Mme la présidente. L'amendement n° 64, présenté par M. Leconte, Mme Tasca, M. Sueur, Mme Jourda et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 47, seconde phrase

Compléter cette phrase par les mots :

et par laquelle il peut se faire comprendre

La parole est à M. Jean-Yves Leconte.

M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement procède du même esprit que les amendements défendus par Esther Benbassa et Cécile Cukierman.

Le projet de loi prévoit que le demandeur est entendu dans la langue de son choix, sauf s'il existe une langue de substitution dont il a une connaissance suffisante. Or le principe de l'entretien est de permettre un échange entre le demandeur et l'agent de l'Office. Il ne suffit donc pas que le demandeur comprenne : il faut aussi qu’il puisse se faire comprendre. Mieux vaut l’écrire que le sous-entendre. L’ajout que nous proposons se justifie d’autant plus que l'article 7 précise que le demandeur doit répondre personnellement aux questions qui lui sont posées.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 114 et 181, car le remplacement de la notion de connaissance suffisante de la langue par celle de maîtrise courante de la langue conduirait à restreindre le champ de la langue de substitution.

J’ajoute que l’OFPRA s’efforce toujours, dans un premier temps, de satisfaire les demandes d’interprétariat dans la langue choisie par le demandeur.

L’amendement n° 64 vise à préciser que le demandeur doit être capable non seulement de comprendre la langue dans laquelle se déroule l’entretien, mais également de se faire comprendre dans cette langue. Il me semble que l’expression « langue dont il a une connaissance suffisante » recouvre bien ces deux aspects. La commission émet donc un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, son avis sera défavorable. Je souscris aux arguments du rapporteur sur les amendements identiques nos 114 et 181. S'agissant de l’amendement n° 64, nous considérons qu’il est satisfait par la rédaction actuelle du texte, même si nous estimons que celle qui était initialement proposée par le Gouvernement était meilleure.

Mme la présidente. Madame Benbassa, l'amendement n° 114 est-il maintenu ?

Mme Esther Benbassa. Oui, madame la présidente.

Je ne comprends pas les arguments qui ont été opposés à ma proposition !

Avoir une connaissance suffisante d’une langue, ce n’est pas la même chose que la maîtriser couramment. Le récit d’une vie ne se fait pas avec cinq cents mots. Je suis très étonnée de cette méconnaissance de ce qu’est une vie d’exilé.

À l’OFPRA, j’ai assisté à un entretien avec un demandeur d’asile s’exprimant dans une langue que je maîtrise. J’ai été surprise de constater qu’on recourait, pour faire office d’interprète, à des personnes dont l’interprétariat n’est pas le métier. Elles traduisent à la va-vite, et de manière tout à fait erronée. J’ai été frappée par le décalage entre le discours du demandeur et sa traduction.

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. C’est presque surréaliste ! Nous pourrions reconnaître, à gauche comme à droite, que l’OFPRA fait beaucoup d’efforts. Ses malheureux agents travaillent parfois dans des conditions très difficiles, car ils ne sont pas assez nombreux. Or on est train de dire qu’ils accomplissent leur mission n’importe comment, qu’ils bâclent leur travail.

Mme Esther Benbassa. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Roger Karoutchi. Peut-être y a-t-il des cas d’interprétariat ponctuellement insuffisant, mais il ne s’agit pas d’une généralité : vous l’avez constaté avec une personne, madame Benbassa.

Mes chers collègues, je vous mets en garde contre le risque suivant : plus la loi imposera des contraintes de ce genre, plus on ouvrira les possibilités de recours. En effet, les demandeurs argueront systématiquement que l’interprète n’était pas suffisamment calé dans telle langue, qu’ils n’ont pas pu s’exprimer dans leur langue maternelle, qu’ils ont dû s’exprimer dans une langue de substitution qu’ils ne maîtrisaient pas véritablement, et c’est ce qui justifiera leur recours.

Pour que le droit d’asile ait du sens, il nous faut trouver le meilleur équilibre, c’est-à-dire faire en sorte que les gens qui en ont réellement besoin puissent s’exprimer, être écoutés, entendus, sans ajouter trop de contraintes. Sinon, le système, qui est déjà au bord de l’explosion, va réellement exploser, et ce sera un drame pour tous.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

M. Jean-Yves Leconte. Cher collègue Karoutchi, à vous qui êtes un parlementaire très averti je me permets de rappeler que le débat parlementaire sert aussi à préciser un certain nombre de choses.

