M. Michel Mercier. C’est un bon point pour lui ! (Sourires.)

M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 137.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 138, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 16, seconde phrase

Supprimer les mots :

sans conclusions du rapporteur public,

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement vise à maintenir les conclusions du rapporteur public qui sont indispensables à une bonne justice, dès lors que la procédure se déroule avec un juge unique et que le contentieux est technique.

L’objectif est une nouvelle fois de garantir l’effectivité du droit au recours contre la décision de transfert vers un État membre de l’Union européenne désigné comme responsable du traitement de la demande d’asile.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que la juridiction statue après avoir entendu les conclusions du rapporteur public. Or, en cas de procédure d’urgence, lorsque la juridiction dispose de délais brefs pour statuer, il est d’usage de ne pas avoir ces conclusions. La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 138.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 139, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Remplacer les mots :

quarante-huit heures

par les mots :

sept jours

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. C’est un vrai feuilleton, monsieur le président ! (Sourires.)

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Mme Benbassa est une stakhanoviste !

Mme Esther Benbassa. Afin de rendre effectif le recours contre la décision de transfert vers un État membre de l’Union européenne désigné comme responsable du traitement de la demande d’asile, il convient de laisser au demandeur le temps de faire valoir ses droits. De ce point de vue, un délai de sept jours semble bien plus raisonnable que les quarante-huit heures initialement prévues.

M. le président. L'amendement n° 205, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Remplacer le mot :

quarante-huit

par le mot :

soixante-douze

La parole est à Mme Christine Prunaud.

Mme Christine Prunaud. Comme Esther Benbassa vient de l’indiquer, en cas de placement en rétention ou d’assignation à résidence, le délai de quarante-huit heures ne paraît pas suffisant pour permettre un droit au recours effectif. C’est pourquoi nous vous proposons de le faire passer à soixante-douze heures suivant la notification de la décision.

Par ailleurs, je profite de la présentation de cet amendement, mes chers collègues, pour vous faire part de la satisfaction que nous inspire la mise en place d’un recours suspensif contre les décisions de transfert, conformément aux normes européennes. Cependant, nous déplorons que ce recours doive être exercé dans un délai aussi court, encore restreint par la commission des lois, qui l’a fait passer de quinze à sept jours. Compte tenu de la technicité du contentieux en la matière et de la nécessité de faire valoir tant la situation personnelle des demandeurs que l’état des systèmes d’asile et d’accueil dans certains États membres, ce recours est, ainsi, rendu inopérant.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Il importe qu’une décision privative ou restrictive de liberté, contre laquelle le recours n’est pas suspensif, puisse être contestée le plus rapidement possible. Il convient donc de ne pas allonger les délais. Par conséquent, la commission est défavorable aux amendements nos 139 et 205.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 139.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 205.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 140, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 20, seconde phrase

Remplacer les mots :

soixante-douze heures

par les mots :

sept jours

La parole est à Mme Esther Benbassa. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)

Mme Esther Benbassa. Chers collègues, c’est notre rôle que de défendre des amendements !

Afin de permettre à la juridiction saisie d’un recours contre une décision de transfert vers un État membre de l’Union européenne désigné comme responsable du traitement de la demande d’asile de travailler sereinement, il convient de prévoir un délai raisonnable. À cet égard, un délai de sept jours semble bien plus raisonnable que les soixante-douze heures initialement prévues.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement, pour les raisons que je viens juste d’évoquer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 140.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 141, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Remplacer les mots :

sept jours

par les mots :

trente jours

et les mots :

quarante-huit heures

par les mots :

sept jours

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, je retire cet amendement, l’amendement n° 139 n’ayant pas été adopté.

M. le président. L'amendement n° 141 est retiré.

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l'article.

M. Jean-Yves Leconte. Il peut paraître paradoxal que, par nos votes sur les amendements déposés à l’article 13, nous ayons réaffirmé notre attachement au règlement Dublin III qui fonctionne, contrairement à ce l’on entend souvent dire. Cependant, nous estimons que, pour faire évoluer le système actuel, nous ne devons pas le détracter encore plus.

Bien évidemment, nous sommes tous d’accord pour reconnaître que des évolutions sont nécessaires. Toutefois, compte tenu de la demande d’asile dans l’ensemble de l’Union européenne, nous devons essayer de raccourcir les délais autant que faire se peut, car une situation d’engorgement généralisé ne serait pas tenable.

C'est la raison des votes que nous avons émis sur les différents amendements déposés à l’article 13, même si nous souscrivons à l’humanité qui caractérise nombre d’entre eux.

Il importe que la France soit dans la meilleure position possible pour négocier des évolutions des règlements, en particulier des règlements de Dublin. La qualité des droits accordés aux demandeurs d’asile en dépend !

M. le président. Je mets aux voix l'article 13.

(L'article 13 est adopté.)

Article 13
Dossier législatif : projet de loi relatif à la réforme du droit d'asile
Article 14 (interruption de la discussion)

Article 14

I. – Le titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« CHAPITRE III

« Droit au maintien sur le territoire français

« Art. L. 743-1. – L’étranger dont l’examen de la demande d’asile relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu’à la notification de la décision de l’office ou, si un recours a été formé, jusqu’à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d’asile. L’attestation délivrée en application de l’article L. 741-1, dès lors que la demande d’asile a été introduite auprès de l’office, est renouvelable jusqu’à ce que l’office et, le cas échéant, la cour statue.

« Art. L. 743-1-1. – (Supprimé)

« Art. L. 743-1-2. – (Supprimé)

« Art. L. 743-2. – Par dérogation à l’article L. 743-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l’attestation de demande d’asile peut être retirée ou son renouvellement refusé lorsque :

« 1° L’Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris une décision d’irrecevabilité en application du 1° ou du 2° de l’article L. 723-10 ;

« 1° bis (nouveau) Le demandeur a informé l’office du retrait de sa demande d’asile en application de l’article L. 723-11 ;

« 2° L’office a pris une décision de clôture en application de l’article L. 723-11-1. L’étranger qui obtient la réouverture de son dossier en application de l’article L. 723-12 bénéficie à nouveau du droit de se maintenir sur le territoire français ;

« 3° L’étranger n’a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l’objet par l’office d’une décision d’irrecevabilité en application du 3° de l’article L. 723-10, qu’en vue de faire échec à une mesure d’éloignement ;

« 4° L’étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d’une première demande de réexamen ;

« 5° L’étranger fait l’objet d’une décision définitive d’extradition vers un État autre que son pays d’origine ou d’une décision de remise sur le fondement d’un mandat d’arrêt européen ou d’une demande de remise par une cour pénale internationale.

« Dans les cas prévus aux 3° et 4°, l’office apprécie qu’une mesure d’éloignement n’entraînera pas de refoulement direct ou indirect en violation des obligations internationales et européennes de la France.

« Les conditions de renouvellement et de retrait de l’attestation de demande d’asile sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Art. L. 743-3. – (Supprimé)

« Art. L. 743-3-1 (nouveau). – Sauf circonstance particulière, la décision définitive de rejet prononcée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, le cas échéant après que la Cour nationale du droit d’asile a statué, vaut obligation de quitter le territoire français. À ce titre, elle peut faire l’objet d’une contestation devant la juridiction administrative de droit commun.

« Art. L. 743-4. – L’étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l’article L. 743-2 ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre et doit quitter le territoire français, sous peine de faire l’objet d’une mesure d’éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI.

« Art. L. 743-5. – Sans préjudice des articles L. 556-1 et L. 743-2, lorsque l’étranger sollicitant l’enregistrement d’une demande d’asile a fait l’objet, préalablement à la présentation de sa demande, d’une mesure d’éloignement prise en application du livre V, celle-ci, qui n’est pas abrogée par la délivrance de l’attestation prévue à l’article L. 741-1, ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de l’office, lorsqu’il s’agit d’une décision de rejet, d’irrecevabilité ou de clôture, ou, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d’asile contre une décision de rejet, avant la notification de la décision de la cour. »

II. – L’article L. 311-5 du même code est ainsi modifié :

1° Les mots : « d’un récépissé de demande d’asile » sont remplacés par les mots : « d’une attestation mentionnée aux articles L. 741-1, L. 742-1 ou L. 743-1 » ;

2° Sont ajoutés les mots : « ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire en application du livre VII ».

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 161, présenté par Mmes Bouchoux, Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 3

Remplacer le mot :

maintien

par les mots :

séjour provisoire

II. – Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

de se maintenir

par les mots :

au séjour provisoire

III. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

de se maintenir

par les mots :

au séjour provisoire

La parole est à Mme Corinne Bouchoux.

Mme Corinne Bouchoux. Tout d’abord, je veux remercier Esther Benbassa de défendre ces amendements, auxquels nous tenons énormément.

Le projet de loi prévoit que le demandeur d’asile, quel que soit le type de procédure qui lui est appliqué, a droit au maintien sur le territoire le temps de la procédure de détermination de l’État responsable de l’examen de la demande d’asile.

Les auteurs de cet amendement considèrent qu’une autorisation provisoire de séjour lui garantirait une meilleure stabilité sur le territoire français et un accès plus facile aux droits sociaux et permettrait un alignement avec la notion de « droit au séjour » telle que pensée en France pendant très longtemps.

M. le président. L'amendement n° 206, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 4, première phrase

1° Remplacer les mots :

L’étranger

par les mots :

Le demandeur d’asile

2° Après les mots :

sur le territoire français

rédiger ainsi la fin de cet alinéa :

et vaut autorisation provisoire de séjour. Ce document, dès lors que la demande a été introduite auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, est renouvelable jusqu’à ce que l’office statue et, si un recours est formé devant la Cour nationale du droit d’asile, jusqu’à ce que la Cour statue. Cette attestation autorise à travailler selon les dispositions de l’article L. 5221-5 du code du travail.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Pour l’accès au marché du travail des étrangers, les dispositions réglementaires actuelles prévoient, d’une part, un délai et, d’autre part, une autorisation préalable.

Le présent amendement a pour objet de prévoir la possibilité, pour un demandeur d’asile, d’exercer une activité salariée pendant l’examen de sa demande et de supprimer l’autorisation préalable.

L’une des causes fondamentales des crises successives du dispositif d’asile est la quarantaine sociale dans laquelle vivent les demandeurs d’asile, qui ne sont pas automatiquement autorisés à travailler et ne peuvent donc subvenir par eux-mêmes à leurs besoins. Cette situation est hypocrite, car, nous le savons bien, pour survivre, certains demandeurs d’asile sont contraints de travailler au noir.

Le dispositif que nous proposons permettrait non seulement aux demandeurs d’asile de subvenir à leurs besoins, mais aussi aux personnes hébergées en centre d’accueil de demandeurs d’asile, ou CADA, de gagner en autonomie et de sortir dignement de ces hébergements d’accueil en attendant la décision définitive sur leur demande d’asile.

L’insertion des bénéficiaires de la protection subsidiaire sera ainsi facilitée et accélérée. À défaut d’obtenir immédiatement un emploi stable, les demandeurs pourraient bénéficier de formations professionnelles.

Par ailleurs, l’attente d’une décision de l’OFPRA ou de la CNDA serait vécue plus sereinement.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons déposé cet amendement.

M. le président. L'amendement n° 237, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Cette attestation vaut autorisation provisoire de séjour.

La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Cet amendement vise à préciser que l’attestation de demande d’asile, remise au demandeur dont l’examen de la demande relève de la compétence de la France, vaut autorisation provisoire de séjour.

La substitution au régime actuel de l’admission provisoire au séjour de celui du droit au maintien a suscité des interrogations lors de la discussion du présent texte en première lecture par l’Assemblée nationale. Je comprends, au vu de plusieurs des amendements déposés au Sénat, que ces craintes ne sont pas toutes dissipées.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d’abord vous rassurer sur le sens de la réforme que le Gouvernement propose : il ne s’agit en aucun cas, à travers le droit au maintien, de réduire les droits des demandeurs d’asile, notamment de les priver du droit de rester en France le temps de l’examen de leur demande, garantie absolument essentielle du droit d’asile.

Au contraire, le droit au maintien, c’est plus de droits pour les demandeurs d’asile, et pour tous les demandeurs d’asile. Hier, l’admission provisoire au séjour ne bénéficiait qu’à ceux dont la demande était examinée en procédure normale ; demain, le droit au maintien sera reconnu à tous, même en procédure accélérée et en cas de recours contre une décision de rejet de l’OFPRA, et ce jusqu’à ce que la CNDA statue.

En outre, le droit au maintien et l’attestation de demande d’asile qui en sera la concrétisation ouvriront les mêmes droits que ceux qui sont actuellement ouverts par l’autorisation provisoire de séjour.

Je veux ensuite souligner qu’un équilibre raisonnable a été trouvé à l’Assemblée nationale : le Gouvernement avait accepté de prévoir que l’attestation remise au demandeur d’asile valait autorisation provisoire de séjour et l’Assemblée nationale, de son côté, avait adopté un amendement du Gouvernement visant à expliciter, dans un souci d’efficacité et de prévention des détournements de procédure, que le dépôt d’une demande d’asile et la délivrance d’une attestation d’asile n’emporteraient pas l’abrogation des éventuelles obligations de quitter le territoire français précédemment notifiées.

Cet équilibre a été rompu par la commission des lois du Sénat qui a supprimé la mention selon laquelle l’attestation de demande d’asile vaut autorisation provisoire de séjour. Le Gouvernement, je le dis très solennellement, regrette ce choix.

Parce que l’équilibre trouvé à l’Assemblée nationale permettait d’apaiser des craintes, le Gouvernement avait indiqué qu’il y était favorable. Par ailleurs, la rédaction retenue permettait d’être plus explicite sur le contenu du droit au maintien et la nature précise de l’attestation.

C'est la raison pour laquelle le Gouvernement vous propose, mesdames, messieurs les sénateurs, de rétablir l’équilibre du texte qui vous a été initialement soumis en adoptant le présent amendement, lequel vise à rendre le dispositif plus opérationnel et à lever tous les doutes qui pourraient surgir lors de sa mise en application.

M. le président. L'amendement n° 142, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéas 7 à 15

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. L’article L. 743-2 qu’il est proposé d’introduire dans le CESEDA prévoit de nombreuses possibilités pour l’administration de retirer à un demandeur d’asile son droit au séjour. La conséquence pratique et directe d’un tel retrait est d’exposer le demandeur à un risque de notification d’une mesure d’éloignement. Dès lors, on ne peut plus parler de recours suspensif contre la décision de rejet de la demande d’asile.

Une nouvelle fois, le maintien de cette disposition dans le CESEDA, selon un spectre vague et peu défini qui risque de toucher un grand nombre de demandeurs d’asile, vide en pratique l’engagement de la France de garantir à tous un droit au recours suspensif et expose notre pays à de nouvelles condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg pour violation de l’article 13 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 161, qui vise à remplacer la notion de maintien sur le territoire par celle de droit au séjour provisoire. Il convient de le répéter, la notion de droit au maintien sur le territoire est issue de la directive Procédures, laquelle précise que « ce droit de rester dans l’État membre ne constitue pas un droit à un titre de séjour ». Les mots employés sont donc essentiels pour éviter toute confusion – je ne reviens pas sur les déclarations de la secrétaire d’État chargée des droits des femmes à l’Assemblée nationale.

La commission est également défavorable à l’amendement n° 206, dont les dispositions reviennent sur la notion d’autorisation provisoire de séjour déjà évoquée à l’article 12. Cet amendement tend surtout à ce que l’attestation de demande d’asile vaille autorisation immédiate de travail, alors que la directive Accueil ne prévoit cet accès au marché du travail qu’au bout de neuf mois, comme nous le verrons à l’article 15.

La commission émet de même un avis défavorable sur l’amendement du Gouvernement n° 237. Nous avons déjà évoqué cette question lors de l’examen de l’article 12.

L’amendement n° 142, quant à lui, vise à supprimer la faculté ouverte aux autorités de mettre fin au droit au maintien sur le territoire et de retirer, ou de ne pas renouveler, une attestation de demande d’asile. Ces dispositions étant absolument nécessaires à l’équilibre général du texte et conformes à la directive Procédures, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 161, 206 et 142 ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Le Gouvernement demande aux auteurs de ces amendements de bien vouloir les retirer au profit de son amendement n° 237, plus équilibré et visant à rétablir la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale ; à défaut, il émettra un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Le groupe socialiste votera en faveur de l’amendement du Gouvernement tendant à rétablir la version du texte adoptée par l’Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je ne voterai pas ces amendements et défendrai dans quelques instants, au nom de la commission des finances, l’amendement n° 163 portant sur l’article 15.

Il faut tout de même savoir ce que l’on veut ! Je comprends très bien que l’on pense, à l’instar de Mme Assassi, qu’ouvrir le marché du travail est préférable au développement du travail au noir.

Je rappelle toutefois que nous examinons un projet de loi visant à réduire les délais d’examen des demandes d’asile pour qu’il soit plus facile et cohérent de raccompagner aux frontières ceux dont la demande n’aboutirait pas. Or, si vous mettez en place un système permettant au demandeur d’asile de s’intégrer dans la société et d’accéder au marché du travail avant que l’on ait pu statuer sur son cas, le raccompagner à la frontière au bout de six mois équivaudrait à une double peine ! Cela n’aurait aucun sens !

Il est certain que nous devons réduire les délais d’examen des demandes et faire en sorte de mieux intégrer et sur le marché du travail et dans la société française ceux qui obtiennent le droit d’asile. Pour autant, on ne peut permettre aux 65 000 demandeurs d’asile d’accéder immédiatement au marché du travail. Ce serait là un appel d’air invraisemblable. Vous êtes le premier à reconnaître, monsieur le ministre, que les trois quarts de ces demandeurs sont issus de filières d’immigration économique non officielles. Et pour cause, seuls 14 000 à 15 000 d’entre eux voient leur demande aboutir chaque année. Permettre à tous les demandeurs d’intégrer notre marché du travail dès leur arrivée, c’est envoyer un très mauvais signal aux réseaux de passeurs.

Si l’on veut réduire les délais d’examen des demandes d’asile et intégrer mieux qu’on ne le fait aujourd’hui les titulaires du droit d’asile, il serait incohérent de permettre à tous ceux qui sont passés par une filière d’immigration économique détournée d’accéder au marché du travail. Quel message voulons-nous envoyer ?

Je comprends les propos de Mme Assassi. Ce n’est évidemment pas avec l’allocation versée que les demandeurs d’asile peuvent aujourd’hui s’en sortir. Nous sommes face à la quadrature du cercle : comme nous n’avons pas les moyens d’accueillir les 65 000 demandeurs d’asile de manière convenable, nous leur proposons d’accéder immédiatement au marché du travail afin d’éviter le travail au noir, alors même que nous savons que les trois quarts d’entre eux viennent de filières d’immigration économique détournée, clandestine.

Le message que nous enverrions serait inaudible. Je suis totalement hostile à l’ouverture du marché du travail à tous les demandeurs d’asile dès leur arrivée sur le territoire. Cela reviendrait à noyer sous le nombre les vrais demandeurs d’asile qui sont finalement très mal traités.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Il s’agit d’une très belle démonstration, monsieur Karoutchi, mais qui n’a rien à voir avec l’amendement gouvernemental.

M. Roger Karoutchi. Mon explication de vote portait sur l’amendement de Mme Assassi !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. C’est une belle déclaration politique qui n’a, encore une fois, aucun rapport avec l’amendement que j’ai présenté, lequel vise à définir les conditions du maintien au séjour. Je suis totalement opposé à ce que les demandeurs d’asile aient accès au marché du travail aussitôt après que leur demande a été adressée.

M. Roger Karoutchi. Vous vous opposez donc à l’amendement de Mme Assassi !

M. Bernard Cazeneuve, ministre. Je me suis exprimé clairement sur ce sujet, au nom du Gouvernement, à l’Assemblée nationale. Un compromis a été trouvé avec les députés. Le seul amendement qui a été accepté par le Gouvernement est un amendement d’équilibre, tendant à prévoir la possibilité du droit au travail au bout de neuf mois.

Cela étant, une sénatrice de votre groupe, Mme Garriaud-Maylam, a déposé un amendement visant à faire exactement ce dont vous ne voulez pas. Je vous invite donc à refaire cette excellente démonstration, par laquelle vous témoignez d’une prévention que je partage, lors de l’examen de cet amendement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.M. Alain Bertrand applaudit également.)

M. Roger Karoutchi. L’amendement du Gouvernement n’était pas le seul en discussion, monsieur le ministre. Je faisais référence à celui qu’a présenté Mme Assassi !