M. Jean-Pierre Bosino. Pas de cette manière !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Nous voulons protéger les salariés, mais ma conviction est que nous devons aussi être capables, madame la sénatrice, de répondre aux attentes de tous ceux qui ne trouvent pas d’emploi. C’est le sens de ce projet de loi, que je suis déterminé à faire aboutir, dans un esprit d’écoute et de responsabilité. Le pays a besoin de cette réforme ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour la réplique.
Mme Annie David. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de votre réponse, mais de quel dialogue parlons-nous ? Pourquoi n’avoir pas engagé plus tôt le dialogue social avec les organisations syndicales et pourquoi opposer la jeunesse aux salariés ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Ce n’est pas ainsi, monsieur le Premier ministre, que vous allez moderniser notre code du travail. Oui, le code du travail a besoin d’être modernisé pour prendre en compte la révolution numérique en cours, qui bouleverse le monde du travail. Cette révolution numérique doit amener des progrès sociaux pour les salariés et non pas profiter seulement aux actionnaires. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
prise en charge du revenu de solidarité active par l’état
M. Pierre Camani. Ma question, qui s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé, porte sur la recentralisation annoncée par le Premier ministre du revenu de solidarité active.
Cette allocation, fille du RMI instauré en 1988 par le gouvernement de Michel Rocard, constitue une aide essentielle pour les personnes exclues du marché du travail. Elle contribue également à les accompagner dans un parcours d’insertion sociale.
Nous devons rester attachés au caractère national de cette allocation, qui ne saurait souffrir d’exceptions en fonction de singularités locales, au risque de rompre avec le principe républicain d’égalité et d’universalité des droits sociaux.
La gestion du RMI, devenu le RSA, a été confiée aux départements en 2004. Or, depuis cette date, l’État n’a pas compensé à juste hauteur les dépenses liées au transfert de cette compétence. Aujourd’hui, à titre d’exemple, le département que je préside est confronté à une situation financière sans précédent, qui le conduit à une impasse budgétaire, malgré des ratios de gestion positifs.
En effet, la progression des dépenses au titre du RSA est, pour une large part, responsable d’une très forte croissance du reste à charge pour la collectivité. Celui-ci était de 2 millions d’euros en 2008 ; il est de 22 millions d’euros en 2015, pour une dépense totale de 52,7 millions d’euros.
Ce manque à gagner s’ajoute à la chute des recettes départementales due à la suppression de ressources fiscales dynamiques hier, et à la baisse des dotations de l’État aujourd’hui.
Nous le savons tous, malgré les mesures positives prises par le Gouvernement en 2013 dans le cadre du pacte de solidarité, l’insuffisante compensation de la charge des allocations individuelles de solidarité entraîne une dégradation accélérée et structurelle des finances des départements, avec une incidence bien plus forte pour les départements les plus pauvres.
M. Hubert Falco. Parfaitement !
M. Pierre Camani. Les annonces faites par le Premier ministre jeudi dernier vont dans le bon sens et constituent une première réponse à ces difficultés. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Fouché. Non !
M. Pierre Camani. Il importe cependant d’aller plus loin, en définissant les règles d’une véritable péréquation qui tienne pleinement compte de la structure des ressources des départements, de leurs dépenses et des disparités fortes qui existent entre eux.
M. le président. Veuillez poser votre question !
M. Pierre Camani. Comment envisagez-vous la mise en œuvre de la péréquation dans le cadre de la recentralisation annoncée ?
M. Michel Bouvard. Ça y est, ça recommence !
M. Pierre Camani. Plus globalement, pourriez-vous apporter des précisions sur les mécanismes envisagés par le Gouvernement en vue d’une recentralisation du RSA ? (Applaudissements sur de nombreuses travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le sénateur Pierre Camani, j’avais en effet annoncé, le 22 juillet dernier, la mise en place d’un groupe de travail avec l’Assemblée des départements de France sur le financement des allocations de solidarité. Ce groupe de travail a, depuis, établi un diagnostic partagé de la situation financière des départements, et étudié, parmi les pistes de solutions, la recentralisation du financement du RSA.
Nous n’ignorons rien, bien sûr, des difficultés financières rencontrées par les départements du fait de l’augmentation du nombre des bénéficiaires du RSA.
Nous devons refuser toutes les polémiques, les stigmatisations et les fausses solutions, qui n’ont pas manqué ces derniers temps et qui visent en permanence à rendre responsables de la situation financière les chômeurs ou les allocataires du RSA eux-mêmes.
M. Jean-Claude Carle. Et l’État !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Le Gouvernement entend réaffirmer avec force – Marisol Touraine a déjà eu l’occasion de le faire ici même – que la solidarité est l’essence même de notre pacte républicain et qu’elle fonde ainsi, d’une certaine manière, le rôle des départements.
Je tiens à rappeler que le Gouvernement a déjà agi avec volontarisme en décidant de revaloriser de 10 % le RSA sur cinq ans pour garantir la dignité de nos concitoyens les plus en difficulté, les plus pauvres.
Nous avons aussi amélioré l’incitation au retour de l’activité de ses bénéficiaires, avec la fusion du RSA activité et de la prime d’activité. Cela mérite également d’être rappelé.
Par ailleurs, j’ai confié une mission au député Christophe Sirugue, qui doit proposer, d’ici à la fin du mois de mars, des solutions en vue d’une simplification et d’une rationalisation des neuf minima sociaux existant aujourd’hui.
Dans ce contexte, j’ai rencontré jeudi dernier, avec Jean-Michel Baylet et Estelle Grelier, une délégation des présidents des conseils départementaux. Nous avons pris nos responsabilités en présentant une hypothèse de recentralisation qui permettrait de résoudre de manière pérenne la situation.
Nous avons proposé aux départements que l’État reprenne à sa charge le financement du RSA dans le cadre des débats qui auront lieu sur le projet de loi de finances pour 2017, sur la base des dépenses de l’année 2016. Nous avons proposé de préserver au maximum les recettes dynamiques des départements et de veiller à développer ce que l’on appelle la « péréquation horizontale » pour corriger les inégalités entre les départements.
Cela, je le souligne, représente un effort important de l’État, qui prendrait ainsi à sa charge l’intégralité de la croissance des dépenses de RSA en 2017.
En contrepartie, nous avons demandé que les départements s’engagent fortement en faveur de l’insertion, qui régresse malheureusement, pour garantir le bon accompagnement des bénéficiaires du RSA et leur sortie du dispositif.
C’est ainsi que nous pourrons contenir la dépense et offrir un avenir à celles et ceux qui sont aujourd’hui dans une situation de grande pauvreté.
Aujourd’hui même se tient une réunion de l’Assemblée des départements de France. Nos propositions sont sur la table. Si l’ADF accepte la méthode proposée, nous continuerons ce travail ensemble.
Je vous assure, monsieur le sénateur, que les membres du Gouvernement, en particulier Marisol Touraine, Jean-Michel Baylet, Estelle Grelier et Christian Eckert, seront attentifs à ces échanges, qui doivent permettre d’avancer vers une solution et d’en préciser les modalités de mise en œuvre, afin que les départements puissent faire face au défi financier qui s’impose à eux, que l’État puisse assurer la cohésion nationale et, surtout, que nous puissions apporter une réponse à ceux qui en ont le plus besoin. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
politique agricole commune et zones intermédiaires
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour le groupe UDI-UC.
Mme Anne-Catherine Loisier. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt ou à M. le Premier ministre. Elle porte sur l’inégale répartition des aides de la politique agricole commune pour les exploitations se situant dans les zones intermédiaires ou « à faible potentiel ».
Sur votre initiative, monsieur le ministre, la France a fait le choix de mettre en place la convergence des aides et le paiement redistributif, qui consiste à verser une dotation complémentaire pour les cinquante-deux premiers droits à paiement de base. La part allouée à ce paiement redistributif est progressive : elle était de 5 % en 2015 et atteindra 20 % en 2019.
On le constate aujourd’hui, cette réforme a des conséquences désastreuses dans les vingt-trois départements reconnus à faible potentiel agricole, représentant environ 2 millions d’hectares de terres situées dans un croissant allant de la Lorraine au Poitou.
Depuis trois ans, tous les systèmes de production de ces territoires sont pénalisés, jusqu’aux exploitations céréalières, dont 41 % ont enregistré un revenu négatif en 2015 en Côte-d’Or. Dans ces territoires à faible potentiel, les aides de la PAC sont historiquement inférieures à la moyenne nationale, à concurrence de 26 euros par hectare pour les grandes cultures, de 36 euros par hectare pour la viande bovine et de 49 euros par hectare pour la filière bovins-lait.
Ces écarts se sont encore aggravés depuis 2015 avec ce choix, unique en Europe, de la convergence des aides et de l’activation du paiement redistributif, qui crée des distorsions de concurrence inégalées entre les producteurs français et leurs concurrents européens.
Dans le contexte particulièrement défavorable que nous connaissons, monsieur le ministre, qu’envisagez-vous de faire pour réajuster les dispositifs existants ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement.
M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Madame la sénatrice, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Stéphane Le Foll, qui se trouve actuellement au salon de l’agriculture. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je vous remercie de me pousser dans les derniers retranchements de mes compétences (Sourires.) en abordant cette difficile question des zones dites « intermédiaires », où les rendements céréaliers sont plus faibles et les exploitations plus grandes que la moyenne. Ces zones sont indispensables et doivent donc être aidées.
Comme vous l’avez souligné, la réforme de la PAC a majoré l’aide aux premiers hectares, en instaurant une progressivité en pourcentage et dans le temps afin d’éviter des variations brutales.
Le ministre de l’agriculture a obtenu de l’Union européenne que des exploitations agricoles puissent être organisées sous forme sociétaire, ce qui correspond mieux au type d’exploitations concernées.
Dans ces zones, le risque d’abandon des activités d’élevage est réel, dans un contexte que chacun connaît.
Il convient, dès lors, de trouver des solutions spécifiques pour ces exploitations agricoles qui pratiquent très souvent la polyculture-élevage. Une expérimentation est en cours en Lorraine pour préciser les mesures agro-environnementales spécifiques qui pourraient être prises. En effet, la réduction des traitements phytosanitaires dans les exploitations plus spécialisées en céréales est rendue plus difficile en fonction de la nature des sols. C’est pourquoi le ministre de l’agriculture a plaidé auprès de la Commission européenne en faveur de l’adoption d’une mesure agro-environnementale spécifique, avec des objectifs adaptés. Une modification sera demandée pour l’année 2016, assortie d’engagements sur les cinq ans qui viennent. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour la réplique.
Mme Anne-Catherine Loisier. Je voudrais juste souligner que la profession attend que l’on établisse un bilan à mi-parcours, en 2017, de l’application de ce dispositif franco-français, dont on mesure aujourd’hui les conséquences désastreuses. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
traité transatlantique et agriculture
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour le groupe Les Républicains.
M. Alain Vasselle. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’agriculture, mais, comme M. Le Guen vient de le préciser, M. Le Foll se trouve actuellement au salon de l’agriculture… Je vais donc m’adresser à M. Fekl.
Monsieur le secrétaire d’État, je ne sais pas si vous avez accompagné, le week-end dernier, le Président de la République et le Premier ministre au salon de l’agriculture. Ils ont pu à cette occasion mesurer le désespoir et la colère des agriculteurs face à la situation qu’ils vivent.
M. Didier Guillaume. Nul besoin d’y aller pour le savoir !
M. Alain Vasselle. Les agriculteurs restent circonspects quant aux mesures qui ont été annoncées par le Gouvernement pour tenter de répondre à la crise que traverse la profession. À cela vient s’ajouter une inquiétude supplémentaire liée à la négociation en cours du traité de libre-échange transatlantique entre les États-Unis et l’Europe. Ce traité suscite de nombreuses inquiétudes, notamment dans le monde agricole. L’agriculture ne doit pas faire les frais de cette négociation, ni en être la variable d’ajustement.
C’est dans cette perspective que notre collègue Sophie Primas a déposé, le 16 décembre dernier, au nom de la commission des affaires économiques, une proposition de résolution sur ce sujet et que notre collègue Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques, a déposé une proposition de loi, laissée sans suite.
Monsieur le secrétaire d’État, avez-vous réellement conscience des enjeux de cette négociation ? Quelles décisions ou positions le Gouvernement compte-t-il prendre pour répondre à l’appel au secours de toutes les filières de la profession agricole et éviter que cette négociation n’ait pour elles des conséquences désastreuses ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Je vous remercie de votre question, monsieur Vasselle, qui concerne un sujet fondamental, sur lequel la Haute Assemblée a déjà beaucoup travaillé.
J’ai eu l’occasion à plusieurs reprises d’être auditionné par les commissions compétentes et de m’exprimer dans cet hémicycle à propos de divers textes et travaux, qui, le plus souvent, ont donné lieu à des décisions consensuelles et à des votes unanimes de votre assemblée.
Avec Stéphane Le Foll, nous conduisons ce que nous avons appelé la « diplomatie des terroirs ». En effet, beaucoup de décisions qui affectent nos territoires – je suis moi-même élu d’un département rural, le Lot-et-Garonne – se prennent dans les instances internationales.
Nous sommes attentifs à la reconnaissance de nos indications géographiques et de nos appellations. Ce sujet essentiel est abordé dans le cadre des négociations, et nulle part ailleurs. Nos vins, nos productions laitières ou charcutières, notamment, ont besoin de cette reconnaissance. (Mme Frédérique Espagnac approuve.)
Nous sommes également attentifs à la défense de notre modèle alimentaire, car nous ne voulons en aucun cas voir arriver dans nos assiettes du bœuf aux hormones ou du poulet chloré. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du groupe écologiste et du RDSE.)
Nous sommes attentifs enfin à ce que la juxtaposition des négociations ne vienne pas déséquilibrer encore un peu plus nos filières, au travers l’octroi de quotas. La semaine dernière, lors de son voyage en Amérique latine, le Président de la République a rappelé que, dans les négociations avec le Mercosur, nous serions en particulier attentifs à ce point.
Cela vaut aussi dans le cadre de la négociation du TAFTA, où la diplomatie des terroirs trouve à s’exprimer pleinement. L’agriculture est au cœur de nos priorités, elle représente l’une des lignes rouges pour la France. Je le redis devant vous : il n’y aura pas d’accord si nos demandes en matière agricole, à savoir la reconnaissance de notre modèle alimentaire et celle de nos appellations, ne sont pas prises en compte. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
M. Didier Guillaume. Très bien ! Très clair !
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour la réplique.
M. Alain Vasselle. Nous pouvons bien entendu vous faire crédit des engagements que vous venez de prendre devant le Sénat, monsieur le secrétaire d’État, mais serez-vous soutenu, dans la négociation, par les autres pays européens ? (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.) La France ne sera-t-elle pas minoritaire ? La politique agricole française ne sera-t-elle pas le dindon de la farce ? (Applaudissements sur certaines travées du groupe Les Républicains.)
M. Didier Guillaume. Si la gauche était majoritaire en Europe, ce serait mieux, en effet !
essais cliniques
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour le groupe du RDSE.
M. Gilbert Barbier. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
En janvier dernier, un essai clinique a conduit au décès d’un volontaire et à l’hospitalisation de cinq autres, dont quatre souffrent de lésions cérébrales plus ou moins profondes. L’enquête menée par l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, a révélé plusieurs failles : le laboratoire ne s’est pas tenu suffisamment informé de l’état de santé des premiers volontaires hospitalisés ; il a poursuivi l’essai sur l’ensemble des volontaires, alors qu’un premier patient avait été hospitalisé la veille ; il a tardé à signaler l’accident aux autorités, n’informant l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, des effets indésirables graves survenus lors de l’essai clinique que quatre jours après l’hospitalisation du premier volontaire.
En outre, selon certaines informations, les essais précliniques semblent entourés d’incidents, sans que cela soit rendu public. Aujourd’hui encore, de nombreuses questions restent sans réponse, d’autant que l’ANSM paraît se retrancher derrière le secret médical.
Madame la ministre, pouvez-vous éclaircir les zones d’ombre qui entourent encore ce dossier ? Par ailleurs, que comptez-vous faire pour encadrer ces essais cliniques afin que cet accident, certes exceptionnel, ne se reproduise pas ? (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.
Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le sénateur, comme vous l’avez dit, c’est un accident gravissime qui s’est produit au début du mois de janvier à Rennes, puisqu’il a entraîné le décès d’un volontaire sain et l’hospitalisation de cinq autres. Ceux-ci vont mieux, mais restent suivis médicalement.
Ces circonstances obligent à faire la transparence la plus complète sur ce qui s’est passé. C’est la raison pour laquelle, indépendamment des enquêtes judiciaires en cours, deux enquêtes administratives ont été lancées, l’une sous la responsabilité de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’autre sous celle de l’Inspection générale des affaires sociales.
Les rapports définitifs n’ont pas encore été rendus, mais des rapports d’étape m’ont été remis. À ce stade, l’IGAS ne trouve pas d’explication crédible à l’accident qui s’est produit. En revanche, elle a souligné que des manquements graves avaient été observés dans le comportement du centre d’essais cliniques. C’est pourquoi j’ai d’ores et déjà adressé une instruction à toutes les agences régionales de santé, afin qu’elles rappellent à tous les centres d’essais cliniques leurs obligations en matière d’information des volontaires et d’information immédiate des autorités sanitaires en cas d’accident.
De la même manière, l’ANSM a réuni un comité d’experts internationaux, qui, au regard des informations dont nous disposons, considèrent que les essais précliniques répondaient aux normes et aux réglementations en vigueur. Cependant, d’autres enquêtes vont être réalisées.
J’attends donc que les rapports définitifs soient remis, monsieur le sénateur, mais toute la vérité doit être établie, et il n’est pas question de laisser le moindre élément dans l’ombre. J’ai pris cet engagement, et je le tiendrai. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Françoise Laborde applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour la réplique.
M. Gilbert Barbier. Madame la ministre, une fois de plus, notre pays est frappé par un accident dû à des médicaments. Faut-il rappeler les affaires de l’Isoméride, du Distilbène, du sang contaminé, du Vioxx, du Mediator, de la pilule Diane 35 ou de la Dépakine ? Tous ces scandales conduisent nos concitoyens à douter de l’action menée par les pouvoirs publics en matière de contrôle des médicaments.
Plusieurs agences coexistent : la Haute Autorité de santé, la Commission de la transparence, le Comité économique des produits de santé… Mon collègue Yves Daudigny et moi-même essayons d’y voir un peu plus clair, mais nos concitoyens attendent davantage de transparence, afin que la politique menée en la matière soit compréhensible. (Applaudissements sur les travées du RDSE.)
octroi d'un statut d'économie de marché à la chine au sein de l'organisation mondiale du commerce
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour le groupe écologiste.
M. André Gattolin. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l’étranger.
La Chine connaît, depuis plusieurs mois, un net ralentissement de sa croissance économique. Actuellement en situation de surproduction sidérurgique, ce pays déverse sur le marché mondial des centaines de millions de tonnes d’acier à prix cassés, mettant ainsi en danger des dizaines de milliers d’emplois en Europe.
Parallèlement, la Chine réclame haut et fort un changement de statut au sein de l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC, pour obtenir celui d’économie de marché, qui lui permettrait d’esquiver les nombreuses procédures anti-dumping dont elle fait l’objet de la part de l’Union européenne.
Sur ce sujet crucial pour notre économie, c’est la Commission européenne qui conduit, seule, les négociations pour l’ensemble des pays de l’Union. Soucieuse de ne pas s’aliéner les bonnes grâces de la Chine, elle tient des propos assez ambigus et fait preuve de beaucoup d’opacité sur l’état actuel des pourparlers. De leur côté, la plupart des États membres évitent de s’exprimer sur le sujet, redoutant sans doute d’éventuelles mesures de rétorsion à leur endroit.
Alors, monsieur le secrétaire d’État, afin d’éviter de se retrouver dans une situation encore plus embarrassante que celle qui prévaut pour le TTIP, ne serait-il pas pertinent que la France demande la réalisation d’une véritable étude d’impact, par secteur et par pays, ainsi que l’inscription de ce sujet à l’ordre du jour du prochain Conseil européen ? (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et sur quelques travées du groupe CRC. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger.
M. Matthias Fekl, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Permettez-moi tout d’abord de saluer le travail réalisé, sur ce sujet, par le Parlement. Il est indispensable pour faire la transparence et donner aux Français les informations auxquelles ils ont droit. Le Gouvernement y est lui aussi très attaché.
Emmanuel Macron et moi-même suivons de très près, au sein des différents conseils des ministres de l’Union européenne concernés, la question que vous avez soulevée, monsieur le sénateur.
La Chine a adhéré à l’OMC en 2001. C’est d’ailleurs l’une des dernières grandes économies mondiales à avoir rejoint cette organisation multilatérale. Elle était alors caractérisée comme une économie en transition. La question se pose maintenant de savoir si le statut d’économie de marché doit lui être attribué ou pas.
Effectivement, la Commission européenne est chargée des négociations, que la France, comme d’autres pays, suit de près.
Sur la méthode, conformément à ce que vous souhaitez, la France a déjà demandé, par ma voix et celle d’Emmanuel Macron, la réalisation d’analyses juridiques et économiques, ainsi que d’études d’impact, pour connaître précisément les effets qu’une telle décision entraînerait sur l’emploi en France et en Europe. Ce qui est en jeu, c’est l’application des règles anti-dumping.
Sur le fond, nous sommes très attentifs à ce que nous puissions continuer à mettre en œuvre des règles anti-dumping pour protéger notre industrie, selon un principe de réciprocité que nous défendons activement dans toutes les négociations commerciales. Nous nous coordonnons avec nos partenaires européens et au sein du G7 pour avancer sur ce sujet. C’est au niveau européen que tout se joue. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur certaines travées du RDSE. – Mme Corinne Bouchoux applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour la réplique.
M. André Gattolin. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. Cette question des études est essentielle. La commissaire européenne au commerce, Mme Malmström, a récemment évoqué la perte de 73 000 à 188 000 emplois, tandis que l’Institut de politique économique de Washington estime qu’entre 1,7 million et 3,5 millions d’emplois seraient mis en péril en Europe.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. André Gattolin. On raille souvent les divergences, en matière de décompte des manifestants, entre les chiffres de la police et ceux des organisateurs, mais là, l’écart est de un à vingt ! Nous avons besoin de davantage d’éléments sur ce point. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
revalorisation de l’allocation personnalisée d'autonomie