncer. Il s’agit non pas de dresser un tableau noir ou pessimiste, mais d’être lucide sur l’impact que va avoir la primauté de l’accord d’entreprise sur l’accord de branche.
C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Tous ces amendements visent les dispositions relatives au congé mutualiste de formation.
Je m’attarderai un peu plus sur les amendements identiques nos 582 et 903 rectifié, qui visent à prévoir que des personnes qui ne sont pas administrateurs ou administratrices dans une mutuelle, union ou fédération, mais qui apportent un concours personnel et bénévole, puissent également être éligibles à ce congé dans une limite de quatre jours, au lieu de neuf jours pour les administrateurs. C’est l’éternel débat sur le bénévolat et son impact sur la vie dans l’entreprise. La commission a estimé qu’il ne fallait pas aller au-delà de ce qui existe aujourd’hui.
En ce qui concerne les trois autres amendements, notre argumentation est toujours la même, et elle est à l’opposé de celle des auteurs des amendements.
La commission a donc émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’objet de ce texte n’est pas de revoir toute la question des congés. Pour autant, lors des travaux en commission à l’Assemblée nationale, il a été décidé d’ouvrir ces congés, notamment aux administrateurs des unions et des fédérations. Il s’agit d’un pas important, qui était nécessaire.
Plus largement, sur la question des congés, notamment de formation, rien n’interdit aux partenaires sociaux de s’intéresser aux bénéficiaires, mais on retombe toujours sur les difficultés causées dans l’entreprise par le bénévolat, que vient d’évoquer M. le rapporteur.
L’ouverture du droit aux administrateurs me semble déjà un progrès important et, à ce stade, nous ne souhaitons pas aller plus loin. Les partenaires sociaux ont entamé une réflexion, qui doit se poursuivre, sur cette question des bénéficiaires.
Le Gouvernement est donc également défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 582 et 903 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 585, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 164 à 183
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Le projet de loi prive une nouvelle fois de leur rôle les comités d’entreprise et les délégués du personnel.
Aujourd’hui, pour qu’un congé exceptionnel de participation aux instances d’emploi et de formation professionnelle ou à un jury d’examen soit refusé par l’employeur, il lui faut un avis conforme des comités d’entreprise ou des délégués du personnel, avis conforme qui est remplacé dans le projet de loi par un avis simple, qui ne sera finalement qu’une prise de position que pourra allégrement ignorer l’employeur.
De fait, les alinéas dont nous proposons la suppression affaiblissent concrètement le droit des salariés à un congé suffisant et nécessaire à la participation d’un jury d’examen ou à une instance d’emploi et de formation professionnelle.
La volonté du Gouvernement de laisser le champ libre à l’accord d’entreprise au mépris des accords de branche, plus protecteurs, ne peut que conduire les salariés à hésiter à participer à ces instances, et, partant, à leur porter préjudice, la participation des salariés à ces structures étant la garantie de leur qualité et de leur originalité. Par ailleurs, c’est aussi une marque d’engagement de ces derniers. Il paraît donc normal que la responsabilité qui leur incombe en pareille occasion n’ait pas pour conséquence de diminuer leurs revenus.
M. le président. L'amendement n° 583, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 180
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement tend à compléter le précèdent, dans la lignée des amendements que nous avons défendus jusqu’à présent pour faire prévaloir les accords de branche sur les accords d’entreprise.
Aujourd’hui, l’absence du salarié lorsqu’il siège dans une instance traitant de problèmes d’emploi et de formation n’est soumise à aucun formalisme particulier. L’employeur lui accorde le temps nécessaire pour participer aux réunions des instances précitées, et aucune condition restrictive n’est prévue pour le salarié, si ce n’est sa participation effective aux travaux pour lesquels il a sollicité une autorisation d’absence.
Le salarié qui participe à un jury d’examen ou de validation des acquis de l’expérience, la VAE, adresse à son employeur, dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours avant le début de la session d’examen ou de validation, une demande écrite d’autorisation d’absence dans laquelle il mentionne les dates et le lieu de la session.
Il s’agit donc d’un amendement de cohérence, qui vise lui aussi à revenir sur la nouvelle architecture normative proposée par le projet de loi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. À amendement de cohérence, position de cohérence de la commission ! Je n’ai pas besoin d’être plus long pour justifier les avis défavorables de la commission sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 587, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 184 à 203
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous proposons de supprimer les dispositions relatives au congé pour catastrophe naturelle. Ce congé, encore très largement méconnu, permet à des salariés de proposer leur aide dans le cadre de catastrophes naturelles importantes.
Le climat est en train de changer, comme en témoignent les travaux de la récente COP, ainsi que ceux du GIEC, le groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat. La prise de conscience internationale doit grandir encore pour permettre d’agir concrètement. Les dérèglements conduisent depuis plusieurs années à la multiplication des inondations, tsunamis et ouragans, autant de phénomènes aux conséquences terribles, qui nécessitent la mise en place d’une solidarité internationale.
Nous devons être fiers de ces salariés qui sollicitent ce type de congé, non rémunéré, pour aller porter la solidarité en urgence là où elle est la plus utile.
Pour cette raison, qui s’ajoute aux problématiques plus sociales fondant notre opposition à cet article, nous vous proposons d’adopter cet amendement. Nous pensons que, au lieu de permettre une régression potentielle de ce droit acquis des salariés en donnant la primauté à la négociation collective, qui pourra être plus défavorable que la loi, il conviendrait plutôt de mieux les aider et de les accompagner dans cette pratique.
La rénovation du code du travail proposée par ce texte aurait pu et dû, bien au contraire, permettre d’élargir les cas de recours à ce type de congé, notamment pour venir en aide aux réfugiés climatiques, qui seront, hélas, de plus en plus nombreux à l’avenir.
M. le président. L'amendement n° 586, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 196
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Avec cet amendement, que nous pourrions qualifier de repli, nous proposons de faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise en matière de congé pour catastrophe naturelle. En effet, nous estimons que la hiérarchie des normes doit être conservée, car elle est plus protectrice pour les salariés.
Le congé pour catastrophe naturelle est important. Il s’agit, par ce congé spécifique, de permettre aux salariés d’aller apporter leur aide en cas de catastrophe naturelle dans d’autres pays, comme cela a pu se produire lors du tsunami de 2004 ou encore des inondations de Louisiane. Malheureusement, les exemples sont nombreux et devraient l’être de plus en plus. En effet, ce type de solidarité internationale risque de devoir se développer au regard des risques naturels croissants, favorisés par des logiques productivistes préjudiciables à l’environnement.
De plus en plus, nos concitoyens devront aller prêter main-forte pour aider les victimes des conséquences dramatiques de la hausse globale des températures. Nous considérons que le monde de l’entreprise doit lui aussi prendre en compte cette dimension.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons d’adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. S’agissant de l’amendement n° 587, celui-ci vise à supprimer une disposition qui est également d’ordre public et dont les parlementaires touchés par les dernières catastrophes naturelles connaissent l’importance.
La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements, pour des raisons que vous comprenez tous, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’avis est également défavorable, même si je partage tout à fait l’avis de M. Watrin sur l’importance de ce congé pour catastrophe naturelle. Les événements récents nous l’ont rappelé avec beaucoup d’acuité.
Par cohérence avec l’esprit du projet de loi, je ne puis malheureusement qu’émettre un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. C’est formidable : tout le monde est d’accord avec M. Watrin, mais personne n’appelle à voter pour son amendement. L’inverse serait plus intéressant pour le groupe CRC ! (Sourires.)
Jusqu’à maintenant, nous avons beaucoup parlé de flexibilité, pour que l’entreprise soit compétitive. Le texte préconise donc de négocier des accords d’entreprise, qui sont censés être plus efficaces que les accords de branche. Nous pouvons entendre cette logique, même si nous ne la partageons pas.
En l’occurrence, il faut se placer dans le cas de survenance d’un événement d’ampleur. On regrette en permanence que, dans notre société, les gens soient trop individualistes et qu’il n’y ait pas assez de moments collectifs. Les dernières inondations ont pourtant montré que, dans de telles circonstances, nous assistons à un retour du projet collectif.
Or, au lieu de favoriser de tels comportements au niveau de la branche, en autorisant à prendre des congés pour participer à l’élan de solidarité face à un événement important, on laisse cette possibilité au bon vouloir des employeurs. Bien sûr, certains d’entre eux joueront le jeu en autorisant le salarié à prendre sa journée, mais il y a aussi ceux qui refuseront et obligeront le salarié à travailler ce jour-là !
On soumet donc des actions collectives de solidarité à l’appréciation des employeurs, qui, pour certains, ne joueront pas le jeu. Je ne comprends pas ! Je puis le comprendre lorsqu’il s’agit d’organiser le temps de travail en fonction du carnet de commandes. Toutefois, en l’occurrence, on laisse place à la subjectivité la plus totale de l’employeur, qui permettra, ou non, à des salariés de son entreprise de participer à des actions de solidarité, pour réparer les atteintes à l’environnement ou protéger les biens des familles.
Je trouve que votre position n’est pas cohérente, madame la ministre. Vous êtes en train d’individualiser tous les actes de solidarité, mettant un terme à une mentalité collective au nom de laquelle chacun pouvait jusqu’alors annoncer son choix d’arrêter son travail pour rejoindre une solidarité plus vaste, en apportant son aide aux victimes de catastrophes.
Désormais, l’employeur, qui est le supérieur du salarié, aura le droit d’empêcher ce dernier de participer à ces actes de solidarité ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Dans l’article 3, le droit au congé pour catastrophe naturelle est consacré. Ce congé est d’ordre public. La disposition aux termes de laquelle ce congé peut, en cas d’urgence, être pris sous préavis de vingt-quatre heures est également d’ordre public.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous ai rappelé notre attachement à affirmer le caractère d’ordre public de ces dispositions. Ce sont les modalités qui peuvent être négociées à l’échelon de l’entreprise.
Vous venez, monsieur Desessard, d’évoquer des congés qui seraient pris dans le cadre de la solidarité nationale. Je vous renvoie au texte de l’article 3, lequel mentionne clairement, pour ce genre de congé, le caractère d’ordre public, qui n’est donc pas une notion à géométrie variable !
M. Philippe Dallier. Cessons de discuter, puisqu’il n’y a pas de sujet !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je suis donc désolée de contrer votre argumentation, monsieur le sénateur, et de vous renvoyer à la réalité du texte. Ce droit à congé pour catastrophe naturelle relève de l’ordre public. Est également d’ordre public la disposition suivant laquelle « la durée du congé ne peut être imputée sur la durée du congé payé annuel. »
M. Jean Desessard. Moi aussi, j’ai lu le texte de la commission, madame la ministre ! Et je parle de la possibilité laissée à l’employeur de refuser ce congé…
Mme Myriam El Khomri, ministre. Non, nous maintenons le droit actuel ! Ne faites pas croire que ce congé aurait un caractère aléatoire et que la décision de l’accorder ou non serait prise au niveau de l’entreprise. Telle n’est pas la réalité. Je le répète, nous maintenons le droit actuel et avons pris le soin d’inscrire dans l’ordre public ce genre de congé, qui est en effet essentiel.
Ne nous faites pas de faux procès ! Vous pouvez avoir un désaccord sur le fait que les modalités soient négociées à l’échelle de l’entreprise, mais ne faites pas croire que ce droit à congé pour catastrophe naturelle n’est pas une disposition d’ordre public.
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas ce qu’il a dit !
Mme Évelyne Didier. Il a parlé des modalités !
M. Jean Desessard. Un bien triste sort !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 589, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 204 à 228
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement vise à supprimer les dispositions relatives aux congés de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse. En effet, l’article L. 3142-43 de l’actuel code du travail prévoit que tout salarié âgé de moins de 25 ans souhaitant participer aux activités des organisations de jeunesse et d’éducation populaire, des fédérations et des associations sportives agréées par l’autorité administrative, destinées à favoriser la préparation et la formation ou le perfectionnement de cadres et animateurs, a droit, sur sa demande, à un congé non rémunéré de six jours ouvrables par an pouvant être pris en une ou deux fois.
Dans l’état actuel des choses, l’employeur peut très bien refuser le congé s’il estime que l’absence du salarié est préjudiciable à la production et à la bonne marche de l’entreprise après consultation du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, le refus de l’employeur devant être motivé et notifié à l’intéressé dans les huit jours à compter de la réception de sa demande.
En dehors des deux cas suivants – refus pour dépassement du nombre de salariés absents et raisons tenant à la production et à la bonne marche de l’entreprise – l’employeur est tenu d’accepter la demande de congé. Or, une convention ou un accord d’entreprise va pouvoir déterminer les dispositions prévues aux articles L. 2145-5 à L. 2145-13.
Dans les faits, nous pourrions nous retrouver avec un animateur désireux d’accroître ses compétences professionnelles qui verra sa requête refusée de façon discrétionnaire, puisque l’employeur n’a plus l’obligation de consulter le comité d’entreprise ou les délégués du personnel.
Il est impensable de retirer de façon détournée ce droit aux salariés. Tel est le sens de notre amendement de suppression.
On voit là, madame la ministre, en examinant des cas précis, que cette inversion de la hiérarchie des normes va être une catastrophe. Vous laissez en effet aux employeurs le libre choix, affichant votre attachement à la possibilité d’expression de la solidarité, mais sans la garantir. Dans les faits et les modalités, les choses sont susceptibles de se passer autrement. Et là, vous ouvrez une porte – le terme est faible, je ferais mieux de parler de brèche !
M. le président. L'amendement n° 588, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 218
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il s’agit ici d’un amendement de repli, dont les dispositions font suite à notre amendement précédent, afin de faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise en matière de congé de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse. Nous souhaitons ainsi, dans un souci de cohérence, revenir à la hiérarchie des normes telle qu’elle existe dans notre droit du travail.
Ce congé non rémunéré permet aux salariés et apprentis âgés de moins de 25 ans de suivre des stages de formation à l’animation sportive, culturelle ou sociale auprès d’organismes agréés par le ministère de la jeunesse et des sports. Leur but est de favoriser la préparation et la formation ou le perfectionnement de cadres et animateurs.
Ce congé est également prévu dans la fonction publique – agents de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics hospitaliers, agents non titulaires… Il est à mon sens indispensable de conserver le droit en vigueur en la matière, tant ce congé est porteur d’espoir pour la jeunesse qui sera, à terme, touchée de plein fouet par ce projet de loi.
Mes chers collègues, nous devons nous garder de porter, au travers de dispositions issues de nos débats qui réduiraient les droits des salariés, un message négatif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. En ce qui concerne les congés, qui font l’objet de l’article 3, je n’imagine pas une énorme créativité des accords d’entreprise et des accords de branche, qui seront les cas les plus fréquents. En effet, les TPE et les PME se référeront naturellement aux accords de branche, un degré qui, on le voit, conserve un rôle dans un certain nombre de domaines. Je pense, à dire vrai, que les convergences seront assez fortes pour que l’on s’en tienne plus ou moins à ce qui relève du supplétif.
À ce stade, j’émets donc, au nom de la commission, un avis défavorable sur ces deux amendements, en réaffirmant notre grande confiance dans les acteurs de la négociation.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je formulerai trois remarques.
Tout d’abord, depuis lundi, j’entends dire, au fil du dialogue, que nous laissons aux employeurs le libre choix. Or, je suis désolée, l’entreprise ne se réduit pas à l’employeur ! L’entreprise, c’est l’employeur, plus les salariés et les organisations syndicales. Lorsque nous renvoyons à la négociation collective dans les entreprises, cela ne signifie pas que nous abandonnons les salariés au « libre choix de l’employeur ». Non, renvoyer à la négociation collective, cela signifie faire appel aux acteurs de terrain ! Cet aspect reviendra lors de la discussion de tous les amendements relatifs aux congés.
Ensuite, je tiens à rappeler ici que nous avons prévu une architecture du droit du travail en trois étages et que l’ordre public se situe au sommet. Les droits à congé font partie de l’ordre public social. C’est seulement pour les mettre en œuvre que nous faisons appel à la négociation collective.
Enfin, je veux revenir sur les congés de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse. Nous y avons travaillé, Patrick Kanner et moi-même, et nous allons créer, dans le cadre du projet de loi Égalité et Citoyenneté, un congé d’engagement citoyen. Les conditions seront les mêmes que pour les congés de formation de cadres et d’animateurs pour la jeunesse. Elles seront les mêmes que pour tous les bénévoles élus dans les organes de direction et d’association. Avec ces deux projets de loi, nous élargissons donc le champ des bénéficiaires de ce type de congé !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Je comprends la volonté des membres du groupe CRC d’arriver à leur fin, même si cela les a conduits à multiplier les amendements. Chers collègues, vous voulez absolument faire la démonstration que le texte est défavorable aux salariés, à tout le monde – je ne sais pas pour qui, du reste, ni pour quoi.
Mme Éliane Assassi. Pour les 64 % de Français qui sont contre ce texte !
Mme Nicole Bricq. Cela, je le comprends, c’est votre posture.
Mme Éliane Assassi. Non, c’est notre combat !
Mme Nicole Bricq. Tout de même, vous ne pouvez pas découper ce texte en tranches. Vous ne pouvez pas procéder ainsi, même si je peux comprendre certains problèmes. En effet, avec cet amendement, vous faites comme si, dans ce texte, on ne s’occupait pas de la jeunesse et de l’engagement associatif. J’espère bien, au demeurant, que nous allons nous retrouver quand il s’agira de rétablir, à l’article 21, qui traite du compte personnel d’activité, le compte engagement citoyen, qui a été supprimé par la commission !
S’agissant des jeunes et de la formation, ce texte augmente substantiellement les droits à la formation, qu’il s’agisse des droits aux congés ou du temps consacré à la formation, et il comporte des mesures essentielles pour les jeunes et surtout pour ceux qui n’ont rien.
Vous n’arriverez donc pas à démontrer que ce texte est mauvais pour tous ceux que je viens de citer.
Mme Éliane Assassi. Si ! Nous y arrivons, mais vous n’êtes pas d’accord.
Mme Nicole Bricq. Vous avez le droit de défendre vos amendements, mais nous avons le droit de dire que nous soutenons et le Gouvernement et le texte !
Par ailleurs, vous faites comme si l’on démolissait le droit du travail actuel. Il y a une chose que vous ne voulez pas admettre, c’est justement la prégnance de l’ordre public à chaque article. On n’arrête pas de vous le dire, la ministre ne cesse d’en faire la démonstration, mais vous ne voulez pas écouter. Vous êtes dans votre raisonnement, et aucun autre argument ne trouve grâce à vos yeux !
Il s'agit tout de même d’une démarche, excusez-moi de vous le dire, que l’on pourrait qualifier de totalitaire. Vous n’entendez pas les arguments que l’on vous oppose. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Bien sûr !
Mme Éliane Assassi. Ben voyons !
Mme Nicole Bricq. Oui, une démarche totalitaire !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Tout d’abord, je ne m’associe pas, pour ma part, à l’idée qu’il y aurait là une démarche totalitaire. J’ai pu découvrir que le Gouvernement n’avait manifestement pas du tout, quoi qu’il arrive, l’intention de bouger.
« On ne bougera pas ! » Ce discours, aussi, on peut le trouver totalitaire. Je ne crois pas que ce soit la bonne approche. Les positions des uns et des autres ont une certaine raideur. À certains moments, je les réprouve et, à d’autres, je les approuve.
Ensuite, je ne comprends pas pourquoi on remet en cause ce qui fonctionnait dans le domaine de la formation des jeunes. Pourquoi cette remise en cause ? Cet aspect est-il vital pour la compétitivité de l’entreprise ? Le nombre de congés ne doit manifestement pas poser de grands problèmes dans la survie de nos entreprises. Le plus souvent, c’est dans le domaine de l’économie sociale et solidaire que de jeunes salariés les demandent. Or les entreprises de l’économie sociale et solidaire n’ont pas rien demandé du tout.
Enfin, on nous dit que l’ordre public est déterminant, ce qui constitue une garantie des droits des salariés, mais que la manière de le mettre en œuvre sera négociée. Or, on sait tout de même que la manière de mettre en œuvre un droit conditionne l’accès réel à ce dernier. Et plus fondamentalement, je pense que le signe que nous devons donner à la jeunesse, c’est que l’on a besoin d’une éducation populaire forte dans ce pays. On a besoin de gens qui se forment pour ces compétences et qui s’y impliquent, notamment dans la vie associative avec les BAFA, par exemple.
Je ne comprends absolument pas pourquoi on modifie un dispositif, alors que ni les associations dans le domaine de l’éducation populaire ni les entreprises de l’économie sociale et solidaire n’ont demandé une quelconque remise en cause du droit existant. À mon avis, en le modifiant, on va complexifier l’accès à des formations qui, dans leur majorité, ne semblaient pas poser de problème.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Je suis étonnée de l’intervention de Mme Bricq, qui parle de comportement ou de démarche « totalitaire ».
Mme Nicole Bricq. Il faut écouter les autres !
Mme Laurence Cohen. Je ne sais pas comment elle qualifie l’emploi du 49.3 à l’Assemblée nationale ! Hier, en expliquant son vote sur l’article 2, elle s’est réjouie qu’un débat ait lieu au Sénat et elle a déploré qu’il n’y en ait pas eu à l’Assemblée nationale. On voit bien qu’elle n’est pas à quelques contradictions près… C’était ma première remarque.
Deuxième remarque, elle s’est demandée « pour qui, pour quoi ? » les communistes s’acharnent à démonter les articles et les alinéas un par un. Je suis désolée, ce n’est pas nous qui avons rédigé ce projet de loi. Mme la ministre est bien placée pour le dire, elle qui le soutient à 200 % ! Elle le revendique, sa porte est ouverte, mais elle ne bouge pas d’un iota pour modifier quelque mesure que ce soit…
Ce n’est pas nous qui avons rédigé, par exemple l’article 3, qui comprend 417 alinéas. Je suis désolée, nous accomplissons notre mission de parlementaire…
Mme Nicole Bricq. Je ne l’ai pas contesté !
Mme Laurence Cohen. Or notre mission de parlementaire, ce n’est pas seulement de déconstruire un projet de loi qui est mauvais, qui est négatif, qui, sous le prétexte de sécuriser l’entreprise, va apporter de l’insécurité aux salariés.
Notre mission, c’est aussi de prouver que des mesures de rechange existent. C'est pourquoi, dans chaque domaine, que ce soit sur les questions de formation, de jeunesse ou de hiérarchie des normes, nous démontrons qu’un autre chemin est possible. Cette voie, c’est la voie progressiste, celle d’un autre code du travail, qui sécurise à la fois les entreprises et les salariés.
Quand les salariés d’une entreprise vont mal, l’entreprise va mal elle aussi. Il y a beaucoup de PME et de TPE qui meurent tous les jours ! Ici, on ne parle pas des grands groupes ! Ce que nous démontrons, c’est qu’il existe une autre voie, celle du progrès, celle du XXIe siècle, dans laquelle chacun s’épanouit. Et, malheureusement, telle n’est pas la voie choisie par ce gouvernement.
Telles sont les raisons pour lesquelles, jusqu’au bout, nous défendrons nos arguments. « Pour qui, pour quoi ? » Pour toutes celles et tous ceux qui défilent dans la rue et pour toutes celles et tous ceux qui manifestent par leur intermédiaire !
Nous allons continuer jusqu’au bout ce combat, que nous trouvons juste et que nous croyons être celui d’une vraie gauche ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Madame Bricq, vous avez dit aux membres du groupe CRC qu’ils découpaient ce texte en tranches. Selon vous, on ne peut pas découper ce texte par tranches, on ne peut pas le saucissonner.
J’aurai une question à vous poser, madame Bricq : peut-on découper le droit du travail en tranches ? Peut-on le saucissonner ? Non ! C’est en effet un ensemble, qui garantit les rapports sociaux. Or ce texte, que vous le vouliez ou non, et même s’il a une cohérence, comme vous le dites, madame la ministre, porte tout de même l’idée d’adapter le droit du travail en fonction des accords d’entreprise.
Comme vous l’avez dit, tout à l’heure, madame la ministre – c’est notre débat depuis lundi –, vous êtes persuadée que, dans les accords d’entreprise, il y a les chefs d’entreprise, les salariés et les organisations syndicales.
Vous dites que tout cela fera un équilibre, lequel serait plutôt positif, puisqu’il défend la proximité. Ce que nous disons, nous, depuis lundi, et ce n’est pas une posture, madame Bricq, mais une analyse politique globale, partagée aussi bien sur les travées du groupe CRC – à ce propos, peut-être le terme de « totalitaire » était-il un peu exagéré –, que sur quelques travées socialistes et par nous, les écologistes. Ce que nous disons, c’est que, aujourd'hui, le rapport de forces entre le patronat et les salariés n’est pas à l’avantage des salariés. Et il l’est et le sera encore moins lorsque s’y ajoutera le rapport hiérarchique entre les salariés et le patronat, qui est estompé au niveau des branches.
On nous dit vouloir ramener aujourd'hui, sous couvert de bonnes intentions, le rapport de forces social au niveau de l’entreprise. Nous, nous disons que cela se fera, à l’exception de certaines branches, au détriment des salariés. Voilà ce qui nous guide.
Aussi, madame Bricq, il s'agit non pas d’une posture, mais d’une analyse politique, qui consiste à se demander où est aujourd'hui le rapport de forces entre les salariés et le patronat. Ce qui ne va pas dans votre sens, c’est que la droite est toute prête à se dire d’accord avec vous et à estimer qu’il vaut effectivement mieux que cela se passe au niveau de l’entreprise.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Nous, nous nous contentons de regarder !
M. Jean Desessard. Vous regardez ? Non ! Vous approuvez la démarche et vous l’accentuez, sur le thème de la nécessaire compétitivité. D'ailleurs, pour améliorer cette dernière, vous n’avez jamais pensé à diminuer la rémunération des patrons. Vous qui siégez à droite, vous vous en prenez toujours à la rémunération des travailleurs ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Madame la ministre, à votre place, je serais inquiet de constater que la droite est d’accord avec la philosophie de ce texte ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. On l’a vu depuis lundi, il y a des divergences de vues et des désaccords. Il y a aussi des nuances. Certains auraient sans doute souhaité un assouplissement, qu’ils auraient préféré voit intervenir au cours de la première année du mandat présidentiel plutôt que lors de l’avant-dernière.
Peut-être certains considèrent-ils que des endroits du code du travail comportent des rigidités excessives. C’est d’ailleurs tout l’intérêt des discussions parlementaires, même si elles sont un peu longues et jalonnées de nombre d’amendements, que de zoomer sur le panel des lissages que vous êtes en train d’effectuer. Ceux-ci ont leur logique et leur cohérence.
Toutefois, on ne peut pas s’empêcher de penser que, sur certains points, le droit de lissage va très loin. Il va dans un sens qui, dans le climat social actuel, n’apparaît pas forcément à l’avantage des salariés même si l’on peut faire confiance aux syndicats pour les défendre dans l’entreprise.
Quant au mot « totalitaire », dont l’emploi dans cette discussion m’a semblé plutôt malheureux,…
Mme Nicole Bricq. Il n’est pas malheureux !
Mme Corinne Bouchoux. … les lecteurs d’Hannah Arendt s’accorderont à le trouver excessif ici.
Je n’ai pour ma part jamais été communiste, et beaucoup des idées communistes ne reçoivent pas mon adhésion. Néanmoins, même nos collègues libéraux et républicains n’auraient pas été jusqu’à affirmer que les interventions de nos collègues communistes témoignent d’une vision totalitaire ! Du moins, ils ne l’auraient pas dit à haute voix.
M. Philippe Dallier. Nous n’aurions pas osé ! (Sourires.)
Mme Éliane Assassi. C’est vrai. Nous nous combattons, mais nous nous respectons !
Mme Corinne Bouchoux. Selon moi, l’ampleur des contradictions entre nos positions ne mérite pas que l’on cède à des facilités sémantiques excessives, en particulier à un moment où notre Haute Assemblée se voit attaquée sur d’autres plans. On peut certes juger certaines positions monomaniaques ou répétitives ; en revanche, les taxer de « totalitaires » est pour le moins excessif.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. L’esprit de ce projet de loi est bien de répondre au besoin de flexibilité et de faire en sorte que les gens puissent discuter et se mettre d’accord à l’échelle de l’entreprise.
Je crois comprendre ce qu’a voulu exprimer Mme Bricq et je ressens parfois le même sentiment. En effet, on constate bien chez nos collègues communistes une volonté constante d’imposer leur point de vue à tous les autres, sans tenir compte des avis respectifs.
Mme Laurence Cohen. Et ce projet de loi, il tient compte de ce que pensent les autres ?
Mme Éliane Assassi. Au moins 64 % des Français ne sont pas d’accord avec ce texte !
M. Olivier Cadic. Cette volonté peut être perçue comme une démarche totalitaire ou, du moins, outrancière. Chers collègues, je ne fais que vous exprimer mon sentiment.
Pardonnez-moi, monsieur Desessard, mais la rémunération des patrons est de leur propre compétence : ce sont bien eux qui dirigent leur entreprise et qui déterminent leur propre rémunération. (Exclamations sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)
Mme Éliane Assassi. Ben voyons !
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il est intéressant que Mme Bricq et M. Cadic se retrouvent !
M. Olivier Cadic. Quand les affaires d’une entreprise vont mal, le chef d’entreprise cesse de verser son propre salaire en premier lieu.
M. Jean Desessard. Pas dans les grosses entreprises !
M. Olivier Cadic. Certes, monsieur Desessard, mais plus de 95 % des entreprises sont des PME. Les lois s’appliquent à tout le monde, y compris aux petites entreprises : ne l’oubliez jamais ! On a l’impression de ne parler que des patrons du CAC 40, alors que ceux-ci ne sont que quarante et que l’activité de leurs entreprises s’effectue pour les deux tiers en dehors de notre pays.
Madame Lienemann, vous évoquiez hier la Finlande, qui serait revenue sur la primauté des accords d’entreprise. Il faudrait tout de même rappeler aussi les efforts accomplis par ce pays, comme l’augmentation de la durée annuelle du travail, y compris par des jours de travail non payés, l’augmentation des cotisations retraite et chômage des salariés, ainsi que la baisse des cotisations sociales des entreprises.
Les Finlandais ont changé de politique après un an. Vous constaterez néanmoins que votre vision de ce revirement est fausse : de véritables compensations ont été acceptées en retour. Par ailleurs, les problèmes rencontrés par la Finlande sont réels. Nous verrons dans un an si cette politique a eu les effets escomptés.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je rassure d’emblée nos collègues communistes : je n’emploierai pas le mot de « totalitaire » et je ne leur reprocherai pas de défendre leur point de vue.
Mme Éliane Assassi. Merci !
M. Philippe Dallier. Cela dit, je vais peut-être mettre la gauche d’accord avec ce que je vais dire (Rires sur les travées du groupe CRC et du groupe écologiste.), ou plutôt contre ce que je vais dire. En effet, chers collègues de l’opposition, vous n’arrivez pas à vous mettre d’accord pour soutenir quoi que ce soit ; peut-être parviendrai-je en revanche à vous unir contre moi !
L’examen de cet article a cela d’intéressant qu’il balaye la totalité des congés possibles. Cette liste est assez impressionnante, d’une manière positive ou négative, mais elle ne saurait étonner après la lecture de l’enquête parue hier dans Le Monde.
Mme Nicole Bricq. On en a parlé hier !
M. Philippe Dallier. Je le sais bien, chère collègue, mais je fais le lien, parce qu’il existe une corrélation directe avec ce qui nous occupe ce matin. Cette enquête montre en effet que la France est le pays de l’OCDE où l’on travaille le moins.
M. Dominique Watrin. C’est faux !
M. Jean-Louis Tourenne. Pas du tout !
M. Philippe Dallier. Mais si ! Il faut bien, à un moment, regarder la réalité en face et avoir le courage de le dire : nous sommes le pays où, à l’année et tout compris, on travaille le moins !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Non, uniquement en CDI !
M. Philippe Dallier. Il faut d’autant plus le dire que nous nous trouvons dans une situation difficile, tant pour les entreprises que pour les 3,5 millions de chômeurs en catégorie A. À cet égard – sur ce point, je ne vais pas réconcilier la gauche –, je tiens à saluer le courage de ce gouvernement socialiste, qui a su annoncer, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, que l’on négocierait ces questions à l’échelle de l’entreprise et en fonction de la situation de cette dernière.
Nous sommes certes en train de négocier le dosage exact de ce changement. Néanmoins, l’histoire retiendra de ce texte cette simple chose. Oui, il est peut-être temps dans notre pays de résoudre les problèmes au plus près de l’entreprise, pour essayer de nous adapter. En effet, comme je le disais déjà lors de la discussion générale, si nous ne nous adaptons pas, nous n’avons aucune chance d’améliorer la situation des entreprises de ce pays.
Ayons tous en tête d’abord la situation des chômeurs, de tous ceux qui sont privés d’emploi : si nous ne bougeons pas, nous n’avons aucune chance de nous en sortir ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Tourenne, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Tourenne. Ce n’est pas parce que l’on répète une contre-vérité qu’elle devient vérité au bout d’un certain temps ! Je vous prie, monsieur Dallier, de lire jusqu’au bout l’article du Monde auquel vous avez fait référence et de ne pas vous contenter de ses premiers graphiques.
Selon cet article, en Allemagne, au Royaume-Uni, ainsi qu’aux Pays-Bas, le temps partiel est largement plus répandu qu’ailleurs, et notamment qu’en France. Par conséquent, le temps de travail hebdomadaire moyen des Français, si l’on inclut les salariés à temps partiel, s’élève à environ 37,5 heures, alors qu’il est de 35,2 heures en Allemagne et de 36,8 heures au Royaume-Uni ! Admettez donc ces vérités !
M. Philippe Dallier. Je parle du temps de travail annuel !
M. Jean-Louis Tourenne. Sur l’année aussi, les Français travaillent plus que les Allemands, de même que sur l’ensemble d’une vie.
M. Philippe Dallier. Non !
M. Jean-Louis Tourenne. Lisez donc l’article jusqu’au bout, monsieur Dallier ! Cela demande peut-être de faire un effort important, mais qui est nécessaire si l’on veut tenir ce genre de discours.
M. Philippe Dallier. Je l’ai fait !
M. Jean-Louis Tourenne. Par ailleurs, vous n’avez pas le monopole de l’intérêt porté à nos concitoyens qui se trouvent privés d’emploi. Ne revendiquez donc pas un tel monopole !
Tout le travail effectué autour de ce texte découle justement d’une volonté de faire en sorte qu’il y ait moins de chômeurs et que les jeunes ne se trouvent pas demain dans la même situation qu’aujourd’hui, à enchaîner des CDD de moins d’un mois sinon d’une semaine seulement.
Il y a là tout un travail à faire ; c’est tout le mérite du Gouvernement de l’avoir entrepris : vous l’avez d’ailleurs relevé vous-même. Je me demande parfois à ce propos s’il n’est pas quelque peu compromettant pour Mme la ministre de recevoir autant de louanges de votre part…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ça l’est franchement !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 593, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 253 à 280
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 591, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 269
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Le congé de solidarité internationale a pour objet de permettre à un salarié de participer à une mission d’entraide à l’étranger. La durée du congé ou la durée cumulée de plusieurs congés, pris de façon continue, ne peut excéder six mois.
Pour bénéficier de ce congé, le salarié doit avoir au moins douze mois d’ancienneté dans l’entreprise, consécutifs ou non. La mission à laquelle il souhaite participer doit se situer hors de France et relever soit d’une association humanitaire, soit d’une organisation internationale dont la France est membre. La liste de ces dernières est fixée par arrêté.
Le salarié doit informer son employeur au moins un mois à l’avance en précisant la date de départ en congé, la durée de l’absence envisagée, ainsi que le nom de l’association ou de l’organisation internationale pour laquelle la mission sera effectuée.
En cas d’urgence, le salarié peut solliciter un congé d’une durée maximale de six semaines, sous préavis de quarante-huit heures. L’employeur peut refuser ce congé dans deux cas : en premier lieu, si l’absence du salarié est préjudiciable à l’entreprise, auquel cas l’employeur doit motiver et notifier sa réponse sous quinze jours ; en second lieu, si le nombre maximum de salariés bénéficiant déjà de ce congé a été atteint. Ce plafond est déterminé par la loi en fonction du nombre de salariés de l’entreprise.
Pendant le congé, le contrat de travail est suspendu et le salarié n’est pas rémunéré. Toutefois, la durée du congé est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des avantages liés à l’ancienneté.
La durée du congé de solidarité ne peut être, sauf d’un commun accord, imputée sur celle du congé annuel. À son retour de congé, le salarié doit retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d’une rémunération au moins équivalente. Il est important de rappeler ces éléments.
L’amendement que nous vous présentons obéit à notre logique constante d’opposition à ce projet de loi : nous voulons faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise, ici pour le problème spécifique du congé de solidarité internationale.
M. le président. L’amendement n° 1024, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 280
Remplacer les mots :
est déterminée
par les mots :
sont déterminés
et remplacer le mot :
fixés
par le mot :
fixées
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 593 et 591.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L'amendement n° 1024 est un amendement rédactionnel, monsieur le président.
Avec les amendements nos 593 et 591, il est question du congé de solidarité internationale. On voit se développer au sein des entreprises ou, du moins, dans un premier temps, des plus grandes d’entre elles, certains dispositifs visant à permettre aux salariés de pouvoir prendre un break de quelques semaines ou de quelques mois pour se dédier à une cause qui leur est chère ou qui est chère à cette entreprise dans le cadre d’un mécénat de compétence.
C’est pourquoi je ne partage pas la crainte des auteurs de ces amendements. En effet, des accords pourront manifestement se nouer assez facilement.
Je voudrais à ce propos regretter la rhétorique employée par les opposants à ce projet de loi, du moins en dehors de cet hémicycle. On m’a distribué un tract du mouvement « Nuit debout », où il était écrit que les dérogations se multiplieraient « par simple accord ». Or un accord n’est pas forcément simple ! Ce n’est pas un fait unilatéral : il faut bien le consentement des deux parties.
Pour en revenir au cas particulier du congé de solidarité internationale, je pense que ce type de dispositif est de plus en plus souvent mis en place : faisons donc confiance aux acteurs de terrain !
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur les amendements nos 593 et 591.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. En ce qui concerne le congé de solidarité internationale, je travaille avec d’autres membres du Gouvernement sur le dispositif de volontariat international en entreprise. Il faut en effet le redynamiser, notamment sur les postes les moins qualifiées, pour lesquels on enregistre très peu de candidatures. Avec Harlem Désir, j’ai lancé une expérimentation pour développer un « Erasmus pro » d’échanges d’apprentis entre une dizaine de grandes entreprises françaises et allemandes. De même, nous essayons de relancer ce congé, qui est parfois sous-utilisé.
L’avis du Gouvernement sur les amendements nos 593 et 591 est donc défavorable. En revanche, je suis favorable à l’amendement n° 1024, qui a pour objet la rectification d’une vilaine erreur grammaticale.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote sur l’amendement n° 593.
M. Dominique Watrin. Je voulais apporter quelques explications sur le sens de cet amendement, dans la mesure où les dispositions relatives au congé de solidarité internationale sont assez peu connues. C’est d’ailleurs regrettable, car les retours des salariés en ayant bénéficié démontrent que ces congés ont représenté pour eux une expérience formidable.
Depuis 2006, seulement 74 missions de congé de solidarité internationale ont été réalisées : il y a encore un champ de développement à favoriser. Le salarié ou l’agent d’une collectivité qui part en congé de solidarité internationale voit sa mission financée totalement ou partiellement par son employeur, son comité d’entreprise ou sa fondation d’entreprise, par la signature d’une convention de partenariat avec l’organisme d’envoi.
Alors que les besoins humanitaires sont criants dans le monde, ce que la crise actuelle des réfugiés ne fait qu’accentuer, notre groupe estime que ce type de congés doit être revalorisé. Or, loin de simplifier les règles et donc d’encourager ces expériences et ces initiatives, les alinéas 253 à 280 de l’article 3 proposent une réécriture qui, de fait, alourdit les textes en vigueur. Voilà pourquoi nous proposons de les supprimer.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il me faut réagir à l’intervention de M. Watrin.
Notre écriture en trois étages pose de son point de vue une difficulté. En revanche, si ce congé est insuffisamment connu, en faire un objet de négociations au sein de l’entreprise permettra non seulement de revitaliser le syndicalisme, mais aussi de rendre plus visible la possibilité de ce congé.
Selon moi, c’est parce que nous ne négocions pas les questions les plus structurantes et les plus quotidiennes pour les salariés que nous ne parvenons pas à avoir une négociation qui ne soit pas juste formelle, mais qui change véritablement les choses. Nous avons le code du travail, les conventions collectives et les accords d’entreprise. Pour mieux faire connaître ce congé, en faire un objet de négociation est un vecteur central.
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 595, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 281 à 303
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Si vous le permettez, mes chers collègues, je vais répéter l’offense jugée totalitaire par Mme Bricq !
En 2015, quelque 140 000 personnes ont été conviées à leur cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française. Le congé exceptionnel pour acquisition de la nationalité représente un élément essentiel pour la bonne tenue de cette cérémonie.
Alors que l’article L. 3142–116 du code du travail, actuellement en vigueur, établit que chaque salarié invité à sa cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française bénéficie d’un congé d’une demi-journée, l’article L. 3142–66 instauré par ce projet de loi ne précise aucun délai et renvoie la question de la durée du congé à une négociation collective.
Bien évidemment, on peut s’attendre à ce que cela permette, dans les entreprises où le rapport de force syndical est favorable aux salariés, un congé plus long qu’une simple demi-journée.
À l’inverse, on peut craindre qu’il ne se transforme en un congé horaire, comme cela se fait déjà régulièrement pour d’autres types de congés. En effet, et ce d’autant plus dans un contexte de flux tendu en matière d’effectifs dans les entreprises, nombreux sont les employeurs qui vont demander aux salariés de ne s’absenter que pour une durée minimale puis de revenir à leur poste une fois la cérémonie achevée. À ce titre, il aurait certainement été préférable de fixer par la loi le cadre d’un délai minimal.
Second élément, qui ne vous étonnera pas, nous déplorons, madame la ministre, que vous fassiez primer en cette matière aussi l’accord d’entreprise sur l’accord de branche. Ce dernier, plus englobant, permet de distendre légèrement le lien de subordination et de renforcer les organisations syndicales vis-à-vis des entreprises. C’est d’autant plus vrai en ce qui concerne les PME. C’est pourquoi nous souhaitons maintenir le droit existant en la matière.
M. le président. L'amendement n° 594, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 290
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement de repli par rapport à celui qui vient d’être brillamment défendu par notre collègue Brigitte Gonthier-Maurin vise à faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise pour la durée du congé pour acquisition de nationalité.
M. le président. L'amendement n° 995, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 294
Remplacer cet alinéa par les cinq alinéas ainsi rédigés :
c) La sous-section 8 est ainsi modifiée :
- les articles L. 3142-56 à L. 3142-64, dans leur rédaction antérieure à la présente loi, deviennent les articles L. 3142-70 à L. 3142-78 et l’article L. 3142-64-1, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, devient l’article L. 3142-79 ;
- à l’article L. 3142-71, dans sa rédaction résultant du présent c, la référence : « L. 3142-56 » est remplacée par la référence : « L. 3142-70 » ;
- au premier alinéa de l’article L. 3142-76, dans sa rédaction résultant du présent c, la référence : « L. 3142-61 » est remplacée par la référence : « L. 3142-75 » et la référence : « L. 3142-60 » est remplacée par la référence : « L. 3142-74 » ;
- à l’article L. 3142-79, dans sa rédaction résultant du présent c, les références : « L. 3142-60 à L. 3142-64 » sont remplacées par les références : « L. 3142-74 à L. 3142-78 » ;
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 993, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 296
Après la référence :
L. 3142-70
insérer les mots :
, dans leur rédaction antérieure à la présente loi,
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 994, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 297
Après la référence :
L. 3142-77
insérer les mots :
, dans leur rédaction antérieure à la présente loi,
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 996, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 297
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
- à l'article L. 3142-87, dans sa rédaction résultant du présent d, la référence : « L. 3142-71 » est remplacée par la référence : « L. 3142-86 » ;
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 595 et 594.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L’amendement n° 996 est un amendement de coordination.
La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 595 et 594.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 595 et 594, d’autant que la durée d’une demi-journée est mentionnée au sein du paragraphe sur les dispositions supplétives.
En revanche, l’avis est favorable sur les amendements nos 995, 993, 994 et 996.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 995.
Mme Laurence Cohen. Nous voterons contre cet amendement et les trois suivants.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 596, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 304 à 382
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement concerne le congé et la période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d’entreprise.
Les dispositions prévues aux alinéas visés renversent le droit existant. Si la nullité du refus en cas de non-motivation a été supprimée, les droits sont abaissés.
Les conditions d’ancienneté, le nombre de renouvellements et la durée minimale de ces congés ne sont plus prévus qu’en dispositions supplétives. Il peut donc y être dérogé sans conséquence par l’accord d’entreprise.
Les points les plus périlleux résident encore une fois dans la latitude laissée à l’accord d’entreprise.
Autoriser, notamment, la fixation par accord d’entreprise des « conditions permettant le maintien d’un lien entre l’entreprise et le salarié pendant la durée du congé et, le cas échéant, les modalités d’accompagnement et de réadaptation professionnelle à son retour » rend inutiles ou contradictoires les dispositions d’ordre public prévues à l’alinéa 320. Et laisser à l’accord d’entreprise tout pouvoir pour déterminer la mise en place des mesures de réadaptation risque d’alourdir le droit, en rendant excessivement floue son application.
Voilà qui illustre une nouvelle fois les effets délétères d’un droit du travail découpé et où les accords d’entreprise priment l’ensemble ! Un régime dérogatoire aboutit par définition à un droit « buissonnant », éclaté, qui finira, dans les conditions actuelles, par n’accorder aux salariés que le droit minimal prévu par la loi.
Nous condamnons de nouveau cette remise en cause des conventions collectives. Le salarié qui souhaite s’absenter et avoir une période de travail à temps partiel doit pouvoir bénéficier du droit le plus favorable. Une fois encore, ce n’est pas ce que vous offrez avec ce texte !
M. le président. L'amendement n° 597, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 336
Remplacer les mots :
une convention ou un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, un accord de branche
par les mots :
un accord de branche ou, à défaut, une convention ou un accord collectif d’entreprise
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement de cohérence vise à permettre le maintien de la prééminence de l’accord de branche sur l’accord d’entreprise en matière de congé ou de période de travail à temps partiel pour reprise ou création d’entreprise.
Ce dispositif, s’il est bien utilisé, peut permettre au salarié de créer une entreprise ou de la reprendre, en minimisant les risques. Son effectivité est toutefois rendue difficile par les dispositions que nous avons évoquées précédemment, s’agissant notamment du retour du salarié dans l’entreprise.
L’autre problème de la prééminence de l’accord d’entreprise est que l’absence d’accord entraîne de facto une réduction des droits des salariés. En permettant à la négociation dans l’entreprise de délimiter l’ensemble de ce droit et en ne laissant qu’une référence « faute de mieux » à la loi, elle autorise un abaissement drastique du droit au congé pour création ou reprise d’entreprise.
Très concrètement, beaucoup de salariés n’auront tout simplement pas la possibilité de bénéficier de ce droit, du fait des pressions et de la concurrence. Encore une fois, ce sont les salariés des petites structures qui seront touchés par ce moins-disant. Comment imaginer que ce droit soit étendu aux petites entreprises comme il peut l’être aux grandes, où les difficultés de gestion sont moindres, car les tâches peuvent être plus facilement échangées en l’absence d’un salarié ?
L’effectivité d’un tel droit nécessite que les mêmes règles s’imposent à toutes les entreprises d’un secteur, tout simplement pour que chaque salarié puisse en bénéficier. C’est l’objet de notre amendement.
M. le président. L'amendement n° 997, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 354
Remplacer les mots :
au titre duquel l'employeur peut différer le départ en congé ou le début de la période de travail à temps partiel
par les mots :
, pour lequel l'employeur peut différer le départ ou le début de la période de travail à temps partiel,
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 596 et 597.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L'amendement n° 997 est un amendement rédactionnel.
La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 596 et 597.
Cela étant, je comprends ce qui a conduit le groupe CRC à déposer l’amendement n° 596. Dans la majorité des cas précédents, les dispositions supplétives ont été insérées à droit constant. Ce n’est pas le cas des règles prévues par le projet de loi en matière de congé et de période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise entreprise. Le seuil de 200 salariés, qui conditionne la possibilité de refus ou l’application de règles plus souples pour le report du congé ou du temps partiel, est relevé à 300 salariés. Connaissant l’attachement de nos collègues à un droit constant, je comprends ce qui les a motivés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur les amendements nos 596 et 597.
Comme vient de le souligner M. le rapporteur, le projet de loi relève le seuil à partir duquel il est possible d’assouplir les règles applicables à un report du congé ou de la période de travail à temps partiel pour la création ou la reprise d’entreprise. Cela va dans le bon sens pour le salarié.
En revanche, l’avis est favorable sur l’amendement n° 997.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 997.
M. le président. L'amendement n° 998, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 387
Après le mot :
à
insérer la référence :
la sous-section 1 de
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 999, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 392
Après la deuxième occurrence des mots :
les mots : «
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
mentionné à l'article L. 3142-6 » et la référence : « L. 3142-22 » est remplacée par la référence : « L. 3142-15 » ;
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1002, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 411
Remplacer le mot :
cinquième
par le mot :
quatrième
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 3, que nous venons d’examiner, traduit une vision très régressive de ce que doit être le droit social au sein des entreprises. Je vous le dis franchement : ce qui est envisagé, c’est un droit au service du patronat ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Je savais que je vous ferais réagir, mes chers collègues.
Pour atteindre un tel objectif, le présent projet de loi procède à l’inversion des normes – les règles ne seront plus négociées pour tout un secteur ; ce sera entreprise par entreprise – et met fin au principe de faveur.
Quoi que vous en disiez, ces deux mesures conjuguées placent les salariés dans une grande fragilité face à leur employeur, dans un contexte économique fragile où le chômage de masse est un argument utile pour justifier des régressions sociales.
Ce n’est pas en abaissant toutes les réglementations favorables aux salariés et en faisant plus d’austérité que nous réglerons le problème très grave du chômage. Au contraire !
M. Philippe Dallier. Passons tout de suite aux 32 heures ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Les accords d’entreprise deviennent ainsi la norme de droit commun, l’accord de branche n’étant plus applicable qu’à défaut d’accord d’entreprise. Nous nous trouvons donc dans une situation de balkanisation du droit social, notamment pour les congés.
Tous les types de congés, à part les congés payés, sont concernés par le présent article, qu’il s’agisse de congés familiaux, de congés de solidarité, militant ou autres.
Ces aménagements visent à accorder à l’employeur une flexibilité maximale et à revenir ainsi sur des acquis sociaux obtenus par les salariés au niveau de la branche.
La diversité des congés sera demain un véritable casse-tête pour les entreprises et les délégués du personnel, ainsi que pour les salariés mandatés. Il y a ainsi fort à craindre que certains congés méconnus ou peu utilisés ne disparaissent globalement.
Or cette diversité est une richesse que nous devons encourager. Nous considérons que les congés doivent être définis par la loi et que les entreprises peuvent prévoir des accords modifiant les conditions, mais uniquement dans un sens plus favorable.
Ces congés ont une justification et une légitimité particulières. En particulier, toute forme de congé de solidarité ou militant devrait être encouragée dans une société marquée par un repli identitaire.
Nous voterons donc contre cet article dangereux.
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 309 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Pour l’adoption | 310 |
Contre | 21 |
Le Sénat a adopté.
Article 3 bis
(Non modifié)
La sous-section 1 de la section 1 du chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa de l’article L. 1225-4 est ainsi modifié :
a) Le mot : « et » est remplacé par le signe : «, » ;
b) Après les mots : « ce droit, », sont insérés les mots : « et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité » ;
c) Le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « dix » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 1225-4-1, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « dix ».
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, sur l'article.
Mme Laurence Cohen. Cet article a été inséré par la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. Fort heureusement, celle du Sénat n’est pas revenue sur ces dispositions favorables aux femmes enceintes.
L’article 3 bis prévoit ainsi d’étendre la durée de la période légale de protection contre le licenciement pour les mères à l’issue de leur congé de maternité, en la faisant passer de quatre à dix semaines. Cette extension de quatre à dix semaines de la période de protection est également prévue pour le père.
Enfin, les congés payés pris à l’issue du congé de maternité sont expressément inclus dans la période de protection contre le licenciement.
Il s’agit là de l’une des seules mesures positives de ce projet de loi – vous voyez, on en trouve quand même quelques-unes ! –, afin de lutter concrètement contre les discriminations dont peuvent faire l’objet les femmes enceintes ou les jeunes mères, notamment en matière de licenciement.
Pour autant, la question plus globale de la protection de la maternité, aujourd’hui définie par des conventions collectives disparates, reste posée.
Par ailleurs, d’autres droits restent à définir. Les organisations syndicales demandent notamment l’extension de la durée du congé de maternité de seize à vingt-quatre semaines, puisque même les députés du Parlement européen ont adopté, dès le mercredi 20 octobre 2010, une résolution en faveur de la prolongation du congé de maternité à vingt semaines intégralement rémunérées.
Autant de droits qui restent à conquérir, pour les mères comme pour les pères.
En effet, aux termes de cette même résolution européenne, les États membres sont invités à faire bénéficier les pères d’un congé de paternité entièrement rémunéré d’au moins deux semaines au cours de la période du congé de maternité. La France, qui avait là aussi un temps d’avance, va-t-elle stagner ?
Les organisations demandent dans ce cadre également un congé de paternité porté à un mois et rémunéré comme le congé de maternité. C’est un point d’appui dans cette décision.
Par ailleurs, les discriminations entre les hommes et les femmes ne se limitent pas à la période de la maternité. Il en est ainsi notamment des écarts de salaire.
Mes chers collègues, vous le voyez, les champs du progrès social sont immenses. Nous voterons cet article 3 bis, que nous considérons comme positif.
Nous critiquons, nous proposons des mesures alternatives et, quand il y a une mesure positive, nous la soutenons en le disant haut et fort.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, sur l'article.
Mme Catherine Génisson. Nous voterons nous aussi l’article 3 bis, qui est issu de la proposition de loi visant à prolonger la période légale d’interdiction de rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur pour les femmes à l’issue de leurs congés liés à la grossesse et à la maternité, déposée par la députée Dominique Orliac et adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale le 10 mars 2016.
Il vise à améliorer la protection des femmes de retour de congé de maternité en prolongeant de quatre à dix semaines la période de protection relative durant laquelle l’employeur ne peut pas rompre leur contrat de travail.
Cette protection est dite relative en ce qu’elle n’est pas applicable en cas de licenciement dû à une faute grave ou non lié à l’état de grossesse de la salariée.
En revanche, la protection est absolue pendant le congé de maternité. Si une procédure de licenciement a été engagée avant que l’employée ait déclaré sa grossesse à son employeur, elle peut réclamer l’annulation de cette procédure dans un délai de quinze jours, en présentant un certificat médical justifiant son état de grossesse.
Par ailleurs, l’article 9 de la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a introduit le principe d’une protection relative empêchant l’employeur de licencier un salarié pendant les quatre semaines suivant la naissance de son enfant. Cette loi a également étendu la période de protection de quatre à dix semaines. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le président. Je constate que cet article a été adopté à l’unanimité des présents.
Mme Laurence Cohen. Eh oui !
Mme Catherine Génisson. Ça s’arrose !
M. Jean Desessard. Ça va des démocrates aux totalitaires ! (Sourires.)
Article 4
I. – Le titre V du livre Ier de la troisième partie du code du travail est ainsi rédigé :
« TITRE V
« COMPTE ÉPARGNE-TEMPS
« CHAPITRE IER
« Ordre public
« Art. L. 3151-1. – Le compte épargne-temps peut être mis en place par une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.
« Art. L. 3151-2. – Le compte épargne-temps permet au salarié d’accumuler des droits à congé rémunéré ou de bénéficier d’une rémunération, immédiate ou différée, en contrepartie des périodes de congé ou de repos non prises ou des sommes qu’il y a affectées.
« Le congé annuel ne peut être affecté au compte épargne-temps que pour sa durée excédant vingt-quatre jours ouvrables.
« Art. L. 3151-3. – Tout salarié peut, sur sa demande et en accord avec son employeur, utiliser les droits affectés sur le compte épargne-temps pour compléter sa rémunération ou pour cesser de manière progressive son activité.
« L’utilisation sous forme de complément de rémunération des droits versés sur le compte épargne-temps au titre du congé annuel n’est autorisée que pour ceux de ces droits correspondant à des jours excédant la durée de trente jours fixée à l’article L. 3141-3.
« Art. L. 3151-4. – Les droits acquis dans le cadre du compte épargne-temps sont garantis dans les conditions prévues à l’article L. 3253-8.
« CHAPITRE II
« Champ de la négociation collective
« Art. L. 3152-1. – La convention ou l’accord collectif détermine dans quelles conditions et limites le compte épargne-temps peut être alimenté en temps ou en argent à l’initiative du salarié ou, pour les heures accomplies au-delà de la durée collective, à l’initiative de l’employeur.
« Art. L. 3152-2. – La convention ou l’accord collectif définit les modalités de gestion du compte épargne-temps et détermine les conditions d’utilisation, de liquidation et de transfert des droits d’un employeur à un autre.
« Art. L. 3152-3. – Pour les droits acquis, convertis en unités monétaires, qui excèdent le plus élevé des montants fixés par décret en application de l’article L. 3253-17, la convention ou l’accord collectif établit un dispositif d’assurance ou de garantie.
« Art. L. 3152-4. – Lorsque la convention ou l’accord collectif prévoit que les droits affectés sur le compte épargne-temps sont utilisés, en tout ou partie :
« 1° Pour contribuer au financement de prestations de retraite qui revêtent un caractère collectif et obligatoire déterminé dans le cadre d’une des procédures mentionnées à l’article L. 911-1 du code de la sécurité sociale. Dans ce cas, les droits qui correspondent à un abondement de l’employeur en temps ou en argent bénéficient des régimes prévus aux 2° ou 2°-0 bis de l’article 83 du code général des impôts et aux sixième et septième alinéas de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale ou à l’article L. 741-10 du code rural et de la pêche maritime ;
« 2° Pour réaliser des versements sur un ou plusieurs plans d’épargne pour la retraite collectifs. Dans ce cas, les droits qui correspondent à un abondement de l’employeur en temps ou en argent bénéficient du régime prévu aux articles L. 3332-11 à L. 3332-13 et L. 3332-27 du présent code.
« Les droits utilisés selon les modalités prévues aux 1° et 2° du présent article qui ne sont pas issus d’un abondement en temps ou en argent de l’employeur bénéficient, dans la limite d’un plafond de dix jours par an :
« a) De l’exonération prévue à l’article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale ou aux articles L. 741-4 et L. 741-15 du code rural et de la pêche maritime en tant qu’ils visent l’article L. 242-4-3 du code de la sécurité sociale ;
« b) Et, selon le cas, des régimes prévus aux 2° ou 2°-0 bis de l’article 83 du code général des impôts, pour ceux utilisés selon les modalités prévues au 1° du présent article, ou de l’exonération prévue au b du 18° de l’article 81 du même code, pour ceux utilisés selon les modalités prévues au 2° du présent article.
« CHAPITRE III
« Dispositions supplétives
« Art. L. 3153-1. – À défaut de convention ou d’accord collectif mentionné à l’article L. 3152-3, un dispositif de garantie est mis en place par décret.
« Dans l’attente de la mise en place d’un dispositif de garantie, lorsque les droits acquis, convertis en unités monétaires, excèdent le plafond mentionné à l’article L. 3152-3, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l’ensemble des droits est versée au salarié.
« Art. L. 3153-2. – À défaut de dispositions conventionnelles prévoyant les conditions de transfert des droits d’un employeur à un autre, le salarié peut :
« 1° Percevoir, en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité correspondant à la conversion monétaire de l’ensemble des droits qu’il a acquis ;
« 2° Demander, en accord avec l’employeur, la consignation auprès d’un organisme tiers de l’ensemble des droits, convertis en unités monétaires, qu’il a acquis. Le déblocage des droits consignés se fait au profit du salarié bénéficiaire ou de ses ayants droit dans les conditions fixées par décret. »
II. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au b du 18° de l’article 81 et au e du 1° du IV de l’article 1417, la référence : « L. 3153-3 » est remplacée par la référence : « L. 3152-4 » ;
2° À l’article 163 A, la référence : « L. 3151-1 » est remplacée par la référence : « L. 3151-2 ».
III. – À l’article L. 3334-10 du code du travail, la référence : « L. 3153-3 » est remplacée par la référence : « L. 3152-4 ».
IV. – À l’article 18 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 relative à l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, la référence : « L. 3152-1 » est remplacée par la référence : « L. 3151-1 ».
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Sous couvert de grandes similitudes avec ce qui existe, l’article 4 réorganise les dispositions relatives au compte épargne-temps, ou CET, compte tenu de la nouvelle architecture du code du travail.
Je vous le rappelle, le compte épargne-temps permet aux salariés de stocker des jours de congés ou de RTT non pris, pour les différer ou les convertir en rémunération. Au-delà des bilans qui devraient être réalisés sur ce dispositif et des éventuelles améliorations qui pourraient être proposées – selon les chiffres de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, seulement 12 % des salariés disposent d’un compte épargne-temps –, nous regrettons cette nouvelle rédaction.
Des dispositions particulières jusqu’ici encadrées par la loi, comme les deux articles relatifs à la mise en place de ce compte épargne-temps, tombent à présent dans le champ de la négociation collective, avec toutes les limites et les critiques que nous avons déjà exposées.
Nous opposons donc toujours avec la même constance et la même détermination à cette logique à géométrie variable, entreprise par entreprise.
Plus particulièrement, le compte épargne-temps représente aussi un risque potentiel pour la santé des salariés, qui pourront désormais cumuler et reporter leurs jours de repos devenus fongibles.
Avec un encadrement trop souple renvoyant à la négociation collective, comme cela est proposé ici, nous craignons que la santé des salariés ne soit mise à mal et ne les pousse, par exemple, au burn-out, dans une société où l’intensité du travail ne cesse d’augmenter.
Le Gouvernement n’autorise pas, me semble-t-il, la fongibilité sur les droits à retraite. Il sera peut-être possible à l’avenir de les réduire en reportant la date de prise de la retraite, mais aussi d’inciter les salariés à économiser des jours de repos pour compenser. Nous déplorons cette logique.
C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 4.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La réécriture du CET, dispositif parfois horriblement compliqué, a eu lieu à droit constant, dans un souci de meilleure lisibilité. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet un avis d’autant plus défavorable sur cet amendement que l’argument de l’inversion de la hiérarchie des normes n’est pas pertinent.
Aujourd’hui, le CET, qui relève de la gestion du temps des salariés, est traité à l’échelon de l’entreprise. D’ailleurs, c’est légitime. Je le précise, seuls 12 % des salariés disposent d’un CET ; nous aurons sans doute ce débat lors de l’examen du compte personnel d’activité, le CPA. C’est ce qui a divisé les partenaires sociaux. L’enjeu n’est pas d’éliminer les droits à congés intégrés au CET. Les salariés sont attachés à ce dispositif.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 43.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n°°310 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 321 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 28 rectifié bis, présenté par Mme Lienemann, M. Cabanel, Mme Ghali et M. Gorce, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après la première occurrence du mot :
accord
insérer les mots :
de branche ou
et supprimer les mots :
ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je suis favorable au compte épargne-temps. Il faut qu’il puisse se développer et qu’il soit progressivement introduit dans le compte personnel d’activité.
Toutefois, je ne comprends pas la volonté de mettre en cause le principe de faveur, qui n’est pas de nature à menacer la compétitivité des entreprises en l’espèce. La convention ou l'accord de branche ne sauraient avoir une valeur subsidiaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Il nous arrive de partager certains combats avec Marie-Noëlle Lienemann, au-delà des clivages partisans.
Mme Nicole Bricq. Lesquels ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Je pense par exemple au TAFTA.
Mais, en l’occurrence, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. Accorder la primauté de l’accord de branche sur l’accord d’entreprise constitue un vrai recul législatif, puisque c’est l’inverse qui prévaut depuis 2008.
Le public concerné par le CET est effectivement trop restreint. Comme le soulignait Mme la ministre, cela représente 12 % des salariés, quand 25 % des salariés sont couverts par des accords. Pour diffuser les accords d’entreprise, il faut les favoriser.
En outre, une telle logique est tout à fait cohérente avec l’évolution actuelle, qu’il s’agisse du CPA ou du CET, en matière de gestion des droits.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Si la branche était le niveau pertinent pour le compte épargne-temps, cela se saurait !
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il existe très peu d’accords de branche en la matière, tandis que les accords d’entreprises sont nombreux. Pour développer le CET, ce que nous souhaitons tous, le niveau pertinent est bien celui de l’entreprise.
La nécessité d’examiner avec attention la situation de chacun des champs par rapport à la réalité de la négociation collective s’est imposée à nous dans la rédaction de ce texte.
C’est ce que nous avons fait, en nous attachant notamment aux points de désaccord et à la taille des entreprises pour voir s’il y avait des différences dans certains domaines. Par exemple, sur le temps de travail, très peu d’accords ont été trouvés dans les petites entreprises.
Nous avons toujours un temps de retard, car les dernières analyses de la DARES sur les accords d’entreprise datent de 2013. Grâce à l’open data, nous pourrons sûrement mettre au point de meilleurs dispositifs à l’avenir. Tout cela nous permettra d’avoir une vision plus claire des points à améliorer, pour lesquels la question du mandatement a été posée.
C’est donc dans cette perspective que nous avons cherché le niveau le plus pertinent. Le projet de loi n’a pas pour objet d’imposer en permanence à l’entreprise de trouver un accord : le travail à temps partiel continue par exemple de relever de l’accord de branche. Néanmoins, sur le CET, la pratique depuis 2008 montre que le niveau pertinent est celui de l’entreprise.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’entends bien les propos de Mme la ministre. Mon souci n’est pas d’empêcher toute négociation dans l’entreprise. Au contraire : si nous voulons que cette culture se généralise, des discussions devront avoir lieu au niveau des branches, afin de garantir un cadre minimum pour développer le principe de faveur et le compte épargne-temps.
Pour ma part, j’estime qu’il est assez important de consolider le contenu des accords de branche, et pas simplement de maintenir ce qui est négocié aujourd’hui. Je suis d’ailleurs d’accord avec le Gouvernement sur la reconfiguration des branches. Je souhaite instaurer pour un droit nouveau, dont ne profitent pas tous les salariés et toutes les entreprises, un cadre assez protecteur au niveau général des branches, décliné ou amélioré au niveau des entreprises.
M. le président. La parole est à Mme Evelyne Yonnet, pour explication de vote.
Mme Evelyne Yonnet. Je partage les propos de Mme la ministre.
Le compte épargne-temps est choisi par le salarié et négocié à l’intérieur de l’entreprise. Il concerne donc le fonctionnement direct de l’entreprise, et non une branche professionnelle. Je comprends bien le principe de faveur, mais il ne peut pas être étendu à toutes les branches ; c’est le fonctionnement de l’entreprise qui est fondamentalement en cause.
À l’expiration du CET alimenté par un nombre donné de congés, le salarié bénéficiaire peut prendre des congés, même un an avant de partir à la retraite s’il a cumulé suffisamment de jours, sans préjudice des droits acquis. On est donc bien au niveau de l’entreprise, et non de la branche.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est transférable au niveau de la branche !
Mme Evelyne Yonnet. Mais non ! Cela ne peut pas être uniformisé au niveau de la branche !
Cela touche directement au fonctionnement d’une entreprise. On cumule des jours qu’on ne peut pas prendre, pour plusieurs raisons. À un moment donné, c’est l’employeur qui doit ces jours au salarié.
Il s’agit donc d’une négociation très particulière avec les syndicats qui ne peut avoir lieu qu’au sein de l’entreprise. Je ne vois pas pourquoi on uniformiserait tous les bons accords par des accords de branche, pour laisser à l’entreprise tous les mauvais accords. Lorsque des salariés sont absents ou prennent un an de congé, comme ils en ont le droit, le dysfonctionnement qui en résulte affecte l’entreprise.
Il faut donc bien que ce soit un accord d’entreprise.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Très bien !
M. Philippe Dallier. Très bon argument !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 366 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.
L'amendement n° 599 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Remplacer le mot :
vingt-quatre
par le mot :
trente
La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 366.
M. Jean Desessard. Je le retire, monsieur le président ! (Exclamations amusées.)
M. le président. L’amendement n° 366 est retiré.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l'amendement n° 599.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Selon nous, les jours acquis au titre de la cinquième semaine de congés payés annuels ne doivent pas être versés dans le CET. Ils sont destinés à améliorer les conditions de vie des salariés et à faciliter l’accès de nos concitoyens au tourisme, aux sports et, de manière générale, aux loisirs. Ces congés sont une conquête sociale que nous ne voulons pas voir écornée.
Au-delà de la nécessité de ces congés pour les salariés, nous souhaitons rappeler un élément aux parlementaires qui souhaitent étendre de manière démesurée et, d’ailleurs, contre-productive, le temps de travail, au service bien souvent non de l’économie réelle et de l’entreprise, mais d’un capital anonyme et lointain. La généralisation des congés payés a permis l’essor du tourisme dans notre pays.
Je prendrai l’exemple du littoral vendéen, où le secteur du tourisme représente 6 % de l’emploi salarié. Dès lors, augmenter le temps de travail en revenant sur la durée des congés payés revient tout de même à mettre en difficulté des pans entiers de notre économie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur la situation qui existe depuis de nombreuses années pour le CET. Je conçois qu’elle puisse ne pas satisfaire le groupe CRC, mais il faut garder la petite souplesse actuelle.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Ce n’est pas une petite souplesse !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Ce droit accordé aux salariés est plutôt apprécié et utilisé concrètement. Toutefois, il faut comprendre que cette cinquième semaine ne peut pas être monétisée. C’est un point essentiel. Cette possibilité ne contrevient à aucune disposition européenne, comme l’a constaté la Cour de cassation dans un arrêt du 25 septembre 2013.
