M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame Prunaud, j’entends bien sûr les inquiétudes des jeunes concernant leur futur et leur entrée dans le monde du travail. Il n’est pas question de nier que les jeunes, notamment les moins qualifiés d’entre eux, sont les victimes de la situation économique et sociale que nous connaissons.
M. Didier Guillaume. Eh oui !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Ce n’est pas nouveau.
Moi-même, qui suis une jeune ministre, je me souviens avoir entendu parler du chômage dès la sixième. Nous avons collectionné les petits boulots, nous avons travaillé pour payer nos études, fait des vacations.
M. Roger Karoutchi. Une jeune ministre en CDD !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Je comprends donc bien la situation.
Le projet de loi que je défends vise justement à renforcer l’embauche en CDI. Dès sa version initiale, il visait à lutter contre la pire des exclusions, celle, presque définitive, du marché du travail des personnes les moins qualifiées de notre pays.
L’avant-projet de loi, dans la rédaction proposée par le Conseil d’État, prévoyait déjà un droit à la nouvelle chance pour les jeunes. Il s’agissait pour les jeunes n’ayant pas eu accès à un premier niveau de qualification de pouvoir y prétendre tout au long de leur vie.
Qui sont les victimes aujourd’hui de cette situation ? Qui collectionne les CDD, les emplois en intérim et les périodes de chômage ? Ce sont les jeunes, les femmes, les personnes les moins qualifiées dans notre pays !
Nous avons rencontré et entendu les organisations de jeunesse. La Garantie jeunes, je le répète, n’est pas une allocation. C'est un dispositif d’accompagnement intensif qui fonctionne très bien. Je suis très heureuse que tout jeune répondant aux critères d’entrée dans ce dispositif puisse y accéder dès le 1er janvier 2017.
M. Didier Guillaume. Nous aussi !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Certes, il coûte cher, comme on me le rappelle suffisamment, mais il fonctionne. Il s’agit non pas d’une boîte dans laquelle mettre les jeunes,…
M. Pierre Laurent. Un Algeco !
Mme Myriam El Khomri, ministre. … mais d’un dispositif conçu pour eux, prévoyant deux accompagnants pour quinze personnes. C’est ce qui permettra d’obtenir des résultats.
La jeunesse reste une priorité pour le Président de la République, comme elle l’a toujours été.
Depuis le 1er janvier dernier, près de 300 000 jeunes ont bénéficié de la prime d’activité. Nous avons encadré les stages, le nombre de stagiaires étant désormais limité à 15 % de l’effectif de l’entreprise, mis en place les emplois d’avenir (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) et les emplois CIE-Starter en direction des jeunes.
Ce ne sont pas des paroles, ce sont des actes, et nous continuerons ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour la réplique.
Mme Christine Prunaud. Certes, madame la ministre, vous avez mis le pied à l’étrier à des jeunes, mais seuls 100 000 ou 200 000 d’entre eux – je ne connais pas les chiffres exacts –sont concernés, soit un public très ciblé. Pour autant, ces mesures ne déboucheront pas sur des emplois stables.
Nous ne doutons pas de votre bonne foi, mais nous déplorons le caractère profondément libéral de votre projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
projet de loi sur le travail
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Alain Anziani. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Je vous interrogerai à mon tour sur les jeunes, madame la ministre.
Les jeunes, c’est vrai, ont besoin d’espoir, en particulier les jeunes âgés de 16 à 25 ans, dits « NEET », c’est-à-dire ceux qui n’ont pas d’emploi, ne suivent ni études ni formation et connaissent une véritable précarité. À cet égard, la Garantie jeunes mise en place par le Gouvernement en 2013 est une solution tout à fait intéressante, dont on mesure aujourd’hui les résultats.
Mme la ministre vient de le dire, ce dispositif permet aux jeunes d’être accompagnés par les missions locales, de s’immerger dans l’entreprise ou encore de bénéficier d’une aide financière. Le bilan est, je le pense, tout à fait satisfaisant. Deux chiffres en attestent : un jeune sur deux aujourd’hui retrouve un emploi après huit à dix mois d’accompagnement, et 50 000 jeunes ont pu bénéficier de cette mesure.
