M. le président. L’amendement n° I-356 rectifié est retiré.
L’amendement n° I-357, présenté par Mme Lamure, MM. Retailleau, Allizard, G. Bailly, Bignon, Bizet, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Commeinhes, Cornu, Dallier et Danesi, Mme Debré, MM. de Nicolaÿ, Delattre, de Raincourt et del Picchia, Mmes Deroche, Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et Di Folco, M. P. Dominati, Mmes Duchêne, Duranton et Estrosi Sassone, MM. B. Fournier, J.P. Fournier et Frassa, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme Giudicelli, MM. Gournac, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Huré, Husson, Joyandet et Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel, D. Laurent, Lefèvre, Leleux et Lenoir, Mme Lopez, MM. Malhuret, Masclet, A. Marc, Mandelli et Mayet, Mmes M. Mercier et Micouleau, MM. Milon, Morisset, Mouiller, Nègre, Panunzi, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pillet, Pintat, Pointereau et Poniatowski, Mme Primas, MM. Raison, Reichardt, Revet, D. Robert, Savary, Savin et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle, Vogel, Dassault et Dufaut, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 2 du II de l’article 150-0 A du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Elle n’est pas non plus applicable lorsque les actions, parts ou droits cédés ne sont pas éligibles au plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire mentionné à l’article L. 221-32-1 du code monétaire et financier, que le produit de la cession est, dans un délai de trente jours, versé sur un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises et investis en titres mentionnés à l’article L. 221-32-2 du même code et que le contribuable s’engage à détenir ces titres de manière continue pour une durée minimale de cinq ans ; »
II. - Après la première phrase du second alinéa du II de l’article L. 221-32 du code monétaire et financier, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Des retraits ou des rachats de sommes ou de valeurs figurant sur le plan peuvent également être effectués au cours des huit années suivant l’ouverture du plan sans entraîner la clôture, lorsque les actions, parts ou droits cédés ne sont pas éligibles au plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire mentionné à l’article L. 221-32-1, que le produit de la cession est, dans un délai de trente jours, versé sur un plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises et investis en titres mentionnés à l’article L. 221-32-2 et que le cédant s’engage à détenir ces titres de manière continue pour une durée minimale de cinq ans. »
II. – Les I et II s’appliquent à compter du 15 décembre 2015.
III. - La perte de recettes résultant pour l’État des I, II et III est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. le président. L’amendement n° I-357 est retiré.
L’amendement n° I-27, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au dernier alinéa du 1 de l’article 150-0 D du code général des impôts, après les mots : « ne s’applique pas », sont insérés les mots : « aux moins-values ni ».
II. – Le I s'applique aux moins-values réalisées à compter du 1er janvier 2013.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à préciser le droit positif, car nous contestons la doctrine fiscale en vigueur. Le jour même où la commission des finances a adopté le présent amendement, le Conseil d’État a annulé ladite doctrine fiscale et a confirmé notre interprétation de la loi : l’abattement pour durée de détention s’applique aux gains nets, et non pas aux moins-values mobilières.
Compte tenu de cet arrêt du Conseil d’État, je vais retirer l’amendement, en espérant que l’administration fiscale ne reviendra pas à la charge en énonçant une nouvelle doctrine. Nous souhaiterions entendre les engagements de M. le secrétaire d’État sur ce point.
Il est regrettable, selon moi, qu’il faille attendre un arrêt du Conseil d’État pour pouvoir contraindre l’administration fiscale à appliquer la bonne doctrine. Ce problème, qui est évident, avait été soulevé à plusieurs reprises. C’est la raison pour laquelle nous avions déposé cet amendement : nous voulions réaffirmer ce que dit la loi.
Nous demandons à M. le secrétaire d’État de prendre des engagements en matière de stabilité fiscale, et en attendant nous retirons cet amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je tiens à être précis, car ce sujet, qui a d’ailleurs fait l’objet de discussions depuis de longs mois, est très important.
Le Conseil d’État ne dit pas la même chose que vous, monsieur le rapporteur général, au travers de votre amendement.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Si ! Il affirme que l’abattement pour durée de détention ne s’applique pas aux moins-values mobilières.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Non, ce n’est pas ce que dit le Conseil d’État. Nous avons examiné cette question délicate très attentivement.
Nous considérions auparavant que, par symétrie, l’abattement pour durée de détention devait s’appliquer de la même façon aux plus-values et aux moins-values. Un certain nombre de parlementaires le contestaient, notamment Gilles Carrez, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, qui a régulièrement déposé des amendements visant à supprimer cette disposition.
Le Conseil d’État n’a pas dit que l’abattement ne s’appliquait pas aux moins-values, mais qu’il convenait d'abord d’imputer les moins-values à des plus-values, puis de calculer l’abattement sur le solde. C’est complètement différent !
Un journal économique bien connu a consacré récemment un article à ce sujet : il a rendu compte de l’arrêt du Conseil d’État et donné des exemples. Si vous le lisez, vous vous rendrez compte que cet arrêt, je le répète, ne dit pas la même chose que votre amendement.
Nous évaluons actuellement le coût de la mesure préconisée par le Conseil d’État. Nous pensons qu’il est relativement faible, dans la mesure où le dispositif ne pourrait bénéficier qu’à ceux qui choisiraient d’imputer des moins-values sur des durées de détention très courtes de plus-values, ce qui serait un moyen d’optimisation.
L’adoption de votre amendement, en revanche, entraînerait un coût évalué entre 400 et 700 millions d’euros. Je vous remercie donc de l’avoir retiré, monsieur le rapporteur général. Je souhaitais cependant indiquer, pour la clarté de ce débat qui est suivi de près par les fiscalistes, quelle est notre lecture de l’arrêt du Conseil d’État.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous allons relire cet arrêt !
M. le président. L’amendement n° I-27 est retiré.
L’amendement n° I-26, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 5° ter de l'article 157 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les gains nets mentionnés au 1 du I de l’article 150-0 A résultant de la cession à titre onéreux de droits sociaux, valeurs, titres ou droits considérés au moment de leur cession comme des biens professionnels en vertu de l’article 885 O bis ; ».
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
IV. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le présent amendement vise à exonérer d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux les plus-values résultant de la cession de titres et droits considérés comme des biens professionnels.
Je suis conscient que cet amendement est lourd de conséquences, mais il s’agit là d’un véritable problème. Pour parler concrètement, certains des pays dont nous sommes limitrophes, comme le Luxembourg, la Suisse et la Belgique, ne taxent pas les plus-values mobilières.
Nous proposons, non pas d’aller aussi loin que ces pays,…
M. Richard Yung. Ah bon ?... (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … mais de ne pas taxer les plus-values mobilières issues de la cession de biens professionnels, au sens des dispositions fiscales relatives à l’impôt de solidarité sur la fortune.
Nous ne visons pas toutes les plus-values mobilières. Lorsqu’il s’agit de la gestion de portefeuilles de valeurs mobilières, il est normal qu’une taxation s’applique. En revanche, pour la cession d’une entreprise, nous préconisons une exonération. Cette mesure est destinée à éviter les exils fiscaux.
Comme l’a justement souligné Richard Yung hier, ce n’est pas l’impôt sur le revenu qui est à l’origine de l’exil fiscal. Ce n’est pas non plus la douceur du climat belge ou la beauté de l’architecture bruxelloise qui font que des contribuables s’installent à Uccle ou Ixelles ! (Sourires.) S’ils partent, c’est simplement parce que, à une heure vingt de Paris en Thalys, le régime fiscal des plus-values est beaucoup plus favorable. Voilà pourquoi les personnes qui souhaitent vendre une entreprise partent s’installer en Belgique.
Nous avons la conviction que ce dispositif n’entraînerait qu’une perte de recettes minime. Aujourd’hui, en effet, les plus-values résultant de la cession de biens professionnels d’entreprise sont relativement faibles, puisque les personnes concernées s’organisent : elles s’installent en Belgique ou en Suisse, par exemple, avant de vendre leur entreprise pour bénéficier de l’exonération.
Ce problème mérite d’être posé. Nous avons la conviction que les règles fiscales en vigueur ont pour résultat de faire partir des personnes, lesquelles sont de plus en plus jeunes. Lorsque des entrepreneurs âgés de 35 ou 40 ans cèdent aujourd’hui leur société, nous perdons des contribuables à l’impôt sur le revenu ou à l’ISF pour plusieurs années !
Nous avons donc tout intérêt à mettre en place un régime fiscal proche de celui de nos voisins. Cela fera revenir en France des contribuables qui paieront l’impôt sur le revenu, des impôts locaux et d’autres taxes. Quant à la perte de recettes induite par cette mesure, elle est à notre sens minime, puisque, je le répète, les plus-values importantes échappent, de fait, à l’impôt via les délocalisations.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Pour le coup, c’est bien une révolution que vous proposez ! (Sourires.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le Sénat est plus avancé qu’on ne le pense ! (Nouveaux sourires.)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En disant cela, j’ai quasiment tout dit…
Le régime d’imposition des plus-values des valeurs mobilières a été revu dans un sens particulièrement favorable. Certains ont même estimé, avant d’occuper le poste qui est le mien aujourd’hui, que c’était un régime trop favorable, au motif qu’il prévoit des abattements pour des durées de détention extrêmement courtes. On aboutit ainsi très rapidement à une exonération de 65 % pour le régime de droit commun et de 85 % pour le régime dit « spécifique », c’est-à-dire favorable. C’est massif !
De plus, puisque vous évoquez ce cas, a été ajouté un abattement spécifique pour le départ à la retraite qui, de mémoire, est de 500 000 euros, ce qui n’est pas rien. Les salariés qui partent en retraite avec une prime de départ de 500 000 euros ne sont pas si nombreux… Le régime est donc très favorable.
Vous affirmez que certains pays limitrophes ont des régimes plus favorables. C’est vrai ! Toutefois, l’alignement sur les régimes les plus favorables, ne serait-ce qu’en Europe – je ne parle même pas du monde – conduirait immanquablement à la faillite de la plupart des budgets des pays européens. On trouve, ici ou là, des régimes plus favorables, soit en matière d’impôt sur le revenu, soit pour les plus-values, soit pour l’ISF, soit pour les contributions indirectes.
Si nous décidions de nous aligner systématiquement sur les régimes les plus favorables qui existent dans les pays voisins, nous serions confrontés à un déficit d’une ampleur comparable à celui que vous nous avez laissé en 2012. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
L’adoption de cet amendement aurait un coût de plusieurs centaines de millions d’euros, et même plutôt – puisque celui-ci n’a pas été évalué avec précision – d’un milliard d’euros. Nous y sommes complètement opposés, monsieur le rapporteur général, et, si vous le mainteniez, je le soumettrais à la calculatrice qui fonctionne depuis le début de nos travaux !
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Nous ne voterons évidemment pas cet amendement, personne n’en sera surpris. Nous le rejetons non pas pour des raisons dogmatiques, mais parce que, en creux, cette proposition soulève la question de l’harmonisation fiscale en Europe.
Trois pays ont été cités : si je mets à part la Suisse, à qui il faut faire un sort particulier, restent le Luxembourg et la Belgique, pays que nous respectons et adorons, qui, avec les Pays-Bas, sont des fondateurs historiques de l’Union européenne.
On sait quelles sont les pratiques fiscales de ces deux États. On nous dit qu’il ne faut pas aller aussi loin qu’eux en matière d’exonération d’imposition. M. le rapporteur général nous a rassurés de ce point de vue : nous n’irons pas jusque-là. Toutefois, on voit bien qu’on réfléchit quand même à « tendre vers », c'est-à-dire à toujours aller vers moins d’imposition, à diminuer la pression, à harmoniser vers le bas, avec les conséquences que l’on sait, et, à cet égard, je partage le point de vue de M. le secrétaire d’État.
C’est donc la question de la concurrence fiscale au sein de l’Union européenne qui est posée. Vous savez aussi que la règle de l’unanimité s’applique en matière de modification fiscale.
Il est vrai qu’il y a de l’exil fiscal et que celui-ci concerne davantage Uccle que Molenbeek dans l’agglomération bruxelloise, pour des raisons que, malheureusement, on comprend. Néanmoins, il ne suffit pas de constater pour le déplorer cet état de fait et d’en prendre acte ; il faut engager véritablement, à notre échelle et avec nos partenaires européens, ce chantier de l’harmonisation fiscale vers le haut, qui ne pénalisera personne.
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. M. le rapporteur général a lui-même indiqué que son amendement avait une dimension d’interpellation, si ce n’est de provocation, mais je pense qu’il soulève un vrai sujet.
Bien évidemment, certains pays ont des fiscalités tellement basses que l’on ne pourra jamais s’aligner sur leurs positions. Le coût budgétaire serait dissuasif et, même sans se placer sur le plan moral, du seul point de vue de la justice fiscale, on n’aurait aucun intérêt à le faire.
Pour autant, nous devons voir le monde tel qu’il est. Aujourd’hui, la mobilité s’est accrue et le mouvement enclenché depuis fort longtemps a malheureusement été aggravé par un certain nombre de mesures fiscales dont nous parlons depuis hier. Le propos de M. Bocquet me paraît donc frappé au coin du bon sens.
Cela nous renvoie à la nécessité d’une harmonisation fiscale européenne. En dépit de son aspect « serpent de mer », le sujet devient inévitable. Faute de prendre en compte cette réalité, on continuera à voir se développer un certain nombre de mouvements produits par ceux qui ont les moyens financiers de s’offrir les conseils nécessaires. Et même si cette situation fait la fortune de bon nombre de spécialistes en la matière, je pense que M. le rapporteur général a raison de nous interpeller.
Il y a deux solutions : soit on va vers l’harmonisation fiscale, soit nous faisons, nous, un certain nombre de pas pour éviter que ce mouvement ne se poursuive. En tout état de cause, on ne peut pas en rester là.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. Je formulerai trois remarques.
Premièrement, le coût de cet amendement est d’un milliard d'euros, monsieur le rapporteur général. Pour ceux qui tiennent la chronique de ces débats, c’est un progrès ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Deuxièmement, nous nous retrouvons sur l’idée qu’il faut une harmonisation fiscale. Que ce soit en matière d’impôt sur les sociétés, de transactions financières ou de taxation des plus-values, cela fait partie de ces veaux d’or que nous adorons.
Mme Isabelle Debré. C’est clair !
M. Philippe Dallier. C’est un serpent de mer !
M. Richard Yung. Toutefois, nous n’avançons pas sur ces sujets. S’il doit y avoir harmonisation, ce qui pour l’instant n’est pas le cas, elle ne doit pas être calquée sur le statut fiscal de l’île de Man ; elle doit être raisonnable pour les finances publiques françaises.
Troisièmement, je ne vous suis pas sur cette position, monsieur le rapporteur général, puisque, il y a quatre ans si ma mémoire est bonne, M. Sarkozy nous avait longuement préparés à la loi sur l’exil fiscal. A alors été mis en place un système de taxation des plus-values patrimoniales d’entreprises pour ceux qui partent à l’étranger – car c’est odieux, c’est Coblence ! Voilà ce qu’il en était il y a quatre ans. Et aujourd'hui, vous voulez faire le contraire.
Nous n’y comprenons donc plus rien.
M. Francis Delattre. Vous ne faites pas d’effort…
M. Richard Yung. En tout cas, nous ne voterons pas cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’ai bien conscience des conséquences assez lourdes de cet amendement, dont les dispositions ont le mérite de poser le débat. Objectivement, il a un caractère d’appel. Plusieurs éléments nous interpellent.
Tout d'abord, les chiffres – le dernier rapport date de 2013, et vous nous avez reçus très aimablement avec Gilles Carrez l’été dernier, monsieur le secrétaire d’État, pour en discuter – montrent une progression importante du nombre de départs. On peut dire que les gens partent pour différentes raisons, mais lorsque l’on examine concrètement la valeur des titres qui sont attachés à ces départs, on constate une forte augmentation.
On ne peut pas nier que Bruxelles est à une heure vingt de Paris et que ce n’est pas exclusivement pour la beauté de l’architecture ou pour la qualité du climat que les personnes s’installent à Uccle ou à Ixelles. (Sourires.) La réalité, c’est que la France est limitrophe de trois pays qui appliquent des taux zéro. Faut-il pour autant s’aligner vers le bas ? Aujourd'hui, le principe de libre circulation s’applique en Europe, et l’exit tax ne permet pas, compte tenu de ses limites, de résoudre complètement la question.
M. le secrétaire d’État nous dit que le coût de cet amendement serait de plusieurs centaines de millions d’euros. Soit. Toutefois, quand la France perd des contribuables qui vont s’installer en Belgique, qui sont d'ailleurs de plus en plus jeunes et qui vivront encore cinquante ou soixante ans, elle perd les impôts qu’ils n’acquitteront pas.
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Certains reviennent pour se faire soigner !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. À cet égard, je rappelais hier les chiffres relatifs à la concentration de l’impôt. Ils ne paieront plus les impôts locaux. Ils ne consommeront plus en France – d’où une perte de recettes de TVA – et ne paieront plus d’ISF s’ils ont cédé leurs titres. Il y a là une perte récurrente de matière fiscale. Vaut-il mieux, à un moment donné, perdre le produit de la taxe sur la plus-value ou perdre de manière définitive des contribuables qui ne paieront plus tous ces impôts ?
C’est en ce sens que le débat mérite d’être posé. Néanmoins, je vais retirer cet amendement.
Mme Isabelle Debré. Non !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Libre à vous de le reprendre, madame Debré. En effet, il s'agit essentiellement d’un amendement d’appel, et son coût n’a pas été précisément chiffré. Toutefois, je le répète, nous ne pouvons pas nous exonérer de ce débat.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je signalerai tout d’abord qu’il y a aussi des retours. Une fois que les affaires sont faites, les personnes en question reviennent parfois, pour différentes raisons, peut-être à cause de l’architecture française, monsieur le rapporteur général ! (Sourires.)