Par conséquent, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Caffet
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
L'amendement n° 254 rectifié ter, présenté par Mme Deroche, MM. Retailleau, Allizard, Bignon, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cantegrit, Cardoux et Carle, Mme Cayeux, M. César, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Commeinhes, Cornu, Dallier, Danesi et Dassault, Mmes Debré, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et P. Dominati, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Duranton, M. Emorine, Mme Estrosi Sassone, MM. Falco, Fontaine, B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa, J. Gautier, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grand, Gremillet, Grosperrin, Guené, Houel, Houpert, Huré et Husson, Mme Imbert, M. Joyandet, Mme Kammermann, MM. Karoutchi, Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Malhuret, Mandelli, A. Marc, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Panunzi, Paul, Perrin, Pierre, Pillet, Pinton, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia et MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Trillard, Vaspart, Vasselle, Vendegou, Vial, Vogel et Baroin, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Remplacer les mots :
trente jours
par les mots :
vingt-quatre jours ouvrables au sein de celle
II. – Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le salarié, quelle que soit la taille de l’entreprise, peut, en accord avec l’employeur et dans la limite de cinq jours, renoncer à tout ou partie des journées ou demi-journées de repos acquises en application d’un accord collectif visé à l’article L. 3122-2 du code du travail ou à une partie des jours de congés payés. Les demi-journées ou journées ainsi travaillées donnent lieu à une majoration de salaire au moins égale au taux de majoration de la première heure supplémentaire applicable à l’entreprise. Les heures correspondantes ne s’imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d’heures supplémentaires. »
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Cet amendement vise à donner à un salarié la possibilité de transformer, à sa demande, du temps de repos en rémunération, dans la limite maximale de cinq jours de congés ou de RTT, et en accord avec son employeur. Le paiement de ces jours de congés ou de RTT serait majoré sur le même principe que les heures supplémentaires.
Les employés qui le souhaitent pourraient ainsi augmenter leur temps de travail en entreprise et en tirer un complément de revenus.
Toutefois, comme les congés sont un temps de récupération pour les salariés – ils leur permettent de préserver leur santé –, nous entendons limiter cette possibilité à cinq jours par an. Dès lors, les employés conserveront au minimum quatre semaines de congés annuels. Je rappelle que certaines conventions collectives vont au-delà des cinq semaines de congés légales, auxquelles peuvent s’ajouter les jours de RTT.
Une telle mesure est demandée par des jeunes, notamment dans les entreprises du numérique, où certains n’ont pas forcément la possibilité de partir pendant toutes les vacances et aspirent à travailler un peu plus pour accroître leurs revenus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Cet amendement a suscité un débat en commission.
Le dispositif proposé permettra aux salariés, qu’ils aient ou non un CET, de monétiser leur cinquième semaine de congés payés.
En commission, plusieurs collègues ont fait valoir que le droit au repos devait également rester effectif, pour la santé des salariés.
Mme Catherine Génisson. Les salariés doivent aussi être protégés !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. J’ai bien réfléchi à cet argument. Mais les discussions que j’ai eues avec des acteurs de l’entreprise, salariés ou entrepreneurs, m’ont amené à la conclusion qu’un certain nombre de salariés auto-entrepreneurs prendront officiellement leur cinquième semaine de congés tout en travaillant pour leur propre compte si une telle faculté n’est pas offerte. Par exemple, les maçons iront sur d’autres chantiers. Et ces heures de travail ne seront pas nécessairement déclarées !
Nous devons évidemment avoir à l’esprit l’argument de la santé ; je vous renvoie au débat sur la sécurisation du forfait jours. Mais je ne crois pas que la possibilité de monétiser cinq jours de congés payés mette en péril la santé des travailleurs, qui, à défaut, contourneront de toute façon les dispositions en vigueur.
Au demeurant, Mme la ministre a employé à plusieurs reprises l’argument du contournement, qui me paraît pertinent en l’espèce.
La commission salue l’apport du groupe Les Républicains et émet un avis favorable sur cet amendement !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Les salariés ont évidemment besoin de souplesse pour organiser, éventuellement pour différer leurs congés. Pour eux, c’est un enjeu essentiel. Mais je considère que la monétisation des droits sociaux nuit réellement à leur protection.
Mme Stéphanie Riocreux. Tout à fait !
Mme Myriam El Khomri, ministre. La possibilité de verser la cinquième semaine de congés payés sur le compte épargne-temps est une avancée importante. Mais là, on touche à autre chose.
J’ai effectivement évoqué les multiples contournements du droit du travail, par exemple pour les travailleurs détachés ou les travailleurs indépendants. À cet égard, le fait de fixer la négociation au niveau de l’entreprise permet d’avoir plus de réactivité ; je défends pleinement l’adaptation par le dialogue social. Mais la monétisation des droits sociaux irait à l’encontre du droit au repos et de la protection des salariés.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le rapporteur, ne nous trompons pas de sujet : vous avez évoqué les auto-entrepreneurs, mais nous parlons des salariés !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. On peut être à la fois salarié et auto-entrepreneur !
Mme Nicole Bricq. Le fait que le président du groupe Les Républicains figure parmi les signataires de l’amendement a peut-être eu une incidence sur l’avis favorable de la commission…
Mme Catherine Deroche. Il y a beaucoup d’autres signataires !
Mme Nicole Bricq. Certes. Mais avouez que la signature d’un président de groupe a son importance.
Peut-être a-t-on voulu présenter un amendement miroir du compte épargne-temps, qui peut aussi aboutir à une monétisation. Mais votre proposition va bien au-delà de la logique et de la philosophie du CET.
Le compte épargne-temps permet effectivement à un salarié de monétiser ses congés dans les limites légales, par exemple pour alimenter son compte épargne retraite ; c’est tout à fait envisageable. Mais le CET offre aussi d’autres modalités : des temps de repos spécifiques, une cessation progressive d’activité… Il ne se limite pas à la monétisation.
La loi doit être protectrice des salariés. Je comprends les souhaits de certains jeunes salariés. Mais je préfère qu’ils soient mieux payés, afin de ne pas avoir à monétiser leurs congés aux dépens de leur santé ou de leur accès à la formation.
Par conséquent, à l’instar de Mme la ministre, nous sommes très défavorables à cet amendement. (Très bien ! sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour explication de vote.
Mme Corinne Bouchoux. Nous comprenons l’idée qui sous-tend cet amendement. Elle correspond sans doute à des demandes exprimées par des jeunes de tous horizons, dans tous les domaines d’activité.
Néanmoins, offrir une telle possibilité pour la cinquième semaine de congés payés risque d’inciter certains à demander de le faire aussi pour la quatrième, la troisième ou la deuxième, voire pour l’ensemble des congés payés.
Mme Nicole Bricq. N’ouvrons pas une telle porte !
Mme Corinne Bouchoux. Nous ne voterons donc pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Mes chers collègues, il ne faut rien exagérer : cette proposition est tout de même bien modérée. Il ne s’agit pas de tout casser !
Mme Catherine Deroche. Tout à fait !
M. Olivier Cadic. Chez certains de nos voisins, les salariés n’ont droit qu’à deux semaines de congés payés pendant leur première année de travail. Les dispositions de cet amendement ne sont pas du tout de cette nature.
Je comprends la position de Mme la ministre. Mais il s’agit d’une demande réitérée de la part de salariés qui – il ne faut pas nier cette réalité – doivent parfois accepter des petits boulots, car ils ont véritablement besoin d’argent.
Mme Nicole Bricq. Dans ce cas, payons-les davantage !
M. Olivier Cadic. Certains sont satisfaits de leur situation. Mais d’autres ne le sont pas. C’est à ceux-là que le présent amendement s’adresse. Je remercie mes collègues de l’avoir déposé. Pour notre part, nous le voterons.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je regrette que nos débats se résument une fois de plus à un tout ou rien.
Je reconnais que le dispositif envisagé dans cet amendement va un peu loin.
Mme Nicole Bricq. Ah ! Tout de même !
M. Philippe Dallier. Mais il y a différents cas de figure. Certains salariés travaillent plus de 35 heures par semaine. Ils disposent de RTT et de jours de fractionnement ; ils bénéficient de nombreux dispositifs et totalisent sept ou huit semaines de vacances à la fin de l’année. Honnêtement, cela ne pose pas problème que ces personnes puissent monétiser cinq jours de congés payés, sur la base du volontariat.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Voilà !
Mme Nicole Bricq. C’est l’objet de l’un des amendements suivants !
M. Philippe Dallier. En tant que maire, je suis assez souvent confronté à de telles situations. Les fonctionnaires municipaux de ma commune travaillent trente-sept heures et demie par semaine. Au cours de l’année, ils totalisent sept, huit, parfois neuf semaines de congés payés. Certains d’entre eux viennent me demander s’ils peuvent transformer une partie de ce temps en salaire. Je leur réponds que c’est impossible. C’est dommage : pour certains d’entre eux, ce serait bien utile.
En revanche, je peux comprendre les réserves pour les salariés qui sont aux 35 heures et qui disposent seulement des cinq semaines de congés payés.
Mais je déplore que nous ne puissions pas trouver de compromis.
Mme Nicole Bricq. Eh bien, nous allons chercher !
M. Philippe Dallier. Je n’envisage pas de déposer un sous-amendement, mais je pense qu’une telle mesure serait très utile pour certaines personnes.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. En effet ! N’infantilisons pas les salariés !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour explication de vote.
Mme Catherine Deroche. Mes chers collègues, j’y insiste, le dispositif ne s’appliquerait qu’à la demande du salarié. D’ailleurs, certains employeurs ne l’accepteraient peut-être pas. Ce n’est peut-être pas possible dans toutes les entreprises. (Mme Corinne Bouchoux acquiesce.) Idem pour les collectivités territoriales ; compte tenu de la situation budgétaire, il n’est pas certain que tous les responsables des exécutifs locaux veuillent engager une telle dépense supplémentaire.
Il s’agit simplement d’une faculté, qui répond à un besoin exprimé au sein de nos territoires.
Au demeurant, la loi, tout en conservant le socle intangible des quatre semaines de congés payés, a déjà ouvert des possibilités similaires. Je pense par exemple à la possibilité pour les agents de la fonction publique et les salariés du privé de donner quelques jours de congés ou de RTT à un collègue dont un enfant est malade, disposition que nous avons soutenue à l’unanimité.
Là, il s’agit d’aider de jeunes salariés ayant besoin d’un peu de revenus supplémentaires pour satisfaire des besoins parfois ponctuels, comme acheter une voiture, une maison, ou, tout simplement, s’installer.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur.
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur de la commission des affaires sociales. De très nombreux salariés de TPE ou de PME, dans des situations différentes, demandent à bénéficier d’une telle faculté.
Même si certains patrons refusent cette pratique, elle est déjà très répandue. Elle a cours dans le tiers, voire dans la moitié des entreprises. La monétisation des congés permet de rendre service aux salariés.
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas légal !
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. J’en conviens, madame Bricq. Mais cela se fait ! En fin de période, les congés qui n’ont pas été pris ne sont pas nécessairement supprimés.
Mme Evelyne Yonnet. Et le CET ?
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. Les salariés des TPE n’en ont pas forcément.
Il faut répondre à des demandes et à des situations particulières. Le rejet de cet amendement irait à l’encontre de la volonté des salariés.
Certes, je suis d’accord pour que l’on fixe des barrières, afin d’assurer un contingentement.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. C’est d’ailleurs ce que nous faisons !
M. Jean-Marc Gabouty, rapporteur. Mais, encore une fois, nous parlons d’une pratique qui est déjà courante !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 254 rectifié ter.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 311 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 330 |
Pour l’adoption | 187 |
Contre | 143 |
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° 1000, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
1° Au b du 18° de l’article 81, les mots : « du dernier alinéa de l’article L. 3153-3 » sont remplacés par les mots : « fixées à l’article L. 3152-4 » ;
1° bis Au e du 1° du IV de l’article 1417, les mots : « au dernier alinéa de l’article L. 3153-3 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 3152-4 » ;
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 1001, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Après le mot :
travail,
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
les mots : « deuxième alinéa de l’article L. 3153-3 », sont remplacés par les mots : « 2° de l’article L. 3152-4 ».
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Amendement de correction d’une erreur matérielle.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 5
I. – Lorsqu’une convention ou un accord de branche ou un accord d’entreprise ou d’établissement conclu avant la publication de la présente loi et autorisant la conclusion de forfaits annuels en heures ou en jours est révisé pour être mis en conformité avec l’article L. 3121-62 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la présente loi, l’exécution de la convention individuelle de forfait annuel en heures ou en jours se poursuit sans qu’il y ait lieu de requérir l’accord du salarié.
I bis. – Les 2° et 4° du I et le 3° du II de l’article L. 3121-62 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la présente loi, ne prévalent pas sur les conventions ou accords de branche ou accords d’entreprise ou d’établissement autorisant la conclusion de conventions de forfait annuel en heures ou en jours et conclus avant la publication de la présente loi.
II. – L’exécution d’une convention individuelle de forfait en jours conclue sur le fondement d’une convention ou d’un accord de branche ou d’un accord d’entreprise ou d’établissement qui, à la date de publication de la présente loi, n’est pas conforme aux 1° à 3° du II du même article L. 3121-62 peut être poursuivie sous réserve que l’employeur respecte l’article L. 3121-63 du même code. Sous ces mêmes réserves, l’accord collectif précité peut également servir de fondement à la conclusion de nouvelles conventions individuelles de forfait.
III. – Cessent d’être applicables aux accords collectifs conclus avant la publication de la présente loi les dispositions relatives à la détermination d’un programme indicatif prévues :
1° Au 4° de l’article L. 212-8-4 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 87-423 du 19 juin 1987 relative à la durée et à l’aménagement du temps de travail ;
2° À l’article L. 212-2-1 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 93-1313 quinquennale du 20 décembre 1993 relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle ;
3° À l’article L. 212-8 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail ;
4° Au 1° de l’article L. 3122-11 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail ;
5° À l’article L. 713-16 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction antérieure à la même loi.
M. le président. L'amendement n° 303, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement porte sur le forfait jours. Je précise qu’il s’agit d’un amendement d’appel. Notre groupe souhaite que Mme la ministre nous expose clairement la position du Gouvernement sur le sujet.
Les conventions de forfait jours concernent des publics ayant une grande autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps, dont des cadres, mais aussi d’autres salariés, de plus en plus nombreux, dont le métier ou la fonction ne permet pas de prédéterminer la durée de temps de travail.
Certes, le forfait jours a été très utile ; il a permis d’améliorer à la fois d’améliorer la vie des salariés et leur productivité. Mais, du fait des différentes lois votées entre 2004 et 2012 – je pense notamment la loi Fillon de 2008, qui prévoit la possibilité pour le salarié ayant conclu une convention de forfait jours sur l’année de renoncer, en accord avec son employeur, à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de salaire –, certains salariés travaillent jusqu’à 78 heures par semaine.
C’est pour cela que la Cour de cassation a invalidé plusieurs accords de branche. Dès lors, seule une directive européenne s’applique aujourd'hui. Or elle est bien moins favorable que ne l’était la législation.
Pour les conventions existantes, je comprends la rédaction proposée par le Gouvernement. Mais mes inquiétudes concernent les nouvelles conventions. Je crains que la rédaction actuelle, même si elle vise à sécuriser le dispositif, ne conduise l’employeur à se sentir autorisé à conclure de nouvelles conventions individuelles, en vertu du droit actuel, le droit européen. Il faut éviter que l’on puisse faire un usage détourné du forfait jours.
Nous souhaitons donc que Mme la ministre nous apporte des éclaircissements sur les choix de rédaction qui ont été retenus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission n’est pas favorable à cet amendement. Mais, comme nous avons bien compris qu’il s’agit d’un amendement d’appel, nous en sollicitons le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement.
Je pense aussi qu’il faut favoriser la négociation collective de conventions sur le forfait jours. Je crois que c’est bien l’esprit du texte.
Madame Bricq, comme vous l’avez rappelé, certaines conventions collectives ont été retoquées par la Cour de cassation. L’enjeu pour nous était donc d’apporter les garanties demandées par sa jurisprudence, à la fois sur les modalités de suivi régulier de la charge de travail, sur l’entretien entre le salarié et l’employeur et sur le droit à la déconnexion.
La question que vous soulevez porte sur l’insécurité juridique créée par la jurisprudence. Il serait illusoire de penser que tous les accords et conventions collectives seront renégociés du jour au lendemain.
En cas d’adoption de cet amendement, les employeurs ne pourront plus conclure de nouvelles conventions individuelles de forfait jours jusqu’à ce que l’accord soit renégocié. Cela entraînerait un coût supplémentaire pour l’employeur et une perte d’autonomie pour le salarié, et constituerait un frein à l’embauche de salariés au forfait jours. Ce n’est pas acceptable.
Dans l’article 5, le Gouvernement a souhaité tenir compte des deux paramètres, le premier étant le grand nombre de salariés au forfait jours, soit 1,4 million, et le second le temps nécessaire pour renégocier un accord collectif.
Il y a à la fois la dimension juridique – la codification de la jurisprudence est un élément important – et l’aspect pratique. Que fait l’employeur à partir du moment où il recrute un salarié au forfait jours ? Quel est le droit qui s’applique ?
L’article 5 crée une sorte de corde de rappel pour protéger le salarié. Dès la promulgation de la loi, l’encadrement prévu pour les salariés au forfait jours, qui comprend notamment le suivi régulier et le maintien de la charge de travail, devra être mis en œuvre par l’employeur à travers les normes supplétives.
Nous devons évidemment faire en sorte qu’il y ait plus de négociation. Mais l’adoption d’un amendement ainsi rédigé pourrait nous mettre en grande difficulté par rapport aux nouvelles conventions.
M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 303 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je souhaite toutefois attirer l’attention de Mme la ministre sur le fait qu’il faudrait au moins fixer un délai de renégociation. Dans l’article, c’est ouvert pour l’éternité…
Au demeurant, comme les accords de branche ont été invalidés par la Cour de cassation, c’est le moment d’inviter à renégocier en fonction de la jurisprudence. À défaut, nous serons confrontés au même problème dans quelques années, mais nous serons bien au-delà des 78 heures !
Cela étant, je retire mon amendement.
M. le président. L'amendement n° 303 est retiré.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote sur l'article.
M. Dominique Watrin. Ce débat très important nous incite à procéder à un petit exercice mental.
Il existe à l’évidence une aspiration à travailler différemment dans de larges couches du salariat. D’ailleurs, plus que le modèle social, ce qui est contesté par un nombre croissant de salariés à mesure que le niveau moyen de qualification augmente, c’est peut-être le modèle hiérarchique de nos entreprises.
Mais, force est de le constater, la généralisation relative du forfait jours auprès des personnels d’encadrement censés disposer d’une plus grande autonomie dans la gestion de leur temps de travail peut être une mauvaise réponse à une vraie question, tant cette liberté apparente se trouve vite battue en brèche par la réalité de la charge de travail imposée. De toute évidence, l’existence de ces dispositifs a conduit à de sensibles dépassements du volume horaire travaillé.
Il faut donc en premier lieu marquer une limite stricte entre vie professionnelle et vie familiale des salariés. Des enquêtes montrent le niveau insupportable d’heures de travail effectuées par ces cadres, 46,6 heures en moyenne, d’où la condamnation de la France par différences instances européennes.
Dans le texte de la commission, le forfait jours a été sécurisé. Les conventions ont été repensées pour tenir compte des griefs retenus. Mais certaines garanties offertes, notamment le droit à la déconnexion, ne trouveront pas à s’appliquer. L’article 5 offre même une confirmation a priori des conventions existantes, sous réserve d’adaptation limitée.
Les cadres et salariés employés au forfait jours devront donc se satisfaire de dispositifs à peine améliorés, de même que les nouveaux salariés soumis à ces conventions discutables.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas l’article 5.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5.
(L'article 5 est adopté.)
Article additionnel après l’article 5
M. le président. L'amendement n° 304, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la redéfinition, l'utilisation et l’harmonisation des notions de jour et, en tant que de besoin, l'adaptation de la quotité des jours, dans la législation du travail et de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Cet amendement a pour objet d’encourager le Gouvernement. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous souhaitons qu’il continue dans la voie dans laquelle il s’était engagé lors de l’adoption de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives. Ce texte, alors présenté par M. Mandon, habilitait le Gouvernement à prendre une ordonnance dans les neuf mois suivant sa promulgation pour harmoniser la notion de « jour ». Entre les « jours chômés », les « jours calendaires », les « jours ouvrés » et les « jours ouvrables » – je ne parle même pas des jours carillonnés, car nous sommes dans une enceinte laïque (Sourires.) –, cette notion est un casse-tête pour les employeurs et les salariés !
Le Gouvernement ayant laissé filer les neuf mois, il faut de nouveau légiférer sur ce sujet délicat, qui pose des problèmes de sécurité juridique. On peut en effet se retrouver aux prud’hommes sans avoir forcément voulu malfaire. Cette simplification est d’ailleurs très attendue par les PME.
Mme Catherine Deroche. C’est vrai !
Mme Nicole Bricq. Je peux envisager le retrait de mon amendement, qui n’a d’ailleurs pas de portée juridique. Mais nous voulons vraiment que le Gouvernement s’engage sur ce dossier.
Madame la ministre, c’est donc à vous d’agir auprès de vos services. Au demeurant, je ne suis pas certaine que les services du ministère du travail soient les moins allants dans cette affaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission partage la volonté des auteurs de cet amendement.
Nous avons bien compris qu’il s’agissait d’un sujet majeur lors des auditions ; je pense notamment à celle de Mme Neau-Leduc. Si nous avions eu plus de temps, nous aurions pu envisager de nous y coller nous-mêmes. Mais il est vrai qu’il s’agit d’un travail très compliqué.
Madame Bricq, je connais votre implication dans le travail de simplification. Votre préoccupation est partagée sur l’ensemble des travées.
La commission avait émis un avis favorable sur cet amendement. Bien entendu, il n’y aura aucun souci si Mme Bricq décide de le retirer après avoir entendu les explications du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je sais que M. le président de la commission des affaires sociales n’est pas très favorable aux demandes de rapport. Mais, en l’occurrence, je suis favorable à la proposition de Mme Bricq, car la notion de « jour » est illisible.
Mme Nicole Bricq. Une chatte n’y retrouverait pas ses petits !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il y a des acceptions différentes dans le code du travail et dans celui de la sécurité sociale. La loi évoque les « jours ouvrés », les « jours ouvrables », les « jours francs », les « jours calendaires »… (M. Olivier Cadic applaudit.) Tout cela est illisible et, surtout, source de confusion, pour les salariés comme pour les chefs d’entreprise. Certes, nul n’est censé ignorer la loi. Mais encore faut-il pouvoir la comprendre !
Je voudrais faire un mea culpa. Le Gouvernement avait en effet reçu du Parlement une habilitation pour légiférer par ordonnance. Nous n’avons pas pu prendre cette ordonnance dans les délais impartis tant le travail requis est important. Je vous le dis en toute sincérité, je pensais qu’un rapport sur les jours pouvait être produit en un mois. Or cela ne correspond absolument pas à la réalité.
Je souhaite que nous arrivions à réétudier cette question dans un objectif de simplification et d’harmonisation de toutes ces notions. Le Gouvernement peut s’engager à produire le rapport que vous proposez d’ici à un an. Ce délai nous permettra de recueillir les avis des experts et des partenaires sociaux.
Madame Bricq, je ne sais pas si vous maintiendrez ou non votre amendement, mais sachez que le Gouvernement y est très favorable.
M. le président. Madame Bricq, l'amendement n° 304 est-il maintenu ?
Mme Nicole Bricq. Oui, monsieur le président.
J’observe que M. le président de la commission des affaires sociales ne dit rien. Qui ne dit mot consent ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Madame la ministre, nous sommes le 17 juin. Compte tenu du calendrier électoral, il serait peut-être préférable de fixer la date de remise du rapport au début du mois de mai 2017, et non dans un an. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) En effet, si nous laissons passer les élections, quel que soit leur résultat, le renouvellement des équipes risque de repousser encore l’échéance.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. D’une manière générale, je ne suis pas très favorable aux rapports non plus. Toutefois, en l’espèce, par souci de sécurité, je proposerais de prévoir un délai de neuf mois pour la remise de ce rapport.
M. le président. Madame Bricq, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par M. Requier ?
Mme Nicole Bricq. Oui, monsieur le président.
M. le président. Il s’agit donc de l'amendement n° 304 rectifié, présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, et ainsi libellé :
Après l'article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la redéfinition, l'utilisation et l’harmonisation des notions de jour et, en tant que de besoin, l'adaptation de la quotité des jours, dans la législation du travail et de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement est intéressant.
Par une loi de simplification de la vie des entreprises promulguée en décembre 2014, le Gouvernement avait souhaité obtenir l’habilitation à légiférer par ordonnance sur l’importante question du « jour ».
Comme vous l’avez indiqué, madame la ministre, entre « jours calendaires », « jours ouvrés », « jours francs » ou « jours ouvrables », il est franchement difficile de s’y retrouver.
Le problème est qu’il n’y a pas eu d’ordonnance et que l’article 2 de la loi de décembre 2014 s’est, en quelque sorte, perdu dans les sables, malgré la promulgation de pas moins de soixante-dix ordonnances en 2015 et de quarante-cinq autres textes de même nature depuis le début de l’année 2016.
La portée de l’habilitation est donc désormais caduque. Cela n’a pas permis de résoudre la question posée, qui est en apparence plutôt simple, mais en réalité assez compliquée.
Une première critique peut donc être formulée. Nous voyons que le fait d’exiger de la représentation nationale le recours à la procédure d’habilitation ne constitue aucunement la solution la plus adaptée pour faire avancer plus vite la rédaction de la loi.
Ensuite, il faudra bien convenir que la définition du « jour » est trop incertaine et trop lâche pour permettre de concevoir un code du travail de notre temps.
Faut-il, par exemple, continuer à compter les congés sur les jours ouvrables ou en venir aux jours ouvrés ? Quelles conséquences emporte la banalisation du dimanche dans de trop nombreux secteurs d’activité, une banalisation qui mine désormais gravement la vie de nombreuses familles ? Ce sont ces questions-là qu’il conviendrait de traiter dans un rapport portant sur le sujet, sans oublier de mesurer, éventuellement, ce que coûtent en emplois à la collectivité nationale les horaires décalés et atypiques, les journées à rallonge, les heures supplémentaires à l’excès et les forfaits jours par trop alourdis.
Voilà quelques pistes de réflexion que nous aimerions voir dans le rapport. Nous voterons cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5.
Par ailleurs, je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Organisation des travaux
M. le président. Mes chers collègues, je vous informe que, avec l’accord de la commission et du Gouvernement, nous lèverons la séance publique à dix-neuf heures quarante-cinq, et non à zéro heure trente, comme prévu initialement. Nous devons donc avancer cet après-midi à un rythme soutenu. Je m’emploierai à faire en sorte qu’il en soit ainsi. (Sourires.)
M. Yves Daudigny. Est-ce un accord d’entreprise ou un accord de branche ? (Nouveaux sourires.)
Article 6
(Non modifié)
Le code des transports est ainsi modifié :
1° L’article L. 1321-7 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après les mots : « 5 heures », sont insérés les mots : « pour le personnel roulant et entre 23 heures et 6 heures pour le personnel navigant » ;
b) À la première phrase du deuxième alinéa, la référence : « à l’alinéa précédent » est remplacée par les mots : « au premier alinéa pour le personnel roulant, » ;
2° L’article L. 4511-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La convention ou l’accord collectif de branche étendu ne peut avoir pour effet de porter la durée quotidienne de travail effectif à plus de 14 heures et la durée maximale hebdomadaire de travail à plus de 84 heures. Il ne peut pas non plus avoir pour effet de porter à plus de 72 heures la durée hebdomadaire moyenne de travail calculée sur une période quelconque de 16 semaines consécutives. » ;
3° L’article L. 4511-2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Sans préjudice de l’article L. 1321-8 et du premier alinéa du présent article, le nombre maximal hebdomadaire d’heures de travail des personnels navigants pendant la période nocturne ne peut excéder 42 heures sur une période de sept jours. »
M. le président. La parole est à M. Bernard Vera, sur l'article.
M. Bernard Vera. L’article 6, qui transpose la directive 2014/112/UE, pose un nombre important de problèmes pour les personnels du transport fluvial, qu’ils soient navigants ou qu'ils occupent une autre fonction de bord. Il pose également celui des garanties apportées aux clients recourant aux services de transport fluvial.
Porter la durée quotidienne maximale à quatorze heures, c’est accroître le risque de créer un accident grave, mettant de fait en péril l’intégrité des personnels. Ce risque est d’autant plus réel que le texte prévoit de faire passer la durée maximale du travail hebdomadaire à quatre-vingt-quatre heures, contre soixante heures actuellement.
De la même manière, on ne peut que s’interroger sur la rupture de l’égalité que vous opérez entre personnel navigant et personnel roulant dans la définition de la période de nuit, qui va de vingt-deux heures à cinq heures pour les uns et de vingt-trois heures à six heures pour les autres, sans qu’aucun accord collectif puisse y déroger.
Pourquoi se faire une nouvelle fois l’apôtre du travail de nuit, quel qu’il soit, alors que toutes les études universitaires et celles de l’OMS montrent que celui-ci ne renforce que faiblement la productivité, tout en étant une cause de surmortalité pour les salariés ?
Une autre voie est pourtant possible. C’est celle du respect des droits des salariés et de la préservation de ces droits. En effet, la directive européenne est en réalité facultative. Ainsi, dans son considérant 12, elle indique : « La présente directive ne devrait pas être invoquée pour justifier une réduction du niveau général de protection des travailleurs dans les domaines régis par l’accord. » De plus, l’article 2 dispose : « Les États membres peuvent maintenir ou introduire des dispositions plus favorables que celles prévues par la présente directive. »
Dès lors, pourquoi transposer cette directive en ne la respectant même pas ? Le Gouvernement fait ici le choix de précariser les salariés, en invoquant la transposition d’une directive européenne à laquelle il est parfaitement possible de déroger !
M. le président. L'amendement n° 601, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous proposons de supprimer cet article, qui allonge les durées hebdomadaires de travail pour les salariés du transport fluvial, sous prétexte de transposer la directive européenne. Or cette dernière est facultative dans le cas où les législations nationales seraient plus favorables.
Le mouvement de grève ayant affecté l’établissement public Voies navigables de France, VNF, est là pour nous convaincre de la nocivité de telles dispositions. Il a été particulièrement suivi en Moselle ; mon collègue Patrick Abate pourrait en parler mieux que moi.
Le plan de la direction prévoit que les effectifs d’agents affectés aux canaux à petit gabarit, soit 70 % des personnels de VNF, soient réduits de moitié d’ici à 2020. Comme le souligne le syndicat FO de VNF : « La gestion hydraulique, tout au long de l’année week-end et jours fériés compris, doit rester du domaine de l’humain. La réactivité d’un être humain est bien supérieure à celle d’un automate. La sécurité des biens et des personnes nécessite impérativement de maintenir au minimum les effectifs 2015. »
Les personnels de VNF affectés au réseau pour petit gabarit contestent aussi le projet de la direction visant une réorganisation en basse saison du travail sur la semaine.
Cette réforme faisant passer l’organisation de la gestion hydraulique à cinq jours sur sept, contre sept jours sur sept actuellement, induirait une perte de salaire allant de 200 à 250 euros par mois pour les agents.
Les personnels ont obtenu des garanties quant à leurs conditions de travail. Or cet article 6, qui transcrit une directive européenne facultative et régressive sur le travail de nuit, va remettre en cause cet accord. C'est la raison pour laquelle nous sommes totalement convaincus de la nécessité de le supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
L’heure de nuit, qui se déclenche à vingt-deux heures, se déclenchera à vingt-trois heures dans le nouveau régime. Cette question fait écho au débat que nous avons eu hier sur le déclenchement du travail de nuit. La réflexion que nous avons engagée est donc pertinente au regard de certaines exceptions. (M. Olivier Cadic acquiesce.)
Pour en revenir à la navigation fluviale, l’article 6 procède à la transposition de la directive européenne. Il convient donc de le maintenir en l’état.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je ne mésestime pas la situation qui existe à VNF. Toutefois, je me permets de le souligner, c’est le ministère des transports qui a demandé la transposition de cette directive, plus protectrice que le droit actuel. Il ne s’agit pas là d’une augmentation de la durée du travail.
L’article 6 modifie la plage horaire pour le personnel navigant, fixée entre vingt-trois heures et six heures, contre vingt-deux heures et cinq heures actuellement.
Surtout, l’article protège mieux le salarié, notamment en prévoyant des limitations du temps de travail, qui n’existaient pas auparavant. Les dispositions prévues dans le code des transports ne prévoient actuellement aucun encadrement des durées de travail.
Enfin, il introduit une limitation du temps de travail réalisé par un travailleur nocturne pendant la période de travail nocturne. C’est une notion nouvelle en droit français, où seul le temps de travail des travailleurs de nuit est encadré.
Ces deux nouvelles dispositions, limitation du temps de travail effectué par un travailleur de nuit pendant la période nocturne et limitation du temps de travail d’un travailleur de nuit, s’appliquent sans préjudice de l’une ou de l’autre.
Ces mesures n’ont aucun effet sur la durée du temps de travail. Elles sont plus protectrices que le système actuel.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Un profane qui voudrait consulter les dispositions relatives au temps de travail les trouverait non pas dans le code du travail, mais dans celui des transports ! Cela prouve bien que notre droit du travail est illisible.
Nous y reviendrons lors de l’examen d’autres articles. Il faut toiletter le code du travail pour rendre le droit plus lisible. Toutes les dispositions relatives au droit du travail doivent être rassemblées dans le code du travail, de même que les mesures pénales doivent être rassemblées dans le code pénal.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 601.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 312 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 312 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 6.
(L'article 6 est adopté.)
M. Yves Daudigny. On a sauvé l’article 6 !
Titre II
Favoriser une culture du dialogue et de la négociation
Chapitre Ier
Des règles de négociation plus souples et le renforcement de la loyauté de la négociation
Articles additionnels avant l'article 7 A
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 255 rectifié bis, présenté par M. Retailleau, Mme Deroche, MM. Allizard, Bignon, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, MM. Cantegrit, Cardoux et Carle, Mme Cayeux, M. César, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Cornu, Dallier, Danesi et Dassault, Mmes Debré, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et P. Dominati, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Duranton, M. Emorine, Mme Estrosi Sassone, MM. Falco, Fontaine, J.P. Fournier, Frassa, J. Gautier, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Grand, Gremillet et Grosperrin, Mme Gruny, MM. Guené, Houel et Houpert, Mme Hummel, MM. Huré et Husson, Mme Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi, Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy, Longuet, Malhuret, Mandelli, Masclet et Mayet, Mmes M. Mercier et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul, Perrin, Pierre, Pillet, Pinton et Pointereau, Mmes Primas et Procaccia et MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Revet, Savary, Savin, Trillard, Vaspart, Vasselle, Vendegou, Vogel et Baroin, est ainsi libellé :
Avant l'article 7 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 1er de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi est abrogé.
II. – La deuxième partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° Les articles L. 23-112-2 et L. 23-114-2 sont abrogés ;
2° Le livre IV est ainsi modifié :
a) Le 20° de l’article L. 2411-1 est abrogé ;
b) La section 15 du chapitre Ier du titre Ier est abrogée ;
c) Le 16° de l’article L. 2412-1 est abrogé ;
d) La section 16 du chapitre II du même titre Ier est abrogée ;
e) Le 7° de l’article L. 2421-2 est abrogé ;
f) Le 8° de l’article L. 2422-1 est abrogé ;
g) Le chapitre X du titre III est abrogé.