M. le Premier ministre a annoncé, il y a quelques jours, l’extension de la Garantie jeunes. Madame la ministre, combien de jeunes seront concernés par cette généralisation et comment cette mesure sera-t-elle financée ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Monsieur le sénateur, l’accompagnement des jeunes, notamment de ceux d’entre eux qui ne suivent ni études ni formation et qui n’ont pas d’emploi, est en effet essentiel. La Garantie jeunes, vous l’avez dit, a été expérimentée dès 2013. Elle bénéficie aujourd’hui à 50 000 jeunes.
Sont éligibles à ce dispositif les jeunes qui sont privés d’emploi, qui ne suivent ni études ni formation et qui répondent à des critères en termes de précarité. Ils doivent déposer leur demande à la mission locale, laquelle sera examinée par une commission.
Les jeunes passent ensuite six semaines intensives en groupe, encadrés par deux accompagnants de la mission locale pour quinze jeunes. On essaie ensuite de voir avec eux quel projet professionnel pourrait leur correspondre. S’ils ont envie d’être mécaniciens par exemple, ils passent une semaine dans un garage pour voir si le métier leur convient, avant d’être orientés soit vers une formation, soit vers un emploi. C'est vraiment de la dentelle, du cousu main, et c’est pour cela, je pense, que cela fonctionne.
Il s’agit aussi d’un dispositif « cadrant » : les jeunes perçoivent une allocation d’environ 461 euros par mois, qu’ils perdent en cas d’absence. C’est un contrat donnant-donnant.
Nous souhaitons que, d’ici à la fin de l’année, 100 000 jeunes bénéficient de la Garantie jeunes et que 80 % des missions locales puissent les accueillir. L’objectif est que l’ensemble de ces missions puissent proposer ce dispositif au 1er janvier 2017. Nous posons un droit universel à la Garantie jeunes afin que tout jeune remplissant les critères puisse entrer dans le dispositif. C’est très clair.
Cela étant dit, il ne faut pas confondre le flux et le stock, si vous me permettez cette expression. Aujourd’hui, d’après la Cour des comptes, 750 000 jeunes sont sans formation ni emploi. Nous instaurons un droit à l’accompagnement. La Garantie jeunes est une forme d’accompagnement intensif.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Myriam El Khomri, ministre. Pour 200 000 jeunes, par exemple, le coût de ce dispositif s’élèvera à 700 millions d’euros environ, lesquels seront financés grâce à des économies réalisées dans le budget de l’État. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Didier Guillaume. Cela en vaut la peine !
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour la réplique.
M. Alain Anziani. Madame la ministre, je tiens à vous remercier pour cette belle avancée sociale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. - Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
impact d'une crue centennale à paris
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour le groupe UDI-UC.
M. Yves Pozzo di Borgo. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche.
Depuis le lundi 7 mars, et jusqu’à demain, des exercices grandeur nature sont réalisés afin de tester la capacité de Paris à gérer une inondation du type de celle de 1910. Rappelez-vous, mes chers collègues, Paris était alors sous l’eau.
Tous les experts sont d’accord : la question est non pas de savoir si une crue centennale se produira, comme à Prague, mais quand.
Selon un rapport de l’OCDE, en cas de crue centennale, à l’échelle du Grand Paris, ce sont 5 millions de personnes qui seraient touchées, ainsi que des dizaines de milliers d’entreprises et d’emplois. Les dégâts directs seraient évalués à plus de 40 milliards d’euros. Je rappelle que l’Île-de-France représente 29 % du PIB de la France et que l’ensemble de notre pays serait aussi profondément impacté.
Le plan ORSEC de la zone de défense et de sécurité de Paris et le plan Neptune du ministère de la défense prévoient l’organisation des secours plutôt que la mise en place d’un dispositif de protection en amont. Nous sommes dans la gestion immédiate de la crise alors que le véritable enjeu, c’est la prévention.
À cet égard, l’établissement public territorial de bassin Seine Grands Lacs a élaboré dès 2001 le projet de barrages-réservoirs de la Bassée, en amont de la capitale, à la confluence de l’Yonne et de la Seine. Il prévoit dix gigantesques casiers capables de stocker 55 millions de mètres cubes d’eau. Ce système, dont le coût est évalué à 500 millions d’euros, permettrait de faire baisser le niveau de l’eau de 50 centimètres, sachant qu’il suffit d’un centimètre de trop pour qu’un fleuve déborde.
