Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Audrey Azoulay, ministre. Le Gouvernement partage pleinement l’objectif de soumettre les livres exclusivement numériques aux obligations de dépôt légal qui pèsent sur les supports physiques.

Toutefois, ces amendements ne me semblent pas opportuns, car le législateur, dans sa grande sagesse, a déjà pris en compte cette question. En effet, par la loi du 1er août 2006, il a étendu l’obligation de dépôt légal au livre numérique comme partie d’un tout : l’article 131-2 du code du patrimoine, qui codifie ce texte, énonce sans ambiguïté que « sont également soumis au dépôt légal les signes, signaux, écrits, images, sons ou messages de toute nature faisant l’objet d’une communication au public par voie électronique ».

Par conséquent, une base législative existe déjà. Peut-être est-elle trop large, mais le livre numérique est bien soumis à l’obligation de dépôt légal, au même titre que le livre physique.

Cela étant, la préoccupation des auteurs des amendements reste tout à fait légitime, dans la mesure où la mise en œuvre de la loi s’est révélée pour le moins décevante, compte tenu à la fois des méthodes choisies, la BNF étant contrainte de collecter elle-même ce qui est publié, alors que la démarche inverse eût été peut-être plus opérante, et des normes techniques retenues, qui ne sont pas satisfaisantes pour l’ensemble des publications numériques.

L’amélioration du processus de dépôt exige une réforme du décret d’application qui a été pris en 2011. Cette réforme fait l’objet d’une concertation depuis le début de cette année avec l’ensemble des professionnels, éditeurs mais aussi acteurs d’autres secteurs culturels concernés par cette obligation de dépôt légal.

L’angle mort que vous avez évoqué existe bien, monsieur Abate, mais il est réglementaire, et non législatif. Il me revient donc de travailler à cette question.

Voilà pourquoi, même si je souscris à l’objectif, je suis défavorable à ces amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, pour explication de vote.

Mme Marie-Christine Blandin. Nous maintenons notre amendement, en dépit de l’argumentation très pertinente de Mme la ministre. Les quelques votes favorables qu’il recueillera accéléreront peut-être la réforme annoncée du décret…

Il convient en effet de prendre le temps de mettre au point le meilleur système, eu égard aux précédents des logiciels Socrate, pour la gestion des réservations de la SNCF, ou Louvois, destiné à gérer la paie des militaires… (Sourires.)

Chacun connaît les conditions que doit remplir un bon système de dépôt légal numérique : accepter tous les formats, offrir des volumes importants en octets, prévoir les champs IPTC des images, permettre un chargement rapide et une inscription simple de l’ouvrage et de son auteur, comporter un emplacement spécifique pour la couverture.

En attendant, on ne peut pas se résigner à ce que, pour des raisons techniques, la collecte de la création littéraire ne se fasse pas. Si une panne informatique affectait demain le système d’information des notaires, les actes authentiques dressés pendant ce temps ne seraient pas pour autant annulés ! De même, si une inondation touchait la BNF, on déplacerait les livres papier du dépôt légal.

Par conséquent, nous estimons que l’obligation de dépôt légal pour les livres numériques doit être inscrite dans la loi. Ce dépôt pourrait, dans l’attente de la mise au point d’un système plus satisfaisant, s’opérer sur des disques durs provisoires, qui seraient réexploités plus tard.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.

M. Patrick Abate. Nous maintenons également notre amendement. Nous n’avons pas de désaccord de fond sur ce sujet avec la commission et le Gouvernement, mais nous estimons que, si la loi ne réglera certes pas les problèmes techniques, son silence ne le fera pas davantage.

Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Eblé, pour explication de vote.

M. Vincent Eblé. Mme Blandin a évoqué une hypothétique inondation de la Bibliothèque nationale de France : je signale que les archives, à Fontainebleau, sont bel et bien sous l’eau, et je ne sache pas que l’on soit parvenu à les déplacer…

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 88 et 153.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, l’article 13 bis A demeure supprimé.

Article 13 bis A (suppression maintenue)
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Article 13 ter

Article 13 bis

(Non modifié)

L’article L. 132-27 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :

« Art. L. 132-27. – Le producteur est tenu de rechercher une exploitation suivie de l’œuvre audiovisuelle, conforme aux usages de la profession.

« Le champ et les conditions de mise en œuvre de cette obligation ainsi que, le cas échéant, les dispositions convenues entre le producteur et ses cessionnaires ou mandataires sont définis par voie d’accord professionnel conclu entre, d’une part, les organismes professionnels d’auteurs ou les sociétés de perception et de répartition des droits mentionnées au titre II du livre III de la présente partie et, d’autre part, les organisations représentatives des producteurs d’œuvres audiovisuelles, les organisations représentatives des éditeurs de services de communication audiovisuelle ou un ensemble d’éditeurs de services de communication audiovisuelle représentatifs ainsi que, le cas échéant, un ensemble d’éditeurs de services de communication au public en ligne représentatifs et les organisations représentatives d’autres secteurs d’activité. L’accord peut être rendu obligatoire pour l’ensemble des intéressés des secteurs d’activité concernés par arrêté du ministre chargé de la culture. À défaut d’accord professionnel rendu obligatoire dans le délai de trois mois à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, le champ et les conditions de mise en œuvre de cette obligation sont fixés par décret en Conseil d’État. » – (Adopté.)

Article 13 bis
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Article 14 D

Article 13 ter

(Non modifié)

I. – L’article L. 331-3 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :

« Art. L. 331-3. – Le Centre national du cinéma et de l’image animée peut porter plainte et se constituer partie civile devant le juge d’instruction à raison des faits constitutifs du délit de contrefaçon, au sens de l’article L. 335-3 du présent code, d’œuvres audiovisuelles qui emportent pour lui un préjudice quant aux ressources qui lui sont affectées en application des articles L. 115-1 à L. 116-5 du code du cinéma et de l’image animée pour l’accomplissement de ses missions prévues à l’article L. 111-2 du même code.

« Il peut également exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne le délit de contrefaçon, au sens de l’article L. 335-3 du présent code, d’œuvres audiovisuelles et le délit prévu à l’article L. 335-4 s’agissant des droits des artistes-interprètes d’œuvres audiovisuelles et des producteurs de vidéogrammes, lorsque l’action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée. »

II. – (Non modifié) – (Adopté.)

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Chapitre IV

Développer et pérenniser l’emploi et l’activité professionnelle

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Article 13 ter
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Article 14 E

Article 14 D

(Non modifié)

L’article 20 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l’artisanat est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La liste prévue au premier alinéa ne préjuge pas du statut professionnel des personnes exerçant l’une des activités y figurant. Elles peuvent donc être aussi, notamment, des salariés d’entreprises artisanales ou de toute autre personne morale ayant une activité de métiers d’art, des professionnels libéraux, des fonctionnaires ou des artistes auteurs. » – (Adopté.)

Article 14 D
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Article 14 (Texte non modifié par la commission)

Article 14 E

(Non modifié)

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur la situation des arts visuels en termes d’économie, d’emploi, de structuration et de dialogue social. – (Adopté.)

Article 14 E
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Article 16

Article 14

(Non modifié)

L’article L. 7121-2 du code du travail est ainsi modifié :

1° Au 10°, après les mots : « metteur en scène », sont insérés les mots : « , le réalisateur et le chorégraphe » et le mot : « sa » est remplacé par le mot : « leur » ;

2° Sont ajoutés des 11° à 13° ainsi rédigés :

« 11° L’artiste de cirque ;

« 12° Le marionnettiste ;

« 13° Les personnes dont l’activité est reconnue comme un métier d’artiste-interprète par les conventions collectives du spectacle vivant étendues. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.

Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Il n’était pas évident de trouver l’occasion, dans la discussion de ce projet de loi, d’évoquer la situation particulière des intermittents du spectacle.

Nous savons tous ici que ce secteur d’activité, qui crée pourtant aujourd’hui plus d’emplois que l’industrie automobile, se trouve dans une situation catastrophique.

Les réformes successives du régime et du droit d’entrée dans celui-ci, conjuguées à la multiplication des annulations d’événements culturels et artistiques du fait de la fragilité des finances locales, n’ont fait qu’accroître la précarisation des intermittents du spectacle. Madame la ministre, nous saluons votre soutien à ces derniers et votre volonté que l’accord conclu voilà un mois entre les organisations représentatives des salariés et celles représentant les employeurs s’applique au plus vite.

Toutefois, nous restons perplexes : comment faire appliquer un accord qui s’inscrit en dehors du champ de l’inacceptable lettre de cadrage imposée par le MEDEF, que vous qualifiez vous-même de provocation ? Comment éviter un blocage lors des négociations interprofessionnelles, d’autant que le MEDEF et la CGPME recourent à une stratégie scandaleuse de chantage pour obtenir une loi relative au travail « sur mesure » ?

Vous le voyez, les questions sont légion. Nous espérons obtenir des réponses, tant dans cet hémicycle qu’au-dehors, les actes devant évidemment suivre. Les choses ne se présentent pas forcément sous les meilleurs auspices puisque, mercredi dernier, le comité d’expertise et de chiffrage a repoussé à une date indéterminée la remise de son rapport, en raison de formulations floues, pour les uns, de pressions du MEDEF, qui n’en est certes pas à son coup d’essai, pour les autres. En tout état de cause, la mise en œuvre de l’accord est repoussée, alors que la situation devient de plus en plus urgente.

Enfin, est-il pertinent que l’État prenne en charge une partie de ce qui incombe au patronat ? Au fond, c’est bien d’un désengagement des employeurs à l’égard de leur obligation de cotisation dans le cadre d’un modèle solidaire et intergénérationnel qu’il s’agit.

La hausse des cotisations patronales est certes acceptée du bout des lèvres par la Fédération des syndicats patronaux des entreprises du spectacle vivant, de la musique, de l’audiovisuel et du cinéma, mais cela ne saurait faire oublier des décennies de baisse.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 14.

(L'article 14 est adopté.)

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Article 14 (Texte non modifié par la commission)
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Article 17 AA

Article 16

(Non modifié)

I. – Les entrepreneurs de spectacles vivants détenant une licence en application de l’article L. 7122-3 du code du travail mettent à la disposition du ministre chargé de la culture les informations contenues dans les relevés mentionnés aux articles 50 sexies B et 50 sexies H de l’annexe 4 du code général des impôts, y compris pour les spectacles dont ils confient la billetterie à des tiers, en précisant, d’une part, les informations sur le prix global payé par le spectateur ou, s’il y a lieu, la mention de la gratuité définie au 4° du III de l’article 50 sexies B de la même annexe et, d’autre part, le nom du spectacle, le domaine, la localisation et le type de lieu de chaque représentation.

bis. – Le ministre chargé de la culture peut conclure avec ses établissements publics ou les sociétés de perception et de répartition des droits relevant du titre II du livre III de la première partie du code de la propriété intellectuelle des accords pour définir les modalités et les conditions de communication à ces établissements et sociétés des informations mentionnées au I.

II. – Les modalités d’application du I sont précisées par décret en Conseil d’État. – (Adopté.)

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Chapitre V

Enseignement artistique spécialisé, enseignement supérieur de la création artistique et de l’architecture

Article 16
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Article 17 A

Article 17 AA

(Suppression maintenue)

Article 17 AA
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Article 17 B (Texte non modifié par la commission)

Article 17 A

Le titre Ier du livre II de la première partie du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° À la première phrase du 3° du I de l’article L. 214-13, les mots : « le cycle d’enseignement professionnel initial dispensé par les établissements d’enseignement artistique » sont remplacés par les mots : « l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant » ;

2° L’article L. 216-2 est ainsi modifié :

aa) La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : « , à vocation professionnelle ou amateur » ;

a) Après le mot : « proposer », la fin du même premier alinéa est ainsi rédigée : « un enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. Ils peuvent délivrer un diplôme national. Leur mission est également la formation des amateurs et le développement de leur pratique ; à ce titre ces établissements peuvent apporter, avec leurs enseignants, leur concours aux actions conduites en matière d’éducation artistique et culturelle. » ;

bis) (Supprimé)

a ter A) Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’État et les collectivités territoriales garantissent une véritable égalité d’accès aux enseignements artistiques, à l’apprentissage des arts et de la culture. Cette politique s’exprime notamment par le financement de l’enseignement artistique spécialisé au travers des établissements d’enseignement public de la musique, de la danse et de l’art dramatique. Ces derniers sont ouverts à toutes et tous et sont des lieux essentiels pour l’initiation, l’éducation et le perfectionnement artistique et culturel. » ;

ter) À la fin de la seconde phrase du troisième alinéa, les mots : « le schéma départemental » sont remplacés par les mots : « les schémas régional et départemental » ;

quater) À la deuxième phrase du quatrième alinéa, après les mots : « communes concernées », sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, avec leurs groupements » ;

b) Le cinquième alinéa est ainsi rédigé :

« La région organise l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. Elle participe à son financement dans des conditions précisées par convention avec les collectivités gestionnaires des établissements, après concertation dans le cadre de la conférence territoriale de l’action publique. Elle adopte un schéma régional de développement des enseignements artistiques, en concertation avec les collectivités concernées et après avis de la conférence territoriale de l’action publique. » ;

c) À la deuxième phrase de l’avant-dernier alinéa, après le mot : « définit », sont insérés les mots : « un schéma national d’orientation pédagogique dans le domaine de l’enseignement public spécialisé de la musique, de la danse et de l’art dramatique ainsi que » ;

d) Le même avant-dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Il coordonne, au plan régional ou interrégional, l’organisation des examens du diplôme national prévu au présent article et délivre ledit diplôme. ».

3° (Supprimé)

Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication. Nous avions déjà eu l’occasion d’évoquer très largement les conservatoires en première lecture. Nous avions alors abouti à un texte équilibré, à mon sens, permettant de tracer enfin des perspectives satisfaisantes pour ces établissements d’enseignement artistique qui constituent un maillage extrêmement précieux pour l’ensemble de notre territoire.

Madame la ministre, aujourd’hui, les conservatoires se trouvent réellement à la croisée des chemins. Leur avenir dépend de la décision que nous allons prendre. Vous savez la crise institutionnelle, de reconnaissance et de financement que vivent ces établissements. Le temps est venu, après des années de tergiversations et d’expérimentations heureuses dans les régions Nord-Pas-de-Calais et Poitou-Charentes, de mettre définitivement en œuvre le dispositif de la loi de 2004, amélioré par une proposition de loi que nous avions déposée à l’époque et qui a été reprise sous forme d’amendements, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat.

Madame la ministre, dans le cadre de la décentralisation promue par la loi de 2004, le texte d’équilibre auquel nous étions parvenus en première lecture confiait aux régions un chef de filat leur permettant de s’impliquer dans le financement des troisièmes cycles, sachant que les communes et les départements interviennent eux aussi, à leur niveau de compétence.

Bien entendu, la loi de 2004 prévoyait un transfert de crédits de l’État. Or nous nous apercevons, à l’occasion de cette deuxième lecture, que ces crédits, sur lesquels je vous avais d’ailleurs interrogée lors de la première lecture, sont appelés à être purement et simplement supprimés.

Cette situation est gravissime et met en péril l’existence même des conservatoires. En effet, si ces crédits sont supprimés, les régions ne s’impliqueront pas dans le financement. Tous les niveaux de collectivités sont concernés, au premier chef les nouvelles grandes régions, qui ont vu leurs compétences renforcées en matière d’enseignement ou d’aménagement du territoire. Le bien-fondé du dispositif de la loi de 2004, qui, je le répète, a pourtant été expérimenté avec succès, se trouve remis en cause. À cet égard, que se passera-t-il dans la nouvelle région Grande Aquitaine, qui inclut l’ancienne région Poitou-Charentes, où cette expérimentation a été menée ? Il faudra harmoniser par le haut, et non par le bas !

Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la présidente.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente de la commission de la culture. Je tenais à alerter la Haute Assemblée sur le fait que les conservatoires sont à la croisée des chemins. Nos débats sont suivis avec attention : de nos décisions dépend l’avenir de l’enseignement artistique en France !

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 189, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 9

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La région organise et peut participer au financement, dans le cadre du contrat de plan mentionné à l’article L. 214-13, de l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. » ;

III. – Alinéa 16

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° L’article L. 216-2-1 est abrogé.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Audrey Azoulay, ministre. Avant tout, je tiens à insister sur l’important réengagement financier de l’État auprès des conservatoires. Cet effort doit se déployer en plusieurs étapes. Il est encore accentué cette année. Il a pour contrepartie des engagements pris par les conservatoires en matière de diversification de leur recrutement.

Par ailleurs, il est également important, pour le Gouvernement, de préserver l’équilibre de la répartition des compétences et des missions entre les différents niveaux de collectivités territoriales et, même si des expérimentations ont été menées, de procéder par étapes.

Dans sa première partie, le présent amendement tend à supprimer le chef de filat confié aux régions pour l’ensemble des cycles d’enseignement artistique et spécialisé. En revanche – j’insiste sur ce point –, il vise à confirmer leur rôle d’organisation de l’enseignement préparant à l’entrée au sein des établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. À mon sens, cela est cohérent avec la compétence attribuée aux régions en matière de formation professionnelle.

En effet, un engagement plus volontaire des régions pour l’organisation et leur participation au financement des « classes préparatoires » donnant accès à cette branche de l’enseignement supérieur constitueront un signal très positif. Ce sera en outre cohérent, le code de l’éducation prévoyant d’ores et déjà que les régions doivent définir un schéma de développement de la formation professionnelle initiale, incluant l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. Ainsi, rien n’interdit aux régions de discuter de ce schéma au sein des conférences territoriales de l’action publique, les CTAP, qui sont présidées par les présidents de région.

Le II de l’amendement tend à supprimer les schémas régionaux. Cette disposition est cohérente avec la suppression du chef de filat pour les régions.

Enfin, le III de l’amendement vise à abroger la disposition de l’article L. 216-2-1 du code de l’éducation prévoyant le transfert aux départements et aux régions des concours financiers de l’État concernés, disposition qui n’a jamais été mise en œuvre. Il ne serait pas cohérent de procéder à un tel transfert de crédits, alors que le réengagement de l’État dans le financement des établissements spécialisés, au côté des collectivités territoriales, qui en ont la responsabilité première, vient d’être décidé.

Mme la présidente. L'amendement n° 43, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

« La région organise et peut participer au financement, dans le cadre du contrat de plan mentionné à l’article L. 214-13, de l’enseignement préparant à l’entrée dans les établissements d’enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant. » ;

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Le présent amendement rejoint dans une certaine mesure celui du Gouvernement.

Nous sommes réticents à confier d’emblée le chef de filat aux régions pour les enseignements artistiques. Douze ans après le vote de la loi de 2004, prendre une telle mesure et donc, de fait, faire reposer sur les régions le financement des cycles d’enseignement artistique, sans année de référence ni étude d’impact budgétaire, nous paraît hasardeux.

En outre, au cours des douze années écoulées, des conférences territoriales de l’action publique ont été mises en place. Ces instances, présidées par les présidents de région, devraient à mon sens être mises à contribution pour organiser les schémas des enseignements artistiques. Dans ce cadre, les régions qui le souhaiteraient pourraient participer au financement.

Quoi qu’il en soit, dans l’état actuel des choses, il me semblerait important de prévoir une concertation préalable avec les présidents de région.

En conclusion, évitons de figer le dispositif, d’alourdir d’emblée la charge financière des régions. Faisons surtout en sorte de mettre en place, au sein des CTAP, une démarche associant l’ensemble des collectivités territoriales et l’État et permettant que les régions s’engagent intelligemment, par étapes.

Mme la présidente. L'amendement n° 44, présenté par M. Assouline, Mmes Blondin, Monier et S. Robert, MM. Guillaume, Montaugé et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :

3° L’article L. 216-2-1 est abrogé.

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Il s’agit d’un amendement de coordination avec le précédent, l’article L. 216-2-1 du code de l’éducation prévoyant le transfert des crédits de l’État vers les régions et les départements pour financer les conservatoires.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Leleux, rapporteur. Ces amendements visent à supprimer le chef de filat de la région pour les enseignements artistiques et le transfert des crédits de l’État vers les régions et les départements tel que prévu par la loi de 2004.

Mme la présidente de la commission, dont on sait l’engagement sur ce sujet, l’a très bien dit : nous souhaitons que la région soit le chef de file pour les enseignements artistiques. Comme pour toute politique, il faut que le pilote, l’organisateur, le fédérateur soit situé au bon échelon territorial.

Par ailleurs, si l’État souhaite que les régions s’engagent dans le financement des classes préparatoires, le transfert de crédits prévu en 2004 doit être effectivement opéré à leur profit.

Madame la ministre, je prends note du réengagement financier de l’État en la matière. Sans le minorer, je tiens à rappeler que les crédits de l’État consacrés aux conservatoires étaient de 27 millions d’euros en 2012. Ils ont certes doublé en 2016 par rapport à 2015, mais ils ne s’élèvent qu’à 13,5 millions d’euros, soit la moitié de leur montant quatre ans plus tôt : le compte n’y est donc pas encore !

Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur les trois amendements.