La parole est à Mme Catherine Deroche.
Mme Catherine Deroche. Cet amendement vise à supprimer les commissions paritaires régionales interprofessionnelles dans les petites entreprises. Nous avions eu ce débat lors de l’examen de la loi Rebsamen. Nous sommes constants dans nos positions.
M. le président. L'amendement n° 838 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l'article 7 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 23-113-2 du code du travail, dans sa rédaction résultant de l’article 1er de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, est ainsi modifié :
Après les mots : « accès aux entreprises », les mots : « , sur autorisation de l’employeur » sont supprimés.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. La loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi a donné lieu à la création de commissions paritaires régionales interprofessionnelles, ce qui constitue un point positif en termes de démocratie sociale.
Cependant, dès le départ, la portée de cette mesure a été grandement limitée par l’obligation pour les représentants du personnel membres de ces commissions paritaires d’obtenir l’autorisation du chef d’entreprise pour pénétrer dans les locaux où travaillent les salariés.
Dans ces conditions, il leur est impossible de réaliser pleinement leurs missions, notamment aller à la rencontre des salariés pour discuter de leurs problèmes, les conseiller au plus proche du terrain et se rendre compte de la réalité de leurs conditions de travail pour mieux les représenter.
Ainsi, cette mesure permet au chef d’entreprise d’entraver éventuellement la démocratie sociale, puisqu’elle lui donne les moyens d’empêcher les représentants des salariés d’assumer leurs responsabilités.
Il n’est pas inutile de rappeler que cette possibilité d’accès au lieu de travail des salariés existe déjà pour d’autres représentants des salariés extérieurs à l’entreprise, comme le conseiller assistant le salarié lors d’un entretien préalable au licenciement.
Il s’agit donc de concrétiser l’ambition que tous affichent, du moins dans les mots, de démocratiser le monde de l’entreprise, afin que cela ne reste pas un vœu pieux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission reste sur la position que le Sénat avait défendue voilà un an, lors de l’examen de la loi Rebsamen et émet un avis favorable sur l’amendement présenté par Mme Deroche.
En revanche, l’avis est défavorable sur l’amendement n° 838 rectifié, qui vise à donner aux représentants des salariés un accès aux entreprises sans l’accord de l’employeur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je ne rouvrirai pas le débat que vous avez eu lors de l’examen de la loi Rebsamen.
À mes yeux, les commissions paritaires régionales interprofessionnelles, qui seront mises en place au 1er juillet 2017, sont très importantes. Elles permettront d’assurer la représentation des salariés dans les petites entreprises.
Mme Nicole Bricq. Bien sûr !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Après l’adoption de la loi Rebsamen, j’ai rencontré les organisations patronales. J’ai eu des échanges dans les territoires. Je puis vous le dire, les commissions de ce type apportent un vrai plus dans l’artisanat ou l’agriculture. Il faut sortir des discours anxiogènes.
Idem pour le mandatement. Les chefs d’entreprise craignent de voir des représentants syndicaux de l’appareil débarquer dans leur entreprise alors qu’il s’agit en réalité d’un salarié de l’entreprise.
Nous avons l’occasion de mettre en place des outils permettant d’améliorer la situation et de sortir de ces affrontements. Si l’on veut une culture du compromis, chacun doit faire un pas.
Mme Éliane Assassi. N’est-ce pas ? (Sourires sur les travées du groupe CRC.)
Mme Myriam El Khomri, ministre. En matière de représentation des salariés des entreprises, je suis plutôt fière de la création des commissions paritaires régionales interprofessionnelles.
Comme je l’ai indiqué, les commissions mises en place volontairement dans l’artisanat et l’agriculture ont tout leur intérêt.
Une telle mesure est de nature à apporter un appui aux TPE. Culturellement, il faut avancer sur cette question.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Nous avons eu le même débat l’année dernière, lors de l’examen de la loi Rebsamen.
Il est vrai que vous êtes constants, chers collègues de la majorité sénatoriale. Vous n’acceptez pas la territorialisation des branches. Mais cela va à l’encontre la République décentralisée à laquelle vous êtes attachés. Je n’arrive pas à comprendre votre logique.
Nous n’allons pas supprimer cette année les dispositions votées l’année dernière. Les commissions paritaires régionales interprofessionnelles vont être mises en place. Elles seront utiles pour la négociation collective.
Les positions, d’une part, de la droite et, d’autre part, du groupe CRC sont typiques de ce qui prévaut parfois dans nos débats. Les uns veulent démolir la loi ; les autres ne veulent rien faire.
Nos collègues communistes défendent un amendement visant à permettre aux représentants des salariés des petites entreprises d’accéder aux locaux de l’entreprise sans l’accord de l’employeur. Mais ce n’est pas par une logique aussi conflictuelle que l’on fera avancer la négociation ! Il est normal qu’un représentant des salariés prévienne l’employeur de son arrivée.
Les uns comme les autres veulent bloquer toute possibilité d’évolution. Nous, nous voulons avancer. Nous sommes donc contre ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Madame Bricq, si l’on crée des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, il faut leur donner un minimum de compétences et de possibilités d’action. On peut évidemment discuter des formes et des moyens. La question que nous soulevons me paraît tout à fait pertinente.
Mais je souhaite m’exprimer sur l’amendement n° 255 rectifié bis. Certains ont manifestement du mal à assumer le dialogue social, qu’ils n’ont pourtant de cesse d’invoquer. Cet amendement est une véritable déclaration de guerre – je crois que c’est la formule qui convient – au monde du travail. La première mesure consiste à supprimer toute représentation syndicale dans les entreprises de moins de dix salariés. Telle serait en effet la conséquence de la suppression des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, qui ont vocation à être le lieu de discussion et de règlement des conflits pour les petites entreprises. Il serait bien dommage de supprimer toute possibilité de concertation dans ces entreprises !
L’adoption d’un tel amendement priverait du droit à la représentation plus de 3 millions de salariés des TPE de moins de dix salariés, soit plus de 80 % des entreprises de notre pays ; ce n’est tout de même pas rien !
Au demeurant, comme le groupe Les Républicains propose par ailleurs de relever à vingt salariés le seuil au-delà duquel l’élection d’un délégué du personnel est obligatoire, ce sont au total plus de 4,5 millions de salariés qui seraient privés de toute représentation syndicale, y compris par un délégué sans étiquette confédérale !
Pour nous, la modernité – nous ne sommes pas pour le statu quo – commande l’existence d’un véritable dialogue social. Nous souhaitons même le renforcer. Nous avancerons des propositions en ce sens tout au long du débat.
Nous voterons contre l’amendement n° 255 rectifié bis, dont l’adoption entraînerait une régression !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 255 rectifié bis.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est favorable et que celui du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 313 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 186 |
Contre | 153 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l’article 7 A, et l'amendement n° 838 rectifié n'a plus d'objet.
Article 7 A (nouveau)
I. – Aux articles L. 2312-1 à L. 2312-4 du code du travail, le nombre : « onze » est remplacé par le nombre : « vingt ».
II. – L’article L. 2312-5 du même code est abrogé.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 45 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 392 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.
L'amendement n° 938 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 45.
M. Dominique Watrin. L’article 7 A, qui a été ajouté dans le projet de loi par la commission des affaires sociales au nom de la simplification de la vie des entreprises, relève le seuil d’élection obligatoire d’un délégué du personnel.
Faire ce choix aurait pour conséquences immédiates de priver plus de 1,5 million de salariés du droit d’être représentés et plus de 100 000 entreprises d’un interlocuteur au moins entre le personnel et l’employeur. Dans le secteur de la construction, ce sont la moitié des salariés qui n’auraient plus de délégué. Il en serait de même dans de nombreuses branches du commerce et des services.
En d’autres termes, si cet article était maintenu, nous abandonnerions des millions de salariés, près de 5 millions au total, dans une sorte de zone de non-droit, où il n’y aurait ni délégués ni accords d’entreprise. Au moment même où tout le monde parle de dialogue social, ce serait pour le moins contradictoire !
Officiellement, il s’agit de libérer les petites entreprises de contraintes, jugées trop fortes, qui leur seraient imposées. L’argument est un peu court. En réalité, le vrai problème qui se pose aux petites et moyennes entreprises, en particulier dans celles qui comptent moins de 20 salariés, est leur positionnement économique dans leur branche d’activité. On peut parler aujourd’hui de vassalisation progressive des PME par de grands groupes donneurs d’ordres, qui soumettent les chefs de petites et moyennes entreprises à des pressions sur les coûts souvent insupportables. Nous dénonçons fermement cette situation, qui est, selon nous, la véritable cause des difficultés rencontrées par la plupart des petites structures.
Encore faut-il ajouter à ce problème les difficultés d’accès au crédit bancaire, qui sont régulièrement signalées ; la délégation sénatoriale aux entreprises en a fait le tour.
À notre avis, c’est dans ces directions qu’il faudrait orienter nos efforts, pour nous attaquer vraiment aux difficultés des TPE et PME.
L’article 7 A est inacceptable ; il faut le supprimer !
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour présenter l'amendement n° 392.
Mme Corinne Bouchoux. Mon argumentation sera un peu différente de celle de M. Watrin.
Toutefois, il est effectivement très paradoxal de vouloir s’approcher au plus près des entreprises et nourrir le dialogue social en leur sein sans prévoir la désignation d’interlocuteurs aguerris à cet exercice.
Il est même contradictoire de se réclamer de la philosophie qui a inspiré la commission, une philosophie que moi-même et la plupart des membres de mon groupe n’approuvons pas, tout en cherchant à neutraliser les plus petites entreprises !
Il y a sans doute des petites entreprises tout à fait conviviales qui ne posent aucune difficulté. Mais on ne peut pas préjuger qu’il n’existe aucun problème nulle part !
Sous une autre ère – si je ne m’abuse, c’était en 2005 –, on avait envisagé, histoire de poser le débat sans le poser, de ne pas comptabiliser les salariés de moins de vingt-six ans. Cela aurait permis de relever le seuil par un moyen détourné.
Il est quelque peu paradoxal de la part de partisans de ce texte, qui entendent tout situer au niveau de l’entreprise, de vouloir ainsi dévitaliser le dialogue social !
La mesure adoptée par la commission ne nous paraît vraiment pas une bonne idée. Certes, les seuils peuvent poser des problèmes que nous ne mésestimons pas. Mais la position de la commission nous paraît un peu trop radicale. Si l’on veut du dialogue social, il faut des partenaires aguerris à même de discuter !
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 938.
Mme Myriam El Khomri, ministre. À l’instar de Mme Bouchoux, j’invite le Sénat à supprimer cet article, qui relève les seuils.
Je souscris à l’objectif, très largement partagé dans cet hémicycle, de faciliter la vie des entreprises, notamment les TPE et les PME. On me reproche suffisamment par ailleurs les mesures prévues par le projet de loi en leur faveur ! Je pense par exemple à la modulation du temps de travail sur neuf semaines et au service d’appui dédié à ces entreprises, qui ne disposent pas d’une armée d’experts juridiques pour les aider sur le droit du travail.
Mme Nicole Bricq. C’est très important, en effet !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je pense aussi à la définition du licenciement économique et aux accords types de branche, essentiels pour les TPE et PME, ainsi qu’aux mesures liées au groupement d’employeurs.
Je défends avec vigueur toutes ces dispositions. Les chefs d’entreprise ont besoin de développer leur activité. Il y a des emplois à la clé.
Mais je m’oppose avec la même vigueur à ce qui touche aux seuils. Le projet de loi porte sur la démocratie sociale. Or je pense que le relèvement des seuils serait une régression pour la démocratie sociale et pour les droits des salariés !
Les délégués du personnel, les sections syndicales et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les CHSCT, sont autant d’instances qui s’intéressent au quotidien des salariés, veillent au respect de leurs droits de ceux-ci et protègent leur santé et leurs conditions de travail. Au moment où l’on affirme qu’il faut développer la négociation au niveau de l’entreprise, on ne peut pas limiter la présence syndicale ; elle est essentielle ! (Mme Corinne Bouchoux acquiesce.)
Nous voulons poser les bases de la démocratie sociale dans l’entreprise, pour permettre aux salariés de faire entendre leur voix et passer d’une culture de l’affrontement à une culture du compromis. On ne peut pas y parvenir sans interlocuteurs mobilisés pour défendre les droits des salariés !
Par ailleurs, ce débat, qui a déjà eu lieu au Sénat l’été dernier, lors de l’examen de la loi Rebsamen, me paraît inutile. Remonter les seuils, c’est aussi en créer de nouveaux !
Mme Nicole Bricq. Absolument !
Mme Myriam El Khomri, ministre. On compare tout le temps notre situation à celle de l’Allemagne. En Allemagne, une représentation est assurée à partir de cinq salariés. (M. Olivier Cadic s’exclame.) Il faut voir aussi cette réalité-là !
Ces instances n’existent pas pour faire plaisir à tel ou tel. Elles ont évidemment vocation à protéger les intérêts des salariés, mais aussi à permettre le règlement de situations conflictuelles par le dialogue et, plus généralement, l’organisation du dialogue. D’ailleurs, les chefs de PME disent eux-mêmes qu’ils ont besoin d’interlocuteurs.
Mme Nicole Bricq. C’est évident !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Selon moi, la solution n’est pas de relever les seuils. Il faut des instances adaptées à la taille des entreprises.
C’est tout le travail que vous avez mené autour de la loi relative au dialogue social et à l’emploi. Je pense à l’élargissement jusqu’à 300 salariés de la délégation unique du personnel, qui comprend désormais le CHSCT, à la mise en place par accord d’institutions communes dans les entreprises de moins de 300 salariés, à la réforme du fonctionnement des instances et à la diminution du nombre des réunions.
Voilà autant d'avancées très concrètes en direction des entreprises ! Sans doute avons-nous publié les décrets avec un peu de retard ; au ministère du travail, chaque décret doit être négocié avec l’ensemble des partenaires sociaux. Ces mesures, qui contribueront à améliorer la vie des entreprises, permettront aussi que le dialogue social soit perçu non comme une contrainte, mais comme un outil au service de l’amélioration du climat dans les entreprises !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces trois amendements identiques.
Ce n’est pas par idéologie qu’elle a introduit l’article 7 A dans le texte. Elle a considéré un certain nombre de travaux mettant en évidence des effets de bord significatifs – j’ai des graphiques sous les yeux –, en particulier au niveau des seuils de dix, vingt et cinquante salariés. Il y a un nombre significatif d’entreprises qui ne franchissent pas ces différents seuils.
D’ailleurs, ce n’est pas nécessairement le fait des obligations liées aux instances dont nous parlons. Cela peut aussi être lié à tout un ensemble de normes fiscales et sociales applicables à partir de ces seuils. (M. Jean-Marie Vanlerenberghe acquiesce.)
Certains chiffres sont particulièrement édifiants. Ainsi, en Allemagne, la part des entreprises de quarante-huit ou quarante-neuf salariés est 1,8 fois supérieure à celle constatée en France. Ce chiffre nous éclaire sur les surcoûts associés au franchissement des seuils.
Un autre document, établi en liaison avec la délégation sénatoriale aux entreprises, récapitule les obligations qui se déclenchent au niveau des différents seuils en Allemagne et en France. La colonne de notre pays est nettement plus remplie que celle de notre voisin.
C’est pourquoi la commission a décidé d’adapter les seuils. Cette mesure, qui, je ne le nie pas, est assez importante, devra peut-être nous conduire à repenser les règles pour les entreprises situées sous les seuils. Il faudra sans doute trouver une manière différente d’appréhender les notions de sécurité et d’association des salariés.
De ce point de vue, l’Allemagne ne fait pas rien. L’employeur est tenu de s’adjoindre les prestations de professionnels de santé. En France, nous avons le CHSCT.
En somme, nous appelons à une réflexion véritablement innovante. Je pense en effet que nous avons passé l’ère des petits ajustements consistant à déplacer un curseur de plus ou moins 10 %. Il y a quelques big bang à faire, dont la réforme des seuils.
C’est pourquoi la commission est attachée au maintien de l’article 7 A.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Selon les estimations du ministère, les salariés sont aujourd’hui 750 000, femmes et hommes de tous âges, professions et conditions, à consacrer une part de leur temps de travail, voire de leur temps libre, au dialogue social.
Ainsi, bien qu’on insiste régulièrement sur la faible implantation des syndicats, la majorité des entreprises de plus d’onze salariés disposent aujourd’hui d’au moins un représentant du personnel.
Si celui-ci n’est pas toujours syndiqué dans l’une des organisations confédérées représentatives, la majorité des élus du personnel est composée de salariés syndiqués. Les mandataires syndicaux sont aujourd’hui au nombre de 400 000. Il est de notoriété publique que nombre de ces délégués ne sont pas affiliés à une organisation. Beaucoup veulent s’éviter les foudres de l’arbitraire patronal, qui continue tout de même d’alimenter la chronique juridique en licenciements de salariés dits protégés.
Pour plus d’un tiers, ces salariés sont des ouvriers, qualifiés ou non. Cela tend à prouver que la classe ouvrière n’a pas encore tout à fait disparu du paysage social de notre pays, contrairement à ce que voudraient certains.
Il s’agit aussi assez souvent de salariés dont la formation initiale est relativement faible. La proportion de délégués dont le diplôme est proche ou inférieure au bac est identique à la part des salariés ayant le même niveau de formation dans la population active. En d’autres termes, les salariés délégués du personnel sont à l’image du monde salarié d’aujourd’hui. C’est un fait qu’il est important d’avoir à l’esprit.
Par ailleurs, les délégués ont souvent une certaine ancienneté dans leur entreprise, souvent supérieure à dix ans. Cela prouve que leur action est de qualité et ne fragilise pas les entreprises. La question qui se pose souvent est plutôt celle du rajeunissement des cadres syndicaux.
Les délégués représentatifs des personnels acquièrent une véritable culture syndicale professionnelle ouvrière qui échappe aux codes traditionnels et favorise l’épanouissement des individus.
Je pense que ces délégués sont aujourd’hui des atouts pour les entreprises. Cela se manifeste particulièrement lorsque certaines, notamment des PME, sont en situation de fragilité et que les salariés reprennent les activités en coopérative. Oui, cette culture des délégués est importante pour l’avenir de nos petites entreprises !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 45, 392 et 938.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe CRC et, l'autre, de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 314 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 153 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 201 rectifié est présenté par Mme Deromedi, M. Bouchet, Mme Cayeux, MM. Chasseing, Doligé, Frassa et Gremillet, Mme Gruny et MM. Husson, Laménie, Magras, Masclet, Morisset, Pellevat et Soilihi.
L'amendement n° 250 rectifié bis est présenté par MM. Cadic et Canevet, Mmes Billon et Gatel et MM. Bockel, Delahaye, Guerriau, Longeot et Pozzo di Borgo.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
vingt
par le mot :
cinquante
La parole est à Mme Jacky Deromedi, pour présenter l’amendement n° 201 rectifié.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement est retiré, monsieur le président.
Mme Nicole Bricq. Quel dommage !
M. le président. L'amendement n° 201 rectifié est retiré.
La parole est à M. Olivier Cadic, pour présenter l'amendement n° 250 rectifié bis.
M. Olivier Cadic. Comme l’a brillamment rappelé M. le rapporteur, les effets de seuil posent un vrai problème pour les entreprises de notre pays. C’est d’ailleurs la raison d’être de l’article 7 A.
J’ai bien écouté les explications de Mme la ministre sur le sujet. Toutefois, comme l’a indiqué M. le rapporteur, les effets de seuil ne créent pas uniquement des difficultés au niveau de la mise en place des délégués du personnel. En effet, le franchissement des seuils augmente fortement les coûts pour les très petites entreprises, les TPE.
Mon amendement repose sur l’idée qu’il faut fixer le seuil d’élection des délégués du personnel à cinquante salariés, conformément au seuil retenu pour les très petites entreprises au sens communautaire.
En matière d’organisation et de dialogue social, les pays anglo-saxons développent pour les TPE ou les petites et moyennes entreprises, les PME, ce qu’on appelle le management par la qualité : une entreprise ne peut pas réussir si, parmi ses salariés, personne ne travaille ensemble. Des commissions et des groupes de travail sont donc mis en place et déterminés selon les entreprises.
Au sein de la délégation aux entreprises du Sénat, nous avons cherché à promouvoir ce management par la qualité en encourageant le développement de « diplômes » qui contribuent à valoriser les entreprises utilisant ce type d’instruments. Le management par la qualité accroît à la fois le bien-être et un dialogue social de très haute qualité dans l’entreprise. En revanche, les règles sont beaucoup plus souples, parce que ce modèle fait appel à la responsabilité des acteurs.
M. le président. L'amendement n° 605, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
vingt
par le mot :
cinq
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Avec cet amendement, nous proposons de ramener à cinq le nombre de salariés nécessaires à l’élection d’au moins un délégué du personnel dans les entreprises. Nous proposons donc l’inverse de ce que préconise la majorité sénatoriale !
L’objet de notre amendement repose non seulement sur l’aspiration profonde d’un monde du travail qui souhaite pouvoir donner son point de vue sur la vie de l’entreprise, son devenir et ses choix, bref qui souhaite participer à un collectif de travail, mais aussi sur les expériences étrangères, et notamment sur celle d’un grand pays voisin, l’Allemagne.
Les Allemands ont en effet réformé leur marché du travail mais ont laissé la possibilité aux entreprises de plus de cinq salariés de constituer un Betriebsrat ou conseil d’entreprise, et ce, rappelons-le, sans qu’il soit nécessaire pour l’employeur d’être directement impliqué dans l’organisation du scrutin conduisant à l’élection du responsable dudit conseil.
Doter notre pays de délégués du personnel élus dans toutes les entreprises de cinq salariés et plus serait un facteur important de dynamisation et donc de compétitivité pour nos entreprises. C’est donc pour le bien de l’économie française en général qu’il conviendrait d’adopter cet amendement innovant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements restant en discussion ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements, le premier qui vise à relever à cinquante salariés, le second à abaisser à cinq salariés, le seuil d’effectif à partir duquel l’élection des délégués du personnel devient obligatoire. En effet, la commission estime avoir trouvé un équilibre avec l’article 7 A en relevant ce seuil à vingt salariés.
En présentant l’amendement n° 605, Mme Brigitte Gonthier-Maurin s’est référée à l’exemple allemand. Si ce n’est qu’en Allemagne la représentation du personnel n’est possible dans les entreprises de plus de cinq salariés que sur accord d’entreprise, et donc, d’une certaine façon, selon les modalités retenues à l’article 2 du présent projet de loi ! En d’autres termes, il faut que les partenaires soient d’accord pour que le seuil soit abaissé.
Votre amendement vise, quant à lui, ma chère collègue, à rendre cette représentation du personnel obligatoire, ce qui est tout de même un peu différent du modèle évoqué…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. J’ai dit qu’il s’agissait d’un amendement innovant ! (Sourires.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Moyennant votre ralliement à la logique de l’article 2 et votre vote en faveur de l’ensemble du projet de loi, on pourrait en effet progresser ensemble dans la voie de l’innovation ! (Rires sur l’ensemble des travées.) Je disais cela uniquement pour détendre l’atmosphère, laquelle n’est d’ailleurs pas tendue et est tout à fait sereine.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement est également défavorable aux deux amendements. Je me suis en effet déjà expliquée tout à l’heure sur la question des effets de seuil.
S’agissant de l’amendement n° 605, je tiens à rappeler que nous avons créé des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, les CPRI, qui seront mises en place à compter du 1er juillet 2017 et qui auront pour mission de faire valoir les intérêts des salariés. Leurs membres seront élus, puisque les salariés auront la possibilité de voter pour des syndicats qui les représentent. En outre, les CPRI pourront intervenir en cas de médiation et dans beaucoup d’autres situations, même si elles ne disposent pas du pouvoir de négocier.
Selon moi, elles représentent un point d’appui pour les salariés de toutes les TPE. Par la suite, il faudra peut-être encourager les expérimentations, mais je rappelle que cette disposition vient juste d’être introduite dans le cadre de la loi relative au dialogue social et à l'emploi.
S’agissant ensuite de l’amendement n° 250 rectifié bis, je précise que l’ANI de 2013 accorde un délai de un an aux entreprises qui franchissent un seuil pour revenir « dans les clous » de la loi. Avec cette mesure qui constitue une réelle avancée, nous cherchions à éviter de créer trop de contraintes.
Le Gouvernement essaie aujourd’hui de mettre en œuvre des dispositifs plus efficaces, avec le moins de formalisme possible, tout en maintenant une représentation syndicale selon les seuils actuels.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° 250 rectifié bis.
Mme Nicole Bricq. Au moment où l’on cherche à donner davantage de souplesse aux entreprises pour négocier des accords, il est paradoxal de vouloir supprimer le seuil de cinquante salariés, qui rend pourtant obligatoire la mise en place des comités d’entreprise.
Ce seuil de cinquante salariés est un totem pour la droite : chaque fois, vous y revenez ! D’ailleurs, vous considérez vous-même, monsieur le rapporteur, que le seuil actuel est défavorable à l’emploi : il existerait selon vous beaucoup d’entreprises de quarante-neuf salariés. Pour ma part, je n’entrerai pas dans le fond du sujet.
En revanche, je me souviens qu’à l’occasion de la loi Rebsamen nous avons voté une disposition accordant aux entreprises un délai de trois ou quatre ans – je ne sais plus –, en tout cas un délai relativement long, pour s’adapter à la nouvelle donne en matière de comité d’entreprise. Or cette mesure met totalement à bas l’argumentation de M. Cadic sur le coût engendré par le franchissement des seuils.
La démocratie, qu’elle soit dans l’entreprise, sociale ou politique, a certes un coût – nous représentons d’ailleurs l’un de ces coûts ! – mais favorise la discussion. Je ne prononcerai pas ici l’éloge de la démocratie, mais quand même… Il n’y a aucune raison de ne pas laisser l’entreprise en bénéficier au même titre que la société dans son ensemble. La demande de démocratie correspond d’ailleurs à une demande sociale très forte.
Par ailleurs, vous savez que les nombreux intérimaires et salariés employés en contrat à durée déterminée qui travaillent aujourd’hui dans les entreprises ne sont pas comptabilisés parmi les salariés qui servent au calcul du seuil d’effectif de cinquante salariés. Les contrats aidés ne le sont pas davantage, pas plus que les contrats de génération dans le secteur privé. Vous fustigez ces contrats mais il en existe tout de même plusieurs dizaines de milliers !
M. Philippe Dallier. Seulement 50 000 !
Mme Nicole Bricq. Quant aux temps partiels et aux stages, ils sont comptabilisés en fonction des heures effectuées et non en termes d’unités de production.
Franchement, avec vous, c’est toujours plus de coups de boutoir et toujours moins de droits pour les salariés !
Comme l’a dit Mme la ministre – et j’en suis moi-même personnellement convaincue –, la négociation a horreur du vide…
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Nicole Bricq. … et on a toujours besoin d’avoir en face de soi des personnes qui ne sont pas du même avis. C’est la démocratie et nous la voulons dans l’entreprise. C’est pourquoi nous voterons évidemment contre l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. Madame Bricq, en tant qu’entrepreneur, je fais toujours en sorte de recruter des salariés qui ne pensent pas comme moi. En effet, quand tout le monde pense la même chose, il n’y en réalité qu’une seule personne qui pense !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. C’est une vertu !
M. Olivier Cadic. On n’a pas besoin d’avoir recours au droit du travail ni à un texte comme celui-ci pour s’entourer de personnes qui contribuent à vous ouvrir d’autres perspectives et à atteindre des objectifs communs.
Ma chère collègue, vous avez parlé d’un délai d’adaptation pour les entreprises qui franchissent les seuils. Mais de quoi se plaignent les entrepreneurs en France ? Que nous disent-ils quand nous les auditionnons avec la délégation aux entreprises ? Ils se plaignent de l’instabilité juridique. Le délai que vous avez évoqué est de trois ou quatre ans aujourd’hui mais, demain, une loi sera subitement votée et la mesure sera appliquée immédiatement ! Aujourd’hui, les entrepreneurs ont un problème de confiance et c’est cette difficulté que nous cherchons à résoudre.
Madame Bricq, je voudrais vous rassurer sur un autre point : il est des pays dans lesquels il n’existe pas de seuils dans les entreprises et dans lesquels la démocratie existe malgré tout, et où elle a parfois même été instaurée avant certains autres pays !
Mme Nicole Bricq. Peut-être, mais on est en France !
M. Olivier Cadic. On est certes en France, mais nous ne sommes pas le seul pays sur cette planète et, comme vous le savez, nos entreprises sont confrontées à la compétition internationale.
Mme Nicole Bricq. Oui, mais on a une histoire !
M. Olivier Cadic. Je souhaite relever le seuil d’élection des représentants du personnel de vingt à cinquante salariés. Cela étant, je vais retirer mon amendement pour répondre aux attentes de M. le rapporteur.
Dans un esprit constructif et afin d’accélérer les débats, j’en profite par ailleurs pour dire que je retire par avance l’amendement n° 251 rectifié bis à l’article 7 B. Cet amendement visait à relever de cinquante à deux cent cinquante salariés le seuil de représentation du personnel, ce seuil étant celui qui est retenu pour la définition des PME au sens communautaire. Pour conclure avec cet exemple, Xavier Bertrand, président du conseil régional des futurs Hauts-de-France, considère lui aussi qu’il n’existe qu’un seul seuil, celui des PME au sens communautaire, puisqu’il a récemment décidé d’accorder des aides régionales pour les PME implantées sur son territoire à des entreprises dont les effectifs vont jusqu’à deux cent cinquante salariés.
Je retire donc les deux amendements, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 250 rectifié bis et 251 rectifié bis sont retirés.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Les arguments développés en faveur de l’amendement de M. Cadic ou contre celui-ci me laissent dubitatif. Jusqu’à présent, aucun d’entre eux ne m’a convaincu. Et pourtant, dieu sait si c’est un sujet que nous ressassons depuis longtemps, que ce soit ici ou au sein d’autres instances !
Ne serait-il pas envisageable d’obtenir une étude sérieuse et approfondie, une mission parlementaire en quelque sorte, pour creuser vraiment le sujet ? Peut-être une telle étude a-t-elle d’ailleurs été conduite, mais je n’en ai pas eu personnellement connaissance et personne n’y a fait référence.
Ce qu’affirme Olivier Cadic est juste : les effets de seuil existent. Et comme l’a également dit M. le rapporteur, ces effets de seuil ont un coût ! Pour une entreprise, passer de cinquante à cinquante et un salariés représente ainsi 4 % de charges supplémentaires diverses et variées.
En tout cas, je reste convaincu, pour ma part, que le dialogue dans l’entreprise et l’élection de délégués du personnel est une excellente chose.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Sur ce sujet, il faut être dans le même état d’esprit que M. Vanlerenberghe, c’est-à-dire calme et serein.
Nous discutons d’une loi sur le dialogue social. Ce serait envoyer un très mauvais signe aux salariés que de voter l’amendement de M. Cadic, même si j’ai bien compris, mon cher collègue, que vous l’aviez retiré.
Aujourd’hui, les entreprises ont besoin de stabilité et cette loi nous semble être une loi d’équilibre. Or qui dit équilibre, dit efficacité économique et protection des salariés !
En revanche, il ne doit pas y avoir de sujet tabou. Peut-être faudrait-il en effet étudier la situation et vérifier si le fait de modifier les seuils permettrait réellement de créer de l’emploi ?
Il faut se garder des affirmations selon lesquelles – je précise que ce n’est pas ce qu’a dit M. Cadic – il y aurait, d’un côté, les sénateurs membres de la délégation aux entreprises qui connaîtraient les entreprises et, de l’autre, les sénateurs qui n’en seraient pas membres et qui n’auraient jamais vu de leur vie comment fonctionnent les entreprises.
J’ajoute qu’il y a certes des gentils patrons, des gentils chefs d’entreprise – vous avez été félicité à ce titre à plusieurs reprises, monsieur Cadic –, mais que je connais aussi des chefs d’entreprise qui n’embauchent pas leurs salariés en cherchant à tenir compte de leur personnalité.
Je le répète : si, au sortir de ce débat, nous donnions le sentiment d’une régression, si nous laissions entendre que la question des seuils permet à elle seule de régler les problèmes d’efficacité économique et les problèmes sociaux dans notre pays, nous nous tromperions ! Qu’une étude soit réalisée, que la délégation aux entreprises travaille sur le sujet des seuils, pourquoi pas. Nous ne sommes pas obscurantistes, il faut étudier les choses, peu importe le sens des conclusions que l’on en tire.
C’est pourquoi je salue la sagesse de M. Cadic d’avoir retiré son amendement. Restons sur la version actuelle du texte. L’objet principal de ce projet de loi ne concerne pas les seuils. Qu’il y ait un problème d’embauche, d’adéquation entre emploi et formation dans notre pays, c’est une réalité ! En revanche, je ne pense pas qu’il faille aller plus loin !
Mme Nicole Bricq. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 605.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 315 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 331 |
Pour l’adoption | 20 |
Contre | 311 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 7 A.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 316 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 186 |
Contre | 153 |
Le Sénat a adopté.
Article 7 B (nouveau)
I. – L’article L. 2312-2 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le chiffre : « douze » est remplacé par le chiffre : « vingt-quatre » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« L’employeur dispose d’un délai d’un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer à cette obligation de mise en place. »
II. – L’article L. 2322-2 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le chiffre : « douze » est remplacé par le chiffre : « vingt-quatre » ;
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« L’employeur dispose d’un délai d’un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer à cette obligation de mise en place. »
III. – Aux articles L. 2143-3, L. 2143-6, L. 2322-1 à L. 2322-4, L. 2313–7, L. 2313-7-1, L. 2313-8, L. 4611-1 à L. 4611-6 du même code, le chiffre : « cinquante » est remplacé par le chiffre : « cent ».
IV. – Le premier alinéa de l’article L. 2313–13 du même code est ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de cinquante salariés et plus et dans les entreprises dépourvues de comité d’entreprise par suite d’une carence constatée aux élections, les attributions économiques de celui-ci, mentionnées à la section 1 du Chapitre III du titre II, sont exercés par les délégués du personnel. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 46 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L’amendement n° 401 rectifié est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.
L'amendement n° 937 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l'amendement n° 46.
Mme Cécile Cukierman. Comme les sénateurs écologistes et le Gouvernement, nous proposons la suppression de l’article 7 B du projet de loi, symptomatique de la volonté de la majorité sénatoriale d’aggraver la situation des salariés de ce pays.
Ainsi, cet article tend à assouplir les règles encadrant les institutions représentatives du personnel, en relevant de cinquante à cent salariés le seuil d’effectif au-dessus duquel la création d’un comité d’entreprise – CE – et d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail – CHSCT – est obligatoire. Il vise également à augmenter la durée de référence permettant de vérifier que le seuil d’effectif a été durablement franchi, celle-ci passant de douze à vingt-quatre mois.
Alors même que la majorité sénatoriale dénonce l’absence de dialogue social, c’est l’obligation imposée aux entreprises de mettre en place des institutions représentatives du personnel qui est mise à mal. Nous dénonçons cette contradiction, et refusons une disposition allant à l’encontre des intérêts des travailleuses et des travailleurs.
La présence d’un CE et d’un CHSCT au sein de l’entreprise est de nature à protéger les salariés.
