M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. La commission est plutôt favorable à cet amendement.
Lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2015, vous avez été, mes chers collègues, un certain nombre à vous inquiéter des ressources de l’ANAH. Cette agence fonctionne bien et rend vraiment service. Or les crédits pour 2015 ont déjà été en partie consommés pour résorber la liste d’attente de 2014, ce qui pose un vrai problème. Il me paraît bon, par conséquent, d’interroger le Gouvernement sur les moyens dévolus à l’ANAH.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Je m’en remets à la sagesse du Sénat sur cet amendement, auquel je ne suis guère favorable dans la mesure où le sujet relève typiquement de la loi de finances.
En outre, on a souhaité tout à l’heure limiter le nombre de rapports demandés au Gouvernement.
M. Charles Revet. C’est pour vous aider !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Concernant les demandes de rapport, nous devons être cohérents : nous avons toujours soutenu, de manière constante et quels que soient les textes examinés, que la plupart des rapports demandés étaient inutiles.
Sur le fond, nous connaissons tous les difficultés de financement de l’ANAH. Je ne doute pas que le Gouvernement en soit également conscient : il lui appartient d’y apporter une réponse, mais il me paraît tout à fait inutile, je le répète, d’établir un rapport.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Comme je l’ai dit tout à l'heure, il n’est pas mauvais de pouvoir disposer de rapports. L’intérêt d’un rapport gouvernemental est de présenter un certain nombre d’hypothèses, d’études prospectives que nous ne sommes pas en mesure de conduire nous-mêmes. Je voterai donc l’amendement de Mmes Létard et Jouanno.
S'agissant de l’ANAH, la question de l’affectation des ressources provenant de l’EU ETS, l’European Union emissions trading scheme, c’est-à-dire le marché européen d’échange de quotas de carbone entre les entreprises, est extrêmement importante.
Il se trouve que j’ai présidé, voilà une dizaine d’années, le groupe de travail constitué sur le sujet par un réseau européen de grandes villes. Nous avions énormément milité pour que ces recettes, qui vont dans les caisses des États, soient affectées aux collectivités territoriales. M. Jean-Marc Ayrault, lorsqu’il était Premier ministre, les avait attribuées à l’ANAH, ce qui répondait assez bien à notre demande.
À présent, nous avons besoin de visibilité quant à l’évolution de cette ressource. La feuille de route de la troisième conférence environnementale, présentée par Manuel Valls et Ségolène Royal la semaine dernière, prévoit notamment la création d’un stock spécial de tonnes de CO2 retirées du marché, pour faire remonter les prix sur le marché européen des quotas d’émission. Or une augmentation du prix de la tonne de CO2 aurait une incidence extrêmement importante sur les recettes de l’ANAH. Il s’agit d’un enjeu financier majeur.
Une telle augmentation des prix engendrerait un cercle vertueux, en induisant une régulation plus forte des émissions de CO2 par les industriels, soucieux de maîtriser leurs coûts, un moindre recours au charbon pour la production d’électricité et un renforcement des moyens consacrés à la rénovation thermique des bâtiments, entraînant en retour une réduction des émissions de CO2.
À l’approche de la Conférence des parties de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques qui se tiendra à Paris en décembre 2015, il est donc crucial de trouver le moyen de faire remonter, à l’échelon européen, le prix de la tonne de CO2 émise.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Madame la ministre, j’ai été un peu déçu par votre réponse.
Le financement des travaux de rénovation thermique des logements est un sujet essentiel, et nous savons tous que l’ANAH ne dispose pas de moyens suffisants : les crédits pour 2015 ont déjà été en partie utilisés au titre de la liste d’attente de 2014.
J’avais cru comprendre, cet après-midi, que vous vous engagiez à trouver des financements complémentaires.
M. Charles Revet. Nous l’avons entendu !
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Or vous renvoyez à présent le traitement de la question au secrétariat d’État chargé du budget et à la loi de finances pour 2016…
M. Jean-François Husson. Il faut être sérieux !
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. J’aimerais que vous preniez une position plus forte sur ce sujet crucial.
