M. Jacques Cornano. Il s'agit d'un amendement d'appel concernant la prochaine transposition dans notre droit de la directive 2014/89/UE du Parlement européen et du Conseil de l'Union européenne du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime et visant à l’établissement et à la mise en œuvre par les États membres de la planification de l’espace maritime, sous forme donc de plans.
Cette planification contribuera à une gestion efficace des activités maritimes et à l’utilisation durable des ressources marines et côtières, en créant un cadre décisionnel cohérent, transparent, durable et fondé sur des données probantes.
Elle permettra également d’atteindre notamment l’objectif du bon état écologique des eaux marines d’ici à 2020.
La directive devant être transposée par les États membres dans leur législation nationale au plus tard le 18 septembre 2016, cet amendement donne l'occasion au Gouvernement de nous préciser le contenu effectif de cette transposition.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. Je suis favorable à l’appel, mais pas à l’amendement ! (Sourires.)
Je comprends bien les préoccupations exprimées par notre collègue au sujet de la mise en œuvre de la gestion intégrée des zones côtières, opération juridiquement et conceptuellement complexe ; néanmoins, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Cornano, maintenant que l’appel a été entendu (Sourires.), l'amendement n° 396 est-il maintenu ?
M. Jacques Cornano. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 396 est retiré.
Article 51 ter A
(Non modifié)
Pour stopper la perte de biodiversité en outre-mer et préserver son rôle en faveur de l’adaptation des territoires au changement climatique, l’État se fixe comme objectifs, avec l’appui de ses établissements publics sous tutelle et en lien avec les collectivités territoriales concernées :
1° D’élaborer et de mettre en œuvre un programme d’actions territorialisé de protection de 55 000 hectares de mangroves d’ici à 2020 ;
2° D’élaborer, dans le cadre de l’initiative française pour les récifs coralliens et sur la base d’un bilan de l’état de santé des récifs coralliens et des écosystèmes associés réalisé tous les cinq ans, un plan d’action contribuant à protéger 75 % des récifs coralliens dans les outre-mer français d’ici à 2021.
M. le président. L'amendement n° 388 rectifié, présenté par MM. Patient, J. Gillot, S. Larcher, Karam et Cornano, Mme Claireaux et M. Desplan, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer le mot :
lien
par le mot :
concertation
La parole est à M. Jacques Cornano.
M. Jacques Cornano. Cet amendement a pour objet de préserver la cohérence des futures actions menées par l'État et de celles qu’ont déjà engagées les collectivités territoriales, ainsi que d’en accroître l'efficacité par l'implication des structures régionales existantes – réserves naturelles régionales, parcs naturels régionaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
Substituer le mot « concertation » au mot « lien » a du sens, et je sais Mme la ministre sensible à cette démarche de travail partagé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. L’article 51 ter A est très important, puisqu’il a trait aux programmes d’action pour la protection des mangroves et des récifs coralliens.
Ces deux sujets ont fait également l’objet de débats et de décisions au cours de la COP 21. La France a été à l’initiative d’un programme mondial de protection des mangroves à partir des actions qu’elle a engagées dans les outre-mer.
Je me suis récemment déplacée en Guadeloupe pour lancer un programme de reconquête de 50 000 hectares de mangroves précisément destiné à réparer les dégâts causés par le réchauffement climatique, les mangroves permettant d’amortir des vagues mesurant jusqu’à sept mètres de haut.
Comme on le voit, il existe dans la nature une diversité de solutions pour faire face à certains dégâts causés par le dérèglement climatique. C’est cela aussi, la biodiversité.
Cet article renforce l’action de l’État outre-mer dans la préservation des mangroves et des récifs coralliens, qui sont des écosystèmes très riches sur le plan de la biodiversité, mais aussi très sensibilisés et dégradés par le dérèglement climatique.
C’est donc une reconnaissance des services rendus par ces écosystèmes.
Cette base législative va nous permettre de lancer ou d’accélérer des actions dans ce domaine.
À cet égard, les entreprises françaises sont particulièrement en pointe dans ce qu’il est maintenant convenu d’appeler la « croissance bleue » et dans toutes les technologies liées au génie écologique.