Ainsi, le CE est consulté ou informé sur tout projet concernant l’organisation et la marche de l’entreprise, par exemple l’introduction de nouvelles technologies ou la restructuration et compression des effectifs. Il est également consulté sur les conditions de travail, sur toute procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire.
À l’occasion de ces consultations, l’instance émet des avis et des vœux, et l’employeur est tenu de rendre compte, de façon argumentée, des suites données à ces derniers.
Le CE dispose en outre d’un droit d’alerte lorsqu’il a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise. Il peut alors demander à l’employeur de lui fournir des explications, ce qu’il est aussi en droit de faire s’il constate un accroissement important des CDD ou du travail temporaire dans l’entreprise, ou un recours abusif à ce type de contrats.
Enfin, le CE peut saisir l’inspection du travail.
L’introduction de cet article prive donc les salariés des entreprises de cinquante à cent salariés du droit – et des moyens attenants à celui-ci – de disposer d’un comité d’entreprise pour défendre leurs intérêts. Pour cette raison, nous en demandons la suppression.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux, pour présenter l'amendement n° 401 rectifié.
Mme Corinne Bouchoux. Je poursuivrai dans la lignée de l’argumentaire précédent.
Il est compliqué de vouloir, conformément à la philosophie du texte, que d’aucuns cherchent à renforcer, porter le dialogue social au niveau de l’entreprise et, dans le même temps, modifier ou supprimer les seuils, jouer sur le temps, notamment en augmentant fortement le délai de douze mois.
La proposition qui est avancée ici correspond certes à une demande des chefs d’entreprise, mais elle contrevient à la fois aux intérêts des salariés et au principe même de dialogue social prôné par le texte.
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 937.
Mme Myriam El Khomri, ministre. J’ai souhaité présenter cet amendement de suppression de l’article 7 B car, sans revenir sur tout ce que je viens d’expliquer, je crois important d’avoir des instances représentatives du personnel pour défendre les conditions de travail des salariés, mais également pour contribuer à l’efficacité de l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Ce débat est de même nature que celui que nous venons d’avoir sur l’article 7 A. La commission a émis un avis défavorable, mais je sais gré aux auteurs de ces amendements d’avoir défendu leurs convictions et leurs valeurs avec panache.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Précisément pour défendre nos convictions et nos valeurs, je rappellerai que, sur la problématique générale des effets de seuil, nous devons garder l’intérêt général en point de mire. Ce n’est pas le membre de la délégation aux entreprises, même communiste, qui s’exprime ici ; c’est le parlementaire, soucieux, comme tous les membres de cet hémicycle, je pense, de cet intérêt général.
Il ne faut envisager aucun assouplissement du niveau actuel des seuils, et ce d’autant que, selon des études officielles, l’effet de ces seuils sur les créations d’emploi est actuellement, en France, très marginal.
Ici, nous évoquons précisément le lissage des effets de seuils, mais je serai bref, la logique étant la même. Pourquoi les entreprises devraient-elles être les seuls lieux dans lesquels des seuils sont établis ? La démocratie doit s’imposer partout ! Il serait paradoxal que l’entreprise demeure inaccessible à la démocratie représentative, au moment même où celle-ci gagne pratiquement toutes les sphères de la vie sociale et économique.
C’est pourquoi, contrairement à ceux qui ont défendu le présent article, nous sommes opposés au lissage des seuils.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 46, 401 rectifié et 937.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, de la commission, l’autre, du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 317 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 153 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 607, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 2312-2 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’une unité économique et sociale regroupant au moins onze salariés est reconnue par convention ou par décision de justice entre plusieurs entreprises juridiquement distinctes, la mise en place de délégués du personnel est obligatoire. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les TPE et les PME constituent l’un des principaux moteurs de notre croissance économique, nous en conviendrons toutes et tous. Les salariés qui les font vivre méritent donc d’être représentés.
L’introduction de cet article 7 B a été justifiée, par les sénateurs qui en sont à l’origine et par les rapporteurs, par le souci de « lever l’un des principaux blocages psychologiques au développement des entreprises ».
Un certain blocage psychologique a dû aussi opérer au sein du Front national car certains amendements portant sur le doublement des seuils sociaux ont été retirés avant la séance afin d’éviter que leurs auteurs ne soient vilipendés en étant clairement identifiés comme des ultralibéraux, ce que le parti cherche à tout prix à cacher ! (M. Jean Desessard s’exclame.)
Mais je reviens à la présentation de l’amendement, qui porte sur les unités économiques et sociales, les UES.
Comme vous le savez, mes chers collègues, cette notion d’origine jurisprudentielle permet le regroupement de plusieurs entreprises, distinctes juridiquement, mais étroitement liées, pour la mise en place obligatoire d’un comité d’entreprise.
Ces UES présentent un intérêt certain car elles peuvent permettre de déjouer une certaine fraude consistant à morceler fictivement une entreprise pour ne pas atteindre les effectifs rendant obligatoire la mise en place des instances représentatives du personnel.
Nous souhaitons donc, à travers cet amendement, compléter les dispositions existant dans le code du travail, pour garantir, en plus du comité d’entreprise, la mise en place obligatoire de délégués du personnel.
La droite vient de voter le relèvement des seuils à vingt salariés pour la mise en place de ces délégués du personnel. Nous proposons au contraire, pour ces unités spécifiques, de se fonder sur le seuil tel qu’il existe encore dans le code du travail, à savoir onze salariés.
Le rôle des délégués du personnel n’est plus à démontrer, les salariés y sont attachés et il nous paraît indispensable, dans un souci d’égalité de traitement, que les salariés regroupés dans ces UES – qu’il s’agisse d’incubateurs et pépinières d’entreprises, d’associations d’emploi à domicile ou de certaines enseignes commerciales – puissent avoir les mêmes droits que ceux qui sont accordés à d’autres structures.
C’est tout le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. À l’article 7 A, la commission a supprimé l’obligation de prévoir des délégués de site, qui se déclenchait à partir de cinquante salariés. Cet amendement vise à la rétablir à partir de onze salariés.
Par cohérence, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement n’a pas la même position que la commission.
Madame la sénatrice, je tiens à vous remercier car, à l’occasion de cet amendement, j’ai demandé à mes services un point sur l’état du droit en matière d’unités économiques et sociales. Le seuil que vous préconisez est déjà mis en place ; c’est une jurisprudence constante. Il n’y a donc aucun intérêt à adopter cet amendement.
Il faut d’ailleurs savoir que, dans ce domaine, le droit n’est que jurisprudentiel. Je l’ai découvert grâce à votre initiative.
Il serait à mon sens utile de mener une réflexion approfondie sur les unités économiques et sociales.
Cet amendement est donc satisfait. Mettre dans la loi un bout de la jurisprudence et pas le reste risquerait de déséquilibrer l’ensemble. En revanche, pour les parlementaires que vous êtes, il y a un vrai travail à accomplir sur la codification de cette jurisprudence.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Madame Cohen, l'amendement n° 607 est-il maintenu ?
Mme Laurence Cohen. Non, à la lumière des explications de Mme la ministre, je le retire, monsieur le président.
M. Jean Desessard. C’est l’effet Martinez ? (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 607 est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1012, présenté par M. Lemoyne, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
III. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° La sous-section 2 de la section 1 du chapitre III du titre IV du livre Ier de la deuxième partie est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé du paragraphe 1, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
b) À l’intitulé du paragraphe 2, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
2° Aux articles L. 2143-3, L. 2143-5, L. 2143-6, L. 2313-7, L. 2313-7-1, L. 2313-8, L. 2322-1 à L. 2322-4 et L. 4611-1 à L. 4611-6, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent ».
La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 251 rectifié bis, présenté par MM. Cadic et Canevet, Mmes Billon et Gatel et MM. Bockel, Delahaye, Guerriau, Longeot et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer le mot :
cent
par les mots :
deux cent cinquante
Cet amendement a été précédemment retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 1012 ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement est hostile au relèvement des seuils. C’est une position constante. Par conséquent, il émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Je tiens à préciser la position du groupe socialiste et républicain.
Comme l’a indiqué Mme la ministre, l’unité économique et sociale est une création jurisprudentielle, notamment destinée à combattre les fraudes à la mise en place des délégués ou de comités d’entreprise. Elle reste une structure informelle sans personnalité morale et est reconnue au cas par cas. Nous pensons que c’est une notion à stabiliser, sur laquelle il faut travailler, surtout avec les nouvelles formes d’emploi.
Nous serons attentifs à toutes les initiatives susceptibles de faire évoluer et de conforter cette structure.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La cohérence se fera à l’Assemblée nationale ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 7 B.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 318 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Pour l’adoption | 186 |
Contre | 138 |
Le Sénat a adopté.
Article 7 C (nouveau)
Au début du premier alinéa de l’article L. 2326-1 du code du travail, les mots : « Dans les entreprises de moins de trois cents salariés, » sont supprimés.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, sur l'article.
Mme Cécile Cukierman. L’existence de la délégation unique du personnel a été facilitée par l’adoption de dispositions dans la loi quinquennale de 1993 relative au travail, à l’emploi et à la formation professionnelle, dont le but était de limiter les effets de seuil dans les PME par regroupement des instances représentatives du personnel, c’est-à-dire les délégués du personnel et le comité d’entreprise dans un premier temps. Pour s’adapter à la diversité des entreprises, la loi Rebsamen de 2015 a ajouté à cette délégation les fonctions assurées jusqu’alors par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT.
Notre position de principe à l’endroit de la délégation unique du personnel est très claire : nous estimons qu’elle ne saurait constituer la solution pour un dialogue social de qualité. Déjà, au mois de novembre 1993, lors de la discussion de la fameuse loi quinquennale ou loi Giraud, notre groupe soulignait que l’organisation d’une seule élection – délégués du personnel et membres du comité d’entreprise – au lieu de deux pour les entreprises de moins de cent salariés réduisait la durée des débats : « Ceux qui sont investis de mandats de représentation étant moins nombreux, moins de salariés bénéficieront de la procédure particulière de licenciement ; enfin, le nombre d’heures de délégation au bénéfice de l’ensemble des salariés diminuera. »
Le travail d’amendements et les débats ultérieurs à cette loi, notamment ceux de la loi Rebsamen, n’ont finalement pas changé les données du problème. Bien au contraire, les obligations de négociation comme celles d’information et de consultation ont été sensiblement réduites, puisque nous sommes passés de douze et dix-sept obligations respectives à trois dans les deux cas.
La réduction de l’effectif des élus du personnel, de leurs heures de délégation, donc de leur capacité à représenter le plus efficacement possible les intérêts de leurs mandants a été le corollaire de la démarche entreprise depuis 1993, qui, sauf démonstration contraire, n’a pas in fine créé d’emplois dans notre pays.
Nous ne pourrons donc pas suivre la majorité sénatoriale dans sa démarche.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 348 est présenté par Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy, Jeansannetas et Labazée, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 409 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.
L'amendement n° 608 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 936 est présenté par le Gouvernement.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour présenter l’amendement n° 348.
Mme Nicole Bricq. Nous avons déjà eu ce débat au moment de l’examen de la loi Rebsamen sur le seuil de trois cents salariés. Je rappelle que, quand la délégation unique du personnel est mise en place, le nombre et le crédit d’heures des délégués sont augmentés en conséquence. C’est peut-être cela qui vous gêne ; à moi, cela paraît logique. On rappelle bien que cette délégation unique du personnel conserve l’ensemble des attributions des délégués du personnel et du CHSCT. Nous avons eu ce débat avec le groupe CRC lors de la loi Rebsamen. Le CHSCT ne disparaît pas.
C’est quand même un instrument de simplification du dialogue social, et là nous sommes d’accord. La délégation unique du personnel permet un gain de temps apprécié. Elle est spécialement adaptée aux entreprises moyennes.
La commission a souhaité étendre ce dispositif à toutes les entreprises, y compris aux très grandes, et en faire un principe général. Si cette disposition était maintenue, cela nous inquiéterait. Ce serait notamment déstabilisant pour le CHSCT.
M. Cadic fait souvent référence au seuil européen. Justement, le seuil de trois cents salariés correspond à la définition des PME à l’échelon européen. Il faut donc vraiment maintenir ce seuil et regarder ce que cela donne, avant d’envisager quoi que ce soit.
Nous sommes bien sûr défavorables à la suppression du seuil.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 409.
M. Jean Desessard. Nicole Bricq a fait une réponse globale et totale.
Mme Nicole Bricq. Totale, mais pas totalitaire ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. L’article 7 C prévoit de supprimer le seuil limitant la délégation unique du personnel aux entreprises de moins de trois cents salariés. Nous proposons de supprimer cet article, car cette forme de représentation doit rester réservée aux entreprises qui, en raison de leur taille réduite, ne peuvent pas mettre en place une représentation classique. Au mois d’août 2015, la loi relative au dialogue social et à l’emploi, dite loi Rebsamen, avait déjà étendu la portée de ce dispositif aux entreprises de deux cents à trois cents salariés. En l’étendant davantage, monsieur le rapporteur, ce dispositif spécifique n’a plus aucun intérêt.
La délégation unique du personnel, qui rassemble les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, permet de donner plus de poids aux représentants du personnel dans les petites entreprises. Il s’agit d’un instrument adapté à la taille de ces entreprises, qui ont des difficultés à mettre en place une représentation classique.
En revanche, dans les entreprises dont l’effectif permet la représentation habituelle, il est préférable de ne pas recourir à la délégation unique du personnel, car celle-ci viendrait limiter la possibilité d’une pleine représentation salariale.
Si l’on généralise ce dispositif à l’ensemble des entreprises, celui-ci perd tout son intérêt : l’objectif est de favoriser la représentation salariale dans les petites entreprises et non de l’entraver dans les plus grandes.
Cet article nous semble injustifié et porte atteinte au principe même de représentation salariale. C’est pourquoi nous proposons sa suppression.
Monsieur le rapporteur, vous répétez que tous vos efforts tendent à adapter la démocratie dans l’entreprise à la taille de cette dernière, on voit bien qu’il ne s’agit pas de cela ! Il s’agit uniquement de simplifier au détriment de la représentation salariale !
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 608.
Mme Marie-France Beaufils. Nous étions opposés aux délégations uniques du personnel pour les entreprises de moins de trois cents salariés, dispositif instauré par la loi Rebsamen, nous ne pouvons donc qu’être opposés à sa généralisation dans l’ensemble des entreprises.
En complément des propos que vient de tenir notre collègue Cécile Cukierman, comment penser en effet que la réduction du dialogue social dans les entreprises, petites et moyennes notamment, pourrait décider des employeurs à procéder à des embauches ? Ce ne sont pas les seuils qui empêchent un entrepreneur d’embaucher : c’est la plus ou moins bonne santé économique de son entreprise et celle de l’environnement dans lequel elle évolue.
Comment croire qu’un entrepreneur procédera à des embauches, même largement subventionnées, si ses carnets de commandes sont vides et qu’il n’a aucune perspective de développement à moyen terme ? Tous les arguments développés par le rapporteur depuis que je suis en séance ne peuvent que nous conforter dans l’idée qu’il est nécessaire de supprimer cette disposition.
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 936.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Étendre la délégation unique du personnel, suite à la loi Rebsamen, aux entreprises de plus de trois cents salariés serait un non-sens au regard de la finalité de cette instance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques de suppression.
Lorsque, le 1er juin dernier, la commission a adopté cet amendement portant article additionnel, l’idée était d’aller vers une simplification. Ce n’est pas de la simplification pour de la simplification : une délégation unique du personnel permet que les mêmes élus traitent de sujets qui relèvent à la fois du CHSCT et du comité d’entreprise. Ils ont ainsi une vision plus globale de l’entreprise.
Certains, y compris sur les travées du groupe CRC, ont fait référence au modèle allemand : nous sommes en quelque sorte dans cette logique de conseil d’entreprise unifié. Cela ne signifie pas que des sujets échapperont à ces élus. Il n’y aura pas d’angle mort dans les sujets traités, mais ce seront les mêmes élus qui appréhenderont la globalité des sujets.
C’est cet état d’esprit qui a prévalu pendant les travaux de la commission. Toutefois, il est bien légitime que le débat ait lieu sur ce sujet.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 348, 409, 608 et 936.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 319 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 339 |
Pour l’adoption | 153 |
Contre | 186 |
Le Sénat n'a pas adopté.
L'amendement n° 609, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 2326-2-1 est ainsi rédigé :
« Art L. 2326-2-1. – Le nombre de représentants constituant la délégation unique du personnel est fixé comme suit :
« 1° de 50 à 74 salariés : 6 titulaires et 5 suppléants ;
« 2° de 75 à 99 salariés : 7 titulaires et 6 suppléants ;
« 3° de 100 à 124 salariés : 8 titulaires et 7 suppléants ;
« 4° de 125 à 149 salariés : 9 titulaires et 8 suppléants ;
« 5° de 150 à 174 salariés : 10 titulaires et 9 suppléants ;
« 6° de 175 à 199 salariés : 11 titulaires et 10 suppléants ;
« 7° de 200 à 249 salariés : 12 titulaires et 11 suppléants ;
« 8° de 250 à 299 salariés : 13 titulaires et 12 suppléants. » ;
2° Les deuxième à dernière phrases du 1° de l’article L. 2326-6 sont remplacées par une phrase et sept alinéas ainsi rédigés :
« Ce temps ne peut excéder, sauf circonstances exceptionnelles, un nombre d’heures fixé comme suit :
« a) de 50 à 74 salariés : 13 heures par mois ;
« b) de 75 à 99 salariés : 14 heures par mois ;
« c) de 100 à 124 salariés : 16 heures par mois ;
« d) de 125 à 149 salariés : 17 heures par mois ;
« e) de 150 à 174 salariés : 18 heures par mois ;
« f) de 175 à 299 salariés : 19 heures par mois.
« Ce temps peut être utilisé cumulativement dans la limite de douze mois. Cette règle ne peut conduire un membre à disposer, dans le mois, de plus d’une fois et demie le crédit d’heures de délégation dont il bénéficie. Les conditions d’utilisation des heures de délégation sont fixées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Le Gouvernement soutient que son texte favorise le dialogue social dans les entreprises. Cependant, le projet de loi ne revient pas sur les réductions du nombre de représentants du personnel et des heures de délégation réalisées par la loi Rebsamen.
Je rappelle pourtant que le nombre de représentants a été réduit lors de la mise en place de la délégation unique du personnel. Ainsi, alors que le CHSCT, le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, d’une entreprise de cent salariés comptait quatre titulaires et quatre suppléants et que son comité d’entreprise était composé de cinq titulaires et de cinq suppléants, seuls cinq titulaires et cinq suppléants en tout remplissent désormais l’ensemble des missions de ces instances, soit huit représentants en moins pour défendre les salariés, mais aussi les intérêts de l’entreprise.
Cet amendement vise donc à revenir à la situation antérieure à la loi Rebsamen en rétablissant le nombre d’élus supprimés par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Lors de l’examen de la loi Rebsamen, le Gouvernement s’était en effet engagé à maintenir globalement les moyens des élus dans le cadre de la délégation unique du personnel. Cet engagement a été largement tenu puisque, dans les décrets que j’ai pris en début d’année, le nombre d’heures de délégation de ces représentants a considérablement augmenté. J’ajoute que la mutualisation et l’annualisation des heures de délégation conduiront également à une augmentation du temps disponible dans la pratique. Il n’y a donc pas lieu de craindre une diminution des moyens accordés aux représentants des salariés.
N’entendant pas revenir sur cet équilibre, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 7 C.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
M. Jean Desessard. La droite sénatoriale n’aime pas travailler le vendredi ! C’est peut-être parce que l’emploi du temps n’avait pas été adapté : il n’y a pas d’accord d’entreprise ! (Sourires.) Ils sont sur le terrain, ils préparent la primaire !
M. le président. Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 320 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 188 |
Contre | 153 |
Le Sénat a adopté.
Article additionnel après l'article 7 C
M. le président. L'amendement n° 982, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 7 C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente, au plus tard le 31 décembre 2016, un rapport sur les voies de valorisation et de promotion du dialogue social, notamment en identifiant des actions de pédagogie à destination du grand public.
Ce rapport s’attache plus particulièrement à présenter des pistes de réflexion permettant une meilleure articulation des instances consultatives actuelles, une meilleure définition de leurs missions ainsi que l’amélioration du cadre et de la méthode de la négociation interprofessionnelle.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Cet amendement fait suite au rapport que le Premier ministre avait demandé au Conseil économique, social et environnemental, le CESE, sur le développement de la culture du dialogue social en France après la remise du rapport de Jean-Denis Combrexelle dont les trente premières pages, particulièrement intéressantes, concernent – ce qui ne se décrète pas dans la loi – la manière de développer dans notre pays la culture du dialogue social en sensibilisant les plus jeunes, mais également les étudiants des écoles de commerce et les futurs managers. Il s’agit d’être beaucoup plus outillé sur ce sujet.
Le rapport du CESE, qui m’a été remis au début du mois de juin, contient plusieurs recommandations.
Il préconise ainsi, nous en avons déjà parlé, de saisir le Défenseur des droits sur la question des discriminations syndicales. De nombreux autres sujets sont ouverts, comme le dialogue social dans les plus petites entreprises.
L’objectif est de se fixer une feuille de route afin de mieux valoriser le dialogue social auprès du grand public, mais également des acteurs de l’éducation – la ministre de l’éducation nationale et moi-même nous y sommes engagées – et des partenaires sociaux. La journée Défense et citoyenneté et d’autres outils nous permettraient d’améliorer le dialogue social.
Parallèlement à ces travaux, les députés Arnaud Richard et Jean-Marc Germain ont remis un rapport sur le paritarisme, lequel pose la question du dialogue au niveau interprofessionnel. Il faut que nous parvenions à l’améliorer également dans ce cadre.
Cet amendement vise à prévoir la remise d’un rapport au Parlement – j’en suis désolée, monsieur le président Milon ! (M. le président de la commission des affaires sociales s’exclame.) –, d’ici au 31 décembre 2016, avec l’appui du CESE, afin d’essayer de développer la culture du dialogue social. Mises bout à bout, toutes les réponses que je viens d’évoquer nous permettront d’avancer dans un champ assez large. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. On comprend tout à fait que le Gouvernement veuille prendre acte et tirer des conclusions du rapport du CESE, lequel avait été demandé par le Gouvernement. Je note d’ailleurs que le Gouvernement a demandé un rapport au CESE, qui lui-même en a demandé un au Gouvernement : la machine s’autoalimente, mais les sujets sont intéressants.
Mme Evelyne Yonnet. C’est le dialogue !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Je vous le concède !
Madame la ministre, puisque vous avez évoqué l’éducation nationale, je relève que le CESE, dans son rapport – c’est sa recommandation n° 4 –, estime que « les délégués de classe figurent parmi les premières personnes à pouvoir expérimenter le fonctionnement du dialogue social » ; il y a une emphase qui est mise tout particulièrement sur ce point. Cette recommandation n’est peut-être pas la plus transcendante, mais des mesures intéressantes figurent dans ce rapport, qui mérite d’être lu.
Nous attendons avec impatience la synthèse que fera le Gouvernement de ces différents rapports, y compris de celui de nos collègues députés, au mois de décembre 2016.
La commission émet un avis de sagesse sur cet amendement, mais je pense que notre assemblée l’adoptera.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Notre rapporteur a paru moquer quelque peu les délégués de classe et leur initiation au dialogue social.
Je rappelle donc que Philippe Séguin, lorsqu’il était président de l’Assemblée nationale, a instauré les députés juniors. Tous les ans, une classe par circonscription dépose une proposition de loi. L’une d’entre elle est ensuite adoptée à l’Assemblée nationale par les députés juniors venus de toute la France, avant parfois de devenir une loi de la République.
Je pense qu’il est bon d’initier les enfants et les jeunes à la réflexion sur les questions sociales et politiques. Ce n’est donc pas gentil de moquer l’éducation nationale de cette façon (Mme Stéphanie Riocreux opine.), sachant surtout que c’est Philippe Séguin, je le répète, qui a mis en place les députés juniors. (Mmes Anne Emery-Dumas, Dominique Gillot, Evelyne Yonnet et Stéphanie Riocreux applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. Au nom du groupe socialiste et républicain, je tiens à dire tout le bien que je pense de cette démarche et de l’amendement qui nous est présenté aujourd'hui. Les rapports sont de qualité inégale, comme tout dans la vie. Dans un rapport, tout n’a certainement pas la même valeur.
Les rapporteurs du CESE sont Luc Bérille, secrétaire général de l’UNSA, l’Union nationale des syndicats autonomes, et Jean-François Pillard, ancien directeur général de l’UIMM, l’Union des industries et métiers de la métallurgie, ancien vice-président du MEDEF, qui occupe actuellement des responsabilités importantes.
Permettez-moi de vous citer deux extraits de l’introduction de ce rapport.
Le dialogue social « renvoie aussi à des représentations et à des pratiques des acteurs des relations professionnelles et de la société elle-même qui s’enracinent profondément dans notre histoire sociale ». C’est tout à fait d’actualité.
« Le dialogue social contribue au sens du travail et à sa qualité. Il garantit ainsi son utilité économique et sociale pour le bien commun. Le bien-être de salariés respectés, écoutés, reconnus se traduit dans la qualité de vie au travail, la productivité et la compétitivité. »
Cet amendement est intéressant, car il met en œuvre une démarche à laquelle nous pourrons accorder la plus grande attention.
Mme Evelyne Yonnet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Cet amendement vise, à la suite du rapport du CESE, à explorer les voies de promotion du dialogue social en identifiant des actions de pédagogie et en menant une réflexion sur les instances consultatives afin d’améliorer le cadre de la négociation interprofessionnelle. Pourquoi pas ?
Je crains tout de même que, dans le contexte actuel, cet amendement ne soit en fait une mesure de diversion. Certes, il est toujours utile d’explorer ces pistes, mais il aurait mieux valu commencer, s’agissant du présent projet de loi, par respecter l’article L. 1 du code du travail, lequel rend obligatoire une concertation préalable avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs, ce qui, en l’occurrence, n’a pas été fait. Vous le niez, mais nous pensons qu’il est utile de le rappeler à ce stade du débat.
Le résultat est ce que l’on vit aujourd'hui dans le pays, à savoir une situation de blocage. Voilà où mène l’absence de dialogue social ! Il est donc effectivement important de réfléchir au meilleur moyen de contribuer au développement du dialogue social.
Nous nous abstiendrons sur cet amendement, même si les propositions du CESE sont tout à fait respectables, car nous vous soumettrons plus tard au cours de l’examen du texte une proposition que nous avons prise à la JOC, la Jeunesse ouvrière chrétienne, dont j’ai reçu la présidente. Il s’agit d’instaurer un module d’initiation au droit du travail dès la classe de troisième. Nous pensons que l’éducation nationale doit prendre sa part à la sensibilisation aux questions relatives au droit du travail et au dialogue social. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je voterai cet amendement. Toutefois, j’aimerais que l’on veille à ne pas tout confondre.
Les délégués de classe, auxquels je suis très favorable, sont de mon point de vue plus proches de la représentation politique, à l’instar des conseils municipaux d’enfants, que de la représentation sociale. Ils ont avec l’école, qui est un service public, une relation d’usager ou de personne contribuant à une décision publique. Ils ne défendent pas simplement leurs intérêts face à des intérêts contradictoires. Comment d’ailleurs imaginer que l’école puisse avoir des intérêts spécifiques, différents de ceux des élèves ? Le dialogue social est un champ important, mais, je le répète, il ne faut pas tout confondre.
Puisqu’il est question du rôle de l’éducation nationale dans la promotion du dialogue social, j’avoue que je n’arrive toujours pas à comprendre, madame la ministre – je sais que cette question ne relève pas de votre ministère et cela dure depuis longtemps –, que l’on n’enseigne nulle part au cours de la scolarité, voire à l’université,…
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. L’économie ? (Sourires.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … le statut coopératif, y compris dans les lycées agricoles. On ne peut pourtant pas dire que les coopératives agricoles soient une petite affaire dans ce secteur et qu’elles soient connotées par une seule couleur politique, ce qui ne vous aura pas échappé.
On voit donc bien qu’une certaine vision de l’entreprise peut prévaloir sur d’autres. Or, dans l’enseignement, on est tenu à la neutralité et à une certaine diversité, objectivée.
De la même manière, en France, on enseigne peu le code du travail et le droit des salariés, sujets qui pourraient pourtant être abordés lors des cours d’instruction civique. On a droit à la sécurité sociale, mais les trois quarts des gens ne savent même pas comment elle fonctionne.
Bref, je ne suis pas opposée à la proposition qui nous est faite, mais il faut veiller à ce qu’elle ne se transforme pas en une sorte de propagande ex nihilo, et responsabiliser chacun sur la situation objective de notre pays, de notre droit et de la démocratie.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. À l’évidence, nous sommes dans un pays où on a besoin de parler du dialogue social et de légiférer. Nous avions, l’an dernier, une belle loi de M. Rebsamen sur le dialogue social. Nous voici de nouveau en train de légiférer sur cette question, en prévoyant un rapport qui, je l’espère, portera des fruits, avec une nouvelle loi sur le dialogue social, pour qu’on l’améliore encore. (Sourires.) Et on va enseigner cette question d’abord en classe de troisième, puis en sixième, et ainsi de suite.
Soyons réalistes ! Quelles pratiques avons-nous du dialogue social ? C’est de cela qu’il s’agit. Faisons à un moment donné une loi, appliquons-la, puis nous ferons un bilan après un certain temps. Car ce phénomène de réplication permanente donne un peu le tournis.
Sur cet amendement, je suivrai bien sûr la commission et j’en appelle à la sagesse de nos collègues.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’enjeu n’est pas de faire une loi. En l’occurrence, je parle de la pratique, de la culture du dialogue social, qui, je le répète, ne se décrétera pas dans une loi. Comme le rapport Mettling l’a relevé, le droit à la déconnexion est lié à l’implication des managers, des encadrants. (M. Olivier Cadic opine.) La loi ne suffit pas ; le management est également un vrai sujet dans notre pays. (M. Olivier Cadic opine de nouveau.)
L’approche que je préconise, c’est de montrer l’importance du dialogue social au moment des études supérieures, notamment dans les écoles de commerce et dans les formations destinées aux encadrants.
Il ne s’agit pas de mesures législatives ; il s’agit de tout autre chose. Comment pouvons-nous avoir une meilleure culture du dialogue social dans notre pays ? La culture du compromis ne se décrète pas dans une loi. L’objectif est à rechercher dans les pratiques. C’est à partir de structures telles que l’association Réalités du dialogue social, ou RDS, qui analyse la pratique du dialogue social, que les pratiques peuvent émerger.
La question des acteurs de l’éducation est importante, bien sûr, mais je pensais aux écoles supérieures, à certains diplômes universitaires. C’est une question de culture, mais elle est essentielle.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 7 C.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
Article 7
I. – Le chapitre II du titre II du livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° La section 2 est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé, après le mot : « thèmes », sont insérés les mots : «, de la périodicité et de la méthode » ;
b) L’article L. 2222-3 est ainsi modifié :
– à la fin, les mots : «, sans préjudice des thèmes de négociation obligatoires prévus aux articles L. 2241-1 à L. 2241-8 et L. 2242-5 à L. 2242-19 » sont supprimés ;
– sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Cette convention ou cet accord définit le calendrier des négociations, y compris en adaptant les périodicités des négociations obligatoires prévues aux chapitres Ier et II du titre IV du présent livre pour tout ou partie des thèmes, dans la limite de trois ans pour les négociations annuelles, de cinq ans pour les négociations triennales et de sept ans pour les négociations quinquennales. Cette possibilité de modifier la périodicité de la négociation annuelle sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail mentionnée à l’article L. 2242-8 n’est ouverte qu’aux entreprises de la branche concernée déjà couvertes par un accord sur l’égalité professionnelle.
« En l’absence de conclusion d’un accord sur l’égalité professionnelle mentionné à l’article L. 2242-8, l’employeur est tenu d’établir chaque année le plan d’action mentionné au 2° du même article. » ;
c) Sont ajoutés des articles L. 2222-3-1 et L. 2222-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 2222-3-1. – Une convention ou un accord collectif peut définir la méthode permettant à la négociation de s’accomplir dans des conditions de loyauté et de confiance mutuelle entre les parties.
« Cette convention ou cet accord précise la nature des informations partagées entre les négociateurs, notamment, au niveau de l’entreprise, en s’appuyant sur la base de données définie à l’article L. 2323-8.
« Sauf si la convention ou l’accord en stipule autrement, la méconnaissance de ses stipulations n’est pas de nature à entraîner la nullité des accords conclus dès lors qu’est respecté le principe de loyauté entre les parties.
« Art. L. 2222-3-2. – Un accord conclu au niveau de la branche définit la méthode applicable à la négociation au niveau de l’entreprise. Cet accord s’impose aux entreprises n’ayant pas conclu de convention ou d’accord en application de l’article L. 2222-3-1. Si un accord mentionné à l’article L. 2222-3-1 est conclu, ses stipulations se substituent aux stipulations de cet accord de branche.
« Sauf si l’accord prévu au premier alinéa du présent article en stipule autrement, la méconnaissance de ses stipulations n’est pas de nature à entraîner la nullité des accords conclus dans l’entreprise dès lors qu’est respecté le principe de loyauté entre les parties. » ;
2° Après la section 2, est insérée une section 2 bis ainsi rédigée :
« Section 2 bis
« Préambule des conventions et accords
« Art. L. 2222-3-3. – La convention ou l’accord contient un préambule présentant de manière succincte ses objectifs et son contenu.
« L’absence de préambule n’est pas de nature à entraîner la nullité de la convention ou de l’accord. » ;
3° Les deux derniers alinéas de l’article L. 2222-4 sont ainsi rédigés :
« À défaut de stipulation de la convention ou de l’accord sur sa durée, celle-ci est fixée à cinq ans.
« Lorsque la convention ou l’accord arrive à expiration, la convention ou l’accord cesse de produire ses effets. » ;
4° La section 4 est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé, après le mot : « de », il est inséré le mot : « suivi, » ;
b) Après l’article L. 2222-5, il est inséré un article L. 2222-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2222-5-1. – La convention ou l’accord définit ses conditions de suivi et comporte des clauses de rendez-vous.
« L’absence ou la méconnaissance des conditions ou des clauses mentionnées au premier alinéa n’est pas de nature à entraîner la nullité de la convention ou de l’accord. »
II. – Le titre III du livre II de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :
1° La section 3 du chapitre Ier est ainsi modifiée :
a) À l’intitulé, après le mot : « notification », il est inséré le mot : «, publicité » ;
b) Après l’article L. 2231-5, il est inséré un article L. 2231-5-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2231-5-1. – Les conventions et accords de branche, de groupe, interentreprises, d’entreprise et d’établissement sont rendus publics et versés dans une base de données nationale, dont le contenu est publié en ligne dans un standard ouvert aisément réutilisable.
« La publication de la convention ou de l’accord vaut dépôt et notification auprès de l’autorité administrative compétente.
« La convention ou l’accord détermine les conditions et les délais dans lesquels un signataire peut s’opposer à sa publication s’il estime qu’elle serait préjudiciable à l’entreprise. Cette opposition est notifiée aux autres signataires et à l’autorité administrative compétente pour le dépôt de l’accord en application de l’article L. 2231-6.
« Les conditions d’application du présent article sont définies par décret en Conseil d’État. » ;
2° À l’article L. 2232-20, après les mots : « dans l’entreprise, », sont insérés les mots : « dans les conditions prévues aux articles L. 2222-3 et L. 2222-3-1 et ».
III. – Le présent article s’applique aux accords conclus après la publication de la présente loi, à l’exception de ses dispositions relatives aux conditions de publicité mentionnées à l’article L. 2231-5-1 du code du travail, qui s’appliquent aux accords conclus à compter du 1er septembre 2017.
M. le président. L'amendement n° 44, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. L’article 7, en l’état actuel, pose trois problèmes.
Premier problème : il fixe par défaut une durée de vie pour une convention ou un accord collectif. Ainsi, on passerait d’une durée illimitée telle qu’elle est prévue par le code du travail aujourd’hui à une durée par défaut de cinq ans au maximum.
Dans le contexte économique et social que nous connaissons, cela ne peut que s’apparenter à une fragilisation des conditions de travail et de vie des salariés. Tous les cinq ans, l’employeur pourra imposer de nouvelles conditions aux travailleurs, se servant de ce créneau pour renégocier des accords précédemment favorables, désormais non pérennes. Pourtant, les conditions de dénonciation d’un accord sont déjà suffisamment larges pour permettre leur révision.
Deuxième problème : l’article revient sur la périodicité des négociations obligatoires prévues dans le code du travail, qui se trouveraient ainsi plus espacées. Pour ne prendre qu’un aspect de ces négociations, celles qui concernent la rémunération, cela signifie qu’à la place d’une revalorisation salariale annuelle les salariés pourraient voir leur salaire bloqué pendant trois ans, sans aucune adaptation à l’égard de l’inflation, par exemple. En outre, cette mesure ne peut qu’être contre-productive pour l’économie, dans la mesure où nous savons que le pouvoir d’achat, donc toute revalorisation salariale, participe à la consommation intérieure et par conséquent à la croissance.
Troisième et dernier problème : la publicisation des accords collectifs d’entreprise. Si l’intention générale est louable, laisser la possibilité à un signataire de s’opposer unilatéralement à la publicisation d’un accord revient à limiter fortement le droit d’information des salariés sur leurs conditions de travail. À un moment où le Gouvernement souhaite renforcer le dialogue, on ne peut qu’être étonné de voir qu’il laisse cette opacité de fait sur un sujet aussi essentiel que la rémunération ou la possibilité d’évolution de carrières.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression.
Cet article instaure par défaut une durée maximale de validité de cinq ans pour les accords. Il s’inscrit dans la logique de favoriser le dialogue social et de mettre une butée, à défaut que les partenaires sociaux aient choisi la leur, afin d’avoir la certitude que le dialogue se réinstaurera régulièrement. Cette mesure nous semble plutôt bonne.
Par ailleurs, cet article vise à rendre obligatoires les préambules, ce qui est bénéfique en termes de méthode. Il tend en outre à créer un portail internet dédié aux conventions et aux accords accessible à tous.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’article que nous examinons permettra des avancées majeures pour favoriser la négociation et la confiance entre les partenaires sociaux.
On parle beaucoup des accords de branche, mais parmi les branches les plus vivantes – parce que, aujourd’hui, il y a de nombreuses branches qui sont mortes, si je puis dire – un tiers d’entre elles n’ont pas négocié depuis plus de dix ans. L’instauration d’une durée de validité est une nécessité pour accompagner la place sans précédent que nous allons donner à la négociation.
Nous avons évoqué voilà quelques instants l’avis du CESE sur la culture du dialogue social : il abonde largement en ce sens.
L’article 7 prévoit le développement des accords sur la méthode de négociation, l’assouplissement des règles de révision des accords, l’encadrement de leur durée, les clauses de rendez-vous. Ces solutions sont directement inspirées par le rapport Combrexelle. L’enjeu est de favoriser une négociation dynamique et d’empêcher que des accords ne soient pas renégociés pendant des années parce que les partenaires sociaux ne se sont pas mis autour de la table. Il est aussi que les accords soient beaucoup plus accessibles grâce à l’open data national, ce qui constitue une avancée importante en matière de transparence. (Mme Nicole Bricq opine.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 44.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 321 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 29 |
Contre | 312 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 611 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. La loi Rebsamen a déjà profondément modifié le paysage de la négociation collective : l’extension de la délégation unique du personnel, la DUP, réduit de fait le temps dédié à la démocratie sociale dans l’entreprise, et le regroupement des thèmes de négociation a pour but, sous couvert de « simplification », de limiter les discussions sur certains sujets.
C’est ainsi que le thème de l’égalité professionnelle n’a été sauvé que in extremis, grâce à la mobilisation des organisations féministes.
Ces évolutions ne sont pas sans conséquence sur la portée des négociations, ce qui est certainement le but poursuivi par le MEDEF et par une certaine partie de la « gauche ». Après vous être attaquée aux thèmes de négociation, à la fréquence et à la durée des réunions des différentes instances représentatives du personnel, vous proposez maintenant, à peine un an après la loi de votre prédécesseur, madame la ministre, de revenir sur la périodicité des négociations.
La négociation sur le salaire et le temps de travail passerait ainsi de un an à trois ans, de même que celle sur l’égalité professionnelle et la qualité de vie au travail, tandis que la négociation sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, la GPEC, passerait de trois ans à cinq ans.
Dans un contexte de pression à la baisse sur les salaires, comment concevoir qu’un gouvernement puisse instaurer une telle mesure ?
Les négociations annuelles obligatoires sont un moment important pour faire vivre la démocratie sociale en entreprise.
Il m’a semblé que vous étiez sensible, dans le débat, à la notion d’égalité professionnelle, madame la ministre, mais le combat de l’égalité professionnelle nécessite une attention de tous les instants, et pour le moins une discussion annuelle avec les organisations syndicales !
Sans compter la GPEC : à l’heure où les besoins des entreprises évoluent en permanence, où les licenciements mettent « sur le carreau » de nombreux salariés dont l’employabilité a baissé faute de formations délivrées par l’entreprise, comment envisager un débat sur l’évolution des compétences uniquement tous les cinq ans ?
Vous affirmez parfois que le monde va vite et qu’il faut s’adapter, d’autres fois que deux réunions par décennie suffisent pour anticiper les évolutions de ce monde.
Nous sommes en plein paradoxe, et c’est pourquoi nous présentons un amendement de suppression des alinéas 6 à 8.
M. le président. L’amendement n° 960 rectifié, présenté par MM. Durain, Labazée, Godefroy, Cabanel et Montaugé, Mmes Jourda et Lienemann, M. Gorce, Mme Ghali, M. Néri, Mme Tocqueville, M. Courteau, Mmes Lepage et Guillemot et M. Karam, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Avec Jérôme Durain et quelques autres collègues, je pense qu’il faut garder l’annualité des négociations salariales.
Dès lors que l’on veut améliorer le dialogue social, il n’est pas de bon augure d’en réduire la fréquence, d’autant que l’évolution des salaires – à la hausse, nous l’espérons – est un élément important pour soutenir, dans notre pays, la consommation, l’activité et les carnets de commandes des entreprises.
M. le président. L'amendement n° 410, présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. La suppression de l’alinéa 7 ayant déjà été fort bien défendue par notre collègue du groupe CRC et par Mme Lienemann, je serai bref.
Ce projet de loi doit normalement favoriser le dialogue dans l’entreprise, et l’on pourrait penser qu’il faut pour cela des rencontres régulières. Peut-être ai-je mal compris, madame la ministre – j’ai quelques difficultés, entre deux scrutins publics, à fixer mon attention ! (Sourires.) –, mais j’ai cru vous entendre dire que, dans certaines entreprises, il n’y avait pas eu de dialogue social depuis deux ou trois ans. Cela voudrait donc dire qu’elles ne respectent pas la loi !
M. Jean Desessard. Et vous pensez que les entreprises engageront un dialogue plus régulier… Autant pour moi, je n’avais pas compris.
M. le président. L'amendement n° 860 rectifié, présenté par MM. Canevet, Guerriau, Cadic et Bonnecarrère, Mmes Joissains et Loisier, M. Kern, Mme Billon et MM. L. Hervé et Marseille, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Une organisation signataire peut, pendant la durée de l’accord, formuler la demande que la négociation sur un accord d’intéressement soit engagée. Le thème est alors sans délai mis à l’ordre du jour de la négociation.
La parole est à M. Olivier Cadic.
M. Olivier Cadic. Cet amendement vise à favoriser la mise en place d’accords d’intéressement en entreprise.
Utiles au développement, voire à la relance de l’activité en entreprise, les dispositifs d’intéressement favorisent également une bonne cohésion en entreprise.
Pour ces raisons, la négociation de tels accords d’intéressement doit logiquement s’inscrire dans la négociation collective en entreprise.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Sur les deux amendements visant à supprimer les alinéas 6 à 8, la commission a émis un avis défavorable. Il s’agit en réalité de décliner au niveau de la branche un dispositif qui existe déjà au niveau de l’entreprise depuis la loi Rebsamen.
Pour être mis en œuvre, un accord des partenaires sociaux sera nécessaire. Par ailleurs, cette faculté de faire varier la fréquence des négociations est encadrée et ne peut aller au-delà d’un cycle triennal.
L’avis est le même sur l’amendement n° 410, présenté par M. Desessard, dont l’esprit est identique.
Sur l’amendement n° 860 rectifié, défendu par M. Cadic, l’avis est également défavorable. Il prévoit la possibilité pour un syndicat signataire d’un accord modifiant la périodicité des négociations obligatoires au niveau de la branche de demander et d’obtenir l’ouverture d’une négociation sur l’intéressement. On considère qu’un syndicat qui a signé cette modulation doit être cohérent avec lui-même et s’en tenir à la signature qui était la sienne.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je suis défavorable aux amendements nos 611 rectifié, 960 rectifié et 410, qui vont à l’encontre de notre objectif consistant à recentrer le dialogue social sur les sujets stratégiques et à faire confiance aux partenaires sociaux pour définir la méthode et l’agenda.
Les négociations sur les salaires restent annuelles, mais les partenaires sociaux ont la possibilité de les espacer.
Tout à l’heure, monsieur Desessard, j’indiquais que 240 branches n’avaient pas signé depuis dix ans. L’enjeu de cet article est justement de rendre la négociation plus dynamique. D’ailleurs, quand on parle d’accords de méthode et d’accords pour une durée déterminée, nous voulons les forcer à renégocier au bout de cinq ans.
C’est tout l’objet de cet article 7 sur la négociation, sa méthode et la loyauté avec laquelle elle doit être conduite.
Je profite aussi de cette intervention pour clarifier de nouveau un point : je tiens particulièrement à ce que nous appliquions une règle spécifique pour la négociation sur les salaires. La rédaction initiale du Gouvernement, qui diffère de la rédaction issue de la commission des affaires sociales, prévoyait ainsi que si une organisation syndicale signataire d’un accord souhaitait, pendant la durée d’application de celui-ci, ouvrir une négociation sur les salaires, elle pouvait le faire.
Cette disposition a été supprimée du texte de la commission des affaires sociales du Sénat, qui s’en trouve en conséquence quelque peu déséquilibré.
Ainsi, si votre amendement n’avait porté que sur la possibilité pour une organisation syndicale d’ouvrir une négociation, j’y aurais été favorable. En l’occurrence, c’est à eux de gérer l’agenda. La négociation sur les salaires reste annuelle, ils peuvent décider de l’espacer, mais avec toujours la possibilité pour une organisation de demander qu’elle soit rouverte. Pour moi, le projet porté par le Gouvernement parvenait sur ce point à un juste équilibre.
S’agissant de l’amendement n° 860 rectifié, je partage bien sûr l’objectif d’inciter les entreprises à développer l’intéressement, qui contribue au pouvoir d’achat et à la motivation des salariés. Le Gouvernement a pris des mesures très concrètes pour les salariés des TPE et PME dans la loi Macron pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances, dont je ne doute pas qu’elles porteront leurs fruits.
Néanmoins, je ne peux pas être favorable à cet amendement, qui obligerait les entreprises à ouvrir sans délai une négociation sur l’intéressement à la demande d’un seul syndicat, même si un accord majoritaire a décidé d’espacer l’échéance de cette négociation. Nous avons ouvert cette possibilité sur la question des salaires, mais si nous l’ouvrions pour tous les thèmes importants, l’accord sur le calendrier des négociations n’aurait plus de sens. Pour résumer, notre but est d’introduire davantage de méthode et de fixer un agenda pour rendre la négociation plus dynamique.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote sur l’amendement n° 611 rectifié.
Mme Cécile Cukierman. Il semble bien anodin, cet article 7 sur les accords de méthode destinés à « programmer » dans chaque entreprise la négociation collective et ses contenus.
Mais il est finalement assez important et s’inscrit, de fait, dans un processus de dévitalisation du dialogue social.
Étrange affaire : on soigne les formes du dialogue ; on en maltraite le fond.
Pour expliquer notre vote sur cet article, j’effectuerai un rapide rappel sur les alinéas 4 et 5, qui visent à modifier l’article L. 2222–3 du code du travail, lequel dispose que « la convention de branche ou l’accord professionnel prévoit les modalités de prise en compte, dans la branche ou l’entreprise, des demandes relatives aux thèmes de négociation émanant d’une ou des organisations syndicales de salariés représentatives, sans préjudice des thèmes de négociation obligatoires prévus aux articles L. 2241–1 à L. 2241–8 et L. 2242–5 à L. 2242–19. »
Il existe donc actuellement des matières dans lesquelles on négocie quoi qu’il arrive, dans les champs de la formation, des salaires, de la place des travailleurs handicapés dans l’entreprise, etc.
Or, dans la rédaction qui nous est proposée, la référence aux domaines obligatoires de négociation disparaît. Les intentions des auteurs du texte nous semblent donc claires.
En pratique, la négociation collective, dont on nous a affirmé qu’elle était la priorité du projet de loi, devient une négociation régie par un accord de méthode sans valeur juridique affirmée, destiné à débattre de n’importe quelle question dans des délais variables et adaptables selon les circonstances, en utilisant une base de données économiques et sociales dont le référentiel est loin d’être mis en place partout.
Nous ne pouvons accepter, mes chers collègues, une telle dévaluation de la négociation collective, d’autant que, dans l’histoire du mouvement social et syndical de notre pays, rares sont les dispositifs qui sont entrés en application sans mobilisation.
Ainsi, chez Renault, ce sont bien des mouvements de grève qui ont permis d’obtenir la troisième semaine de congés payés en 1955, la quatrième en 1962 ou la mise en place de la retraite complémentaire.
On ne doit, à nos yeux, jamais négocier les mains vides. Les formes du dialogue ne peuvent être satisfaisantes si l’on en a maltraité le fond. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J’ai relu, madame la ministre, l’alinéa 8 de l’article 7 auquel vous faisiez référence. En effet, le rapporteur l’a supprimé, car il ne veut pas que l’on négocie sur les salaires.
Cet alinéa était ainsi rédigé : « Une organisation signataire peut, pendant la durée de l’accord, formuler la demande que la négociation sur les salaires soit engagée. Le thème est alors sans délai mis à l’ordre du jour de la négociation. »
En l’état, il reste assez difficile à comprendre. Qu’entend-on par « pendant la durée de l’accord » ? Est-ce pendant la période de négociation ou s’agit-il de l’accord qui avait été établi deux ou trois ans auparavant ? Qu’entend-on également par « sans délai » ? Est-on en négociation permanente ou cela ouvre-t-il une nouvelle période de négociation ? Mais on retrouve en effet l’intention dont vous parliez, madame la ministre.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 611 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 322 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 340 |
Pour l’adoption | 37 |
Contre | 303 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 960 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 860 rectifié.
M. Olivier Cadic. Je le retire, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 860 rectifié est retiré.
3
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Lors du scrutin public n° 303, intervenu hier soir, M. Gilbert Barbier souhaitait voter contre et M. Robert Hue ne voulait pas prendre part au vote. Tous les autres membres du groupe souhaitaient voter pour.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
4
Nouvelles libertés et nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s.
Article 7 (suite)
M. le président. Nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 7.
L’amendement n° 957, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Cette convention ou cet accord définit les principales étapes du déroulement des négociations et peut prévoir des moyens supplémentaires ou spécifiques, notamment s’agissant du volume de crédits d’heures des représentants syndicaux ou des modalités de recours à l’expertise, afin d’assurer le bon déroulement de l’une ou de plusieurs des négociations prévues.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. J’ai souhaité présenter cet amendement, qui est aussi une préconisation issue de l’avis du CESE sur le développement de la culture du dialogue social, qui m’a été remis au début du mois.
Nous avions déjà travaillé, dans la préparation de ce projet de loi, à donner un peu plus de cadre aux accords de méthodologie. On sait bien que la question de la loyauté de la transparence dans une négociation ne se décrète pas. C’est pourquoi la méthodologie est importante.
Il existe des accords de méthode pour les plans de sauvegarde de l’emploi, mais ici, nous sommes sur autre chose, puisque cela concerne toutes les négociations. Notre idée est d’avoir plus de loyauté et de confiance.
Le CESE a pris le parti de regarder ce que nous avions mis dans le projet de loi et a proposé des mesures permettant un enrichissement des accords de méthodologie.
Ainsi, ces accords pourront, notamment, décider d’attribuer des moyens supplémentaires aux délégués syndicaux, si une négociation particulière le justifie. Il pourra s’agir, par exemple, de crédits d’heures, d’expertises ou de formations.
Cette évolution est une mesure de plus pour renforcer les syndicats dans les entreprises, ce qui favorisera la qualité du dialogue social.
Je vous appelle à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, en notant avec intérêt la logique qui consiste à confier aux partenaires sociaux le soin de déterminer eux-mêmes l’éventuelle possibilité d’ajouter un volume supplémentaire de crédits d’heures.
C’est une logique que nous reprendrons un peu plus tard dans le débat, madame la ministre ; nous la préférons à celle d’une généralisation… (Mme la ministre sourit.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Avec cet amendement, madame la ministre, vous vous appuyez, en effet, sur une recommandation du rapport du CESE pour donner des moyens supplémentaires aux acteurs du dialogue social engagés dans la démarche de négociation d’un accord de méthode.
Nous sommes quelque peu surpris de voir un amendement de ce type, puisque, depuis 2012, le Gouvernement a réduit les moyens des instances représentatives du personnel.
L’extension du recours à la délégation unique du personnel, la DUP, aux entreprises de moins de trois cents salariés fait effectivement disparaître un certain nombre de comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, mais aussi des représentants du personnel, ce qui réduit le volume des heures de délégation.
Une telle démarche n’a sans doute pas facilité, dans la dernière période, le développement du syndicalisme.
Il y a donc bien lieu de renforcer les moyens matériels et humains dévolus au mouvement syndical, ne serait-ce que parce que les organisations de salariés disposent de bien moins de moyens que la partie adverse, qui est nourrie par les effectifs des chambres professionnelles – chambres de commerce et d’industrie, groupements locaux ou interprofessionnels… – et par bien d’autres moyens qui sont à sa disposition.
En revanche, il nous semble, madame la ministre, qu’il serait bien de commencer par rétablir le volume d’heures de délégation des élus du personnel dans le cadre de la DUP.
Ce serait le premier pas à faire !
Nous ne voterons pas contre cet amendement : à partir du moment où des moyens supplémentaires sont proposés, on ne peut pas être en désaccord, compte tenu de l’affaiblissement qui a eu lieu…
Nous nous abstiendrons, en réitérant notre demande pour que les moyens à disposition des élus des salariés soient remis au niveau où ils étaient auparavant.
M. le président. L’amendement n° 613, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 13 et 14
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Nous voici confrontés au discours de la méthode, puisque cet amendement prévoit de discuter des conditions du dialogue social dans les entreprises !
Outre le fait qu’ouvrir des négociations ne signifie aucunement être soumis à une obligation de résultat, il est tout à fait intéressant de constater que, dans ce texte dit de progrès social, figure en bonne place le recul de la périodicité de la négociation collective. C’est ce que vient de rappeler une de nos collègues.
Le dialogue social, plus stratégique, intéressant et riche, qui nous était promis par l’extension de la délégation unique du personnel aux entreprises comptant jusqu’à trois cents salariés, commencera donc par prendre son temps…
Outre le fait que nous attendons toujours le fameux décret en Conseil d’État sur le contenu de la base de données, découlant de l’article 18 de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, on nous propose, avec cet alinéa 13, de fixer les conditions, les contenus et la programmation du dialogue social.
Tant pis si les salaires n’augmentent pas et si les accords d’entreprise, dont vous nous vantez les mérites, pourront être dénoncés par la partie patronale suivant des règles prédéfinies !
Nous avons donc un dispositif étonnant : d’abord, une base de données, dont nous ne connaissons pas vraiment le contenu et qui est présentée comme le viatique de toute négociation collective ; ensuite, une méthode proposée par la branche pour négocier sur les thématiques, obligatoires ou non, sous réserve que l’entreprise définisse sa propre méthode.
Mais cet accord de méthode est particulier, puisque sa validité juridique est proche de zéro, son absence n’ayant nul effet sur la validité ou la nullité des accords ultérieurement passés.
Je rappellerai simplement en conclusion que, lorsqu’un accord sera dénoncé par des syndicats ou l’employeur, ses effets disparaîtront…
En revanche, le projet de loi fait sauter une barrière capitale : le maintien des avantages acquis, réduits à la portion congrue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Nous pensons – et c’est justement un ajout de la commission – qu’obliger les accords de branche à comprendre un accord de méthode applicable aux négociations en entreprise montre que les branches ont un rôle support pour un certain nombre d’entreprises qui d’elles-mêmes ne peuvent pas avoir toutes les clés pour rédiger.
La branche a donc un vrai rôle support pour les PME et les ETI. Nous le croyons ! C’est pourquoi l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il s’agit également d’un avis défavorable.
Nous pouvons être étonnés : en regardant l’objet de l’amendement, on remarque que ses auteurs s’opposent au principe de faveur et à une prérogative nouvelle donnée à l’accord de branche…
Les alinéas 13 et 14 prévoient justement qu’un accord de méthode défini au niveau de la branche s’applique aux entreprises. C’est la réalité !
M. Dominique Watrin. Mais il n’y a pas d’effet juridique !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Par ailleurs, en ce qui concerne la question précise que vous m’avez posée au sujet du décret en Conseil d’État relatif aux informations liées à la consultation annuelle sur la situation économique et financière de l’entreprise, il sortira dans les prochains jours.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 613.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 323 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 332 |
Pour l’adoption | 24 |
Contre | 308 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 612, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 21 et 22
Rédiger ainsi ces alinéas :
« La convention ou l’accord est conclu pour une durée indéterminée, sauf stipulation contraire.
« Lorsque la convention ou l’accord arrive à expiration, il poursuit ses effets à durée indéterminée à défaut de conclusion d’une nouvelle convention ou d’un nouvel accord conclu dans le même champ d’application et stipulant sa vocation à se substituer au précédent. » ;
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Cet amendement vise à réaffirmer le caractère indéterminé de la durée des accords collectifs conclus, tout en laissant la possibilité, pour les partenaires sociaux, de signer des accords à durée déterminée.
Les dispositions actuellement prévues par le code du travail, en particulier son article L. 2222–4 portant sur la détermination de la durée des conventions et accords, prévoient que les conventions et accords collectifs sont conclus pour une durée déterminée ou indéterminée.
Quant à lui, l’article 7 du projet de loi instaure, en l’état, une durée maximale de validité de cinq ans.
Cela pose problème, car, dans un contexte économique où le rapport de force est défavorable aux salariés, il s’agit d’une disposition régressive pour ces derniers, puisque tous les cinq ans les accords signés pourront être remis en cause par des dispositions moins favorables.
De plus, il est impensable que la convention cesse de produire ses effets, dès lors qu’elle arrive à expiration.
La seule éventualité d’un retour en arrière tous les cinq ans contreviendrait clairement à l’esprit même des accords de branche, puisque la négociation collective résulte des luttes sociales, qui ont émaillé l’histoire du pays.
Les conventions et accords doivent être synonymes de progrès social et, en aucune manière, de régression.
Cela ne contribuera qu’à mettre, une fois de plus, les salariés en situation défavorable.
En effet, dans ce cas de figure, l’employeur aura tout intérêt à ne pas signer un accord avant les cinq ans et, ainsi, revenir à une page vierge.
Les salariés devront à nouveau se battre, afin d’obtenir a minima ce qu’ils avaient auparavant. Compte tenu du contexte économique, ces derniers seront lésés dans le cadre d’un rapport de force inégalitaire.
Garantir l’intérêt des salariés est de notre devoir. Ils sont la clef de voûte de notre économie. Aujourd’hui et demain, ils font et feront l’avenir économique de la France. Les défendre, c’est créer les conditions d’une meilleure santé économique de notre pays.
M. le président. L’amendement n° 411, présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. Cet amendement s’inscrit dans la même tonalité.
Il y a, aujourd’hui, une possibilité de conclure des accords à durée indéterminée.
Il s’agirait, maintenant, d’accords à durée déterminée de cinq ans.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Oui ! Un quinquennat !
M. Jean Desessard. J’espère que le rapporteur va m’expliquer en quoi cinq ans, c’est mieux qu’indéterminé.
Il va me dire que c’est plus court…
M. Olivier Cadic. Pas forcément !
M. Jean Desessard. Ah bon ? Une durée de cinq ans me semble plus courte qu’une durée indéterminée, non ?
Une durée indéterminée présente l’avantage de pouvoir négocier quand on le souhaite.
J’ai donc quelques interrogations.
Pour un salarié, il est tout de même préférable d’avoir un contrat à durée indéterminée, plutôt qu’un contrat à durée déterminée.
Si on prend la même logique, c’est mieux d’avoir un accord à durée indéterminée qu’un accord à durée déterminée !
Peut-être existe-t-il une explication cachée, que Mme la ministre va nous révéler ?
Je suppose que cela a été discuté avec la CFDT…
M. Jean Desessard. Peut-être pourrez-vous nous dire, sans trahir le secret des négociations, quel est l’intérêt de la CFDT à refaire la discussion tous les cinq ans et à ne pas laisser la possibilité d’accords à durée indéterminée ?
Là, c’est par défaut : si on lit exactement le texte, on voit qu’on peut fixer une durée, mais par défaut, c’est cinq ans.
On pourrait penser le contraire et fixer, par défaut, une durée indéterminée, comme pour un contrat de travail.
Vous, vous mettez que, par défaut, c’est cinq ans !
M. le président. L'amendement n° 305, présenté par Mme Lienemann, MM. Cabanel et Labazée, Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy et Jeansannetas, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Remplacer les mots :
cesse de produire ses effets
par les mots :
s’applique jusqu’à la conclusion d’une nouvelle convention ou d’un nouvel accord
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mes collègues du groupe socialiste et républicain et moi-même pouvons très bien comprendre qu’au regard des fréquentes mutations dans les entreprises, on souhaite une renégociation plus régulière des conventions collectives, ce qui explique le délai de cinq ans.
Pour autant, nous sommes très attachés à ce que les salariés soient assurés que le dialogue social se déroule dans la sérénité.
Pour cela, il faut qu’ils demeurent sous l’emprise des accords collectifs en vigueur et que la négociation du nouvel accord se déroule dans des conditions sécurisées.
Cela vaut d’ailleurs aussi bien pour les employeurs que pour les salariés.
La loi étant faite non pas pour régler des situations idéales, mais pour prévoir et anticiper le règlement de problèmes éventuels, il nous paraît quelque peu aventureux de compter sur une négociation anticipée systématique des nouvelles conventions avant l’expiration des précédentes.
C’est pourquoi notre amendement vise à la fois à éviter une situation de vide juridique et à s’assurer que la protection des salariés est pérennisée après l’expiration des conventions. (M. Didier Guillaume applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a donné des avis défavorables sur ces trois amendements.
Actuellement, il est en effet prévu que les accords soient à durée indéterminée. Le rapport Combrexelle pointait que l’élément de confort que procurait le caractère indéterminé était néfaste pour la vitalité du dialogue social.
Dans l’idée de le revitaliser, il apparaît pertinent de prévoir une borne à titre supplétif, les partenaires sociaux gardant la possibilité de déterminer la durée de l’accord, y compris une durée indéterminée. À défaut d’accord entre eux, c’est cette durée de cinq ans qui sera retenue.
En revanche, prévoir le caractère indéterminé à titre supplétif n’aurait pas incité les partenaires à se mettre autour de la table régulièrement.
Telle est la logique ayant animé la commission dans sa majorité, qui rejoint d’ailleurs la philosophie du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement a également donné trois avis défavorables.
Aujourd’hui, sans clause précise, il faut savoir qu’un accord est considéré comme étant à durée indéterminée.
Quel est le résultat ? Il y a 240 branches qui n’ont pas négocié depuis plus de dix ans. L’objectif de ce texte est donc de rendre le processus de négociation plus dynamique.
Aussi, nous avons choisi de dire qu’à défaut de clause dans l’accord, celui-ci a une durée de cinq ans. Seulement, une clause peut prévoir qu’il s’agit d’un accord à durée indéterminée, d’un accord à durée plus courte ou à durée plus longue.
Cette précision est essentielle, car la persistance d’accords de branche qui ne sont pas négociés sur plusieurs années pénalise les salariés, notamment des plus petites entreprises, sur la question des salaires, de la formation, bref, sur des sujets très concrets.
L’enjeu est donc bien de rendre la négociation plus dynamique. C’est pourquoi Jean-Denis Combrexelle préconisait que tous les accords soient à durée déterminée. Nous avons retenu une solution un peu différente, que je viens de vous décrire, mais nous avons aussi la volonté de dynamiser le processus.
Par ailleurs, madame Lienemann, l’idée n’est pas de créer un vide juridique, mais d’inciter les acteurs à se mettre autour de la table, soit pour prolonger l’accord, ce qu’ils peuvent tout à fait décider, soit pour négocier un autre accord. Il faut donc qu’ils se mettent d’accord sur une clause au moment de la signature. Je le répète, il peut s’agir d’une durée indéterminée, mais nous avons la volonté de les forcer à se mettre autour de la table plus régulièrement.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien entendu les arguments tant de M. le rapporteur que de Mme la ministre, mais, pour notre part, nous nous efforçons justement de tenir compte de la situation dans les entreprises, que nous connaissons bien, et de celle du mouvement syndical et de sa capacité à engager des discussions à l’intérieur des entreprises.
À travers notre amendement, nous souhaitons garder une protection pour les secteurs fragiles. Dire que pousser à des négociations tous les cinq ans revient à dynamiser, cela vaut pour un monde idéal, avec des structures développées et des représentations syndicales fortes. Or, vous le savez, tel n’est pas le cas aujourd’hui, et dans les secteurs les plus fragiles, les salariés n’y gagneront pas. Il faut donc les protéger quand ils n’ont pas la capacité d’engager un véritable dialogue social.
Nous ne souhaitons donc pas inverser la règle : l’accord doit être, pour nous, à durée indéterminée, sauf clause contraire, afin de ne pas fragiliser les salariés.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. En l’occurrence, madame la ministre, le rapport dont nous avons parlé hier ou avant-hier serait utile.
Dans les 240 branches qui n’ont pas renégocié un accord, les salariés sont-ils pénalisés ou avantagés ? Là est la question !
Il aurait été intéressant de savoir ce qui a bloqué la demande de négociation. (Mme Brigitte Gonthier-Maurin s’exclame.)
Quand les gens sont contents, ils ne demandent rien ; quand ils sont mécontents, ils demandent à renégocier.
Mme Laurence Cohen. Eh oui !
M. Jean Desessard. On ne sait pas exactement si l’absence de négociation dans ces branches est un signe de stabilité sereine, bienheureuse, ou un signe de blocage de la part de l’une ou l’autre des parties.
Pour ma part, je manque d’éléments sur ce point. Je ne vous en tiens pas rigueur, madame la ministre, car j’aurais pu moi-même faire les démarches et travailler la question.
En l’état, je retire mon amendement, car je suis circonspect.
M. le président. L’amendement n° 411 est retiré.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Pour notre part, nous maintenons notre amendement, car ce point est important.
Je partage ce que vient de dire notre collègue Jean Desessard sur la complexité du sujet, qui n’appelle pas forcément de recette miracle. À tout le moins, nous devons éviter de faire en sorte que les salariés ne se retrouvent du jour au lendemain en ayant perdu un nombre considérable d’avantages individuels acquis. C’est bien le fond de la question.
Je mène cette réflexion parce que je suis concerné par un cas précis dans ma circonscription. La papeterie Reno de Medici, RDM, remet en question l’accord d’entreprise pour revenir à l’accord de branche, moins avantageux, sous prétexte que l’entreprise n’a pas reçu l’aide qu’elle avait demandée auprès de la BPI pour financer des investissements.
En l’occurrence, il s’agit non pas d’une volonté de dynamiser la négociation, mais d’une décision brutale de l’employeur, qui veut faire payer aux salariés un problème de financement auprès d’un organisme bancaire. Aujourd’hui, un bras de fer juridique est engagé, car il ne s’agit pas de problèmes secondaires : la prime d’ancienneté passe de 20 % à 15 %, les primes de nuit passent de 25 % à 15 %, la perte du treizième mois, la majoration des jours fériés passe à 50 % au lieu de 100 %, etc.
Notre amendement a pour objet de prémunir les salariés contre cette brutalité, en faisant en sorte que l’accord continue à produire ses effets en attendant la conclusion d’un autre accord. C’est déjà un bon garde-fou.
Après est posée la question du maintien des avantages individuels acquis, or, dans ce projet de loi, j’ai remarqué que ces avantages étaient réduits à la portion congrue, c’est-à-dire à la seule question des rémunérations, en particulier de la rémunération mensuelle. Pourtant, je viens de citer bien d’autres sujets qui peuvent être sources de reculs sociaux.
M. le président. La parole est à M. Olivier Cadic, pour explication de vote.
M. Olivier Cadic. J’appuie la démarche de M. le rapporteur et de Mme la ministre.
D’après l’expérience que j’ai eue, en Norvège ou en Suède, des discussions avec les partenaires sociaux, ce rendez-vous régulier est vu comme un signe de vitalité pour le dialogue social. C’est important. Il permet aussi de se confronter ensemble aux problématiques que l’on peut rencontrer.
Monsieur Watrin, je ne comprends pas bien votre argumentation. Depuis le début de la discussion, vous ne cessez de nous expliquer que vous êtes contre l’inversion de la hiérarchie des normes. En l’occurrence, vous êtes en présence d’une entreprise qui propose de meilleures conditions que la branche…
M. Dominique Watrin. Non, c’est l’inverse !
M. Olivier Cadic. C’est pourtant ce que vous avez dit, donc j’étais un peu étonné. Vous dites que l’accord de branche était moins favorable que l’accord d’entreprise…
M. Dominique Watrin. Ce n’est pas ce que je voulais dire.
M. Olivier Cadic. C’est ce que j’avais compris, donc je vous remercie de la clarification.
Cela étant, il est nécessaire de prévoir une réévaluation régulière des accords, ce qui permet d’évoluer en cas de coup dur. C’est ainsi que la flexibilité est justifiée en Norvège. Il importe de prévoir des rendez-vous, par exemple tous les trois ans, pour anticiper les problèmes en changeant certaines dispositions. Mettre un tel cadre dans les textes me semble donc judicieux.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Le groupe socialiste et républicain avait souhaité que des garanties soient prévues pour que les salariés ne se retrouvent pas, avant la signature de la nouvelle convention, dans une situation où la précédente convention ne serait pas respectée.