Toutefois, il y a aussi le service de traitement des déclarations rectificatives. Ceux qui ont des patrimoines et des comptes bancaires à l’étranger sont aujourd'hui enclins à revenir, parce qu’ils savent qu’ils seront bientôt rattrapés par la patrouille fiscale. Aujourd’hui, ils le sont de façon ponctuelle, mais les contrôles seront bientôt systématiques. N’oublions pas que 2,5 milliards d'euros environ entrent ainsi chaque année dans les caisses !
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° I-26 est-il maintenu ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° I-26 est retiré.
L'amendement n° I-28, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 163 bis G du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 5 du II est abrogé ;
2° En conséquence, à la première phrase du troisième alinéa du II, la référence : « 5 » est remplacée par la référence : « 4 ».
II. – Le I s’applique à compter du 15 décembre 2015.
III. – La perte de recettes pour l’État résultant des I et II du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à étendre le dispositif des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise aux sociétés non cotées ou de petite capitalisation boursière de plus de quinze ans.
Aujourd'hui, ce dispositif existe. Toutefois, une condition d’âge est actuellement prévue qui ne semble absolument pas adaptée à la réalité du tissu entrepreneurial français. Par exemple, une entreprise ancienne de taille modeste qui a fait l’objet d’une reprise est, aujourd’hui, compte tenu du droit en vigueur, dans l’impossibilité d’attribuer ces bons de souscription, qui sont un élément important d’attraction.
L’adoption de cet amendement renforcerait l’attractivité de ce type d’entreprises et aurait un coût modeste pour les finances publiques, puisque celui-ci est estimé à quelques millions d’euros pour les exercices 2015 et 2016. Il serait utile, notamment, aux petites sociétés non cotées ou avec de faibles capitalisations de plus de quinze ans.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-28.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 70 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 189 |
Contre | 155 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2 quinquies.
L'amendement n° I-102 rectifié bis, présenté par MM. Delattre, Doligé, Joyandet, Morisset, Mouiller, D. Laurent, Portelli, Masclet et Charon, Mme Primas, M. Pellevat, Mme Duchêne et MM. P. Dominati, Chatillon, Mayet, Savary, Husson et Pierre, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Aux premier et second alinéas du 1 de l’article 200-0 A du code général des impôts, après la référence : « 199 undecies C », est insérée la référence : « , 199 terdecies-0 A ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Il s’agit de faire en sorte que nos petites entreprises puissent trouver des financements, notamment pour se doter de fonds propres.
Jusqu’en 2012, il était possible d’obtenir grâce au système dit « Madelin » une réduction d’impôt pouvant s’élever à 18 % du montant de l’investissement, ce qui permettait à un couple d’investir jusqu’à 100 000 euros. Lors du rabotage de l’ensemble des niches fiscales, le montant maximal de l’avantage fiscal est passé de 18 000 euros à 10 000 euros.
Le résultat ne s’est pas fait attendre : l’investissement ne reste incitatif fiscalement que jusqu’à 55 550 euros.
En fait de lisibilité et de continuité de l’action, nous avons assisté, en l’occurrence, à une rupture que nombre de PME déplorent, notamment les plus jeunes et les plus innovantes d’entre elles. Notre dispositif de crédit d’impôt recherche, ou CIR, est convenable, mais nombre de start-ups rencontrent néanmoins des difficultés à monter un financement pour s’installer en France, alors que c’est plus facile, par exemple, au Canada.
Je suis conscient que les dispositions de cet amendement posent problème au regard des règles applicables à l’ensemble des niches. Toutefois, leur adoption permettrait de retrouver une masse de crédits à même de soutenir les fonds propres de nos PME, dont l’insuffisance constitue aujourd'hui pour elles un vrai problème.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à placer la réduction d’impôt sur le revenu Madelin sous le plafonnement global des avantages fiscaux de 18 000 euros, plutôt que sous celui de 10 000 euros, comme c’est le cas actuellement.
Une partie de la préoccupation exprimée par Francis Delattre me semble d’ores et déjà satisfaite, puisque, en cas de dépassement du plafond, la réduction d’impôt est reportable sur les cinq années suivantes.
Quoi qu’il en soit, la commission sollicite le retrait de cet amendement, car le dispositif ISF-PME, voisin de l’IR-PME, sera entièrement refondu dans le prochain collectif, en raison notamment d’un problème d’incompatibilité avec le droit communautaire. Nous aurons donc à cette occasion un débat sur l’ensemble des dispositifs de soutien à l’investissement dans les PME, qu’ils soient assis sur l’IR ou sur l’ISF.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. On peut au moins saluer votre constance, monsieur Delattre : vous proposez systématiquement d’élargir les niches et de rehausser les plafonds ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Richard Yung. Tout à fait !