M. Gaëtan Gorce. Très bien !

Mme la présidente. L’amendement n° 501, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 112, seconde phrase

Remplacer le taux :

10 %

par le taux :

25 %

La parole est à M. Bernard Vera.

M. Bernard Vera. Cet amendement vise à rehausser le taux minimal de majoration des heures supplémentaires à 25 %. Nous souhaitons revenir ainsi sur la suppression du verrou de l’accord de branche. Illustration, une nouvelle fois, du renversement de la hiérarchie des normes, cette disposition aura des effets directs et palpables, pour des millions de travailleurs français.

Ainsi, la loi encouragerait les entreprises à baisser encore les majorations, frappant les revenus de salariés déjà en difficulté.

Le taux de 25 %, tel qu’il serait déterminé par notre amendement, vise à maintenir le niveau minimal, qui est actuellement celui de la loi, mais aussi des conventions collectives.

En effet, quel serait le résultat d’une baisse de cette majoration ?

Cela encouragerait la diminution mécanique des taux des heures supplémentaires, d’abord au niveau des grosses entreprises, libérées de la nécessité de l’accord de branche, puis dans les petites entreprises sous-traitantes et, enfin, dans les conventions collectives elles-mêmes, dont le contenu deviendrait une coquille vide. C’est finalement le champ des négociations de branche, permettant de préserver les intérêts des petites entreprises, qui est attaqué par ces dispositions.

Nous savons pourtant à quel point les distorsions de concurrence posent problème. On peut largement imaginer les effets d’une telle évolution dans les secteurs déjà très concurrentiels. C’était d’ailleurs la raison principale de la mobilisation des entreprises de transport routier : elles craignaient de faire face à un nouvel épisode de dumping.

Ce sera également le cas dans des secteurs tendus, notamment dans les services, mais aussi dans le secteur du commerce, où les salariés sont très souvent privés du paiement de leurs heures supplémentaires. Pour ceux qui verront la majoration tomber à 10 %, c’est l’assurance, évidemment, de travailler plus pour gagner moins…

Notre amendement vise donc à protéger les salariés, en assurant que les accords d’entreprise ne pourront prévoir de majoration des heures supplémentaires inférieure au taux actuel minimal, soit 25 %. Son adoption éviterait ainsi le moins-disant social, le dumping et l’arbitraire des grands groupes pour les salariés des petites entreprises.

Mme la présidente. L’amendement n° 503, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 121

Remplacer les mots :

d’entreprise ou d’établissement conclu en application de l’article L. 1244-2 ou, à défaut, une convention ou un accord collectif de travail

par les mots :

collectif de travail ou, à défaut, une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement conclu en application de l’article L. 1244-2

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. On peut dire que, dans ce texte, vous n’oubliez aucun salarié ! Ainsi, dans l’alinéa 121, vous vous attaquez aux salariés saisonniers, notamment à leurs heures supplémentaires.

Quand on connaît les conditions de travail, de vie et d’emploi de ces salariés, on ne peut pas accepter que leurs droits soient encore réduits.

Quand on sait aussi le peu d’accords signés en faveur de leurs conditions de travail, on ne peut que s’inquiéter, encore plus, de laisser la possibilité que ces accords soient signés au niveau des entreprises.

En visant les travailleurs saisonniers, cet alinéa 121 touche environ 2 millions de femmes et hommes, qui font vivre le tourisme dans notre pays, mais qui travaillent aussi, pour une grande part – environ 800 000 –, dans l’agriculture ; 2 millions de femmes et d’hommes, sans lesquels notre économie touristique ne pourrait tourner !

Mardi dernier, lors des questions d’actualité au Gouvernement, le groupe Les Républicains, par la voix d’une de ses membres, s’est ému des difficultés que connaît ce secteur, à la suite des différents mouvements qui traversent notre pays. L’auteur de la question a insisté, je me le rappelle très bien, sur le fait que même les salariés de la tour Eiffel étaient en grève…

Je vous invite plutôt, mes chers collègues, à vous soucier, certes du secteur de l’économie touristique dans son ensemble, mais surtout de ses salariés, ces femmes, ces hommes, bien souvent invisibles ! Dans ma région, ce sont très souvent des perchistes ou des salariés de restaurants ou de bars. On ne les voit même pas ! Pour une grande part d’entre eux, on les ignore même… Pourtant, s’ils n’étaient pas là, aucune de nos stations touristiques, à la montagne comme à la mer, ne pourrait fonctionner.

C’est pourquoi je vous invite vraiment, mes chers collègues, à adopter cet amendement, qui remettrait la hiérarchie des normes à l’endroit, au moins pour le secteur des saisonniers.

Mme la présidente. L’amendement n° 240 rectifié bis, présenté par MM. Cadic et Canevet, Mme Billon et MM. Bockel, Guerriau, Longeot et Pozzo di Borgo, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 992, présenté par MM. Lemoyne, Gabouty et Forissier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 125

Remplacer les mots :

à trente-neuf

par les mots :

par décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de la négociation collective, dans la limite de trente-neuf

La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. (Exclamations.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Eh oui, c’est à mon tour de parler, mes chers collègues !

Avec cet amendement, qui permet d’évoquer les différentes notions de durée légale et de durée de référence, nous prévoyons le régime qui prévaudra, à défaut d’accord, pour la durée de référence. Qu’est-il prévu en régime supplétif ?

Tout d’abord, une concertation avec les partenaires sociaux au sein de la Commission nationale de la négociation collective, de telle sorte que ceux-ci puissent être consultés sur la fixation de la durée de référence supplétive. Peut-être feront-ils des propositions pour la fixer à 36, 37, 38 ou 39 heures ? Qu’en sais-je !

Ensuite, le Gouvernement pourra fixer, par décret, la durée supplétive dans la limite de 39 heures.

Nous sommes donc bien loin des caricatures qui ont pu être faites et qui sont une façon, finalement, de tuer le débat, ce qui est quelque peu dommage…

En substituant à la durée légale une durée de référence négociée dans l’entreprise ou la branche, nous sommes dans la cohérence de l’article 2. À telle enseigne, mes chers collègues, que le rapport Combrexelle, que je vous invite à lire, évoque ce point à la page 86 : « La question posée serait de savoir s’il ne conviendrait pas d’aller au-delà et d’ouvrir la négociation, dans un cadre défini par la loi, sur le seuil de déclenchement lui-même. » C’est effectivement ce que nous faisons !

Il y a donc bien une logique d’ensemble et l’article 2 la respecte. Nous, nous assumons cette position, alors que le Gouvernement ne fait finalement rien d’autre, madame la ministre, mais il le fait de façon subreptice…

En effet, l’alinéa 150 de l’article 2 du projet de loi initial précise que, dans le cadre de la modulation sur trois ans, la limite hebdomadaire, qui déclenche le seuil des heures supplémentaires, est supérieure à 35 heures. Elle sera peut-être de 36, 37 ou 38 heures. Ainsi, en réalité, vous atteignez le même résultat, mais sans le dire ou en tout cas pas clairement…

M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Moi, je le dis ! Et nous l’assumons !

En conclusion, la réécriture de l’article 2, telle que l’a voulue la commission, prévoit tout : à la fois le régime d’ordre public et le régime supplétif.

Mme la présidente. L’amendement n° 504, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 132 à 178

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.

M. Jean-Pierre Bosino. Si nous avions encore des doutes sur l’orientation de ce texte, nous n’en aurions plus, en écoutant ce que vient de dire M. le rapporteur ! Il vient de nous expliquer, en clair, qu’il s’appuie sur le projet de loi du Gouvernement pour aller un peu plus loin. Il estime simplement être un peu plus cohérent…

Avec notre amendement, nous proposons de supprimer des alinéas qui ont trait à l’aménagement du temps de travail et qui aggravent ce qui est déjà prévu depuis la loi du 20 août 2008, dont nous avons déjà parlé et que le groupe CRC avait combattue, à l’époque, avec d’autres… En ce qui nous concerne, nous nous souvenons de la bagarre contre cette loi !

À l’époque, nous avions déjà dit – et nous n’étions pas les seuls, je viens de le rappeler… – tout le mal que nous pensions de cette inversion des normes, tant il nous apparaît indispensable de protéger le travailleur soit par la loi, soit par la convention collective de branche, c’est-à-dire par une norme suffisamment éloignée du rapport personnel pour pouvoir s’imposer.