C’est la raison pour laquelle, sur certains sujets, il vaut mieux exposer les problèmes, débattre, questionner, plutôt qu’égrener rapidement les dispositions sans s’assurer qu’elles sont bien comprises dans tous leurs aspects.

Poser le problème de la langue dans laquelle se déroule l’entretien ne constitue en aucun cas une remise en cause du fonctionnement de l’OFPRA. Du reste, beaucoup d’entre nous ont pu assister à des entretiens, ce qui nous a permis de nous rendre compte des conditions de travail des officiers de protection. Ceux-ci écoutent, prennent des notes en même temps et sont donc effectivement soumis à des contraintes importantes.

Il n’empêche que nous, auteurs des trois amendements en discussion, sommes parfaitement fondés à soulever cette question. En effet, une chose est de comprendre une langue, une autre est de pouvoir s’exprimer dans cette même langue.

Je comprends que l’on ne souhaite pas mettre une contrainte de plus dans la loi, et je vais donc retirer mon amendement, mais je crois que nous n’aurions pas été à la hauteur si nous n’avions pas attiré l’attention sur cette question lors de ce débat.

Mme la présidente. L’amendement n° 64 est retiré.

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote, sur les amendements identiques nos 114 et 181.

Mme Cécile Cukierman. L’objectif n’est pas d’ajouter des contraintes ou de dénigrer un système existant. Cependant, force est de constater qu’il y a des dysfonctionnements. Il s’agit donc, pour les parlementaires que nous sommes, d’améliorer le dispositif en pointant les difficultés rencontrées par les personnels.

C’est une chose de bien connaître une langue, d’être capable de traduire un texte écrit, mais c’est autre chose d’être interprète – c’est d’ailleurs une profession spécifique –, a fortiori lorsqu’il s’agit de traduire des échanges impliquant des personnes en difficulté comme le sont les demandeurs d’asile. Bien sûr, il n’est pas question de faire entrer l’affect ou le sentiment dans l’appréciation du dossier, mais il importe que l’interprète puisse traduire de la manière la plus juste un récit souvent chargé en émotion, en se gardant de tout excès dans un sens ou dans l’autre.

Monsieur Karoutchi, je ne pense pas qu’insister pour que l’entretien ait lieu dans la langue maîtrisée, la langue parlée, la langue vécue – une langue se vit aussi ! – par le demandeur d’asile soit de nature à augmenter le nombre de recours et donc à accroître les difficultés. Au contraire, nous nous efforçons de trouver des solutions pour qu’il ne puisse pas y avoir de remise en cause de la traduction des dires du demandeur d’asile.

Nous ne sommes peut-être pas d’accord sur les modalités, mais vous ne pouvez pas nous reprocher de vouloir alourdir les procédures et de dénigrer l’OFPRA. Le contentieux existe déjà, et la protection des demandeurs d’asile passe aussi par la garantie de leurs droits. C’est ce qui fait la noblesse de la République française, et nous entendons préserver cette tradition d’accueil.

Mme Esther Benbassa. Madame la présidente, puis-je reprendre la parole ? Je ne peux pas laisser dire que j’ai critiqué le travail de l’OFPRA !

Mme la présidente. Madame Benbassa, vous ne pouvez reprendre la parole que pour retirer votre amendement, car vous avez déjà expliqué votre vote.

Je mets aux voix les amendements identiques nos 114 et 181.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 29 rectifié bis est présenté par Mme Létard, M. Guerriau, Mme Loisier, MM. Bonnecarrère, Delahaye, Médevielle, Longeot, L. Hervé et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.

L'amendement n° 229 est présenté par le Gouvernement.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 48

Après le mot :

asile,

insérer les mots :

notamment ceux liés à des violences à caractère sexuel,

La parole est à Mme Valérie Létard, pour présenter l’amendement n° 29 rectifié bis.

Mme Valérie Létard. Cet alinéa, introduit à l’Assemblée nationale, vise à faciliter, dans la mesure du possible, un entretien avec un agent de l’Office et un interprète du même sexe que le demandeur. Pour l’Assemblée nationale, il s’agissait notamment de lui permettre de surmonter les difficultés à exposer devant des tiers le récit de violences à caractère sexuel.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, la majorité des femmes qui demandent la protection de notre pays tentent d’échapper à des persécutions de ce type.

