Mme Éliane Assassi. Alors ça…
M. Pierre-Yves Collombat. Comme l’animation du débat électoral dépend des médias libres dans le poulailler médiatique libre, autant dire que le résultat ne devrait pas surprendre par son originalité…
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. Pierre-Yves Collombat. Le moindre des paradoxes, pour qui observe l’évolution de la Ve République, n’est pas que la constitution voulue par le général de Gaulle pour tordre le cou au « régime des partis » ait installé un système où deux partis dominant deux coalitions alternent au pouvoir pour y conduire les mêmes politiques sur l’essentiel : mode de construction d’une Europe libérale, politique financière, économique, organisation territoriale, et j’en passe.
Aveugles au principe de réalité, sourdes aux messages régulièrement envoyés par les électeurs, ces formations « sérieuses » entendent continuer à occuper le pouvoir suprême en le partageant le moins possible, au besoin en changeant les règles du jeu. Sur ce plan, ce quinquennat nous aura gâtés : modification du mode de scrutin des élections municipales, départementales et sénatoriales, redécoupage des circonscriptions départementales et régionales, modification des règles d’inscription sur les listes électorales, modification du calendrier électoral et, aujourd’hui, modernisation des conditions du déroulement de la campagne pour la prochaine élection présidentielle.
À en juger par les résultats de ces expédients, ces modernisateurs feraient bien d’y regarder à deux fois. Marianne peut être susceptible quand on froisse ses principes. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe CRC. – Mme Corinne Bouchoux et M. Jean-François Longeot applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Hugues Portelli.
M. Hugues Portelli. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je cherchais du regard le ministre chargé des affaires constitutionnelles, mais je suis ravi que ce soit Mme la secrétaire d’État chargée des collectivités territoriales qui nous réponde, puisque, d’une certaine façon, les collectivités territoriales ont un rôle dans la tenue de l’élection présidentielle.
Au nom du groupe Les Républicains, je félicite M. le rapporteur pour l’excellent travail qu’il a accompli : son rapport est vraiment de grande qualité, et les réponses qu’il apporte, au travers de la proposition de loi organique et de la proposition de loi, permettent au moins de régler les problèmes de l’heure. Nous le savons, les véritables questions que soulèvent l’élection présidentielle et ses modalités seront peut-être traitées un jour, par le biais d’un autre texte législatif…
Le groupe Les Républicains approuve le texte que la commission des lois a adopté, améliorant la rédaction issue de l’Assemblée nationale sur des points essentiels, notamment l’égalité entre les candidats avant l’ouverture de la campagne officielle, l’ajustement entre la campagne des primaires et celle de l’élection présidentielle proprement dite et la modernisation indispensable de la méthodologie et du contrôle des sondages électoraux.
Cela dit, les questions de fond sont renvoyées, comme d’habitude, aux calendes grecques.
La première est celle du coût des campagnes, dont l’évaluation par le législateur ne correspond pas à la réalité, surtout à l’heure de la communication. Pensons que la loi française octroie généreusement 22 millions d’euros aux candidats qualifiés pour le second tour, alors que, aux États-Unis, les candidats à l’élection présidentielle dépensent allègrement 1 milliard de dollars. Entre ces deux chiffres, il y a sans doute un juste milieu à trouver : une meilleure évaluation des dépenses amènerait peut-être une diminution de la fraude !
La deuxième question de fond a trait au développement du rôle des primaires, qui n’avait été envisagé ni en 1962 ni après et qui soulève des interrogations financières et juridiques dont on ne pourra pas longtemps faire abstraction. À cet égard, la proposition de loi pose un premier jalon en prévoyant de réduire de moitié, à partir de 2022, la durée de la campagne présidentielle proprement dite, de façon à obliger le législateur à s’interroger sur le moyen de réglementer les primaires. Aux États-Unis, où les primaires font partie de la vie politique, aussi bien nationale que locale, et constituent en réalité le premier tour de l’élection présidentielle, il existe une législation fédérale sur le financement des primaires, des législations d’État sur les conditions d’accès aux primaires et une jurisprudence fournie de la Cour suprême, tant sur le premier que sur le second point.