Pour notre part, nous n’avons pas changé d’avis, ce qui suffirait à justifier cet amendement de suppression.

Et voilà qu’aujourd’hui, au nom des mêmes arguments avancés en 2008 par la droite – « calquer le temps de travail sur les seules fluctuations de l’activité de l’entreprise », c’est ce qu’on appelle l’adaptation à l’entreprise –, vous aggravez les choses en permettant aux entreprises d’aménager le temps de travail de leurs salariés. Cela désorganise complètement les salariés, mais permet aux entreprises de faire les choix qu’elles souhaitent.

Une nouvelle fois, nous souhaitons revenir à la hiérarchie des normes, qui fait primer l’accord de branche sur celui d’entreprise.

Mme la présidente. L’amendement n° 505, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 139

Remplacer les mots :

trois ans

par les mots :

un an

et le mot :

seize

par le mot :

quatre

II. – Alinéa 141

Supprimer les mots :

ou supérieure

III. – Alinéa 147

Après le mot :

an

supprimer la fin de cet alinéa.

IV. – Alinéa 152

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Cet amendement de repli vise à revenir au droit actuel en matière d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine.

Alors que la réécriture du code du travail devait prétendument se faire à droit constant, de nombreuses dispositions dans cet article s’apparentent à de graves régressions.

Ainsi, il serait possible de moduler, par accord collectif, le temps de travail sur trois ans, au lieu d’un an aujourd’hui. Ces dispositions font du salarié la variable d’ajustement de l’entreprise. C’est ce que nous dénonçons.

Le groupe CRC souhaite donc, tout simplement, maintenir la législation en vigueur.

Mme la présidente. Les amendements nos 25 rectifié bis, 868 et 918 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 25 rectifié bis est présenté par Mme Lienemann, MM. Godefroy et Cabanel, Mme Ghali et M. Gorce.

L’amendement n° 868 est présenté par M. Desessard, Mmes Archimbaud, Benbassa, Blandin et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Poher.

L’amendement n° 918 rectifié est présenté par Mme Malherbe, MM. Amiel, Bertrand et Guérini, Mme Jouve et M. Vall.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

I. – Alinéa 139

Remplacer les mots :

trois ans

par les mots :

un an

II. – Alinéa 141

Supprimer les mots :

ou supérieure

III. – Alinéa 147

Après le mot :

an

supprimer la fin de cet alinéa.

IV – Alinéa 152, première phrase

Supprimer cette phrase.

La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 25 rectifié bis.

M. Henri Cabanel. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l’amendement n° 868.

M. Jean Desessard. Actuellement, il existe une possibilité de flexibilité sur un an : on considère ainsi que la durée légale du travail peut être calculée et les heures supplémentaires payées sur cette période. C’est déjà important, une flexibilité sur un an !

Or, dans la proposition de la commission et dans celle de Mme la ministre, comme vient de le dire lui-même le rapporteur, on passe à trois ans ! La période de référence pour se faire payer ses heures supplémentaires serait donc de trois ans ! Vous allez dire que c’est un progrès social ? Franchement !

Sur une année – ce qui n’est déjà pas mal ! –, il me semble qu’on peut considérer qu’il est possible de faire le point… Mais au bout de trois ans, c’est infernal, tout simplement fou !

Si ce n’est pas votre position, madame la ministre, tant mieux ! Je m’en réjouis… Vous nous expliquerez alors en quoi votre projet de loi, après le 49.3, parle tout de même de trois ans, selon l’interprétation de M. le rapporteur.

Le rapporteur a vu trois ans et s’est dit : « Pourquoi finasser ? Allons-y ! »

M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Nous restons honnêtes intellectuellement et nous assumons ! Et c’est le texte du Gouvernement…

M. Jean Desessard. Alors, rémunérer les heures supplémentaires d’un salarié au bout de trois ans seulement serait tout à fait normal ? Monsieur le rapporteur, je vous remercie infiniment de votre générosité pour les salariés de ce pays !

Mme la présidente. L’amendement n° 918 rectifié n’est pas soutenu.

L’amendement n° 506, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 139 et 156

Remplacer le mot :

seize

par le mot :

quatre

La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. L’article 2 prévoit la possibilité pour l’employeur de moduler, sur simple décision unilatérale, les horaires de travail sur une période de neuf semaines, portée à seize semaines par la commission des affaires sociales du Sénat.

Les salariés pourront donc voir leurs horaires modifiés sur une période de quatre mois en dehors de tout accord collectif. Rappelons que la législation actuelle prévoit une période de modulation de quatre semaines !

Il s’agit là, vous en conviendrez, d’une véritable régression, qui aura d’importantes incidences sur la vie des travailleurs, mais également sur leur santé.

Contrairement à d’autres, nous pensons que les salariés ont tout autant le droit à une vie en dehors du travail. Imaginez les conséquences qu’une telle disposition aura pour un grand nombre de familles, en particulier pour les familles monoparentales !

La garde des enfants, qui est loin d’être une chose aisée, va devenir, encore plus qu’aujourd’hui, un véritable casse-tête, sans compter le coût financier pour les familles. Elles sont déjà nombreuses à fonctionner à flux tendu !

C’est toute l’organisation de la famille qu’il sera donc nécessaire de revoir. Sur un mois, vous pouvez trouver, à la limite, quelques solutions de dépannage, mais au-delà, c’est mission impossible… Donc, sous le prétexte de faciliter la vie des entreprises, vous compliquez encore plus celle des salariés. Est-ce normal ?

Pensez-vous qu’un salarié soucieux et fatigué soit plus productif à son poste ? Personnellement, je ne le pense pas !

La vie moderne ne consiste certainement pas à être modulable à merci. Les sénatrices et sénateurs du groupe CRC pensent, au contraire, que les salariés valent mieux que cela. C’est ce qu’ils scandent dans les rues !

C’est pourquoi nous préconisons, par cet amendement, de rester à une période de quatre semaines.

Mme la présidente. L’amendement n° 885 rectifié, présenté par MM. Collombat, Amiel, Bertrand et Guérini et Mmes Jouve et Malherbe, n’est pas soutenu.

L’amendement n° 507, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 139 et 156

Remplacer le mot :

seize

par le mot :

douze

La parole est à M. Dominique Watrin.

M. Dominique Watrin. Nous souhaitons revenir sur la disposition permettant d’augmenter la durée hebdomadaire de travail, qui pourra grimper jusqu’à 46 heures en moyenne pendant 16 semaines par an, au lieu de 12 aujourd’hui, et qui pourra même atteindre 48 heures « en cas de surcroît d’activité ». Un simple accord d’entreprise suffira.

Les charges de travail au quotidien pourront franchir toutes les barrières, car elles ne seront plus contrôlables dans la pratique. Cela est d’autant plus vrai que les 11 heures de repos quotidien consécutives obligatoires sautent, puisqu’elles pourront être « fractionnées » !

Bref, comme il a été dit précédemment, nous refusons cette réécriture à l’envers des conquêtes sociales historiques de la gauche. En effet, comme le rappelle justement le rapport, l’encadrement du temps de travail trouve sa justification historique dans la protection des salariés et de leur santé et dans la nécessité de leur garantir du temps libre pour leurs activités personnelles et familiales.

Attention donc à ne pas jongler avec les semaines et les chiffres, en oubliant l’essentiel : la vie, le quotidien de millions de personnes, de millions de familles !

En effet, l’aménagement des temps de travail a souvent obéi à des modalités, qui sont loin d’impliquer une quelconque amélioration des conditions de travail : flexibilités non choisies, pressions temporelles accentuées, rythmes accélérés… Vous proposez ici d’accentuer encore ces différents travers.

C’est pourquoi cet amendement de repli vise à revenir au droit actuel.

Mme la présidente. L’amendement n° 118 rectifié, présenté par MM. Antiste, Cornano et Desplan, Mme Jourda et M. Karam, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 142

Remplacer le mot :

raisonnable

par les mots :

d’au moins sept jours

II. – Alinéa 158

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Antoine Karam.

M. Antoine Karam. Le travail rythme la vie de la très grande majorité des personnes. Il s’agit donc d’une chose sérieuse.

Le droit du travail doit s’adapter à la très grande diversité du travail salarié, ce qui est difficile. Comme il doit assurer une certaine sécurité juridique, il faut qu’il soit suffisamment précis.