Ce projet est prêt depuis 2001. L’ensemble des pouvoirs publics, aussi bien la ville de Paris que la région, les communes et l’État, se sont pourtant refusé à faire avancer ce projet vital pour la capitale et l’Île-de-France, malgré l’enquête publique positive.
M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas la région qui va payer !
M. Yves Pozzo di Borgo. Le Gouvernement va-t-il relancer ce dossier d’avenir, si vital pour la région et le pays ?
Dans le cas où vous me répondriez par la négative, monsieur le secrétaire d'État, quelles autres solutions auriez-vous à nous proposer ? Les opérations d’entraînement au secours sont plus une sympathique forme d’autopersuasion qu’une véritable action.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Yves Pozzo di Borgo. Elles pourraient être vaines sans un dispositif de rétention d’envergure en amont. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué l’importance de l’exercice en cours en nous rappelant ce qui s’est passé en 1910. Il faut être conscient que ce type d’événement peut se reproduire et toucher potentiellement 5 millions de personnes.
La directive Inondations du 23 octobre 2007 établit un cadre pour l’évaluation et la gestion des risques d’inondation afin de réduire les conséquences du phénomène. Elle a été transposée en droit français par la loi du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, complétée par un décret du 2 mars 2011.
Parallèlement à ces dispositions, le préfet de la région d’Île-de-France et le préfet de police de Paris ont mis en place une gouvernance du risque inondation. L’exercice Sequana 2016, qui se déroule jusqu’à demain, organisé sur deux semaines par la préfecture de police et piloté par le Secrétariat général de la zone de défense et de sécurité de Paris, en lien avec le ministère de l’intérieur, la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, s’inscrit dans la suite logique des actions engagées pour la zone Île-de-France.
Vous opposez, monsieur le sénateur, la prévention aux exercices de sécurité. Or ce n’est pas l’un ou l’autre. L’un et l’autre sont au programme de l’action du Gouvernement.
Je ne partage pas votre appréciation sur l’état du dossier que vous avez évoqué. À vous entendre, un projet serait prêt depuis 2001, mais il n’aurait pas été mis à exécution. Or ce projet – un système de casiers de rétention d’eau – a été mis en œuvre à partir de 2013 et labellisé par ce gouvernement. Une action test est en cours aujourd’hui.
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Ce dispositif est subventionné à 40 % par le Fonds Barnier.
Le Gouvernement répond donc positivement à votre question et il espère que les collectivités locales seront, elles aussi, au rendez-vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
assurance chômage
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains.)
M. Serge Dassault. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, dans son rapport du 23 décembre 2015, la Cour des comptes s’inquiète de la détérioration rapide des déficits de l’assurance chômage. L’endettement bancaire de l’UNEDIC est passé de 5 milliards d’euros en 2008 à 21 milliards en 2014. Il devrait s’élever à 35 milliards d’euros en 2018. Où va-t-on s’arrêter ?
Cette situation est de plus en plus dangereuse pour nos finances publiques. Ces dernières continueront à se détériorer si vous ne changez pas de politique pour l’emploi. Voilà le véritable problème ! On réduira le chômage en facilitant les embauches par les entreprises, et non en multipliant les emplois aidés ou en instaurant des Garanties jeunes.
Vous avez essayé de faire un effort grâce au projet de loi de Mme El Khomri, mais, si vous abandonnez ses principales dispositions permettant aux entreprises de licencier quand elles n’ont plus assez de travail – c’est un point fondamental –, celles-ci continueront à ne pas embaucher et développeront leurs activités à l’étranger. L’UNEDIC continuera à s’endetter, et la France aussi, ce qui retardera dangereusement le retour à un déficit de 3 % promis par le Président de la République pour 2017 - on en est loin !
Le chômage est en baisse dans tous les pays européens, ainsi qu’aux États-Unis, où il n’est que de 5 %. Les partis politiques et la jeunesse ont compris que, pour embaucher, les entreprises ont besoin de savoir si elles pourront licencier quand elles n’auront plus assez de travail.
Contrairement à ce que pensent votre majorité, les syndicats, et parfois les jeunes, à trop vouloir protéger les salariés, on crée du chômage.