Dans ces conditions, la précision qui figurait dans la rédaction de l’Assemblée nationale ne paraissait pas superfétatoire. Au contraire, elle répondait à une problématique très concrète. C’est pourquoi nous proposons de la rétablir.

Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État, pour présenter l’amendement n° 229.

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Il s’agit également pour le Gouvernement de rétablir une précision qui lui paraît utile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ces amendements visent à rétablir une précision supprimée par la commission au motif qu’elle risquait d’ouvrir trop largement, en raison de l’utilisation de l’adverbe « notamment », le champ des demandes tendant à ce que l’officier de protection et l’interprète soient du sexe du choix du demandeur.

La commission a préféré s’en tenir aux termes de la directive Procédures, interprétés à la lumière de son considérant 32 : « Afin d’assurer une égalité réelle entre les demandeurs femmes et hommes, il convient que les procédures d’examen tiennent compte des spécificités de genre. Il importe notamment que les entretiens personnels soient organisés de telle sorte que les demandeurs femmes et hommes qui ont subi des persécutions fondées sur le genre puissant faire part de leurs expériences. »

L’OFPRA pourra donc apprécier chaque situation à la lumière de ces éléments.

C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 29 rectifié bis et 229.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 49, première phrase

Après les mots :

d’un représentant d’une association

rédiger ainsi la fin de cette phrase :

dont l’objet statutaire est en relation directe ou indirecte avec la défense des droits des étrangers ou des droits de l'homme

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Il s’agit d’un amendement rédactionnel qui, s’il était adopté, éviterait d’énumérer de manière forcément limitative les associations dont l’objet social justifie la présence auprès du demandeur.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis est défavorable, pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées à l’article 6.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Même avis.

M. Jean-Claude Requier. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 17 rectifié est retiré.

L'amendement n° 183, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéa 49, deuxième et dernière phrases

Remplacer ces phrases par une phrase ainsi rédigée :

Au cours de l’entretien, l’avocat ou le représentant de l’association peut prendre des notes et formuler des observations.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. Cet amendement a pour objet de permettre au conseil de jouer un rôle actif au cours de l’entretien, et non uniquement à l’issue de celui-ci. L’adoption de cet amendement nous permettrait de ne pas transposer la directive « Procédures » a minima – nous regrettons que ce soit ce qui nous est proposé sur un certain nombre points – et constituerait une avancée significative.

Il est vrai que, avec ce dispositif, un grand pas est franchi, mais il ne nous paraît pas suffisant. Il vaudrait mieux aller jusqu’au bout de l’esprit de la directive.

Selon nous, limiter l’intervention du tiers à des observations finales réduit considérablement la portée de cette disposition. En effet, comme lors des auditions devant la CNDA, l’avocat et les associations peuvent être utiles pour conseiller le demandeur d’asile, préciser certains points, demander une reformulation des questions posées ou une nouvelle traduction pendant l’entretien.

Tous les demandeurs ne seront pas accompagnés d’un avocat ou d’une association. Permettons au moins à celles et ceux qui le seront de bénéficier pleinement de leurs conseils et de leur participation au cours de l’entretien.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.

Le texte prévoit bien que le demandeur peut être assisté au cours de l’entretien et que son conseil, avocat ou représentant d’association, peut intervenir pour formuler des observations, mais seulement à l’issue de cet entretien.

Nous avons eu ce débat en commission et, à l’unanimité, nous avons choisi de laisser se dérouler l’entretien sans rupture, c’est-à-dire sans intervention des tiers participant à cet entretien jusqu’à son issue, l’objectif étant de garder le bénéfice de la spontanéité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Même avis. Je tiens à souligner que la présence d’un tiers est une avancée considérable.

Mme Éliane Assassi. C’est bien ce que j’ai dit !

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Pour le reste, ne soyons pas trop procéduriers, car cela ne profiterait à personne.

Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 183.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Mme la présidente. L'amendement n° 10, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 55

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« Le demandeur a la possibilité d’apporter des précisions, par écrit ou par oral, concernant toute erreur ou tout malentendu dans la transcription, à l’issue de l’entretien personnel et dans un délai de soixante-douze heures après la date de tenue de l’entretien, avant qu'une décision soit prise sur la demande.