Par conséquent, dans la perspective des programmes qui seront lancés de par le monde pour la réparation des écosystèmes gravement endommagés, c’est aussi une façon d’encourager les entreprises à continuer à se spécialiser, à créer, à innover et à se positionner dans ce domaine d’activité.
Cet engagement permettra de couvrir plus de la moitié des mangroves dans les outre-mer français, objectif national que nous nous sommes fixé. Il permettra aussi de monter en puissance sur la réalisation de la stratégie d’intervention foncière du Conservatoire du littoral.
La France s’est par ailleurs fixé un objectif de protection de 75 % des récifs coralliens d’ici à 2020. Nous avons une responsabilité particulière puisque notre espace maritime contient 10 % des récifs mondiaux. C’est un enjeu considérable. À terme, nous doublerons la surface des coraux couverts par les aires marines protégées dans les outre-mer français.
Cet objectif s’inscrit dans le cadre du plan d’action quinquennal de l’Initiative française pour les récifs coralliens, l’IFRECOR, qui débute cette année.
Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur l’amendement de M. Cornano.
M. le président. Je mets aux voix l'article 51 ter A, modifié.
(L'article 51 ter A est adopté.)
Article 51 ter
(Non modifié)
I. – Après l’article 1395 B du code général des impôts, il est inséré un article 1395 B bis ainsi rédigé :
« Art. 1395 B bis. – I. – Les propriétés non bâties classées dans les deuxième et sixième catégories définies à l’article 18 de l’instruction ministérielle du 31 décembre 1908 et situées dans les zones humides définies au 1° du I de l’article L. 211-1 du code de l’environnement sont exonérées de la taxe foncière sur les propriétés non bâties perçue au profit des communes et de leurs établissements publics de coopération intercommunale à concurrence de 50 % lorsqu’elles figurent sur une liste dressée par le maire sur proposition de la commission communale des impôts directs et qu’elles font l’objet d’un engagement de gestion pendant cinq ans portant notamment sur le non-retournement des parcelles et la préservation de l’avifaune, sans exclure la pratique de la chasse sous réserve que celle-ci soit associée à la préservation et à l’entretien des habitats.
« L’exonération est applicable pendant cinq ans à compter de l’année qui suit celle de la signature de l’engagement et est renouvelable. Elle ne concerne pas les propriétés non bâties exonérées en application des articles 1394 B et 1649 du présent code.
« La liste des parcelles bénéficiant de l’exonération ainsi que les modifications qui sont apportées à cette liste sont communiquées par le maire à l’administration des impôts avant le 1er septembre de l’année qui précède l’année d’imposition. Cette liste ainsi que les modifications qui y sont apportées sont affichées en mairie.
« Pour bénéficier de l’exonération, le propriétaire doit fournir au service des impôts, avant le 1er janvier de la première année au titre de laquelle l’exonération est applicable ou renouvelable, l’engagement souscrit pour les parcelles lui appartenant inscrites sur la liste dressée par le maire. Pour les parcelles données à bail en application des articles L. 411-1 et suivants du code rural et de la pêche maritime, l’engagement doit être cosigné par le preneur. Les modalités de cet engagement sont définies par décret en Conseil d’État.
« En cas d’inscription erronée sur la liste ou lorsque les conditions pour bénéficier de l’exonération ne sont pas respectées, les impositions en résultant sont établies au profit de l’État, dans les conditions prévues à l’article L. 173 du livre des procédures fiscales.
« II. – L’exonération des propriétés non bâties prévue au I est portée à 100 % pour les propriétés non bâties situées dans les zones naturelles relevant des articles L. 211-3, L. 322-1 à L. 322-14, L. 331-1 à L. 333-3, L. 341-1 à L. 342-1, L. 411-1 à L. 411-7 et L. 414-1 à L. 414-7 du code de l’environnement. L’engagement de gestion pendant cinq ans porte sur le non-retournement des parcelles en cause et sur le respect des chartes et documents de gestion ou d’objectifs approuvés au titre des réglementations visées précédemment.