La France connaît, en la matière, un quasi-vide juridique. La CNCCFP a vaguement bâti une cote mal taillée, que le Conseil a validée en 2012. Nous ne pourrons pas rester longtemps dans ce vide juridique et politique !
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Hugues Portelli. La troisième question de fond est celle de la sélection des candidats par le biais des parrainages accordés par les élus nationaux et locaux, qui constitue davantage un barrage qu’un relais pour l’émergence de forces et de personnalités nouvelles.
La proposition de loi organique et la proposition de loi ne répondent pas à ces questions, même si elles posent des jalons utiles sur le chemin menant peut-être vers une évolution ultérieure de la législation, dont il faut espérer qu’elle se produise avant 2021.
Sur ce sujet, nous avions tout loisir d’intervenir. Le Conseil constitutionnel a remis ses observations sur l’élection présidentielle de 2012 le 21 juin de la même année. Le rapport d’activité de la CNCCFP pour l’exercice 2012-2013 a été rendu le 2 septembre 2013. Le Sénat a voté à l’unanimité, le 14 février 2011, une proposition de loi relative aux sondages, sachant que la législation sur ce thème est totalement obsolète. Bien entendu, l’Assemblée nationale et le Gouvernement n’y ont donné aucune suite ! On disposait donc depuis longtemps déjà des éléments nécessaires pour légiférer en la matière : pourquoi a-t-on attendu l’avant-veille de la prochaine élection présidentielle pour se réveiller ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-François Longeot et Jean-Pierre Sueur applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites. Je voudrais pour ma part saluer un effort de créativité procédurale : voilà une proposition de loi portant sur un sujet fondamental, à savoir les élections présidentielles, qui nous est soumise en procédure accélérée, un jeudi après-midi, en présence de trente-cinq sénateurs…
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Parmi les meilleurs !
Mme Nathalie Goulet. Bien entendu, et les absents ont forcément tort ! (Sourires.)
Comme l’ont dit plusieurs d’entre nous, notre vie politique est totalement bloquée,…
Mme Éliane Assassi. Effectivement !
Mme Nathalie Goulet. … la société est à bout de souffle, l’organisation et le fonctionnement des partis politiques ne sont pas satisfaisants, la société civile essaie de prendre le dessus, l’antiparlementarisme n’a jamais été aussi fort, et nous voilà entre nous en train de bricoler, de poser des rustines…
Nous aurions parfaitement pu agir plus tôt. Je rends hommage au travail qui a été accompli par le rapporteur, mais il n’en demeure pas moins que nos concitoyens ont l’impression d’être complètement dépossédés de leur pouvoir et de leur rôle. Les intérêts particuliers semblent avoir pris le pas sur l’intérêt général, et nous nous trouvons aujourd’hui occupés à régler, dans un contexte très spécifique, un problème qui ne l’est pas moins.
Ce qui est ressorti de la lecture du texte à l’Assemblée nationale, c’est que la période de comptabilisation des dépenses de campagne va être réduite, alors que nous sommes en pleine affaire Bygmalion et que nous avons d’autres soucis.
Dans ces conditions, ce texte est quasiment périmé avant même d’avoir été examiné. En 1991 comme en 2006, le rapport du Conseil d’État sur la sécurité juridique qualifiait notre droit fiscal de « gazeux ». Aujourd’hui, le droit électoral ne l’est pas moins. Nous avons modifié quasiment toutes les élections. Au-delà de cette instabilité chronique de notre droit électoral, les deux présentes propositions de loi cristallisent à elles seules le caractère désormais tutélaire et incontournable de l’élection présidentielle.
Nous légiférons sur la base des retours d’expérience produits par le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État et la CNCCFP. Nous ne prenons pas assez en compte l’évolution des pratiques et des usages de la vie politique, en lien avec leur incontournable expression médiatique.
Il a été dit tout à l’heure que, en termes d’exposition médiatique, il fallait assurer l’équité entre les candidats plutôt que l’égalité, afin que le public ne se détourne pas des émissions politiques. Mais si les candidats ne sont pas capables de capter l’attention des téléspectateurs, c’est leur faute, pas celle de la télévision : il appartient aux candidats d’être bons !