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Le présent amendement a pour objet de préciser, conformément à l’article 17 de la directive 2013/32/UE, que le demandeur a la possibilité de faire des commentaires ou d’apporter des précisions concernant toute erreur de traduction ou tout malentendu dans le rapport ou la transcription.

II s’agit de s’assurer que cette personne, qui a éventuellement subi des atteintes diverses ou fait l’objet de poursuites dans son pays d’origine, peut apporter des rectifications ou des précisions à ce qu’elle a déclaré lors de l’entretien personnel. Il faut imaginer ici l’émotion et le stress du demandeur d’asile, qui peuvent le conduire à mélanger des faits et des dates.

Nous tenons toutefois à enserrer cette possibilité dans des délais stricts : nous proposons que le demandeur ne puisse formuler ses commentaires ou apporter des précisions que dans les 72 heures suivant la fin de l’entretien personnel, avant qu’une décision soit prise sur sa demande.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à prévoir, en complément des observations produites, le cas échéant, à l’issue de l’entretien qui a lieu au sein de l’OFPRA, la faculté pour le demandeur de faire parvenir des observations écrites ou orales sur la transcription de cet entretien.

Le vote de cet amendement soulèverait deux difficultés : d’une part, il impliquerait que l’envoi de la transcription soit systématisé, alors même qu’il n’est pour l’heure fourni qu’à la demande de l’intéressé ou de son conseil ; d’autre part, le délai de 72 heures après la date de tenue de l’entretien impliquerait que l’OFPRA ait fait parvenir la transcription de l’entretien avant l’expiration de ce délai, ce qui, d’un point de vue pratique, semble tout à fait déraisonnable.

C’est pourquoi je sollicite le retrait de l’amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État. Même avis.

M. Jean-Claude Requier. Je retire l’amendement, madame la présidente !

Mme la présidente. L’amendement n° 10 est retiré.

L'amendement n° 115, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 56

Supprimer les mots :

, à leur demande,

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Cet amendement vise à permettre une transmission automatique des transcriptions de l’entretien personnel aux demandeurs d’asile et à leur conseil.

Cette mesure tend à la simplification, l’envoi sur demande pouvant être plus chronophage qu’un envoi automatique.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

La transmission systématique de la transcription de l’entretien au demandeur, quand le projet de loi prévoit qu’elle s’effectue uniquement à la demande de celui-ci, constituerait pour l’OFPRA, contrairement à ce que suggère l’exposé des motifs de cet amendement, une charge supplémentaire et injustifiée puisque, en l’état, le texte ne prive aucunement le demandeur de la possibilité d’avoir connaissance de cette transcription. En revanche, le caractère systématique de la transmission poserait un problème pratique d’organisation.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 115.

(L’amendement n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 116 est présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

L’amendement n° 184 est présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Alinéa 57

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 116.

Mme Esther Benbassa. Aucun impératif n’implique de priver les demandeurs d’asile dont la demande fait l’objet d’une procédure accélérée d’une garantie procédurale simple, en l’espèce la remise de la retranscription de l’entretien personnel. En effet, d’une part, cette garantie est facilement accessible, puisque la retranscription a lieu concomitamment à l’entretien pour tous les demandeurs d’asile ; d’autre part, une privation de ce droit, à laquelle s’ajoutent des délais restreints devant la CNDA, constitue une entrave discriminatoire au droit au recours effectif pour cette seule catégorie de demandeurs d’asile.

Mme la présidente. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour présenter l’amendement n° 184.

Mme Christine Prunaud. Pour permettre au demandeur d’asile d’organiser sa défense, nous proposons, nous aussi, de supprimer le délai accordé à l’administration pour notifier sa décision.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable.

Je rappelle que l’alinéa 57 prévoit que, en cas de procédure accélérée, la communication de la décision rendue sur le fond et celle de la transcription de l’entretien peuvent être simultanées. Étant donné les délais impartis à l’OFPRA pour instruire une demande en procédure accélérée, à savoir quinze jours, cette disposition paraît absolument nécessaire.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est identique à celui de la commission.

En effet, la loi prévoit déjà, en conformité avec la directive Procédures, que la transmission de la transcription se fait au moment de la notification. Le fait de la communiquer avant la décision ne présente aucun avantage et poserait, en revanche, de nombreuses difficultés pratiques.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 116 et 184.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 185, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Alinéas 67 à 73

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

« Art. L. 723-10. – Lors de l’entretien personnel prévu à l’article L. 723-6, le demandeur est mis à même de présenter ses observations sur l’application des motifs d’irrecevabilité mentionnés dans le présent article.

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Mme Éliane Assassi. À travers cet amendement, les membres du groupe CRC souhaitent garantir et protéger le droit à l’entretien individuel pour les demandeurs d’asile. En effet, les demandes de réexamen bénéficieront d’un examen préliminaire, à la suite duquel l’OFPRA pourra prendre une décision d’irrecevabilité sans entretien personnel si « les faits ou éléments nouveaux n’augmentent pas de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection ».

Outre que le texte nous paraît conférer à l’évaluation un caractère par trop subjectif, le droit à l’entretien individuel est clairement garanti et protégé, en matière d’asile, par les articles 18, 41, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, telle que l’interprète la Cour de justice de l’Union européenne, et par l’article 14 de la directive du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l’octroi et le retrait de la protection internationale. La généralisation du défaut d’entretien pour les demandes de réexamen est d’ailleurs incompatible avec une jurisprudence de la CNDA dont je vous épargnerai le commentaire…

Mme la présidente. L’amendement n° 117, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 67

Supprimer les mots :

, sans vérifier si les conditions d’octroi de l’asile sont réunies,

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Les conséquences d’une décision d’irrecevabilité sont d’une extrême gravité, car cette décision prive le demandeur de droit au recours suspensif, le confronte à un contentieux accéléré devant un juge unique et risque de le priver de protection internationale, alors même que le fond de sa demande n’a pas été examiné par l’Office. Nous considérons donc qu’il est capital que l’Office prenne sa décision après avoir procédé aux vérifications nécessaires.

En effet, des demandeurs d’asile peuvent avoir obtenu une protection dans un État membre de l’Union européenne ou dans un État tiers et craindre d’y subir des persécutions, directement ou par ricochet, en cas de retour dans cet État. Les conditions d’examen des demandes d’asile sont loin d’être homogènes : elles sont parfois sommaires. En outre, la pratique des renvois vers des États tiers par les États membres de l’Union européenne peut se révéler dangereuse : les situations personnelles ou les climats politiques peuvent changer et de nouveaux dangers peuvent naître postérieurement dans l’« État responsable ».

Le cas de certains ressortissants tchétchènes réfugiés en Pologne et le contentieux Oumarov ont démontré que l’on peut bénéficier d’une protection théorique en qualité de réfugié dans un État membre et être menacé de persécutions dans ce même État. La jurisprudence a ainsi rappelé qu’il n’existait pas de présomption irréfragable de protection du seul fait de l’obtention d’un statut de réfugié, pas plus dans l’espace Schengen qu’en dehors de l’Europe.

Mme la présidente. L’amendement n° 118, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 70

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Nous considérons que la présomption d’irrecevabilité qui pèse sur les demandes de réexamen est injustement sévère et risque d’enfreindre le principe de non-refoulement.

Une demande de réexamen doit être appréhendée comme toute autre, sans discrimination. Il revient donc à l’OFPRA et, en cas de rejet, aux juges de l’asile de se pencher sur le fond de la demande pour déterminer si, au regard du dossier et du motif du précédent rejet, mais aussi des éventuels changements factuels, personnels, géopolitiques ou jurisprudentiels, les faits nouveaux invoqués sont suffisants pour fonder une demande de protection internationale.

Mme la présidente. L’amendement n° 119, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 72

Remplacer les mots :

du motif d’irrecevabilité mentionné aux 1° ou 2° du présent article à sa situation personnelle

par les mots :

des motifs d’irrecevabilité mentionnés au présent article

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Nous considérons que le demandeur d’asile doit être mis en mesure de présenter ses observations quel que soit le motif d’irrecevabilité qui lui est opposé.

Mme la présidente. L’amendement n° 11, présenté par MM. Mézard, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Collombat, Esnol, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et M. Requier, est ainsi libellé :

Alinéa 72

Compléter cet alinéa par les mots et une phrase ainsi rédigés :

et d’apporter tous éléments circonstanciés de nature à établir la réalité de ses craintes et le défaut de protection des autorités de l’État membre qui lui a, en premier lieu, reconnu la qualité de réfugié. Le fait qu’il n’ait pas sollicité ou tenté de solliciter la protection de ces autorités ne peut à lui seul remettre en cause le bien-fondé de sa demande.

La parole est à Mme Françoise Laborde.