Comme nous ne faisons pas tous la même évaluation de la réponse du Gouvernement, je me propose de retirer l’amendement n° 305, que j’avais moi-même déposé au nom du groupe.
À titre personnel, j’étais prête à accepter que les conventions soient courtes, pour qu’il y ait une dynamique de renégociation, mais je veux être sûre qu’il n’y aura pas de recul. Aussi, je souhaite que la convention précédente continue à courir tant que la nouvelle n’est pas signée. Faute d’avoir obtenu cette garantie, je me rallie à l’amendement du groupe CRC, qui va plus loin que ce que je souhaitais, mais qui garantit qu’il n’y aura pas de recul ou d’insécurité juridique.
Je retire l’amendement, monsieur le président.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je veux juste répondre à M. Desessard sur les 240 branches qui n’ont pas négocié. Il peut s’agir, par exemple, des bouchers lorrains, car il y a des branches territoriales. Mais quand une branche n’a pas négocié depuis vingt-cinq ans, c’est toujours synonyme de droits en moins pour les salariés.
En effet, les classifications sont tassées, et il n’y a donc pas d’évolutions de carrières grâce à des passerelles ou à des formations.
C’est pourquoi il faut absolument rendre la négociation collective plus dynamique. On ne peut pas laisser encore 42 branches avec un coefficient inférieur au SMIC.
D’où viennent les blocages ? Ils peuvent venir de la partie patronale, qui n’a pas intérêt à faire remonter certains coefficients pour des questions de classification. Ils peuvent aussi venir de la partie syndicale, qui refuse une proposition de modification patronale.
Nous, nous voulons que les partenaires sociaux, au moment où ils vont signer un accord, réfléchissent ensemble à sa durée. S’ils ne se mettent pas d’accord sur une clause plus courte, plus longue ou indéterminée, l’accord est réputé durer cinq ans. L’idée, c’est d’éviter qu’il n’y ait pas de négociation pendant de nombreuses années.
Nous sommes sur une question de méthode afin de revitaliser la négociation collective dans notre pays, et ce dans le cadre plus global de la restructuration des branches.
M. le président. L'amendement n° 614, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. La question de la publicité des accords collectifs comme des conventions collectives ne se résume pas à nos yeux à un simple problème de support technique.
Elle répond aussi à une exigence de clarté et de transparence dans le dialogue social
Dans la rédaction présentée dans le texte du projet de loi, la publication électronique de l’accord suffit pour lui donner une certaine forme de validité. Le problème n’est pas tant dans l’opposition ou non à la publication d’un accord par voie électronique, il est aussi dans la possibilité de dénonciation du contenu de l’accord par l’une ou plusieurs des parties.
Dans sa rédaction actuelle, le code du travail, dans sa partie réglementaire, indique que les administrations compétentes, autant que les signataires, sont les destinataires naturels d’une version papier desdits accords et conventions.
Cette mesure pose également problème en ce qu’elle est susceptible d’entrer en contradiction avec le contenu des articles relatifs à la dénonciation éventuelle des accords. Je rappelle que l’article L. 2231-9 actuel du code du travail dispose : « Les conventions et accords frappés d’opposition majoritaire, ainsi que ceux qui n’ont pas obtenu l’approbation de la majorité des salariés, en application des dispositions du chapitre II, sont réputés non écrits. »
C’est donc aussi pour ces motifs que nous vous proposons d’adopter cet amendement, qui vise à supprimer l’alinéa 33 de l’article 7.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à cet amendement, qui revient sur une disposition adoptée par la commission le 1er juin.
Nous avions souhaité que la création du portail prévu par le Gouvernement permette un allégement des contraintes et une véritable simplification. Le fait de déposer l’accord sur le portail peut entraîner un système de notification à toutes les administrations concernées. C’est tout l’intérêt des nouvelles technologies que d’autoriser une telle simplification, qui est souhaitable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’avis du Gouvernement est favorable. Je conçois bien la complexité qu’une telle disposition peut représenter pour l’entreprise.
Dans ce que nous avons mis en place, il y a une seule démarche. La publicité des accords, dont l’article 7 prévoit la généralisation, n’impose pas de formalité supplémentaire, car elle se fera dans la foulée du dépôt.
La formalité de dépôt va être encore simplifiée, car notre objectif est de permettre, à terme, un dépôt dématérialisé pour tous les accords. Ce point me paraît essentiel.
Enfin, il importe de maintenir la base nationale des accords d’entreprise, faute de quoi nous n’aurions aucune information d’ensemble, ce qui serait préjudiciable au rôle de recommandation susceptible d’être joué par les branches au sujet de ces accords.
Ce qui est essentiel dans cet article, c’est la publicité des accords. On doit assurer la connaissance et, en même temps, la sécurité juridique et la simplification. Il ne doit donc y avoir qu’une démarche à faire. (Mme Evelyne Yonnet opine.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 614.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable et que celui du Gouvernement est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 324 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 153 |
Contre | 188 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 306 est présenté par Mme Lienemann, M. Labazée, Mme Bricq, MM. Guillaume et Caffet, Mmes Campion et Claireaux, MM. Daudigny et Durain, Mmes Emery-Dumas, Féret et Génisson, MM. Godefroy et Jeansannetas, Mmes Meunier, Riocreux et Schillinger, MM. Tourenne et Vergoz, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 615 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 34
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 306.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement, présenté par le groupe socialiste et républicain, vise à proposer une nouvelle mesure de clarté et de sécurisation du dialogue social.
Aux termes de l’alinéa 34 de l’article 7, un signataire peut s’opposer à la publication d’une convention ou d’un accord s’il estime qu’elle serait préjudiciable à l’entreprise.
Cette rédaction nous a laissés perplexes et quelque peu inquiets.
Elle conduit en effet à penser que c’est l’employeur qui pourrait vouloir s’opposer à une publication. Pour quelle raison ? Les accords collectifs d’entreprise ne contiennent pas de secret de fabrication ! Les accords de maintien ou développement de l’emploi ne doivent contenir aucune clause destinée à demeurer confidentielle !
Par ailleurs, quel représentant du personnel s’opposerait à la publication d’un accord et pour quel motif ? La possibilité d’accords secrets ou comportant des clauses secrètes serait une véritable tumeur dans un dialogue social que nous voulons tous voir développé. Elle créerait une nouvelle défiance à l’égard des signataires.
De plus, la non-publication ne manquerait pas d’aboutir à des rumeurs, à des fuites génératrices de conflits et de contentieux. Elle s’avérera donc de fait inapplicable.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l'amendement n° 615.
Mme Cécile Cukierman. Effectivement, cet alinéa 34 prévoit, comme l’a rappelé notre collègue Marie-Noëlle Lienemann, qu’un signataire peut s’opposer à la publication d’un accord collectif dans une base de données nationale s’il estime que sa diffusion serait préjudiciable à l’entreprise. Or cette mesure est contraire aux exigences de transparence et, ainsi que vous l’avez souligné, madame la ministre, à l’enjeu de publicité des accords que nécessite la démocratie, a fortiori dans le cadre de l’entreprise.
Quelle raison pourrait justifier de passer outre cette obligation de transparence sur laquelle nous sommes en partie d’accord ici ? Je n’ose penser qu’il s’agit seulement d’une solidarité patronale, qui viserait à empêcher que la publicité des accords positifs pour les salariés ne conduise à les voir se multiplier. Nous avons eu beau tourner et retourner la question, il n’y a pourtant pas d’autre raison à un tel refus !
En effet, le préjudice en termes de concurrence de la publication d’accords collectifs qui est invoqué est négligeable tant les informations divulguées ne représentent pas de réels risques pour les entreprises face à leurs concurrents et intéressent assez peu les marchés financiers.
Derrière cet argument, il s’agit donc plus sûrement de ne pas permettre à des accords contenant des mesures progressistes de se diffuser, car ils pourraient ainsi inspirer d’autres négociateurs dans d’autres entreprises. On nous demande ici d’outrepasser l’exigence constitutionnelle de publicité des normes inhérente à l’état de droit pour des raisons bien insuffisantes et contraires aux intérêts des salariés.
D’où cet amendement visant à supprimer l’alinéa 34 de l’article 7.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Les avis de la commission sont défavorables sur ces deux amendements.
Les entreprises sont scrutées, y compris par la concurrence. C’est vrai, cette idée a effleuré plusieurs membres de la commission. Et je sais Mme Lienemann sensible à ces aspects. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.) Dans un monde où règne une sorte de guerre économique, nous devons veiller à préserver un certain nombre d’intérêts fondamentaux.
Je ne pense vraiment pas que l’intention du Gouvernement soit d’empêcher la publication d’accords progressistes pour éviter qu’ils ne se multiplient. J’ai plutôt tendance à considérer qu’il s’agit d’éviter de créer un préjudice pour l’entreprise en diffusant des données liées à l’entreprise elle-même – le texte mentionne une publication qui serait « préjudiciable à l’entreprise ». Le dispositif de restriction de la publication est plutôt conçu pour assurer la protection de l’entreprise par rapport au regard de ses concurrents. Du moins est-ce notre lecture de cet alinéa.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’avis est également défavorable.
Si le texte prévoit cette possibilité de s’opposer à la publication de l’accord, c’est parce que ledit accord contient parfois des données stratégiques. Je pense notamment à la question de l’investissement sur un site, qui a été évoquée au cours des débats et concertations. Et elle l’a été autant du côté des organisations syndicales que du côté des organisations patronales.
Lors des négociations que j’ai pu mener avec les partenaires sociaux, j’ai été saisie d’une demande de respect du parallélisme des formes, c'est-à-dire que la partie syndicale comme par la partie patronale souhaitaient pouvoir s’opposer à cette publication. C’est en ces termes que la question m’a été soumise lors des concertations.
Nous avons donc accédé à cette demande, tout en veillant à assurer aux salariés de l’entreprise le bénéfice de la publicité de l’accord. Ce bénéfice est bien évidemment maintenu, dans l’obligation d’affichage au sein de l’entreprise, certes, mais aussi au-delà.
M. Jean Desessard. Alors, les salariés seront tenus au secret Défense ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Ce que je dis, c’est que les salariés de l’entreprise ont, bien évidemment, eux, connaissance de l’accord. C’est un minimum ! Et parce que les organisations patronales et syndicales ont demandé le respect du parallélisme des formes, nous avons laissé la possibilité à l’un des signataires de l’accord de s’opposer à la publication.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Madame la ministre, vous me direz que c’est une manière comme une autre de finir la semaine, mais vous me perturbez !
M. Philippe Dallier. Vous allez passer un mauvais week-end ! (Sourires.)
M. Jean Desessard. Si je vous ai bien entendue, il ne faudrait pas parler de l’accord sur Renault, dont vous nous avez vanté les formidables mérites et qui a débouché sur un accord pour les branches. Il n’y aurait donc plus de publicité pour les bons accords au motif que cela risquerait de déteindre sur les autres !
Un patron accepte d’accorder telle ou telle chose à ses salariés mais il leur demande de surtout n’en parler à personne. Ils sont au courant mais ils doivent garder le secret ! Et si un salarié enfreint la consigne de silence, on va lui dire qu’il a eu tort, car il aurait dû se taire. C’est incroyable ! Où va s’arrêter cette culture du secret ? Où allons-nous ?
Madame la ministre, on veut déjà la transparence des banques, la transparence sur la rémunération des dirigeants d’entreprise,…
Mme Nicole Bricq. Et des élus !
M. Jean Desessard. … on veut la transparence sur l’ensemble du fonctionnement de l’entreprise.
Nous trouvons qu’il y a assez d’opacité et voici que l’accord d’entreprise doit absolument être passé sous silence. Il suffit que l’une des parties s’oppose à la publication de l’accord pour que sa demande soit acceptée. Franchement, je n’ai plus rien à dire ! Madame la ministre, là, vous avez atteint un petit degré supplémentaire et vous avez su nous créer la surprise. C’est très bien ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Cela me fait penser, par analogie, aux procès qui ont pu être intentés contre de grandes entreprises, notamment des banques, qui ont été condamnées pour non-respect de l’égalité professionnelle.
Tous les protagonistes, y compris les avocats, nous ont dit que pour faire évoluer les choses et aider aux bonnes pratiques, le mieux, c’était de faire de la publicité au procès et de diffuser la décision prise.
Cette culture du secret ne peut qu’entraver la démocratie. Il est bien dommage que l’on en soit arrivé là !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 306 et 615.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 325 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 139 |
Contre | 202 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 7, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 326 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 208 |
Pour l’adoption | 188 |
Contre | 20 |
Le Sénat a adopté.
Articles additionnels après l'article 7
M. le président. L'amendement n° 77 rectifié, présenté par MM. Husson, Houel et César, Mme Canayer, MM. B. Fournier, Vogel et Commeinhes, Mmes Lamure et Deromedi et MM. Revet, Longuet, J.P. Fournier, P. Leroy, Doligé, Rapin et Laménie, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 2143-23 du code du travail est supprimé.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Antérieurement à la loi Rebsamen, le représentant de la section syndicale était, de façon dérogatoire, l’interlocuteur à la négociation dans les entreprises d’au moins deux cents salariés dépourvues de délégué syndical et dans lesquelles il existait des représentants élus du personnel.
La loi Rebsamen ayant élargi la capacité de négociation des représentants élus du personnel puisque les entreprises dépourvues de délégués syndicaux peuvent négocier avec des élus quel que soit leur effectif, il en résulte que la capacité de négociation du représentant de section syndicale, ou RSS, s’en trouve affectée.
Bien que le texte relatif à la possibilité de négocier avec un représentant de section syndicale n’ait pas été modifié, il apparaît que le représentant de section syndicale ne sera pas en capacité de négocier ès qualités un accord collectif.
Il pourra, en revanche, négocier un accord mais ce sera alors en qualité d’élu du personnel – mandaté ou non – ou en qualité de salarié mandaté.
Afin de lever toute ambiguïté pour les entreprises quant à leurs interlocuteurs à la négociation, il convient de supprimer le premier alinéa de l’article L. 2143–23, devenu inopérant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Avant d’en venir à l’objet de l’amendement, je tiens à saluer les nombreux amendements déposés par Mme Deromedi. Nous nous sommes parfois utilement inspirés d’un certain nombre d’entre eux.
Au cas particulier, il s’agit d’un amendement très technique sur lequel la commission souhaite entendre l’avis du Gouvernement. S’il est favorable, nous pourrons suivre. Dans le cas contraire, je suggérerai à Mme Deromedi de bien vouloir retirer son amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Avis défavorable, parce que les partenaires sociaux, depuis l’adoption, en 2008, d’une position commune à ce sujet, sont particulièrement attachés aux représentants de la section syndicale. Nous entendons aujourd’hui des réflexions sur le rôle de ces représentants, qui permettent chaque jour à des syndicats de s’implanter dans les entreprises. En vérité, si l’on supprimait cette possibilité, même avec l’élargissement du mandatement que nous avons entrepris, il en résulterait un grand déséquilibre, surtout dans les petites entreprises.
M. le président. Madame Deromedi, l’amendement n° 77 rectifié est-il maintenu ?
Mme Jacky Deromedi. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 77 rectifié est retiré.
L’amendement n° 738 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 7
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2323-61 du code du travail est abrogé.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Notre amendement vise à abroger l’article L. 2323–61 du code du travail, qui permet, dès lors qu’un accord collectif de branche, d’entreprise ou de groupe est conclu, d’adapter les modalités d’information du comité d’entreprise dans les entreprises d’au moins trois cents salariés.
Nous entendons, avec cet amendement, garantir la loyauté, la sincérité et l’exhaustivité des informations que l’employeur est tenu de transmettre au comité d’entreprise et de porter à la connaissance des salariés dès lors qu’un plan de sauvegarde de l’emploi est envisagé.
Actuellement, dans le cadre des informations trimestrielles du comité d’entreprise, dans les entreprises de moins de trois cents salariés, l’employeur doit communiquer des informations sur l’évolution générale des commandes, l’exécution des programmes de production, les éventuels retards de paiement de cotisations sociales par l’entreprise, ainsi que le nombre de contrats de mission conclus avec une entreprise de travail temporaire.
Toutefois, le contenu des informations transmises au comité d’entreprise aurait dû faire l’objet d’un décret en Conseil d’État lors de l’adoption de la loi relative au dialogue social et à l’emploi, en 2015. Un an plus tard, le décret n’a toujours pas été appliqué et les informations n’ont pas été précisées. Voilà pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons d’adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement. La commission n’avait pas compris l’idée qui justifiait la suppression de ce décret aux yeux des auteurs de cet amendement. Elle avait donc émis, à titre conservatoire, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’avis est défavorable. En effet, nous avons eu un débat à ce sujet l’an dernier lors de l’examen de la loi Rebsamen. Le décret sur les informations liées à la consultation et auquel Mme Beaufils fait référence a été validé par le Conseil d’État ; il sera donc publié dans les prochains jours. Par ailleurs, il me semble que le dispositif de l’amendement comporte une erreur : il tend en conséquence à supprimer l’information trimestrielle du comité d’entreprise, élément lui aussi déterminant.
M. le président. Madame Beaufils, l’amendement n° 738 rectifié est-il maintenu ?
Mme Marie-France Beaufils. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 738 rectifié est retiré.
Article 8
I. – Le livre II de la deuxième partie du code du travail est ainsi modifié :
1° La section 4 du chapitre Ier du titre VI est ainsi modifiée :
a) L’article L. 2261-7 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2261-7. – I. – Sont habilitées à engager la procédure de révision d’un accord interprofessionnel, d’une convention ou d’un accord de branche :
« 1° Jusqu’à la fin du cycle électoral au cours duquel la convention ou l’accord est conclu :
« a) Une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord et signataires ou adhérentes de la convention ou de l’accord ;
« b) Une ou plusieurs organisations professionnelles d’employeurs signataires ou adhérentes. Si la convention ou l’accord est étendu, ces organisations doivent être en outre représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord ;
« 2° À l’issue de ce cycle :
« a) Une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord ;
« b) Une ou plusieurs organisations professionnelles d’employeurs de la branche. Si la convention ou l’accord est étendu, ces organisations doivent être représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord.
« II. – Les avenants de révision obéissent aux conditions de validité des accords prévues, selon le cas, aux sections 1 et 2 du chapitre II du titre III du présent livre II.
« Lorsque l’avenant de révision a vocation à être étendu, sa validité est subordonnée à sa signature par une ou plusieurs organisations professionnelles d’employeurs représentatives dans son champ d’application, dans les conditions prévues au chapitre Ier du titre V du livre Ier de la présente deuxième partie. » ;
b) Après l’article L. 2261-7, il est inséré un article L. 2261-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2261-7-1. – I. – Sont habilitées à engager la procédure de révision d’une convention ou d’un accord d’entreprise ou d’établissement :
« 1° Jusqu’à la fin du cycle électoral au cours duquel cette convention ou cet accord a été conclu, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord et signataires ou adhérentes de cette convention ou de cet accord ;
« 2° À l’issue de cette période, une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives dans le champ d’application de la convention ou de l’accord.
« II. – La validité d’un avenant de révision s’apprécie conformément à la section 3 du chapitre II du titre III du présent livre II. » ;
2° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2232-21, les mots : « et conclure » sont remplacés par les mots : «, conclure et réviser » ;
3° L’article L. 2232-22 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « et conclure » sont remplacés par les mots : «, conclure et réviser » ;
b) Le troisième alinéa est ainsi modifié :
– à la première phrase, après le mot : « accords », sont insérés les mots : « ou des avenants de révision » ;
– à la deuxième phrase, après les mots : « l’accord », sont insérés les mots : « ou l’avenant de révision » ;
– à la dernière phrase, le mot : « collectif » est remplacé par les mots : « ou l’avenant de révision » ;
4° Le premier alinéa de l’article L. 2232-24 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « et conclus » sont remplacés par les mots : «, conclus et révisés » ;
b) La deuxième phrase est supprimée ;
5° Après l’article L. 2232-24, il est inséré un article L. 2232-24-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2232-24-1. – Les accords négociés et conclus par un ou plusieurs salariés mandatés mentionnés à l’article L. 2232-24 peuvent porter sur toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement sur le fondement du présent code. »
II. – Le chapitre Ier du titre VI du livre II de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :
1° Après le mot : « suivent », la fin du deuxième alinéa de l’article L. 2261-10 est ainsi rédigée : « le début du préavis mentionné à l’article L. 2261-9. Elle peut donner lieu à un accord, y compris avant l’expiration du délai de préavis. » ;
2° La sous-section 4 de la section 5 est ainsi rédigée :
« Sous-section 4
« Maintien de la rémunération perçue
« Art. L. 2261-13. – Lorsque la convention ou l’accord qui a été dénoncé n’a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans un délai d’un an à compter de l’expiration du préavis, les salariés des entreprises concernées conservent, en application de la convention ou de l’accord dénoncé, une rémunération dont le montant annuel, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par leur contrat de travail, ne peut être inférieur à la rémunération versée lors des douze derniers mois. Cette rémunération s’entend au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, à l’exception de la première phrase du deuxième alinéa du même article.
« Lorsqu’une stipulation prévoit que la convention ou l’accord dénoncé continue à produire ses effets pendant un délai supérieur à un an, le premier alinéa du présent article s’applique à compter de l’expiration de ce délai si une nouvelle convention ou un nouvel accord n’a pas été conclu. »
III. – La section 6 du chapitre Ier du titre VI du livre II de la deuxième partie du même code est ainsi modifiée :
1° Le deuxième alinéa de l’article L. 2261-14 est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque la convention ou l’accord qui a été mis en cause n’a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans le délai fixé au premier alinéa du présent article, les salariés des entreprises concernées conservent, en application de la convention ou de l’accord mis en cause, une rémunération dont le montant annuel, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par leur contrat de travail, ne peut être inférieur à la rémunération versée lors des douze derniers mois. Cette rémunération s’entend au sens de l’article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, à l’exception du deuxième alinéa du même article.
« Lorsque la mise en cause concerne une convention ou un accord à durée déterminée, le deuxième alinéa du présent article :
« 1° S’applique jusqu’au terme qui aurait été celui de la convention ou de l’accord en l’absence de mise en cause si ce terme est postérieur à la date à laquelle la convention ou l’accord mis en cause cesse de produire ses effets en application du premier alinéa ;
« 2° Ne s’applique pas si ce terme est antérieur à la date à laquelle cette convention ou cet accord cesse de produire ses effets en application du premier alinéa. » ;
2° Sont ajoutés des articles L. 2261-14-2 à L. 2261-14-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 2261-14-2. – Dès lors qu’est envisagée une fusion, une cession, une scission ou toute autre modification juridique qui aurait pour effet la mise en cause d’une convention ou d’un accord, les employeurs des entreprises concernées et les organisations syndicales de salariés représentatives dans l’entreprise qui emploie les salariés dont les contrats de travail sont susceptibles d’être transférés peuvent négocier et conclure la convention ou l’accord de substitution prévu au premier alinéa de l’article L. 2261-14.
« La durée de cette convention ou de cet accord ne peut excéder trois ans. Il entre en vigueur à la date de réalisation de l’événement ayant entraîné la mise en cause et s’applique à l’exclusion des stipulations portant sur le même objet des conventions et accords applicables dans l’entreprise ou l’établissement dans lesquels les contrats de travail sont transférés.
« À l’expiration de cette convention ou de cet accord, les conventions et accords applicables dans l’entreprise ou dans l’établissement dans lesquels les contrats de travail des salariés ont été transférés s’appliquent à ces salariés.
« Art. L. 2261-14-3. – Dès lors qu’est envisagée une fusion, une cession, une scission ou toute autre modification juridique qui aurait pour effet la mise en cause d’une convention ou d’un accord, les employeurs et les organisations syndicales de salariés représentatives dans les entreprises ou établissements concernés peuvent négocier et conclure une convention ou un accord se substituant aux conventions et accords mis en cause et révisant les conventions et accords applicables dans l’entreprise ou l’établissement dans lesquels les contrats de travail sont transférés. Cette convention ou cet accord entre en vigueur à la date de réalisation de l’événement ayant entraîné la mise en cause.
« Art. L. 2261-14-4. – La validité des conventions et des accords mentionnés aux articles L. 2261-14-2 et L. 2261-14-3 s’apprécie dans les conditions prévues aux articles L. 2232-12 et L. 2232-13.
« Les taux mentionnés aux mêmes articles L. 2232-12 et L. 2232-13 sont appréciés :
« 1° Dans le périmètre de l’entreprise ou de l’établissement employant les salariés dont les contrats de travail sont transférés, dans le cas mentionné à l’article L. 2261-14-2 ;
« 2° Dans le périmètre de chaque entreprise ou établissement concerné, dans le cas mentionné à l’article L. 2261-14-3.
« Le cas échéant, la consultation des salariés est effectuée dans ces mêmes périmètres. »
IV. – Le II et le 1° du III du présent article s’appliquent à compter de la date où les accords ou conventions dénoncés ou mis en cause cessent de produire leurs effets, y compris si la date de leur dénonciation ou de leur mise en cause est antérieure à la publication de la présente loi.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. L’article 8 du présent projet de loi autorise, dans les entreprises dépourvues de délégué syndical, les représentants élus du personnel ou, à défaut, les salariés mandatés à réviser un accord ou une convention.
Sans même parler de la tentation, pour l’employeur, de choisir son interlocuteur en proposant à l’un de ses salariés de se faire mandater par un syndicat pour être habilité à négocier et signer son projet d’accord, on peut s’interroger sur la capacité réelle d’un salarié d’une petite entreprise, sans formation ni expérience de la négociation collective, et ne bénéficiant que d’une protection de douze mois, à jouer pleinement son rôle de partenaire social dans une négociation portant sur tous les aspects du droit du travail. Surtout, cet article 8 prévoit la suppression des avantages individuels acquis, désormais réduits au simple maintien de la rémunération perçue. C’est à nos yeux une attaque particulièrement grave contre les droits des salariés.
Pour donner un exemple, la Cour de cassation a rendu une décision le 2 mars dernier qui prévoit que, en l’absence d’accord, la structure de la rémunération résultant d’un accord collectif dénoncé constitue un avantage individuel acquis incorporé au contrat de travail des salariés.
En 2001, un employeur a dénoncé plusieurs accords collectifs nationaux et locaux applicables au sein des entreprises du groupe. L’un des accords prévoyait le versement, en plus du salaire, de primes de vacances, ainsi que de primes familiales et d’expérience. En l’absence d’accords de substitution conclus, les salariés concernés ont perdu le bénéfice de leurs primes. Néanmoins, la Cour de cassation a donné raison aux salariés en reconnaissant leurs avantages individuels acquis.
Avec son article 8, ce projet de loi, d’un côté, supprime cet acquis social et, de l’autre, exige pour la validation des accords le soutien d’organisations syndicales ayant reçu non plus 30 % mais 50 % des voix aux élections professionnelles.
Cette dernière mesure, certes positive, ne compense pourtant pas les mesures régressives de cet article. Pour cette raison, nous demandons sa suppression.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 31 rectifié est présenté par Mme Lienemann, M. Cabanel et Mme Ghali.
L’amendement n° 47 est présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 31 rectifié.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous proposons, à travers cet amendement, la suppression de l’article 8 car il remet en cause le principe des avantages individuels acquis, qui permet aux salariés n’étant plus couverts par un accord de conserver des avantages issus de cet accord. La nouvelle définition des avantages individuels acquis prévue par cet article est strictement fondée sur le montant de la rémunération annuelle des douze derniers mois. En conséquence, tous les avantages qui ne relèvent pas de la rémunération – jours de congés supplémentaires, sursalaire familial, etc. – vont disparaître. Cette disposition s’apparente à une régression sociale pour de nombreux salariés. C’est pourquoi cet amendement tend à la supprimer.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 47.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Nous demandons nous aussi la suppression de l’article 8 car il comporte selon nous plusieurs dispositions synonymes de régression pour les protections des salariés.
Il prévoit tout d’abord l’extension du mandatement des salariés pour la négociation de tout type d’accord dans les entreprises dépourvues de délégué syndical. Cette mesure n’incite pas au développement du syndicalisme dans les entreprises, alors que la présence d’organisations syndicales dans les entreprises est à nos yeux un véritable gage d’efficacité et de dialogue social.
En outre, il remet en cause le principe essentiel du droit du travail dit des « avantages individuels acquis », qui permet aux salariés qui ne sont plus couverts par un accord collectif de conserver les avantages issus de cet accord. Nous ne voulons pas voir disparaître cet aspect extrêmement important de la législation du travail.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression de l’article 8. Il est vrai que le rapport Cesaro pointait bien la complexité de cette notion d’avantages individuels acquis : chacun de ces trois mots est délicat à définir. Permettez-moi de citer ce rapport : « Il ressort de cette analyse que, s’il existe certaines “zones de clarté”, la notion d’avantages individuels acquis est complexe et d’une prévisibilité relative. Celle-ci dépend assez largement des solutions jurisprudentielles existantes ».
Le Gouvernement a fait le choix de centrer les avantages individuels acquis, ou AIA, sur le cœur du cœur de la relation contractuelle qu’est la rémunération, le reste étant le fameux « grain à moudre » cher à André Bergeron. Dans le cadre de la renégociation d’un accord, on met en effet tout sur la table, la rémunération représentant le seul élément intangible.
La commission avait approuvé l’article 8 du projet de loi le 1er juin. Par conséquent, l’avis est défavorable sur ces amendements de suppression dudit article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. La première question à se poser est celle-ci : pourquoi avons-nous voulu revenir sur les avantages individuels acquis ? Ce projet de loi est le fruit du rapport Mettling, du rapport Combrexelle, du rapport Cesaro, ainsi que du rapport Quinqueton sur la restructuration des branches.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Les rapports peuvent servir à quelque chose !
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’objectif de ce projet de loi est de favoriser le dynamisme des accords. Pour ce faire, il faut lever les flous juridiques qui existent aujourd’hui lorsqu’un accord est dénoncé. La jurisprudence actuelle sur cette question est pléthorique ; c’est pourquoi M. le professeur Cesaro s’est attelé à nous faire des propositions.
Puisque nous sommes aux responsabilités, quand il y a un flou (Exclamations amusées sur plusieurs travées.), faut agir. Comme le disait Mme Martine Aubry, grande ministre du travail, il faut poser les choses.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Son esprit plane décidément sur nos discussions !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il faut savoir qu’aujourd’hui ni l’employeur ni le salarié ne peuvent savoir quelles sont les clauses qui constituent des avantages individuels acquis, c’est-à-dire ces avantages qui ont été incorporés dans le contrat de travail et doivent être maintenus. La jurisprudence est extrêmement variable et, surtout, peu prévisible. C’est notamment le cas pour les primes et les rémunérations dites « accessoires », pourboires, temps de pauses, etc. Toutes les primes ne sont pas systématiquement considérées comme faisant partie de ces avantages. Pour notre part, nous les incluons dans la rémunération.
À cause de ce flou, la négociation se trouve bloquée ; certains accords d’entreprise ou de branche n’ont pas été renégociés depuis des années parce que ni les entreprises ni les salariés ne savent à quoi s’attendre.
Cette situation est à mes yeux inacceptable alors que nous souhaitons rendre la négociation plus dynamique. Elle est en outre contraire à l’égalité entre les salariés : selon qu’ils vont ou non au contentieux, ils ne sont pas traités de la même manière et ne bénéficient pas des mêmes garanties.
C’est au regard de cette situation que nous avons souhaité clarifier les choses. La loi fixera une règle claire : les avantages individuels acquis consisteront dans le maintien de la rémunération du salarié. Autrement dit, tous les salariés conserveront leur pouvoir d’achat si un accord est dénoncé. Je précise que la base de cette rémunération est large : elle sera la même que celle des cotisations sociales et inclura toutes les rémunérations perçues par le salarié pendant l’année qui précède la fin de l’accord. Le salarié gardera donc le montant équivalent au salaire et à toutes les primes. C’est ainsi que nous entendons également stabiliser la jurisprudence. Seuls l’intéressement et les stock-options ne seront pas pris en compte.
Notre but n’est donc pas de faire du moins-disant social ou de porter atteinte aux droits des salariés ; au contraire, nous posons un système qui respectera l’égalité, apportera de la sécurité juridique et protégera le pouvoir d’achat. En outre, nous favorisons ainsi la conclusion d’accords, c’est-à-dire aussi de nouveaux droits pour les salariés.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31 rectifié et 47.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 79 rectifié, présenté par M. Husson, Mme Morhet-Richaud, MM. Houel, César et Karoutchi, Mmes Canayer et Imbert, MM. B. Fournier et Commeinhes, Mmes Lamure et Deromedi et MM. Vasselle, Revet, Longuet, Doligé, Rapin et Laménie, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Il est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L’amendement n° 617, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 19 à 27
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il est prévu d’ouvrir la révision des accords collectifs conclus avec des syndicats représentatifs aux représentants du personnel, qu’ils soient ou non mandatés.
L’extension du mandatement des salariés pour la négociation de tous types d’accords dans les entreprises dépourvues de délégué syndical n’est pas une mesure qui tend à valoriser le syndicalisme dans les entreprises.
Celles et ceux qui dénoncent la faiblesse du nombre de salariés syndiqués ne peuvent pas, dans le même temps, faire comme si l’on ne pouvait pas changer les choses d’une manière différente de celle qui est proposée.
Il me semble extrêmement important d’affirmer que le fait de mandater un salarié ne règle pas les problèmes. En effet, nous savons pertinemment qu’une pression très importante s’exerce sur les salariés, qui sont notamment exposés à la possibilité de perdre leur emploi. Par conséquent, un salarié mandaté peut se montrer beaucoup plus perméable aux pressions de son employeur. Dès lors, ce mécanisme n’aide pas à l’exercice d’un véritable dialogue social pouvant assurer la défense des salariés.
Une confusion des genres s’opère tant au banc de la commission qu’au banc du Gouvernement. Il faudrait, selon eux, dynamiser le dialogue social ; pour autant, on ne crée pas les conditions nécessaires à ce dialogue et, surtout, on continue de faire comme si n’existait aucun lien de subordination dans l’entreprise. Le code du travail a justement été construit pour protéger ceux qui subissent ce lien, à savoir les salariés.
C’est pourquoi nous présentons cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Bizet, Commeinhes et Cambon, Mmes Primas, Morhet-Richaud et Cayeux, MM. César et Cornu, Mme Garriaud-Maylam, M. Vaspart, Mme Mélot, MM. Houel, Revet, P. Leroy, Dallier, P. Dominati, Panunzi et Mouiller, Mme Deromedi et MM. Lefèvre, Laménie et Mandelli, est ainsi libellé :
Alinéas 19 à 24
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
3° L’article L. 2232-22 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2232-22. – Les représentants élus titulaires du personnel au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel ou à l’instance mentionnée à l’article L. 2391-1 ou, à défaut, les délégués titulaires du personnel peuvent négocier, conclure et réviser des accords collectifs de travail.
« Ces accords peuvent porter sur toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement sur le fondement du présent code et doivent avoir été approuvés par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans des conditions déterminées par décret et dans le respect des principes généraux du droit électoral.
« La validité de l’accord est subordonnée à sa signature par un ou plusieurs représentants élus titulaires ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.
« À défaut, l’employeur peut soumettre le projet d’accord pour ratification à la majorité des deux tiers du personnel.