« En cas de coexistence sur une même commune de parcelles pouvant bénéficier de l’exonération de 50 % et de l’exonération de 100 %, deux listes correspondant à chacune des exonérations applicables doivent être dressées par le maire sur proposition de la commission communale des impôts directs. »
II. – La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée par la majoration, à due concurrence, de la dotation globale de fonctionnement et corrélativement pour l’État par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 107 rectifié bis est présenté par MM. Vasselle, Baroin, Vaspart et Cardoux, Mme Garriaud-Maylam, MM. Mandelli, Cornu, B. Fournier, Charon, D. Laurent et Dufaut, Mme Cayeux, MM. Revet et Laménie, Mme Hummel, MM. Kennel, Chasseing et Masclet, Mme Lopez, MM. Raison, Houel, Commeinhes, Pinton, Dassault, G. Bailly et Lefèvre, Mmes Deromedi et Gruny et MM. Pointereau, Morisset et Husson.
L'amendement n° 163 rectifié est présenté par Mme Billon et M. Médevielle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Avant les mots :
Les propriétés non bâties
insérer les mots :
Sauf délibération contraire de la collectivité́ territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité́ propre, prise dans les conditions prévues au I de l'article 1639 A bis,
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour présenter l'amendement n° 107 rectifié bis.
M. Jean-Noël Cardoux. Cet amendement initié par M. Vasselle prévoit le rétablissement de l’exonération de taxe foncière sur les propriétés non bâties pour les terrains classés dans les deuxième et sixième catégories définies à l’article 18 de l’instruction ministérielle du 31 décembre 1908 et situées dans les zones humides telles qu’elles ont été définies dans le code de l’environnement.
Ce dispositif avait permis de réduire la taxe à concurrence de 50 % pour les terrains humides éligibles ou 100 % pour certains terrains spécifiques, mais cette exonération a été supprimée par l’article 26 de la loi de finances pour 2014.
Nous avons déjà voté un amendement en ce sens voilà quelques semaines. Le rétablissement de cette exonération serait une très bonne chose pour préserver les zones humides, qui sont en voie de disparition et dont la définition, je le précise au passage, pose quelques difficultés. Nous sommes en train de travailler sur ce sujet, madame la ministre, afin de vous soumettre des propositions qui permettraient d’éliminer toute contestation.
Je précise, enfin, que les collectivités territoriales concernées, telles que définies dans l’amendement, auraient la possibilité de s’opposer à cette exonération, ce qui est bien naturel, puisqu’il s’agit de leurs ressources.
M. le président. L’amendement n° 163 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 107 rectifié bis ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. L’article 51 ter, qui a été réintroduit par l’Assemblée nationale, rétablit l’exonération, pour les propriétés classées, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties situées en zones humides, que la loi de finances de 2014 avait supprimée.
L’amendement prévoit – c’est le cœur de notre débat – que les communes et les EPCI à fiscalité propre puissent se prononcer sur cette exonération et ne pas la maintenir le cas échéant. Pourtant, il ne serait pas optimal d’adopter un système de traitement des zones humides à géométrie variable en fonction des territoires.
Nous devons nous doter d’une politique nationale en la matière. Imaginons un territoire sur lequel une commune approuverait l’exonération, tandis que la commune voisine n’y serait pas favorable. Le désaccord entre les deux communes jouerait au détriment de la zone humide, dont on connaît pourtant l’importance pour l’avenir du climat. Or le but de cette mesure est bien de favoriser les zones humides.
Si le gage est levé, et donc l’amendement maintenu, l’adoption de celui-ci ne serait pas pour autant opportune. Dans ce cas, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, je souhaiterais présenter l’amendement n° 163 rectifié.
M. le président. C’est impossible, car cet amendement a été signé par Mme Billon et M. Médevielle et non par les membres du groupe de l’UDI-UC. Mais je peux vous donner la parole pour une explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Volontiers, monsieur le président.
M. le président. Vous avez donc la parole pour explication de vote, mon cher collègue.
M. Vincent Delahaye. L’amendement initial avait été signé par les membres du groupe de l’UDI-UC, mais cela n’a pas été repris dans la version rectifiée de l’amendement. C’est dommage, car j’aurais souhaité apporter quelques précisions sur cette question.
On fait, on défait, on refait. Certes, la loi de finances pour 2014 a supprimé cette exonération. En l’espèce, il est question de la rétablir. Je veux bien, mais il faudrait un peu de cohérence gouvernementale sur le sujet. Mme la ministre pourrait s’entendre avec son collègue secrétaire d’État au budget afin que l’on y voie clair.
Alors que l’article rétablit une exonération, l’amendement permet aux collectivités de décider ou non de la maintenir. Cette liberté laissée aux collectivités locales va plutôt dans le bon sens. Voilà pourquoi le groupe de l’UDI-UC y était favorable et que je maintiens cette position.
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux, pour explication de vote.
M. Jean-Noël Cardoux. J’ai écouté l’argumentation de M. le rapporteur après avoir défendu la position de M. Vasselle. Je ferai simplement remarquer à Jérôme Bignon que, en matière de choix laissé aux communes de pratiquer telle ou telle exonération, il y a des précédents. Je me souviens avoir fait voter par mon conseil municipal, à une certaine époque, l’exonération de la taxe professionnelle pour les cinémas. Les communes étaient libres de leur choix à cet égard. Je le dis pour l’anecdote, sans vouloir soulever le moindre problème sur le fond.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jérôme Bignon, rapporteur. Je comprends bien votre position, mon cher collègue.
Évidemment, l’exonération ne remet pas en cause le principe de liberté des communes. Toutefois, la rendre obligatoire nuirait à la cohérence de la politique de protection des zones humides, qui s’applique à ces zones dans leur ensemble. Un mitage dans la protection des zones humides n’aurait aucun sens. Ou alors, il ne faut pas faire cette politique !
Pour le cinéma et autres sujets, la problématique est différente, mais la question qui nous occupe requiert une cohérence, ce qui ne sera possible que s’il y a compensation. Je comprendrais que les communes s’y opposent si tel n’est pas le cas. (M. Vincent Delahaye s’exclame.) Le gage est prévu, mon cher collègue.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 107 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 323 rectifié bis est présenté par Mme Loisier, MM. Bonnecarrère, Trillard et Cigolotti, Mme Goy-Chavent et MM. Gabouty, Guerriau, Cabanel, Pierre, Cadic, Chasseing, L. Hervé, Pellevat, Savary, Gremillet et D. Dubois.
L'amendement n° 571 est présenté par M. de Nicolaÿ.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 2
Après le mot :
deuxième
insérer les mots :
, cinquième
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
… – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. André Trillard, pour présenter l’amendement n° 323 rectifié bis.
M. André Trillard. Il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 571 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 323 rectifié bis ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. Comme le dirait Mme Loisier, la forêt est un élément décisif du climat. Par conséquent, il faudrait aider les zones forestières au même titre que les zones humides, qui sont, elles aussi, des éléments décisifs de l’évolution et de la restauration du climat. Le problème réside dans la capacité de nos finances à supporter ces exonérations.
Si le Gouvernement est favorable à cette mesure, je n’y verrai pas d’inconvénient, mais, pour l’instant, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 323 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 51 ter.
(L'article 51 ter est adopté.)
Mise au point au sujet de votes
M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, hier, lors du scrutin n° 121, Chantal Jouanno a été comptabilisée comme votant contre, alors qu’elle ne souhaitait pas prendre part au vote. Quant au scrutin n° 122, notre collègue a été comptabilisée comme votant contre, alors qu’elle souhaitait voter pour.
M. le président. Mon cher collègue, acte vous est donné de cette mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Chapitre IV bis
Lutte contre la pollution
Article additionnel avant l'article 51 quater A
M. le président. L'amendement n° 295 rectifié, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Bigot, Poher, Madrelle, Guillaume, Bérit-Débat, Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Miquel et Roux, Mme Tocqueville, MM. Cabanel, Yung, Daunis et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Avant l’article 51 quater A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre VII du livre VII du code de justice administrative est complété par un chapitre X ainsi rédigé :
« CHAPITRE X
« L’action de groupe dans le domaine environnemental
« Art. L. 77-10-1. – Une association agréée ou une association régulièrement déclarée depuis cinq ans au moins, dont l’objet statutaire comporte la défense des victimes de dommages corporels ou une association de protection de l’environnement agréée en application des articles L. 141-3 et suivants du code de l’environnement, peut agir devant une juridiction civile ou administrative afin d’établir que plusieurs personnes, placées dans une situation similaire, ont subi des préjudices individuels résultant d’un dommage causé à l’environnement ayant une cause commune.
« L’action peut tendre à la cessation du manquement ou à la réparation des dommages corporels et matériels résultant du dommage causé à l’environnement. »
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. Le présent amendement vise à créer une action de groupe spécifique pour les dommages environnementaux. Cette proposition a déjà été formulée par le groupe socialiste et républicain à l’occasion de la discussion du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du XXIe siècle.
Cet amendement tend à mettre en place un dispositif juridique essentiel pour la défense des citoyens qui auront subi de manière sérielle et analogue un préjudice individuel à la suite d’une atteinte causée à l’environnement par une personne physique ou morale.
Je précise que seules les associations agréées et les associations régulièrement déclarées depuis cinq ans au moins, statutairement dédiées à la protection de l’environnement, pourront aller en justice en défense des victimes potentielles.
La porte est ainsi fermée aux dérives observées outre-Atlantique, où la procédure est parfois dévoyée par des cabinets d’avocats engageant des procédures pour leur seul profit privé.
La procédure proposée ne couvre pas non plus le préjudice environnemental pur, celui de l’atteinte à l’environnement en tant que bien commun, lequel doit être traité dans un autre cadre que celui de l’action de groupe.
Enfin, de telles actions de groupe ne pourront être engagées qu’à condition que le juge constate une infraction de la personne poursuivie à ses obligations légales ou contractuelles. Les actions engagées contre des personnes ayant respecté le droit et leurs engagements contractuels seront jugées irrecevables par la justice.
L’activité économique ne s’en trouvera donc pas fragilisée. Cela doit être souligné avec force pour ne pas laisser prospérer la crainte selon laquelle serait ouverte la voie à une prolifération de telles actions en justice.
Le bilan que nous pouvons désormais dresser de l’action de groupe en matière de consommation, plus d’un après son entrée en vigueur, nous confirme que les craintes qui avaient pu être exprimées en ce sens n’ont pas trouvé d’écho dans la réalité. En effet, le dispositif n’a été utilisé que six fois.
Toutes ces précisions, qui visent à dissiper les craintes, ne doivent pas pour autant nous empêcher de considérer l’important progrès social et environnemental qu’un tel dispositif représenterait.
Alors que le recours en justice pour faire respecter le droit de l’environnement est actuellement en voie de disparition, ainsi que le souligne le Conseil d’État dans un rapport publié en 2010, ce dispositif renforce notre État de droit au bénéfice des victimes des dommages illégalement causés à l’environnement, lesquelles peuvent aujourd’hui être dans l’incapacité d’agir en raison d’une situation d’isolement devant la justice.
Pour conclure, je dirai que, quelques semaines après la COP 21 et à l’occasion d’un débat sur un projet de loi de reconquête de la biodiversité, l’adoption de cet amendement enverrait un signal fort.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jérôme Bignon, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, non en raison de l’esprit général qui le sous-tend, mais parce que cette proposition soulève, en l’état, des problèmes juridiques complexes.
Sur l’intérêt à agir, vous proposez au travers de votre amendement de reprendre un système qui avait été mis en place pour la consommation afin d’éviter des recours abusifs. Or la situation est très différente entre des associations de consommateurs et les associations environnementales. Le monde associatif environnemental n’est pas encore aussi structuré, même s’il tend à le devenir. Le concept même de représentativité et de définition de critères ne fait pas l’unanimité parmi les différentes associations. Greenpeace, par exemple, refuse que lui soient appliqués des critères de représentativité.
Une réforme de l’agrément des associations environnementales a été engagée à la suite de la loi Grenelle 2, mais le décret du 12 juillet 2011 réformant la procédure d’agrément et de définition des critères de représentativité au sein des instances consultatives a suscité un grand nombre de débats, qui ne sont toujours pas tranchés aujourd’hui. Tant qu’aucune réponse ne sera apportée, il me paraît difficile d’envisager de confier à des œuvres socio-environnementales l’intérêt pour agir en matière d’action de groupe.
Pourtant, il existe d’autres pistes de réflexion. On pourrait ainsi confier cet intérêt à agir aux agences environnementales et sanitaires de l’État, ou encore aux collectivités territoriales.
Plusieurs sujets sont sur la table, mais la réflexion ne me paraît pas mûre.
La commission ne saurait, en l’état, émettre un avis favorable. Toutefois, je ne doute pas que Mme la ministre va nous donner des indications quant à l’état de la réflexion gouvernementale sur cette question importante dont je conçois qu’elle mérite d’être traitée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?