M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel.
Mme Françoise Gatel. Monsieur le président, madame la ministre, je veux à nouveau remercier très sincèrement M. le président de la commission et MM. les rapporteurs pour la qualité du travail réalisé.
Nous revenons de loin. Nous avons cheminé ensemble sur ce que j’ai appelé, tout à l'heure, un « chemin de crête », pour aboutir à un texte de fraternité, qui honore le Sénat, sécurise les équipes médicales, respecte les êtres humains que sont les patients, y compris en fin de vie.
Madame la ministre, permettez-moi, à l’issue de ce débat, qui aura été parfois difficile, de faire preuve d’un peu de légèreté : l’obstination quelque peu déraisonnable dont vous avez fait preuve en début d’après-midi m’a fait un peu peur – je vous demande de prendre cette remarque avec beaucoup d’humour !
Autant nous partageons le souhait d’accompagner la fin de vie de chacun et de soulager les souffrances, autant je ne suis pas sûre que nous pouvions et devions aujourd'hui donner satisfaction à ceux d’entre nous – dont je respecte les convictions, au demeurant – qui estiment que nous aurions dû cheminer vers un autre texte.
Pour ce qui me concerne, je me réjouis de la proposition de loi à laquelle nos travaux ont abouti – et que nous allons, je l’espère, voter – et je me félicite de la qualité et de l’intensité de nos débats.
M. le président. La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Nous avons eu des discussions passionnantes, sur un sujet aussi délicat que celui de la fin de vie.
J’avais annoncé en discussion générale que le groupe communiste, républicain et citoyen voterait ce texte s’il n’était pas dénaturé en séance. Ce soir, la majeure partie des dispositions qu’il nous semblait important de conserver demeurent : sédation profonde, soins palliatifs, etc. Le financement de ces derniers reste un point faible, mais peut-être y reviendrons-nous, dans quelques semaines, lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, et alors nous serons très vite fixés.
Si certains membres de mon groupe estiment que le texte ne va pas assez loin, les avancées introduites nous semblent intéressantes.
Je regrette, pour ma part, les imprécisions dont a fait part Georges Labazée à l’instant sur les directives anticipées. Le fait que des amendements qui avaient reçu un avis défavorable en commission reçoivent un avis favorable en séance m’a quelque peu mise en colère. J’ai le sentiment que l’on n’a pas respecté le travail accompli en commission sur la collégialité de la décision. Quoi qu’en disent les rapporteurs, il me semble que ce que nous avions fait sur les directives anticipées a été amoindri en séance publique.
Je vous avoue que je suis encore hésitante au moment de voter ce texte et d’engager mon groupe sur une proposition de loi au sujet de laquelle je l’ai assuré qu’elle comportait des avancées, notamment sur les directives anticipées. Il me semble que je ne pourrais tenir le même discours après ce qui vient de se passer.
J’entends néanmoins M. Amiel, M. Dériot et M. Pillet. Je veux bien faire confiance à nos trois rapporteurs, dans leur diversité politique, car ce sujet le mérite. C'est la raison pour laquelle le groupe CRC votera ce texte, qui ne constitue qu’une étape.
D’ici à la CMP, mon avis sera un peu plus affûté et je vous proposerai peut-être alors de revenir sur la question de la décision collégiale afférente aux directives anticipées en espérant, monsieur le rapporteur pour avis de la commission des lois, que nous puissions échanger un peu plus sereinement afin d’aboutir à la meilleure rédaction possible. (M. le rapporteur pour avis approuve)
M. le président. La parole est à Mme Corinne Bouchoux.
Mme Corinne Bouchoux. Nos débats ont été riches et se sont déroulés – je tenais à le souligner – dans un climat respectueux, serein, presque apaisé sur un sujet pourtant dramatique.
Je tiens à saluer le président de la commission des affaires sociales, nos deux rapporteurs, le rapporteur pour avis, M. Pillet, et le président de la commission des lois.
La position du groupe écologiste demeure inchangée : nous nous abstiendrons sur ce texte, l’une d’entre nous ne souhaitant pas s’engager dans cette direction, les autres estimant que cette proposition de loi ne va pas assez loin.
J’aimerais que nos travaux, à l’avenir, quand il est question de sujets aussi importants, aient la même tenue. Ne reproduisons pas les errements du passé qui ont conduit le Sénat à donner une image négative de lui-même.