En tout état de cause, il serait absolument inacceptable, pour notre groupe, que l’on remplace l’égalité par l’équité. D’ailleurs, qui serait juge de l’équité, et dans quelles conditions ? Pour nous, ce point n’est pas négociable.
Mme Éliane Assassi. Voilà !
Mme Nathalie Goulet. Tout en soulignant encore une fois la qualité du travail du rapporteur, je ne peux que constater que l’impact du quinquennat et des primaires sur le fonctionnement de l’élection présidentielle n'est pas assez pris en compte. Finalement, comme l’a dit M. Anziani, il y a encore énormément de points en suspens, qu’il aurait peut-être été bienvenu de régler à l’occasion de l'examen de ces textes.
Concernant la période de comptabilisation des dépenses de campagne, il faut souligner que la durée de celle-ci est en réalité de plus d’une année pour un candidat pouvant prétendre à la qualification au second tour. Les deux textes font l’impasse sur une hypocrisie bien française : on ne peut pas se faire élire à la présidence de la République avec 22 millions d’euros. Les contribuables et les citoyens jugeront. À l’heure où la politique, à l’échelle nationale, repose largement sur la communication, les campagnes coûtent cher. La question de leur financement ne s’en pose pas moins, mais, là encore, nous avons des comptes à rendre à l’opinion publique. Je crois que le moment est vraiment malvenu de « bricoler » un texte sur les comptes de campagne. En tout cas, moi, je m’y refuse !
En revanche, le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale a visé à revenir sur le principe du pluralisme. Je l’ai déjà dit, les dispositions de l’article 4 de la proposition de loi organique ne sont pas acceptables. La vie politique nationale ne saurait être un duopole ou un oligopole, avec deux ou trois partis politiques se taillant la part du lion en matière d’accès aux médias. Une telle appropriation de l’expression publique serait absolument contraire au principe du pluralisme. Comme cela a été dit, peut-être est-ce parce que l’égalité devient de moins en moins effective en politique qu’un secrétariat d’État à l’égalité réelle a été créé…
Nous devons absolument nous garder de telles dérives alors que, par ailleurs, nous prétendons travailler à renforcer la déontologie et la transparence. On ne peut pas plaider pour plus de transparence d’un côté et accroître l’opacité de l’autre. Nous devons faire preuve de cohérence !
Les travaux de la commission des lois apportent une réelle plus-value concernant le régime des parrainages ou l’heure de fermeture des bureaux de vote, sans oublier le régime des sondages. Toutefois, le texte issu de ces travaux ne présente pas suffisamment de garanties en matière de respect du pluralisme pour être tout à fait satisfaisant, à moins d’un an du démarrage officiel de la campagne présidentielle, d’autant que nous constatons tous les jours, à la télévision, dans les médias ou sur les réseaux sociaux, que cette campagne a en réalité déjà commencé. Les primaires sont engagées ; elles font partie intégrante de la campagne, et je pense qu’il aurait fallu anticiper…
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Que va faire l’UDI ? (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. C’est une grande question, à laquelle je ne peux répondre ! En revanche, je puis vous dire que les sénateurs centristes ont choisi d’appuyer la position de Catherine Morin-Desailly et de la commission de la culture, faisant primer l’égalité sur l’équité.
Nous estimons que les textes qui nous sont soumis ne présentent nullement les garanties nécessaires et ne sont pas satisfaisants ; sous réserve de leur évolution au cours du débat, nous voterons donc contre. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC. – Mmes Corinne Bouchoux et Éliane Assassi, M. Pierre-Yves Collombat applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la secrétaire d’État, je suis heureux de saluer votre présence au banc du Gouvernement.
Cela fait cinq ans, presque jour pour jour, que le Sénat a adopté, à l’unanimité, la proposition de loi sur les sondages visant à mieux garantir la sincérité du débat politique et électoral, qui avait été précédée d’un rapport, fruit d’un très grand travail et de multiples auditions, coécrit avec M. Portelli.
Cette proposition de loi vise à réformer la pratique en matière de sondages, aujourd'hui régie par une loi de 1977 totalement inadaptée à la situation actuelle.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bonne analyse !
M. Jean-Pierre Sueur. Madame la secrétaire d'État, ce n’est pas la première fois que je le dis à cette tribune : il n’est pas acceptable, pour notre démocratie, qu’une proposition de loi portant sur un sujet aussi important et adoptée à l’unanimité par le Sénat n’ait pas été inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale après cinq ans.
M. Jacques Mézard. C’est scandaleux !
M. Jean-Pierre Sueur. J’en ai parlé un nombre incalculable de fois avec les présidents successifs de la commission des lois de l’Assemblée, MM. Jean-Luc Warsmann, Jean-Jacques Urvoas, Dominique Raimbourg, avec tous les Premiers ministres et les ministres de l’intérieur. Rien n’empêchait l’Assemblée nationale d’inscrire ce texte à son ordre du jour et, madame la secrétaire d'État, rien n’en empêchait le Gouvernement non plus.
Mme Éliane Assassi. Vous n’avez pas dû être assez convaincant !
M. Jean-Pierre Sueur. Nous savons que les sondages jouent un rôle très important dans la vie politique. Un grand nombre d’analyses reposent en fait sur eux, mais on ne se préoccupe pas, ou peu, de la manière dont ils sont réalisés. Nous sommes par conséquent dans une situation totalement absurde.
Je vous signale que, lors de la dernière élection présidentielle, il y a eu en moyenne trois sondages par jour. Or, madame la secrétaire d'État, il est patent qu’il n’y a pas de règles. Par exemple, on n’est pas tenu de dire qui finance le sondage, qui le commente, qui le publie. Il y a beaucoup de confusion en la matière !
On n’est jamais tenu non plus de publier la marge d’erreur. Lorsqu’un sondage annonce qu’un candidat recueille 51 % des intentions de vote, l’autre 49 % – on ne sait d’ailleurs pas quelle est la proportion de non-réponses –, la marge d’erreur peut être de plus ou moins 3 %, voire de plus ou moins 3,5 %. Il est déjà arrivé que le public croie, sur la foi des sondages, qu’un candidat en devancerait un autre. Or, en raison de la marge d’erreur, les courbes pouvaient parfaitement se croiser…
Mme Éliane Assassi. Eh oui !
M. Jean-Pierre Sueur. De la même manière, il n’est pas obligatoire, pour les instituts de sondages, de donner à la Commission des sondages des indications sur les méthodes qui ont présidé aux redressements, pourtant très nombreux.
Je remercie notre rapporteur, Christophe Béchu, et nos collègues de la commission des lois d’avoir fait preuve d’un grand esprit d’ouverture, ce qui nous a permis d’insérer dans les présents textes toutes les dispositions de la proposition de loi sur les sondages adoptée par le Sénat relatives à l’élection présidentielle.
À cet égard, je précise que reste en suspens la question de la composition de la Commission des sondages. J’ai un grand respect pour cette instance, mais il est tout à fait absurde qu’aucun de ses membres ne soit spécialiste des statistiques ou des études d’opinion…
M. Pierre-Yves Collombat. Ce sont des juristes !
M. Jean-Pierre Sueur. Elle comprend des juristes de grande qualité, je n’en disconviens pas, mais il faut complètement revoir sa composition. J’espère que nous en aurons la possibilité. En conclusion, madame la secrétaire d'État, surtout ne nous dites pas qu’il n’est pas opportun d’en parler maintenant et que le sujet pourra être abordé à une prochaine occasion ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Madame la présidente, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord dire à Pierre-Yves Collombat qu’il n’est pas tout à fait exact que, en 1965, François Mitterrand ait eu autant de temps de parole à la télévision que le général de Gaulle, pour la bonne et simple raison que ce dernier, considérant que ce n’était pas de son niveau, n’avait absolument pas participé à la campagne médiatique avant le premier tour.
M. Pierre-Yves Collombat. C’est encore mieux !
M. Roger Karoutchi. Il avait renoncé à son temps de parole et ne s’était exprimé qu’entre les deux tours. François Mitterrand a donc eu beaucoup plus de temps de parole que le général de Gaulle !
J’admire le rapporteur d’avoir été aussi patient…
Mme Éliane Assassi. C’est vrai !
M. Roger Karoutchi. … et impliqué dans la préparation de l’examen de textes qui ne remettent tout de même pas en cause les fondements de l’élection présidentielle. Je pensais que l’on pourrait non pas se diriger vers la VIe République – je n’y crois pas –, mais au moins actualiser un peu le système de l’élection présidentielle. J’ai le sentiment que chacun parle beaucoup, puis, quand arrive le moment de la décision, la main tremble, parce que tout est complexe et que l’on se fait plus d’ennemis en changeant les choses qu’en ne touchant à rien.
Les parrainages doivent-ils être rendus publics au fur et à mesure ? Franchement, cela ne changerait pas la République, et je doute que cela fasse beaucoup bouger les élus. J’aurais souhaité pour ma part que l’on trouve un autre système, mais on s’est arc-bouté sur le principe des 500 parrainages. Pourquoi ne pas envisager, par exemple, que de simples citoyens puissent eux aussi parrainer des candidats ? Il était possible de changer la donne à cet égard.
Le système des temps de parole, monsieur le rapporteur, a été mis en place en un temps où il y avait très peu de chaînes de télévision, uniquement publiques. Par conséquent, le citoyen captif n’avait guère d’autre choix que regarder les émissions de la campagne électorale. Aujourd'hui, très peu de nos concitoyens regardent les émissions politiques et suivent la campagne électorale, qu’il s’agisse ou non, d’ailleurs, de l’élection présidentielle, et ceux qui le font sont de moins en moins nombreux. On peut se battre pour savoir s’il faut accorder trois minutes de plus ou de moins à tel ou tel candidat, mais, franchement, ça ne fera pas changer d’avis un seul électeur. Si l’on remplaçait ces émissions où chacun vient faire son petit laïus par des débats ou des émissions interactives, peut-être cela aurait-il un sens, mais le système actuel des émissions de campagne électorale participe, sinon du discrédit de la chose publique, en tout cas du désintérêt des gens : ils ne les regardent plus.
Un jour venant, il faudra adopter un texte de loi, assurément plus complexe à rédiger, relatif à la modernisation des types de campagnes politiques. Ce sujet sera d’une autre envergure. Je ne suis pas certain qu’il soit possible de dégager, à cet égard, des solutions consensuelles.
Monsieur le rapporteur, vous n’en aurez pas moins, au titre du présent texte, tout loisir pour déployer vos talents diplomatiques. Je le répète, les débats à venir seront sans doute beaucoup plus difficiles.
Quoi qu’il en soit, telles qu’elles sont médiatisées aujourd’hui, les campagnes électorales n’intéressent pas les électeurs. Elles ne convainquent personne d’aller voter. Il faudra donc bien changer de système.
Quant aux primaires, je ne suis pas convaincu qu’elles constituent un problème en elles-mêmes.
Lors de l’élection présidentielle de 2012, la Commission nationale a pris, pour les comptes de campagne du candidat Hollande, une base de 400 000 euros. Je relève au passage que l’on n’a jamais très bien su comment ce montant avait été choisi : pourquoi 400 000 euros ? Pourquoi pas 600 000 ou 200 000 euros ?
Madame la présidente, j’ai cosigné votre proposition de loi relative au financement des dépenses électorales. Avec un tel texte, la comptabilisation des dépenses de campagne serait, pour l’ensemble des élections, opérée sur une période de six mois.
Les primaires peuvent très bien s’inscrire dans un tel laps de temps. Prenons l’exemple de la primaire ouverte que Les Républicains vont organiser.
Mme Nicole Bricq. Ah !
M. Roger Karoutchi. Cette primaire aura lieu à la fin du mois de novembre prochain, soit dans les six mois précédant l’élection présidentielle.
M. André Gattolin. C’est parce que vous n’êtes pas pressés… (Sourires sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
M. Alain Anziani. Eh oui !
M. Roger Karoutchi. Ainsi, avec l’instauration de la règle que je soutiens, elle s’inscrirait dans les comptes de campagne.
Les primaires ne posent donc pas problème en tant que telles : il faut simplement que les formations politiques acceptent de les organiser au cours de la période de six mois.
La présente proposition de loi ne va pas affecter l’équilibre des campagnes présidentielles. Soyons francs, elle ne va pas très loin dans les remises en cause ou les évolutions qu’elle suggère.
Il est question des pouvoirs du Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA. La Haute Assemblée a débattu, il y a peu, des autorités administratives indépendantes… Reconnaissons qu’il est un peu surréaliste de confier au CSA la mission de contrôler des émissions de la campagne présidentielle. (Marques d’approbation sur les travées du groupe écologiste.) Je ne suis pas convaincu que cette situation soit la meilleure.
M. André Gattolin. Autant demander au CSA d’organiser les élections !
M. Roger Karoutchi. Cela étant, il faut composer avec les dispositions en vigueur.
Monsieur le rapporteur, en tout état de cause, nous vous soutiendrons et nous voterons ce texte qui, sans révolutionner le domaine auquel il s’applique, apporte des améliorations techniques et diverses précisions positives. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La discussion générale commune est close.
Nous passons à la discussion de la proposition de loi organique, dans le texte de la commission.
proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l'élection présidentielle
Chapitre Ier
Présentation des candidats à l’élection présidentielle
Articles additionnels avant l’article 1er
Mme la présidente. Les amendements nos 13, 14 et 15, présentés par M. Jean Louis Masson, ne sont pas soutenus.
Article 1er
Le I de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « généraux des départements, du conseil général de Mayotte » sont remplacés par les mots : « départementaux, du conseil de la métropole de Lyon », les mots : « du congrès et » sont supprimés, après le mot : « délégués », sont insérés les mots : « des communes déléguées et », après le mot : « arrondissements », sont insérés les mots : « de Paris, » et les mots : « ou membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger » sont remplacés par les mots : «, membres de l’Assemblée des Français de l’étranger ou vice-présidents des conseils consulaires » ;
b) À la deuxième phrase, après le mot : « délibérants », sont insérés les mots : « des métropoles, » ;
2° Le troisième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après la première occurrence du mot : « les », sont insérés les mots : « députés et les » et les mots : « et les membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger » sont remplacés par les mots : « , les membres de l’Assemblée des Français de l’étranger et les vice-présidents des conseils consulaires » ;
a bis) (nouveau) À la deuxième phrase, les mots : « le sénateur » sont remplacés par les mots : « les sénateurs » ;
b) À la quatrième phrase, après le mot : « délibérants », sont insérés les mots : « des métropoles, » ;
c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Aux mêmes fins, les conseillers métropolitains de Lyon sont réputés être les élus du département du Rhône. »
Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 43, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Supprimer les mots :
et les mots : « ou membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger » sont remplacés par les mots : « , membres de l’Assemblée des Français de l’étranger ou vice-présidents des conseils consulaires »
II. – Alinéa 6
Supprimer les mots :
et les mots : « et les membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger » sont remplacés par les mots : « , les membres de l’Assemblée des Français de l’étranger et les vice-présidents des conseils consulaires »
III. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
…° Aux deuxième et troisième alinéas, les mots : « membres élus de l’Assemblée des Français de l’étranger » sont remplacés par les mots : « membres de l’Assemblée des Français de l’étranger ».
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Estelle Grelier, secrétaire d'État. Cet amendement tend à revenir sur le pouvoir de parrainage d’un candidat à l’élection présidentielle accordé aux vice-présidents des conseils consulaires. Le Gouvernement s’appuie, à cette fin, sur un argument de droit : à nos yeux, les activités exercées ne sauraient relever des fonctions exécutives locales.
J’ajoute que, si les vice-présidents des conseils consulaires disposaient d’une telle compétence, il faudrait nécessairement envisager de l’attribuer aux adjoints au maire et aux vice-présidents d’établissements publics de coopération intercommunale, qui, aujourd’hui, n’en bénéficient pas.