J’ajoute qu’il y va de la crédibilité non seulement de l’ANAH, mais aussi des collectivités locales qui se sont engagées dans des opérations programmées d’amélioration de l’habitat. C’est le cas de l’intercommunalité que je préside. Les élus se trouvent en première ligne quand des personnes n’obtiennent pas les financements attendus.
Je souhaiterais donc, madame la ministre, que vous puissiez nous délivrer ce soir un message plus fort quant à la mobilisation de moyens suffisants pour répondre aux demandes.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mes chers collègues, nous engageons un débat sans lien avec l’objet du présent projet de loi, au détour de la discussion d’un amendement prévoyant simplement la remise d’un rapport…
Mme Chantal Jouanno. Tout de même !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous ne sommes pas en train d’élaborer une loi de programmation comportant un arbitrage d’ensemble, visant à préciser la répartition de l’argent public entre l’ANAH, la rénovation thermique des logements sociaux, la modernisation des équipements publics… J’y serais favorable, pour ma part, mais, en tout état de cause, comme l’a dit Mme la ministre, une programmation pluriannuelle est prévue dans le projet de loi, ainsi que la mobilisation de moyens pour promouvoir les énergies renouvelables.
Nous sommes devant un large spectre de nouvelles dépenses publiques à consentir, et je ne voudrais pas que l’on procède à un arbitrage particulier au détour de l’examen d’un amendement. Dieu sait pourtant que j’ai toujours défendu le budget de l’ANAH !
Je pense que le temps n’est pas venu d’avoir ce débat. Il se trouve que j’étais député européen au moment du débat sur l’ETS. J’avais indiqué à mes collègues écologistes, qui me traitaient de vieille archaïque, que ce n’était pas le marché des quotas d’émission de gaz à effet de serre qui permettrait de financer les travaux d’amélioration de l’efficacité énergétique, eu égard à la grande volatilité des recettes, liées à la fois à la croissance et au prix du pétrole. Le financement d’investissements destinés à réaliser des économies d’énergie doit, au contraire, être garanti dans la durée.
Parce que je privilégiais le recours à des normes, à l’intervention publique ou à une progressivité programmée par filière, on me trouvait archaïque : aujourd'hui, force est de constater qu’il n’y a plus un centime…Vive le marché de la pollution !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 5 ter.
Article 5 quater
Le titre Ier du livre III du code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° À l’intitulé, après le mot : « construction », sont insérés les mots : « et l’amélioration » ;
2° Le chapitre II est complété par une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4
« Fonds de garantie pour la rénovation énergétique
« Art. L. 312-7. – I. – Le fonds de garantie pour la rénovation énergétique a pour objet de faciliter le financement des travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements.
« Ce fonds peut garantir :
« 1° Les prêts destinés au financement de travaux mentionnés au premier alinéa accordés à titre individuel aux personnes remplissant une condition de ressources fixée par décret ;
« 2° Les prêts collectifs destinés au financement de travaux mentionnés au premier alinéa, régis par les articles 26-4 à 26-8 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;
« 3° Les garanties des entreprises d’assurance ou des sociétés de caution accordées pour le remboursement de prêt octroyé pour le financement des travaux mentionnés au premier alinéa.
« I bis. – Les ressources du fonds sont constituées par toutes les recettes autorisées par la loi et les règlements.
« II. – Le fonds est administré par un conseil de gestion dont la composition, les modes de désignation de ses membres et les modalités de fonctionnement sont fixés par décret en Conseil d’État.
« III. – Les modalités d’intervention du fonds sont fixées par décret en Conseil d’État. Les travaux et la condition de ressources mentionnés au I sont définis par décret. »
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, rapporteur pour avis.
M. Jean-François Husson, rapporteur pour avis de la commission des finances. La commission des finances a émis un avis favorable à l’adoption de l’article 5 quater visant à créer un fonds de garantie pour la rénovation énergétique. Nous ne pouvons en effet que souscrire à l’objectif de développer des outils permettant de favoriser la rénovation énergétique des logements privés.
La question du financement des opérations envisagées par les ménages et les copropriétés est cruciale, en particulier s’agissant des ménages les plus modestes et lorsque le recours à l’emprunt s’avère indispensable.
Le développement de garanties visant à faciliter l’octroi de prêts bancaires constitue d’ailleurs, il faut le reconnaître, une solution intéressante.
Pour autant, le dispositif inscrit dans le projet de loi paraît encore relativement flou. En tant que rapporteur pour avis de la commission des finances, je souhaite interroger Mme la ministre sur plusieurs points : quel devrait être le champ d’application de ce fonds de garantie ? À quels objectifs doit-il répondre ?
Selon les informations qui m’ont été communiquées, le champ d’intervention du fonds de garantie se limiterait, s’agissant des particuliers, aux ménages les plus modestes qui ne parviennent pas à boucler le financement de leur opération de rénovation énergétique malgré les aides de l’ANAH, compte tenu du refus des établissements de crédit de leur accorder l’emprunt nécessaire. Il s’agirait ainsi de développer le microcrédit.
Quoi qu’il en soit, le champ d’intervention de ce fonds devrait être relativement restreint puisque, selon les personnes que j’ai auditionnées, une somme de 10 millions à 50 millions d’euros devrait suffire pour assurer son lancement.
Madame la ministre, pouvez-vous nous confirmer ces hypothèses de travail ?
Les ressources affectées à ce fonds sont, quant à elles, encore très largement inconnues, puisque le projet de loi précise uniquement qu’elles « sont constituées par toutes les recettes autorisées par la loi et les règlements ».
Certes, l’article 8 du projet de loi tel que modifié par l’Assemblée nationale prévoit que la contribution au fonds de garantie pourrait notamment donner lieu à la délivrance des certificats d’économies d’énergie. En outre, ce fonds pourrait, m’a-t-on dit, également bénéficier d’une partie des ressources du fonds pour le financement de la transition énergétique. Là encore, pouvez-vous nous confirmer ces informations ?
Le financement du fonds paraît encore bien incertain, s’agissant tant de son montant que de ses sources, ce qui n’est guère opportun dans la période de contrainte économique et budgétaire prégnante que connaît notre pays.
Enfin, pourriez-vous nous préciser les conditions de mise en œuvre de ce fonds, s’agissant notamment de son adossement et de ses modalités de gestion ? Je ne voudrais pas que, comme d’autres – je pense en particulier au Fonds d’aménagement numérique des territoires –, il soit trop peu alimenté, voire pas du tout.
Je vous remercie par avance, madame la ministre, de la qualité des réponses que vous ne manquerez pas de m’apporter…
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. Créer un fonds de garantie pour la rénovation thermique, pourquoi pas ? Mais il nous faudra attendre la prochaine conférence bancaire pour savoir comment il sera alimenté. Nous savons malheureusement d’expérience que certains fonds ne peuvent jouer leur rôle faute de ressources suffisantes : il en est ainsi du Fonds d’aménagement numérique des territoires.
Madame la ministre, pourquoi ne pas avoir simplement utilisé les ressources du livret A ou du livret de développement durable pour financer la réponse aux besoins du pays en matière de rénovation énergétique ou pour soutenir les PME et les TPE du secteur ? Pourquoi ne pas avoir décidé que, chaque année, lorsque le montant total des sommes déposées sur les livrets A et les livrets de développement durable aura augmenté, les établissements de crédit distribuant ces livrets consacreront au moins un tiers du volume de cette augmentation à l’attribution de nouveaux prêts aux petites et moyennes entreprises et un autre tiers au financement de travaux liés à la transition énergétique, comme le précise l’article L. 221-5 du code monétaire et financier ?
Cela aurait permis la mobilisation de l’épargne populaire, qui représente aujourd’hui 365 milliards d’euros, pour la réhabilitation du parc locatif social et l’amélioration des performances énergétiques de l’habitat. Ainsi, une mobilisation supplémentaire de 5 % de l’épargne populaire représente une ressource de 18 milliards d’euros pour le logement social et la transition énergétique.
Pourquoi ne pas créer un livret d’épargne « transition énergétique », distribué par l’ensemble des établissements de crédit et destiné à financer la mise en œuvre de la transition énergétique ?
Finalement, le fonds que vous proposez aujourd’hui de créer s’adresse essentiellement à des personnes ayant les moyens d’entreprendre des travaux de rénovation énergétique, puisque son intervention prendra avant tout la forme d’une garantie d’emprunt.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. Le financement de la transition énergétique est une question essentielle.
Monsieur le président de la commission des affaires économiques, j’ai obtenu l’année dernière un complément de financement de 50 millions d’euros pour l’ANAH, qui joue un rôle extrêmement précieux. Toutefois, vous l’avez dit, compte tenu du nombre de dossiers en cours, ce montant est déjà pratiquement consommé.
Je suis heureuse de pouvoir vous annoncer qu’une première enveloppe supplémentaire de 20 millions d’euros viendra alimenter le budget de l’ANAH dans les jours prochains. Cela permettra de traiter les dossiers en instance. Il restera bien sûr à compléter ce financement, car il est essentiel que l’ANAH puisse continuer à remplir sa mission.
Concernant la création du fonds de garantie pour la rénovation énergétique, je commencerai par en retracer la genèse. Elle accompagne en fait la mise en place des sociétés de tiers-financement par les régions. Plusieurs régions ont déjà anticipé, à titre expérimental, la possibilité ouverte par le texte de créer de telles sociétés, qui pourront consentir des avances de fonds aux particuliers.
La création du fonds de garantie pour la rénovation énergétique résulte de l’adoption d’un amendement de la commission spéciale de l’Assemblée nationale. Ce fonds sera créé à la Caisse des dépôts et consignations. Dans un premier temps, il sera doté de 10 millions d’euros. Nous mènerons une expérimentation pour étudier les modalités de l’articulation de son intervention avec les avances financières consenties par les régions. Je suis, personnellement, toujours favorable à une gestion de proximité, qui permettra en l’occurrence aux régions ayant mis en place des sociétés de tiers-financement d’en arrêter les principes de fonctionnement, d’en suivre l’activité et d’en contrôler l’efficacité.
En appui, la Caisse des dépôts et consignations viendra apporter une garantie au bénéfice des personnes disposant de ressources modestes, qui n’ont pas accès au crédit ni à l’éco-prêt à taux zéro compte tenu de leur solvabilité insuffisante, ainsi que des propriétaires de logements régis par une copropriété. En effet, compte tenu des spécificités des copropriétés, les établissements de crédit hésitent souvent à s’engager dans le financement de travaux de rénovation lorsque les locataires, mêmes s’ils sont solvables, ont des revenus modestes.
Le fonds pourra garantir des prêts individuels sous condition de ressources et des prêts collectifs contractés par des syndicats de copropriété en appui, c’est-à-dire en garantie de l’intervention des sociétés de tiers-financement des régions.
Le dispositif est donc à la fois efficace, pragmatique, puisqu’il s’appuie sur des initiatives régionales, et évaluable, ce qui me semble très important.
Ce fonds pourra également garantir les garanties des entreprises d’assurances ou des sociétés de caution pour des prêts dédiés aux travaux de rénovation énergétique.
Enfin, le dispositif pourra être évalué et, éventuellement, complété au vu de son fonctionnement et des résultats obtenus.
M. le président. Je mets aux voix l'article 5 quater.
(L'article 5 quater est adopté.)
