M. René Vandierendonck. Je m’efforcerai de faire comprendre ce débat à l’aune de ce que nous avons voté ici même sur l’initiative du Sénat dans le cadre de la loi visant à faciliter l’exercice, par les élus locaux, de leur mandat.
D’une part, qu’il s’agisse de la proposition de loi Cardoux ou de celle-ci, dès lors que vous touchez au statut d’un maire, vous imaginez bien que vous ne pouvez pas le faire dans des dispositions concernant le code électoral. Il y a un cavalier dès lors que vous risquez le mélange des législations à l’occasion d’un amendement.
D’autre part, et c’est l’aspect le plus important politiquement, le ministre pourrait se contenter de relever l’irrecevabilité et s’arrêter là, mais il souligne que vous abordez quelque chose d’important, qu’il faut choisir le bon vecteur et trouver le point d’équilibre.
Le point d’équilibre crève les yeux ! Il faut respecter l’esprit de la proposition de loi Gourault-Sueur, c'est-à-dire ne pas humilier des maires en les mettant en position de mendier une indemnité auprès de leur conseil municipal. Dans le même temps, vous proposez de permettre une modulation, sur l’initiative du maire, comme l’a dit fort justement le ministre, en cas de cumul ou pour une raison x ou y.
Il faut trouver une solution, nous en sommes tous d’accord, mais ce n’est ni dans ce texte ni dans la proposition de loi Cardoux que vous avez quelque chance, juridiquement, d’y parvenir.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Si le maire d’une commune de moins de 1 000 habitants ne veut vraiment pas de son indemnité, il existe des solutions, il ne faut tout de même pas faire croire le contraire. Je connais de nombreux maires qui reversent une partie de leur indemnité à une structure paramunicipale ou associative, club du troisième âge, association des joueurs de foot ou autre.
Cela étant, je suis profondément choqué que nous soyons en train de monter des usines à gaz spécifiques aux communes nouvelles. Si l’on veut créer une commune nouvelle, on applique la règle du jeu. Sinon, on reste chez soi, ou bien, comme l’a dit notre collègue Collombat, on fusionne purement et simplement !
Il faut dire la vérité au sujet des communes nouvelles : la plupart des maires qui s’intéressent à ce statut le font plus pour la carotte financière prévue pendant trois ans que dans un souci de bonne gestion, ce qui est aberrant.
Je trouve que ce débat, dans lequel on déforme finalement la législation, va trop loin. Pour ma part, je ne voterai rien qui soit spécifique aux communes nouvelles dans ce domaine. Votons des dispositions pour tous les maires ou pour personne ! Il n’y a pas de raison de faire des dérogations, de monter des structures particulières pour les communes nouvelles. Si les gens sont mécontents, qu’ils s’abstiennent de créer de telles communes !
Mme Jacqueline Gourault. Ce que dit notre collègue est assez juste !
M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Le débat sur cet amendement ayant été élargi à l’amendement qui viendra sur la proposition de loi suivante, je ferai une remarque préalable.
Sur la forme, la notion de cavalier me gêne un peu. Même si l’article de la proposition de loi touche à d’autres dispositions du code ou si la proposition de loi Cardoux touche au code électoral, pour autant, on sait que différents codes peuvent être impactés par la discussion d’un projet de loi ou d’une proposition de loi. Il arrive d'ailleurs que l’on change le titre d’un texte pour tenir compte de l’adoption de tel ou tel amendement. Je me demande donc si la notion de cavalier s’applique aussi strictement que l’on veut bien nous le faire entendre.
Sur le fond, l’amendement de notre collègue Guené précise bien que c’est le maire délégué qui formule la demande. Je suis conscient du long « combat » qui a été mené, notamment par Jacqueline Gourault, pour que les maires, qui sont les piliers de la République, n’aient pas à s’excuser de percevoir des indemnités décentes.
Le principe d’une indemnité au taux maximal n’est pas remis en question. La révolution copernicienne qui a eu lieu en mars 2015 reste inscrite dans la loi et personne, ici, ne veut la remettre en cause. En revanche, pour tenir compte de la diversité des situations – vous le savez, 26 000 communes sont potentiellement concernées par le dispositif qui viendra ultérieurement en discussion –, instaurer de la souplesse à l’initiative du maire ne paraît pas aberrant. Nous avons toujours la tentation de créer de beaux jardins à la française, mais il faut savoir parfois ménager des souplesses.