Faites donc confiance à nos chefs d’entreprise qui, contrairement à ce que vous croyez, ne pensent qu’à embaucher pour développer leurs activités, et non à licencier. Laissez-les agir comme ils l’entendent.
Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous vous y prendre pour éviter l’augmentation continue du chômage, la faillite de l’UNEDIC et celle de la France ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail.
Mme Myriam El Khomri, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Pour réduire le chômage, monsieur le sénateur, on peut prendre des mesures conjoncturelles et structurelles.
Je ne reviens pas sur les mesures conjoncturelles, elles ont été citées précédemment : le pacte de responsabilité et de solidarité, le CICE et le plan Emploi annoncé par le Président de la République le 18 janvier dernier.
M. Roger Karoutchi. Le énième !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Ce plan comprend deux volets très importants : d’une part, la prime « Embauche PME », qui consiste en des allégements de charges, aides dont près de 80 000 entreprises ont fait la demande en deux mois, pour des recrutements en CDD de plus de six mois ou en CDI ; d’autre part, l’amélioration de la formation, notamment celle des demandeurs d’emploi.
Protéger les salariés, leur permettre d’accroître leurs compétences et parfois de sortir de la pénibilité ne sont pas pour moi des objectifs antinomiques avec la compétitivité de notre économie. C’est sur ce point essentiel que nous avons peut-être une réelle divergence, monsieur le sénateur. J’estime en outre que cela permet aussi de répondre à ces employeurs qui ne parviennent à recruter dans certains métiers en tension.
Enfin, vous m’interrogez sur le régime de l’assurance chômage. Vous le savez, ce sont les partenaires sociaux qui en sont les gestionnaires. Ils ont ouvert des négociations le 22 février dernier et ils auront plusieurs séances de travail d’ici au 30 juin prochain.
Les rapports de l’UNEDIC et du Gouvernement, conformément, bien sûr, à la loi de finances, ont établi un diagnostic objectif, à la fois sur la situation financière et sur le fractionnement de l’activité. On voit, par exemple, que les contrats particulièrement courts, de même que les ruptures conventionnelles, ont un impact sur l’assurance chômage.
Il faut donc regarder les choses dans leur globalité et, pour ma part, je fais confiance aux négociateurs dans ce cadre-là, notamment pour assurer la pérennité du système. Ils ont prouvé en 2014 qu’ils pouvaient le faire en créant les droits rechargeables et en réalisant des économies. Restons confiants,…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Myriam El Khomri, ministre. … faisons-leur confiance !
Je vous rappelle que la pérennité financière du régime d’assurance chômage ne signifie pas une diminution de l’indemnisation des chômeurs, d’autant que seulement la moitié des demandeurs d’emploi sont indemnisés. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
partenariat entre la poste et l'état : maisons de services au public
M. le président. La parole est à M. Georges Labazée, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Georges Labazée. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales, et porte sur l’organisation des maisons de services au public.
La Poste s’est engagée au côté du Gouvernement pour accompagner la mutualisation des services dans les zones rurales et de montagne depuis juin 2015.
L’État et La Poste se sont ainsi engagés ensemble à réaliser 1 000 maisons de services au public avant le 31 décembre 2016, dont 500 par la transformation de bureaux de poste.
Les bureaux de poste qui accueillent ces maisons sont ainsi pérennisés sur les territoires et ont la possibilité de proposer aux citoyens une offre innovante de bouquets de services physiques, humains et numériques. La liste de ces bureaux est établie et donne lieu à concertation depuis un an, et encore actuellement, avec les conseils départementaux, les associations des maires et les préfectures. La Poste est prête à transformer ces bureaux dès maintenant pour atteindre l’objectif et pour garantir sa mission de service public.
Le déploiement de ces sites est acté en commission départementale de présence postale territoriale. Ces commissions se sont toutes tenues en février et au début de ce mois de mars.
À l’issue de ces commissions, il apparaît nécessaire que le déploiement des maisons de services au public ne soit pas ralenti par les discussions et les échanges sur les schémas départementaux de coopération intercommunale ou de service, d’autant qu’un partenariat très riche a été structuré au niveau national avec la Caisse nationale des allocations familiales – la CNAF –, la mutualité sociale agricole – la MSA –, les caisses de l’assurance retraite et de la santé au travail – les CARSAT –, Pôle emploi, ERDF, etc.
Comment, monsieur le ministre, le Gouvernement et les représentants de l’État dans les départements peuvent-ils accompagner La Poste dans le déploiement des maisons de services au public ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le ministre. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur, le Gouvernement souhaite un aménagement harmonieux du territoire,…
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. … ne laissant personne au bord du chemin et garantissant à tous l’accès à des services publics de qualité, que ce soit dans les secteurs urbains et périurbains ou, naturellement, dans la ruralité.
Pour ce faire, le comité interministériel aux ruralités a acté, en mars 2015, la création des maisons de services au public, en partenariat, comme vous l’avez rappelé avec raison, avec un certain nombre d’organismes, les principaux d’entre eux étant Pôle emploi, les MSA et La Poste.
D’ici à la fin de 2016, 1 000 maisons de services au public doivent voir le jour. Aujourd'hui, 468 maisons sont labellisées. Nous pensons atteindre le nombre de 750 dès la fin du mois de juin.
Pour répondre à votre question, les maisons de services au public s’inscrivent dans les schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public élaborés par le préfet et le président du conseil départemental. L’État, au travers de mes services et de la Caisse des dépôts et consignations, soutient pleinement la mise en œuvre de ce dispositif, au sein duquel, vous l’avez souligné, La Poste joue un rôle central.
Monsieur le sénateur, nous savons que cette solution est une réponse efficace, utile, indispensable au problème du service public en milieu rural.
Nous allons continuer à œuvrer dans ce sens puisque, dès le mois prochain, nous réunirons sous l’autorité du Premier ministre un nouveau comité interministériel aux ruralités. Naturellement, nous serons amenés à faire le bilan et à aller encore plus loin,…
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. …pour le meilleur confort et le meilleur intérêt de tous les usagers. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.)
crise migratoire : camp de grande-synthe
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour le groupe Les Républicains.
M. Jean-François Rapin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Lundi, Jean-Jacques Urvoas, ministre de la justice, s’est déplacé dans les Hauts-de-France,…
M. Bruno Sido. Où est-ce ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-François Rapin. … à Calais, pour apprécier la situation que nous connaissons tous. Permettez-moi en cet instant de le remercier d’avoir accédé à la demande, maintes fois renouvelée, de Natacha Bouchart et de Xavier Bertrand, qui souhaitaient que le garde des sceaux vienne instamment sur place.
Or la Côte d’Opale est touchée aussi en d’autres points, qui méritent également toute l’attention du Gouvernement. Ainsi, à quelques kilomètres de Calais, Grande-Synthe, où je me suis rendu récemment avec François-Noël Buffet, doit faire face à une affluence importante de migrants. Vous le savez, monsieur le Premier ministre, on ne ressort pas moralement indemne de ces visites.
Au regard de cette situation, les élus locaux ont souhaité offrir des conditions d’accueil supportables à ces abandonnés de la planète, en créant un camp coconstruit et cofinancé avec Médecins sans frontières.
Dans le cadre du débat portant sur le dispositif exceptionnel d’accueil des réfugiés, le 1er mars dernier, j’ai fait part à M. Cazeneuve de plusieurs de mes interrogations. Celui-ci m’a apporté des réponses concernant la situation calaisienne, mais trop peu sur celle de Grande-Synthe.
Pourquoi y a-t-il une différence de traitement ? Pourquoi y aurait-il plus d’État d’un côté et moins de l’autre ?
La commune a besoin de soutien : soutien de l’État, soutien financier, soutien humain. Encore quelques mois et, selon son maire, Grande-Synthe ne pourra plus faire face aux dépenses de fonctionnement exposées au titre de cet accueil !
Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous garantir que les dépenses nécessaires pour accueillir ces personnes ne seront plus supportées par la seule commune de Grande-Synthe ?
Enfin, allons-nous donner à cette partie du littoral, qui est l’un des carrefours essentiels des stratégies économiques de notre région, de notre pays et de l’Europe, un avenir autre que celui d’un « mur de la Manche » ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le sénateur, il me paraît important, puisqu’il y a eu de nombreuses questions sur Calais, parfois des approximations, voire des accusations sur l’absence de l’autorité de l’État dans ce secteur, de commencer par vous confirmer l’achèvement dans le calme des opérations d’évacuation de la zone sud du campement dit « de la lande », à Calais, opérations que Bernard Cazeneuve a évidemment suivies attentivement.
Je salue l’ensemble de ceux qui sont intervenus pour qu’elles se déroulent en bon ordre : les services de l’État, les forces de l’ordre, bien sûr, mais également les associations calaisiennes et leurs travailleurs sociaux, qui œuvrent sur place depuis plusieurs mois dans des conditions difficiles. Je tiens à saluer aussi la bonne coopération entre l’État et la ville de Calais.
Des solutions ont été apportées à toutes les situations individuelles. Des abris solides ont été installés dans la partie nord du camp. Des centres d’accueil et d’orientation ont été répartis sur l’ensemble du territoire national, vous le savez. Des départs ont encore été organisés hier.
Je précise que 80 % des migrants se rendant dans ces centres ne reviennent jamais à Calais. Nous sommes passés de 6 000 à 3 700 personnes à Calais en moins de six mois. Mais, à travers ces chiffres, chacun mesure la difficulté et la nécessité de maîtriser le dossier des réfugiés et de leur accueil.
La situation est différente, en effet, à Grande-Synthe.
Le campement, installé depuis plusieurs années, présentait une situation très dégradée, sur le plan tant sanitaire que sur celui de la sécurité. Je rappelle aussi que l’emprise des réseaux d’immigration irrégulière y était très forte.
Comme l’a indiqué Bernard Cazeneuve, déplacer ce campement n’est pas une solution durable. Depuis plusieurs mois, l’État a intensifié ce que l’on appelle les « maraudes sociales », avec des résultats significatifs : de 3 000, le nombre des migrants est passé sous la barre des 1 000. L’installation d’un nouveau campement sans que toutes les procédures garantissant sa sécurité aient été accomplies créera demain d’autres difficultés pour les élus qui ont pris cette initiative et pour l’État.
J’en appelle donc à la responsabilité, à une coopération de meilleure qualité entre les élus de ce secteur, entre le maire et l’État, pour éviter que nous ne nous retrouvions avec des problèmes qui nécessiteront alors de nouveau une opération très importante de l’État.
Sur le dossier de Calais comme sur celui de Grande-Synthe, ou d’autres, comme celui de Lampedusa, où trois d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, dont le président Larcher, se sont rendus récemment, je mets en garde contre toute position idéologique, mais vous n’êtes pas dans ce cas, car il faut agir de manière concrète.
Il n’y a pas de solution miracle : il y a un travail patient, quotidien, difficile pour lutter contre l’immigration irrégulière et les réseaux criminels qui l’exploitent, pour convaincre les migrants que Calais n’est plus une voie de passage vers le Royaume-Uni et pour garantir une solution digne pour les personnes et sécurisée – j’insiste sur ce point – pour les migrants.
Sur le plan européen, la France est pleinement engagée sur ce dossier. Le Conseil européen qui se réunit aujourd'hui et demain est particulièrement important puisqu’il est consacré à la question migratoire et aux réfugiés. La France y porte actuellement, par la voix du Président de la République, trois messages principaux.
D’abord, il est impératif de retrouver la maîtrise de l’espace Schengen en renforçant le contrôle aux frontières extérieures. C’est un enjeu de sécurité majeur et la condition pour accueillir au mieux ceux qui demandent légitimement une protection.
Ensuite, il faut définir une coopération efficace avec la Turquie sans remettre en cause les cadres des relations avec l’Union européenne. C’est indispensable pour endiguer le flux des migrants.
Enfin, il faut souligner l’urgence d’une réponse efficace pour prévenir la crise humanitaire qui risque de se développer en Grèce du fait de la fermeture de la route des Balkans.
Sur ces sujets, il ne faut pas uniquement parler. Il faut agir, en traitant les dossiers les uns après les autres. À cet égard, vous pouvez compter, monsieur le sénateur, sur l’engagement du Gouvernement, et notamment du ministre de l’intérieur, pour apporter vite une solution à celui que vous avez évoqué. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur certaines travées du RDSE.)
conseil européen : crise migratoire