Articles additionnels après l’article 5 quater
M. le président. L'amendement n° 840, présenté par MM. Labbé, Dantec et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 5 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 1 du chapitre III du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code général des collectivités territoriales est complétée par un article L. 2213-6-... ainsi rédigé :
« Art. L. 2213-6-... – Le maire ne peut ni octroyer, ni renouveler, pour des activités commerciales en terrasses pour le compte de personnes physiques ou morales, un permis de stationnement sur la voie publique ou une autorisation de voirie si cette occupation est accompagnée d’une installation de chauffage contrevenant aux normes de déperdition thermique déterminées par décret en Conseil d’État en équivalence avec la réglementation thermique en vigueur concernant le bâti. Ce décret en Conseil d’État détermine les modalités d’établissement du diagnostic de déperdition thermique. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement traite de l’un des signes de l’aberration énergétique des sociétés occidentales du début du XXIe siècle : je veux parler des « braseros ».
Depuis que nous avons instauré l’interdiction de fumer dans les cafés et restaurants, certains de ces établissements ont aménagé des terrasses de rue chauffées en hiver. Aux termes d’une décision de la Cour de cassation de juin 2013, ces terrasses ne doivent pas être complètements fermées. Le rendement énergétique est donc pire que très mauvais !
En février 2008, le Parlement européen s’est prononcé pour l’interdiction des systèmes de chauffe pour terrasses, par le biais d’un avis non contraignant émis dans le cadre d’un rapport d’initiative portant sur les moyens d’améliorer l’efficacité énergétique en Europe.
D’un côté, on multiplie les campagnes pour lutter contre le gaspillage énergétique et on insiste sur la gravité du changement climatique ; de l’autre, on chauffe l’extérieur ! Ces braseros sont un symbole des contradictions de nos sociétés…
Nous proposons donc qu’un maire ne puisse « ni octroyer, ni renouveler, pour des activités commerciales en terrasses pour le compte de personnes physiques ou morales, un permis de stationnement sur la voie publique ou une autorisation de voirie si cette occupation est accompagnée d’une installation de chauffage contrevenant aux normes de déperdition thermique ».
Le dispositif proposé est relativement simple. Nous n’allons pas interdire les braseros, mais la puissance publique doit pouvoir s’opposer à l’occupation de l’espace public par des installations aussi aberrantes : c’est une question de bon sens ! Ces systèmes de chauffe induisent un gaspillage extrêmement coûteux. J’ajoute qu’ils fonctionnent souvent en périodes de pointe de consommation électrique, avec de l’électricité produite en Allemagne, à partir du charbon…
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Vous l’avouez ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Mon cher collègue, le secteur des cafés et des restaurants ne se porte déjà pas très bien : si cet amendement est adopté, bonjour les dégâts !
M. Ronan Dantec. Les gens fumeront moins !
M. Ladislas Poniatowski, au nom de la commission des affaires économiques. Je n’ai pas l’intention de me lancer dans un grand débat avec vous sur cette question. Je vous sais très fidèle à vos convictions et à votre combat contre les braseros, digne de Don Quichotte !
La commission, elle, est favorable aux braseros, et donc défavorable à votre amendement !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Ségolène Royal, ministre. Nous avons déjà connu l’épisode des feux de cheminée ; nous n’allons pas continuer maintenant avec les braseros ! Je suis désolée, monsieur Dantec, mais je ne suis pas pour l’écologie punitive, même si je sais que vous n’aimez pas cette expression.
M. Ronan Dantec. Non, pas du tout.
Mme Ségolène Royal, ministre. Il n’est pas possible de tout encadrer en matière de loisirs, de plaisirs. On ne peut pas à la fois interdire de fumer à l’intérieur des établissements et empêcher ceux-ci de trouver une solution pour que leurs clients puissent fumer en terrasse en bénéficiant d’un peu de chauffage… Encourageons plutôt l’amélioration technologique des chauffages d’extérieur ! Une PME trouvera certainement un jour un système astucieux.
Par ailleurs, les exploitants savent que ces chauffages entraînent des dépenses d’énergie élevées : il leur appartient de prendre leurs décisions en fonction du rapport entre le coût de l’investissement et son rendement.
Il n’est vraiment pas envisageable d’adopter une mesure comme celle-ci, s’apparentant à l’interdiction des feux de cheminée, qui a rencontré le succès que l’on sait et que je suis bien aise d’avoir abrogée !
M. Jean-Claude Lenoir, président de la commission des affaires économiques. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Je ne voterai pas cet amendement, parce que je crains que son adoption ne creuse le déficit de la sécurité sociale : sans braseros, les clients prendront froid ! (Rires.) Ne serait-ce que pour cette raison, je ne peux voter cet amendement ! (M. Philippe Dallier applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Au risque de vous surprendre, mes chers collègues, je trouve que ce type de chauffage des terrasses est scandaleux.
M. Philippe Dallier. Tout de suite les grands mots !
M. Roland Courteau. C’est du gaspillage, un véritable gâchis énergétique.
Certes, madame la ministre, il ne faut pas tout encadrer ou interdire, mais avouons que l’usage des braseros pour chauffer des terrasses de rue est une aberration !
M. Ronan Dantec. Très bien, monsieur Courteau !
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Je m’étonne qu’un écologiste veuille interdire les braseros. En effet, qui fréquente les terrasses chauffées ? Essentiellement, les bobos des villes ! (Rires.) Quelle contradiction ! (Exclamations amusées.)
Pour ma part, je suis pour les cafés et leurs terrasses chauffées, car ils sont la France ! Par conséquent, je ne voterai pas cet amendement, même si, à titre personnel, je me tiens à l’écart des braseros, parce que je n’aime pas que l’on me chauffe les oreilles ! (Sourires.) Néanmoins, ils permettent aux cafés et aux restaurants d’attirer la clientèle pendant l’hiver.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Je ne suis pas très surpris par les réactions suscitées par cet amendement. S’il était adopté ce soir, je pense que les médias en parleraient beaucoup demain… (Exclamations amusées.)
Néanmoins, le gaspillage est réel, et je remercie mon collègue Roland Courteau de l’avoir souligné. Il n’est pas aberrant de soulever cette question, qui est moins secondaire que certains le pensent. Les braseros sont un symbole, et il convient de faire passer un message.
Si l’on se contentait d’installer un seul brasero à l’entrée des cafés pour que les fumeurs ne prennent pas froid en hiver, ce serait acceptable, mais il ne s’agit pas du tout de cela : l’interdiction de fumer a conduit nombre de restaurateurs à installer rien de moins qu’un second établissement en extérieur, doté d’un puissant système de chauffe. Telle est la réalité !
Il s’agit finalement d’une forme de contournement de l’interdiction de fumer dans les cafés et les restaurants, dont le coût énergétique est absolument hallucinant. Pour lutter contre cette dérive, on pourrait aussi envisager une taxation des émissions de CO2 des braseros, mais on nous accuserait alors sûrement de promouvoir une écologie punitive… J’y insiste, il s’agit d’un vrai problème.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ne tombons pas dans la caricature : au-delà du cas des fumeurs, le recours aux braseros concerne des secteurs entiers de l’industrie du tourisme.
Par exemple, sur le port de Marseille, 80 % des restaurants sont tout petits, et accueillent l’essentiel de leur clientèle en terrasse.
M. Charles Revet. C’est vrai aussi à Honfleur !
M. Marc Daunis. Et à Antibes !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les enquêtes réalisées par les acteurs du tourisme montrent que, aux yeux des étrangers, une des spécificités de la France est que l’on y mange en extérieur.
M. Marc Daunis. Voilà !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. En hiver, cela suppose de chauffer les terrasses, notre climat n’étant pas celui de l’Espagne ou de l’Italie.
En tout état de cause, j’en appelle à la mise au point du brasero propre ! (Rires.) Mme la ministre a raison : je ne doute pas que, après ce débat, des PME innovantes se pencheront sur le sujet !