Qu’il s’agisse de l’amendement n° 5 rectifié comme de l’amendement sur le texte suivant, j’insiste sur le fait que la demande émane du maire, qui n’est nullement pris en otage. Le principe acté dans la loi de 2015 est par ailleurs conservé.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Il n’est pas étonnant que le débat soit aussi long, car tout le monde a raison. M. Collombat a raison de vouloir être rigoureux : après tout, il y a une règle, appliquons-la ! M. Guené et les cosignataires de l’amendement, dont je fais partie, n’ont pas tort non plus. Au fond, de quoi parle-t-on ? Lorsque M. Guené évoque de petites communes, il ne s’agit pas de communes de 500 habitants, mais, comme en Haute-Marne, de communes de vingt, quinze, voire douze habitants.
M. Pierre-Yves Collombat. Il n’y a qu’à les supprimer !
M. Bruno Sido. Vous me dites qu’il suffit de les supprimer, qu’elles ne peuvent plus continuer à exister.
M. François Grosdidier, rapporteur. Pourquoi les supprimer ?
M. Bruno Sido. Déjà, la loi Marcellin a permis aux petites communes qui estimaient ne plus pouvoir survivre de s’associer à de plus grosses. Avec les communes nouvelles, d’autres vont rejoindre des communes plus importantes. Elles ont bien compris qu’elles ne pouvaient plus vivre seules. La preuve, c’est qu’elles vont s’associer au sein d’une commune nouvelle. Pour autant, elles veulent encore exister.
J’ai été maire délégué, puis je suis devenu premier adjoint. Savez-vous ce que m’ont dit les habitants de la commune associée ? « Tu nous abandonnes ! » Il faut prendre en compte ce que pense notre population.
Ces communes veulent encore exister, mais elles n’ont pas les moyens de payer l’indemnité du maire délégué, ou bien la commune nouvelle n’en a pas les moyens. Dans la circonscription de M. Guené, les indemnités cumulées représentent 80 000 euros pour l’année si elles sont établies au maximum. Si vous multipliez par trois ou quatre avec les subventions, cela représente chaque année un investissement de 400 000 euros que la commune ne peut pas réaliser à cause de ces indemnités.
Les cosignataires de cet amendement préfèrent donc que ces élus touchent une indemnité moindre, à leur demande, et que la commune puisse continuer à investir. Je ne sais pas si l’on arrivera à se mettre d’accord, mais, sauf à supprimer ces communes – je suis absolument opposé à cette idée –, je pense que c’est une bonne solution.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Je ne souhaitais pas prendre la parole, mais le débat ne me semble pas sain.
Dès lors que vous exercez une activité, vous prenez des responsabilités. Vous avez donc droit à une compensation dont le montant est déterminé par la loi en fonction de la taille de votre commune. Aujourd’hui, quand j’ouvre le journal, j’ai l’impression que l’on rivalise dans la démagogie : tel nouveau maire décide de diminuer son indemnité de 10 %, tel autre de 15 % Ce n’est pas normal !
Dans la limite du plafond autorisé, qui s’élève à une fois et demie l’indemnité parlementaire, vous avez droit à cette ressource, qui correspond à un travail accompli. Tout travail mérite salaire ! D’aucuns prétendent que ce ne serait pas une réelle activité, voire qu’il s’agirait de bénévolat. Non ! Dès lors que la loi prévoit que le maire d’une commune de tant d’habitants doit toucher telle indemnité, ce dernier doit la percevoir.
Toutefois, j’ai bien compris l’argumentation de Charles Guené et les explications de Bruno Sido : cette indemnité de 80 000 euros par an permettrait de réaliser des investissements, de rembourser des emprunts, etc. Il faut donc trouver une formule afin que les maires des petites communes, qui accomplissent un vrai travail et se « décarcassent » pour leur territoire, puissent être rétribués.
Au-delà, l’État doit-il s’interroger sur l’existence des plus petites communes ? Et si on les maintient, l’État doit-il apporter une aide aux communes à travers ses dotations ? La proposition de loi de nos collègues Jacqueline Gourault et Jean-Pierre Sueur était excellente, mais il lui manquait peut-être un petit quelque chose pour qu’elle soit totalement satisfaisante.
Nos journaux locaux prennent toujours comme exemple le maire qui ne touche pas ses indemnités. En réalité, c’est loin d’être un cas général, c’est seulement quelques-uns parmi de très nombreux maires. À mon avis, il faut trouver une solution pour que les maires puissent toucher la totalité de leur indemnité.
M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Gourault, pour explication de vote.
Mme Jacqueline Gourault. Je remercie Éric Doligé pour ses propos.
Je rappelle que, par deux fois déjà, nous avons voté une disposition de cette nature. En effet, j’avais déjà déposé au Sénat, voilà quelques années, une proposition de loi relative aux communes de moins de 1 000 habitants. Cette proposition de loi étant devenue caduque, nous l’avons reprise, Jean-Pierre Sueur et moi-même, au sein d’une proposition de loi plus générale.
On se perd aujourd’hui dans les détails, mais je rappelle que, si j’avais choisi initialement le seuil de 1 000 habitants – des évolutions étaient ensuite intervenues, mais nous étions revenus à ce seuil de 1 000 habitants –, c’est parce que, dans les communes rurales, l’État, en versant la dotation de l’élu local, prend en charge une partie du versement des indemnités des maires.
M. Alain Vasselle. Une petite partie !
Mme Jacqueline Gourault. J’avais aussi constaté sur mon territoire que, parfois, de jeunes maires, de toutes conditions sociales, mariés, avec des enfants, et obligés dans certains cas de prendre sur leur temps de travail pour exercer leur mandat, ne pouvaient obtenir la totalité de leur indemnité dans certaines communes de 500 ou 800 habitants – je vous laisse imaginer les sommes en jeu… –, car, avant eux, le maire avait renoncé à son indemnité, parce qu’il avait les moyens, parce qu’il était retraité, rentier…
L’automaticité du versement des indemnités était donc aussi un moyen de démocratiser la fonction de maire. En outre, on sait combien les maires des petites communes sont appelés à des missions importantes, notamment en raison de l’absence d’administration.
Vous prétendez que le maire ne renoncera à son indemnité que s’il le décide. C’est oublier que, dans les petites communes, lors des négociations qui précéderont l’élection du nouveau maire, la question se posera de savoir s’il renoncera ou non à son indemnité, en tout ou en partie.
M. André Reichardt. Bien sûr !
Mme Jacqueline Gourault. Je pense donc qu’il ne faut pas revenir sur cette disposition.
Je ne sais pas s’il s’agit d’un cas particulier, mais, dans mon département, j’ai reçu une seule lettre d’un maire, pour 291 communes. En revanche, lorsque la proposition de loi a été votée, j’ai reçu beaucoup de félicitations, car nombre de maires ne pouvaient pas percevoir leur indemnité.
M. René Vandierendonck. Eh oui !
Mme Jacqueline Gourault. Pour des défenseurs de la ruralité et de la survivance des petites communes, certaines de vos positions m’échappent, mes chers collègues. (MM. Patrick Abate, Jacques Chiron, Pierre-Yves Collombat, Christian Favier et René Vandierendonck applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je suis l’un des cosignataires de cet amendement présenté par notre collègue Charles Guené, mais je comprends aussi les avis des uns et des autres.
Le problème des indemnités des élus dans les petites communes est toujours sensible, il faut le reconnaître. Lors des élections municipales, il s’agit souvent d’un sujet de discorde, même quand cela ne représente que 650 euros par mois.
Dans mon département des Ardennes, sur les cinq parlementaires – trois députés, deux sénateurs –, je suis le seul à rester maire d’une petite commune de 170 habitants. En 2007, j’avais fait le choix de toucher zéro euro. Mais il est vrai aussi que les maires consacrent de plus en plus de temps à leur mandat. La direction des finances publiques m’a récemment indiqué que j’allais devoir toucher mon indemnité. On m’a dit aussi que je pourrai la reverser sous forme de don.
Je comprends les interrogations, mais Mme Gourault aussi a raison : les communes concernées perçoivent la dotation « élu local » versée par l’État.
Le problème n’est pas simple, mais l’amendement de notre collègue Charles Guené a le mérite de laisser la question à l’appréciation des conseils municipaux, si le maire délégué en fait la demande.
M. le président. La parole est à M. Jackie Pierre, pour explication de vote.
M. Jackie Pierre. Même si j’ai cosigné cet amendement, je suis plutôt de l’avis de Jacqueline Gourault.
Président de l’association des maires de mon département pendant treize ans, je me suis battu pour avoir un statut de l’élu. Aujourd’hui, certains sont prêts à le remettre en cause, parce que des petites communes estiment ne pas pouvoir équilibrer leur budget. Est-ce que l’on propose de réduire les indemnités des ministres et des parlementaires pour équilibrer le budget de la Nation ?
M. Jackie Pierre. Est-ce que, dans les trente départements qui sont en difficulté financière, on va réduire ou donner la possibilité de réduire les indemnités des élus ?
Il a fallu se bagarrer pendant plus de trente ans pour avoir un tout petit statut de l’élu dans les communes rurales.
Cela étant, les indemnités ont-elles été parfaitement évaluées par tranche ? On peut en rediscuter. Les 600 euros alloués au maire d’une commune de quinze habitants sont excessifs aux yeux de certains…
Nous n’avons pas à élire des maires au rabais. Les indemnités ne doivent pas devenir un argument des futurs candidats pour s’opposer aux maires sortants, qu’ils soient de gauche ou de droite. Dans un petit village, il y aura toujours un colonel venu prendre sa retraite ou un haut fonctionnaire prêt à gérer la commune pour zéro centime. Ne tombons pas dans ce piège, qui rendrait la fonction de maire totalement antidémocratique.
Un maire d’une commune rurale mérite mieux. S’il a trop d’argent, il peut toujours le donner à qui il veut. Mais, le jour où il arrêtera, après trois ou quatre mandats, il doit songer aussi qu’il n’aura pas même un point à l’IRCANTEC, qui elle-même n’aura perçu aucune cotisation…
Nul besoin de légiférer pour qu’un maire ou un citoyen français fasse un cadeau au destinataire de son choix !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. J’irai dans le même sens que Jacqueline Gourault.
Dans les conseils municipaux des petites communes, en effet, au moment du vote des indemnités, les débats tournent souvent autour des indemnités que touchait le prédécesseur dans la fonction.
À la suite de la modification de la loi, je n’ai pas entendu un seul maire de mon département me dire que l’on avait mal fait. Ils m’ont tous affirmé que la loi allait dans le bon sens, qu’ils ne pouvaient pas et n’osaient pas percevoir l’intégralité de leur indemnité, car leur conseil municipal leur répétait que leur prédécesseur ne prenait pas grand-chose. Mais celui-ci n’avait peut-être pas le même statut !
Si l’on veut reconnaître un tant soit peu les élus ruraux dans les petites communes, il faut les indemniser. Il y a un barème d’indemnisation, mais rien n’empêche ensuite le maire de reverser 20 % de son indemnité au CCAS ou à telle association caritative. Je plaide donc pour le statu quo sur ce dossier.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Grosdidier, rapporteur. Cet amendement n’est pas un cavalier, parce qu’il ne vise que les maires délégués, mais le débat qu’il suscite, lui, est un peu cavalier.
Dès lors que le maire touche obligatoirement une indemnité, on voit mal comment on pourrait contraindre, sans qu’il le demande, le maire délégué à renoncer à son indemnité. Dans l’autre hypothèse, qui sera débattue tout à l’heure avec la proposition de loi visant à augmenter de deux candidats remplaçants la liste des candidats au conseil municipal, présentée par Jean-Noël Cardoux, la commission a écarté cette possibilité pour l’ensemble des maires. Il ne s’agit pas d’écarter définitivement cette possibilité, mais cette question appelle un débat beaucoup plus large et une réflexion de fond de la commission des lois et, surtout, de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation, qui a déjà beaucoup œuvré sur le sujet. Je rends d’ailleurs hommage au travail mené par Jacqueline Gourault depuis plusieurs années.
Cette question pose des problèmes beaucoup plus vastes. L’un des intervenants a dit que les maires des communes de plus de 1 000 habitants ont de la chance de pouvoir choisir de percevoir une indemnité ou pas, alors que cette possibilité est refusée aux maires des petites communes. Mais les élus qui doivent commencer leur mandat en délibérant, juste après leur élection, sur leurs indemnités, ne sont pas vraiment chanceux.
Mme Jacqueline Gourault. Absolument !
M. François Grosdidier, rapporteur. Je pense, à titre personnel, que l’indemnité ne devrait pas seulement être versée de droit aux maires des communes de moins de 1 000 habitants, mais aussi à tous les élus territoriaux de la République, y compris aux conseillers départementaux, régionaux et communautaires.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Absolument !
M. François Grosdidier, rapporteur. Peut-être faudrait-il leur ouvrir la possibilité de toucher moins, mais en aucun cas on ne devrait les contraindre à commencer un mandat par cette délibération. Imaginez qu’on démarre une législature par la détermination de l’indemnité des parlementaires. Quel effet cela aurait-il ?
M. Bruno Sido. Oh là là !
M. François Grosdidier, rapporteur. C’est cet effet qui se produit aujourd’hui dans les collectivités locales !
M. le président. Veuillez conclure, monsieur le rapporteur.
M. François Grosdidier, rapporteur. Je conclus, monsieur le président, d’autant que nous aurons ce débat tout à l’heure.
Je souhaite tout de même dire qu’il n’est pas choquant de donner de la liberté aux élus.
En outre, je ne voudrais pas que ceux de nos collègues qui n’adhèrent pas à la philosophie des communes nouvelles en viennent à prendre des positions à contre-emploi, à savoir être défavorables à la représentation des territoires, quand il s’agit du mode d’élection, ou à la prise en compte de certaines spécificités. Je vois même un profond paradoxe à avoir protesté, au nom de la défense de la loi Marcellin, contre la suppression du sectionnement électoral et, dans le même temps, à refuser des spécificités aux communes nouvelles parce qu’on était contre leur constitution.
Oui, il faut reconnaître aux communes nouvelles composées de communes déléguées des règles spécifiques, qui ne sont pas forcément celles des communes de droit commun ! Il faut s’adapter aux réalités locales.
M. Bruno Sido. Très bien !
M. le président. Monsieur le rapporteur, il y a des règles…
M. Éric Doligé. Même pour les petites communes…
M. le président. … concernant les temps de parole.
Mes chers collègues, une majorité d’entre vous m’ont demandé de prolonger la séance jusqu’à vingt heures trente afin que nous puissions terminer l’examen des deux propositions de loi. Or les mêmes qui m’ont fait cette demande dépassent leur temps de parole…
Je vous indique que si nous n’avons pas terminé nos travaux à vingt heures quinze, je suspendrai la séance, puis elle reprendra à vingt-deux heures.
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le sénateur Pierre a évoqué la diminution des indemnités et leurs conséquences ; il a même parlé des ministres. Nous sommes un bel exemple : dès 2012, les indemnités des membres du Gouvernement ont été réduites de 30 %.
M. Éric Doligé. C’était ridicule !
M. Alain Vasselle. Démagogique !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Cela contribue certainement à notre magnifique popularité actuelle… (Rires.)
En ce qui concerne l’amendement, qui porte – je le rappelle – sur les communes déléguées, j’ai émis un avis favorable. La commission ayant fait de même, il est probable que le vote ne posera pas de problème…
En fait, plusieurs orateurs ont anticipé le débat qui aura lieu à l’occasion de l’examen de la proposition de loi suivante. Or il me semble que la sagesse devrait consister à prendre le temps et, comme l’a indiqué le rapporteur, à évaluer la mesure. Je rappelle qu’il s’agit d’une initiative parlementaire ; le Gouvernement n’a jamais fait ce genre de proposition. À l’origine, c’est l’Association des maires de France qui a demandé à un certain nombre de députés et de sénateurs de porter la proposition de loi qui a été adoptée.
Ce n’est pas non plus le Gouvernement qui propose de remettre en cause le statut des maires des communes de moins de 1 000 habitants. Si ce sujet s’est invité dans le débat, c’est parce que certains maires – peu nombreux certes, mais qui se sont beaucoup exprimés – ont fait du battage médiatique. On a alors entendu qu’il est scandaleux que les maires ne puissent pas renoncer à leurs indemnités.
Quand je vois la complexité du débat, le fait qu’une proposition de loi ait été adoptée il y a à peine un an, la diversité des opinions – je partage d’ailleurs les propos de Mme Gourault, de M. Doligé et d’autres sénateurs – et les conséquences – on ne peut pas changer la loi tous les ans ! –, il me semble urgent d’attendre. Je le répète, une évaluation est nécessaire. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat ainsi que la commission des lois pourraient s’emparer du sujet. Nous aurions alors une vision réelle de la prégnance de cette demande, qui, me semble-t-il, ne concerne qu’un nombre limité de communes.
M. Bruno Sido. C’est vrai !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. J’ajoute une dernière chose.
Monsieur Guené, mes services me confirment qu’il y a bel et bien une erreur matérielle de référence dans l’article du code général des collectivités territoriales que votre amendement vise à modifier.
M. Charles Guené. Vous avez raison, monsieur le ministre. J’ai d’ailleurs demandé aux services de la séance de rectifier mon amendement pour remplacer, au troisième alinéa, la référence L. 2113-21 par la référence L. 2123-21.
M. le président. Il s’agit en effet de l’amendement n° 5 rectifié bis, présenté par MM. Guené, Sido et Lefèvre, Mmes Deseyne, Lamure et Mélot et MM. de Legge, Cornu, Vaspart, Mouiller, Pierre, Paul, Vasselle, B. Fournier, Bizet, César, D. Laurent, Laménie, Longuet, Morisset, Trillard, Vial, Joyandet, Genest, Darnaud et Gournac, et ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2123-21 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au dernier alinéa de l’article L. 2123-23, le conseil municipal peut, par délibération, fixer, pour le maire délégué qui en fait la demande, une indemnité de fonction inférieure au barème fixé au même article. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le deuxième alinéa est applicable aux maires délégués des communes issues d’une fusion de communes, prévue à la section 3 du chapitre III du titre Ier du présent livre, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. »
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 1er.
L’amendement n° 6 rectifié ter, présenté par MM. Guené, Sido et Lefèvre, Mmes Lamure et Mélot et MM. Cornu, Mouiller, Pierre, Paul, Vasselle, B. Fournier, Bizet, César, D. Laurent, Laménie, Morisset, Vial, Gournac, Cardoux, Revet, Huré, Genest, Darnaud, Malhuret et Delattre, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« … Jusqu'au prochain renouvellement général des conseils municipaux suivant la création de la commune nouvelle, lorsque le siège d’un conseiller communautaire devient vacant, il est pourvu dans les conditions fixées au b du 1° du présent article, y compris dans les communes nouvelles de moins de 1 000 habitants. »
La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené. J’espère que le débat sur cet amendement, qui a été rectifié en accord avec la direction générale des collectivités locales, sera beaucoup plus rapide.
Actuellement, l’administration estime que les sièges de conseillers communautaires d’une commune nouvelle devenus vacants ne peuvent être remplacés. Cet amendement vise à combler ce vide juridique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Grosdidier, rapporteur. Pour nous faire gagner du temps, je me contenterai de dire que la commission a émis favorable sur cet amendement, qui comble effectivement un vide juridique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido, pour explication de vote.
M. Bruno Sido. Cet amendement est tout à fait justifié ; je l’ai d’ailleurs cosigné.
Quand je suis intervenu dans la discussion générale en tant qu’auteur de la proposition de loi, j’ai expliqué la manière dont devait se dérouler, selon la loi Marcellin, la procédure pour créer des communes associées. La réalité a été tout autre… Je vais vous conter une anecdote.
Comme je le disais, j’ai été maire délégué. Durant l’une de mes nombreuses permanences, j’ai cherché le cahier des délibérations de ma commune pour lire les motivations de la décision visant à la transformer en commune associée. Je vous le donne en mille : il n’y avait aucune délibération au registre du conseil municipal ! Cela aurait pourtant dû être la dernière… À l’époque, le préfet – certainement un empereur aux petits pieds… – a fait ce qu’il a voulu. Nous étions pourtant sous la Ve République, en 1971. Cela ne date pas de Mathusalem ! À l’époque, les préfets avaient l’esprit large.
Aujourd’hui, on a parfois l’impression que les préfets bloquent des situations qui paraissent évidentes dès qu’elles ne sont pas prévues dans le code. À quoi servent les préfets dans ces conditions, monsieur le ministre ? À rien ! Il suffirait de tourner la manivelle d’une machine pour avoir la réponse à notre question… Un préfet devrait, au contraire, pouvoir apprécier les situations, ce qui nous permettrait d’éviter de légiférer sur des choses aussi évidentes.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 1er.