« L’employeur communique l’accord à l’autorité administrative compétente. Elle contrôle qu’il n'enfreint pas les dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles applicables. À défaut de réponse dans un délai de deux mois suivant sa transmission, l’accord est réputé validé. » ;
…° Le dernier alinéa de l’article L. 2232-23-1 est supprimé ;
…° À l’intitulé du paragraphe 2 de la sous-section 3 de la section 3 du chapitre II du titre III, le mot : « mandatés » est supprimé ;
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement vise à renforcer la négociation salariale dans les entreprises en autorisant les représentants du personnel, même non mandatés par un syndicat, à négocier et à conclure des accords. La validité de ces accords sera subordonnée à leur signature par un ou des représentants du personnel ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés. À défaut, l’employeur pourra soumettre le projet d’accord pour ratification à la majorité des deux tiers du personnel.
Cela permettra à l’ensemble des entreprises d’accéder à la négociation salariale. C’est particulièrement vrai dans les ETI, les entreprises de taille intermédiaire, où 73 % des élus majoritaires ne sont pas affiliés à un syndicat représentatif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Sur l’amendement n° 617, la commission a émis un avis défavorable. En effet, le droit en vigueur autorise le salarié mandaté à signer des accords. En revanche, il est muet sur sa capacité à conclure des accords ; la loi Rebsamen n’avait pas inscrit dans ce domaine le terme de « révision ». Ces deux volets sont pourtant indissociables.
Quant à l’amendement n° 11 rectifié, il est largement satisfait par l’article 10 A, introduit par la commission dans ce texte. La commission demande par conséquent le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’avis est défavorable sur ces deux amendements. Concernant l’amendement n° 617, je rappellerai que, lorsqu’un salarié est mandaté, l’accord est ensuite soumis au référendum. En outre, un salarié mandaté est un salarié qui est protégé, et ce d’autant plus qu’il est soutenu par une organisation syndicale. Notre objectif est quand même de ne pas exclure une grande partie des entreprises et de notre tissu économique de la négociation. Si nous voulons que, lors des élections dans les très petites entreprises, à la fin de cette année, les organisations syndicales puissent s’implanter dans ces entreprises, nous ne pouvons pas pour autant exclure pour ces entreprises la capacité de pouvoir négocier des accords. Le mandatement est l’une des manières de parvenir à cette fin. Par ailleurs, les salariés mandatés sont formés par une organisation syndicale.
Une réflexion similaire s’applique à l’amendement n° 11 rectifié. Un salarié mandaté est appuyé par une structure syndicale et peut être formé. Il n’a donc pas le même poids que s’il était seul.
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 11 rectifié.
Mme Jacky Deromedi. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié est retiré.
L'amendement n° 618, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 28 et 29
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Les alinéas 28 et 29 introduisent dans le code du travail un nouvel article afin que des salariés non élus, mais mandatés par un syndicat représentatif, puissent conclure des accords sur toutes les mesures pour lesquelles le code du travail renvoie à la négociation collective, alors que l’actuel article restreint le champ de ces accords aux seules mesures dont la mise en œuvre est expressément subordonnée par la loi à la conclusion d’un accord collectif.
Or ce type de négociations garantit une sécurité moindre par rapport à la représentation collective des salariés. Et donc l’élargir à des négociations plus larges pouvant concerner la durée et l’organisation du temps de travail ou encore les accords de préservation et de développement de l’emploi aura immanquablement des impacts lourds et décisifs sur les conditions de travail.
En 2008, au moment des discussions de la loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail portée par Xavier Bertrand, nous avions déjà alerté sur les conséquences d’un texte qui, en définitive, a ouvert la porte aux dérégulations sur la négociation d’accords par des salariés mandatés, sur des sujets très larges.
Aujourd’hui, l’introduction proposée va encore plus loin en élargissant les négociations à « toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement », alors même que le projet de loi supprime le principe de faveur.
Mes chers collègues, cela risque d’entraîner une rupture d’égalité entre les entreprises d’un même secteur d’activité et la précarisation des conditions de travail des salariés concernés par cette négociation dérogatoire.
C’est pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement de suppression des alinéas 28 et 29 de l’article 8.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Les auteurs de cet amendement, mais aussi d’autres collègues de la commission siégeant sur des travées différentes, critiquent cette possibilité, prévue à cet alinéa, de mandater un salarié afin de conclure des accords sur tous les sujets traités par le code du travail, et formulent des griefs à son encontre.
Il n’en demeure pas moins que nous avons tenu à ménager cette possibilité, même si nous ouvrons de nouveaux canaux de discussion et de dialogue, comme on le verra avec les articles 10 A et suivants.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 620, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 35, première phrase
Après la seconde occurrence du mot :
dénoncé,
insérer les mots :
les avantages individuels qu’ils ont acquis, dont
II. – Alinéa 39, première phrase
Après la seconde occurrence du mot :
cause,
insérer les mots :
les avantages individuels qu’ils ont acquis, dont
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à compléter les dispositions des alinéas 35 et 39 lorsque la convention ou l’accord a été dénoncé et n’a pas été remplacé.
Dans cette situation, le code du travail prévoit actuellement qu’une nouvelle convention ou qu’un nouvel accord intervient dans un délai d’un an à compter de l’expiration du préavis et que « les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu’ils ont acquis, en application de la convention ou de l’accord, à l’expiration de ce délai ».
Dans la rédaction qui nous est proposée, les avantages individuels acquis sont uniquement remplacés par « une rémunération dont le montant annuel, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par leur contrat de travail, ne peut être inférieur à la rémunération versée lors des douze derniers mois ».
Au-delà de la rémunération, ce sont aussi les congés, les repos, qui constituent une amélioration des conditions de travail ou du statut du salarié en tant qu’individu.
De plus, les avantages individuels acquis sont un élément important du rapport de force dans les négociations dont les entreprises souhaitent s’affranchir avec le concours du Gouvernement et de la majorité sénatoriale. En effet, en l’état actuel du droit, cela favorise la négociation collective puisque la seule façon pour l’employeur d’éviter le maintien des avantages individuels acquis est la conclusion d’un accord de remplacement. Alors qu’avec le seul maintien de la rémunération, l’intérêt de l’employeur à négocier est moindre. La notion d’avantages acquis a pu être juridiquement considérée comme insuffisamment précise, comparativement à la notion de rémunération.
C’est pourquoi, à travers cet amendement, nous vous proposons de mentionner les deux notions – les avantages individuels acquis, dont la rémunération –, afin de s’assurer qu’il n’y aura pas de perte de droits pour les salariés.
La rédaction de ces deux alinéas nous paraît incomplète et nous vous proposons donc de la parfaire en adoptant cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission, pour des raisons identiques à celles que nous avons précédemment avancées, émet également un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à étendre la notion d’avantages individuels acquis. Elle souhaite conserver l’épure du projet gouvernemental.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Avis défavorable, pour les raisons que j’ai indiquées tout à l’heure.
M. le président. L'amendement n° 451 rectifié, présenté par Mmes Billon et Lamure, MM. Bouchet, Cadic, Canevet et Danesi, Mme Morhet-Richaud, MM. Adnot et P. Dominati, Mme Primas et M. Vaspart, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 52
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 2511-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une convention ou un accord peut suspendre, pendant toute sa durée, l’exercice du droit de grève en vue d’appuyer des revendications professionnelles ressortant du champ de ladite convention ou dudit accord. Lorsque plusieurs salariés souhaitent exercer leur droit de grève dans ces circonstances, ils demandent à l’employeur d’organiser une consultation des salariés, le cas échéant par voie électronique, dans les cinq jours suivant la notification de la demande. La grève est autorisée si elle recueille l’approbation d’au moins la moitié des salariés de l’entreprise. »
La parole est à M. Olivier Cadic.
M. Olivier Cadic. Plusieurs membres de la délégation aux entreprises ont souhaité déposer cet amendement d’appel afin que nous prenions enfin le temps de nous interroger sur les objectifs du dialogue social et sur ce qui pourrait aider les entreprises françaises.
À la demande de la délégation, l’IFO, institut munichois réputé d’études économiques, a dressé une analyse comparée sur les pouvoirs et la représentativité des représentants des salariés dans l’entreprise en France et en Allemagne. Il montre que notre pays est malheureusement champion européen de la grève, avec 139 jours de travail perdus pour 1 000 employés, contre 18 pour l’Allemagne, où l’organisation des grèves est contrainte par le champ et la durée les accords collectifs.
Aujourd’hui, nous constatons tous le caractère nocif des grèves à répétition. Les premières victimes en sont les TPE, les PME et tous leurs salariés, qui nous le font d’ailleurs savoir !
Par cet amendement, nous proposons simplement de nous inspirer du modèle allemand – Mme Bricq en a parlé tout à l’heure – et d’offrir aux partenaires sociaux la possibilité – il ne s’agit absolument pas de les y obliger – de prévoir une clause de paix sociale dans les accords collectifs.
Et parce que les engagements pris par les syndicats ne doivent pas pouvoir empêcher le droit de grève des salariés, nous prévoyons un aménagement leur permettant, malgré une telle clause dans un accord collectif, d’exercer leur droit dans la mesure où la majorité des salariés l’approuvent par voie de consultation.
Avec cet amendement, je vous invite à aller au-delà de l’approche purement juridique et à aborder la question de la paix sociale, car nous ne pouvons pas continuer à battre le record des jours de grève en Europe sans nous demander comment changer cette situation, qui constitue un véritable handicap pour la France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Comme on dit : c’est du lourd ! (Rires.)
Le constat que dressent Mme Billon et les cosignataires de cet amendement sur le nombre de jours de grève en France n’est pas contestable. Mais il est vrai que nous sommes souvent fiers de cette exception française.
M. Robert del Picchia. Eh oui !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Cela étant, les précédentes majorités qui se sont succédé depuis 2002 ont tenté de concilier à la fois l’exercice du droit constitutionnel de grève et le droit au travail notamment en mettant en place un certain nombre de mécanismes de type service minimum, mécanisme d’alerte, etc.
S’agissant d’un sujet aussi important, la commission a estimé qu’il fallait s’en tenir aux équilibres existants.
Mme Evelyne Yonnet. Cela vaut mieux !
Mme Éliane Assassi. C’est bien !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Soucieuse que l’Euro 2016 se termine bien (Sourires.), elle sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme Evelyne Yonnet. Bravo !
M. Yves Daudigny. Quelle sagesse ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Sans surprise, le Gouvernement émet également un avis défavorable.
L’exercice du droit de grève fait l’objet du septième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Pour ma part, je suis favorable à des négociations pour prévenir les grèves comme cela se fait dans une entreprise de transport public comme la RATP. C’est donc ce type de démarche qu’il faut privilégier. En revanche, permettre à un accord d’interdire une grève, comme vous le proposez, n’est pas envisageable. J’entends que le droit de grève soit respecté.
Mme Éliane Assassi. Comme quoi, le football est fédérateur ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Cadic, pour la bonne tenue de l’Euro… (M. Philippe Dallier s’esclaffe)
M. Olivier Cadic. Je peux comprendre les commentaires que je viens d’entendre. Simplement, dois-je rappeler que le ministre de l’économie déplorait encore récemment l’impact de ces grèves à répétition (Mme Nicole s’exclame.) sur nos TPE et nos PME ? Il est intéressant de voir ce qu’il en est outre-Rhin, comment le droit de grève est encadré. Je ne parle même pas de la Suisse, où les règles sont encore différentes.
Cela étant dit, il faudra bien, tôt ou tard, en discuter, édicter des règles.
Tout à l’heure, il était question d’un rapport d’évaluation ; voilà un sujet intéressant : quelles mesures pourraient nous aider à réduire le nombre de jours de grève et quelles actions permettraient d’obtenir un tel résultat ?
Puisque j’avais bien précisé qu’il s’agissait d’un amendement d’appel, personne ne sera surpris que je le retire.
Mme Nicole Bricq. Dommage ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 451 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
I A. – Le dernier alinéa des articles L. 2314-11, L. 2314-20, L. 2314-31, L. 2324-13, L. 2324-18 et L. 2327-7 du code du travail est ainsi rédigé :
« La décision de l’autorité administrative peut faire l’objet d’un recours devant le juge judiciaire, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. »
I. – L’article L. 2322-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision de l’autorité administrative peut faire l’objet d’un recours devant le juge judiciaire, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. »
II. – Après le troisième alinéa de l’article L. 2232-22 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La commission se prononce sur la validité de l’accord dans un délai de quatre mois à compter de la transmission de celui-ci ; à défaut, l’accord est réputé validé. »
II bis. – Le 1° bis de l’article L. 2323-8 du même code est ainsi modifié :
1° Après le mot : « personnelle », sont insérés les mots : « et familiale » ;
2° Le mot : « respective » est remplacé par le mot : « comparée ».
II ter (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2325-5-1 du même code sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, l’employeur peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité d’entreprise. L’employeur réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
III. – L’article L. 2326-5 du même code est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les réunions de la délégation unique du personnel peuvent se dérouler en visioconférence, dans les conditions prévues à l’article L. 2325-5-1, y compris lorsque l’ordre du jour comporte des points relevant uniquement des attributions des délégués du personnel. »
III bis A (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2327-13-1 du même code sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, l’employeur peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité central d’entreprise. L’employeur réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
III bis. – Aux articles L. 2363-6 et L. 2373-3 du même code, la référence : « L. 2353-27 » est remplacée par la référence : « L. 2353-27-1 ».
IV. – Au premier alinéa de l’article L. 2323-9 du même code, après les mots : « informations au comité d’entreprise », sont insérés les mots : « et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ».
V. – Le livre III de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 2323-26, il est inséré un article L. 2323-26-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2323-26-1. – Le seuil de trois cents salariés mentionné au présent chapitre est réputé franchi lorsque l’effectif de l’entreprise dépasse ce seuil pendant les douze derniers mois, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
« L’employeur dispose d’un délai d’un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer complètement aux obligations d’information et de consultation du comité d’entreprise qui en découlent. » ;
2° À l’article L. 2325-14-1, la référence : « à la présente sous-section » est remplacée par la référence : « au présent chapitre ».
VI. – Au premier alinéa de l’article L. 2323-60 du même code, les mots : « communique au comité d’entreprise » sont remplacés par les mots : « met à la disposition du comité d’entreprise, dans les conditions prévues à l’article L. 2323-9, ».
VII. – L’article L. 2327-15 du même code est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’il y a lieu de consulter à la fois le comité central d’entreprise et un ou plusieurs comités d’établissement, un accord peut définir l’ordre et les délais dans lesquels le comité central d’entreprise et le ou les comités d’établissement rendent et transmettent leurs avis. » ;
2° Le début du dernier alinéa est ainsi rédigé : « À défaut d’accord, l’avis de chaque comité d’établissement est rendu et transmis au comité central d’entreprise et l’avis du comité central d’entreprise est rendu dans… (le reste sans changement) ;
VII bis (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2334-2 du code du travail sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, le président peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité de groupe. Il réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
VII ter (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2341-12 du code du travail sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, le chef de l’entreprise dominante peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité d’entreprise européen. Il réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
VII quater (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2353-27-1 du code du travail sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, le président peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité de la société européenne. Il réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
VIII. – L’article L. 4616-3 du même code est ainsi modifié :
1° Après la première occurrence du mot : « travail », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « un accord peut définir l’ordre et les délais dans lesquels l’instance de coordination et le ou les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail rendent et transmettent leur avis. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« À défaut d’accord, l’avis de chaque comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est rendu et transmis à l’instance de coordination des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et l’avis de cette dernière est rendu dans des délais fixés par décret en Conseil d’État. »
IX. – Le chapitre II du titre IX du livre III de la deuxième partie du même code est complété par un article L. 2392-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 2392-4. – Par dérogation aux dispositions prévoyant la répartition en établissements distincts prévues aux articles L. 2314-31, L. 2322-5 et L. 2327-7, l’accord mentionné à l’article L. 2391-1 peut déterminer le nombre et le périmètre du ou des établissements distincts pour les élections de la ou des instances regroupées conformément à cet accord dans l’entreprise. Par dérogation aux dispositions prévoyant la répartition en établissements distincts prévues aux articles L. 2314-31 et L. 2322-5, l’accord mentionné à l’article L. 2391-3 peut déterminer le périmètre du ou des établissements distincts pour l’élection de la ou des instances regroupées conformément à cet accord dans l’établissement. »
X. – Le III du présent article est applicable aux entreprises mentionnées au VI de l’article 13 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi dans lesquelles l’employeur a décidé le maintien de la délégation unique du personnel.
M. le président. L'amendement n° 622, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet article 9, que nous abordons à présent, a été modifié lors de son examen en commission. Ces modifications ne représentent pas pour nous un progrès social, notamment en ce qui concerne les institutions représentatives du personnel.
Les principales évolutions introduites ont eu pour but d’aménager les règles de fonctionnement de ces institutions dans un sens défavorable, selon nous, aux salariés : recours à la visioconférence, consultation amoindrie des représentants du personnel, délais raccourcis pour les accords, etc.
C’est, une nouvelle fois, une façon de limiter et de normaliser par avance les négociations.
Bien entendu, il est intéressant d’utiliser plus régulièrement les moyens modernes de communication pour développer les échanges. Mais, s’agissant de la visioconférence, on peut se demander si elle n’empêchera pas, par exemple, les délégués syndicaux de se concerter, de confronter leurs points de vue et de cheminer ensemble lorsqu’ils prennent connaissance de tel ou tel problème. D’autant que, même si l’employeur ne respecte pas ses engagements minimaux, les accords conclus de cette façon restent valables « dès lors qu’est respecté le principe de loyauté entre les parties ». En un mot : on triche, mais à la loyale !
Nous ne pouvons pas accepter cette « flexi-insécurité » dans nos entreprises. Il est nécessaire de préserver un paritarisme éclairé et constructif pour mener un véritable dialogue social dans le monde économique où nous vivons.
Malheureusement, cet article 9 ne permettra pas une nécessaire concertation et une protection adéquate des salariés.
C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons de supprimer cet article et nous vous invitons à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement visant à supprimer l’article 9, lequel procède à un certain nombre de corrections et d’ajustements des lois Rebsamen et Macron.
Par ailleurs, la commission l’a elle-même enrichi, notamment par des mesures sur la visioconférence.
Cet article, en quelque sorte, fait office de voiture-balai de lois adoptées récemment. Cela illustre quelque peu les méfaits de la législation à flux tendu que nous connaissons depuis quelques années et qui nous oblige à revenir régulièrement sur des dispositions afin de les parachever ou de les peaufiner.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Il est exact que l’article 9 procède aux derniers ajustements de la loi Rebsamen, qui contenait des mesures importantes de modernisation du dialogue social. En particulier, cet article oblige la commission paritaire de branche à se prononcer dans un délai de quatre mois sur l’accord signé par les représentants élus du personnel non mandatés, faute de quoi son avis sera réputé favorable.
M. le président. L'amendement n° 623, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 5 et 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Aujourd’hui, vous nous proposez de modifier l’une des dispositions de la loi sur le dialogue social, non pas pour l’améliorer, mais pour l’aggraver.
Ainsi, le silence de la commission paritaire de branche vaudra approbation de l’accord d’entreprise dérogatoire.
Dans un contexte de renforcement des accords d’entreprise, il est incohérent de vouloir en plus supprimer les garde-fous qui permettraient de sécuriser les salariés et d’éviter les abus.
Les commissions paritaires de branche ont déjà du mal à se réunir, avec des moyens limités. En moyenne, on situe leur capacité de réunion à une fois par an. Et là, vous voudriez que le silence de la commission paritaire de branche vaille approbation au bout de quatre mois ! On ne leur laisserait même pas la possibilité de se réunir dans le temps usuel !
On est bien loin ici d’une mesure d’équilibre entre une souplesse pour les entreprises et la pleine protection des salariés. Nombre d’accords seront en effet approuvés non pas par un accord tacite, mais tout simplement par incapacité technique et logistique. L’entreprise n’aura aucun intérêt à relancer la commission, surtout dans le cadre d’un accord défavorable aux salariés.
De fait, la primauté donnée à l’accord d’entreprise couplée à cette mesure ne peut que nuire aux salariés et à leurs droits. Il nous semble que, lorsqu’il s’agit des conditions de vie et de travail de 18 millions de personnes directement, une approbation d’accord ne peut être tacite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Lors de l’examen de la loi Rebsamen, notre collègue rapporteur Catherine Procaccia avait souligné la lourdeur que constituait le contrôle de légalité exercé par la commission paritaire de branche. Le Gouvernement a pris en compte ce risque en obligeant celle-ci à se prononcer dans un délai de quatre mois, délai qui a paru suffisant à la commission. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable.
Ce délai de quatre mois correspond au droit en vigueur ! Autrement dit, l’absence de réponse dans ce délai vaut approbation.
Je puis vous dire que, au cours de mes déplacements sur le terrain, beaucoup d’entreprises et de salariés se sont plaints de ce délai de quatre mois pour qu’intervienne une décision explicite de la branche, délai qu’ils considèrent comme particulièrement long quand ils ont passé six mois à négocier un accord.
M. le président. L'amendement n° 634 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…- Le premier alinéa de l’article L. 2323-1 du même code est ainsi rédigé :
« Le comité d’entreprise a pour objet d’assurer l’expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts par sa participation aux décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production. »
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Le présent amendement constitue un changement de paradigme en matière de dialogue social, en ce qu’il entend donner un nouvel élan au comité d’entreprise afin qu’il soit davantage actif dans la prise de décision et que ses intérêts soient mieux pris en considération.
Afin de permettre une prise en compte des intérêts des salariés, le code du travail impose parfois à l’employeur de consulter le comité d’entreprise avant la prise de certaines décisions, mais la règle en vigueur, c’est que les pouvoirs du comité d’entreprise, qui représente l’instance principale de représentation du personnel dans les entreprises de plus de cinquante salariés, restent très limités.
En tant que tel, le comité d’entreprise ne participe pas à l’élaboration des décisions dans l’entreprise.
Or l’expérience montre que la participation des salariés à la prise de décision stratégique est bénéfique pour l’entreprise sur le long terme. Les travailleurs, de l’ouvrier à l’ingénieur, connaissent mieux que quiconque leur entreprise – et l’outil de travail – : ses forces, ses faiblesses et ses besoins.
C’est pourquoi nous souhaitons renforcer les pouvoirs de ces comités d’entreprise en inscrivant leur participation aux décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, mais aussi en matière d’organisation du travail, de formation professionnelle et, le cas échéant, de techniques de production.
Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Et si nous changions tout ce soir ? (Sourires.)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Soyons fous !
M. Philippe Dallier. Le grand soir ! (Nouveaux sourires.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Moi qui suis très intéressé par les concepts de participation et de coopération, je me dis que, dans un monde idéal, cela pourrait être intéressant.
Mme Éliane Assassi. Nous voulons un monde idéal !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. D’une certaine façon, vous vous inspirez du modèle allemand, où les salariés sont très présents au conseil d’administration, où les conseils d’entreprise jouent un rôle. Au demeurant, nous voyons bien là les limites de nos comparaisons respectives avec des modèles étrangers, car chacun a sa propre cohérence.
Pour en revenir au strict objet de l’amendement, qui vise en réalité à introduire une sorte de système de cogestion, la commission a émis un avis défavorable. Il faudra attendre un peu. (M. Robert del Picchia sourit.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il faudra bien y venir un jour. En effet, lorsque l’on a donné plus de pouvoir aux salariés, comme certaines entreprises l’ont fait par le passé, cela a toujours eu des effets bénéfiques. Moi, j’ai travaillé dans une grande entreprise nationale où les représentants du comité d’entreprise, s’ils n’avaient pas de pouvoir décisionnel, étaient associés à la démarche stratégique de l’entreprise. C’est toujours extrêmement positif, à la fois sur la nature des solutions à apporter pour relever ensemble des défis, mais aussi pour porter l’efficacité sociale au cœur de cette efficacité économique.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je soutiens également cet amendement, qui vise à ce que l’ensemble des salariés puissent être associés aux décisions stratégiques.
Certains grands patrons – ce n’est pas vraiment l’intérêt de l’entreprise – veulent être multibranches, ils sont mégalos, notamment en termes de salaire. Ils sont comme les joueurs de football : « Si je gagne tant, je vaux tant, je suis meilleur que toi ». Ils espèrent ainsi obtenir une reconnaissance, un statut, qui ne correspond plus du tout à leurs besoins.
C’est d’ailleurs pour cette raison que les patrons à la tête d’entreprises ou d’établissements publics ont voulu les faire passer en société anonyme pour gagner trois fois plus. Plus ils gagnent, plus ils ont l’impression d’être respectés. Les choix des grands patrons que vous vantez souvent comme étant de grandes opérations stratégiques n’ont parfois qu’un objectif : une meilleure rémunération. Souvent aussi, ces patrons veulent que leur entreprise soit implantée dans tous les pays du monde, notamment en Chine où il est aujourd’hui très important d’être présent pour répondre à un effet de mode.
Par conséquent, si l’ensemble des salariés de l’entreprise étaient associés aux décisions des patrons, cela permettrait de les tempérer. Je ne dis pas qu’ils ont tous comme finalité leur bien-être ou la satisfaction de leur mégalomanie, je dis juste qu’il faudrait aussi prendre en compte les critères des salariés.
M. le président. L'amendement n° 635 rectifié, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
…- L’article L. 2323-3 du même code est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il peut également élaborer des propositions complémentaires ou alternatives aux projets de l’employeur. » ;
2° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’employeur est tenu de prendre en considération avis, vœux et propositions après les avoir mis à l’étude et en débat. Il rend compte, en la motivant, de la suite donnée aux avis, vœux et propositions. »
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. J’ai bien écouté les avis de M. le rapporteur et de Mme la ministre sur l’amendement précédent. Je vais tout de même tenter ma chance sur celui-ci,…
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Soyons fous !
M. Yves Daudigny. Tous ceux qui ont gagné ont tenté leur chance ! (Sourires.)
M. Bernard Vera. … qui s’inscrit dans la continuité du précédent, car nous souhaitons vraiment renforcer les droits des comités d’entreprise en leur permettant d’élaborer des propositions complémentaires, voire alternatives aux projets de l’employeur.
Chacun sait dans cet hémicycle que le droit à la consultation du comité d’entreprise est un droit fondamental des salariés.
Toutefois, s’il est acquis que l’obligation pour l’employeur de consulter le comité doit précéder en principe la décision de l’employeur, l’intervention des élus du personnel ne s’inscrit toujours pas dans une perspective de cogestion. Ceux-ci ne disposent pas davantage d’un pouvoir de codécision. L’employeur n’est jamais obligé de suivre l’avis rendu par le comité. En effet, rapportée au pouvoir de l’employeur, la place du comité ne fait l’objet, en réalité, d’aucun changement en profondeur. Depuis sa création, il continue de se heurter à une limite majeure, celle du maintien sans faille du pouvoir de direction.
Pourtant, le comité d’entreprise rend des avis sur des questions fondamentales comme la gestion et l’évolution économique et financière de l’entreprise, l’organisation et les conditions de travail, la formation professionnelle, les techniques de production, l’emploi et la vie dans l’entreprise – cette liste n’est évidemment pas exhaustive.
Nous pensons qu’il est impératif de donner plus de pouvoir aux salariés dans la gouvernance des entreprises. Ce qui fait la richesse et la réussite d’une entreprise, ce sont certes les investisseurs, mais surtout les salariés, par le fruit de leur travail et de leur intelligence.
C’est pourquoi nous vous proposons d’octroyer au comité d’entreprise un pouvoir de contre-proposition effectif, d’une part, en lui permettant d’élaborer des propositions complémentaires ou alternatives aux projets de l’employeur et, d’autre part, en mettant en débat ces propositions.
Il s’agirait là d’une évolution favorable à toutes les parties prenantes et aux intérêts de court, de moyen et de long terme de l’entreprise. Ce serait la reconnaissance que la procédure de consultation est porteuse d’une valeur de protection de l’emploi.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission comprend parfaitement l’ambition qui sous-tend cet amendement. Elle a néanmoins émis un avis défavorable au regard de l’aspect assez impératif de sa formulation, l’employeur étant tenu de rendre compte, en la motivant, de la suite donnée aux avis, vœux et propositions. Nous vous remercions néanmoins d’avoir proposé ce dispositif, monsieur le sénateur, car cela a alimenté les débats.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Madame la ministre, votre réponse me paraît un peu rapide pour un sujet aussi important. (Rires sur les travées du groupe CRC.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Je lui ai enlevé les mots de la bouche !
M. Jean Desessard. Mme la ministre est tenue de répondre.
Mme Marie-France Beaufils. Nous sommes dans une situation économique difficile. Or, nous le constatons dans de nombreuses sociétés, chaque fois que les dirigeants de société n’ont pas tenu compte, dans leurs prises de décision, des réflexions de leurs salariés et des comités d’entreprise, cela a été nocif pour la vie économique.
Je citerai l’exemple d’une entreprise que je connais bien, à savoir les ateliers de réparation du matériel ferroviaire de ma commune. Si les salariés de l’entreprise ne s’étaient pas mobilisés en 1976, s’ils n’avaient pas combattu l’orientation prise par leur direction, aujourd’hui, les ateliers de réparation du matériel ferroviaire, qui ne comptaient plus que 400 salariés, seraient fermés. Or, à l’heure actuelle, plus de 1 000 salariés travaillent dans les lieux, car ils ont fait la démonstration, avec des propositions visant à réorganiser la façon de travailler dans l’entreprise, qu’il était possible de répondre aux besoins et de prévoir l’évolution attendue en la matière.
Écouter ce que les salariés ont à dire, étudier sérieusement leurs propositions au sein des entreprises peut être bien plus favorable à la dynamique économique dont nous avons besoin, plutôt que de tenir compte seulement des avis des dirigeants, de ceux qui investissent. Qui investit quand un hedge fund apporte de l’argent mais absorbe toute la richesse produite par l’entreprise simplement pour se rémunérer ? On devrait donner autant de place aux salariés que l’on en donne à ceux qui épuisent ainsi l’activité économique. (M. Dominique Watrin applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Madame la sénatrice, vous l’aurez noté, mes avis ont rarement été aussi brefs depuis que le débat a commencé. En l’occurrence, je ne voyais pas l’intérêt de répéter les propos de M. le rapporteur.
L’article 9 a déjà donné lieu à des débats ici au moment de l’examen de la loi Rebsamen. Toute la question a été examinée. Le Gouvernement a renforcé l’expertise du comité d’entreprise et pris des mesures en faveur de la structuration du débat et de la diffusion des informations. Le comité d’entreprise peut d’ores et déjà proposer des alternatives aux projets de l’employeur, sans qu’il soit obligé de les présenter expressément.
Tels sont les éléments que je souhaitais évoquer. Qu’il n’y ait aucune méprise, si je n’ai pas développé mon argumentation, c’est qu’elle allait dans le même sens que celle de M. le rapporteur. Désormais, je prendrai le temps de vous répondre beaucoup plus longuement.
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 114 amendements au cours de la journée ; il en reste 526, ce qui nous permettra probablement de ne pas siéger le week-end prochain.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
5
Dépôt d’un rapport
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le tableau de programmation des mesures d’application de la loi n° 2016–564 du 10 mai 2016 renforçant le dialogue avec les supporters et la lutte contre le hooliganisme.
Acte est donné du dépôt de ce document.
Il a été transmis à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, et à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.
6
Convocation du Parlement en session extraordinaire
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République en date du 17 juin 2016 portant convocation du Parlement en session extraordinaire le vendredi 1er juillet 2016.
Je donne lecture de ce décret :
« Le Président de la République,
« Sur le rapport du Premier ministre,
« Vu les articles 29 et 30 de la Constitution,
« Décrète :
« Article 1er - Le Parlement est convoqué en session extraordinaire le vendredi 1er juillet 2016.
« Article 2 - L’ordre du jour de cette session extraordinaire comprendra :
« 1. Le débat d’orientation des finances publiques ;
« 2. L’examen ou la poursuite de l’examen des projets de loi suivants :
« - Projet de loi organique relatif aux garanties statutaires, aux obligations déontologiques et au recrutement des magistrats ainsi qu’au Conseil supérieur de la magistrature ;
« - Projet de loi de modernisation de la justice du XXIe siècle ;
« - Projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2015 ;
« - Projet de loi « Égalité et citoyenneté » ;
« - Projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s ;
« - Projet de loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages ;
« - Projet de loi relatif à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ;
« - Projet de loi pour une République numérique ;
« - Projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine ;
« - Projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2016-129 du 10 février 2016 portant sur un dispositif de continuité de fourniture succédant à la fin des offres de marché transitoires de gaz et d’électricité.
« 3. L’examen ou la poursuite de l’examen des propositions de loi suivantes :
« - Proposition de loi organique relative à la nomination à la présidence du conseil d’administration de l’Agence française pour la biodiversité ;
« - Proposition de loi organique relative à la compétence du Défenseur des droits pour la protection des lanceurs d’alerte ;
« - Proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des ressortissants d’un État membre de l’Union européenne autre que la France pour les élections municipales ;
« - Proposition de loi organique rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales des Français établis hors de France ;
« - Proposition de loi rénovant les modalités d’inscription sur les listes électorales ;
« - Proposition de loi visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias ;
« - Proposition de loi tendant à prolonger le délai de validité des habilitations des clercs de notaires ;
« - Proposition de loi précisant les modalités de création d’une installation de stockage réversible en couche géologique profonde des déchets radioactifs de haute et moyenne activité à vie longue ;
« - Sous réserve de son dépôt, proposition de loi relative à la régulation, à la responsabilisation et à la simplification dans le secteur du transport public particulier de personnes.
« 4. L’examen ou la poursuite de l’examen des projets de loi autorisant l’approbation des accords internationaux suivants :
« - Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Japon relatif au transfert d’équipements et de technologies de défense ;
« - Projet de loi autorisant la ratification de la convention de Minamata sur le mercure ;
« - Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Guinée relatif à la coopération en matière de défense et au statut des forces.
« 5. Une séance de questions par semaine.
« Article 3 - Le Premier ministre est responsable de l’application du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
« Fait le 17 juin 2016.
« Par le Président de la République :
« Le Premier ministre,
« Manuel Valls »
La conférence des présidents, qui se réunira le mercredi 22 juin à dix-huit heures trente, permettra d’établir le programme de la session extraordinaire.
Lecture de ses conclusions sera donnée en séance et l’ordre du jour vous sera communiqué à la reprise, mercredi soir.
7
Retrait d’une question orale
M. le président. J’informe le Sénat que la question orale n° 1402 de Mme Brigitte Micouleau est retirée de l’ordre du jour de la séance du mardi 21 juin, ainsi que du rôle des questions orales, à la demande de son auteur.
Acte est donné de cette communication.
8
Communication du Conseil constitutionnel
M. le président. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 17 juin 2016, que, en application de l’article 61–1 de la Constitution, le Conseil d’État lui a adressé une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article 1731 bis du code général des impôts (Impôt sur le revenu – Interdiction d’imputer des avantages fiscaux sur les suppléments de droits résultant de certaines infractions) (2016–562 QPC).
Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.
Acte est donné de cette communication.
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 20 juin 2016, à dix heures, à quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actif-ve-s (n° 610, 2015-2016) ;
Rapport de MM. Jean-Baptiste Lemoyne, Jean-Marc Gabouty et Michel Forissier, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 661, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 662, 2015-2016).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures quarante.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD