8

Nomination des membres d’une éventuelle commission mixte paritaire

M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2014, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.

La liste des candidats a été publiée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.

En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :

Titulaires : Mme Michèle André, MM. Albéric de Montgolfier, Francis Delattre, Philippe Dominati, Vincent Delahaye, Jean Germain et Mme Marie-France Beaufils ;

Suppléants : MM. Yannick Botrel, Vincent Capo-Canellas, Yvon Collin, André Gattolin, Jacques Genest, Roger Karoutchi et Antoine Lefèvre.

Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.

9

Nomination de membres d’organismes extraparlementaires

M. le président. Je rappelle que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a présenté cinq candidatures pour quatre organismes extraparlementaires.

La présidence n’a reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 9 du règlement.

En conséquence, ces candidatures sont ratifiées et je proclame :

- M. Xavier Pintat comme membre de la Commission consultative de suivi des conséquences des essais nucléaires ;

- M. Henri de Raincourt comme membre du conseil d’administration de l’Agence française de développement ;

- M. Jeanny Lorgeoux comme membre du conseil d’administration de l’Institut des hautes études de défense nationale ;

- M. Joël Guerriau comme membre titulaire et Mme Michelle Demessine comme membre suppléante du Conseil national du développement et de la solidarité internationale.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

10

Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi

M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi portant diverses dispositions tendant à la modernisation du secteur de la presse, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 17 septembre 2014.

11

Article 30 quindecies (nouveau) (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article additionnel après l'article 30 quindecies

Loi de finances rectificative pour 2014

Suite de la discussion et adoption d’un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2014, adopté par l'Assemblée nationale.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à un amendement portant article additionnel après l’article 30 quindecies.

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article 30 sexdecies (nouveau)

Article additionnel après l'article 30 quindecies

M. le président. L'amendement n° 110, présenté par M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 30 quindecies

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 1649 AB du code général des impôts, il est inséré un article 1649... ainsi rédigé :

« Art. 1649… – Toute personne élaborant, développant ou commercialisant un schéma d’optimisation fiscale, conçu comme la combinaison de dispositions législatives et réglementaires permettant à l’utilisateur d’escompter la réduction de son imposition, est tenue de porter ce dernier à la connaissance de l’administration fiscale dès les pourparlers de vente ou d’achat du dispositif.

« Le manquement à cette obligation entraîne l’application de l’amende prévue à l’article 1734. »

La parole est à M. Thierry Foucaud.

M. Thierry Foucaud. Reprenant le fil de nos réflexions sur la question de la fraude fiscale, je présente ici un amendement qui a déjà été défendu en d’autres occasions et qui vise à créer un « délit de commercialisation d’outils de fraude ou d’optimisation fiscale ».

Cette proposition figure parmi celles qui ont été émises par la première commission d’enquête sénatoriale sur l’évasion fiscale. Elle est le fruit des travaux de nombreux spécialistes de la question, notamment des cadres importants du ministère des finances.

À cet égard, je ne puis manquer de citer un passage du verbatim de l’audition de Bruno Bézard, actuel directeur général du Trésor, par la seconde commission d’enquête sénatoriale sur la fraude fiscale :

« En second lieu, à titre personnel, je trouve très bien de sévir contre les contribuables qui se sont laissés aller à ce genre de dérive, mais je pense que l’on devrait également s’attaquer à ceux qui les encouragent, aux monteurs, aux instigateurs. Il existe un délit d’incitation à la haine raciale, pas à la fraude fiscale ! On peut toujours, par différentes astuces de procédure, utiliser des contextes englobants, recourir à la notion de bande organisée, pour reprendre une expression à la mode, mais nous n’avons pas, dans notre droit, de vecteurs capables d’inquiéter davantage ceux qui démarchent des contribuables pour leur vendre des schémas de fraude fiscale particulièrement lourds.

« Certains contribuables ont certes tenté l’aventure, mais d’autres ont objectivement manqué de vigilance.

« Nous réfléchissons à la manière de faciliter l’incrimination de ces professions, au sens large, qui ne sont jamais inquiétées. J’ai ainsi de très lourds dossiers en tête...

« Par ailleurs, nous sommes particulièrement attentifs aux montages mis en place par certains groupes. Nous avons proposé au Parlement, à l’été 2012, une réforme du dispositif sur les sociétés, qui bénéficient à l’étranger d’un régime fiscal privilégié. Cette première modification nous a permis de faciliter la découverte de certains montages, en renversant la charge de la preuve. Notre objectif est de lutter contre l’un des phénomènes les plus classiques de la fraude fiscale, qui est la délocalisation vers des pays à fiscalité privilégiée. »

Je pourrais poursuivre ma citation, mais une telle expertise me semble suffire pour motiver notre amendement et vous convaincre de le voter, mes chers collègues, afin que soient prises toutes dispositions de nature à prévenir les moins-values fiscales de caractère anormal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, mes chers collègues, permettez-moi d’abord de dire à M. le secrétaire d’État chargé du budget le plaisir que nous avons à le retrouver au banc du Gouvernement.

L’amendement n° 110 vise à instituer un dispositif assez lourd, avec l’obligation pour toute personne élaborant, développant ou commercialisant des schémas d’optimisation fiscale de faire une déclaration préalable. Vous avez déjà présenté cet amendement, monsieur Foucaud, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015, et la commission avait émis un avis défavorable.

Je rappelle d’ailleurs que cette obligation de déclaration préalable a été censurée par le Conseil constitutionnel.

Eu égard au risque d’inconstitutionnalité pesant sur cet amendement, la commission ne peut qu’émettre une nouvelle fois un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement a déjà été présenté et même adopté, sous une forme différente, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, avant d’être censuré par le Conseil constitutionnel au motif que la notion de « montage en matière fiscale » n’était pas suffisamment précise. Si on le présente de nouveau, il subira le même sort pour les mêmes raisons.

Par ailleurs, pour répondre à la préoccupation que vous avez exprimée dans votre argumentaire, monsieur le sénateur Thierry Foucaud, je vous signale qu’une mesure a été adoptée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, dont l'Assemblée nationale a achevé l’examen en toute fin d’après-midi, afin de sanctionner ceux qui conseillent des procédures conduisant à des abus de droit et aident à la mise en œuvre de celles-ci. Cette disposition est de nature à responsabiliser, au sens plein du terme, ceux qui élaborent des montages tels que ceux que vous avez décrits. S’y ajoutent d’ailleurs d’autres dispositifs que nous avons mis en place.

J’ai bien écouté la citation de Bruno Bézard que vous avez faite et je puis vous assurer que la mesure adoptée par les députés comble le souhait qu’il avait formulé devant la commission d’enquête sénatoriale.

En tout état de cause, monsieur le sénateur, je ne saurais recommander l’adoption d’un amendement visant à introduire une disposition qui a déjà été frappée d’inconstitutionnalité. Aussi mon avis est-il clairement défavorable.

M. le président. Monsieur Foucaud, l’amendement n° 110 est-il maintenu ?

M. Thierry Foucaud. Pour les motifs évoqués par M. le secrétaire d’État, je vais retirer cet amendement. Considérons qu’il s’agissait là d’un amendement d’appel, ou plutôt de rappel.

Entendant néanmoins revenir sur cette question, nous modifierons la rédaction des dispositions proposées, afin qu’elles soient constitutionnelles.

M. le président. L'amendement n° 110 est retiré.

Article additionnel après l'article 30 quindecies
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article 30 septdecies (nouveau)

Article 30 sexdecies (nouveau)

I. – Au premier alinéa du 1° du I de l’article 244 quater E du code général des impôts, l’année : « 2016 » est remplacée par l’année : « 2020 ».

II. – L’article 39 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011 est ainsi modifié :

1° Le 2° du II est abrogé ;

2° La dernière phrase du III est supprimée.

M. le président. L'amendement n° 58, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. L’article 30 sexdecies vise à proroger le crédit d'impôt pour investissement en Corse jusqu’au 31 décembre 2020, au lieu du 31 décembre 2016.

Je précise que, dans l’exposé des motifs de cet amendement, c’est par erreur qu’il est écrit que cet article prévoit de doubler le taux applicable à partir de 2015. Après vérification, il s’avère que ce taux était déjà de 20 % du montant des investissements réalisés, et non de 10 %. Je vous prie de faire preuve d’indulgence, monsieur le secrétaire d'État, car nous avons disposé de peu de temps pour examiner les articles nouveaux.

Quoi qu'il en soit, la commission s’interroge sur l’utilité de proroger dès maintenant un dispositif de crédit d’impôt dont l’efficacité n’est pas aujourd'hui établie. Ne disposant pas des éléments d’expertise permettant de juger de cette efficacité et considérant qu’il n’y a pas d’urgence à prendre cette mesure – nous avons encore un an pour procéder à une évaluation ! –, la commission propose de supprimer purement et simplement cet article.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur général, mon indulgence vous est acquise pour ce qui concerne l’erreur figurant dans l’objet de l’amendement de la commission, chacun pouvant avoir – cela m’arrive assez souvent ! – une lecture un peu trop rapide, au regard de la complexité des dispositifs, des mesures qui sont proposées.

Le Gouvernement souhaite proroger d’une durée significative le crédit d’impôt pour investissement dans la mesure où la Corse est confrontée à un certain nombre de difficultés. Elle doit encore faire face à des opérations très lourdes s’agissant, notamment, de la question du transport maritime – la situation de la SNCM est bien connue.

Les autorités et les animateurs de ce territoire indiquent que cette prorogation donnerait de la lisibilité. Si je ne m’abuse, la perception de ce crédit d’impôt est étalée sur plusieurs années.

C’est pourquoi le Gouvernement a proposé cette mesure, que l'Assemblée nationale a adoptée. Dans un contexte social, économique – voire, parfois, climatique – difficile, la spécificité de ce territoire justifie la prorogation de ce crédit d’impôt, dont le coût budgétaire n’est pas considérable, même s’il est souhaitable, il est vrai, de considérer avec vigilance chaque dépense au moment où l’argent public est rare.

Dans ces conditions, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin, pour explication de vote.

M. Yvon Collin. L’article 30 sexdecies résulte d’une initiative de nos collègues députés Paul Giacobbi et Roger-Gérard Schwartzenberg.

L’insularité est une évidence géographique, qui a notamment des incidences économiques. Afin de contrebalancer cette situation, des adaptations en matière de fiscalité notamment ont été prévues. Elles sont nombreuses en Corse, participant au charme particulier – très particulier même ! – de cette île ; nous l’avons vu lors de l’examen d’un article précédent concernant la fiscalité du tabac.

Aux termes de la loi de finances rectificative pour 2011, les entreprises qui réalisent des investissements en Corse entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2016 peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt. Cependant, toutes les entreprises ne sont pas concernées par cette mesure, qui est réservée à celles qui emploient moins de 250 salariés, qui réalisent un chiffre d’affaires inférieur à 40 millions d’euros ou présentent un total de bilan inférieur à 27 millions d’euros.

Ce crédit d’impôt est de 20 % du montant des investissements réalisés jusqu’au 31 décembre 2014 et de 10 % jusqu’au 31 décembre 2016.

De mon point de vue, la formulation du rapport du Sénat sur cet article est un peu trompeuse. Il y est fait mention de la « prorogation et du doublement » de ce crédit d’impôt. Or l’article n’en prévoit pas de doublement. Il vise simplement à prolonger au taux actuellement en vigueur, soit 20 %, ce crédit d’impôt jusqu’en 2020. Il y a bien une prorogation, mais avec un maintien du taux, qui permettra aux entreprises corses d’évoluer dans un environnement fiscal stable.

Il semble, monsieur le secrétaire d’État, que vous partagiez ce sentiment. Du reste, à l'Assemblée nationale, l’amendement qui est à l’origine de cet article avait fait l’objet d’un avis favorable du Gouvernement. Vous aviez alors déclaré : « Le Gouvernement comprend que des problèmes spécifiques se posent en Corse, où les acteurs économiques nous ont affirmé qu’il était important que l’action publique soit lisible. »

Pour cette raison, nous sommes opposés à l’amendement de suppression présenté par M. le rapporteur général.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 58.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'article 30 sexdecies est supprimé.

Article 30 sexdecies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article additionnel après l’article 30 septdecies

Article 30 septdecies (nouveau)

I. – Après l’article L. 62 du livre des procédures fiscales, il est inséré un article L. 62 A ainsi rédigé :

« Art. L. 62 A. – Les bénéfices transférés, au sens de l’article 57, ou les produits mentionnés à l’article 238 A et qualifiés de revenus distribués sur le fondement des 1° et 2° du 1 de l’article 109 et du c de l’article 111 au profit d’entreprises liées, au sens du 12 de l’article 39, peuvent, sur demande écrite du redevable, ne pas être soumis à la retenue à la source prévue au 2 de l’article 119 bis si les conditions cumulatives suivantes sont satisfaites :

« 1° La demande du redevable de la retenue à la source intervient avant la mise en recouvrement des rappels de retenue à la source ;

« 2° Le redevable accepte, dans sa demande, les rehaussements et pénalités afférentes qui ont fait l’objet de la qualification de revenus distribués ;

« 3° Les sommes qualifiées de revenus distribués par l’administration sont rapatriées au profit du redevable. Ce rapatriement intervient dans un délai de soixante jours à compter de la demande ;

« 4° Le bénéficiaire des sommes qualifiés de revenus distribués n’est pas situé dans un État ou un territoire non coopératif, au sens de l’article 238-0 A. »

II. – La mise en œuvre de la procédure prévue au I fait l’objet d’un complément au rapport d’information prévu à l’article 136 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, sur l'article.

M. Michel Bouvard. Monsieur le secrétaire d'État, je suis quelque peu interloqué par cet article introduit à l'Assemblée nationale.

Il est assez rare, même si cela peut évidemment arriver, qu’une commission des finances dont la majorité des membres appartiennent à la majorité nationale– et c’est, a priori, toujours le cas de celle de l’Assemblée nationale – ne suive pas le Gouvernement.

Nous sommes là en présence de dispositions qui ont trait à des cas de fraude fiscale au moyen d’un transfert de bénéfices dans un pays étranger. Elles définissent un mode de régularisation susceptible d’être appliqué à des procédures en cours, ce qui m’étonne un peu, car le fait n’est guère habituel.

Tout à l’heure, à propos des pénalités que l’État était amené à verser dans un certain dossier, nous avons fini par apprendre que l’entreprise concernée était Vivendi. De la même façon, je souhaite que M. le secrétaire d’État nous apporte quelques éclaircissements sur la raison d’être de cet article, que le Gouvernement approuve quoiqu’il ne l’ait pas proposé, puisqu’il est issu d’un amendement parlementaire.

Ces dispositions rendront-elles la lutte contre la fraude fiscale plus efficace ? Certaines situations nécessitent-elles des mesures urgentes dans ce domaine ? Comment le mécanisme prévu s’articule-t-il avec les dispositifs mis en place, en matière de fraude fiscale, à destination des sociétés qui possèdent des antennes ou des filiales dans ce qu’on appelle communément des paradis fiscaux ?

M. le président. L'amendement n° 269, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Après les mots :

l'article 57

insérer les mots :

du code général des impôts

II. – Alinéa 7

Remplacer les mots :

au rapport d'information prévu

par les mots :

à l'annexe à la loi de finances prévue

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est purement rédactionnel, mais, à la suite de Michel Bouvard, je souhaite obtenir de M. le secrétaire d’État certaines précisions.

Cet article, introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement, a suscité un débat au sein de notre commission. En consultant le compte rendu intégral des débats de l’Assemblée nationale, nous avons constaté que Mme Valérie Rabault, rapporteur générale de la commission des finances, s’était très longuement interrogée sur la portée de ces dispositions, qu’elle jugeait un peu curieuses. En ce qui nous concerne, nous n’avons pas très bien compris ni l’objet ni la portée de cette procédure, qui nous a paru assez étrange.

Si une entreprise visée par un contrôle fiscal s’engageait dans le mécanisme prévu, la procédure contentieuse serait-elle abandonnée ? Dans cette hypothèse, l’entreprise aurait tout gagné : la levée de la retenue à la source sans rehaussement du prix de transfert. Cette procédure, parfaitement dérogatoire aux règles de notre droit fiscal, nous a laissés d’autant plus dubitatifs que, ayant été introduite par la voie d’un amendement parlementaire, elle n’a pas fait l’objet d’une étude d’impact.

Notre amendement vise à laisser cet article dans la navette et à ne pas éteindre le débat, mais il serait bon que M. le secrétaire d’État nous éclaire dès ce soir sur l’intérêt du dispositif. S’agit-il de dégager des recettes immédiates au titre de la lutte contre la fraude fiscale, sur le modèle du dispositif en vigueur pour le rapatriement des avoirs étrangers, auquel cas nous pourrions en concevoir l’avantage ? La procédure pourrait-elle s’appliquer à des entreprises visées par des contrôles en cours ? Enfin, puisqu’un gage était prévu dans l’amendement déposé à l’Assemblée nationale, quel serait le coût de ce dispositif pour l’État ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, vos interrogations sont légitimes.

En matière de contentieux sur la correction des prix de transfert, il faut avoir à l’esprit que les procédures sont interminables.

Ainsi, en l’état actuel du droit, lorsque l’administration fiscale notifie un redressement, avec toutes les difficultés que cette opération comporte pour disposer des informations nécessaires à l’évaluation des prix de transfert – même si nous avons déjà beaucoup fait évoluer les obligations des entreprises en matière de documentation détaillée des modes de calcul de ces prix –, l’entreprise peut saisir, et elle le fait dans 99 % des cas, une commission dite « amiable » qui réunit les trois parties : la France, l’entreprise et le pays d’accueil. Ce sont alors des allers et retours sans fin, sans qu’aucune recette soit perçue par l’administration fiscale, malgré la notification.

Vous me demandez s’il y a des cas. Oui, il y en a.

L’administration constate que la progression de la procédure est très largement bloquée, soit que l’entreprise fasse preuve de mauvaise volonté, ce qui arrive très souvent, soit que l’État étranger qui intervient dans la procédure amiable ne coopère pas de manière satisfaisante.

Je vais vous faire une confidence, à propos d’un cas dont je ne suis pas sûr qu’il puisse être concerné par la procédure dont nous parlons : lorsque j’étais rapporteur général de la commission des finances de l’Assemblée nationale, je m’étais intéressé, étant lorrain, à la situation d’ArcelorMittal, après que des reportages télévisés eurent fortement suggéré que des ruling avaient été organisés avec le Luxembourg. Ayant obtenu communication du dossier, j’avais connaissance du montant du redressement demandé – ce fait est assez largement connu, mais je ne peux évidemment vous en dire plus, en vertu du secret fiscal. J’avais alors fait le constat que les choses n’avançaient pas. Un an plus tard, si ce n’est deux, je fais un constat identique.

Il s’agit aujourd’hui d’inscrire dans la loi une pratique déjà en vigueur, puisque la procédure est prévue dans le Bulletin officiel des finances publiques-impôts, sous réserve qu’il y ait ouverture et clôture d’une procédure amiable, au sens du droit français – il ne s’agit pas de la commission dont j’ai parlé il y a quelques instants. L’objectif est clairement d’accélérer les dossiers lorsqu’il y a une reconnaissance du montant du prix de transfert. Sinon, les procédures n’en finissent pas !

L’intérêt du dispositif est de permettre de solder des cas lorsqu’il est possible de trouver un accord. Je ne sais pas si de nombreux cas pourront ainsi être soldés, mais quelques-uns le seront probablement. En tout cas, c’est une possibilité qui sera offerte. Elle n’empêchera pas que, le cas échéant, les procédures aillent à leur terme, mais dans des délais qui sont absolument effarants.

M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.

M. Philippe Dominati. Monsieur le secrétaire d’État, je m’attendais à des réponses beaucoup plus précises et circonstanciées aux questions que vous ont posées et M. Bouvard et M. le rapporteur général.

Cet amendement paraît avoir fait l’objet d’un examen critique de Mme la rapporteur générale de la commission des finances de l’Assemblée nationale. Il semblerait que quelques entreprises seulement soient concernées, voire une seule. Nous aimerions savoir s’il s’agit d’un cas général ou si des entreprises particulières sont concernées.

Par ailleurs, nous souhaitons connaître le coût du redressement et savoir pourquoi, en plein milieu d’un contrôle fiscal, un article est introduit par voie d’amendement dans un projet de loi de finances rectificative.

Je trouve, monsieur le secrétaire d’État, que vous n’avez pas donné les raisons exactes qui justifient cet article. Veuillez s’il vous plaît nous dire s’il s’agit d’une entreprise ou de plusieurs, et quel sera le coût de ce dispositif pour l’État.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs dizaines de situations sont concernées. Il n’y en en a pas une, ni cinq, mais plusieurs dizaines, et même plus de cinq dizaines. Je ne puis pas en dire davantage, le secret fiscal m’obligeant à rester discret sur ces affaires.

Si vous avez lu attentivement le compte rendu des débats de l’Assemblée nationale, vous aurez sans doute observé que les différences d’appréciation entre la commission des finances et le Gouvernement ne se sont pas limitées à ce seul article !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous n’allons pas clore le débat ce soir, et cet article va rester dans la navette si notre amendement est adopté. Simplement, nous aurions aimé, monsieur le secrétaire d’État, que vous nous donniez quelques précisions sur le coût de ce dispositif ; il y en a un puisqu’un gage a été prévu.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Ce gage était purement technique. Des procédures sont en cours, qui durent depuis un certain temps. Pour certaines d’entre elles, des recettes sont estimées, mais les montants en cause font l’objet de contestations et il n’est pas possible de savoir si, au terme des procédures, le rendement attendu sera effectivement obtenu. En effet, nous ne pouvons pas prévoir la conclusion de ces opérations, dont je répète qu’elles s’étalent souvent sur plusieurs années.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 269.

(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 30 septdecies, modifié.

(L'article 30 septdecies est adopté.)

Article 30 septdecies (nouveau)
Dossier législatif : projet de loi de finances rectificative pour 2014
Article 30 octodecies (nouveau)

Article additionnel après l’article 30 septdecies