Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 323 est présenté par M. Navarro.
L'amendement n° 592 est présenté par le Gouvernement.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 323 n'est pas soutenu.
La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour présenter l’amendement n° 592.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Cet amendement vise à supprimer l’article 37 FC, introduit en commission.
Je tiens à rappeler ici quelles ont été nos méthodes de travail respectives, mesdames, messieurs les sénateurs. Lors de vos débats, vous avez introduit dans le texte des éléments qui n’y figuraient pas, donnant l’occasion au Gouvernement de réfléchir à la manière de traduire en droit celles de vos préoccupations qu’il partage.
Il y va ainsi de cet article 37 FC. Néanmoins, nous en demandons la suppression pour les raisons que je vais maintenant évoquer.
L’objectif est de consolider les engagements de couverture pris par les opérateurs en zones dites « AMII ».
Il est important de rappeler l’historique des engagements : ils datent de 2011. Pour les zones très denses, 106 communes sont concernées, les opérateurs s’étant également engagés à déployer la fibre d’ici à 2020 dans 3 500 communes situées dans les zones dites grises. À l’époque, aucun contrat n’a été signé et les engagements n’ont pas été matérialisés. Toutefois, la répartition a été décidée devant l’Autorité de la concurrence, et lesdits engagements ont été confirmés par les opérateurs en 2013, qui les ont étendus aux zones très denses.
Aucun flou ne subsiste donc quant au calendrier ou au périmètre des engagements, étant précisé que nous parlons ici de deux opérateurs – Orange et SFR –, les autres apportant un co-investissement dans ces zones.
L’article 37 FC tend à prévoir une renégociation de l’ensemble des conventions déjà conclues en zone AMII.
D’après moi, une telle mesure aurait un impact très négatif sur la dynamique engagée, que nous constatons au quotidien. Je rappelle, à cet égard, que l’état d’avancement des signatures de conventions entre opérateurs et collectivités locales est une information totalement publique, désormais consultable sur le site internet de l’Agence du numérique.
J’ai ici le document faisant état du conventionnement en zone d’initiative privée – zone AMII Orange et zone AMII SFR –, qui recense le nombre de communes couvertes et le nombre de logements concernés, qu’ils soient résidentiels ou professionnels.
D’après ce bilan, 66 conventions ont déjà été signées, représentant 4,6 millions de logements et 1 160 communes sur un total de 3 600, soit 35 % de la zone AMII. Si l’on tient compte de toutes les conventions en cours de négociation – et nous sommes informés de la quasi-totalité de ces négociations lorsqu’elles ont bien lieu –, il faut ajouter 6,5 millions de logements, soit 50 % de la zone AMII. On en arrive ainsi à un total de 85 %.
Je laisse chacun juge de l’énergie déployée et du travail, notamment de négociation, que cela suppose de la part des collectivités et des opérateurs. En résumé, les quatre cinquièmes de la zone AMII font désormais l’objet d’une convention signée ou en cours ; par ailleurs, nous avons vraiment ressenti une nouvelle dynamique dans les signatures de conventions à partir de 2015, une fois que la fusion entre SFR et Numericable commençait à être digérée.
Votre demande, me semble-t-il, découle de la perception que vous avez des zones à problèmes.
Effectivement, des difficultés demeurent dans 15 % des zones AMII. Elles peuvent être liées soit au fait que les opérateurs ne donnent pas d’informations sur leur volonté de conventionnement – c’est le cas de SFR : 38 % des zones dans lesquelles l’opérateur devrait être présent ne font l’objet d’aucune information relative à un conventionnement –, soit au fait qu’ils ne sont pas d’accord avec le calendrier et le maillage demandés par les collectivités. Dans ce dernier cas, compte tenu de l’existence d’un désaccord de fond, il n’y a aucune perspective de conventionnement.
Il faut veiller à ne pas faire de généralités à partir de ces cas problématiques, d’autant que ces derniers commencent à être surmontés.
Je pense au cas de Nantes Métropole ou de l’Île-de-France. On a longtemps parlé de problèmes dans les Yvelines ou l’Essonne, mais ils sont aujourd'hui débloqués. Dans les Alpes-Maritimes, le Gers, les Hauts-de-France, mais également dans d’autres territoires, les travaux en vue de la signature de conventions ont repris.
Il ne faut pas rompre cette logique de conventionnement en mettant un coup d’arrêt à la dynamique. En revanche, il faut se concentrer sur les cas où il n’y a pas de convention et, surtout, sur les cas où, durant la phase opérationnelle, ladite convention ne suffit pas à faire respecter leurs engagements par les opérateurs.
Une procédure existe, c’est celle du constat de carence : le premier a d’ailleurs été dressé à Lille, voilà moins d’un mois. L’État a ainsi entre les mains des armes très opérationnelles. Aussi, il est préférable de tester préalablement ces dispositifs, qui commencent tout juste à être mis en œuvre, avant de tout remettre en question.
Je n’ai pas abordé les aspects juridiques de cette question afin de ne pas être trop longue ; simplement, pour ne m’en tenir qu’au droit communautaire, je ne suis pas certaine que ce régime annexe dont il est proposé la création puisse être assimilé à une aide d’État dans la mesure où il en serait autonome.
Je ne suis pas non plus certaine que le dispositif que propose la commission ne contrevienne pas au principe de libre administration des collectivités territoriales, puisqu’il serait demandé à l’État de déterminer les conditions dans lesquelles le déploiement doit être assuré par un opérateur privé.
Cette démonstration a pour but d’expliquer que nous partageons le même objectif, mais que nous divergeons sur les moyens à mettre en œuvre. À mon sens, cet article est inopérant, voire contre-productif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à supprimer l’article 37 FC, inséré par notre commission. L’objectif de cet article est de finaliser le processus de conventionnement des déploiements privés dans toute la zone qui a été confiée à l’initiative privée dans le cadre du plan France très haut débit. La combinaison de la liberté d’établissement des réseaux et des aides d’État fait que l’intervention publique se définit en relief de réseaux déployés librement par les opérateurs. Notre préoccupation est d’imposer une échéance au conventionnement.
Lors de l’examen de la loi Macron, il avait été indiqué qu’au 31 décembre 2015 l’ensemble des conventions devait être signé. Vous le constatez avec moi, tel n’est pas le cas.
Soit une convention précise est signée, et les opérateurs conservent une forme de monopole de l’initiative privée, soit il n’y en a pas, et alors l’État et les collectivités peuvent faire le constat qu’une intervention publique est nécessaire. Il faut de la visibilité aux collectivités pour prévoir leurs déploiements.
Madame la secrétaire d'État, vous avez évoqué le constat de carence dressé par la Métropole européenne de Lille : je me permets de vous rappeler que ce constat porte sur une convention signée ; pour notre part, nous visons les conventions non encore signées.
Par ailleurs, nous allons examiner, juste après, un amendement visant à ajuster le dispositif en clarifiant la conséquence de l’absence de convention, qui est le constat de l’insuffisance de l’initiative privée, sans remettre en cause les conventions existantes.
J’ajoute que nous sommes ici tout à fait cohérents avec les lignes directrices de l’Union européenne sur les aides d’État pour le déploiement du très haut débit.
Le dispositif proposé prolonge également l’approche du plan France très haut débit.
Aussi, je ne comprends pas à ce stade l’opposition du Gouvernement à cet article. Je souhaite que nous parvenions à avancer, quitte à procéder à de nouveaux ajustements d’ici à la commission mixte paritaire afin d’offrir de la visibilité à l’ensemble des collectivités.
La commission émet un avis défavorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. J’ai l’impression, même si je peux me tromper, que le Gouvernement porte une appréciation quelque peu erronée sur les zones AMII : certaines d’entre elles sont très denses, certes, mais d’autres peuvent inclure, par exemple, une ville moyenne de 20 000 habitants située au sein d’une communauté de communes, laquelle peut être rurale, voire hyper-rurale. Par conséquent, lors de la signature d’une convention, la collectivité signataire – le département, en règle générale – déploie un réseau d’initiative publique, un RIP, partout, sauf dans les zones AMII. Finalement, on en arrive à la situation paradoxale suivante : les zones qui ne sont pas couvertes par une convention AMII sont mieux dotées que les zones AMII ! Pourquoi ? Parce que dans les zones AMII, les collectivités ne peuvent pas, normalement, déployer de RIP.
J’ai pu le constater, dans les zones AMII de mon département de la Haute-Marne, les choses n’avancent pas, qu’une convention ait été signée ou non. Finalement, nos concitoyens qui vivent dans ces zones sont moins bien raccordés que ceux qui vivent en dehors de ces zones, ce qui est un comble.
Par conséquent, cet article 37 FC, inséré sur l’initiative de la commission de l’aménagement du territoire, permettrait de faire évoluer la situation et, à tout le moins, d’engager des renégociations en vue de quitter une zone AMII pour y développer en lieu et place un RIP.
Mme la présidente. La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ, pour explication de vote.
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Je rejoins M. Sido. Dans les très grandes villes, où les choses sont bien organisées, on ne rencontre pas de problème. En revanche, dans les zones AMII recouvrant des villes secondaires, on ne peut pas en dire autant. Surtout, les départements qui déploient des réseaux d’initiative publique sont prêts à faire en sorte que ceux-ci soient proches d’une zone AMII, mais, en l’absence de convention et à défaut de savoir exactement ce que va faire l’opérateur privé sur ladite zone, il leur est extrêmement difficile d’apporter des solutions aux communes environnantes.
C’est pourquoi je considère que cet article 37 FC, proposé par la commission, est très important.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Je vais tenter d’expliciter davantage la méthode, puisqu’elle ne semble pas avoir été comprise.
Je ne pense pas qu’il soit aujourd’hui opportun de demander à l’ensemble des collectivités locales et des opérateurs qui ont signé des conventions dans les zones AMII de renégocier celles-ci.
D’abord, les collectivités ayant signé des conventions leur donnant toute satisfaction ne comprendraient pas une telle démarche. Ensuite, seule une minorité de situations est concernée par des difficultés, qui, à mon sens, peuvent être traitées dans le cadre actuel du droit.
La réalité, c’est que pour signer une convention, il faut être deux. De fait, le défaut de signature d’une convention s’explique souvent par l’impossibilité de faire converger les intérêts des deux parties. Et il est vrai que les collectivités locales, pour définir le maillage qu’elles attendent des zones AMII, ont souvent tendance à établir une comparaison avec celui qui prévaut dans les RIP, réseaux sur lesquels elles sont autorisées à intervenir et où elles sont maîtresses du jeu. C’est ce qui explique les divergences d’appréciation avec les opérateurs.
Sauf à remettre en cause cette règle et cette logique de la délimitation entre zones RIP et zones AMII – on pourrait en débattre des années, mais ce n’est pas le choix qu’a fait le Gouvernement à l’origine –, à ce jour, remettre tout à plat serait plus nocif que tout.
Dans les situations problématiques, tout est question de rapport de force. Les collectivités locales – pourquoi pas avec l’intervention constructive de l’Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel ? – doivent pouvoir faire part de leur vision du maillage et suggérer un calendrier de déploiement. Très souvent, elles demandent une prévisibilité non pas uniquement des dates de début et de fin des travaux, mais aussi des étapes intermédiaires de déploiement.
Tout cela est matière à discussion, à négociation, dans une logique contractuelle et conventionnelle. Il serait dangereux de vouloir y revenir.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Rome, pour explication de vote.
M. Yves Rome. Nous soutenons l’amendement du Gouvernement, car la disposition visée à l’article 37 FC nous apparaît trop risquée et pourrait très certainement avoir l’effet contraire à celui qui est recherché : ainsi, elle pourrait inciter les opérateurs à prendre leur temps pour renégocier les conventions. En revanche, l’Agence du numérique, qui a mis en avant l’idée du conventionnement, a prévu que, si au terme de celui-ci, certaines zones n’étaient pas couvertes par les opérateurs, il serait alors possible de les intégrer aux RIP situés à proximité.
J’y insiste, je crains que les opérateurs ne profitent de ce délai supplémentaire offert à la négociation pour freiner leur déploiement. Dans une convention, Mme la secrétaire d’État l’a rappelé, il y a deux parties : l’opérateur et la collectivité. Et c’est également à cette dernière de négocier non pas la date du début des activités des opérateurs, mais la chronologie de la couverture intégrale du territoire.
Je le répète, nous soutenons cet amendement qui vise à clarifier une situation parfois trop confuse.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Bosino, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Bosino. Je l’ai dit dans mon intervention liminaire, nous soutenons cet article 37 FC. Je ne suis pas du tout convaincu par vos arguments, madame la secrétaire d’État. Je prends un exemple très concret, celui de la Communauté de l’agglomération creilloise, dont je suis élu, qui regroupe quatre villes, dont trois seulement sont situées en zone AMII, cependant que la quatrième est en zone RIP. Cette situation est incompréhensible dans le cas d’une agglomération totalement intégrée.
Cette zone a été confiée à SFR. Pendant un an et demi, nous n’avons rien vu venir, Numericable ayant entre-temps racheté SFR. C’est alors qu’Orange est revenu en nous expliquant que SFR avait abandonné la zone. Trois mois plus tard, SFR-Numericable nous affirme qu’ils continueront à œuvrer dans cette zone. Allez y comprendre quelque chose !
Si je prends l’exemple de ma ville, qui est câblée depuis le milieu des années 90, les discussions sur notre réseau revêtent une grande importance.
D’ailleurs, dans le texte de l’article, il est dit que les conventions déjà signées doivent être non pas « renégociées », mais « actualisées », terme qui me convient très bien.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 380 rectifié, présenté par M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. de Legge, Mme Cayeux et MM. G. Bailly, Doligé, Calvet, Vogel, P. Leroy, Savin et Pointereau, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 2 et 3
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 33-10-1. – Les projets de déploiement par des opérateurs privés sur la période 2017-2022 de réseaux ouverts au public à très haut débit en fibre optique permettant de desservir l'utilisateur final font l'objet de conventions signées au plus tard le 31 décembre 2016 entre l’opérateur concerné, l'État et les collectivités territoriales ou leurs groupements dont le territoire est compris en tout ou partie dans la zone de déploiement du réseau. À défaut, l'insuffisance de l'initiative privée pour déployer un réseau à très haut débit en fibre optique permettant de desservir les utilisateurs finals dans la zone concernée est constatée.
II. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Le présent article ne s’applique pas aux projets de déploiement qui font l’objet de conventions signées avant la promulgation de la loi n° … du … pour une société numérique entre des opérateurs privés, l'État et des collectivités territoriales ou leurs groupements. »
La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ.
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Dans la suite du débat que nous venons d’avoir, cet amendement tend à préciser le processus de signature des conventions de déploiement des réseaux en fibre optique pour formaliser les engagements des opérateurs privés. Il a pour objet de clarifier la conséquence de l’absence de signature d’une convention avant la fin de l’année 2016, dès lors que le dispositif vise à stabiliser les projets privés à une échéance donnée pour permettre à l’intervention publique de se définir en complément, sans imposer de mécanisme d’autorisation.
En vue de privilégier l’achèvement du conventionnement, le présent amendement tend à exclure, par ailleurs, une application des nouvelles dispositions aux conventions signées avant la promulgation de la présente loi, afin de ne pas remettre en cause les engagements déjà formalisés.
Mme la présidente. L'amendement n° 92 rectifié, présenté par M. de Nicolaÿ, Mme Cayeux, M. Pellevat, Mme Lamure et MM. Bignon, Vasselle, Husson, Lefèvre, Grand, P. Leroy, Perrin, Raison, D. Laurent, Chasseing et Savin, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un projet de déploiement couvre un territoire faisant déjà l’objet d’une convention, l’État et les collectivités territoriales ou leurs groupements signataires s’assurent de la cohérence de ce projet avec les déploiements prévus et déjà réalisés, notamment au regard de l’objectif de couverture du territoire. »
La parole est à M. Louis-Jean de Nicolaÿ.
M. Louis-Jean de Nicolaÿ. Afin d’atteindre le plus efficacement possible l’objectif d’une couverture complète du territoire, nous souhaiterions que l’État et les collectivités s’assurent de la cohérence des projets nouveaux avec les conventions déjà signées.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis. L’amendement n° 380 rectifié vise à préciser que la conséquence de l’absence de convention signée à la fin de 2016 est le constat d’une insuffisance de l’initiative privée, et que les nouvelles dispositions ne s’appliquent pas aux conventions déjà signées –cela répond à la remarque formulée tout à l’heure pas Mme la secrétaire d'État.
L’esprit du dispositif est en effet non pas de créer un mécanisme d’autorisation préalable, mais de formaliser les projets privés et de les actualiser par rapport à l’appel à manifestations d’intentions d’investissement de 2011.
Cette démarche est essentielle pour permettre à l’État et aux collectivités territoriales de connaître le véritable périmètre de l’intervention publique, qui se définit en complément de l’initiative privée. L’absence de convention signée dans de nombreux territoires place les élus et les habitants dans une situation de très forte incertitude et de dépendance à l’égard des stratégies discrétionnaires des opérateurs privés.
Le conventionnement devrait être achevé, puisque le processus a été mis en place au début de 2013.
L’amendement n° 92 rectifié vise à ce que l’État et les collectivités signataires d’une convention s’assurent de la cohérence de ce projet avec les déploiements prévus et déjà réalisés. C’est une précision utile, car l’initiative publique et l’initiative privée doivent permettre d’aboutir à une couverture cohérente.
La commission émet un avis favorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
Je serais tentée de dire : « Qui trop embrasse mal étreint. » Ou alors : « Qui trop étreint mal embrasse. » (Sourires.) Avez-vous envie d’embrasser les opérateurs de télécommunications ? Je l’ignore, mais, de mon point de vue, les dispositifs que vous souhaitez mettre en place, d’une part, sont beaucoup trop contraignants – de cela, à la rigueur, on pourrait discuter – et, d’autre part, risquent d’être contre-productifs à terme en déstabilisant la logique de contractualisation à l’œuvre, alors même que celle-ci vient de redémarrer après être restée en « pause », si l’on peut dire.
Finalement, on ne voit pas pourquoi les opérateurs ne seraient pas tentés de vouloir renégocier d’autres conventions signées avec d’autres collectivités aux problématiques territoriales similaires.
D’ici à la fin de l’année, plus de 85 % des conventions auront été signées ; l’attention des collectivités comme de l’Agence du numérique doit donc se porter sur les zones qui rencontrent des problèmes, là où se concentrent les difficultés.
Certes, nous le constatons, les cas où il n’y a aucune volonté de dialogue et de négociation entre les parties pour parvenir à un accord sont très rares, voire exceptionnels, mais c’est précisément sur ces cas qu’il faut nous concentrer. Nous disposons aujourd’hui des outils, mais encore faut-il les rendre opérationnels, encore faut-il rendre effectif le droit en vigueur, et non le remettre en cause.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis. Nous avons le même objectif, à savoir faire en sorte que soit signé l’ensemble de ces conventions. Madame la secrétaire d'État, vous dites que 85 % d’entre elles le seront à la fin de l’année ; j’en conclus donc que cet objectif devrait être presque atteint.
Encore une fois, l’article 37 FC ne constituera pas un frein à ces intentions. Au contraire, il s’inscrit dans une dynamique et, surtout, permettra d’offrir une visibilité aux collectivités. La vraie difficulté pour elles, aujourd’hui, c’est de ne pas savoir. À la suite de notre collègue Jean-Pierre Bosino, qui évoquait le cas de son territoire, je peux témoigner que certaines collectivités sont abandonnées et ne savent pas comment les choses vont s’organiser dans les mois ou les années à venir.
C’est pour éviter ces situations que nous avons souhaité introduire cet article, qui n’est pas, je le crois, contraire à vos intentions, madame la secrétaire d'État.
Mme la présidente. L'amendement n° 64 rectifié, présenté par MM. Pintat, Revet, B. Fournier, D. Laurent, Longeot et Mouiller, n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 37 FC, modifié.
(L'article 37 FC est adopté.)
Article 37 F
Le septième alinéa du III de l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques est ainsi rédigé :
« – une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement apprécié notamment au regard du nombre d’habitants ou de kilomètres carrés non couverts ou de sites non couverts, sans pouvoir excéder un plafond fixé à 130 € par habitant non couvert ou 3 000 € par kilomètre carré non couvert ou 80 000 € par site non couvert lorsque la personne en cause ne s’est pas conformée à une mise en demeure portant sur le respect d’obligations de couverture de la population prévues par l’autorisation d’utilisation de fréquences qui lui a été attribuée ; ».
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 498 rectifié bis, présenté par MM. Bertrand, Arnell, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Sont notamment considérées comme non couvertes, au sens du présent alinéa, les zones rurales et hyper-rurales dans lesquelles l'entretien et la maintenance des matériels, logiciels et installations constituant le réseau ne sont pas normalement assurés. Pour ces zones rurales et hyper-rurales, le montant de la sanction peut excéder 1 000 € par habitant non couvert ;
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. La couverture des territoires hyper-ruraux est une priorité absolue, à la fois pour leur développement et leur survie. L’article 37 F introduit des sanctions financières en cas de manquement des opérateurs à leurs engagements de couverture numérique, ce qui est une bonne chose. Toutefois, eu égard à la faible densité de population dans les territoires hyper-ruraux, le plafonnement de la sanction à 130 euros par habitant non couvert ne me paraît pas assez dissuasif. Le manque d’intérêt des opérateurs de télécoms pour les zones hyper-rurales doit être sanctionné plus durement : c’est ce que nous proposons avec cet amendement en prévoyant que la sanction peut excéder 1 000 euros par habitant non couvert.
Mme la présidente. L'amendement n° 545 rectifié bis, présenté par MM. Bertrand, Arnell, Barbier, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin, Guérini et Hue, Mmes Jouve, Laborde et Malherbe et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :
Sont notamment considérées comme non couvertes, au sens du présent alinéa, les zones rurales et hyper-rurales dans lesquelles l'entretien et la maintenance des matériels, logiciels et installations constituant le réseau ne sont pas normalement assurés. Pour ces zones rurales et hyper-rurales, le montant de la sanction ne peut excéder 1 000 € par habitant non couvert.
La parole est à M. Guillaume Arnell.
M. Guillaume Arnell. Cet amendement de repli vise à relever le plafond de 130 euros par habitant non couvert à 1 000 euros, toujours dans l’esprit de sanctionner plus durement les manquements à l’obligation de couverture numérique dans les territoires hyper-ruraux.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis. Ces deux amendements visent à rétablir une disposition, supprimée en commission, sur le pouvoir de sanction de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, en matière d’obligations de couverture des opérateurs.
Les auteurs de ces amendements proposent d’assimiler à une absence de couverture des zones rurales et hyper-rurales le manque d’entretien et de maintenance des installations. Ils prévoient par ailleurs que les sanctions par habitant non couvert peuvent excéder la somme de 1 000 euros – ou ne pas lui être supérieures, en ce qui concerne l’amendement de repli.
Cette disposition est complexe à appliquer, car la définition des zones rurales et, a fortiori, hyper-rurales est très incertaine. Elle apporte peu par rapport au droit existant, car l’ARCEP a une approche finaliste de la couverture : elle vérifie l’obligation de résultat, c’est-à-dire la couverture, et sanctionne le cas échéant son non-respect, quelle qu’en soit la cause. L’entretien et la maintenance sont des moyens pour respecter cette obligation.
Cette modification pourrait fragiliser juridiquement l’article du code des postes et des communications électroniques qui fonde le pouvoir de sanction de l’ARCEP, article censuré par une décision sur QPC de 2013, qui avait privé l’autorité de toute capacité de sanctionner pendant près d’un an.
J’ajoute que la sanction, telle qu’elle est prévue actuellement, n’a pas encore eu le temps de faire ses preuves. En tentant de renforcer le dispositif, nous risquerions de manquer notre but.
Enfin, je précise qu’en commission nous avons souhaité renforcer le pouvoir de l’ARCEP en doublant les plafonds des sanctions qu’elle peut prononcer par habitant, site ou kilomètre non couvert.
La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.