Il s’agit donc de maintenir dans tous les cas un délai de prévenance de sept jours pour les changements dans la répartition de la durée du travail dans les entreprises où le temps de travail est organisé sur une période de référence supérieure à la semaine. Les salariés, on doit le comprendre, ont droit à un minimum de prévisibilité : il ne peut s’agir seulement d’une disposition supplétive.

Mme la présidente. L’amendement n° 508, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 142

Remplacer le mot :

raisonnable

par les mots :

minimum d’un mois

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Le droit du travail, aujourd’hui, prévoit un délai de prévenance de sept jours.

Utiliser la notion de « délai raisonnable » reviendrait à passer d’une appréciation objective à une appréciation subjective du délai de prévenance, un peu comme si l’on utilisait les notions de « bonne foi » ou de « mauvaise foi », de « normal » ou d’« anormal ». Comment des notions aussi floues peuvent-elles réguler les intérêts de l’entreprise et ceux du salarié ?

Le délai de prévenance concernant l’organisation du temps de travail est un élément essentiel dans la vie privée du salarié, pour son organisation familiale par exemple.

Ne pas savoir dans les délais prescrits quand on peut disposer d’un temps de garde auprès de ses enfants est une situation d’insécurité non seulement pour le salarié, mais également pour sa famille. Cette insécurité est préjudiciable à la sérénité nécessaire à l’éducation, particulièrement des plus jeunes enfants.

Par ailleurs, le flou d’une telle notion et son caractère subjectif, loin de simplifier les éventuelles procédures, risquent au contraire de complexifier le travail des juridictions qui devront trancher la question de ce qui est, ou non, « raisonnable ».

Par cet amendement, nous proposons en toute logique d’instaurer un délai de prévenance d’un mois minimum.

Mme la présidente. L’amendement n° 510, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 146

Remplacer les mots :

d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, un accord de branche

par les mots :

de branche ou, à défaut, un accord d’entreprise ou d’établissement

La parole est à M. Michel Le Scouarnec.

M. Michel Le Scouarnec. Dans la lignée de nos amendements visant à préserver le principe de faveur, celui-ci a pour objet de faire primer l’accord de branche sur l’accord d’entreprise dans le domaine de l’aménagement du temps de travail.

La modulation du temps de travail est déjà largement rendue possible, et s’avère très utile pour éviter le paiement d’heures supplémentaires. Les textes législatifs et conventionnels encadrent toutefois le dispositif pour le rendre plus difficile à mettre en œuvre, tant il est délétère pour le salarié.

Cette modulation illustre en fait très bien le lien de subordination qui existe entre un salarié et son employeur. Aujourd’hui, même sans accord, un employeur peut mettre en œuvre la modulation du temps de travail pour un maximum de quatre semaines. Demain, cette modulation pourra atteindre, sans accord, seize semaines, soit quatre fois plus.

Alors que l’on sait que beaucoup de salariés cumulent CDD et contrats courts, cela signifie tout bonnement que ces précaires ne bénéficieront très probablement jamais du paiement de leurs heures supplémentaires. Pis encore, ils ne seront jamais réellement maîtres de leurs horaires de travail.

Vous pourriez presque ajouter cyniquement que, de toute façon, les précaires ne touchent que rarement leurs heures supplémentaires, le non-paiement de celles-ci étant en effet le premier motif de redressement opéré par l’URSSAF, et l’une des principales causes de la perte de recettes pour la sécurité sociale, puisqu’elle représente près de dix fois le montant de ce que l’on appelle la fraude sociale.

L’ensemble de cette sous-section est très révélateur de l’esprit de cette réforme : la mise en retrait non seulement de la loi et de la convention collective, mais aussi du contrat de travail. Celui-ci pourra être, en quelque sorte, dénoncé légalement par l’employeur : en cas d’accord d’entreprise, les dispositions du contrat de travail qui concerneraient le temps de travail seraient tout simplement caduques.

Les accords d’entreprise seront également au-dessus des accords de branche. Si l’on reprend l’exemple de l’industrie de l’habillement, la durée maximale de la modulation était de six mois ; le recul, ici, est évident.

Ce texte permet en définitive de laisser tout pouvoir à l’employeur ou au donneur d’ordre. À ce niveau de modulation du temps de travail hebdomadaire, il ne s’agit plus simplement de flexibilité, mais d’hyperélasticité ! (M. Jean Desessard s’esclaffe.)

Voilà pourquoi, je le répète, nous souhaitons que l’accord de branche prime toujours sur l’accord d’entreprise en matière d’aménagement du temps de travail.

Mme la présidente. L’amendement n° 271 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Bizet, Commeinhes et P. Dominati, Mmes Deromedi et Garriaud-Maylam, MM. César, Cambon, Cornu, Lefèvre et Vaspart, Mme Mélot, MM. Houel, Revet, P. Leroy, Mouiller, Dallier et Panunzi, Mme Morhet-Richaud, MM. Laménie et Trillard et Mme Primas, est ainsi libellé :

Alinéa 147

Supprimer les mots :

un an ou, si un accord de branche l’autorise,

La parole est à Mme Pascale Gruny.

Mme Pascale Gruny. Si vous me le permettez, madame la présidente, je présenterai en même temps l’amendement n° 291 rectifié.

Mme la présidente. J’appelle donc en discussion l’amendement n° 291 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Bizet, Commeinhes, Cornu, Cambon et César, Mme Garriaud-Maylam, M. Vaspart, Mme Mélot, MM. Houel, Revet, Lefèvre, P. Leroy, Mouiller, Dallier et Panunzi, Mme Deromedi, M. P. Dominati, Mmes Morhet-Richaud et Primas et MM. Trillard et Laménie, et ainsi libellé :

Alinéa 152, première phrase

Remplacer le mot :

prévoit

par les mots :

peut également prévoir

Veuillez poursuivre, madame Gruny.

Mme Pascale Gruny. Nous proposons d’instituer la possibilité de moduler la durée du travail sur une période supérieure à l’année par accord collectif d’entreprise, et non plus seulement par accord de branche, pour répondre aux spécificités de certains secteurs économiques.

Comme convenu avec les rapporteurs lors de la réunion de notre commission, je retire ces amendements pour maintenir le principe de la négociation au niveau de la branche.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Merci !

Mme la présidente. Les amendements nos 271 rectifié et 291 rectifié sont retirés.

Les amendements nos 26 rectifié et 86 rectifié ter sont identiques.

L’amendement n° 26 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Ghali.

L’amendement n° 86 rectifié ter est présenté par MM. Cabanel, Durain, Godefroy, Labazée et Montaugé, Mmes Guillemot et Lepage et MM. Néri et Karam.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 156

Rédiger ainsi cet alinéa :

« Art. L. 3121-43. – À défaut d’accord mentionné à l’article L. 3121-42, l’employeur peut mettre en place une répartition de la durée du travail sur plusieurs semaines, dans la limite de quatre semaines.

L’amendement n° 26 rectifié n’est pas soutenu.

La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 86 rectifié ter.

M. Henri Cabanel. L’article 2 du présent projet de loi fait subir au droit existant une évolution importante, en permettant aux entreprises de mettre en œuvre une répartition des horaires de travail sur une période de référence pouvant aller jusqu’à trois ans.

À défaut d’accord, l’employeur peut, dans des conditions fixées par décret, mettre en place une répartition sur plusieurs semaines de la durée du travail, dans la limite de seize semaines pour les entreprises employant moins de 50 salariés, et dans la limite de quatre semaines pour les entreprises de 50 salariés et plus.

Or cette extension du pouvoir unilatéral de l’employeur sur la répartition de la durée de travail sur plusieurs semaines n’est pas souhaitable. En effet, le traitement différencié selon la taille de l’entreprise est arbitraire. Nous connaissons tous les difficultés posées par ce type de seuil : quid des entreprises de 52 employés ? Leurs difficultés en matière d’organisation du temps de travail ne sont-elles pas similaires à celles rencontrées par les entreprises de 49 employés ?

Le fait de différencier les entreprises de moins de 50 salariés des autres n’est pas la bonne solution ; il risque d’entraîner, en outre, des disparités de garanties entre les salariés des petites entreprises et ceux des grandes.

Le présent amendement a donc pour objet de fixer une durée unique de répartition du temps de travail, à savoir quatre semaines, pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. Cette période est amplement suffisante, d’autant que, là encore, d’autres moyens de lissage du temps sont prévus et possibles, notamment avec les heures supplémentaires.

Article 2 (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social  et à la sécurisation des parcours professionnels
Discussion générale