Pour nous, le travail continue ; nous ne pouvons nous contenter de cette mouture du texte. Nous avons essayé d’œuvrer pour le bien commun. Je remercie encore toutes celles et tous ceux qui ont travaillé sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge.
M. Dominique de Legge. Une majorité des membres de mon groupe votera ce texte, certains d’entre nous s’abstiendront et quelques-uns voteront contre, ce qui montre la grande liberté de vote régnant au sein du groupe auquel j’ai l’honneur d’appartenir.
Cela témoigne aussi de la difficulté d’avancer sur un tel sujet : chacun a des convictions profondes qu’il est parfois difficile d’exprimer. S’il y a eu des maladresses, notamment de ma part, je vous prie de bien vouloir m’en excuser. Ce qui importe ici, c’est d’être en harmonie avec ses convictions et sa conscience.
Comme je l’ai dit ce matin, il était important pour nous qu’un texte du Sénat soit voté. Ce sera le cas dans quelques instants. Notre groupe souhaite que les avancées du Sénat, fruits d’une expression collective et d’apports personnels, soient prises en compte. C’est en fonction du texte auquel aboutira la CMP que chacun d’entre nous se déterminera sur son vote final.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Tout à fait !
M. Dominique de Legge. Je voudrais vous dire très franchement, madame la ministre, les inquiétudes qu’ont fait naître en moi votre première intervention, en début d’après-midi, et la manière avec laquelle vous avez défendu l’amendement du Gouvernement. Il semblait que votre objectif n’était pas tant d’écouter le Sénat que de revenir à la rédaction de l’Assemblée nationale, comme si elle était l’alpha et l’oméga.
Il est important que le dialogue s’ouvre maintenant entre nos deux assemblées. Je fais confiance au président de la commission des affaires sociales et à nos deux rapporteurs pour faire régner en commission mixte paritaire le même esprit qui a prévalu dans cet hémicycle, c’est-à-dire l’esprit de respect et de recherche d’un consensus, afin d’aboutir à un texte équilibré. (Mme Marie-Annick Duchêne applaudit.)
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Hervé Poher.
M. Hervé Poher. Le français est une langue merveilleuse qui permet bien des nuances. Ce n’est pas la même chose de dire « laissez-moi mourir dignement », « aidez-moi à mourir dignement » ou « faites-moi mourir dignement ».
Jusqu’à présent – je parle en tant que praticien –, les médecins n’avaient officiellement que le droit de laisser mourir dignement.
Une fois ce texte adopté, nous aurons le droit d’aider les gens à mourir dignement. Nous ne sommes pas allés jusqu’au « faites-moi mourir dignement », mais ce n’est pas grave : le texte que nous allons voter constitue déjà un progrès. Il faut sans doute encore laisser la société encore évoluer ; je suis sûr que d’ici à dix ou quinze ans, nous reparlerons de cette proposition de loi.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l'ensemble de la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les personnes malades en fin de vie.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires sociales.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 35 :
Nombre de votants | 335 |
Nombre de suffrages exprimés | 297 |
Pour l’adoption | 287 |
Contre | 10 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements.)
12
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 3 novembre 2015 :
À quinze heures :
Projet de loi organique relatif à l’indépendance et l’impartialité des magistrats et à l’ouverture de la magistrature sur la société (procédure accélérée) (n° 660, 2014-2015) et projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du xxie siècle (procédure accélérée) (n° 661, 2014-2015) ;
Rapport de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois (n° 119, 2015-2016) ;
Texte de la commission des lois (n° 120, 2015-2016) ;
Rapport de M. Yves Détraigne, fait au nom de la commission des lois (n° 121, 2015-2016) ;
Texte de la commission des lois (n° 122, 2015-2016).
À seize heures quarante-cinq : questions d’actualité au Gouvernement.
À dix-sept heures quarante-cinq, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi organique relatif à l’indépendance et l’impartialité des magistrats et à l’ouverture de la magistrature sur la société (procédure accélérée) (n° 660, 2014-2015) et du projet de loi portant application des mesures relatives à la justice du xxie siècle (procédure accélérée) (n° 661, 2014-2015) ;
Rapport de M. François Pillet, fait au nom de la commission des lois (n° 119, 2015-2016) ;
Texte de la commission des lois (n° 120, 2015-2016) ;
Rapport de M. Yves Détraigne, fait au nom de la commission des lois (n° 121, 2015-2016) ;
Texte de la commission des lois (n° 122, 2015-2016).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures dix.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART