Sommaire
Présidence de M. Jean-Claude Carle
Secrétaires :
M. Hubert Falco, Mme Catherine Procaccia.
atteinte à la typicité de l'urbanisme méditerranéen
Question n° 817 de M. Jean-Paul Fournier. – Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires ; M. Jean-Paul Fournier.
Détermination des secteurs de taille et de capacité d'accueil limité
Question n° 810 de M. Yannick Botrel. – Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires ; M. Yannick Botrel.
protection des habitants contre l'expropriation massive à ivry
Question n° 815 de M. Christian Cambon. – Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires ; M. Christian Cambon.
activité postale dans le département des hauts-de-seine
Question n° 806 de M. André Gattolin. – Mme Carole Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; M. André Gattolin.
difficultés rencontrées par certaines communes du fait du gel du fngir
Question n° 818 de M. Jean-Claude Lenoir. – Mme Carole Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire ; M. Jean-Claude Lenoir.
associations d’aide aux victimes d’infractions et de médiation pénale
Question n° 784 de M. Yannick Vaugrenard. – Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice ; M. Yannick Vaugrenard.
Question n° 824 M. Éric Bocquet. – Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication ; M. Éric Bocquet.
enseignement de l'informatique
Question n° 748 de Mme Catherine Procaccia. – Mmes Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication ; Catherine Procaccia.
fermeture d'une école maternelle à cahors
Question n° 811 de Mme Éliane Assassi. – Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication ; M. Éric Bocquet, en remplacement de Mme Éliane Assassi.
vote électronique des français de l'étranger
Question n° 816 de Mme Hélène Conway-Mouret. – Mmes Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger ; Hélène Conway-Mouret.
Question n° 805 de M. Henri Tandonnet. – Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger ; M. Henri Tandonnet.
Question n° 795 de M. Charles Revet. – Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger ; M. Charles Revet.
contrat de plan interrégional relatif à la vallée de la seine
Question n° 799 de Mme Catherine Morin-Desailly. – Mmes Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger ; Catherine Morin-Desailly.
réforme des collectivités territoriales
Question n° 821 de M. Jean-François Humbert. – Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger ; M. Charles Revet, en remplacement de M. Jean-François Humbert.
élus locaux et périmètres des espaces territoriaux de solidarité et de réciprocité
Question n° 825 de Mme Anne Emery-Dumas. – M. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale ; Mme Anne Emery-Dumas.
difficultés des associations d'aide à domicile
Question n° 813 de M. Didier Marie. – MM. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale ; Didier Marie.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
4. Communication relative à une commission mixte paritaire
MM. Éric Bocquet, le président.
6. Loi de finances rectificative pour 2014. – Suite de la discussion et rejet d’un projet de loi
Articles additionnels après l'article 1er (suite)
Amendement n° 150 rectifié de M. Vincent Delahaye. – MM. Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général de la commission des finances ; Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget ; Francis Delattre, Richard Yung, Philippe Marini, président de la commission des finances ; Mme Nathalie Goulet. – Rejet.
Amendement n° 176 de M. André Gattolin. – MM. André Gattolin, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Éric Bocquet, Francis Delattre, Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Rejet.
Amendement n° 161 rectifié bis de Mme Valérie Létard. – MM. Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° 99 rectifié de M. Yvon Collin. – MM. Yvon Collin, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° 136 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Jean-Yves Leconte, Éric Bocquet, André Gattolin, Nathalie Goulet. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 28 rectifié de Mme Marie-Noëlle Lienemann. – Mme Marie-Noëlle Lienemann, MM. François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Francis Delattre, André Gattolin, Roger Karoutchi, Mme Nicole Bricq, MM. le président de la commission, René-Paul Savary, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Vincent Placé, François Patriat, Éric Bocquet. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 3 de la commission. – MM. François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Retrait.
Rejet de l'article.
Amendements nos 88 rectifié et 89 rectifié de M. Jacques Mézard. – MM. François Fortassin, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; René-Paul Savary. – Adoption des deux amendements.
Amendement n° 4 de la commission. – MM. François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 57 de M. Thierry Foucaud. – MM. Éric Bocquet, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; le président de la commission, Mme Nathalie Goulet, M. René-Paul Savary. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles 1er quinquies à 1er septies (nouveaux). – Adoption
Articles additionnels après l’article 1er septies
Amendement n° 110 de M. Éric Doligé. – MM. Éric Doligé, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Rejet.
Amendement n° 180 rectifié de M. Jean-Vincent Placé. – MM. André Gattolin, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
Amendements identiques nos 117 de M. Francis Delattre et 141 rectifié de M. Vincent Delahaye. – MM. Francis Delattre, Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Retrait des deux amendements.
M. le président de la commission.
Amendements nos 203 rectifié, 5 et 204 de la commission. – MM. François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Adoption des trois amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 2
Amendement n° 81 de M. Roland du Luart. – MM. Francis Delattre, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Retrait.
Amendement n° 137 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Retrait.
Amendement n° 6 de la commission. – M. François Marc, rapporteur général.
Amendement n° 202 de M. François Patriat. – M. François Patriat.
MM. François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Retrait de l’amendement n° 6 ; adoption de l’amendement n° 202.
Adoption de l'article modifié.
Article 2 ter (nouveau). – Adoption
Amendement n° 143 de M. Vincent Delahaye. – MM. Vincent Delahaye, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l’article 2 quater
Amendement n° 82 rectifié de M. Gérard Miquel. – M. Gérard Miquel.
Amendement n° 185 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud.
MM. François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Gérard Miquel. – Retrait de l’amendement n° 82 rectifié.
Mme Aline Archimbaud, M. André Gattolin, Mme Marie-France Beaufils. – Rejet de l’amendement n° 185.
Amendement n° 139 rectifié de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Daniel Raoul, Pierre Laurent. – Rejet.
Amendement n° 76 de M. Philippe Marini. – MM. Philippe Marini, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Mme Nathalie Goulet, M. André Gattolin. – Retrait.
Articles additionnels avant l'article 3
Amendement n° 61 de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Vincent Delahaye, le président de la commission. – Rejet.
Amendement n° 60 de M. Thierry Foucaud. – MM. Thierry Foucaud, François Marc, rapporteur général ; Christian Eckert, secrétaire d'État ; Vincent Delahaye, Didier Guillaume. – Rejet.
Amendement n° 206 du Gouvernement. – MM. Christian Eckert, secrétaire d'État ; François Marc, rapporteur général ; Francis Delattre. – Adoption.
MM. Thierry Foucaud, le président de la commission.
Adoption de l’ensemble de l’article et de l’état annexé, modifié.
Demande de seconde délibération et d’un vote unique sur la seconde délibération et l’ensemble de la première partie du projet de loi. – M. Christian Eckert, secrétaire d'État.
MM. le président, le président de la commission.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° A-1 du Gouvernement. – MM. Christian Eckert, secrétaire d'État ; François Marc, rapporteur général.
Amendement n° A-2 du Gouvernement. – M. Christian Eckert, secrétaire d'État.
Amendement n° A-3 du Gouvernement. – M. Christian Eckert, secrétaire d'État.
Amendement n° A-4 du Gouvernement. – M. Christian Eckert, secrétaire d'État.
Amendement n° A-5 du Gouvernement. – M. Christian Eckert, secrétaire d'État.
Amendement n° A-6 du Gouvernement. – M. Christian Eckert, secrétaire d'État.
Vote sur la seconde délibération et sur l’ensemble de la première partie
MM. Jean-Claude Requier, Jean-Pierre Caffet, André Gattolin, Vincent Delahaye, Philippe Adnot, le président de la commission, Christian Eckert, secrétaire d'État.
Rejet, par un vote unique au scrutin public, de la seconde délibération et de la première partie, entraînant le rejet de l’ensemble du projet de loi.
7. Décret complétant l’ordre du jour de la session extraordinaire
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Claude Carle
vice-président
Secrétaires :
M. Hubert Falco,
Mme Catherine Procaccia.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
atteinte à la typicité de l'urbanisme méditerranéen
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier, auteur de la question n° 817, adressée à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires.
M. Jean-Paul Fournier. Madame la ministre, ma question concerne les conséquences immédiates de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, dont l’application s’est imposée aux communes dès le jour de sa promulgation, entre les deux tours des élections municipales.
Je parle de « conséquences », mais il serait plus précis de parler de « préjudices », tant l’incidence de certaines des dispositions de ce texte est potentiellement dévastatrice en matière à la fois d’harmonie urbaine et d’environnement.
L’entrée en vigueur sans délai de cette loi n’a pas laissé le temps aux communes de procéder aux aménagements de la réglementation locale propres à amortir les effets de la suppression du COS, le coefficient d’occupation des sols, et des surfaces minimales pour la constructibilité.
De nombreuses communes, notamment de l’arc méditerranéen, situées entre plaine littorale inondable et reliefs, souvent adossées à des massifs de garrigues ou de forêts méditerranéennes, qui représentent les seules parties de leur territoire non submersibles, parvenaient à gérer leurs sols par un fin équilibre entre urbanisation et respect des identités paysagères locales. Les règles locales d’urbanisme posant des surfaces minimales importantes pour la constructibilité permettaient cet équilibre.
La suppression brutale de ces surfaces minimales, combinée à la suppression tout aussi soudaine du COS, a eu pour effet immédiat une accumulation de demandes d’autorisations de construire assorties de divisions parcellaires qui sont venues encombrer nos services d’urbanisme.
S’il ne peut être rejeté ou suspendu à l’issue de l’instruction, à défaut de bases juridiques, cet afflux de demandes ouvre des perspectives immédiates de défiguration totale des identités paysagères et urbanistiques de nos communes.
La typicité de l’urbanisme méditerranéen, qui est aussi une richesse nationale en termes d’économie touristique, se trouve donc mise à mal. Et je n’évoque pas ici les conséquences en termes de dessertes et de réseaux pour satisfaire aux besoins engendrés par cette densification imposée.
Il est regrettable que l’environnement, le logement et l’urbanisme ne soient pensés que selon les problématiques franciliennes, qui sont à mille lieues de nos contraintes…
En conséquence, madame la ministre, je vous demande de m’indiquer de quels moyens disposent les autorités communales pour remédier sans délai à cette situation catastrophique, sans aller jusqu’au gel global et définitif de la constructibilité dans ces seules parties du territoire qui la permettent.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué la question de la limitation de l’étalement urbain. Vous le savez bien, la doctrine de l’État en la matière est constante depuis quatorze ans.
Tout d’abord, la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite loi SRU, a supprimé les anciennes zones NB présentes dans les POS, les plans d’occupation des sols, au motif que ces zones permettaient une urbanisation inorganisée de secteurs naturels.
Cet ancien zonage, notamment utilisé dans les POS du sud-est de la France, a pu contribuer à banaliser les paysages naturels, d’une grande beauté, pour laisser s’y construire des maisons individuelles sur de grandes parcelles, contribuant ainsi à l’étalement urbain, à la dévitalisation des centres-bourgs et à la fragilisation des équilibres environnementaux de ces espaces.
Malgré la loi SRU, certaines communes ont choisi de laisser perdurer ce type de zones en les classant en zone U lors de la transformation du POS en plan local d’urbanisme, ou PLU, mais les caractéristiques sont restées les mêmes : celles de zones peu équipées, sans composition d’ensemble et avec comme éléments essentiels de régulation de l’occupation du sol une taille minimale de parcelle élevée et un coefficient d’occupation des sols très faible.
La loi ALUR, en supprimant le COS et la taille minimale des terrains, s’inscrit dans la continuité de la loi SRU, en tirant les conséquences de la mauvaise interprétation, sur certaines parties du territoire national, des principes posés par la loi.
Les élus concernés par cette situation doivent donc en premier lieu s’attacher au plus vite à régler au fond la question de ces ex-zones NB et à se doter d’un PLU répondant aux exigences de la loi et aux impératifs d’une gestion économe des sols, respectueuse de la qualité de l’environnement et des paysages.
Toutefois, le temps que les procédures arrivent à terme, et lorsque les projets sont vraiment contraires aux grands enjeux de protection du cadre paysager et de limitation de l’étalement urbain, les collectivités territoriales ont la possibilité de les refuser en se fondant sur les dispositions d’ordre public du règlement national d’urbanisme pour des motifs, entre autres, d’atteinte à l’intérêt des sites et paysages, de sécurité publique – notamment au regard du risque d’incendie – ou de sous-équipement de la zone.
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Fournier.
M. Jean-Paul Fournier. J’entends bien votre réponse, madame la ministre, mais je vous invite à lire, ou à relire, l’étude que John B. Calhoun a publié en 1962 à la suite d’une expérience qu’il avait réalisée sur les conditions de surpeuplement, étude dont l’influence a été telle qu’elle est devenue la pierre angulaire de la sociologie urbaine. Vous vous rendrez alors compte que la loi ALUR est loin de constituer une avancée…
Détermination des secteurs de taille et de capacité d'accueil limité
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 810, adressée à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires.
M. Yannick Botrel. Madame la ministre, je veux avant toute chose vous dire l’incompréhension des élus des communes rurales face aux nouvelles dispositions en matière d’urbanisme concernant les hameaux et l’habitat dispersé. Je vous rappelle la situation créée par l’annulation du PLU de Châteauneuf-du-Rhône, qui a eu pour effet de rendre attaquables les plans locaux d’urbanisme au prétexte que les micro-zones ou pastillages des PLU n’avaient pas de fondement réglementaire, bien qu’ils aient été institués jusqu’à cette époque sur la recommandation des services de l’État.
Afin de répondre à l’insécurité juridique dans laquelle se sont alors trouvé plongées un certain nombre de communes, la loi portant engagement national pour l’environnement, dite loi ENE, en matière de droit du sol, a ouvert la possibilité de créer en 2010 ces micro-zones sous la dénomination de « secteurs de taille et de capacité d’accueil limité », ou STECAL.
Le problème paraissait réglé à la satisfaction générale, jusqu’à l’adoption récente de la loi ALUR, qui a remis en cause ce qui avait été décidé seulement quatre ans plus tôt. Désormais, dans les zones naturelles ou agricoles, ce n’est qu’à titre exceptionnel – et j’insiste sur ce dernier terme – que le règlement du PLU peut délimiter des STECAL. Dans le contexte spécifique de la Bretagne, qui se caractérise par une dispersion de l’habitat, cette nouvelle législation soulève la question du devenir de la plupart des hameaux et des constructions isolées.
Or, cette dispersion de l’habitat est un fait ancien. Ainsi, dans les Côtes-d’Armor, une commune de 7 000 hectares compte 150 écarts – au sens que l’INSEE donne à ce terme – qui, sans aucune exception, figuraient tous sur le cadastre napoléonien de 1840. La situation actuelle est donc issue d’une organisation historique de l’espace, avec des constructions dispersées qui furent à l’origine des fermes, et qui ne le sont plus.
Désormais, en zones agricole ou naturelle, la loi prévoit donc seulement la possibilité d’effectuer un changement de destination ou une extension limitée à des bâtiments d’intérêt architectural ou patrimonial qui devront être désignés dans le règlement du PLU. Le dispositif ne peut être utilisé que de manière exceptionnelle et, par conséquent, se pose la question du devenir des autres constructions que celles qui viennent d’être décrites, et qui sont d’ailleurs les plus nombreuses. Ces dernières ne pourront plus faire l’objet que d’adaptations mineures, sans extension possible, même limitée.
Dans ces conditions, l’application de la loi ALUR peut conduire à s’interroger sur le devenir de l’habitat des communes concernées, telles que celles que l’on rencontre en centre Bretagne, dont le maintien de la population passe justement par la valorisation de tout cet habitat.
Enfin, des communes aujourd’hui très avancées dans l’élaboration de leurs futurs documents d’urbanisme – le PLU – voient remis en question le travail, parfois entamé depuis plusieurs années, qu’elles ont effectué à ce sujet.
Cette réflexion a occasionné des dépenses d’argent public et tout autant d’investissement des élus locaux, auxquels on vient aujourd’hui expliquer que le travail qu’ils ont fourni n’a servi à rien et qu’il est à refaire…
Je souhaite donc connaître votre analyse de cette question, madame la ministre, et savoir si vous envisagez des mesures afin de revenir aux dispositions précédemment introduites par la loi ENE.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires. Monsieur le sénateur Yannick Botrel, vous avez appelé mon attention sur les récents changements concernant les possibilités offertes pour la construction en zone naturelle et agricole, notamment en ce qui concerne la nouvelle écriture de l’article L. 123-1-5 du code de l’urbanisme.
Comme vous le savez, le code de l’urbanisme porte depuis toujours des objectifs de densification, de lutte contre l’étalement urbain et de réduction de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers. Les zones naturelles et agricoles sont en principe inconstructibles, ce qui est cohérent avec les ambitions portées par ce code.
Il existe cependant des mécanismes d’exception qui permettent la construction dans ces zones de façon encadrée. Ainsi, la création de secteurs constructibles en zone agricole, naturelle ou forestière est possible, mais elle doit être envisagée de manière exceptionnelle afin d’éviter le mitage des espaces que l’on cherche à protéger de l’urbanisation.
Par ailleurs, l’avis de la commission départementale de la consommation des espaces agricoles, ou CDCEA, doit à présent être sollicité quant à la création de tels secteurs lors de l’élaboration des PLU.
Néanmoins, le bâti remarquable – du fait de son architecture ou du patrimoine culturel qu’il représente – peut faire l’objet de changement de destination et même d’extension lorsqu’on se trouve en zone A. Quant au reste des bâtiments à usage d’habitation déjà implantés dans les zones naturelles et agricoles, ils peuvent faire l’objet de réfections et d’adaptations. Mais l’extension et le changement de destination ne sont pas possibles pour ces bâtiments.
Je suis toutefois sensible à vos préoccupations, monsieur le sénateur, et je note les difficultés potentielles que cette impossibilité soulève, difficultés que vous avez largement évoquées dans votre question.
Une réflexion est actuellement menée, conjointement avec le ministère de l’agriculture, dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, afin d’étendre les possibilités offertes aux bâtiments remarquables à l’ensemble des bâtiments existants en zone agricole et naturelle. Ces réflexions permettront d’améliorer la situation que vous avez évoquée dans votre question.
M. le président. La parole est à M. Yannick Botrel.
M. Yannick Botrel. Je vous remercie, madame la ministre, de votre réponse ; elle avait plutôt mal commencé, de mon point de vue, mais elle se conclut de façon plus favorable… (Sourires.)
En effet, la question n’est pas de consommer des terres agricoles pour le plaisir – d'ailleurs, tout le monde s’accorde pour dire qu’il ne faut pas s'orienter dans cette direction.
Mais, dès lors que, dans un village, des habitations existent et que l’on parle d’extension limitée, de quarante mètres carrés – surface que les PLU prévoyaient généralement–, on ne peut véritablement parler de consommation de terres agricoles.
Quant au mitage, je l’ai expliqué, c'est un fait que je n’accepte pas pour la Bretagne ; nous sommes parvenus à un degré de dispersion de l’habitat historique, et il ne faudrait pas l’accroître.
Mais j’en reviens à votre conclusion, dont je pense qu’elle ouvre des possibilités si, du moins, elle est suivie d’effets.
protection des habitants contre l'expropriation massive à ivry
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon, auteur de la question n° 815, adressée à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires.
M. Christian Cambon. Madame la ministre, chers collègues de la Bretagne, je vais vous ramener en région parisienne, en évoquant une opération d’urbanisme tout à fait impressionnante qui se déroule actuellement dans la ville d’Ivry. En effet, le tiers de la commune – près de 145 hectares – est concernée par cette affaire et de très nombreuses personnes, dont je me fais ici l’interprète, souhaitent vous faire part de leur inquiétude et de leur désarroi.
Il s'agit d’une zone d’aménagement concerté, ou ZAC, lancée par la ville d’Ivry ; elle a démarré en 2011 avec les procédures habituelles. Dans un premier temps, avant de construire plus de 6 000 logements, cette ZAC visait à faire disparaitre par voie d’expropriation un nombre tout à fait considérable de logements qui sont actuellement occupés.
Ce projet, appelé « Ivry Confluences », représente, je l’ai dit, un tiers de la ville et concerne d'ores et déjà plus de 400 familles – c'est-à-dire 1 500 personnes au total –, des entreprises et des commerces de proximité.
Au cours de la procédure, le commissaire enquêteur, lorsqu’il s'est penché sur ce dossier, a notamment insisté sur la nécessité d’envisager le relogement et l’indemnisation équitable des habitants concernés, ce qui est somme toute assez logique.
Or, à ce jour, malgré un semblant de concertation, la population concernée par cette opération est laissée dans l’incertitude. Elle n’a reçu aucun élément précis sur ce projet, ce qui entraîne, vous le comprendrez, beaucoup d’inquiétude et de désarroi au moment même où la procédure va bientôt conduire à la signature des arrêtés de cessibilité au bénéfice de la SADEV 94, organisme aménageur choisi par la ville.
L’objet de ma question, madame la ministre, n’est bien évidemment pas de remettre en cause l’opportunité de cette opération d’urbanisme, car cette responsabilité relève des élus municipaux et des organismes aménageurs associés. Toutefois, on peut s’interroger sur le gigantisme d’une telle opération, laquelle va entraîner la disparition de nombreuses habitations à un moment où la crise du logement pose de véritables problèmes.
En revanche, je souhaite évoquer l’information des personnes intéressées et les conditions d’indemnisation des propriétaires de pavillons, d’appartements, de commerces et d’entreprises concernés.
Les informations que j’ai recueillies montrent que la mairie et, surtout, l’organisme aménageur ne font manifestement pas les efforts nécessaires pour informer la population de manière précise sur leurs intentions, sur le calendrier et sur les conditions d’indemnisation des expulsions : les futurs expropriés ne sont pas tous prévenus en même temps, le tracé précis de la zone concernée est constamment modifié…
La conséquence, c’est que les intéressés ne savent pas tous ce qui va leur arriver. Quant aux quelques personnes qui ont reçu des propositions, elles contestent bien évidemment le montant des indemnités d’expropriation.
Les habitants d’Ivry se sont rassemblés en collectif contre ce programme de rénovation urbaine. Certains d’entre eux sont présents dans les tribunes ce matin : ils ont tenu à venir vous entendre, madame la ministre, pour vous montrer leur désarroi.
Le collectif « Ivry sans toi(t) » nous signalait encore récemment que des propriétaires modestes – j’insiste sur ce point – ont dû céder leur appartement sur la base de 2 000 euros le mètre carré, alors que le prix moyen dans cette commune, comme dans les communes limitrophes, oscille entre 4 000 et 5 000 euros le mètre carré !
Madame la ministre, peut-on, en 2014, conduire des opérations selon cette méthode ? Nous sommes ici un certain nombre d’élus, de maires qui ont bien l’habitude de ce genre de choses. S’il est tout à fait possible, et même souhaitable, de conduire des opérations d’urbanisme, il faut le faire dans le respect des habitants. En l’espèce, les règles en matière tant d’information que d’indemnisation ne sont manifestement pas appliquées.
Quelles mesures le Gouvernement peut-il prendre pour que les autorités départementales de l’État veillent au respect de la procédure afin que ces femmes et ces hommes, qui expriment depuis longtemps leurs difficultés et leur désarroi, puissent à la fois connaître le véritable but – les limites – de cette opération et se voir appliquer les meilleures conditions d’indemnisation auxquelles ils ont naturellement droit ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre du logement et de l'égalité des territoires. Monsieur le sénateur Christian Cambon, la zone d’aménagement concerté d’Ivry Confluences dont vous parlez, située au sein du périmètre de l’opération d’intérêt national Orly-Rungis-Seine Amont, revêt un enjeu très fort de développement dans le Val-de-Marne, à travers la restructuration d’un quartier de 145 hectares, essentiellement composé de friches industrielles figées depuis des décennies, pour répondre à un très important besoin en logements dans le secteur.
L’enjeu est de développer dans ce quartier géographiquement contraint, entre fleuve et voies ferrées, un projet mixte et équilibré.
Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur, sur l’opportunité d’une telle opération. La construction de plus de 5 000 logements dans cette ZAC répond à un besoin fortement exprimé par le Gouvernement dans une ville qui jouxte Paris et dont les atouts de desserte sont réels.
Une attention particulière est portée au programme résidentiel, qui prévoit une part substantielle de logements sociaux, ainsi qu’au phasage de sa réalisation, afin de ne pas compromettre les objectifs de mixité sociale définis dans le programme local de l’habitat, ou PLH.
Monsieur le sénateur, pour répondre aux craintes que vous exprimez quant à l’information et au relogement des populations qui habitaient ce secteur, je tiens à vous préciser que l’ensemble des aspects programmation et relogement ont fait l’objet d’efforts particuliers de concertation et de communication de la part tant de la ville que de l’aménageur.
En outre, concernant le relogement ou la relocalisation des populations existantes, la ville d’Ivry-sur-Seine et l’aménageur ont mis en place une maîtrise d’ouvrage urbaine et sociale pour le relogement des propriétaires occupants et des locataires.
Plus précisément, cette action s’est traduite par le réinvestissement de quatorze propriétaires-occupants dans des opérations neuves construites sur la ZAC ; huit dossiers sont en cours d’instruction. De plus, le relogement de vingt-deux locataires chez les bailleurs sociaux présents sur ce territoire a déjà été assuré.
Il convient aussi de noter que les expropriations dans la ZAC sont phasées afin de permettre aux personnes faisant l’objet d’un relogement de bénéficier en partie des programmes en cours de construction.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, je confirme que l’intérêt des populations et des entreprises locales est bien pris en compte et que le Gouvernement est particulièrement attentif à la situation des habitants et aux préoccupations légitimes de ces derniers. Nous continuerons à suivre particulièrement ce dossier.
M. le président. La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Madame la ministre, je note un point positif dans votre réponse, puisque vous réaffirmez l’intérêt du Gouvernement et soulignez l’attention qu’il va porter au déroulement de cette opération.
Néanmoins, je ne peux que rappeler à nouveau la réalité vécue sur le terrain : les gens ne disposent pas du niveau d’information que vos services vous ont rapporté.
Ce que je souhaite, c’est que l’État, par l’intermédiaire du préfet, rappelle à l’organisme aménageur les règles très précises en matière d’information.
Par ailleurs, vous n’avez pas abordé le problème de l’indemnisation en matière immobilière. Il est absolument impossible, pour ne pas dire scandaleux, que l’on propose une indemnisation de 2 000 euros le mètre carré quand les prix sont parfois de deux à trois fois supérieurs. Là aussi, le Gouvernement, qui met en avant des préoccupations sociales tout à fait légitimes, doit faire en sorte que ces mêmes préoccupations prennent corps sur le terrain. Les personnes concernées sont non pas des opposants, contrairement à ce que certains prétendent, mais simplement des gens modestes, qui veulent faire valoir leur intérêt et protéger le patrimoine que constituent ces petites propriétés
Je compte donc sur vous, madame la ministre. Croyez-moi, nous serons très vigilants. Nous continuerons à observer cette opération avec attention et à être aux côtés des populations, qui ne se sentent pas toujours comprises.
activité postale dans le département des hauts-de-seine
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, auteur de la question n° 806, adressée à M. le ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique.
M. André Gattolin. Ma question porte sur la situation de l’activité postale dans le département des Hauts-de-Seine.
Depuis le 29 janvier dernier, soit depuis près de six mois, des postiers du département des Hauts-de-Seine sont en grève. À l’origine, ce mouvement était axé sur le non-renouvellement du contrat d’insertion d’une factrice. Depuis, son objet est devenu plus global : il porte désormais sur la précarisation des facteurs.
Les revendications actuelles des grévistes sont les suivantes : versement d’une prime de vie chère, fin des emplois précaires et des tâches supplémentaires et arrêt des réorganisations aboutissant à la suppression d’emplois.
Le nombre de facteurs en grève est estimé à une centaine. Même si la direction de La Poste estime que ce mouvement est « ultraminoritaire », cette grève a néanmoins des conséquences importantes tant sur la vie personnelle des personnels en grève que sur la distribution du courrier – et donc sur la vie des citoyens et des entreprises – puisque, selon les grévistes, il y aurait des milliers de plis en attente d’être distribués.
Le contrat d’entreprise 2013-2017, signé le 1er juillet 2013 entre l’État et La Poste, précise les engagements en matière de responsabilité sociale de l’entreprise. Y sont mentionnées les attentes des salariés de La Poste à l’égard de leur entreprise. Ces derniers ont exprimé « une demande de sens et de dialogue sur l’évolution de leur entreprise et de leur travail » ; ils sont également « en attente d’un management de proximité attentif ».
De même, La Poste a signé un accord-cadre avec quatre organisations syndicales couvrant l’ensemble du champ de la relation sociale.
Aussi, au regard de l’importance de ces documents et du rôle d’actionnaire de l’État au sein du groupe La Poste, je vous demande, madame la secrétaire d’État, de m’indiquer quelles mesures vous comptez prendre pour qu’une sortie de conflit acceptable pour tous puisse être obtenue au plus vite.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Carole Delga, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, du redressement productif et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur André Gattolin, les volumes du courrier ont baissé de 22 % entre 2008 et 2013.
Le contrat d’entreprise 2013-2017 a permis de confirmer l’attachement de l’État et de l’entreprise à ces missions et à la qualité de la mise en œuvre du service universel postal.
Le Gouvernement est bien sûr attentif à la préservation de la qualité de vie au travail au sein de l’entreprise. Ainsi, à la demande d’Arnaud Montebourg, ministre chargé des postes, le contrat d’entreprise 2013-2017 comprend un volet portant sur les engagements citoyens de La Poste, tout particulièrement dans le domaine de la responsabilité sociale.
Lors de l’adoption, en janvier dernier, du plan stratégique 2014-2020, le président-directeur général a annoncé la mise en négociation d’un « pacte social », appelé à prendre le relais de l’accord-cadre de janvier 2013 sur la qualité de vie au travail, sur la mise en œuvre des mesures d’effet immédiat, telles que l’embauche de 15 000 personnes en CDI – pour lutter contre la précarité – et sur l’amélioration de la concertation sociale avant les réorganisations.
L’État veillera bien entendu à ce que les conclusions du pacte social soient adaptées aux besoins des activités de l’entreprise et à ses missions de service public.
S’agissant plus particulièrement de la situation de l’activité postale et sociale dans les Hauts-de-Seine, le mouvement social, qui a débuté le 29 janvier dernier, a mobilisé environ 70 grévistes par jour sur un total de de 7 000 postiers travaillant dans les Hauts-de-Seine.
Depuis le début du conflit, le dialogue social est continu et les représentants SUD Poste 92, qui ont été les seuls à appeler à la grève, ont été reçus en audience par la direction du courrier des Hauts-de-Seine.
Après de nombreuses audiences, près de douze propositions de protocole de sortie de conflit ont été formulées par La Poste. Malheureusement, aucun d’entre eux n’a fait l’objet d’une signature de la part des représentants de SUD Poste 92. De ce fait, les mesures proposées ne peuvent être engagées.
Enfin, certaines demandes du syndicat SUD Poste 92, telles que la mise en œuvre différée de la réorganisation de l’établissement de Rueil, non réorganisé depuis quinze ans, sont susceptibles d’avoir des conséquences très délicates en termes de créations futures d’emplois. Elles vont en effet à l’encontre des orientations stratégiques de La Poste, dans un contexte de mutation.
Dans ces conditions, les projets d’adaptation sont absolument nécessaires afin d’offrir un avenir durable à tous les postiers.
C’est la raison pour laquelle l’État engage La Poste à poursuivre le dialogue avec l’ensemble des organisations syndicales, afin non seulement de trouver une issue au conflit dans l’intérêt commun des clients et des postiers, mais aussi de réaliser la nécessaire adaptation de ses missions.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d’État.
« Il faut savoir terminer une grève dès que satisfaction a été obtenue ». C’est là un principe de bon sens. Certes, d’aucuns trouveront peut-être bizarre qu’un écologiste cite Maurice Thorez… (Sourires.) Toujours est-il que les conditions d’application de ce principe ne sont malheureusement pas encore réunies dans le conflit opposant les postiers grévistes des Hauts-de-Seine à leur direction. Sachez que je le regrette.
Je suis d’accord avec vous, certaines demandes des grévistes peuvent paraître extrêmes par rapport à la nécessaire réorganisation de la distribution du courrier, due à l’érosion du volume traité par La Poste.
Cependant, il nous faut trouver un moyen de sortir d’un conflit qui dure depuis plus de 160 jours et qui a cristallisé bien des peurs, en faisant en sorte que personne ne perde totalement la face.
Le changement se gère par le dialogue et non par la prise de sanctions disciplinaires.
La réflexion menée dans d’autres départements autour du concept de « facteur de demain », devant faire preuve de polyvalence, peut constituer une piste. Après avoir été testée en Seine-et-Marne, cette expérimentation ne pourrait-elle pas se développer dans les Hauts-de-Seine ?
Vous avez raison, le point de cristallisation majeur est la disparition ou la suppression d’emplois. Visiblement, les syndicats, même le plus impliqué dans cette affaire, préfèrent une polyvalence des tâches à des suppressions de poste.
Peut-être s’agit-il d’une piste à suivre afin de sortir de ce conflit ? Les habitants de Rueil-Malmaison, ville que vous avez citée, mais aussi ceux de Courbevoie ou de la Garenne-Colombe ont le droit de recevoir leur courrier tous les jours et non deux fois par semaine, comme c’est le cas actuellement.
difficultés rencontrées par certaines communes du fait du gel du fngir
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, auteur de la question n° 818, adressée à M. le ministre des finances et des comptes publics.
M. Jean-Claude Lenoir. Ma question porte sur un sujet assez technique et je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de vous faire le porte-parole des services de Bercy pour y répondre.
Le Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR, a été mis en place dans le cadre de la réforme de la taxe professionnelle. Certaines communes y cotisent, d’autres reçoivent ses versements.
Un problème très précis se pose pour les communes qui, depuis la réforme de 2010, ont intégré une intercommunalité. La cotisation au FNGIR étant figée au niveau établi pour l’année 2010, ces communes se voient privées d’une partie de leurs ressources, ce qui les place dans une grande difficulté. J’en ai même recensé certaines, au-delà de mon seul département, qui sont placées sous surveillance par la chambre régionale des comptes dont elles dépendent.
Un second problème avait été relevé par Roland Ries l’année dernière. Lors d’une séance de questions orales au Gouvernement, il avait posé à ce propos une excellente question, que je me permets de citer. Notre collègue affirmait alors : « La part départementale de la taxe d’habitation […] a été transférée du département au bloc communal. […] En revanche, les communes isolées ne faisant pas encore partie d’un EPCI à cette date percevaient alors l’intégralité du taux départemental de la taxe d’habitation et subissaient, parallèlement, un prélèvement au titre du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR. Par la suite, l’adhésion de ces communes isolées à un EPCI […] n’a pas été accompagnée d’une révision du mécanisme de compensation de la réforme des finances locales […]. Dès lors, les habitants […] sont contraints de supporter deux fois la part départementale de la taxe d’habitation. En effet, le taux de la taxe d’habitation appliqué à ces contribuables se décompose en un taux communal, qui inclut la totalité du taux départemental, et un taux intercommunal, qui inclut une fraction du taux départemental. »
Roland Ries avait reçu une réponse extrêmement aimable de la part de la secrétaire d’État chargée de la décentralisation, qui représentait le ministre en charge de ces questions ; mais le problème n’est cependant toujours pas réglé. Or voilà plusieurs années que ce mécanisme a été mis en place, et les difficultés qu’il pose place ces communes – souvent de petite taille, parfois de taille moyenne – dans une situation impossible à gérer.
J’attends donc avec beaucoup d’intérêt votre réponse, madame la secrétaire d’État.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Carole Delga, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, du redressement productif et du numérique, chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur, vous avez bien voulu appeler l’attention du ministre des finances et des comptes publics sur la situation des communes qui, comme la loi le leur permet, ont choisi de réduire leur taux de la taxe d’habitation sans diminuer dans la même proportion leur taux de cotisation foncière des entreprises, lors de leur rattachement à un établissement public de coopération intercommunale, ou EPCI, à fiscalité additionnelle.
Vous regrettez que ces communes continuent, le cas échéant, de supporter un prélèvement identique au titre du Fonds national de garantie individuelle des ressources, le FNGIR.
Les garanties de ressources mises en place dans le cadre de la réforme de la fiscalité directe locale, consécutive à la suppression de la taxe professionnelle, ont eu pour objet d’assurer aux collectivités territoriales un niveau de ressources après réforme assez proche de celui qui la précédait.
S’agissant plus particulièrement du FNGIR, les prélèvements et les reversements s’établissent de façon que, au sein d’une même catégorie de collectivités, la somme des reversements soit égale à la somme des prélèvements. Il ne serait donc pas justifié que la politique de taux des communes qui choisissent de les diminuer influe sur les ressources des communes bénéficiaires de ce Fonds. Plus généralement, l’ajustement permanent des garanties de ressources serait source d’instabilité pour les collectivités.
Par ailleurs, l’adhésion d’une commune à un EPCI entraîne un transfert de compétences. En conséquence, le besoin de financement de la commune diminue normalement de manière corrélative. L’incidence de cette opération sur les finances communales doit donc être relativisé. Ayant moins de charges à honorer, la fiscalité de ces communes peut être moins élevée, ce qui peut expliquer la baisse du taux de la taxe d’habitation.
Par ailleurs, les communes, à l’occasion de leur rattachement à un EPCI à fiscalité additionnelle, peuvent, conformément à l’article 37 de la troisième loi de finances rectificative pour 2012, mettre le prélèvement au titre du FNGIR à la charge de l’EPCI, avec l’accord de ce dernier, notamment si elles diminuent leur taux de taxe d’habitation.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
M. Jean-Claude Lenoir. Je vous remercie pour ces précisions, madame la secrétaire d’État.
Je me permets de compléter la question que je vous ai posée voilà un instant. Les communes ayant adhéré à une intercommunalité à compter de 2010 ne sont pas les seules concernées par ce problème ; les communes ayant fait le choix de diminuer leur taux, parfois membres d’une communauté de communes, le sont aussi.
Cela étant, les deux problèmes évoqués se posent toujours.
Le premier a trait à la double imposition – une « double peine », pour ainsi dire – que cette situation crée, la part départementale étant payée deux fois par les contribuables de ces communes. Je souhaiterais que les services de Bercy s’intéressent avec beaucoup d’attention à ce problème, particulièrement pénalisant pour les contribuables de ces communes.
Le second problème a trait au gel du prélèvement pour le FNGIR. Pour les communes ayant adhéré à une communauté de communes, vous affirmez, madame la secrétaire d’État, qu’il appartiendrait à l’EPCI à fiscalité additionnelle de répartir les sommes concernées.
Le problème, c’est que les fonctionnaires chargés de la gestion de ces dossiers – les représentants de la Direction générale des finances publiques dans nos départements – prétendent que cela n’est pas possible, sauf pour les communautés de communes à taxe professionnelle unique, ou TPU. (Mme la secrétaire d’État fait un signe de dénégation.)
Je n’ai pas besoin de vous dire, madame la secrétaire d’État, que, entre le point de vue exprimé par un membre du Gouvernement et celui d’un fonctionnaire, j’attache beaucoup plus d’importance au premier ! Vous affirmez – et vos propos figureront au Journal officiel – que c’est possible ; c’est donc une avancée qui justifiait, madame la secrétaire d’État, que nous nous retrouvions au Sénat, après nous être connus à l’Assemblée nationale.
associations d’aide aux victimes d’infractions et de médiation pénale
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, auteur de la question n° 784, adressée à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
M. Yannick Vaugrenard. Avant toute chose, je tiens, madame la garde des sceaux, à vous exprimer mon soutien le plus vif face aux accusations proférées à votre encontre par l’ancien Président de la République, aujourd’hui mis en examen. Je suis convaincu que les propos tenus par l’ancien chef de l’État, remettant en cause, d’une certaine manière, l’indépendance de la justice, sont condamnés, toutes tendances politiques confondues, par la majorité des membres de la Haute Assemblée.
M. Éric Bocquet. Très bien !
M. Yannick Vaugrenard. Je souhaite vous interroger sur le financement des associations d’aide aux victimes.
Je tiens à revenir, d’abord, sur l’historique de cette question. En juillet 2012, je vous avais écrit, madame la garde des sceaux, afin de vous interroger sur la situation financière de ces associations et sur les aides consenties par le ministère de la justice. Au mois d’août de la même année, vous m’indiquiez avoir demandé à vos services de procéder à l’examen de ce dossier dans les meilleurs délais. N’ayant reçu aucune réponse depuis lors, je m’adresse directement à vous aujourd’hui.
Les associations d’aide aux victimes sont présentes sur tout le territoire et sont fédérées par l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation, l’INAVEM. Vous le savez, leurs actions sont fondamentales pour les victimes ; ces associations assurent une mission tout à fait complémentaire des missions de la police et de la justice. La plupart d’entre elles ont d’ailleurs une permanence dans les commissariats, afin d’apporter une aide psychologique aux victimes d’infractions.
Aujourd’hui, les baisses successives des subventions accordées mettent en péril leur avenir. C’est le cas, en particulier, pour l’association Prévenir et Réparer, compétente dans le ressort du tribunal de grande instance de Saint-Nazaire, en Loire-Atlantique. Mais le problème, vous l’aurez compris, est global. Les missions d’aide, de médiation et d’administration de ces associations sont menacées par le manque de moyens.
Je sais que le Gouvernement a placé la justice au cœur de ses priorités, et je m’en félicite. Le financement des associations d’aide aux victimes en constitue, d’une certaine manière, le bras armé. C’est pourquoi je souhaite savoir, madame la garde des sceaux, quelles mesures vous envisagez de prendre pour leur permettre de continuer à exercer leurs missions d’intérêt général dans les meilleures conditions.
Par ailleurs, je souhaiterais connaître votre position sur la proposition, pour moi tout à fait pertinente, de l’INAVEM, relative à l’instauration d’une amende pénale infligée aux auteurs d’infractions, dont le produit serait affecté aux associations dont nous parlons. Cette disposition est actuellement en vigueur au Québec et semble y donner satisfaction, notamment parce qu’elle n’affecte pas le budget de l’État.
Si les amendes pénales étaient augmentées de 1,5 %, les auteurs d’infractions participeraient au financement des services d’information juridique et de soutien psycho-social, qui sont offerts gratuitement aux victimes. Je souhaiterais donc avoir votre point de vue sur cette proposition, madame la garde des sceaux, et vous remercie de l’attention que vous voudrez bien lui apporter.
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, je vous remercie pour vos mots de soutien extrêmement justes, auxquels, au-delà des rangs de la majorité, doivent normalement s’associer tous ceux qui sont soucieux du bon fonctionnement de l’institution judiciaire.
Vous m’interrogez sur la politique du Gouvernement en matière d’aide aux victimes, entre autres actions précises. Tout d’abord, alors que, sous le précédent quinquennat, on a sans arrêt entendu parler des victimes, le budget consacré à ces dernières a baissé pendant quatre années consécutives.
J’ai donc pris la décision, dès notre première année de responsabilité budgétaire, c’est-à-dire pour 2013, d’augmenter de 25,8 % le budget de l’aide aux victimes. Cette année encore, en 2014, il a connu une hausse de 7 %. Ce budget est donc passé de 10 millions d’euros à notre arrivée au Gouvernement à 13,8 millions d’euros aujourd’hui.
Par ailleurs, monsieur le sénateur, j’ai eu le souci d’ouvrir des bureaux d’aide aux victimes dans tous les tribunaux de grande instance. Pour la seule année 2013, cent ont été ouverts ou consolidés, alors qu’il n’en existait que cinquante auparavant. À la fin du premier semestre 2014, notre objectif d’un bureau d’aide aux victimes dans chacun des tribunaux de grande instance sera atteint.
En outre, le Gouvernement s’est engagé sur le quatrième plan de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes. Dans ce cadre, nous avons dédié une enveloppe supplémentaire de 1,4 million d’euros au soutien aux associations locales intervenant dans l’aide aux victimes. Cette enveloppe a été transmise aux cours d’appel, les chefs de juridiction devant décider de l’attribution de cette dotation aux associations locales, pour subventionner leurs projets.
Ces interventions ne sont pas exclusives d’autres financements ou d’autres instruments de l’État. J’appelle ainsi votre attention sur le Fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD, dont 75 % du budget était consacré à la vidéosurveillance lors de notre arrivée aux responsabilités. Nous avons inversé le ratio, pour favoriser la présence et l’intervention humaines. En 2014, dans le cadre des trois programmes d’actions de la stratégie nationale de prévention de la délinquance, le FIPD contribuera donc essentiellement au financement des interventions humaines, dont pourront profiter les associations locales.
J’en viens aux charges qui résultent des missions judiciaires confiées à ces associations, comme l’aide aux victimes, la médiation pénale ou l’administration ad hoc. Ces charges relèvent de l’enveloppe dédiée aux frais de justice, dont les tarifs sont déterminés par le code de procédure pénale.
Néanmoins, portant une attention particulière aux victimes, j’ai demandé à l’administration d’être vigilante sur le règlement de ces frais par les régies de juridiction ou par les services administratifs régionaux des cours d’appel.
Par ailleurs, j’ai demandé à l’administration de mettre en œuvre un plan d’actions – il est en place depuis plus d’un an désormais –, afin de faciliter le règlement des frais par le regroupement des missions, la simplification du circuit de dépense et le raccourcissement des délais.
Pour répondre à votre dernière question, j’indique que le projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines a institué une majoration de l’amende prononcée par des juridictions répressives.
Enfin, vous indiquez m’avoir écrit, monsieur le sénateur. Si les associations de votre département connaissent des problèmes particuliers, n’hésitez pas à alerter directement l’administration, qui assure une vigilance continue sur ces sujets. Vous pouvez, pour ce faire, passer par l’intermédiaire de mes deux conseillers parlementaires.
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard.
M. Yannick Vaugrenard. Madame la garde des sceaux, je vous remercie de cette réponse très complète.
Vous l’avez souligné, le budget de l’aide aux victimes a augmenté de 25 % alors qu’il avait diminué au cours des années précédentes. Il était, me semble-t-il, utile de le rappeler.
Je salue également la hausse des dotations en faveur des bureaux d’aide aux victimes et la revalorisation, à hauteur de 1,4 million d’euros, des crédits aux associations.
J’avais eu connaissance d’un amendement déposé quant à un dispositif inspiré de la pratique en vigueur au Québec, qui a fait ses preuves.
Vous nous avez annoncé trois bonnes nouvelles. La première concerne les associations, qui effectuent un travail considérable et jouent un rôle essentiel pour le fonctionnement de notre justice et, plus généralement, de notre démocratie. La deuxième se rapporte à l’Institut national d’aide aux victimes et de médiation, qui regroupe l’ensemble de ces associations ; c’est un encouragement à leur égard dont je vous remercie, d’autant qu’elles travaillent dans des conditions parfois difficiles. Et la troisième s’adresse directement aux victimes.
Je me permets en conséquence de vous adresser trois remerciements. (Mme la garde des sceaux sourit.)
défense de la langue française et conditions d'un développement harmonieux de la diversité linguistique
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, auteur de la question n° 824, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.
M. Éric Bocquet. Madame la ministre, dans quelques semaines, ce sera le vingtième anniversaire de l’adoption de la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française. Chacun s’en souvient, ce texte s’appuyait sur une disposition introduite en 1992 dans la Constitution, à l’article 2 : « La langue de la République est le français. »
Le décret d’application du 3 juillet 1996 a mis en place un dispositif d’enrichissement de la langue française. Ses articles 11 et 12 imposent l’usage des termes en français dans les services et établissements publics de l’État.
Ce vingtième anniversaire peut être l’occasion d’un point d’étape sur la loi de 1994, dont Jacques Toubon, l’un de vos prédécesseurs, avait été à l’origine.
Depuis plusieurs années, chacun peut faire le constat d’une accélération de l’évolution dans l’emploi d’un vocabulaire nouveau, essentiellement d’origine anglo-saxonne. La mondialisation économique et l’essor des nouvelles technologies y ont également grandement contribué.
Le débat n’a donc rien de superficiel ou d’anecdotique. L’évolution de notre langue est aussi le marqueur d’une évolution d’un certain mode de pensée, ce que d’aucuns appellent parfois la « pensée unique », elle-même révélatrice d’un système économique que certains souhaiteraient également unique. Les mots sont bien les outils et les véhicules de l’expression d’une pensée.
L’enjeu n’est donc pas seulement linguistique ou défensif ; il est aussi fondamentalement politique, au sens le plus noble du terme. Il s’agit non pas d’engager une guerre linguistique, mais bien de créer les conditions d’un développement harmonieux et mutuellement enrichissant de la diversité linguistique dans nos sociétés.
Je souhaite connaître vos réflexions sur ce sujet, madame la ministre. Pourriez-vous également nous présenter les éventuelles initiatives en cours ou à venir pour répondre au défi de la défense et de la promotion de la langue française ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, vous appelez mon attention sur le sens et l’ambition de la politique, certes interministérielle mais d’abord pilotée par le ministère de la culture, en faveur de la langue française et de la diversité linguistique.
Comme vous le rappelez à juste titre, la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française est une grande loi. D’ailleurs, la date symbolique du 4 août n’a pas été choisie au hasard : la maîtrise de la langue, c’est véritablement l’abolition des privilèges ! Donner à tous nos concitoyens les outils de maîtrise de la langue française, c’est leur permettre d’accéder à l’égalité.
La défense et la promotion de la langue française s’inscrivent dans une perspective de valorisation de la diversité culturelle et linguistique dont notre pays est porteur. On a longtemps considéré que le français s’opposait aux langues régionales, aux langues de France. Aujourd'hui, par la politique culturelle que je mène, j’entends bien montrer que valorisation de la diversité linguistique et défense et promotion de la langue française sont parfaitement conciliables.
J’espère pouvoir répondre à vos interrogations sur les orientations et actions.
La loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française est un élément essentiel de notre pacte républicain. C'est la raison pour laquelle j’ai souhaité, avec Catherine Tasca, mettre à profit le vingtième anniversaire de son adoption pour organiser le 13 octobre prochain au Sénat une réflexion sur la portée réelle de ce texte, sur son rôle au regard de nos solidarités francophones et sur sa pertinence dans un contexte d’internationalisation des échanges et de bouleversement dans les conditions de transmission des savoirs.
Vous le savez, il y a eu un débat sur l’enseignement en langue anglaise dans certaines de nos universités et grandes écoles pour des élèves étrangers issus de pays non francophones. À mon sens, compte tenu des garanties qui ont été apportées, notamment sur le fait qu’une telle démarche s’inscrivait dans un processus d’apprentissage du français, la possibilité d’offrir à ces étudiants des cours en anglais à leur arrivée en France, en tout cas au début, doit être assurée. Cela fait partie, vous l’avez souligné, d’une politique ouverte et dynamique pour promouvoir l’enseignement de la langue française et sa diffusion partout dans le monde.
Par ailleurs, il existe un comité de terminologie, dans lequel l’Académie française et nos partenaires francophones jouent un rôle très actif. Ce dispositif interministériel nous permet d’enrichir la langue en permanence.
Il est indispensable de pouvoir décrire toutes les réalités techniques ou sociologiques du monde contemporain, ainsi que les évolutions sociétales. La stratégie d’influence de la France repose aussi sur sa capacité à représenter le monde contemporain et donc à en nommer les réalités. Ainsi, dans nombre de domaines scientifiques et techniques, nous avons des termes français précis et correctement définis qui permettent de maintenir notre langue en état d’exercice et d’en faire le vecteur privilégié de la transmission et du partage des savoirs.
La pluralité linguistique est constitutive de notre pays ; vous y êtes attaché.
J’ai souhaité conduire une réflexion pour définir une politique publique en faveur des langues régionales. Plusieurs des conclusions formulées l’année dernière par le comité consultatif que j’avais mis en place ont d’ores et déjà été mises en œuvre.
J’ai ainsi publié un code des langues de France qui permet de regrouper et d’organiser, un peu sur le modèle des codes Dalloz, l’ensemble des textes législatifs et réglementaires assurant la présence de ces langues dans la société, que ce soit dans l’enseignement, dans les médias ou dans la justice. Il s’agit là d’une avancée notable dans la reconnaissance des langues qui font la France.
Le 31 mars dernier, j’ai signé et adressé à l’ensemble des directeurs de mon ministère et aux principaux responsables d’institutions culturelles une circulaire relative à la valorisation des langues de France. Un principe de non-discrimination y est posé de manière très nette : il faut appliquer aux projets en langues régionales les dispositifs de droit commun, notamment s’agissant du soutien financier – soutien financier à la création, par exemple –, en vigueur pour les projets en langue française. Cela répond à une exigence d’égalité et de démocratie culturelle.
À travers ces différentes mesures – et je n’en citerai pas d’autres pour ne pas allonger mon propos –, il s’agit pour le Gouvernement tout entier de créer les conditions d’un développement harmonieux de la diversité linguistique dans notre pays.
Une vigilance constante est nécessaire pour veiller à l’application du principe constitutionnel qui fait du français la langue de la République, mais nous devons également donner à cette dernière les moyens d’accueillir et de valoriser son patrimoine linguistique riche et vivant.
Comme je l’avais indiqué devant l’Assemble nationale au mois de janvier dernier, il faut concilier la langue de la République et la République des langues.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse.
Je souhaitais vivement connaître votre appréciation sur le sujet. Les éléments d’information que vous apportez sont tout à fait satisfaisants.
Vous l’avez bien compris, il ne s’agit nullement d’une démarche défensive ; l’enjeu n’est pas d’ériger une ligne Maginot face à l’intrusion des langues étrangères. D’ailleurs, l’apprentissage d’autres langues permet de mieux comprendre la sienne, et les langues s’enrichissent mutuellement.
Le processus est donc permanent. Il s’agit non pas d’arrêter l’histoire de l’évolution, mais d’avoir tout de même en tête des préoccupations que nous sommes très nombreux à partager. Après tout, la Joconde aurait-elle connu le même succès si toutes les couleurs avaient été mélangées pour aboutir à une teinte tout à fait indéfinissable ? (Mme la ministre sourit.)
enseignement de l'informatique
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, auteur de la question n° 748, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Mme Catherine Procaccia. Je remercie Mme la ministre de la culture et de la communication de me répondre à la place de M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Bocquet vient de souligner qu’il ne fallait pas « arrêter l’histoire de l’évolution ». Je partage ce souci. C’est le sens de ma question, qui concerne l’apprentissage de l’informatique et de son langage dans l’enseignement non seulement secondaire, mais également primaire.
Depuis 2012, les élèves des terminales scientifiques peuvent choisir une option « Informatique et sciences du numérique », possibilité qui sera étendue à l’ensemble des classes de terminale à la prochaine rentrée.
L’enseignement de l’informatique a été introduit dans un certain nombre de pays, comme le Royaume-Uni, la Suisse, l’Estonie, la Finlande, Singapour, Israël, d’ailleurs avec beaucoup de succès, ou dans le secondaire aux États-Unis.
L’initiation à la programmation dès le plus jeune âge est préconisée par de nombreux experts. Une approche ludique permet un accès au socle de la logique informatique et de la programmation, stimulant, d’après les spécialistes, une culture transverse et logique.
L’Académie des sciences a très récemment rappelé dans un rapport l’importance d’une formation aux codes et aux langages. Reconnaissons que notre pays est longtemps resté hermétique en la matière ; le déficit d’éducation à l’informatique est réel.
Récemment encore, dans son discours aux États-Unis, lors de l’US French Tech Hub, le Président de la République, François Hollande, a lui-même exprimé sa volonté de donner une impulsion à l’enseignement de la programmation informatique dans nos collèges.
Madame la ministre, pourriez-vous me préciser le calendrier prévu pour la mise en place de telles expérimentations et les critères de choix des établissements ? Le dispositif sera-t-il fondé sur le volontariat, en fonction des académies ?
Au-delà du simple développement de l’usage du numérique dans le milieu scolaire, il est essentiel de favoriser le développement et la compréhension de la science informatique.
Vous-même, M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et Mme la secrétaire d'État chargée du numérique partagez-vous le jugement des spécialistes quant à « l’urgence de ne pas attendre » ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Madame la sénatrice, M. Benoît Hamon, qui participe à la grande conférence sociale, vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Le déploiement du numérique et l’apprentissage de l’informatique à l’école représentent un véritable enjeu pour la réussite des élèves et la lutte contre les discriminations entre les territoires.
L’école doit être actrice de telles évolutions pour accompagner tous les élèves dans leurs apprentissages avec le numérique, par le numérique et au numérique. Il s’agit donc de se saisir du numérique pour refonder l’école.
Actuellement, tous les programmes de l’école et du collège intègrent une composante relative à l’informatique, que ce soit dans les usages ou dans les activités de modélisation.
Dans toutes les séries technologiques au lycée, les élèves sont conduits à une utilisation plus experte des technologies de l’information et de la communication.
Dans la voie professionnelle, l’usage du numérique est pleinement intégré dans l’apprentissage du métier. C’est même une condition nécessaire à l’acquisition des compétences professionnelles indispensables à l’insertion.
Depuis la rentrée scolaire 2012-2013, et dans le cadre de la réforme du lycée, l’informatique fait l’objet d’un enseignement à part entière en classe de terminale de la série scientifique, avec l’option « Informatique et sciences du numérique », ou ISN, qui propose aux élèves une introduction à la science informatique : information numérique, algorithmes, langages, architectures. C’est aussi un enseignement d’ouverture et de découverte qui valorise la créativité, prépare les élèves au monde de demain et permet à ces derniers de mieux s’orienter. Cela s’inscrit dans la lignée de la découverte de l’algorithmique, présente dans les programmes de mathématiques des classes de seconde et de première scientifique.
Depuis la rentrée scolaire 2013-2014, l’académie de Montpellier expérimente l’extension de cette option ISN aux séries économique et sociale, ou ES, et littéraire, ou L, sur la base d’un enseignement adapté aux objectifs de formation de chacune. M. le ministre de l’éducation nationale a demandé une évaluation de l’expérimentation avant d’envisager son éventuelle généralisation.
Au-delà de l’enseignement de l’ISN, le Conseil supérieur des programmes s’est saisi du sujet au moment de l’élaboration du nouveau socle commun de connaissances, de compétences et de culture.
Ce socle, vous le savez, offre un cadre renouvelé pour penser la place de l’informatique au sein de la scolarité obligatoire des élèves. Le numérique, l’informatique et leurs usages occupent une bonne place, puisqu’il est précisé que, en fin de cursus scolaire obligatoire, « l’élève sait que les équipements informatiques utilisent une information codée et il est initié au fonctionnement, au processus et aux règles des langages informatiques ; il est capable de réaliser de petites applications utilisant des algorithmes simples ». Il nous appartient aujourd’hui, par la refonte des programmes à venir, de répondre à cette exigence. Nous examinons les modalités de cette réponse.
Le Gouvernement salue la chance que nous avons de disposer de personnels tout à fait motivés et formés au sein des écoles supérieures du professorat et de l’éducation, les ESPE, pour accompagner la montée en puissance du numérique à l’école. Le ministre de l’éducation nationale veut également mentionner le rôle essentiel de l’École supérieure de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, l’ESENESR, qui a fait le choix d’investir l’ensemble des outils institutionnels de formation à distance pour les enseignants, afin de permettre aux cadres administratifs d’appréhender les dispositifs à destination des personnels.
L’école doit non seulement former les élèves à maîtriser les outils qu’ils utilisent chaque jour dans leurs études et leur vie quotidienne, mais aussi, et surtout, préparer les futurs citoyens à vivre et à travailler dans une société dont l’environnement technologique est amené à évoluer de plus en plus rapidement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Je vous remercie, madame la ministre, de m’avoir lu les éléments d’information qui vous ont été transmis par le ministère de l’éducation nationale. Cependant, cette réponse ne me satisfait pas pleinement. En effet, elle se borne à évoquer de nouveau les quelques expériences existantes et une refondation des programmes qui, en réalité, a lieu tous les ans.
Un rapport d’information de l’Assemblée nationale sur le développement de l’économie numérique française, récemment remis par Mmes Erhel et de La Raudière, préconise un éveil à l’informatique dès l’école primaire. Or, dans la réponse que vous venez de me transmettre, madame la ministre, il est simplement question des classes de terminale scientifique et d’une expérimentation de l’extension de l’option ISN aux classes de terminale des séries ES et L.
La question qui se pose est la suivante : la programmation informatique doit-elle être enseignée uniquement en terminale ? Les enfants ont accès très tôt au numérique. La programmation informatique et l’algorithmique pourraient être abordées par le biais du jeu, et ce dès le plus jeune âge. Avec l’approche retenue par le ministère, je crains que nous ne finissions par prendre autant de retard dans l’apprentissage des bases de l’informatique que dans celui des langues, alors que la maîtrise du langage informatique sera un facteur essentiel de l’employabilité à l’avenir. Au XXIe siècle, l’informatique n’est plus une nouvelle technologie, contrairement à ce que semble penser le ministère de l’éducation nationale. Il importe d’y former nos enfants dès le plus jeune âge. J’espère que les divers rapports et conseils permettront d’inciter le ministère à faire preuve d’un plus grand dynamisme dans ce domaine.
fermeture d'une école maternelle à cahors
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, en remplacement de Mme Éliane Assassi, auteur de la question n° 811, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
M. Éric Bocquet. Mme Assassi, retenue, m’a demandé de la suppléer et vous prie de l’excuser, madame la ministre.
Consulté dans le cadre de l’élaboration de la carte scolaire pour 2014, M. le maire de Cahors, dans le Lot, a proposé, sans concertation avec les parents, la suppression d’un poste d’enseignant à l’école maternelle Henri-Thamier, dans le quartier populaire de Sainte-Valérie, conduisant à la fermeture de cette école. Les parents d’élèves, mobilisés, n’ont eu de cesse de s’élever contre cette décision.
La loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République, que le groupe CRC a votée, comporte de nombreuses dispositions qui plaident en faveur du maintien de cette école maternelle située dans un quartier défavorisé.
Le rapport de l’Assemblée nationale publié le 28 février 2013 à l’occasion de l’examen de ce texte indique que la scolarisation précoce contribue fortement à l’amélioration des trajectoires des élèves issus des milieux défavorisés et préconise de la développer en priorité dans les écoles dont l’environnement social est difficile. Ce rapport a conduit à la modification de l’article L. 113-1 du code de l’éducation, qui précise désormais que « tout enfant doit pouvoir être accueilli, à l’âge de trois ans, dans une école maternelle ou une classe enfantine le plus près possible de son domicile. […] L’accueil des enfants de deux ans est étendu en priorité dans les écoles situées dans un environnement social défavorisé. »
Le quartier où est implantée l’école maternelle Henri-Thamier se trouve précisément dans cette situation. Cela justifie que celle-ci relève d’un contrat urbain de cohésion sociale articulé selon trois objectifs, dont la réussite scolaire.
En supprimant un service public, on met aussi en cause la mixité sociale et culturelle existante – 75 % des familles occupent un logement locatif HLM et 25 % vivent dans des zones pavillonnaires –, au risque de faire de Sainte-Valérie un quartier de relégation.
Rappelons que plus de 50 % des habitants du quartier n’ont pas de moyen de locomotion et qu’il leur sera difficile de rejoindre une école située à plus d’un kilomètre. Cet obstacle constitue un premier pas vers une forme de fracture sociale et, dans certains cas, la déscolarisation.
Quelles actions le Gouvernement compte-t-il engager afin que la loi du 8 juillet 2013 soit appliquée en portant une attention particulière à la scolarisation précoce des enfants dans le quartier de Sainte-Valérie à Cahors ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir excuser M. le ministre de l’éducation nationale, retenu par la grande conférence sociale.
Je vous remercie de souligner les efforts déployés par le Gouvernement pour rétablir l’égalité des chances à l’école et lutter contre l’échec scolaire.
À cet égard, la loi du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République accorde la priorité au premier degré, car la réussite des élèves passe par la maîtrise des premiers apprentissages, notamment celui de la langue.
C’est pourquoi, comme vous le soulignez très justement, il est aujourd’hui primordial de revaloriser le rôle de l’école maternelle et de favoriser la réussite des plus jeunes, notamment dans les secteurs les plus fragiles socialement et économiquement.
C’est tout le sens de la réforme de l’éducation prioritaire que mène Benoît Hamon, avec Najat Vallaud-Belkacem, dans le cadre de la réforme de la politique de la ville. L’objectif est de concentrer les moyens sur les quartiers prioritaires et d’optimiser l’emploi des outils de l’action publique pour restaurer l’égalité républicaine entre les territoires.
Dans ce cadre, la scolarisation des enfants de moins de 3 ans est une priorité que nous nous sommes fixée. Il s’agit de lutter contre les discriminations sociales, culturelles et linguistiques, en faisant de l’école un lieu d’accompagnement de tous les élèves, et d’abord de ceux qui sont le plus en difficulté, vers la réussite.
Cet effort est déjà bien engagé dans le département du Lot, où le taux de scolarisation des enfants de moins de 3 ans est nettement supérieur à la moyenne nationale.
En ce qui concerne le cas précis de la fermeture de l’école maternelle Henri-Thamier, qui fait l’objet de votre question, M. le ministre de l’éducation nationale peut vous apporter les précisions suivantes.
Pour l’année scolaire 2014-2015, la baisse des effectifs prévue dans le département du Lot a conduit à la suppression de quatre postes, dont un dans la ville de Cahors. Dans le souci d’optimiser le redéploiement du réseau scolaire, l’équipe municipale a décidé de procéder à la fermeture de l’école maternelle à classe unique Henri-Thamier.
Cette décision a été le fruit d’une longue concertation, à laquelle la communauté éducative et les parents d’élèves ont été pleinement associés. Les services académiques ont pris les mesures nécessaires pour garantir la continuité des apprentissages. En effet, les vingt-six élèves concernés par cette fermeture de classe seront accueillis au sein de l’école maternelle Jean-Calvet ou de l’école Bellevue, établissements qui se situent tous deux à moins de 750 mètres de l’école Henri-Thamier. Un service de transport scolaire par navettes municipales sera mis en place à la rentrée 2014 pour faciliter les déplacements des plus petits.
Cette décision présente l’avantage d’assurer l’accueil des élèves de moins de 3 ans dans une structure de plus grande importance, où ils seront en contact avec d’autres enfants, tout en prenant en compte la spécificité de leurs besoins, conformément aux recommandations de la circulaire du 18 décembre 2012.
Ainsi, les conditions d’apprentissage des élèves de l’école Henri-Thamier sont préservées, ainsi que l’accueil des enfants de moins de 3 ans. Les enfants du quartier Sainte-Valérie pourront bénéficier de meilleures chances de réussite.
L’objectif qui anime l’action du ministre de l’éducation nationale est de guider l’ensemble de la communauté éducative pour combattre dès le plus jeune âge les inégalités sociales et territoriales, afin de favoriser la réussite de chaque jeune. Ensemble, nous devons faire évoluer l’école vers la réussite de tous. Vous pouvez compter sur le Gouvernement pour défendre cette priorité essentielle de la République.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Je vous remercie, madame la ministre, de m’avoir apporté ces éléments de réponse.
Cette question offre l’occasion de remettre au cœur de notre réflexion l’importance particulière de l’école maternelle. L’acquisition de la maîtrise du langage est une condition déterminante de la réussite future de l’enfant. En effet, selon que le bagage de celui-ci est de 500 mots ou de 2 000 mots à son arrivée à l’école, ses chances en matière d’apprentissage de la lecture et de l’écriture ne sont pas les mêmes ! Il est donc essentiel de maintenir la priorité accordée à la scolarisation précoce.
Notre école maternelle est reconnue en Europe pour son efficacité en matière non seulement de socialisation et de préscolarisation, mais aussi d’acquisition langagière. Pour l’heure, l’école n’est toujours pas parvenue à résorber l’ensemble des inégalités, qui ont même tendance à s’aggraver dans la période difficile que nous traversons. La priorité absolue doit être donnée à l’école maternelle dans la durée.
vote électronique des français de l'étranger
M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, auteur de la question n° 816, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.
Mme Hélène Conway-Mouret. Le 25 mai 2014, 442 conseillers consulaires et près d’une centaine de délégués consulaires ont été élus au suffrage universel direct pour un mandat de six ans. Ces élus de proximité feront vivre la démocratie participative sur les cinq continents au sein de la communauté française qu’ils représentent.
Les électeurs avaient la possibilité de voter dans les consulats, qui s’étaient transformés pour l’occasion en bureaux de vote, par procuration ou par voie électronique. En 2012, ils avaient très largement choisi, pour les élections législatives, la voie électronique, beaucoup d’entre eux vivant à plusieurs milliers de kilomètres d’un consulat. Toutefois, ils avaient été déroutés par certains dysfonctionnements du logiciel de vote Java, dont il fallait installer une version obsolète pour qu’il fonctionne !
À la suite des incidents survenus, le ministère des affaires étrangères, qui a la charge de l’organisation de ces élections, avait fait le bilan des difficultés rencontrées. Il a cependant été décidé de conserver le même système pour les élections des conseillers consulaires. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l’utilisation de ce logiciel a malheureusement privé quelques milliers d’électeurs de la possibilité d’exercer leur droit de vote.
Vendredi dernier, le directeur des Français de l’étranger et de l’administration consulaire a réuni les parlementaires et ses services pour faire le bilan de ces élections consulaires. Un grand nombre de problèmes ont été identifiés.
Madame la secrétaire d’État, le ministère des affaires étrangères – je tiens à saluer l’engagement de son administration, à la fois dans les postes et à Paris, pour l’organisation de ce scrutin – envisage-t-il, pour les prochains scrutins, de s’inspirer des leçons tirées des problèmes rencontrés par les électeurs afin de simplifier le processus et de permettre ainsi à tous ceux qui souhaitent voter par voie électronique de pouvoir le faire ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question, qui me permet de saluer la réforme de la représentation politique des Français de l’étranger que vous avez menée.
Cette réforme s’est traduite notamment par la mise en place de conseils consulaires, permettant d’installer la démocratie de proximité pour nos concitoyens établis à l’étranger.
Ce scrutin était inédit pour le ministère des affaires étrangères et du développement international, qui organisait pour la première fois une élection dans 129 circonscriptions électorales. Près de 3 000 Françaises et Français se sont présentés, ce qui témoigne de la vitalité démocratique de notre communauté expatriée.
Ce scrutin est original, puisque nos compatriotes ont eu la possibilité de voter par internet. Instaurer cette possibilité était, nous le savons, une nécessité : si nous avons ouvert 482 bureaux de vote dans le monde, nombre de nos compatriotes résident encore loin des urnes.
Ainsi, 80 000 de nos concitoyens ont voté par internet pour ces élections consulaires, ce qui représente 43 % des votants et 7 % des inscrits sur les listes électorales.
Quelques milliers d’électeurs n’auraient pu cependant finaliser leur opération de vote électronique, malgré l’assistance téléphonique mise en place. Ils conservaient néanmoins la possibilité de voter à l’urne.
Le directeur des Français de l’étranger et de l’administration consulaire a réuni voilà quelques jours l’ensemble des parlementaires représentant les Français de l’étranger pour tirer le bilan de ces élections.
Les difficultés liées à la mise à jour du logiciel Java sur l’ordinateur de l’électeur ont été évoquées. Ce logiciel est un prérequis de sécurité du système de vote actuel. Je peux vous annoncer qu’une nouvelle solution de vote électronique sera développée, qui permettra de se passer du logiciel en question.
Les Français de l’étranger sont pionniers en ce domaine. Notre objectif est de simplifier le vote par internet afin de favoriser leur expression démocratique, tout en garantissant la sincérité et le secret de cette modalité de vote.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret.
Mme Hélène Conway-Mouret. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Dans la perspective des scrutins à venir, notamment ceux de 2017 pour l’élection des députés des Français de l’étranger et de 2020 pour le renouvellement des conseils consulaires, on peut imaginer qu’un plus grand nombre de familles seront équipées d’ordinateurs et que le vote électronique ne peut que se développer. On a constaté une baisse de la participation en raison des problèmes techniques rencontrés lors des élections consulaires. Je me félicite que vous ayez pu me donner l’assurance que ces problèmes seront pris en compte, que des solutions seront mises en place et que les scrutins à venir se dérouleront convenablement.
temps partiel
M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet, auteur de la question n° 805, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social.
M. Henri Tandonnet. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les dispositions relatives au temps partiel prévues à l’article 12 de la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, s’agissant plus particulièrement des entreprises de moins de dix salariés de la branche du commerce de détail en fruits et légumes, épicerie et crémerie.
Ces entreprises, notamment les vendeurs de primeurs exerçant principalement sur les marchés et ayant un statut non sédentaire, n’ont pas les ressources matérielles et humaines suffisantes pour faire bénéficier leurs salariés à temps partiel d’une durée de travail de vingt-quatre heures au minimum par semaine.
Les cas de dérogation prévus par la loi ne suffisent pas. Les formalités liées à la dérogation sur demande du salarié ou au refus de l’employeur d’augmenter la durée du travail pour les contrats déjà en cours au 1er janvier 2014 ajoutent encore aux lourdeurs administratives qui entravent le fonctionnement de ces entreprises. Ces dernières n’ont, en majorité, que leur comptable pour faire office de service des ressources humaines, et ces dispositions engendrent une insécurité juridique.
Les commerçants se trouvent donc contraints de ne pas embaucher, de supprimer des emplois ou d’augmenter la charge de travail de leurs salariés ou même la leur, déjà très importante. Ils subissent, en parallèle, la concurrence toujours plus forte des supermarchés. Ils demandent notamment un cadre législatif et réglementaire adapté à leurs spécificités de commerçants, y compris non sédentaires.
Je souhaiterais donc savoir, madame la secrétaire d’État, si le Gouvernement compte revenir sur la durée minimale obligatoire de vingt-quatre heures de travail par semaine et adapter la législation relative au temps partiel au cas spécifique des commerçants de la branche, notamment des vendeurs de primeurs sur les marchés, lesquels ne peuvent pas, du fait du nombre et des horaires des marchés, offrir un emploi pour vingt-quatre heures par semaine.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur Tandonnet, François Rebsamen vous prie de bien vouloir excuser son absence. Il est, comme vous le savez, retenu ce jour par la grande conférence sociale pour l’emploi.
Vous attirez l’attention du Gouvernement sur les difficultés d’application, dans la branche du commerce de détail en fruits et légumes, épicerie et crèmerie, de la règle des vingt-quatre heures de travail hebdomadaires instituée par la loi du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.
Cette règle, vous le savez, a été instaurée par la volonté des partenaires sociaux qui ont signé l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013. Il s’agit là d’un progrès social important, en particulier pour les femmes, qui subissent plus que toute autre catégorie de salariés le temps partiel. Celui-ci ne doit plus être une variable d’ajustement.
La loi a prévu, pour prendre en compte certaines situations spécifiques, deux voies de dérogation possibles, assorties à chaque fois de contreparties : une dérogation individuelle, à la demande du salarié qui souhaite travailler moins de vingt-quatre heures par semaine ; des dérogations collectives si un accord de branche prévoit d’abaisser le seuil minimal.
Plusieurs branches ont réussi à négocier et sont parvenues à un accord : ainsi, au 1er juillet 2014, vingt-deux accords ont été signés, certains dans des branches d’une importance significative ; je pense, par exemple, à la restauration rapide. Près d’un tiers de l’ensemble des salariés à temps partiel – hors particuliers employeurs, qui ne sont pas soumis à la règle des vingt-quatre heures –, soit près d’un million de personnes, sont ainsi couverts par un accord de branche, le taux atteignant 63 % pour les salariés des branches les plus concernées, qui étaient tenues d’ouvrir des négociations.
Les négociations se poursuivent dans un très grand nombre de branches, et j’ai bon espoir qu’elles aboutissent. L’équilibre visé au travers de la loi relative à la sécurisation de l’emploi sera ainsi atteint.
Vous faites état, pour une branche spécifique, de difficultés particulières. Le Gouvernement ne s’engagera pas dans la voie de dérogations sectorielles, car cela serait contraire à l’objectif de créer une règle générale de vingt-quatre heures applicable dans tous les secteurs, à l’accord national interprofessionnel, à la position du Gouvernement, qui a écarté tous les amendements allant en ce sens pendant les débats parlementaires sur la loi relative à la sécurisation de l’emploi, et ce serait ouvrir une boîte de Pandore.
Pour autant, les solutions existent pour prendre en compte les spécificités de telle ou telle branche : la dérogation individuelle, bien sûr, ou des idées constructives qui ont été trouvées dans certaines branches pour parvenir à un accord collectif. Bon nombre de branches sont parvenues à un accord alors même que de fortes spécificités les empêchent d’appliquer la règle des vingt-quatre heures.
En revanche, il est vrai que le cas des salariés embauchés avant le 1er janvier 2014 pour moins de vingt-quatre heures de travail hebdomadaires et qui souhaiteraient passer à vingt-quatre heures pose une difficulté. Le Gouvernement, qui en est conscient, fera très prochainement une proposition pour sécuriser cette situation particulière. Il faut en effet, pour ces salariés, prévoir une priorité d’accès à un emploi de vingt-quatre heures hebdomadaires, mais sans automaticité, et simplifier la procédure, pour l’heure trop lourde, comme vous le soulignez à juste titre.
M. le président. La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse.
Sur 4 millions de travailleurs à temps partiel, 2 millions travaillent moins de vingt-quatre heures par semaine.
La règle des vingt-quatre heures est tout de même très contraignante. Si sa mise en œuvre peut se concevoir au sein des grandes entreprises, elle crée des difficultés pour de nombreuses petites entreprises de secteurs très variés, par exemple pour les vendeurs de primeurs sur les marchés.
J’ai récemment été interpellé, sur le terrain, par une association de services aux personnes qui ne peut embaucher un travailleur à temps partiel, faute de pouvoir, à l’heure actuelle, lui assurer cette durée minimale de vingt-quatre heures de travail hebdomadaires. Or le travail à temps partiel permet souvent une première embauche.
Je pense donc qu’il faudrait apporter des aménagements à cette règle, qui est trop contraignante et ne correspond pas à la réalité du monde du travail. Sa portée est trop générale, à l’heure où le chômage s’aggrave.
aquaculture
M. le président. La parole est à M. Charles Revet, auteur de la question n° 795, adressée à M. le secrétaire d'État chargé des transports, de la mer et de la pêche.
M. Charles Revet. Madame la secrétaire d’État, ma question a trait à la place de l’aquaculture sur le littoral et, plus largement, sur le territoire national.
L’aquaculture française stagne depuis 1995. La France a été en pointe dans les années soixante-dix, mais ses productions n’évoluent pas ; pis, elles régressent. La conchyliculture produit 163 000 tonnes de coquillages, la pisciculture seulement 6 000 tonnes de poisson, mais 200 millions d’œufs embryonnaires ou de larves, dont 66 % sont exportés, ce qui est positif pour notre commerce extérieur, dont vous avez la charge. Au total, 3 000 entreprises emploient 18 000 salariés, pour un chiffre d’affaires de 550 millions d’euros.
La France, qui possède la deuxième plus grande zone économique maritime au monde, juste derrière les États-Unis d’Amérique, ne couvre, selon les statistiques, ses besoins en poissons et crustacés qu’à hauteur de 15 %. Cette situation est inacceptable, mais, a contrario, pourrait offrir des possibilités de développement pour peu que des contraintes souvent spécifiques à la France n’aboutissent pas à bloquer les projets et à dissuader les pêcheurs et aquaculteurs de s’engager.
Une disposition de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche a visé à l’établissement de schémas tout au long du littoral français, faisant ressortir les espaces à protéger, les espaces où pourraient s’établir des productions aquacoles ou autres activités économiques et, éventuellement, des espaces à classement ultérieur, afin de ne pas hypothéquer l’avenir des terrains concernés. Cela s’est traduit par une modification du code de l’environnement ; je souhaiterais que vous me précisiez quelle application a été faite des dispositifs des articles L. 219-6-1 et L. 923-1-1 du code rural et de la pêche maritime.
L’algoculture, dont les débouchés, tels les cosmétiques ou la biomasse, sont nombreux, est un gisement à développer.
L’aquaculture contribue fortement à la sécurité alimentaire. En 2030, selon un rapport de la Banque mondiale, plus de 60 % du poisson consommé proviendra de l’aquaculture. La Chine en produira 38 % et en consommera 37 %.
Il importe, pour éviter les concentrations au Vietnam, en Chine et au Chili, dommageables pour l’environnement, de diversifier les lieux de production, mais également d’augmenter la sécurité alimentaire en termes de production de qualité et de couverture des besoins.
La France assure 10 % des captures de poissons. Elle dispose du second domaine maritime au monde en termes de zone économique. La pêche française représente 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires et 93 000 emplois. La richesse halieutique s’épuisant, il est nécessaire de stimuler une économie de substitution.
Je souhaiterais donc connaître les actions conduites en faveur d’un développement significatif de l’aquaculture, afin de faire de notre façade maritime un vivier halieutique de substitution, générateur d’activité économique et contribuant à l’équilibre alimentaire des populations.
La consultation citoyenne relative au « mieux consommer » vient de s’achever. Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous m’indiquer quels en sont les enseignements et quelles sont les perspectives pour l’aquaculture, l’algoculture, la conchyliculture, la pisciculture ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, vous avez appelé l’attention de Frédéric Cuvillier, qui vous prie de bien vouloir excuser son absence, sur la place de l’aquaculture sur le littoral français.
En matière de production conchylicole, la France se classe au deuxième rang des pays de l’Union européenne, avec 160 000 tonnes en 2012, et au premier pour la production ostréicole, avec 80 000 tonnes la même année. En revanche, notre production piscicole marine est très en retrait par rapport à celle d’autres pays, comme l’Espagne ou la Grèce.
La France partage la volonté de soutenir fortement le développement de l’aquaculture affichée par la Commission européenne, qui vise un doublement de la production d’ici à 2020, afin de réduire la pression sur la ressource halieutique et les importations en provenance de pays tiers.
L’augmentation de la production aquacole, en particulier de la production piscicole marine, sera donc l’un des objectifs majeurs du plan national stratégique de développement de l’aquaculture en cours d’élaboration.
Ce plan prévoit des actions de soutien articulées selon quatre axes.
Premièrement, il s’agit d’améliorer l’efficacité de l’action administrative, de la simplifier de manière notamment à réduire les délais d’instruction des autorisations d’installation.
Deuxièmement, il est prévu de planifier l’utilisation des espaces marins, en particulier en prenant appui sur les schémas régionaux de développement de l’aquaculture marine, initiative qui mérite d’être menée à son terme sur l’ensemble des façades – cinq sont finalisés, deux autres sont en phase de finalisation – avant de pouvoir être approfondie.
Troisièmement, il importe d’assurer le soutien à la compétitivité des entreprises, notamment en orientant les aides du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, le FEAMP, sur la période 2014-2020.
Enfin, il faut exploiter les avantages de l’aquaculture française, en ce qu’elle apporte des garanties sur la qualité et sur la protection de l’environnement : garanties sur l’origine, sur la connaissance de l’impact réel sur l’environnement, etc.
L’algoculture est actuellement peu développée, mais elle présente, vous l’avez rappelé, un fort potentiel et fait donc partie intégrante de la stratégie française pour le développement des aquacultures.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, de l’entière mobilisation de Frédéric Cuvillier en faveur du développement de cette filière économique.
M. le président. La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie des réponses que vous m’apportez au nom de M. Cuvillier, que j’avais d’ailleurs déjà interpellé sur ce sujet.
Ce dossier vous concerne directement dans la mesure où la France importe 85 % des poissons et crustacés qu’elle consomme, ce qui induit un déficit pour notre balance commerciale, entre autres conséquences.
J’avais suggéré, lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, que soient établis des schémas territoriaux pour déterminer les endroits où il serait possible d’implanter des fermes aquacoles. Au lieu de cela, on continue de classer tous les terrains. On me dit que le fait qu’un terrain soit classé n’empêche pas la création d’une activité aquacole, mais, vous le savez, cela prend alors beaucoup plus de temps, ce qui décourage les entrepreneurs.
Les schémas départementaux prévus en 2009 devaient avoir été établis un an après ; nous les attendons toujours. Il conviendrait que vous nous aidiez à faire respecter les décisions du Parlement : le rôle de l’administration est aussi de les appliquer. J’y reviendrai si nécessaire, mais je tenais à attirer votre attention sur cet aspect des choses.
contrat de plan interrégional relatif à la vallée de la seine
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteur de la question n° 799, transmise à Mme la ministre du logement et de l'égalité des territoires.
Mme Catherine Morin-Desailly. J’attire l’attention de Mme la ministre de la décentralisation, de la réforme de l’État et de la fonction publique sur le CPIER, le contrat de plan interrégional État-régions pour la vallée de la Seine.
Le 22 novembre 2012, le ministre des transports annonçait la volonté de l’État de revoir la gouvernance de l’axe Seine, ainsi que celle de conclure des contrats avec les territoires concernés, afin de définir les priorités et les moyens financiers qui pourraient être accordés à un projet d’aménagement du territoire à grande échelle autour de l’axe Seine. Cette annonce s’inscrivait donc dans la perspective de la poursuite de la politique que le gouvernement de François Fillon avait amorcée.
Cependant, il aura ensuite fallu attendre six mois avant que ne soit nommé un délégué interministériel, par décret du 24 avril 2013. C’était là faire table rase de tout le travail réalisé, notamment du rapport qui avait été rédigé par le commissaire au développement de l’axe Seine en février 2012.
L’État a refusé de manière inexplicable, par la suite, la création d’un pôle métropolitain de l’Estuaire qui aurait été un atout et une force motrice pour le développement de l’axe Seine, au mépris du travail réalisé et du consensus qui s’était dégagé parmi les élus locaux participants.
Je rappelle que les conseils économiques, sociaux et environnementaux, les CESER, des trois régions d’Île-de-France, de Basse-Normandie et de Haute-Normandie et les chambres de commerce et d’industrie attendent des signes forts quant à la ligne nouvelle Paris-Normandie et, plus globalement, à la vallée de la Seine. Ils ont expressément demandé des « moyens exceptionnels et proportionnés à l’ampleur de l’ambition ».
Par ailleurs, les chambres de commerce et d’industrie des trois régions se sont mises en ordre de marche au sein de Paris-Seine-Normandie. Pour la CCI du Havre, ce sont pas moins de 700 millions d’euros qui vont être investis sur la base de la charte « Compétences totalement Estuaire », afin d’attirer les entreprises. Ainsi, les acteurs dits de la société civile ont commencé à avancer ensemble.
C’est pourquoi, malgré le dynamisme et la motivation des acteurs consulaires, malgré l’impulsion donnée, depuis 2009, au développement de l’axe Seine, je tiens à vous faire part de ma grande inquiétude de ne toujours rien voir venir. Tous les acteurs s’interrogent. Les assemblées régionales, pourtant concernées au premier chef, n’ont reçu aucune information sur la négociation du futur contrat et du schéma stratégique pour l’aménagement et le développement de la vallée de la Seine.
Aussi, je demande à Mme la ministre du logement et de l’égalité des territoires de bien vouloir m’éclairer sur l’avancée des négociations relatives au CPIER et les engagements financiers de l’État dans ce dossier, afin que tous les acteurs locaux continuent à se mobiliser autour de cette indispensable ambition qu’est la vallée de la Seine.
Dans cette période troublée, à la suite des annonces successives, quelquefois contradictoires, du Gouvernement relatives à la décentralisation, il est réellement nécessaire de donner enfin des gages et des éléments précis à tous ceux qui agissent sur le terrain pour donner vie à l’axe Seine.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Madame la sénatrice, la nomination, le 24 avril 2013, d’un délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine, le préfet François Philizot, assisté, sur le plan local, par un préfet coordonnateur, qui est celui de la région Haute-Normandie, illustre la reconnaissance par le Gouvernement de la spécificité de cet espace.
Placé auprès du Premier ministre, le délégué interministériel développe une méthodologie participative afin d’élaborer de façon collégiale entre l’État et les trois régions – Haute-Normandie, Basse-Normandie et Île-de-France – un schéma stratégique d’aménagement et de développement de la vallée de la Seine à l’horizon 2030. Ce schéma a vocation à être décliné dès son approbation en un contrat de plan interrégional État-régions pour la période 2015-2020.
Le premier comité directeur réunissant l’État et les régions, installé le 3 juillet 2013, a permis d’arrêter le cadre général d’élaboration du schéma stratégique, ainsi que ses orientations principales.
L’ensemble des éléments issus du précédent commissariat à la vallée de la Seine ont été utilisés dans le travail de préparation du schéma stratégique. Ce dernier a fait l’objet de nombreuses réunions selon trois thématiques qui ont constitué la matière d’autant de groupes de travail : déplacements, réseaux et flux ; filières et développement économique ; gestion de l’espace et excellence environnementale.
Ces groupes de travail ont associé les partenaires indispensables : départements et principales agglomérations, milieux socioéconomiques, établissements publics de l’État, CESER, Paris-Seine-Normandie.
Ces travaux ont permis aux services de l’État et des régions d’avancer rapidement. La validation finale du schéma stratégique est prévue en septembre 2014 et donnera lieu à la réunion de l’ensemble des partenaires associés à la démarche.
Parallèlement, le délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine et l’ensemble des partenaires locaux travaillent de concert à la traduction opérationnelle de ce schéma dans le CPIER pour la vallée de la Seine.
Des réunions, tant avec les services de l’État en région qu’avec les ministères concernés, ont d’ores et déjà permis d’avancer dans l’identification des actions prioritaires. Quant aux engagements financiers de l’État, ils sont soumis au même calendrier que l’ensemble de la procédure contractuelle, dans le cadre annoncé par le Premier ministre en juin dernier.
La ligne nouvelle Paris-Normandie est, dans cette perspective, l’une des infrastructures prévues. Le comité de pilotage, présidé par le délégué interministériel au développement de la vallée de la Seine, a approuvé, le 29 janvier dernier, le calendrier de travail permettant de déboucher sur la déclaration d’utilité publique à la fin de la décennie. Lors de sa deuxième réunion, le 2 juillet 2014, il a précisé certaines options importantes.
La méthodologie participative adoptée et l’étroite coopération entre l’État et les régions sont autant d’éléments déterminants du succès de cette démarche.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la secrétaire d’État, j’ai pris bonne note des différents éléments que vous avez portés à ma connaissance quant au calendrier des diverses réunions et à la réaffirmation de l’ambition pour l’axe Seine à la suite de la nomination du préfet Philizot.
Vous avez évoqué une démarche participative. Permettez-moi de vous dire qu’il est fort regrettable que, contrairement à ce qui s’était passé précédemment, les parlementaires, notamment de Haute-Normandie et de Basse-Normandie, qui se mobilisent sur ces dossiers – je parle sous le contrôle de mon collègue Charles Revet, qui intervient régulièrement sur les questions portuaires et ferroviaires – n’y aient pas été associés localement,…
M. Charles Revet. C’est vrai !
Mme Catherine Morin-Desailly. … d’autant qu’ils sont souvent aussi des élus locaux. Pour ma part, j’étais encore très récemment conseillère régionale. Visiblement, la communication n’est pas complètement au rendez-vous !
En tout cas, les acteurs pensent que le processus manque de dynamisme et de réactivité ; les questions que j’ai évoquées demeurent.
Concernant le pôle métropolitain de l’Estuaire, je ne comprends pas pourquoi l’État a mis un veto à ce qui n’était, pour l’ouest du département, que le projet miroir du pôle métropolitain CREA de l’agglomération de Rouen-Elbeuf-Austreberthe.
M. Fabius, qui fut longtemps le président de l’agglomération rouennaise, a été le moteur de la création de ce pôle métropolitain de l’Estuaire, rendue possible par la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. Pourquoi ses amis politiques se sont-ils opposés à la création d’un pôle métropolitain à l’ouest du département, projet totalement pertinent qui avait fait l’objet d’un travail immense de tous les élus locaux, de tous bords politiques, depuis des années ? Je tenais à souligner cette incohérence.
réforme des collectivités territoriales
M. le président. La parole est à M. Charles Revet, en remplacement de M. Jean-François Humbert, auteur de la question n° 821, adressée à Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique.
M. Charles Revet. C’est avec plaisir que je supplée mon collègue Jean-François Humbert, qui n’a pu être présent ce matin.
Avant de relayer son propos, j’indique que je partage entièrement les préoccupations exprimées à l’instant par Mme Morin-Desailly, puisque ma collectivité devait faire partie de ce pôle métropolitain. Nous n’avons pas compris pour quelles raisons ce projet n’a pu aboutir. La question de ma collègue était donc tout à fait judicieuse et d’actualité.
M. Humbert souhaite attirer l’attention de Mme la ministre de la décentralisation et de la fonction publique sur la réforme des collectivités territoriales.
Si une clarification des compétences, avec une rationalisation de notre « millefeuille territorial », est attendue par bon nombre de nos élus et de nos concitoyens, il convient néanmoins de s’interroger sur la méthode employée par le Gouvernement.
En effet, les objectifs de cette réforme doivent être de gagner en lisibilité et en efficacité, au travers d’une clarification des compétences des différents échelons territoriaux, et de permettre, dans un contexte de crise, de mieux gérer les dépenses publiques en réalisant des économies.
Depuis plusieurs années maintenant, l’impérieuse nécessité de réformer est acceptée par tous, mais la question est de savoir dans quelles conditions le faire.
En 2009 et en 2012, M. Humbert a souhaité consulter l’ensemble des 594 maires du département du Doubs pour connaître leur position sur la réforme des collectivités territoriales et leurs attentes, enquête dont les résultats ont été adressés au ministère en temps voulu.
Majoritairement, les élus ont exprimé le souhait d’une clarification des compétences, mais demeurent attachés au maintien du conseil général pour assurer la compétence en matière sociale et au maintien de la région pour exercer sa compétence exclusive en matière économique. Concernant l’intercommunalité, ils ne souhaitent pas le transfert de davantage de compétences aux groupements intercommunaux existants.
Si les objectifs de cette réforme sont essentiels, il importe d’écouter les élus, de ne pas négliger la méthode, de ne pas se précipiter et de ne pas mettre une telle démarche au service de fins électorales. Cette réforme structurelle doit être travaillée dans la concertation, en tenant compte des réalités et de la diversité de chaque territoire.
M. Humbert demande au Gouvernement s’il est prêt à s’engager dans cette voie.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Fleur Pellerin, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargée du commerce extérieur, de la promotion du tourisme et des Français de l'étranger. Monsieur le sénateur, consulter les élus, mais aussi les agents du service public, les acteurs de la société civile, les citoyens, prendre en compte la diversité des territoires, c’est une véritable méthode depuis le début du quinquennat. Souvenons-nous en particulier des états généraux de la démocratie territoriale, organisés sur l’initiative du Sénat.
La consultation est donc notre méthode. Une fois cette consultation close, les parlementaires consultent à leur tour. C’est la raison pour laquelle, tout au long de son examen, le texte du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles a évolué. C’est la concertation qui a fait naître, au Sénat précisément, les pôles ruraux d’équilibre. C’est aussi la concertation qui a conduit à la dépénalisation du stationnement payant, que la commission du développement durable du Sénat a soutenue tout au long du débat. C’est enfin la concertation qui a permis d’affiner le dispositif des conférences territoriales de l’action publique.
Pour l’élaboration du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, nous n’avons pas procédé autrement. Nous avons ainsi consulté l’Association des régions de France et toutes les associations d’élus. Nous avons aussi entamé un tour de France des régions, et la Franche-Comté, que M. Humbert a présidée, a fait l’objet d’un des tout premiers déplacements.
Néanmoins, l’intérêt général ne saurait se définir comme l’addition des intérêts particuliers : nous avons le devoir de proposer une vision. Cette vision rejoint celle de M. Humbert sur l’attribution de la compétence économique à la région, ainsi que sur la nécessité d’assurer le meilleur exercice possible de la compétence sociale.
S’agissant précisément des départements, si l’on peut comprendre l’attachement de beaucoup à une institution qui n’a pas démérité, cela ne signifie pas pour autant que les structures doivent être immuables. Dans les métropoles, par exemple, les synergies entre l’exercice de la compétence sociale et celui des compétences en matière de logement sont évidentes.
Enfin, il est bon de consulter les maires, car ils sont les interlocuteurs privilégiés de tous nos concitoyens. Eux-mêmes savent que la survie de la commune, à court et moyen terme, passe par une intégration renforcée dans l’intercommunalité.
En réalité, cette réforme, loin de n’être qu’une réforme électorale ou institutionnelle, est bien une réforme d’ampleur, une réforme profondément progressiste, une réforme attendue par les Français, qui la comprennent bien comme un atout majeur pour le développement de notre pays. Elle est la réponse directe à l’une de leurs préoccupations essentielles, eux qui doutent aujourd’hui de la capacité de la puissance publique à assurer le redressement de notre pays, mais réclament, en même temps, des services publics plus accessibles et plus efficaces.
En fait, la conférence territoriale de l’action publique, créée par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles de janvier dernier, permettra justement d’adapter l’exercice concret des compétences aux réalités de chaque région. Ce sont les élus qui feront la décentralisation de demain et qui mettront en œuvre concrètement les changements institutionnels, ainsi que la répartition des compétences sur le terrain.
L’alternative est simple : soit nous allons vite, soit nous laissons les conservatismes reprendre le dessus. Le Gouvernement, Manuel Valls et Marylise Lebranchu ont fait le choix d’aller vite, pour ne pas laisser s’enliser le débat. Bernard Cazeneuve est venu ici, dès la semaine dernière, discuter le premier volet de la réforme, et, à l’automne, nous débattrons du second.
Le Premier ministre le rappelait la semaine dernière, il a invité le Sénat à faire preuve d’imagination, notamment pour inventer la solution la plus juste et la plus efficace pour l’avenir des territoires ruraux comme pour celui des conseils généraux.
M. le président. La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Madame la secrétaire d’État, il y a quelques jours seulement, le Sénat a rejeté le texte présenté par le Gouvernement. Vous avez parlé de concertation, mais de nombreuses interrogations demeurent, et le projet du Gouvernement ne correspondait manifestement pas aux attentes de la majorité des sénateurs.
Il faut aller plus loin. Je voudrais attirer votre attention et celle de notre ancien collègue André Vallini, ici présent, sur le besoin de proximité.
Pour en avoir rencontré beaucoup sur le terrain, je peux vous dire que les maires sont inquiets. Le devenir des petites communes, notamment au regard des répartitions de recettes, les préoccupe tout particulièrement, ainsi que la suppression des départements. En effet, le département est le bon échelon pour répondre aux besoins dans un certain nombre de domaines. Si nous souscrivons au principe de la création de grandes régions – mieux dessinées toutefois que dans le projet actuel –, nous estimons qu’il est nécessaire de conserver une dimension de proximité. Avec la disparition des départements, un écart se creusera entre la commune et la région. Cette situation suscite l’inquiétude de beaucoup d’élus, au Sénat comme ailleurs.
élus locaux et périmètres des espaces territoriaux de solidarité et de réciprocité
M. le président. La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, auteur de la question n° 825, adressée à M. le secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale.
Mme Anne Emery-Dumas. Monsieur le secrétaire d'État, les élus locaux font actuellement l’objet d’injonctions multiples, les invitant à revoir les périmètres des espaces territoriaux de solidarité et de réciprocité.
En premier lieu, les préfets, en application de l’article 79 de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ont engagé la consultation avec les syndicats mixtes constitués exclusivement d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, ayant été reconnus comme pays avant l’entrée en vigueur de l’article 51 de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010, afin de les transformer rapidement en pôles d’équilibre territoriaux et ruraux, ou PETR. Ces EPCI disposent d’un délai de trois mois à compter de la notification, par le représentant de l’État dans le département, du projet de transformation pour s’opposer éventuellement à celle-ci.
En second lieu, le projet de réforme territoriale invite dès à présent les élus municipaux et intercommunaux à travailler à des regroupements permettant de dessiner, d’ici au 1er janvier 2017, une carte de l’intercommunalité autour d’espaces comptant au moins 20 000 habitants.
Or, le périmètre des PETR comprenant des EPCI, il apparaît impossible ou, du moins, très difficile de délimiter les premiers sans avoir finalisé le travail sur le périmètre des futurs EPCI.
Devant cette complexité, de nombreux élus communaux et intercommunaux, en particulier ceux qui n’ont accédé à leurs fonctions qu’à l’issue du scrutin municipal de mars 2014, demandent à disposer d’un peu de temps pour travailler en profondeur sur ces questions, et s’approprier les problématiques de solidarité à travers les projets de développement, d’aménagement du territoire et de fiscalité locale. Dès lors, monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous envisager de surseoir aux contraintes de délai imposées par l’article 79 de la loi du 27 janvier 2014 ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Madame la sénatrice, vous souhaitez connaître les intentions du Gouvernement s’agissant de la mise en place des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux créés par la loi du 27 janvier 2014.
Le PETR, qui constitue une nouvelle catégorie d’établissement public, a été créé afin de doter les territoires ruraux, périurbains et les petites agglomérations d’un outil d’organisation et de développement leur permettant de mutualiser leurs moyens pour mener en commun des projets structurants. Cette nouvelle structure intercommunale est caractérisée par une organisation et un fonctionnement souples, permettant à ses membres d’organiser les modalités de leur coopération de manière concertée et solidaire.
Vous me faites part de la crainte que vous inspire le délai fixé par le législateur pour la transformation en PETR, par le représentant de l’État, de tous les syndicats mixtes composés exclusivement d’établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre et reconnus comme pays avant l’entrée en vigueur de la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales.
En effet, le II de l’article 79 de la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », prévoit que, dans un délai de six mois à compter de sa promulgation, le préfet informe les organes délibérants des syndicats concernés et leurs membres du projet de transformation. Ces derniers disposent alors d’un délai de trois mois pour s’opposer à la transformation. À défaut d’opposition dans ce délai, la transformation du syndicat mixte de pays en PETR est décidée par arrêté du préfet du département où est situé le siège du syndicat.
Vous évoquez la difficile articulation entre, d’une part, la mise en place des pôles d’équilibre territoriaux et ruraux issus de la transformation des syndicats mixtes de pays avant la fin de l’année 2014, et, d’autre part, la volonté de constituer, à l’horizon 2017, des EPCI à fiscalité propre regroupant au moins 20 000 habitants, comme prévu dans le projet de loi qu’examinera le Parlement à l’automne.
Vous demandez, en conséquence, le report du délai fixé par la loi du 27 janvier 2014. Je tiens à vous préciser que le périmètre des PETR issus de la transformation de syndicats mixtes de pays n’est pas figé dans le temps : aucune disposition de la loi ne fait obstacle à des modifications de périmètre au cours de la vie de la structure, afin de prendre en compte, au sein du pôle, les évolutions de périmètres d’EPCI à fiscalité propre pouvant notamment intervenir à la suite de la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale. En fait, la création des PETR s’inscrit dans une vaste réorganisation du territoire, qui doit rester souple et ne constituer en rien une contrainte pour les collectivités composant cette structure.
Ainsi, si certains projets de transformation de syndicats mixtes de pays en PETR n’aboutissent pas à l’issue de la procédure engagée par le préfet dans les conditions prévues par la loi MAPTAM, celle-ci prévoit que d’autres modes de constitution de PETR puissent intervenir ultérieurement : la transformation sur l’initiative des syndicats répondant aux critères fixés par la loi, telle que prévue à l’article L. 5741-4 du code général des collectivités territoriales, mais également la création ex nihilo de PETR sur l’initiative d’EPCI à fiscalité propre souhaitant se regrouper au sein d’un périmètre pertinent et cohérent, résultant d’une concertation menée entre eux.
En conclusion, je résumerai ma réponse de la manière suivante.
Premièrement, la transformation d’un syndicat mixte de pays en PETR d’ici à la fin de l’année 2014 n’est pas automatique : elle peut donner lieu à une opposition du syndicat et, en tout cas, à un dialogue local avec le préfet.
Deuxièmement, si le PETR est créé, son périmètre devra évoluer avec la nouvelle carte des EPCI à fiscalité propre telle qu’envisagée dans le projet de loi que nous examinerons ensemble à l’automne.
Troisièmement, il apparaît possible – voire préférable dans certains cas à déterminer localement – d’attendre la nouvelle carte intercommunale avant de créer un PETR.
M. le président. La parole est à Mme Anne Emery-Dumas.
Mme Anne Emery-Dumas. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je pense que les élus locaux de la Nièvre suivront vos conseils pour la détermination de leur PETR !
difficultés des associations d'aide à domicile
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 813, adressée à Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie.
M. Didier Marie. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur les difficultés rencontrées par les associations d’aide à domicile.
L'État a confié aux départements la charge de financer les prestations sociales correspondant aux risques de dépendance, à savoir, en 2002, l'allocation personnalisée d'autonomie, ou APA, puis, en 2006, la prestation de compensation du handicap.
Le département de la Seine-Maritime voit, depuis plusieurs années, le nombre de personnes concernées par ces prestations croître très régulièrement. Aujourd'hui, le taux de bénéficiaires d’une allocation personnalisée d’autonomie y est bien supérieur à la moyenne nationale, avec 251,4 bénéficiaires pour 1 000 habitants de plus de 75 ans, contre 208,1 au niveau national. Le conseil général accompagne ainsi 28 000 personnes, pour un budget supérieur à 120 millions d’euros. Parmi les quatre-vingt-dix services d’aide à domicile, les associations assurent les trois quarts des interventions au titre de l’APA et sont, de ce fait, les principaux employeurs des 13 000 salariés du secteur.
Comme dans de nombreux départements, plusieurs de ces associations sont en très grande difficulté. Ainsi, l’une d’elles vient d’être placée en liquidation judiciaire, 450 emplois étant menacés. D’autres associations mettent en œuvre des plans de sauvegarde de l’emploi. Parmi celles-ci, l’aide familiale populaire et l’aide à domicile en milieu rural effectuent, chaque année, 1 320 000 heures d’intervention, pour près de 6 580 bénéficiaires, et comptent 2 710 salariés. Ces associations viennent de lancer un SOS au conseil général, qui leur a répondu en adoptant une revalorisation du taux de prise en charge de 38 centimes par heure d’intervention dans le cadre du budget de 2014, ce qui représente une dépense supplémentaire de 2 millions d’euros par an.
La mobilisation du conseil général auprès de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie a abouti au versement d’une aide exceptionnelle de 1,3 million d’euros, et une nouvelle aide de 810 000 euros est attendue par la région. Par ailleurs, le département a approuvé, il y a quelques mois, son schéma départemental d’autonomie, qui vise notamment à contribuer à la structuration, à la modernisation et à la professionnalisation du secteur.
Cependant, le département ne peut régler seul tous les problèmes, et les raisons des difficultés des associations demeurent. On peut citer la saturation du dispositif de l’APA, un grand nombre de bénéficiaires de cette allocation atteignant le plafond fixé dans les plans d’aide, aujourd'hui insuffisamment revalorisés. On peut également citer le développement, à la suite de l’entrée en vigueur de la loi du 6 juillet 2005, de l’offre de services du secteur commercial, qui a projeté les associations dans un univers concurrentiel. Enfin, si elle constitue une véritable avancée pour les salariés, la convention collective de la branche, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, ne s’applique qu’aux seules associations, créant ainsi une distorsion de concurrence importante et inacceptable au bénéfice du secteur commercial.
Ces deux dernières causes ont entraîné, en Seine-Maritime, un transfert d’activité représentant près de 1 million d’euros de recettes depuis le secteur associatif non lucratif vers le secteur commercial.
Le Gouvernement a annoncé que le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement serait soumis prochainement au Parlement. Monsieur le secrétaire d'État, pouvez-vous me préciser le calendrier de cet examen ? En outre, le Gouvernement envisage-t-il d’étendre au secteur marchand toutes les dispositions qui s’imposent désormais aux associations d’aide à domicile ? Enfin, pouvez-vous me confirmer qu’une enveloppe supplémentaire de 810 000 euros sera attribuée à la région et m’indiquer si elle sera prioritairement fléchée vers les associations les plus en difficulté, que j’ai précédemment citées ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Monsieur le sénateur, je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser Mme la secrétaire d’État chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie, retenue par d’autres obligations.
La situation des services d’aide à domicile intervenant auprès des publics fragiles est un dossier prioritaire pour le Gouvernement, qui a d’ores et déjà mobilisé 130 millions d’euros, de 2012 à 2014, pour soutenir ce secteur dans le cadre du Fonds de restructuration des services d’aide à domicile, dont 1,2 million d’euros pour le département de la Seine-Maritime, sans compter les 810 000 euros de l’enveloppe complémentaire prévue en 2014 pour la région Haute-Normandie. L’attribution départementale par le biais des agences régionales de santé est en cours.
Il convient désormais de construire des réponses pérennes, notamment au travers du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement.
Ce texte d’orientation et de programmation, qui a fait l’objet d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs, vise à mobiliser la société autour des enjeux du vieillissement, de la prévention et de la prise en charge de la perte d’autonomie, en s’attachant à répondre à l’attente de nos concitoyens, à savoir, pour résumer, vivre le plus longtemps possible et dans les meilleures conditions à domicile.
Le projet de loi repose sur trois piliers : anticiper le vieillissement, adapter la société et accompagner la perte d’autonomie.
En ce qui concerne le financement, dans le contexte budgétaire difficile que connaît notre pays, la mise en œuvre de cette loi va mobiliser 645 millions d’euros, au travers de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA.
Le volet « anticipation et prévention » sera doté d’une enveloppe de 185 millions d’euros. Le volet « accompagnement » est, quant à lui, doté de 460 millions d’euros, dont 375 millions d’euros pour la revalorisation de l’APA à domicile, qui est une mesure phare, sans oublier les 78 millions d’euros consacrés au droit au répit pour les aidants. Pendant la phase de montée en charge, 84 millions d’euros seront dégagés pour financer le volet « adaptation » de la loi, notamment pour l’aménagement des logements. Ainsi, la CASA sera bien affectée à 100 % à la mise en application de cette loi, dès son entrée en vigueur.
Le Gouvernement est en effet déterminé à aller vite : le texte a été adopté en conseil des ministres le 3 juin 2014 ; les travaux de la commission des affaires sociales ont débuté dans la foulée et une première lecture à l’Assemblée nationale pourrait avoir lieu à la rentrée.
Ce projet de loi apporte des réponses concrètes aux gestionnaires de services à domicile.
Au travers notamment de la réforme importante de l’APA à domicile, l’accessibilité financière des prestations sera largement améliorée : plus d’heures seront assurées, avec des plans d’aides diversifiés et une participation financière des usagers réduite. L’ensemble des bénéficiaires en profitera, l’effort étant accentué pour les personnes en perte d’autonomie importante et les foyers aux revenus modestes. En résumé, ce texte apportera une meilleure réponse aux attentes et aux besoins des personnes et plus de justice sociale.
Toutefois, si une meilleure solvabilisation des personnes aidées permettra de développer l’activité, elle ne résoudra pas toutes les difficultés des services d’aide à domicile que vous avez évoquées, monsieur le sénateur. Il sera nécessaire d’aller plus loin pour restructurer, moderniser et professionnaliser ces services, qui sont des maillons essentiels du dispositif de maintien à domicile.
Concernant l’harmonisation des conventions collectives du secteur, un grand pas a été franchi avec la signature, le 21 mai 2010, de la convention collective nationale de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile, cela après dix ans de négociations. Cette convention, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2012, remplace quatre textes : la convention collective nationale de l’UNADMR, l’Union nationale des associations d’aide à domicile en milieu rural, la convention collective des organismes d’aide ou de maintien à domicile, la convention collective nationale concernant les personnels des organismes de travailleuses familiales et les accords collectifs UNACCSS –Union nationale des associations coordinatrices de soins et santé. Cette convention collective, majoritaire dans le secteur privé non lucratif, regroupe 220 000 salariés.
Le secteur privé lucratif a également avancé, avec la signature, le 3 avril 2014, d’un arrêté portant extension de la convention collective nationale des entreprises de services à la personne, qui a été publié le 30 avril 2014. Les entreprises ont jusqu’au 1er novembre 2014 pour se mettre en conformité avec ce texte.
Le mouvement d’harmonisation des cadres d’emploi du secteur du domicile est, vous le voyez, notable. La nécessaire poursuite de cette tendance dépend des négociations entre les partenaires sociaux, dont le Gouvernement ne doute pas qu’elle sera fructueuse.
M. le président. La parole est à M. Didier Marie.
M. Didier Marie. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse et de l’intérêt que le Gouvernement porte aux associations d’aide à domicile, ainsi qu’aux personnes âgées et handicapées qui bénéficient de leurs prestations.
Mme la secrétaire d'État chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie, Laurence Rossignol, qui a annoncé un plan d’action pour le secteur de l’aide à domicile en septembre prochain, a promis « des avancées structurelles, des simplifications, une meilleure régulation de l’offre et une intégration des services à domicile, afin de mieux évaluer le juste coût des prestations nécessitant un plus juste financement ». Nous serons bien évidemment très attentifs à cette refondation.
3
Commission mixte paritaire
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la demande de constitution d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.
Il sera procédé à la nomination des représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire selon les modalités prévues par l’article 12 du règlement.
Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures trente, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
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Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’individualisation des peines et à la prévention de la récidive est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
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Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour un rappel au règlement.
M. Éric Bocquet. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36 de notre règlement relatif à l’organisation de nos travaux.
Monsieur le secrétaire d’État, hier soir, lors de la discussion d’un amendement de notre groupe tendant à modifier le barème de l’impôt sur le revenu, vous avez indiqué que cette mesure, si elle était adoptée, aurait un impact négatif de 2,7 milliards d’euros sur le solde général du budget de l’État. Une telle affirmation, présentée de manière un peu lapidaire à mon goût, appelle quelques éclaircissements.
Nous souhaitons fortement connaître les éléments vous ayant permis d’aboutir à cette estimation. Faute de quoi, nous aurions l’impression que le Gouvernement détient des informations spécifiques lui permettant de disposer d’une sorte d’« avantage comparatif » au détriment de la représentation nationale. Nous vous saurions donc gré de nous fournir, après consultation des services de Bercy, une note documentée, précise et détaillée conduisant aux conclusions que vous nous avez communiquées. Je n’ose croire que la justification serait que le barème de l’impôt sur le revenu que visait à instaurer cet amendement aurait eu la particularité d’alléger de manière un peu trop importante l’impôt des plus modestes...
Je serais particulièrement intéressé d’être le destinataire de ce document, qui nous permettrait de juger de l’argumentaire que vous avez opposé à cette proposition d’un barème de l’impôt plus progressif que celui qui est aujourd'hui en vigueur. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. Acte vous est donné de ce rappel au règlement, mon cher collègue.
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Loi de finances rectificative pour 2014
Suite de la discussion et rejet d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2014 (projet n° 671, rapport n° 672).
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen, au sein de la première partie du projet de loi de finances rectificative, des dispositions relatives aux ressources.
PREMIÈRE PARTIE (suite)
CONDITIONS GÉNÉRALES DE L’ÉQUILIBRE FINANCIER
TITRE Ier (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RESSOURCES
RESSOURCES AFFECTÉES
M. le président. Nous poursuivons, au sein du titre Ier de la première partie, l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 1er.
Articles additionnels après l'article 1er (suite)
M. le président. L'amendement n° 150 rectifié, présenté par M. Delahaye et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l'article 219 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2015, le taux normal de l’impôt est fixé à 32 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016, le taux normal de l’impôt est fixé à 31 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017, le taux normal de l’impôt est fixé à 30 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018, le taux normal de l’impôt est fixé à 29 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, le taux normal de l’impôt est fixé à 28 %. » ;
2° Après le premier alinéa du b, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2015, le taux est fixé à 14 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016, le taux est fixé à 13 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2017, le taux est fixé à 12 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018, le taux est fixé à 11 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2019, le taux est fixé à 10 %. »
II. – Après le deuxième alinéa de l’article 235 ter ZAA du même code, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2015, le taux est fixé à 9,7 %.
« Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2016, le taux est fixé à 8,7 %. »
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Pour le groupe UDI-UC, la compétitivité des entreprises doit être au cœur de toute politique économique. C’est une conviction que nous avons depuis longtemps. Nous sommes donc heureux de constater que le Gouvernement la partage : ce principe figure dans le rapport Gallois de novembre 2012 et, surtout, dans le pacte de responsabilité et de solidarité annoncé par le Président de la République, puis par le Premier ministre. Reste que les dispositions visant à conforter cette compétitivité devraient être adoptées le plus vite possible et non pas être décalées dans le temps.
Le projet de loi de finances rectificative pour 2014 prévoit une diminution du taux de l’impôt sur les sociétés à l’horizon de 2017, étalée jusqu’en 2020. Or l’entrée en vigueur de ce dispositif nous paraît beaucoup trop lointaine au regard de la situation de nos entreprises et de notre économie. Il serait souhaitable de commencer dès cette année à diminuer de 1 point par an le taux normal de l’impôt sur les sociétés, actuellement de 33 %, en vue de l’abaisser à 28 %. Pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires de plus de 250 millions d’euros, le taux passerait de 38 % à 28 %, à la suite de la disparition de la surtaxe. En outre, le taux réduit, actuellement fixé à 15 %, serait ramené, in fine, c’est-à-dire au bout des cinq ans, à 10 %.
Ce nouveau calendrier est de nature à provoquer un choc de confiance auprès des entreprises. Je pense non seulement à celles qui sont déjà installées sur notre territoire, mais aussi à celles qui voudraient s’implanter ici. Cette mesure est également très importante en matière de concurrence sur le plan européen.
On me rétorquera sans doute qu’un tel dispositif coûtera de l’argent. Je ne suis pas sûr que ce soit si vrai. Nous avons constaté que les augmentations d’impôts avaient plutôt tendance à faire baisser les recettes, en tout cas à les rendre inférieures à ce que l’on pouvait en attendre. La baisse des taux n’est pas forcément synonyme de baisse des recettes ; au contraire, le dynamisme économique qui résulterait de ce nouveau calendrier pourrait générer des recettes supplémentaires.
Puisque le Gouvernement est convaincu que c’est la direction qu’il faut prendre, pourquoi attendre 2017 ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission a émis un avis défavorable.
M. Charles Revet. Oh ! Pourquoi ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je me plais à rappeler que le Gouvernement a entrepris un travail très important, en examinant dans le détail la situation de la fiscalité dans notre pays, en particulier celle applicable aux entreprises.
Les assises de la fiscalité des entreprises ont conduit, durant trois mois, à plusieurs réunions de travail, à l’issue desquelles, de façon concertée avec les responsables d’entreprises françaises, en particulier le MEDEF, un certain nombre de priorités ont été définies. La première de ces priorités, c’est la baisse de la fiscalité sur la production. C’est dans cet esprit qu’a été décidée la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés, dite C3S, annoncée aujourd'hui.
C’est dans le cadre de cette problématique globale que les acteurs économiques, après un examen attentif, ont estimé que la refonte de l’impôt sur les sociétés ne constituait pas une urgence. Néanmoins, et vous avez raison de le souligner, mon cher collègue, abaisser le taux facial à 28 % est un objectif à atteindre le plus rapidement possible, afin d’arriver, en 2020, à un niveau équivalent à celui de nos concurrents européens.
L’adoption de cet amendement mettrait en péril la trajectoire de réduction des déficits pour 2015-2017, même s’il faut tendre vers ce que vous souhaitez. Un choix collectif a été fait : dans l’immédiat, il faut donner la priorité à la baisse des impôts sur la production ; ensuite, interviendra la baisse progressive de l’impôt sur les sociétés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Je commencerai par répondre à M. Bocquet, dont je comprends parfaitement l’interrogation. Je suis bien évidemment prêt à lui fournir toutes les données ayant permis à mes services – mon cabinet examine un grand nombre d’amendements formulant des propositions intéressantes – de me communiquer ces estimations ; j’en prends l’engagement ici même.
Le Gouvernement partage l’avis de la commission sur l’amendement n° 150 rectifié. Certes, monsieur Delahaye, vous proposez un calendrier qui vous paraît plus opportun, mais le Gouvernement, après des échanges avec les forces socioéconomiques de ce pays, toutes les organisations syndicales, patronales et salariales, en a choisi un autre : dès 2015, nous supprimerons 1 milliard d’euros au titre de la C3S et 4,5 milliards d’euros au titre des cotisations salariales des employeurs. En 2016, un autre milliard d'euros sera prévu pour la C3S.
La contribution sociale de solidarité des sociétés est assise sur le chiffre d’affaires, ce qui n’est pas la meilleure assiette en termes d’impact sur l’activité économique. C’est d’ailleurs pourquoi elle est assez souvent critiquée. Le Gouvernement a donc décidé de faire disparaître cette contribution en trois ans, ce qui représentera un coût de 6,7 milliards d’euros. J’observe que, pendant deux quinquennats, vous n’avez pas, avec la majorité précédente, engagé cette démarche, ne serait-ce que de façon partielle. Au contraire, y compris à la fin de la dernière législature, un alourdissement de l’impôt sur les sociétés a été décidé.
Aujourd’hui, vous voulez être plus royaliste que le roi et aller plus vite... Le Gouvernement, pour sa part, a choisi un rythme très volontariste – j’ai rappelé les chiffres à maintes reprises depuis le début de ce débat –, qui doit être concilié avec la nécessaire réduction des déficits.
Monsieur le sénateur, vous avez affirmé de façon un peu rapide que les recettes fiscales diminuaient parce que les taux d’imposition avaient augmenté. Ce matin, nous avons publié la situation à fin mai des recettes et des dépenses de l’État. Vous y noterez que la comparaison entre 2013 et 2014 montre une progression des recettes du budget de l’État de 5,4 % et une diminution des dépenses de 1,6 %. Je livre ces chiffres à votre appréciation.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Monsieur le secrétaire d’État, pour répondre à votre remarque sur les deux précédents quinquennats, sachez que je n’ai été élu sénateur qu’en septembre 2011. Dès cette époque, j’ai formulé un certain nombre de critiques sur la façon dont le budget de l’État était géré. Je ne me sens donc pas engagé par ce qui a été fait.
Il a été reproché à la réforme de la taxe professionnelle d’avoir été mal menée. Cet argument vaut également pour le projet de loi relatif à la délimitation des régions. Ce n’est pas parce que vos prédécesseurs ont mal agi qu’il faut les imiter. Il serait temps de changer de méthode !
Vous estimez que l’attitude du Gouvernement est volontariste. Pour ma part, je pense qu’elle ne l’est pas encore suffisamment. Il convient donc d’aller plus loin, comme le préconise le rapport Gallois. Nous avons d’ailleurs fait des propositions en ce sens. Ne mollissons pas !
Renvoyer la baisse de l’impôt sur les sociétés à la période 2017-2020, c’est bien beau, mais c’est prendre des engagements pour après les élections de 2017… Mieux vaudrait les tenir dès maintenant !
Quant aux chiffres donnés en cours d’année, je suis sceptique. Lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative de décembre 2013, il manquait 12 milliards d’euros de recettes alors qu’au printemps on nous annonçait qu’il manquait 4 milliards d’euros dans les caisses de l’État. Je tiendrai compte de ces chiffres le jour où l’on me donnera en milieu d’année des prévisions précises des recettes de l’État pour la fin d’année, comme de nombreuses collectivités territoriales sont capables de le faire.
Je le répète, après de fortes hausses d’impôts, on aurait pu s’attendre à des recettes en forte augmentation. Tel n’a pas été le cas. Voilà pourquoi je pense que baisser les taux n’entraînera pas forcément une diminution des recettes.
Nous devons renforcer l’attractivité des entreprises de notre pays, afin de favoriser l’emploi. C’est notre priorité à tous. Il est donc dommage de reporter cette mesure.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Notre groupe soutiendra cet amendement.
Je rappelle à M. le secrétaire d’État, qui prétend que nous n’avons pas fait grand-chose pour alléger les charges des entreprises, que la réforme de la taxe professionnelle a représenté 8 milliards d’euros d’économies pour les entreprises. Si ce chiffre, emblématique de la contestation ici, a changé, il faut nous le dire !
Par ailleurs, nous avions sérieusement engagé, certes un peu tardivement, une réduction des charges des entreprises grâce à ce qu’il était convenu d’appeler la TVA sociale. Cette taxe aurait permis d’injecter progressivement 14 milliards d’euros dans les entreprises si elle avait été mise en œuvre le 1er octobre 2012.
Aujourd'hui, pour connaître une véritable diminution de leurs charges sociales, les entreprises sont en train de négocier le CICE. Cette mesure commence seulement à apparaître dans leurs comptes. Vous pouvez le nier, monsieur le secrétaire d’État, mais nous savons très bien que les avances qui ont été faites par la BPI se situent autour de 1 milliard d’euros pour l’année 2013. Si, par pur dogmatisme, le Gouvernement n’avait pas supprimé la TVA sociale, il n’aurait pas eu à annoncer des milliers d’emplois en moins ces deux dernières années.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très juste !
M. Francis Delattre. Voilà pour le passé auquel vous nous renvoyez un peu trop systématiquement.
M. Sapin est venu hier dix minutes pour nous tenir un discours sur la compétitivité. Or l’amendement de M. Delahaye va précisément dans ce sens. En outre, il ne devrait pas coûter très cher, puisque, d’après le rapporteur général du budget lui-même, mais nous le savons tous, l’écart entre le taux facial et le taux réel est important. Le taux se situerait plutôt autour de 28 % que de 33 %. Dès lors, pourquoi afficher un taux dissuasif pour d’éventuels investisseurs étrangers ?
Vous nous dites qu’un effort est globalement fait sur les charges réelles des entreprises. Je vous rappelle tout de même que la surtaxe est prolongée de deux ans et que la non-déductibilité fiscale des intérêts d’emprunt des entreprises n’est pas abrogée alors qu’elle est catastrophique pour la rentabilité des entreprises.
L’adoption de cet amendement permettrait à l’État français d’afficher un message à l’intention de tous ceux qui souhaitent investir dans notre pays et qui comparent naturellement nos taux d’imposition à ceux de nos concurrents, notamment au sein de l’Union européenne.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. J’ai bien écouté le plaidoyer de M. Delattre…
M. Francis Delattre. Oh !
M. Richard Yung. … pour le passé, mais essayons d’avoir un débat constructif.
La baisse du taux de l’impôt sur les sociétés est inscrite dans le projet de loi de finances rectificative. Elle est actée ! À cette baisse vient s’ajouter la suppression progressive de la C3S. C’est également une mesure importante.
Le débat porte sur plusieurs aspects.
M. Francis Delattre. Le débat est : peut-on encore attendre ?
M. Richard Yung. Monsieur Delattre, avec vos propositions, on dépasse déjà les 3 milliards d’euros de dépenses supplémentaires. Accélérer le calendrier de la baisse de l’impôt sur les sociétés ajouterait seulement quelques milliards de plus…
M. Francis Delattre. Ce sont des dépenses utiles !
M. Richard Yung. S’il est possible de faire plus vite et mieux, pourquoi pas ? M. le secrétaire d’État pourra peut-être nous éclairer sur ce que coûterait la mesure proposée.
M. Vincent Delahaye. Et sur ce qu’elle rapporterait !
M. Richard Yung. En effet ! Je suis également d’accord avec vous, monsieur Delahaye, pour dire qu’il n’y a pas nécessairement un lien direct entre l’assiette et le taux. On voit bien d’ailleurs que les taux européens se situent entre 25 % et 30 % pour les grands pays – le taux de l’Allemagne est de 30 %– et qu’ils sont évidemment plus faibles pour les petits pays.
Notre réflexion doit également intégrer l’Europe. Ce débat, dont nous avons dit un mot hier, a un peu des allures de ritournelle, mais il est essentiel que nous puissions mettre en place une harmonisation. On pourrait ainsi imaginer un impôt sur les sociétés européen, lequel serait payé une fois par les entreprises ayant des activités multiples sur le territoire de l’Union.
Enfin, les entrepreneurs ne se plaignent pas tellement du taux. Ce qu’ils réclament tous, c’est de la stabilité.
M. Francis Delattre. Depuis deux ans, ils sont gâtés !
M. Richard Yung. Quand ils investissent pour cinq, huit ou dix ans, ils ont besoin de connaître les règles.
Sur le fondement de ces critères, la proposition du Gouvernement me paraît raisonnable.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Abstenons-nous de réécrire l’histoire ou, sinon, n’ayons pas la mémoire sélective.
Vous dites que l’abandon de la taxe professionnelle, laquelle a d’ailleurs été remplacée par une kyrielle de contributions diverses et variées, à tel point que plus personne ne sait ce qu’il paie ni à qui, ni même qui fixe les assiettes et les taux et qui sont les bénéficiaires, aurait permis d’alléger l’impôt des entreprises de 8 milliards d’euros. Mais sur le dos de qui ?
Vous évoquez d’autres mesures, mais vous oubliez de dire comment elles ont été financées. J’ai tout de même observé que nombre de ces allégements étaient financés par de la dette, ce qui n’est pas le cas de l’ensemble des mesures que nous proposons.
Revenons maintenant à la question du taux facial de l’impôt sur les sociétés. J’ai trop de respect pour les conseillers financiers et pour les directeurs financiers des entreprises désireuses d’investir pour penser un seul instant qu’ils pourraient s’arrêter au seul taux facial sans prendre en compte l’ensemble des aspects fiscaux de leurs investissements.
L’une des plus grandes questions qui se posent concernant l’impôt sur les sociétés est bien sûr celle de l’assiette et non celle du taux. À cet égard, le Gouvernement s’est engagé, avec d’autres partenaires, sur la voie d’une harmonisation de l’assiette de cet impôt. Cela me paraît essentiel, car une fois que nous aurons harmonisé les assiettes, il sera beaucoup plus objectif et raisonnable de comparer les taux.
J’ajoute que l’impôt sur les sociétés n’est que l’un des éléments de la fiscalité et qu’il faut tenir compte de tous les autres, à savoir les contributions sociales, la fiscalité locale, la fiscalité environnementale. Les directeurs financiers des investisseurs, je le répète, ne sont pas bêtes. Ils ne sauraient se contenter de comparer de manière brute et austère les taux marginaux des impôts sur les sociétés.
Nous-mêmes, nous avons bien des interrogations sur le taux réel d’imposition des entreprises. Tout le monde sait que le taux facial marginal de l’impôt sur les sociétés est de 33,33 %, mais il est vrai qu’il peut varier en fonction de la taille et de la structure des entreprises, de l’optimisation de l’organisation de leur groupe en filiales et de leur implantation au sein de différents pays. On sait tous que le taux d’imposition des grandes multinationales est probablement beaucoup plus faible que 33,33 %. Le taux de 8 % est parfois avancé, mais il est aussi contesté. Je pense qu’il nous faut accroître nos connaissances sur ce sujet, mais je dirais que, en moyenne, le taux de l’impôt sur les sociétés se situe plutôt aux alentours de 13 % à 15 % et à un peu plus de 20 % pour les plus petites. Il y a probablement là une incohérence, mais, franchement, dire que le taux facial de l’impôt sur les sociétés serait décisif pour les investisseurs est trop réducteur pour qu’on puisse vous suivre dans ce cheminement.
Enfin, je précise que, selon les estimations – à cet égard, je vous renvoie à ce que j’ai dit à M. Bocquet –, la baisse de 1 point annuel que tend à prévoir votre amendement, monsieur Delahaye, aurait un coût de l’ordre de 1,5 milliard d’euros.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d’État, il convient de vous remercier du tableau que vous venez de brosser. La question de l’attractivité de notre territoire est évidemment essentielle. À cet égard, le volet sur l’impôt sur les sociétés est central. Cependant, annoncer, comme vous le faites, à la fois une baisse à terme du taux de l’impôt sur les sociétés – c’est une belle promesse ! – et la prolongation de la surtaxe temporaire sur l’impôt sur les sociétés, qui, elle, est une réalité, constitue une véritable performance. Vendre pour l’avenir une fiscalité d’entreprise au niveau européen qui rendrait la France plus attractive, selon le principe du taux facial que vous avez relativisé dans votre intervention, et, dans le même temps, demander aux entreprises de prolonger un effort décrit comme temporaire mais qui devient très durable est une prouesse qui montre les qualités de communication de ce gouvernement. C’est une vraie leçon que vous nous donnez !
Accroître très sensiblement la ponction sur les entreprises, puis, grâce au tournant social-libéral, défendre une vision qui serait plus respectueuse de leurs intérêts et de l’attractivité du territoire, c’est manier les contraires, cultiver le paradoxe. Faire en sorte que l’on se concentre sur des promesses pour demain alors que les réalités d’aujourd'hui sont différentes mérite que le Sénat vous rende hommage. Chapeau bas devant une telle dextérité !
Néanmoins, permettez-moi d’ajouter que ce sont les faits qui seront jugés et pas l’habileté de votre communication.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je ne voudrais pas que notre débat de cet après-midi commence sur un malentendu.
Je vous remercie de vos compliments, monsieur le président de la commission, mais je n’en veux pas !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je n’en fais pas !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Contrairement à ce que vous dites, il ne s’agit pas uniquement d’engagements verbaux. Vous êtes trop fin connaisseur de la mécanique budgétaire pour ignorer que nous avons transmis à Bruxelles un programme de stabilité construit sur une trajectoire des finances publiques, qui a d’ailleurs fait l’objet d’un débat ici. Ce document est détaillé et intègre la progression des différentes mesures pour les trois prochaines années.
Vous êtes également trop fin connaisseur de notre mécanique budgétaire pour ignorer que, à l’automne, nous aurons un débat sur l’orientation des finances publiques. Nous sommes sur le point de vous faire parvenir – c’est une question d’heures, je crois – les documents budgétaires qui vous permettront d’apprécier le fait que nous ne nous contentons pas de paroles, mais que nous prenons des engagements pluriannuels, par écrit. Dès lors, ne dites pas que nos engagements en termes de volume, de méthode ou de calendrier ne sont pas clairs, même si nos appréciations peuvent diverger sur ces différents points.
Je peux concevoir que vous eussiez préféré voir supprimer immédiatement la surtaxe sur l’impôt sur les sociétés, qui, il me semble, a été créée non par l’actuelle majorité, mais par le gouvernement dirigé par M. Fillon. Je vous rappelle que cette surtaxe ne s’applique qu’aux entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Si la mesure est mauvaise, il faut la supprimer rapidement !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Elle ne concerne donc pas la plupart des PME ni des ETI, qui sont effectivement les entreprises qui créent de l’activité dans notre pays, même si le rôle des grandes entreprises au chiffre d’affaires élevé est loin d’être négligeable, que ce soit en termes d’entraînement, d’emploi, d’activité ou d’impôts.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Rompons un instant ce débat de spécialistes…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. De spécialistes des généralités…
Mme Nathalie Goulet. … pour saluer, puisque l’Europe a été évoquée, l’élection de Jean Arthuis à la présidence de la commission des budgets du Parlement européen. C’est le premier débat budgétaire qui se tient sans lui. Il nous manque aujourd’hui, mais nous sommes au moins assurés d’avoir un représentant de qualité au Parlement européen. Ils ne sont pas si nombreux…
Pour améliorer l’attractivité du territoire, monsieur le secrétaire d’État, il faut de la lisibilité et de la constance. Or on nous offre ces temps-ci une fiscalité « hoquetante ».
Quant aux lois de programmation des finances publiques, qui ne font partie de notre arsenal juridique que depuis quelques années seulement, les chiffres qui y figurent sont absolument faux et servent simplement à asseoir le raisonnement.
Les dernières dispositions qui ont été prises ne sont absolument pas favorables aux entreprises. C’est pourquoi je soutiens l’amendement présenté par M. Delahaye.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Certains de nos collègues noircissent volontairement le tableau. Je rappelle que nous sortons des assises de la fiscalité des entreprises, que j’ai déjà évoquées, qui ont conduit à procéder à des arbitrages et à préparer un calendrier.
Le taux facial de l’impôt sur les sociétés en France est effectivement l’un des plus élevés d’Europe, mais l’impôt réellement payé par les entreprises, pour des raisons d’assiettes et de niches, est relativement faible par rapport aux autres membres de l’Union européenne. Si l’on prend le poids de l’impôt sur les sociétés rapporté au PIB, la France ne se classe qu’en quinzième position. Il y a donc quatorze pays où l’impôt sur les sociétés coûte plus cher aux entreprises. En somme, nous nous situons à peu près au milieu du classement. Par conséquent, dire que la situation actuelle est absolument apocalyptique et que nos entreprises sont totalement pénalisées n’est pas justifié.
Pour avoir participé à toutes les nombreuses réunions qui se sont tenues depuis le mois de janvier avec l’ensemble des partenaires sociaux à l’occasion de ces assises de la fiscalité, je peux témoigner que ce sont les entreprises elles-mêmes qui demandent en priorité la réduction de la fiscalité sur la production. Elles préfèrent que la C3S soit supprimée et que les prélèvements sociaux soient diminués plutôt que le taux de l’impôt sur les sociétés soit baissé. Elles nous demandent néanmoins de travailler sur les assiettes – c’est ce que le Gouvernement s’engage à faire, comme le secrétaire d’État vient de le préciser – et de diminuer progressivement le taux facial afin que les entreprises aient de la visibilité.
Dans ces conditions, mon cher collègue Delahaye, je ne peux pas être d’accord avec votre argumentation. J’ai tendance à penser que la trajectoire définie par le Gouvernement est la plus appropriée ; c’est en tout cas celle qui convient le mieux à nos partenaires et aux entreprises. C’est pourquoi je demande une nouvelle fois le rejet de votre amendement.
M. le président. L'amendement n° 176, présenté par MM. Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article 219 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« g) Ce taux est majoré de 2 % lorsque les dividendes versés aux actionnaires représentent plus de 10 % du bénéfice imposable. »
La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Cet amendement proposé par les écologistes vise à moduler le taux de l’impôt sur les sociétés en fonction de la répartition des profits opérée au sein de chaque entreprise. Il s’agit d’inciter les entreprises à privilégier l’emploi et l’investissement productif et d’éviter les comportements tendant à favoriser la part des actionnaires dans la répartition. En effet, des études attestent l’augmentation de la part des dividendes dans la répartition des bénéfices de certaines grandes entreprises. Ainsi, selon l’INSEE, la part des dividendes dans l’excédent brut d’exploitation a augmenté de 2,5 points en 2012 par rapport à 2011.
Il est d’autant plus important de se prémunir contre cette évolution que les mesures de soutien de plus d’une quarantaine de milliards d’euros prises en faveur des entreprises ne sont absolument pas conditionnées. Le risque est donc grand de voir une part de ces ressources publiques distribuée en rémunération des capitaux.
Vous l’aurez compris, nous sommes favorables à des mesures différenciées et non à des mesures générales. Tâchons d’éviter les erreurs qui ont été commises et qui perdurent vis-à-vis du crédit d’impôt recherche. Je crois qu’il faut poser des conditions en amont des mesures que nous prenons.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement vise à prévoir une majoration de 2 % du taux d’impôt sur les sociétés lorsque l’entreprise verse des dividendes représentant plus de 10 % du bénéfice imposable.
La commission comprend et partage l’intention des auteurs, qui est d’inciter les entreprises à réinvestir leurs bénéfices. Cependant, des dispositions ont déjà été prises en ce sens. La deuxième loi de finances rectificative pour 2012, adoptée juste après l’élection présidentielle et les élections législatives, a instauré une mesure de taxation des entreprises en fonction des bénéfices qu’elles distribuent à leurs actionnaires. Cette contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés, dont le montant équivaut à 3 % des dividendes distribués, rapporte environ 1,9 milliard d’euros par an.
En conséquence, une nouvelle mesure fiscale, qui est de surcroît susceptible de créer un effet de seuil en fonction du pourcentage des bénéfices, ne semble pas opportune.
Pour toutes ces raisons, mon cher collègue, la commission vous invite à retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. J’ajoute aux arguments du rapporteur général, que je fais miens, que les dividendes distribués sont désormais portés, sur l’initiative de ce gouvernement, au barème de l’impôt sur le revenu et non plus soumis à un prélèvement forfaitaire libératoire. Selon moi, cette disposition a contribué, non pas à dissuader de verser des dividendes, mais à rendre plus juste l’imposition de ces revenus par rapport à ceux qui sont réinvestis.
L’effet de seuil que souligne le rapporteur général constitue également un handicap à l’adoption de cet amendement. C’est pourquoi j’en suggère le retrait ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Gattolin, l'amendement n° 176 est-il maintenu ?
M. André Gattolin. C’est vrai que des dispositions ont déjà été prises. Cependant, plus on accroît les mesures en faveur des entreprises, plus le niveau de contrôle doit être élevé.
Les mesures de 2012 sont une bonne chose, mais quand on injecte 41 milliards d’euros dans les entreprises, cet afflux supplémentaire exige de revisiter les dispositifs précédemment mis en place. C’est pourquoi je maintiens mon amendement.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Notre groupe regarde avec beaucoup de sympathie l’amendement de nos collègues du groupe écologiste, qui pointe une réelle tendance de ces dernières années : un transfert progressif croissant des profits vers les dividendes au détriment de l’économie réelle.
Cet amendement étant tout à fait conforme aux propositions que nous défendons en toutes occasions, nous le voterons.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. L’intention des auteurs de l’amendement est louable, mais l’adoption d’un tel dispositif pourrait être problématique. Puisque notre rapporteur général a beaucoup côtoyé les chefs d’entreprise, ils ont dû lui dire que c’est en France que les marges sont les plus faibles. Les entreprises rencontrent donc des difficultés pour investir, ce qui pose un vrai problème pour notre pays. Dès lors, il est difficile de faire des réformes ambitieuses.
Le livre de M. Piketty, qui fait actuellement fureur aux États-Unis, démontre très justement, tableaux à l’appui, que l’accumulation capitalistique se fait toujours au profit des 1 % les plus aisés de la population, et ce au détriment des classes moyennes. Nous sommes d’accord avec ce diagnostic. C’est pourquoi il faudra bien, un jour ou l’autre, corriger cette situation, qui conduit à une société où les inégalités sont de plus en plus insupportables. Tous bords politiques confondus, nous devrions réfléchir à cette question, car cette financiarisation forcenée de l’économie ne saurait être admise par tout élu raisonnable.
À titre personnel, je m’abstiendrai sur cet amendement en soutien à l’idée qu’il sous-tend, en espérant que nous pourrons explorer ces pistes de réflexion dans les années à venir.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. J’ai toujours défendu l’idée – ce point figure aussi de longue date dans les programmes du parti socialiste – que les aides aux entreprises devaient avoir des contreparties. Je pense aussi que nous devrions alléger notre fiscalité sur les investissements et veiller à éviter les dérapages de la rémunération du capital sous forme de dividendes.
Par fidélité à mes convictions, je voterai donc l’amendement de nos collègues écologistes.
M. le président. L'amendement n° 161 rectifié bis, présenté par Mme Létard et M. Delahaye, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 1 de l’article 231 du code général des impôts, il est inséré un 1 quater ainsi rédigé :
« 1 quater. Pour les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les syndicats professionnels et leurs unions mentionnés au titre III du livre Ier de la deuxième partie du code du travail et par les mutuelles régies par le code de la mutualité lorsqu’elles emploient moins de trente salariés, le taux de la taxe prévue au 1. est égale à 1,25 %. »
II. – Après la première phrase du premier alinéa du 2 bis de l’article 231 du code général des impôts, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Pour les associations régies par la loi du 1er juillet 1901, les syndicats professionnels et leurs unions mentionnés au titre III du livre Ier de la deuxième partie du code du travail et par les mutuelles régies par le code de la mutualité lorsqu’elles emploient moins de trente salariés, le taux de la taxe sur les salaires prévue au 1 quater est porté de 1,25 % à 7,60 % pour la fraction comprise entre 17 364 € et 43 404 €, à 13,60 % pour la fraction comprise entre 43 404 € et 151 208 € et à 20 % pour la fraction excédant 151 208 € de rémunérations individuelles annuelles. »
III. – L’article 1679 A du code général des impôts est abrogé.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I, II et III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
V. – La perte de recettes résultant pour le fonds de solidarité vieillesse des I, II et III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la majoration des droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Cet amendement de notre collègue Valérie Létard a trait à l’économie sociale et solidaire.
Avec 223 000 établissements employeurs et plus de 2,3 millions de salariés, l’économie sociale et solidaire représente 10 % de l’emploi en France. La masse salariale brute du secteur atteint 53 milliards d’euros. Les mesures fiscales favorisant la compétitivité et l’emploi doivent bénéficier, sans discrimination, à toutes les entreprises, dont celles de l’économie sociale et solidaire. Le CICE ne bénéficiant pas au secteur associatif, il crée là aussi une distorsion de concurrence en sa défaveur.
Aussi l’objet du présent amendement est-il de compenser les montants octroyés en vertu du CICE au bénéfice des uns par une baisse de la taxe sur les salaires pour les structures les plus fragiles. En effet, la mesure d’abattement de 20 000 euros sur la taxe sur les salaires avantage les structures de moins de vingt « ETP SMIC », qui, certes, représentent la majorité des associations mais qui ne concernent que 20 % des emplois. Au-delà de vingt équivalents temps plein, l’octroi du CICE est bien plus avantageux, ce qui génère une distorsion du coût du travail en fonction du statut juridique dans les mêmes secteurs d’activité, aboutissant à une concurrence déloyale. Pour le secteur associatif, il est à craindre que cela engendre des effets contre-productifs en matière d’emploi.
Le présent amendement opère ainsi une diminution marquée du taux normal de la taxe sur les salaires, qui passerait de 4,25 % à 1,25 %, et supprime le premier taux majoré concernant les rémunérations inférieures au SMIC. Cela aurait pour effet de libérer du carcan de cette fiscalité les bas salaires, qui constituent une partie importante de la masse salariale brute du secteur associatif. La part des salaires supérieure au SMIC serait taxée à 7,60 %, et non plus à 8,50 %, et ce dans l’objectif d’introduire une forme de progressivité et de ne pas trop impacter les salaires médians.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission a émis un avis défavorable, car la mesure proposée présente un coût potentiellement important pour les finances publiques : au moins 100 millions d’euros. Je dis « au moins », car ce coût est difficile à évaluer avec précision. Sans doute le Gouvernement pourra-t-il nous éclairer sur ce point.
Le dispositif aurait également un effet pervers : il soumettrait de nouveau à la taxe sur les salaires les 40 000 petites associations qui en étaient sorties grâce à l’abattement.
J’ajoute que cette mesure ne faisait pas partie des préconisations du rapport parlementaire récent de nos collègues de l’Assemblée nationale, qui suggérait plutôt des ajustements de régime.
Enfin, les associations vont bénéficier des mesures du pacte de responsabilité, en particulier les allégements de cotisations sociales.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement n’est pas non plus favorable à cet amendement.
Nous avons mis en place un barème préférentiel de taxe sur les salaires pour les associations, les syndicats professionnels et les mutuelles au 1er janvier 2014, en lieu et place de l’abattement majoré, qui avait déjà été porté précédemment de 6 000 euros à 20 000 euros C’est un mécanisme simple qui bénéficie à l’ensemble des associations et qu’elles ont salué.
Comme l’a souligné le rapporteur général, adopter cet amendement conduirait à assujettir de nouveau à la taxe sur les salaires 40 000 structures qui en sont à présent exonérées. Or tout le monde en appelle à la stabilité et à la lisibilité en matière fiscale. Je pense donc que personne ne souhaite voir cette taxe sur les salaires modifiée tous les six mois au gré des lois de finances rectificatives.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 161 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 99 rectifié, présenté par MM. Collin, Fortassin, Mézard, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le II bis de l’article 244 quater M du code général des impôts, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« ... – Pour le calcul du crédit d’impôt des micro-entreprises constituées des entreprises qui, d’une part, occupent moins de dix personnes et, d’autre part, ont un chiffre d’affaires annuel ou un total de bilan n’excédant pas deux millions d’euros, le taux horaire mentionné au I est multiplié par trois. »
II. – Le I ne s’applique qu’aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. L’objet de cet amendement est de renforcer la formation des dirigeants de micro-entreprises, c’est-à-dire des entreprises de moins de dix salariés réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 2 millions d’euros. Il est proposé pour cela de tripler le taux horaire du crédit d’impôt pour la formation des dirigeants de ces entreprises, aujourd’hui fixé au taux horaire du SMIC.
Il est regrettable que nos très petites entreprises souffrent, trop souvent, du manque de formation de leurs dirigeants, qui constitue malheureusement un corollaire de leur taille modeste. Or des carences en matière de compatibilité, de droit, de gestion ou autres peuvent avoir des conséquences dramatiques sur le devenir de ces entreprises. C’est pourquoi nous proposons l’adoption de cet amendement, qui contribuera, en renforçant la formation des dirigeants, à pérenniser les emplois dans nos petites entreprises, lesquelles sont, faut-il le rappeler, l’un des ciments majeurs de notre économie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Sur cet amendement, qui vise à rendre plus incitatif un crédit d’impôt de faible ampleur, la commission souhaite recueillir l’avis du Gouvernement. Je m’interroge en effet sur les effets d’aubaine que cette mesure pourrait engendrer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement entend la préoccupation des auteurs de cet amendement. Il observe toutefois que le dispositif actuel est déjà très généreux, y compris pour les chefs de très petites entreprises.
Nous ne considérons donc pas comme complètement avérée la nécessité de rendre plus attractif le crédit d’impôt pour la formation des dirigeants d’entreprises, qui coûtera 35 millions d’euros en 2014. Le surcoût du dispositif proposé, qui n’a pas été évalué, ne peut être envisagé dans le contexte actuel. Il serait d’ailleurs en contradiction avec les objectifs, partagés par le président Marini, de réduction des dépenses fiscales…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Merci de ce clin d’œil ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 136, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le I de l’article 953 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le montant : « 89 € » est remplacé par le montant : « 53 € » ;
2° Au deuxième alinéa, le montant : « 86 € » est remplacé par le montant : « 50 € » ;
3° Les troisième et quatrième alinéas sont ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa, le tarif du droit de timbre du passeport délivré à un mineur de quinze ans et plus est fixé à 27 €.
« Si le demandeur fournit deux photographies d'identité, tel que prévu à l'article 6-1 du décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 précité, le montant du titre pour un mineur de quinze ans et plus est fixé à 22 €. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Citoyenneté et liberté, voilà de bien jolis mots ! Encore faudrait-il qu’ils trouvent une application concrète pour les Français qui souhaitent voyager à l’étranger.
Parmi vingt-trois États de l’Union européenne, la France est le pays où le tarif du droit de timbre pour l’obtention d’un passeport est le plus cher. Ce coût peut entraver la liberté des plus jeunes ou des familles nombreuses qui souhaitent se déplacer hors de nos frontières. Si l’on ajoute au droit de timbre le prix de la photo obligatoire imposée par la préfecture, qui s’élève à 3 euros, nous sommes champions d’Europe, devant les Britanniques. Pour voyager, il faut donc payer son écot aux finances publiques. Vous me direz que c’est logique, après tout, puisque nous sommes aussi champions d’Europe des prélèvements obligatoires.
Je voudrais que les mots de liberté et de citoyenneté retrouvent un sens, notamment pour les plus jeunes de nos concitoyens. C’est pourquoi je propose non pas de diminuer le tarif du droit de timbre du passeport à 24 euros, comme en République tchèque ou en Slovaquie, mais de le ramener au niveau de la moyenne européenne, soit 53 euros.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue, dont je salue au demeurant les louables intentions, suggère que l’État vende à perte… L’adoption de cet amendement ramènerait en effet le droit de timbre en deçà du coût de production d’un passeport, qui a été évalué par la Cour des comptes à un montant compris entre 55 euros et 69 euros.
M. Charles Revet. Alors, il faut baisser le coût de production !
Mme Nathalie Goulet. Demandez à Bygmalion, ils vous feront des prix !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Tout adepte du libéralisme économique sera sans doute désireux de voir au moins couverte la charge engagée pour la fabrication d’un passeport…
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous avez comparé, monsieur le sénateur, les droits de timbre des passeports de différents pays européens. J’ignore si vous avez fait de même pour les autres titres sécurisés. On peut sans doute trouver certains titres qui sont plus chers chez nous que chez nos voisins, mais aussi, très vraisemblablement, d’autres qui le sont moins. Ainsi, dans notre pays, la délivrance de la carte nationale d’identité et du permis de conduire est désormais gratuite.
Sachez que l’Agence nationale des titres sécurisés, l’ANTS est aujourd’hui à court de financement. Outre le passeport, moyennant un droit de timbre que vous visez dans votre amendement, elle délivre quatorze autres titres sécurisés, dont, gratuitement, la carte nationale d’identité et le permis de conduire.
Cette agence est aujourd’hui confrontée à un besoin de financement lié à la fabrication des nouveaux permis de conduire sécurisés au format européen, qui va engendrer des frais supplémentaires. C’est d'ailleurs pour cette raison que l’article 2 ter du collectif budgétaire prévoit un droit de timbre supplémentaire pour la copie demandée en cas de perte ou de vol d’un titre – le permis de conduire, notamment.
Les difficultés auxquelles est confrontée l’ANTS nécessitent une réaction de notre part. C’est pourquoi le Gouvernement est très défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement est sympathique, puisqu’il réaffirme le droit aux documents de voyage et d’identité. Néanmoins, je tiens à souligner, au-delà des arguments qui ont été avancés par le rapporteur général, que ce droit a été atteint par ce qui a été présenté comme une simplification : le passage de dix à quinze ans de la durée de validité de la carte d’identité. Cette mesure nous a probablement permis de gagner entre 400 et 600 équivalents temps plein. C’était une mesure d’économie plus que de simplification. En effet, les complications sont arrivées rapidement. Dans les pays où l’on peut circuler avec une carte d’identité valable selon le droit français, mais facialement périmée, de nombreux Français se trouvent en difficulté, ce qui alourdit la charge de travail des consulats.
Je demande au Gouvernement de revenir rapidement sur l’allongement de la durée de validité de la carte d’identité et de permettre à chaque Français qui le souhaite de renouveler sa carte d’identité lorsqu’elle n’est plus valable facialement. C’est le seul moyen de pouvoir circuler librement dans l’Union européenne et dans les pays, comme la Turquie et l’Égypte, qui autorisent la venue de Français sans passeport.
Il y a aujourd'hui de nombreuses difficultés dues à l’utilisation de cartes d’identité facialement périmées.
M. Charles Revet. C’est vrai !
M. Jean-Yves Leconte. Certaines compagnies aériennes refusent de prendre en charge les personnes dont la carte d’identité est valable mais facialement périmée. Il est important d’affirmer le droit aux documents de voyage. Je le répète, je demande au Gouvernement de revenir sur la situation actuelle, qui n’est pas acceptable.
J’ajoute, puisque vous avez évoqué les besoins de financement de l’ANTS, monsieur le secrétaire d'État, que nous sommes l’un des rares pays à financer les équipements biométriques mis à disposition des prestataires de services chargés d’enregistrer les demandes de visa et les empreintes des demandeurs. La plupart de nos partenaires européens louent ces équipements aux prestataires de services. Il serait temps, aussi bien pour l’amélioration du service que pour le redressement de nos comptes, de mettre un terme à ce mode de fonctionnement. Il n’y a aucune raison que le financement vienne de l’État.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Au risque de surprendre, notre groupe votera cet amendement. Plusieurs choses nous séparent de M. Dominati – il propose par exemple de supprimer l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, tandis que nous voulons le renforcer –, mais son amendement nous convient.
M. Charles Revet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Nous soutenons nous aussi le très bon amendement de M. Dominati, pour plusieurs raisons.
D’abord, il faut prendre en compte le fait qu’on oblige depuis quelques années chaque enfant à avoir son propre passeport dès le plus jeune âge, alors que les enfants pouvaient auparavant être inscrits sur le passeport de leurs parents.
M. Philippe Dominati. Absolument !
M. André Gattolin. Ensuite, les passeports des enfants doivent être renouvelés tous les cinq ans. Le tarif est certes divisé par deux, mais cela entraîne tout de même de nombreuses démarches.
Mme Nicole Bricq. Mais non !
M. André Gattolin. Si, et pour une famille avec plusieurs enfants, ce n’est pas rien ! Il n’est pas évident, quand on ne bénéficie pas de passe-droits, de renouveler son passeport au mois de juillet : à Paris, il faut cinq semaines pour obtenir un rendez-vous, et deux mois en tout pour obtenir un nouveau passeport biométrique en été.
La question est de savoir si on est pour ou contre la liberté de circulation.
M. Jean-Vincent Placé. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous soutenons nous aussi cet amendement.
M. Roger Karoutchi. Très bien !
Mme Nathalie Goulet. Puisque M. le secrétaire d'État a annoncé le doublement du prix du timbre fiscal, peut-être pourrait-il en profiter pour augmenter le nombre de pages des passeports. Cela éviterait aux gens qui voyagent beaucoup d’avoir à refaire trop souvent le leur.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je l’ai déjà demandé !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Avant toute chose, je remercie mes collègues de l’écoute dont ils ont fait preuve à l’égard de ma demande, qui a trait à la liberté.
Monsieur le rapporteur général, je suis étonné que vous m’opposiez l’argument du coût. Vous n’allez pas me dire que les services administratifs sont plus compétitifs dans les autres pays. Pourquoi ne louerait-on pas les portiques s’il en faut ? Pourquoi le coût d’un passeport serait-il nettement plus élevé chez nous que dans vingt-trois autres pays ?
M. Charles Revet. Exactement !
M. Philippe Dominati. On ne peut pas faire payer aux jeunes, et plus largement aux citoyens, les dysfonctionnements éventuels – j’ignore s’ils existent, vous en savez plus que moi – de nos services. Ce n’est vraiment pas sur la question du coût qu’il fallait attirer notre attention.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. La mise en place de l’ANTS et la passation de certains de ses marchés, qui ne relèvent pas de ce gouvernement ni du précédent, mériteraient effectivement un examen attentif. Dans une vie antérieure, j’ai rédigé un rapport sur l’ANTS au moment de la révision générale des politiques publiques, la RGPP. Je vous invite modestement à le consulter. Un certain nombre des commentaires que je viens d’entendre s’en trouveraient peut-être fragilisés.
Par ailleurs, je n’ai pas proposé de doubler le prix du timbre fiscal pour le permis de conduire ; nous le verrons lors de l’examen de l’article correspondant. J’ai simplement dit qu’on ne pouvait pas simultanément diminuer les droits de timbre pour les passeports et délivrer gratuitement quatorze autres documents tout en réalisant des économies en termes d’emplois – il y en a eu, objectivement – et en équilibrant les comptes, actuellement préoccupants, de l’ANTS. Nous souhaitons équilibrer les comptes de cette agence, qui est un opérateur de l’État, en étendant au permis de conduire ce qui existe déjà pour la carte d’identité.
Vous parlez de la liberté de circuler. Mesdames, messieurs les sénateurs, il s’agit d’un débat complètement différent. Je vous rappelle que le fait d’avoir des titres sécurisés est une garantie de sécurité, par rapport à un certain nombre de phénomènes que nous nous devons tous de surveiller. Nous n’allons pas dissuader nos concitoyens de voyager par le prix du timbre fiscal pour un titre ayant une durée de validité plutôt longue… Il est complètement déplacé d’évoquer la liberté de circuler dans ce débat.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est vrai, il ne faut pas exagérer !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Concernant le problème des cartes d’identité valables mais facialement périmées, j’avoue mon incompétence complète. Je vous invite à interroger le ministre de l’intérieur, qui pourra vous répondre et remédier aux éventuels dysfonctionnements. En tout état de cause, ces derniers ne sont pas liés au prix du timbre fiscal.
L’amendement va dans le sens inverse de ce qui est souhaitable pour les comptes de l’ANTS. Je vous invite à y réfléchir à deux fois avant de le voter. Avec tout le respect que je vous dois, il me paraît franchement excessif d’affirmer que la liberté de circulation est mise en cause.
M. Jean-Claude Carle. Bravo, monsieur Dominati !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
L'amendement n° 28 rectifié, présenté par Mme Lienemann et MM. Rome et Leconte, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À compter de la promulgation de la présente loi et jusqu’au 31 décembre 2015, les entreprises qui recourent aux contrats d’apprentissage prévus à l’article L. 6221-1 du code du travail bénéficient d’une réduction d’impôt sur les sociétés égale à 500 euros par mois et par apprenti lorsque ces embauches ont pour effet de porter la proportion de jeunes en apprentissage au-delà de 5 % de l’effectif total de l’entreprise, et pour les entreprises de moins de vingt salariés, dès le deuxième apprenti.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement, cosigné par Yves Rome et Jean-Yves Leconte, a trait à l’apprentissage. Notre souci est de trouver des mesures pour permettre d’atteindre réellement les 500 000 apprentis par an. Compte tenu de la situation actuelle, la réalisation de cet objectif est extrêmement urgente. En effet, le développement de l’apprentissage est de nature à faire reculer le chômage des jeunes et à améliorer le pouvoir d'achat.
Nous proposons de faire bénéficier les entreprises d’un crédit d’impôt sur les sociétés de 500 euros par mois et par apprenti. Nous posons évidemment des conditions : ce crédit d’impôt s’appliquera si la proportion d’apprentis excède 5 % de l’effectif total de l’entreprise ou dès le recrutement d’un deuxième apprenti pour les entreprises de moins de vingt salariés.
Mes chers collègues, il ne vous a pas échappé que le Président de la République avait déclaré que la relance de l’apprentissage était indispensable. La disposition proposée, si elle n’est pas l’unique moyen d’y parvenir, y contribuera de façon tout à fait décisive.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission partage bien entendu le souci qu’a Marie-Noëlle Lienemann de soutenir l’apprentissage. C’est d'ailleurs l’une des priorités du pacte de compétitivité. Il conviendra de revenir sur cette question à l’issue de la conférence sociale, qui doit s’achever aujourd'hui.
J’ai bien noté que le Président de la République avait pris des engagements fermes : il a annoncé qu’une rencontre au plus niveau entre les partenaires sociaux et l’État serait organisée en septembre prochain sur le thème de l’apprentissage. Cette rencontre aura vocation à lever tous les obstacles au développement de l’apprentissage. Les régions seront évidemment impliquées elles aussi. Il s’agit de répondre à l’exigence d’un renforcement du dispositif, que beaucoup d’entre nous appellent de leurs vœux.
À titre personnel, je suis défavorable à l’amendement ; j’ai indiqué mes raisons à la commission. La perte de recette fiscale, qui, du reste, n’est pas évaluée par les auteurs de l’amendement, est susceptible de représenter un coût de plusieurs centaines de millions d’euros, dans la mesure où le dispositif proposé s’élève à 500 euros par mois, soit 6 000 euros par an, et où l’assiette porte sur une partie des 2,4 milliards d’euros de salaires versés aux quelque 400 000 apprentis. Eu égard à l’exigence de rééquilibrage des comptes publics qui sous-tend ce projet de loi de finances rectificative, je me vois mal donner un avis favorable à cet amendement.
M. Francis Delattre. C’est l’avis de la commission que vous devez donner !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Laissez-moi terminer, mon cher collègue !
J’ai développé les arguments qui m’ont conduit à préconiser le rejet de l’amendement. Cependant, je dois indiquer à notre assemblée que la commission ne m’a pas suivi : elle a donné un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Nous avons eu l’occasion d’examiner un amendement très proche, pour ne pas dire identique, à l’Assemblée nationale. Il s'agit de créer une réduction d’impôt – encore une ! M. Marini doit frémir –…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je vais vous dire ce que j’en pense !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … qui serait égale à 500 euros par mois.
Nous comprenons la philosophie qui vous pousse à vouloir encourager l’apprentissage.
M. Charles Revet. Il en a bien besoin !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cette philosophie est d'ailleurs largement partagée. Je ne vais pas reprendre les propos du Président de la République, mais, avant de vous rejoindre, j’ai participé à la grande conférence sociale et travaillé avec le Premier ministre à la préparation des annonces de cet après-midi. J’en retiens qu’il doit y avoir une forte implication des régions en matière d’apprentissage.
Si la répartition des compétences est en train de s’organiser, voire de se clarifier, soit dit sans vouloir froisser personne, c’est bien pour mettre dans une même dynamique les partenaires sociaux, les régions ainsi que le monde de l’apprentissage et de la formation professionnelle. Il ne s’agit pas pour nous de nous défausser en disant que l’État n’a rien à y voir. Bien au contraire, des engagements et des rendez-vous ont été pris pour que, dès l’automne, nous puissions avancer sur cette question.
Je me suis livré à un petit calcul de coin de table sur le coût de cette mesure. Certes, elle ne concernerait que les entreprises qui dépasseraient le seuil de 5 % d’apprentis, mais, si l’on prend la somme de 500 euros, multipliée par douze mois, puis par le nombre d’apprentis, on arrive à un coût budgétaire gigantesque,…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Un milliard d’euros !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … sachant qu’il y a entre 400 000 et 500 000 apprentis actuellement. Il faut bien voir qu’il y aurait aussi un effet d’aubaine pour certaines entreprises : quand on prend une mesure, il ne faut pas oublier qu’il y a une situation existante à laquelle va s’appliquer ladite mesure. Au total, le coût se situerait, selon nos estimations, aux alentours de 2 milliards à 3 milliards d’euros, si toutes les entreprises entraient dans le dispositif, mais, au bas mot, probablement à plus de 1 milliard d’euros. Or je vous rappelle que nous devons maîtriser nos dépenses fiscales.
Je le répète, des engagements et des rendez-vous sont pris. Dans ce cadre, nous avons besoin d’une forte implication des régions et de l’ensemble des acteurs du secteur, notamment les formateurs, qui sont parfois, si j’ose dire, d’obédience publique, mais pas toujours, du moins en ce qui concerne les organisations professionnelles.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Le groupe UMP a soutenu cet amendement en commission des finances et il le votera en séance publique, car il présente plusieurs qualités.
La première, c’est de permettre une expérimentation. La nouvelle délimitation des futures régions n’est pas un problème, puisque la réforme n’est pas censée s’appliquer avant le 31 décembre 2015. Mes chers collègues, nous avons tort de ne pas assez expérimenter.
La deuxième qualité, c’est l’alternance. Si nous avons une difficulté par rapport à nos voisins allemands, c’est bien que les entreprises ne sont pas assez impliquées dans les formations en alternance, lesquelles constituent de véritables accélérateurs à l’embauche. En effet, sur le terrain, on voit bien que tous les jeunes qui ont eu la chance de bénéficier d’une formation professionnelle en alternance sérieuse sont souvent embauchés par les entreprises qui les ont formés.
Sur le sujet, nous n’avons pas vraiment besoin d’une étude d’impact, monsieur le secrétaire d’État. Tout le monde connaît les chiffres : 120 000 à 150 000 jeunes sortent du système sans formation.
M. Bruno Sido. C’est terrible !
M. Charles Revet. On l’oublie trop souvent !
M. Francis Delattre. Dans le cadre de la réforme engagée, qui privilégie les régions, il serait judicieux que le financement profite aussi aux entreprises. Ce sont elles les vrais acteurs de la formation professionnelle en alternance puisqu’elles ciblent les emplois dont elles ont besoin.
Enfin, mes chers collègues de l’opposition,…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. De la majorité ! Ils ne sont pas encore dans l’opposition ! (Sourires.)
M. Francis Delattre. … c’est une occasion unique de respecter l’un des engagements du Président de la République, à savoir atteindre l’objectif de 500 000 jeunes en contrat d’apprentissage.
M. Bruno Sido. Ça en ferait au moins un !
M. Charles Revet. Et grâce à nous !
M. Francis Delattre. Voilà qui serait le début d’une révolution !
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Le groupe écologiste soutient cet amendement.
Je me dois de dire que l’une des meilleures mesures prises durant le précédent quinquennat concerne la formation en alternance, notamment dans le supérieur. (Marques de satisfaction sur les travées de l'UMP.) Pour avoir dirigé un master professionnel, je suis assez bien placé pour vous dire que, dans une filière sinistrée comme le journalisme culturel, la moitié des étudiants que je plaçais en alternance terminaient en contrat à durée indéterminée.
Bien sûr, les coûts sont importants, mais il faut aussi considérer ce que ces dépenses rapportent, car ces jeunes cotisent en entrant dans la vie active. Or je rappelle que les chiffres donnés dernièrement font état d’un recul de 8 % de l’apprentissage en 2013, d’où le souhait émis par le Président de la République, lors de la conférence sociale, de voir l’apprentissage relancé.
À ceux qui disent que les régions doivent participer, je conseille de prendre l’exemple de l’Île-de-France : Formasup, l’organisme qui gère ce secteur avec une extrême compétence (M. Roger Karoutchi fait une moue dubitative.), même si l’on peut en discuter à la marge, abonde la somme donnée par l’État de 1 000 à 2 000 euros par apprenti. Le travail est donc fait dans certaines régions, qui n’hésitent pas à expérimenter, mais toutes les régions ne le font pas.
Voyons ce qui fonctionne, regardons ce qui ne marche pas, mais ayons conscience de l’urgence. Avec l’apprentissage, on améliore la formation des étudiants et, dans le même temps, on leur permet une insertion accélérée dans le monde du travail, et ce pour une durée indéterminée, c’est-à-dire en leur évitant d’aller de CDD en périodes de chômage, ce qui coûte aussi très cher à l’État. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, ainsi que sur plusieurs travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Il y a quand même des contradictions dans le discours du Gouvernement : il souhaite une inversion de la courbe du chômage, mais il continue à saturer les entreprises de charges et de réglementations ; le Président de la République s’engage à atteindre le nombre de 500 000 apprentis dans notre pays, mais à condition que ça ne coûte rien. Dans ces conditions, dites-nous comment faire !
Ériger l’apprentissage en absolue priorité aura nécessairement un coût. Or se défausser financièrement sur les régions ne serait pas très sérieux. L’Île-de-France, qui a fait beaucoup d’efforts dans les années antérieures, avec parfois le concours de l’État, n’arrive toujours pas au chiffre de 100 000 apprentis. En effet, les entreprises, dans cette région comme ailleurs, sont extrêmement réticentes en ce moment à prendre des apprentis. Elles supportent déjà des charges considérables – elles réclament d’ailleurs au Gouvernement la baisse de plusieurs taxes et impôts –, ce n’est pas pour accepter en plus la charge d’apprentis sans aides publiques.
Le raisonnement du Gouvernement n’est pas clair : s’il souhaite que les régions se débrouillent sans aide de l’État, il ne doit pas fixer d’objectifs chiffrés, et les régions feront ce qu’elles pourront. En revanche, si le Gouvernement et le Président de la République fixent un objectif de 500 000 apprentis, il faut mettre un minimum de moyens matériels pour l’atteindre. Il ne serait pas très sérieux de laisser les régions se débrouiller sans efforts de l’État.
Je le répète, cette politique a un coût, mais l’intégration de ces jeunes dans le monde du travail pour leur premier emploi est tellement meilleure, en comparaison de ceux qui viennent d’une formation publique générale, que cet effort financier vaut le coup. Je voterai donc l’amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. La position de M. le rapporteur général et de M. le secrétaire d’État me semble être la bonne. C’est pourquoi je voudrais remettre un peu de cohérence dans le débat. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Francis Delattre. C’est une plaisanterie ?
Mme Nicole Bricq. Je parle de cohérence de part et d’autre de l’hémicycle.
M. Francis Delattre. Vous sortez à peine du Gouvernement et vous venez donner des leçons de cohérence ? La soupe n’était pas bonne là-bas ?
Mme Nicole Bricq. Je sais que, depuis le début de l’examen du projet de loi de finances rectificative, on assiste à des combinazione assez curieuses, mais je voudrais que chacun sache raison garder.
Je rappelle que le budget de la formation professionnelle s’élève à 32 milliards d’euros. Ce seul chiffre prouve bien que le problème ne tient pas seulement aux aides fiscales, mais qu’il est aussi culturel. Il est sans doute compliqué pour des entreprises, notamment les plus petites, de prendre des apprentis, car cela suppose d’organiser un tutorat. C’est l’esprit du contrat de génération, mais il n’est pas évident de dégager du temps pour prendre des jeunes sous son aile. Nous avons pourtant tous vécu le moment terrible du mois de septembre où nous voyons arriver dans nos permanences, accompagnés de leurs parents, des jeunes qui n’ont pas trouvé de contrats en alternance, alors que 800 000 emplois ne sont pas pourvus à l’heure actuelle.
M. Charles Revet. Simplifions les procédures !
Mme Nicole Bricq. En tout état de cause, il est quand même curieux de soutenir un amendement qui tend à créer une nouvelle niche fiscale en faveur des entreprises, après nous avoir expliqué, il y a quelques minutes, la nécessité de contraindre les entreprises qui bénéficiaient de 41 milliards d’euros de soutien de l’État, consentis par l’ensemble de la nation.
M. André Gattolin. Nous n’y adhérons pas, parce que ce n’est pas ciblé !
Mme Nicole Bricq. Je n’arrive pas à comprendre cette contradiction.
Monsieur Gattolin, vous voulez reprendre la main sur le CICE, que vous n’admettez pas fondamentalement ; vous refusez donc que nous donnions cet oxygène aux entreprises et, là, vous dépensez les milliards sans compter.
M. André Gattolin. Nous sommes pour l’offre différenciée !
Mme Nicole Bricq. Nous avons essayé, avec le Gouvernement, de défendre une équation qui consiste à donner un peu d’oxygène aux entreprises, tout en les mettant devant leurs responsabilités. Dans notre esprit, on ne peut pas accepter de tels gestes de l’État sans s’engager sur des résultats. Tel est le sens du pacte de responsabilité.
M. Francis Delattre. Oh !
Mme Nicole Bricq. Si vous n’y croyez pas,…
M. Francis Delattre. On n’y croit pas du tout !
Mme Nicole Bricq. … vous ne croyez pas en l’action politique, ce qui est dommage, car les parlementaires doivent être des acteurs politiques. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce n’est pas possible d’entendre cela !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Essayons de retrouver de la cohérence.
M. Francis Delattre. Ah oui !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il s’agit de la politique d’emploi des jeunes. Interrogeons-nous sur les voies les plus efficaces pour accompagner ceux-ci vers l’emploi. N’est-il pas vrai que l’apprentissage et l’alternance ont de meilleures chances, statistiquement, de déboucher sur l’emploi que la plupart des contrats aidés ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Bruno Sido. C’est évident !
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Notre raisonnement consiste à regarder, de manière équitable, équilibrée, les mérites des différents dispositifs. À cet égard, il est bon de rappeler, mes chers collègues, que la loi de finances pour 2014 a diminué de moitié les incitations financières à l’apprentissage et à l’alternance, alors que nous savons qu’il est particulièrement difficile de trouver des emplois pour les alternants. Nous en faisons tous l’expérience lorsque nous recevons du public, puisque c’est l’une des demandes les plus fréquentes qui nous est faite.
M. Bruno Sido. Absolument !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Or il est bien clair que, dans la conjoncture actuelle, les entreprises auraient eu besoin d’être aidées, comme elles l’ont été dans le passé. Pourtant, je le répète, la majorité a divisé par deux l’aide qui leur était apportée,…
M. Charles Revet. Et voilà !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … alors qu’une entreprise a besoin de dégager du temps pour accompagner un alternant ou un apprenti, un temps qui est sans doute un peu moins productif que celui qui est habituellement consommé par les salariés de l’entreprise.
J’ai entendu tout à l’heure une appréciation positive sur l’action de l’ancienne majorité en la matière. Je trouve vraiment très dommage que, pour des raisons ne relevant pas de l’intérêt général, l’actuelle majorité ait ainsi démantelé, ou en tout cas affaibli, un régime efficace. Pour le remplacer par quoi ? Par différentes catégories de contrats aidés, dont on a majoré l’enveloppe de 300 millions d’euros par rapport à 2013. J’entends dire qu’il est peut-être question d’accroître encore cet effort…
Bien entendu, lorsque l’on est maire et que l’on reçoit des gens qui cherchent un emploi et une chance d’être réinsérés par le travail, il va de soi – si l’on en a la possibilité – qu’on facilite leur accès à telle ou telle catégorie d’emploi aidé. Il n’en reste pas moins que, si l’on s'interroge sur l’efficacité de la réinsertion sociale par l'entreprise, c'est quand même bien l’alternance et l'apprentissage qu’il faudrait davantage favoriser. Et cette seule considération me conduira, une fois n’est pas coutume, à voter un amendement de notre collègue Marie-Noëlle Lienemann ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Le parcours vers l’emploi comprend un volet « insertion sociale », aujourd'hui dévolu au département, et un volet « insertion professionnelle et formation », confié, lui, aux régions. Je suis tout à fait d’accord avec M. le président de la commission des finances pour dire que l’alternance et l’apprentissage sont de meilleures voies d’entrée dans l’emploi que l’insertion professionnelle ou les contrats aidés, lesquels coûtent particulièrement cher. C’est pourquoi il serait bon que, dans le cadre de la réforme territoriale, on bouge le curseur, en replaçant véritablement le parcours vers l’emploi au cœur du dispositif.
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez remis l’apprentissage dans le domaine de compétence des régions. Par ailleurs, on sait que les régions ont fait du bon travail en matière de formation : elles ont montré leur savoir-faire et leur expertise. Demain, il faudra aller encore plus loin ! C’est la raison pour laquelle j’aimerais savoir ce que feront les conseils régionaux à partir du 1er janvier 2015…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Rien ne presse ! (Sourires.)
M. René-Paul Savary. … ou plutôt, en effet, à partir du 1er janvier 2016. Se pencheront-ils sur la politique de l’apprentissage ou réfléchiront-ils à la façon dont ils pourront s'organiser dans le cadre des fusions de régions ?
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il faudra qu’ils choisissent un chef-lieu et un hôtel de région…
M. René-Paul Savary. Il y aura deux types de régions : celles qui ne fusionneront pas – les grandes régions que sont le Nord-Pas-de-Calais ou l’Île-de-France, par exemple – et celles qui fusionneront. Les premières continueront à exercer leur savoir-faire et auront donc de l’avance sur les autres. De plus, si des compétences telles que les routes et les collèges sont confiées aux nouvelles régions, celles-ci seront obligées de gérer le personnel transféré, soit 10 000 à 20 000 agents selon les cas.
M. Bruno Sido. Cela n’arrivera jamais !
M. René-Paul Savary. Pendant ce temps-là, elles ne seront pas entièrement disponibles pour conduire les politiques en matière d’apprentissage, d’emploi ou de formation. Pourtant, si l’on veut développer l’attractivité du fait régional, il faudra bien leur confier plus de responsabilités, particulièrement dans le domaine de l’emploi, qui est complémentaire de la formation et de l’apprentissage. On voit bien les difficultés qui vont surgir de la réorganisation territoriale par rapport à la formation de nos jeunes.
Voilà pourquoi je considère que cet amendement, qui donne un signal fort en faveur de l'apprentissage, est important pour nos entreprises et pour nos jeunes. Je tiens à le soutenir afin de promouvoir ce principe de la primauté de la formation, qui est largement reconnu par tous.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. À ce stade du débat, tout a été dit. Je serai donc brève.
La Normandie, demain réunifiée – cette fusion ne pose pas tant de difficultés chez nous –, est déjà fortement impliquée dans la formation.
C’est vrai que les entreprises ont du mal à prendre un apprenti en ce moment. C’est pour elles une responsabilité et il faut lui consacrer du temps, comme l’a dit Philippe Marini.
Cela étant, nous soutiendrons cet amendement, qui est un placement pour l’avenir des jeunes, ce qui est toujours bon.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Une fois n’est pas coutume, je suis conjoncturellement et ponctuellement d’accord avec notre collègue Marini (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.),…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. On peut faire un bout de chemin ensemble… (Sourires.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. … mais pas sur l’ensemble de son raisonnement.
Je ne suis pas d’accord avec l’idée selon laquelle l’alternance est une meilleure voie vers l’emploi que les autres.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est l’une des voies !
M. Bruno Sido. Toutes sont bonnes à prendre !
M. Charles Revet. Elle est en tout cas très efficace !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Dans bien des cas, l’alternance est opérationnelle, mais, dans d’autres cas, pour les jeunes qui connaissent des difficultés extrêmes, les emplois aidés sont bien plus efficaces. En effet, vous le savez bien, ces jeunes ne sont pas toujours prêts à entrer en apprentissage. Par ailleurs, il existe une voie qu’il faut continuer à soutenir, c'est celle de l’enseignement professionnel, qui, comme l'apprentissage, connaît, lui aussi, une chute massive.
M. René-Paul Savary. Absolument !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Or si nous voulons réussir la réindustrialisation de la France et doper notre capacité productive, nous avons besoin de l’ensemble de ces formations professionnelles.
Dans cette perspective, les engagements de François Hollande me paraissaient parfaits : les contrats d’avenir, les contrats de génération – difficiles à réussir mais représentant un défi tout de même important puisque se profile une perte massive d’actifs liée au départ à la retraite des générations du baby-boom – et, par ailleurs, 500 000 contrats d’apprentissage. Or nous n’y sommes pas !
Il ne s'agit pas de prendre à l’un pour donner à l’autre, il faut relever tous ces défis, parce que ce sont nos priorités. J’entends bien, monsieur le secrétaire d’État, que notre mesure coûte cher. Avec mes collègues à l’Assemblée nationale et au Sénat, nous sommes prêts à considérer que l’ensemble de nos propositions sur les contrats aidés et sur l'apprentissage correspondent au plus à une dépense de 2 milliards d’euros. Or, vous le savez, plusieurs d'entre nous ont fait des contre-propositions au Gouvernement : nous avons ainsi chiffré le gain pour l’État s'il conditionnait la baisse de l'impôt sur les sociétés au réinvestissement de plus de 90 % des bénéfices.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Là, je suis un peu moins d’accord !
Mme Nicole Bricq. Vous auriez dû le voter cet amendement, monsieur Marini !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je n’ai parlé que d’un bout de chemin…
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les aides aux entreprises ne sont utiles que si elles débouchent sur de l’emploi, de la formation ou de l’investissement. Nous avons toujours dit que ces aides étaient valables si elles étaient conditionnées et ciblées.
Madame Bricq, proposer d’économiser sur les baisses de l'impôt sur les sociétés qui ne vont pas à la formation, à l’investissement ou à l’emploi et d’injecter de l’argent pour permettre aux entreprises d’accueillir des apprentis, ce qui correspond à l’un des éléments du dispositif pour l’emploi des jeunes, c’est cohérent !
Par ailleurs, on nous explique que les régions peuvent payer. Il se trouve que j’ai été vice-présidente de la région Nord-Pas-de-Calais, chargée de la formation professionnelle, et que je travaillais en lien étroit avec ma collègue chargée de l'apprentissage. Quel était l’obstacle majeur au recrutement d’apprentis ? Ce n’était pas de trouver des jeunes ou même des places en centre de formation des apprentis ou en lycée professionnel – je vous rappelle que l'éducation nationale fait de l’alternance et de l’apprentissage –, c'était de trouver des entreprises !
M. Éric Doligé. Bien sûr !
M. Charles Revet. Le système est trop complexe !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les entreprises nous expliquaient que l’activité du tuteur représentait une véritable charge de travail et qu’elle prenait du temps.
M. Jackie Pierre. Exact !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Il faut donc trouver des aides pour compenser cette charge.
M. Jean-Pierre Caffet. Il faut des aides pour tout !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Écoutez, 20 milliards d’euros pour le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, ce sont bien des aides !
M. Jean-Pierre Caffet. Justement, ça suffit !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Or là, vous n'avez pas d’états d’âme sur les contreparties !
Nous, nous proposons que, sur les 41 milliards d’euros, on puisse dégager 1 milliard à 2 milliards d’euros en faveur de l’apprentissage plutôt que de distribuer de l’argent sans condition.
Les régions n’ayant pas la compétence fiscale, elles ne peuvent pas baisser les impôts. C’est du ressort de l’État, de la loi. Elles ne peuvent pas non plus verser directement des aides aux entreprises, sinon elles contreviendraient au droit européen. Les marges de manœuvre des régions pour permettre aux entreprises d’accueillir plus d’apprentis ne sont donc techniquement pas grandes. On a essayé dans la région Nord-Pas-de-Calais, mais on a rencontré des difficultés.
La mesure que nous proposons, nous y avons réfléchi depuis longtemps. Elle n’est pas révolutionnaire, elle est simplement cohérente avec l’idée que les aides publiques massives versées aux entreprises méritent une contrepartie : recruter un grand nombre d’apprentis. (Applaudissements sur plusieurs travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour explication de vote.
M. Jean-Vincent Placé. Je ne vais pas cacher que l’intervention de Mme Bricq m’a singulièrement agacé. Ce n'est déjà pas facile de soutenir ce gouvernement (Exclamations amusées sur plusieurs travées de l'UMP.),…
M. Roger Karoutchi. Ah ça…
M. Jean-Vincent Placé. … mais si, en plus, les anciens ministres nous donnent des leçons de cohérence, d’efficacité et de vista politique et économique une fois revenus sur ces travées, cela devient intenable.
Marie-Noëlle Lienemann et André Gattolin l’ont dit très clairement : nous n’avons pas de leçons à recevoir ! Heureusement que le soutien que l’on apporte ou non au pacte de compétitivité ou au crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi n’est pas le marqueur de l’appartenance à la majorité, sinon il n’y aurait plus grand monde…
Cela fait deux ans que nous déplorons que ces 20 milliards d’euros aient été décidés sans mise en perspective politique, sans hiérarchisation des priorités économiques. Les effets d’aubaine sont parfois tels qu’ils font sourire celles et ceux qui reçoivent les chèques. On a même vu un restaurateur comparer sa situation à celle de Mme Bettencourt, en référence aux dispositions fiscales dont elle avait bénéficié lors du précédent quinquennat.
M. Henri de Raincourt. Cette fiscalité, c'est de la cuisine, en effet !
M. Jean-Vincent Placé. Tout ce que nous disons relève du bon sens. Par exemple, le crédit d’impôt recherche, qui existe toujours, pourrait être affiné, voire plafonné pour les grandes entreprises. Il faut avoir une vision en matière d’innovation et de recherche.
C’est la même chose en matière d’exportations. Il faut essayer de cibler, de prioriser, de thématiser. Avec la Banque publique d’investissement, privilégions les entreprises dans des secteurs porteurs. Pour notre part, nous sommes particulièrement attachés à la transition énergétique, mais il existe bien d’autres secteurs : le numérique, la santé, l’agroalimentaire, etc. Ce n’est pas très compliqué de prendre les six ou sept postes qui développent le commerce extérieur de notre pays et de les aider plutôt que de soutenir la grande distribution ou même La Poste, qui n’avait rien demandé.
Au sein de la Haute Assemblée, tout le monde est à peu près d’accord pour dire que l'apprentissage et la formation professionnelle sont des sujets éminemment importants. Alors, on s'interroge : pourquoi le Gouvernement n’écoute-t-il pas ? Pourquoi a-t-on l’impression que la discussion devient interne à la majorité, avec des élus frondeurs ou écologistes, contre la majorité socialiste ? Cela n’a pas de sens ! À quoi sert le Parlement ? À quoi sert le bicamérisme ? À quoi sert-il que nous fassions des propositions qui nous tiennent particulièrement à cœur ?
Pour atteindre l’objectif de 500 000 apprentis, qui est une priorité, il faut améliorer l’environnement des entreprises. La fiscalité et la réglementation doivent donc être stabilisées pendant trois, quatre ou cinq ans et une perspective quinquennale doit être donnée à l'apprentissage, à la formation, aux chercheurs et aux universitaires. Voilà ce qu’on attend de la Haute Assemblée !
Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, nous aimerions pouvoir soutenir l'amendement de notre collègue Marie-Noëlle Lienemann sans, de grâce, recevoir de leçons ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. François Patriat, pour explication de vote.
M. François Patriat. Le conseil régional de Bourgogne, le 30 juin dernier, a voté, sur ses ressources propres, 4 millions d’euros de rallonge pour soutenir l'apprentissage.
M. Francis Delattre. C’est bien !
M. François Patriat. Pour ce faire, il a réduit un certain nombre de crédits sur d’autres secteurs pouvant apparaître comme prioritaires.
J’entends bien le discours de toutes les pleureuses autour de l’apprentissage. Certains se font plaisir un peu par démagogie, d’autres pensent que la solution passe par l’octroi d’une aide supplémentaire de 500 euros…
La disparité des aides qu’accordent les régions avec des crédits de l’État est très importante : certaines donnent 1 800 euros aux employeurs d’apprentis dans les secteurs prioritaires, d’autres 1 400 ou 1 000. Or, sur les trois dernières années, quel que soit le montant de ces aides, la baisse du nombre d’apprentis dans toutes ces régions a été uniforme, oscillant entre 2 % et 7 %. Voilà la vérité !
M. Jacques Chiron. Absolument !
M. François Patriat. L’année dernière, je me suis opposé à la mesure du Gouvernement qui visait à économiser 500 millions d’euros par la suppression de l’indemnité compensatrice de formation, au prétexte qu’un rapport conjoint de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale des finances soulignait qu’elle ne procurait aucun effet levier.
Je ne suis pas sûr que cette indemnité induise un effet levier, mais les difficultés de l’apprentissage tiennent à un certain nombre de raisons sans lien avec l’existence d’une niche fiscale ou d’une aide ponctuelle : il s’agit d’abord du bac professionnel en trois ans, qui dissuade beaucoup d’artisans de prendre des apprentis ; il s’agit ensuite de la faiblesse structurelle, redondante, des centres de formation d’apprentis, dont beaucoup sont en difficulté et que les régions soutiennent du mieux possible ; il s’agit encore, bien entendu, de la conjoncture économique, mais aussi de l’orientation. S’agissant de cette dernière difficulté, il faut arrêter de présenter l’apprentissage, non pas comme la voie de l’échec, mais comme une voie secondaire qui ne permet pas de réussir tous les jours.
La réussite de l’apprentissage ne tient donc pas à 300 ou 500 euros supplémentaires. Je le dis à ma collègue : ce n’est pas en créant une nouvelle niche fiscale que l’on sauvera l’apprentissage. Beaucoup d’entreprises ne sont pas aujourd’hui en mesure de prendre des apprentis, faute de moyens, faute de temps et faute de marché.
M. Charles Revet. Et parce que les procédures sont trop complexes !
M. François Patriat. Il faut se pencher sur l’ensemble des facteurs qui nuisent au développement de l’apprentissage.
Nous sommes tous d’accord – le précédent gouvernement l’était également – pour augmenter le nombre de contrats d’apprentissage. En région Bourgogne, nous avions passé des contrats d’objectifs et de moyens avec Mme Morano, qui voulait que l’on porte le nombre d’apprentis à 15 000. À l’époque, je lui ai répondu qu’arriver à 12 000 serait déjà bien ; nous sommes restés à 10 000, alors que nous étions montés jusqu’à 12 500 les années précédentes !
L’adoption de cet amendement, qui laisse croire qu’en faisant cet effort supplémentaire on changerait la donne, enverrait peut-être un signal… Toutefois, madame Lienemann, le signal à envoyer doit être beaucoup plus large et englober l’orientation, l’accompagnement, les CFA et le soutien aux collectivités.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. C’est un premier pas !
M. François Patriat. Je ne pense pas que cet amendement puisse résoudre le problème de l’apprentissage à lui tout seul.
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote.
M. Éric Bocquet. Cet amendement, qui part d’une louable intention, pose une véritable question. Pour notre part, nous avons quelques réserves.
Je ne pense pas qu’il soit possible ni souhaitable d’évacuer le sujet de la formation initiale, dont on connaît les difficultés aujourd’hui. De nombreux lycées professionnels souffrent, il convient de les soutenir ardemment et avec vigueur. Les crédits qui nous sont présentés aujourd’hui prévoient, par exemple, une diminution de 3 millions d’euros pour l’enseignement technique agricole. Cela participe en partie de notre questionnement sur la formation initiale, qui doit rester le socle de la formation. En effet, nous le savons tous, les apprentis sont parfois des élèves, des étudiants qui ont connu l’échec scolaire en amont et qui, in fine, en viennent à choisir cette voie, laquelle peut bien évidemment s’avérer positive.
Dans nos collectivités, nous sommes régulièrement sollicités pour accueillir des jeunes. Or nous ne disposons pas forcément des capacités pour le faire. Je rejoins en cela notre collègue François Patriat, qui a souligné la nécessité de mobiliser des encadrants qualifiés, motivés, disponibles pour assurer un accompagnement véritable et permettre l’acquisition d’un savoir-faire, d’un métier au cours du processus.
Pour ces raisons, nous nous abstiendrons sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je me réjouis de ce débat. Je voudrais simplement rectifier un certain nombre de points, madame la sénatrice de Paris. Quand vous siégiez au conseil général du Nord…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Au conseil régional ! Même vous, vous les confondez ! (Sourires.)
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous avez fait allusion à un certain nombre d’expériences menées lorsque vous étiez au conseil régional du Nord. Le sénateur François Patriat, quant à lui, vient de faire état d’autres expériences et a mis en évidence des causes probablement différentes.
Ce que j’ai envie de vous dire, avec beaucoup d’humilité, c’est que vous avez adopté, cette nuit, un amendement dont le coût est de 1,7 milliard d’euros. En cet instant, nous discutons d’un amendement dont le coût est probablement supérieur à 1 milliard d’euros, vous l’avez vous-même admis, et je passe sur le coût de 40 millions d’euros du timbre fiscal du passeport qui semble assez marginal en regard des montants dont nous discutons…
Notre responsabilité collective est d’avoir une vision d’ensemble, de savoir comment financer ces mesures. C’est bien de dire qu’il faut réduire les charges – j’entendais tout à l'heure que l’on prévoyait de réduire l’impôt sur les sociétés de quelques milliards d’euros –, mais quelles sont les propositions de financement ? Certains de ceux qui soutiennent cet amendement veulent moins de contrats aidés au motif que l’apprentissage serait plus efficace.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il faut gager !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je ne suis pas sûr, madame Lienemann, pour avoir participé à l’intégralité des débats à l’Assemblée nationale et pour avoir examiné les amendements dont l’objet était proche du vôtre, que leurs auteurs réclamaient plus de contrats aidés. D’ailleurs, M. Marini en veut moins.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Nous avons tous nos différences !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. D’autres proposent, pour financer ce type de mesures, de diminuer les aides aux entreprises. Parmi ceux-là, certains visent la C3S, d’autres préfèrent diminuer le CICE… En tout cas, les mêmes qui défendent des dépenses supplémentaires pour l’apprentissage veulent des dépenses supplémentaires pour les contrats aidés ou des réductions d’impôt pour les entreprises.
La position du Gouvernement n’est pas sérieuse, monsieur Karoutchi ? Je crois pourtant que vous avez fait partie d’un gouvernement qui a doublé la dette ! (Protestations sur les travées de l'UMP.) C’est une réalité !
M. Francis Delattre. Vous oubliez qu’il y avait la crise !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Alors même que nous sortons d’une conférence sociale au cours de laquelle le Président de la République a donné un signe fort sur l’apprentissage, …
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Oui, un de plus ! Il est temps d’aller au-delà des signes !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … et alors que le Premier ministre s’apprête, peut-être même au moment où nous parlons, à tenir un certain nombre de propos sur l’apprentissage, vous nous dites que ce n’est pas sérieux. Vos propos ne sont pas très courtois. Permettez, de temps en temps, que le Gouvernement aussi soit quelque peu froissé par un certain nombre de propos tenus dans cet hémicycle.
Le Gouvernement a une cohérence.
M. Francis Delattre. Il n’en a aucune !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Il a fixé un calendrier pour la diminution des contributions et des charges des entreprises, ainsi que pour celle des impôts d’un certain nombre de catégories. Tout cela a un coût que nous assumons par des réductions de dépenses. Or ici je n’entends que propositions de dépenses supplémentaires ou d’allégements des contributions aux recettes de l’État.
Telle est notre différence. Je tenais simplement, en étant extrêmement respectueux, monsieur Placé, des droits du Parlement – le Parlement a des droits, le Gouvernement a des devoirs – à rappeler que le Parlement, de temps en temps, pourrait aussi avoir quelques devoirs en matière d’équilibre des finances publiques – ce serait une façon de se responsabiliser – et le Gouvernement quelques droits dont il entend disposer.
Madame Lienemann, je n’ai jamais dit que les régions n’avaient qu’à payer. Vous pourrez vous référer au compte rendu de nos travaux pour le vérifier. Dans une vie antérieure, figurez-vous que j’ai été, moi aussi, vice-président d’un conseil régional, celui de la région Lorraine. J’ai donc, moi aussi, le sens des responsabilités et des compétences d’un conseil régional.
J’ai simplement dit que la compétence de l’apprentissage et de la formation professionnelle serait – encore plus à l’avenir, me semble-t-il, c’est en tout cas le souhait du Gouvernement – confiée aux conseils régionaux et qu’il y avait lieu – les propos de M. Patriat sont à cet égard assez éloquents – d’entraîner dans cette discussion, dans cette construction d’un mouvement en faveur de l’apprentissage, les conseils régionaux. Je n’ai jamais dit que ces derniers n’avaient qu’à payer. J’ai moi aussi cette fibre régionale héritée d’une région qui m’est chère.
Le Gouvernement ne souhaite pas l’adoption de cet amendement, mais le Parlement est souverain.
M. Henri de Raincourt. Bravo, madame Lienemann !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
Article 1er bis (nouveau)
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du 1 de l’article 150-0 D est complété par les mots : « , ni au gain net mentionné au I de l’article 163 bis G » ;
2° Le II bis de l’article 150-0 D ter est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° À l’avantage et au gain mentionnés au dernier alinéa du 1 de l’article 150-0 D. »
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer cet alinéa par cinq alinéas ainsi rédigés :
1° L’article 150-0 D est ainsi modifié :
a) Le dernier alinéa du 1 est complété par les mots : « , ni au gain net mentionné au I de l’article 163 bis G » ;
b) Le 1 quinquies est ainsi modifié :
- aux premier, deuxième, troisième, septième, huitième, onzième, douzième, treizième (deux fois), quinzième, avant-dernier et dernier alinéas, les mots : « de la date » sont remplacés par les mots : « du 1er janvier suivant la date » ;
- aux quatrième et cinquième alinéas, les mots : « de la date à » sont remplacés par les mots : « du 1er janvier de l’année suivant celle au cours de » ;
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement a pour objet de simplifier la gestion des portefeuilles de valeurs mobilières de placements par les établissements financiers et les contribuables. À cette fin, il est proposé de faire partir le décompte du délai de détention de ces valeurs pour le calcul de l’abattement sur les plus-values au 1er janvier de l’année suivant l’acquisition de ces titres ou droits. En effet, le mode de calcul en vigueur, de date réelle à date réelle, semble poser des difficultés de gestion aux établissements financiers, la reconstitution des portefeuilles actuels semblant particulièrement délicate.
Il s’agit d’un ajustement de date de mise en application qui répond à une attente des acteurs du secteur financier.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je vous prie de m’excuser, mais je vais être un peu technique. Il s’agit en effet d’une question précise.
La réforme des durées d’abattement des plus-values des valeurs mobilières concernait les régimes dits « favorable » et de « droit commun ». Par ce dispositif, les détenteurs de valeurs mobilières bénéficiaient, par exemple, d’un abattement de 50 % sur les plus-values réalisées au bout d’un an de détention dans le régime favorable et deux ans – je crois – dans le régime de droit commun.
La question est de savoir comment calculer cette durée de détention. Dans un premier temps, le gouvernement précédent avait proposé de prendre en compte la situation au 1er janvier de l’année antérieure pour les acquisitions et au 31 décembre pour les ventes. On arrivait ainsi à un paradoxe formidable : celui qui achetait un titre le 29 décembre et qui le vendait le 2 janvier suivant pouvait comptabiliser une année de détention, ce qui paraissait un peu curieux et par trop favorable.
Le Parlement, en loi de finances initiale, avait considéré qu’il y avait lieu d’évaluer la durée de détention de date à date : un titre acheté le 1er juillet devait être effectivement détenu pendant un an – c’est-à-dire jusqu’au 1er juillet de l’année suivante – pour pouvoir comptabiliser un an de détention. Cela nous semblait être la meilleure des solutions.
Votre rapporteur général propose de retenir la date du 31 décembre de l’année suivante, au motif que la durée exacte de détention peut être ignorée, sachant que le contribuable détenteur de titres pourrait ne pas avoir conservé trace de la date d’acquisition et de vente de ces titres, le tableau d’abattement ne s’arrêtant pas à un an mais s’étalant, si ma mémoire est bonne, sur huit années.
Un tel dispositif nous paraît pénalisant pour l’investisseur, car cela reviendrait à obliger certains propriétaires de titres à les détenir dix-huit mois, voire plus, pour pouvoir comptabiliser une année entière. Le Gouvernement souhaite en rester au statu quo : les établissements financiers effectuent des relevés annuels de portefeuilles, parfois même semestriels, trimestriels, voire mensuels pour des portefeuilles substantiels et suivant la nature des banques. Il existe donc toujours, dans la composition de son portefeuille, un point de repère à partir duquel le titulaire des titres peut faire valoir leur possession, à quelques mois près, s’il ne dispose pas des dates exactes d’exécution.
De toute façon, la justification de la durée de détention incombe au contribuable, et non aux établissements financiers, même si nombre de ces derniers s’acquittent de cette tâche pour la commodité de leurs clients.
Pour éviter ces difficultés – je ne prétends pas qu’il n’en existe pas dans la formule actuelle, mais celle-ci a le mérite d’être juste, puisque l’on travaille de date à date –, je vous suggère donc, monsieur le rapporteur général, de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je tiens à remercier M. le secrétaire d’État de ses explications détaillées, qui sont peut-être un peu techniques pour certains de nos collègues, mais qui répondent parfaitement aux interrogations qui étaient les nôtres.
Des clarifications utiles ayant été apportées quant aux dates et aux modalités de mise en œuvre du dispositif, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 3 est retiré.
Je mets aux voix l'article 1er bis.
(L'article 1er bis n'est pas adopté.)
Article 1er ter (nouveau)
I. – Le II de l’article 199 ter S du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les trois dernières phrases du 1 sont supprimées ;
2° Le même 1 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par exception :
« a) Lorsque le devis ou la facture visant les travaux financés ne permettent pas de justifier les informations figurant dans le descriptif mentionné au 5 du même I, l’entreprise réalisant les travaux est redevable d’une amende égale à 10 % du montant des travaux non justifié. Cette amende ne peut excéder le montant du crédit d’impôt. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent a ;
« b) Lorsque la justification de la réalisation ou de l’éligibilité des travaux n’est pas apportée par le bénéficiaire dans le délai prévu au 5 dudit I, à l’exception des cas mentionnés au a du présent 1, l’État exige du bénéficiaire le remboursement de l’avantage indûment perçu. Celui-ci ne peut excéder le montant du crédit d’impôt majoré de 25 %. Un décret en Conseil d’État définit les modalités de restitution de l’avantage indu par le bénéficiaire de l’avance remboursable sans intérêt. » ;
3° Au 3, les références : « aux 1 et 2 » sont remplacées par les références : « au premier alinéa du 1 et au 2 ».
II. – Le I s’applique aux offres d’avance émises à compter de l’entrée en vigueur du décret prévu au même I et, au plus tard, au 1er janvier 2015.
M. le président. L'amendement n° 88 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 5, première phrase
1° Remplacer les mots :
les travaux financés
par les mots :
tout ou partie des travaux financés
2° Remplacer les mots :
les travaux
par les mots :
ces travaux
La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. Si vous me le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps les amendements nos 88 rectifié et 89 rectifié, qui visent tous deux à apporter quelques améliorations importantes à l’article 1er ter.
M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 89 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Fortassin, Baylet, C. Bourquin et Collombat, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Tropeano, Requier et Vall, et ainsi libellé :
Alinéa 5, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Sans préjudice des dispositions du présent a, l'entreprise peut avoir recours à un tiers pour vérifier l'éligibilité des travaux.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. François Fortassin. L’article 1er ter a pour objet de simplifier et de faciliter l’accès à l’écoprêt à taux zéro, dit « éco-PTZ », destiné à financer les travaux d’amélioration de la performance énergétique des logements.
Ce dispositif repose actuellement sur des établissements de crédit ayant conclu une convention avec l’État. Or ces établissements rencontrent souvent des difficultés pour évaluer l’éligibilité des travaux à l’éco-PTZ.
Afin de renforcer l’attractivité du dispositif et de favoriser la rénovation énergétique des logements, il est proposé, dans cet article 1er ter, de transférer la responsabilité de l’attestation de l’éligibilité des travaux des banques vers les entreprises réalisant ces travaux. En cas de devis ou de facture non conforme aux exigences fixées pour l’obtention du prêt, l’entreprise devra alors acquitter une amende.
Nous vous proposons, mes chers collègues, d’améliorer ce dispositif grâce à l’amendement n° 88 rectifié, qui vise les cas, très fréquents, dans lesquels un ensemble de travaux est réalisé par différentes entreprises. Il est logique, dans cette situation, que l’entreprise commettant une erreur dans la déclaration de ses travaux éligibles ne puisse être sanctionnée que sur sa seule part de travaux, indépendamment de ceux qui auront été réalisés par les autres sociétés.
L’amendement n° 89 rectifié, quant à lui, a pour objet de permettre aux entreprises – dans le secteur du bâtiment, il s’agit bien souvent de petites ou moyennes entreprises, voire de très petites entreprises – de recourir à un « tiers vérificateur » pour s’assurer de l’éligibilité des travaux. Ces tiers pourraient être des organismes « reconnus », « agréés » ou « habilités » par l’État, comme Qualigaz, Qualifelec, Promotelec, etc. Les entreprises qui le souhaiteraient pourraient faire appel à ces organismes pour vérifier l’éligibilité de leurs travaux.
Cet ajout est absolument indispensable, dans la mesure où il ne revient pas à des entreprises artisanales du bâtiment de maîtriser l’ensemble des conditions fixées par l’État pour bénéficier d’une aide publique, telle que l’éco-PTZ, et ce d’autant que les réglementations évoluent régulièrement.
Sans la mise en place concomitante du transfert de responsabilité des banques vers les entreprises du bâtiment en matière d’attestation de l’éligibilité à l’éco-PTZ, d’une part, et du dispositif de « tiers vérificateur », d’autre part, les entreprises, principalement les plus petites d’entre elles, se trouveraient seules à assumer l’entière responsabilité de l’éligibilité des travaux, sans aucune possibilité de s’assurer face au risque d’erreur.
Cela nous semble tout à fait inacceptable et contraire à la volonté du Gouvernement de simplifier la vie des entreprises. Ces dernières ne peuvent pas attendre, comme vous l’avez suggéré à l’Assemblée nationale, monsieur le secrétaire d’État, le vote de la loi sur la transition énergétique pour la mise en place d’un tel dispositif, le transfert de responsabilité pour l’éco-PTZ intervenant, lui, dès le 1er septembre prochain.
C’est pourquoi, pour faciliter l’accès à l’éco-PTZ sans mettre en difficulté les petites entreprises du bâtiment, nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter très largement ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 88 rectifié et 89 rectifié ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° 88 rectifié tend à préciser la rédaction de l’article pour prévoir le cas, fréquent dans l’hypothèse d’un bouquet de travaux, où plusieurs entreprises réalisent ces derniers. Comme François Fortassin l’a souligné, cette mesure est de nature à rassurer les artisans, qui souhaitent, en termes d’éligibilité des travaux à l’écoprêt à taux zéro, être responsables de la seule part des travaux qu’ils ont eux-mêmes réalisés, et non du reste.
J’émets donc un avis favorable sur l’amendement n° 88 rectifié.
L’amendement n° 89 rectifié, quant à lui, a pour objet d’offrir aux artisans la possibilité de recourir à des tiers pour vérifier l’éligibilité à l’écoprêt à taux zéro des travaux pour lesquels ils ont établi un devis. Cette disposition permettrait également de rassurer les professionnels, mais la commission des finances s’interroge sur la nécessité de la faire figurer dans la loi. Sur ce sujet, nous souhaitons l’éclairage du Gouvernement, et le secrétaire d’État nous donnera certainement son appréciation sur la question.
En ce qui concerne l'amendement n° 89 rectifié, je souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. S’agissant de l’amendement n° 88 rectifié, le Gouvernement rejoint l’analyse de M. le rapporteur général. Il juge cette disposition utile et remercie même les auteurs de l’amendement d’avoir ainsi permis de préciser ce qu’il adviendra au moment où plusieurs entreprises conduiront un chantier commun bénéficiant d’un éco-PTZ. Une telle clarification des responsabilités des uns et des autres se révélera tout à fait bénéfique.
En revanche, les dispositions de l’amendement n° 89 rectifié nous posent un certain nombre de difficultés quant à leur rédaction et leur application, même si la piste qu’elles ouvrent nous est connue. D’ailleurs, le Gouvernement travaille actuellement sur cette possibilité et il sera probablement, mesdames, messieurs les sénateurs, en mesure de vous proposer une nouvelle rédaction assez prochainement, soit dans le cadre de la navette sur ce présent projet de loi de finances rectificative, soit à l’occasion de l’examen d’un autre texte de loi.
Nous sommes bien sûr prêts à travailler la question avec vous. Il s’agirait de clarifier précisément le rôle du tiers vérificateur, car nous ne souhaitons pas que cette disposition, à laquelle nous réfléchissons, alourdisse les procédures.
Les aménagements dans la mise en œuvre du prêt à taux zéro ont justement pour but d’éviter les lourdeurs et difficultés pénalisant le dispositif, qui – on peut le reconnaitre simplement, avec l’humilité qui convient –, ne fonctionne pas bien.
Nous entendons donc l’améliorer, le fluidifier un peu, tout en clarifiant les responsabilités. Les banques ne souhaitent effectivement pas les assumer, et si certaines entreprises, notamment celles qui sont labellisées, semblent pouvoir le faire, la mise en place d’un tiers vérificateur apparaît comme un moyen de franchir une étape supplémentaire. Je crains toutefois qu’elle n’engendre aussi quelques frais supplémentaires… En effet, on imagine aisément que l’intervention d’un tel tiers ne sera pas gratuite !
Telles sont les préoccupations du Gouvernement. Nous comprenons et partageons les interrogations des auteurs de cet amendement n° 89 rectifié, mais, dans sa rédaction actuelle, nous ne souhaitons pas retenir cette proposition, étant précisé que nous aurons l’occasion de revenir prochainement sur le sujet.
Par conséquent, le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 89 rectifié, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. L’article 1er ter m’a interpellé, compte tenu de ce que l’on peut lire dans le chapitre du rapport à son sujet : « Les banques se montrent très réticentes à distribuer ce type de prêt, d’autant plus que, comme cela a été expliqué précédemment, elles sont tenues de reverser à l’État le crédit d’impôt dont elles ont bénéficié en cas d’erreur quant à l’éligibilité des travaux de l’emprunteur ». Aussi, les banques rencontrant une difficulté, on la transfère sur les entreprises !
Je tenais à attirer votre attention sur ce point, mes chers collègues, car c’est une complexité supplémentaire que l’on impose. Déjà, des taux différents de TVA s’appliquent selon le type de travaux, ce qui oblige à inscrire différentes lignes budgétaires sur les factures ou, par anticipation, sur les devis.
J’observe également que cette responsabilité supplémentaire s’accompagne de l’application d’une pénalité, celle qui s’imposait auparavant aux banques étant également transférée au niveau de l’artisanat. Ainsi, d’un côté, on envoie un signal positif, avec cet avantage fiscal qui encourage les chantiers, donc qui est susceptible de donner du travail en plus aux entreprises ; de l’autre, on adresse un signal négatif, avec l’instauration d’une pénalité.
Il aurait été plus judicieux, me semble-t-il, de différer la mise en œuvre de cette pénalité et d’observer pendant un an comment le transfert de responsabilités s’effectue, comment les entreprises réagissent, afin de leur permettre de s’adapter à l’évolution et, en particulier, d’obtenir en plus grand nombre la labellisation « reconnu garant de l’environnement », ou RGE.
Il ne faut pas s’étonner ensuite, monsieur le secrétaire d’État, que les entreprises fassent appel aux travailleurs détachés. Il leur faut bien retrouver de la compétitivité, tandis que la complexité des dispositifs mis sur pied les pousse à chercher d’autres moyens d’améliorer leurs marges.
C’est pourquoi j’émets de fortes réserves sur cet article.
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Le I s’applique aux offres d’avance émises à compter de l’entrée en vigueur du décret prévu au a du 1 du II de l’article 199 ter S du code général des impôts, tel qu’il résulte de la présente loi et, au plus tard, au 1er janvier 2015.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er ter, modifié.
(L'article 1er ter est adopté.)
Article 1er quater (nouveau)
Le I de l’article 569 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les deux occurrences du mot : « cigarettes » sont remplacées par les mots : « tabacs manufacturés » ;
2° À la première phrase du second alinéa, les mots : « par et » sont supprimés.
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Ne serait-ce que pour des raisons de santé publique, on peut parfaitement comprendre – c’est même une évidence – la nécessité de lutter contre la contrefaçon des produits du tabac et de mieux assurer leur traçabilité. Selon toute vraisemblance, si j’en crois le rapport, une directive européenne, que nous risquons, cette fois, de voir transposée par anticipation, porte sur cette question pour le moins décisive.
Seulement, que la certification des produits du tabac soit assumée par un organisme indépendant pose un problème assez simple. Si tant est que nous ayons bien compris le processus, une entreprise helvétique aurait mis en œuvre une intense campagne de « pression » pour convaincre certains élus du bien-fondé du dispositif de traçabilité qu’elle se propose de mettre sur le marché à la demande de toute autorité qui le souhaiterait…
Le problème posé par l’article 1er quater est donc le suivant : nous sommes en train de voter une disposition donnant à une entreprise privée, selon la plus pure forme du cas d’espèce, la possibilité de s’assurer le marché de la sécurité des produits du tabac, alors même que cette mission devrait tout simplement relever d’une autorité indépendante.
Par principe, nous avons toujours été opposés à tout transfert d’une compétence d’ordre public à une entreprise privée prestataire de services. Nous ne pouvons donc que nous opposer à l’adoption de cet article de circonstance, adoption au demeurant prématurée, tous les contours de la directive n’étant pas encore parfaitement et définitivement connus.
Les services du ministère de l’agriculture, éventuellement ceux du ministère des finances, ou un service administratif émanant de la Commission européenne nous sembleraient mille fois plus indiqués qu’une entreprise privée, qui pourrait être sensible aux amicales pressions des acteurs du marché.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’article 1er quater adopté par l’Assemblée nationale vise à confier à des tiers indépendants le traitement des données permettant d’assurer l’identification et la traçabilité des produits de tabacs.
En ce sens, il anticipe utilement la prochaine transposition de la directive « Tabacs » du 3 avril 2014, sans prendre parti pour une technologie ou pour une entreprise en particulier. Il s’agit seulement d’acter le principe de transparence, que personne ne songe à contester.
Toutefois, nous comprenons également les préoccupations du Gouvernement, qui était opposé à l’adoption de cet article à l’Assemblée nationale, si j’ai bien compris, ainsi que celles des auteurs de cet amendement de suppression. De fait, la modification du droit applicable est peut-être prématurée, dans la mesure où d’importantes précisions techniques sont encore attendues de la Commission européenne en vue de la transposition de la directive.
Par ailleurs, nos collègues députés Thomas Thévenoud et Jean-François Mancel travaillent actuellement à ces questions, lesquelles devraient être traitées dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2015.
Dans ces conditions, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Le Gouvernement a bien entendu les arguments avancés par M. Bocquet. Il s’agit d’un sujet délicat, qui laisse souvent place à des interprétations : on entend ainsi que certains pourraient céder à la pression des lobbies, ceux du tabac, bien sûr, mais aussi d’autres secteurs d’activités – vous avez d’ailleurs cité l’exemple, monsieur le sénateur, d’un groupe de pression probablement au moins aussi actif.
Le Gouvernement souhaite donc être très précis. La directive du 3 avril 2014 relative aux produits du tabac instaure des obligations en matière de marquage et de traçabilité. Elle concrétise la participation de l’Union européenne et de ses États membres au protocole de l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, relatif à la traçabilité des produits du tabac, chose que certains contestent, d’ailleurs.
Le législateur français a anticipé sur ce cadre communautaire. Dès le projet de loi de finances rectificative de 2012, il a souhaité inscrire le principe de la traçabilité dans notre droit national, par l’adoption de l’article 569 du code général des impôts.
Il apparaît néanmoins que cet article doit être adapté au cadre communautaire fixé par cette directive récemment adoptée. Un amendement a été déposé en ce sens à l’Assemblée nationale, qui visait à la transposer dans le droit national – c’est, du moins, ce que les auteurs de cette disposition ont indiqué.
Telle n’est pourtant pas l’interprétation du Gouvernement. En effet, la rédaction actuelle, telle qu’elle est issue des travaux de l’Assemblée nationale, n’introduit pas la notion de « tiers indépendant », notamment pour ce qui a trait au stockage des données, un élément extrêmement important et non encore inscrit dans notre droit.
L’amendement n° 57 vise à supprimer l’article 1er quater introduit par l’Assemblée nationale et à revenir ainsi à l’article 569 du code général des impôts, dont j’ai indiqué qu’il n’était pas satisfaisant, car il n’est pas pleinement conforme à la directive. Je souligne d’ailleurs, à la suite de M. le rapporteur général, que nous attendons la publication de certains textes devant préciser les modalités d’application de la directive.
Le Gouvernement propose donc de procéder à la transposition à l’identique de la directive, comme nous serons de toute façon amenés à le faire, et de réécrire l’article 569 du code général des impôts. Pour cela, nous pourrions mettre à profit le temps de la navette.
Comme je l’ai rappelé à l’Assemblée nationale, si des actes délégués, c’est-à-dire des textes d’application de la directive, étaient adoptés entre-temps, nous pourrions préciser les dispositions transposées.
Pardonnez-moi d’avoir été quelque peu précis et technique, mesdames, messieurs les sénateurs, mais je voudrais que les choses soient très claires. On le sent bien, en effet, ce sujet amène certains à se livrer à des accusations, selon lesquelles, notamment – je l’ai entendu à l’Assemblée nationale ou non loin de là – le Gouvernement cèderait au lobby du tabac.
Le Gouvernement a la volonté – antérieure à mon arrivée aux fonctions de secrétaire d’État chargé du budget – d’assurer la traçabilité, le stockage de données et le contrôle des dispositifs mis en place, sans pour autant renvoyer ces missions à des entreprises de caractère privé, qui pourraient trouver là l’occasion de prospérer, en France, mais aussi ailleurs, le mouvement étant européen.
Le Gouvernement veut procéder de façon extrêmement méticuleuse. La rédaction actuelle de l’article, issue des travaux de l’Assemblée nationale, ne nous satisfait pas ; nous souhaitons prendre le temps de la modifier. Néanmoins, revenir à la rédaction actuelle de l’article 569 du code général des impôts ne nous satisfait pas plus. Dès lors, le Gouvernement entend bien continuer à y travailler et préciser les choses dans le cadre des travaux parlementaires à venir.
Dans cette attente, si vous ne retirez pas cet amendement, monsieur le sénateur, le Gouvernement s’en remettra à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je suis un peu surpris de ce que nous dit M. le secrétaire d’État au budget.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est ce qui nourrit notre dialogue !
M. le secrétaire d’État prétend, en effet, que le texte venu de l’Assemblée nationale ne le satisfait pas vraiment, mais qu’il n’est pas non plus favorable à sa suppression.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Mais alors, pourquoi ne pas l’amender, pour que sa rédaction devienne satisfaisante ? N’est-ce pas une question connue depuis un certain temps, ainsi que plusieurs orateurs l’ont rappelé ?
Par ailleurs, pourriez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous préciser les aspects industriels de la question ? Dans l’amendement adopté à l’Assemblée nationale, dû à l’initiative de MM. Grandguillaume et Solère, on trouve un dispositif, que je ne suis pas capable d’analyser de manière technique, mais qui se traduira par la fourniture de prestations d’un industriel. Ce point, vous l’avez souligné, monsieur le secrétaire d’État, a fait l’objet de divers commentaires, notamment dans la presse. Or il n’est tout de même pas excellent de laisser vivre un texte qui semble frappé d’une telle ambigüité ou qui suscite de tels propos.
Au demeurant, vous l’avez signalé, la France n’est pas le seul pays en cause. Un journal marocain, La Nouvelle Tribune, reprend une problématique voisine, s’agissant de prestations identiques, susceptibles d’être fournies par une société suisse.
N’est-il donc pas préférable, dans ces conditions, de suivre l’initiative des auteurs de l’amendement n° 57 ? S’il faut mettre en place un dispositif de traçabilité, pourquoi ne pas le faire correctement, de façon transparente, sur la base des rapports parlementaires qui vont être élaborés, et sans qu’aucun soupçon particulier puisse avoir cours ?
C’est à la lumière des réponses qu’il sera possible d’apporter à ces questions qu’il faudra se décider. Dans le doute, pour ma part, je serai plutôt enclin à voter cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je suis très favorable à cet amendement tendant à supprimer l’article 1er quater.
Il y a quelques jours, le Sénat a organisé un débat sur l’application des lois, au cours duquel le sujet de la traçabilité des produits du tabac a été abordé. Il a été signalé que les textes de mise en place des dispositions législatives relatives à ce sujet n’avaient pas été pris, pour des raisons que nous comprenons mieux aujourd’hui…
Les dispositions en question ont des implications multiples. Or nous avons déjà suffisamment de problèmes avec certaines sociétés privées, auxquelles ont été déléguées des missions de service public.
Je pense notamment à la plateforme nationale des interceptions judiciaires, confiée à Thalès. L’installation de la plateforme a pris des mois de retard sur le calendrier ; elle ne fonctionne toujours pas, malgré un budget qui explose. J’ai donc envie de dire, pour ceux que ce sujet intéresse : vous avez aimé le système Louvois, vous allez adorer la plateforme des interceptions judiciaires ! En effet, les problèmes qui vont se poser sont similaires.
Nous le verrons – peut-être – après le vote sur l’article d’équilibre, un projet de loi de finances rectificative est un véhicule intéressant : il permet de raccrocher au projet de loi de finances initiale certaines dispositions qui n’ont pu être étudiées au cours de son examen, lequel, au Sénat, est tronqué depuis deux ans, les dépenses n’étant pas examinées du fait du rejet des recettes.
Mme Nathalie Goulet. Je le sais bien, monsieur le secrétaire d'État ; moi non plus, d’ailleurs !
On comprend donc la frustration de certains et l’envie d’inscrire quelques dispositions au sein du projet de loi de finances rectificative.
Néanmoins, je suis plutôt d’avis d’adopter l’amendement de suppression et de revoir cette question dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2015. Cela me semble de meilleure pédagogie ; nous aurons alors plus d’informations.
De plus, transposer une directive par voie de projet de loi de finances rectificative ne me semble pas une bonne méthode.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je voudrais aborder l’aspect sanitaire de cette question.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !
M. René-Paul Savary. La commission des affaires sociales a largement débattu des méfaits du tabac : lors de ses discussions sur un rapport, fort intéressant, sur les taxes comportementales, élaboré par Yves Daudigny et Catherine Deroche, si ma mémoire est bonne, mais aussi au moment où le plan cancer a été établi. En effet, l’implication du tabac dans ce domaine est terrible.
Pour moi, la suppression de l’article 1er quater, que l’on peut comprendre pour d’autres raisons, reviendrait à envoyer à un très mauvais signal à tous ceux qui sont sensibles aux dégâts causés par le tabac.
C’est la raison pour laquelle la proposition de M. le président de la commission des finances me paraît intéressante. L’objectif de l’amendement adopté par l’Assemblée nationale était, d’une part, d’étendre l’obligation de marquage et de traçabilité à l’ensemble des produits manufacturés de tabacs – c’est une ambition que l’on peut partager –, et, d’autre part, de retirer aux professionnels du secteur du tabac le contrôle et la mise en œuvre des systèmes de traçabilité – une visée qui pose davantage de problèmes.
Il nous faut donc trouver une solution, monsieur le secrétaire d’État, qui permette de ne pas envoyer de mauvais signal, tout en étant constructif sur la question de la traçabilité.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Encore une fois, la rédaction actuelle de l’article 569 du code général des impôts n’est pas satisfaisante. (M. le président de la commission des finances approuve.) Le Gouvernement souhaite donc l’améliorer.
La rédaction issue de l’Assemblée nationale étend effectivement la notion de « traçabilité » à l’ensemble des produits du tabac. En ce sens, elle constitue un progrès.
Toutefois, le dispositif adopté par vos collègues députés ne nous satisfait pas non plus. Il se heurte en effet à certains volets de la directive et présente d’autres inconvénients, notamment sur le stockage des données et l’intervention d’une entreprise privée.
À mon sens, le signal donné n’est pas ni bon ni mauvais en matière de prévention et de lutte contre la fraude, la contrebande et le tabagisme.
Par ailleurs, je partage le souhait de M. le président de la commission des finances de parvenir à une rédaction commune ; je me suis toujours prononcé en ce sens depuis le début de nos travaux. Nous n’avons pas pu atteindre cet objectif dans les délais qui nous étaient fixés, faute de texte d’application de la directive, qui n’est pas suffisamment précise sur un certain nombre de points.
Comme l’a souligné l’une de vos collègues, il serait plus opportun de traiter le sujet en loi de finances initiale. D’ailleurs, nous n’avons pas encore tous les éléments en notre possession.
La question est très sensible et donne lieu à des accusations multiples et variées ; d'ailleurs, comme M. le président de la commission des finances l’a rappelé, la presse s’en fait parfois l’écho. Nous aurons l’occasion d’en entendre parler de nouveau dans les jours et les semaines à venir.
De deux choses l’une : soit le Sénat décide de revenir au mauvais texte actuellement en vigueur, soit il décide de laisser vivre le mauvais texte – dans mon esprit, l’expression ne vaut évidemment pas reproche fait aux députés – qui vient d’être adopté par l’Assemblée nationale. Le Gouvernement prendra ses responsabilités et proposera sa propre version. Il appartiendra ensuite au Parlement de décider.
Le dispositif envisagé présente autant d’avantages que d’inconvénients. Je suis donc enclin à m’en remettre à la sagesse de la Haute Assemblée. La situation n’est pas dramatique, mais elle n’est pas forcément très confortable. Nous ne devons donc légiférer qu’avec prudence. D’ailleurs, certains aspects du problème pourront peut-être être traités par voie réglementaire, sans que des dispositions législatives soient nécessaires.
Je le répète, je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er quater.
(L'article 1er quater est adopté.)
Article 1er quinquies (nouveau)
Au dernier alinéa de l’article 575 du code général des impôts, le taux : « 95 % » est remplacé par le taux : « 97 % ». – (Adopté.)
Article 1er sexies (nouveau)
Le 3 du B du VI de la section II du chapitre Ier du titre IV de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par un article 776 quater ainsi rédigé :
« Art. 776 quater. – À compter du 1er janvier 2014, les frais de reconstitution des titres de propriété d’immeubles ou de droits immobiliers engagés dans les vingt-quatre mois précédant une donation entre vifs pour permettre de constater le droit de propriété du donateur et mis à la charge de ce dernier par le notaire sont admis, sur justificatifs, en déduction de la valeur déclarée des biens transmis, dans la limite de cette valeur, à la condition que les attestations notariées, mentionnées au 3° de l’article 28 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, relatives à ces biens aient été publiées dans les six mois précédant l’acte de donation. » – (Adopté.)
Article 1er septies (nouveau)
Au deuxième alinéa du 2 du C du IV de l’article 27 de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, les mots : « celle autorisée par le coefficient d’occupation des sols applicable » sont remplacés par les mots : « la surface de plancher maximale autorisée en application des règles du plan local d’urbanisme ou du plan d’occupation des sols ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 1er septies
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 22 rectifié bis, présenté par Mme Primas, MM. G. Larcher et Gournac, Mme Duchêne et M. Bas, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 278-0 bis est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... – Les droits d’entrée pour la visite des parcs zoologiques. » ;
2° Au b ter de l’article 279, les mots : « zoologiques et » sont supprimés.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 110, présenté par M. Doligé, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 278-0 bis du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... – Les droits d’entrée dans les parcs zoologiques. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Les dispositions de mon amendement s’inscrivent dans la même perspective que celles de l'amendement n° 22 rectifié bis. Je présenterai donc les arguments qui ont motivé le dépôt de ces deux amendements. D’ailleurs, Mme Primas m’avait demandé de défendre son point de vue, qui est inspiré par la situation du parc zoologique de Thoiry.
Le taux de TVA appliqué aux droits d’entrée des parcs zoologiques est successivement passé de 5,5 % à 7 % au 1er janvier 2012, puis à 10 % au 1er janvier 2014.
Je le rappelle, l’activité des zoos représente 2 000 emplois en contrat à durée indéterminée, ainsi que de nombreux emplois induits, et toujours dans des zones rurales. C’est également un atout pour le développement touristique ; les parcs attirent beaucoup de visiteurs, qui, pour une bonne part, n’auraient pas les revenus suffisants pour effectuer de grands voyages à l’étranger.
En outre, les parcs zoologiques remplissent de nombreuses missions, par exemple de préservation de la biodiversité, d’éducation du public ou de recherche scientifique, pour lesquelles ils ne sont pas financés à l'échelon national, ou alors très peu. Ils ont également une activité agricole, qui les rapproche du spectacle vivant.
Malheureusement, l’augmentation de la TVA représente un surcoût considérable pour ces établissements très utiles au plan local ; je le rappelle, il y en a plus de quatre-vingt-dix en France, répartis sur tout le territoire.
Ainsi, le zoo de Beauval, qui est un zoo familial, atteint aujourd'hui 1,1 million de visiteurs. Ce n’est tout de même pas mal dans une zone rurale ! En outre, il a une véritable activité. Or, selon son directeur, qui préside par ailleurs l’Association française des parcs zoologiques, le passage du taux de TVA à 10 % représente pour son établissement une perte nette de quarante-cinq emplois. L’augmentation des charges est donc considérable !
Certes, le dispositif sur lequel je propose de revenir rapporte à l’État, mais les sommes sont relativement faibles au regard du volume général du budget. Et, je vous le rappelle, il s’agit de 2 000 emplois directs et d’activités touristiques, de loisirs, mais également scientifiques extrêmement importantes.
Mes chers collègues, je vous remercie d’appuyer cet amendement, que nous sommes plusieurs à soutenir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Lors de l’examen du projet de loi de finances pour l’année 2014, au cours d’un samedi gris du mois de novembre dernier – d'ailleurs, nous étions mieux abrités dans l’hémicycle qu’à l’extérieur ! (Sourires.) –, nous avons abondamment débattu de la TVA, évoquant douze secteurs d’activité différents pour lesquels le bénéfice du taux réduit était réclamé. En particulier, les centres équestres avaient, si ma mémoire est bonne, dominé nos échanges.
Pour ma part, j’ai suggéré à la commission des finances de ne pas rouvrir la discussion sur le sujet.
Certes, de nombreux arguments pourraient militer en faveur de la demande de notre collègue Éric Doligé. Néanmoins, des arguments similaires pourraient également être invoqués pour d’autres domaines d’activité. Je propose de ne pas nous engager dans cette voie et d’en rester à l’équilibre auquel nous avons abouti au mois de novembre dernier.
La commission émet donc un avis défavorable sur tout amendement tendant à modifier le régime des taux réduits de TVA, ce qui est le cas de l'amendement n° 110.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Le débat sur les taux réduits de TVA a déjà eu lieu. Chaque secteur d’activité présente un intérêt propre, qu’il s’agisse du bois de chauffage, des transports, scolaires ou non, ou des cantines, scolaires ou non. Nous en avons discuté pendant plusieurs semaines.
Les entreprises qui gèrent les parcs zoologiques bénéficieront du CICE et des allégements de charge. Ce sera, me semble-t-il, de nature à compenser, voire plus, les effets de la hausse de la TVA, dont le taux reste d’ailleurs réduit, à 10 %, par rapport à un taux normal qui est de 20 %. Si les entreprises n’ont pas répercuté dans leurs prix la hausse du taux de TVA de 7 % à 10 %, elles ont dû supporter un surcoût. Toutefois, elles trouveront aujourd'hui leur compte, je le crois, grâce aux allégements prévus.
Le Gouvernement n’entend plus bouger sur les taux réduits de TVA, même de manière marginale. Certes, il s’agit d’un petit secteur, mais il y a beaucoup de petits secteurs qui font l’objet d’amendements : c’est de tradition lors de chaque projet de loi de finances…
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Je comprends évidemment les observations de M. le rapporteur général et de M. le secrétaire d'État. Le sujet est effectivement complexe, et l’adoption d’un tel dispositif aurait probablement pour conséquence d’inciter certains à revenir sur les positions qui ont été adoptées en la matière.
Toutefois, j’espère que mon amendement sera adopté, et nous verrons bien quelles suites aura ce vote.
Mes chers collègues, si je ne vous encourage pas à fumer plus pour aider l’industrie du tabac, je ne puis en revanche que vous exhorter à aller visiter les zoos. À défaut de baisser leur taux de TVA, au moins aidons-les à augmenter leur chiffre d’affaires ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 180 rectifié, présenté par MM. Placé, Gattolin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 1er septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 278-0 bis est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... – Les transports publics urbains réguliers de voyageurs. » ;
2° Le b quater de l’article 279 est complété par les mots : « à l’exclusion des transports publics urbains réguliers de voyageurs qui relèvent du taux prévu à l’article 278-0 bis ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Cet amendement vise à appliquer aux transports publics de voyageurs du quotidien, c’est-à-dire les transports publics urbains, un taux de TVA de 5,5 %, ce taux ayant été remonté à 10 % pour financer le CICE.
Je le rappelle, cette disposition avait été adoptée par le Sénat dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014, avant que le texte ne soit rejeté par notre assemblée.
Nous avons toujours considéré que le CICE ne devait pas être financé n’importe comment, et notamment au travers de la TVA sur les transports publics urbains du quotidien, qui remplissent une utilité sociale, économique et environnementale de premier plan. L’État et les régions, par leur politique de transport, peuvent en effet jouer un rôle fondamental dans la lutte contre les nuisances, la pollution de l’air, les accidents de la route, la dépendance pétrolière et le réchauffement climatique.
Les usagers qui choisissent le train sont autant de personnes qui ne se servent pas de la voiture, dont l’empreinte écologique est particulièrement catastrophique, notamment en Île-de-France. L’objectif, dans le cadre d’une transition écologique de la mobilité, est de favoriser le report modal de la voiture vers le train. Aussi avons-nous tout intérêt à ce que le prix du train soit attractif et l’offre en la matière aussi diversifiée que possible.
Or la hausse de la TVA s’apparente à une taxe sur le train, alors que nous devrions agir dans le sens inverse. L’augmentation des prix des tickets inquiète donc vivement le groupe écologiste.
La mobilité est un service de première nécessité, particulièrement pour les transports publics urbains, qu’empruntent des millions de personnes tous les jours dans le cadre de leurs déplacements logement-travail. Pour l’usager, c’est donc la double peine : des déplacements longs et pénibles, payés au prix fort. Par cette politique, le Gouvernement fait peser un poids supplémentaire sur une dépense incompressible des actifs et envoie un très mauvais signal à l’écologie.
Les écologistes déplorent vivement l’avantage donné ainsi à la voiture et proposent, par cet amendement, d’appliquer au transport public urbain régulier de voyageurs un taux réduit de TVA de 5,5 %.
J’imagine déjà la réaction de M. le rapporteur général et de M. le secrétaire d’État au budget face à une telle proposition. Toutefois, dans la mesure où nous avons enfin inscrit la transition écologique à l’ordre du jour politique – deux ans et demi après l’élection d’une nouvelle majorité ! –, il convient, me semble-t-il, de réfléchir aux instruments dont nous nous doterons dans le cadre de la future loi. En tout cas, il faudra trouver des systèmes facilitant les transports publics.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission souscrit aux arguments évoqués à l’instant par notre collègue. Je rappelle d'ailleurs que Mme Ségolène Royal présentera bientôt son projet de loi sur la transition écologique, qui comportera certainement de nouveaux dispositifs.
Au demeurant, l’argumentation de la commission des finances concernant le secteur des transports est identique à celle qu’elle a adoptée pour les autres secteurs.
Au surplus, mon cher collègue, il s’agit ici de plusieurs centaines de millions d’euros, peut-être même d’un milliard d’euros, vous l’avez d’ailleurs implicitement dit. Cette considération relative au coût me conduit également à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le président, je sollicite une suspension de séance de quelques minutes.
M. le président. Le Sénat va bien sûr accéder à votre demande, monsieur le secrétaire d'État.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
Article 2
I. – Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 6241-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 6241-2. – I. – Une première fraction du produit de la taxe d’apprentissage mentionnée à l’article 1599 ter A du code général des impôts, dénommée : “fraction régionale pour l’apprentissage”, est versée au Trésor public avant le 30 avril de l’année concernée, par l’intermédiaire des organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage mentionnés au chapitre II du présent titre IV. Le montant de cette fraction est égal à 56 % du produit de la taxe due.
« Par dérogation au 2° du I de l’article 23 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011, cette fraction est reversée aux régions, à la collectivité territoriale de Corse et au Département de Mayotte pour le financement du développement de l’apprentissage, selon les modalités définies au présent I.
« Une part fixe, arrêtée à la somme totale de 1 544 093 400 €, est répartie conformément au tableau suivant :
«
(En euros) |
||
Alsace |
46 941 457 |
|
Aquitaine |
69 767 598 |
|
Auvergne |
34 865 479 |
|
Bourgogne |
38 952 979 |
|
Bretagne |
68 484 265 |
|
Centre |
64 264 468 |
|
Champagne-Ardenne |
31 022 570 |
|
Corse |
7 323 133 |
|
Franche-Comté |
29 373 945 |
|
Île-de-France |
237 100 230 |
|
Languedoc-Roussillon |
57 745 250 |
|
Limousin |
18 919 169 |
|
Lorraine |
64 187 810 |
|
Midi-Pyrénées |
57 216 080 |
|
Nord-Pas-de-Calais |
92 985 078 |
|
Basse-Normandie |
38 083 845 |
|
Haute-Normandie |
46 313 106 |
|
Pays de la Loire |
98 472 922 |
|
Picardie |
40 698 224 |
|
Poitou-Charentes |
57 076 721 |
|
Provence-Alpes-Côte d’Azur |
104 863 542 |
|
Rhône-Alpes |
137 053 853 |
|
Guadeloupe |
25 625 173 |
|
Guyane |
6 782 107 |
|
Martinique |
28 334 467 |
|
La Réunion |
41 293 546 |
|
Mayotte |
346 383 |
|
Total |
1 544 093 400 |
« Si le produit de la fraction régionale pour l’apprentissage est inférieur au montant total mentionné au troisième alinéa du présent I, ce produit est réparti au prorata des parts attribuées à chaque région ou collectivité dans le tableau du quatrième alinéa.
« Si le produit de la fraction régionale pour l’apprentissage est supérieur à ce même montant, le solde est réparti entre les mêmes régions ou collectivités selon les critères et taux suivants :
« 1° Pour 60 %, à due proportion du résultat du produit calculé à partir du nombre d’apprentis inscrits dans les centres de formation d’apprentis et les sections d’apprentissage dans la région au 31 décembre de l’année précédente selon un quotient :
« a) Dont le numérateur est la taxe d’apprentissage par apprenti perçue l’année précédente par les centres de formation d’apprentis et les sections d’apprentissage pour l’ensemble du territoire national ;
« b) Dont le dénominateur est la taxe d’apprentissage par apprenti perçue lors de cette même année par les centres de formation d’apprentis et les sections d’apprentissage dans la région ;
« 2° Pour 26 %, au prorata du nombre d’apprentis inscrits dans les centres de formation d’apprentis et les sections d’apprentissage dans la région au 31 décembre de l’année précédente et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus au baccalauréat professionnel, enregistré au répertoire national des certifications professionnelles mentionné à l’article L. 335-6 du code de l’éducation ;
« 3° Pour 14 %, au prorata du nombre d’apprentis inscrits dans les centres de formation d’apprentis et les sections d’apprentissage dans la région au 31 décembre de l’année précédente et préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle supérieur au baccalauréat professionnel, enregistré au répertoire national des certifications professionnelles.
« II. – Une deuxième fraction du produit de la taxe d’apprentissage, dénommée : “quota”, dont le montant est égal à 21 % du produit de la taxe due, est attribuée aux personnes morales gestionnaires des centres de formation d’apprentis et des sections d’apprentissage au titre de ces centres et sections.
« Après versement au Trésor public de la fraction régionale pour l’apprentissage prévue au I du présent article, l’employeur peut se libérer du versement de la fraction prévue au présent II en apportant des concours financiers dans les conditions prévues aux articles L. 6241-4 à L. 6241-6 du présent code.
« Pour la part de cette fraction qui n’a pas fait l’objet de concours financiers mentionnés au deuxième alinéa du présent II, la répartition entre les centres de formation d’apprentis et les sections d’apprentissage s’opère en application de l’article L. 6241-3.
« III. – Le solde, soit 23 % du produit de la taxe d’apprentissage due, est destiné à des dépenses libératoires effectuées par l’employeur en application de l’article L. 6241-8. Ces dépenses sont réalisées par l’intermédiaire des organismes collecteurs de la taxe d’apprentissage mentionnés au chapitre II du présent titre IV, après versement des fractions prévues aux I et II du présent article. » ;
2° À la première phrase de l’article L. 6241-3, après le mot : « quota », sont insérés les mots : « et de la contribution supplémentaire à l’apprentissage » ;
3° À la fin de la première phrase du second alinéa de l’article L. 6241-4, à la fin de l’article L. 6241-5, à l’article L. 6241-6, à la fin du premier alinéa de l’article L. 6241-7, au 2° de l’article L. 6241-8 et à la seconde phrase du II de l’article L. 6242-1, la référence : « à l’article L. 6241-2 » est remplacée par la référence : « au II de l’article L. 6241-2 » ;
4° L’article L. 6241-8-1 est ainsi modifié :
a) La seconde phrase du 2° est supprimée ;
b) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les entreprises mentionnées au I de l’article 1609 quinvicies du code général des impôts qui dépassent, au titre d’une année, le seuil d’effectif prévu au cinquième alinéa du même I bénéficient d’une créance égale au pourcentage de l’effectif qui dépasse ledit seuil, retenu dans la limite de 2 points, multiplié par l’effectif annuel moyen de l’entreprise au 31 décembre de l’année et divisé par 100 puis multiplié par un montant, compris entre 250 et 500 €, défini par arrêté des ministres chargés du budget et de la formation professionnelle.
« Cette créance est imputable sur la taxe d’apprentissage due au titre de la même année après versement des fractions prévues aux I et II de l’article L. 6241-2 du présent code. Le surplus éventuel ne peut donner lieu ni à report, ni à restitution. »
I bis (nouveau). – Au 3° de l’article L. 3414-5 du code de la défense, la référence : « 4° de l’article L. 6241-8-1 » est remplacée par la référence : « 1° de l’article L. 6241-8 ».
II. – L’article L. 4332-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Le 5° est ainsi rédigé :
« 5° Le produit de la fraction régionale pour l’apprentissage prévue au I de l’article L. 6241-2 du code du travail. Si, au titre d’une année, le produit de cette fraction régionale pour l’apprentissage est inférieur, pour chaque région ou la collectivité territoriale de Corse, au montant des crédits supprimés en 2007 en application du second alinéa du 1° du présent article et, pour le Département de Mayotte, à la dotation générale de décentralisation perçue en 2008 au titre du premier transfert de compétences à cette collectivité au titre de l’apprentissage, les ajustements nécessaires pour compenser cette différence sont fixés en loi de finances ; »
2° Le dixième alinéa est supprimé.
III. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le V de l’article 1609 quinvicies est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, après la référence : « L. 6241-2 », est insérée la référence : « et de l’article L. 6241-3 » ;
b) Au dernier alinéa, la date : « 31 mai » est remplacée par la date : « 30 juin » ;
2° Le 1° du 2 de l’article 1599 ter A est ainsi rédigé :
« 1° Par les personnes physiques ainsi que par les sociétés soumises au régime fiscal des sociétés de personnes, lorsque ces personnes et sociétés exercent une activité mentionnée aux articles 34 et 35 du présent code ; ».
IV. – Le 1° du I de l’article 23 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011 est ainsi modifié :
1° Le a est ainsi rédigé :
« a) La fraction mentionnée au I de l’article L. 6241-2 du code du travail ; »
2° Le c est abrogé ;
3° (Supprimé)
V. – Les I, II, III et IV du présent article s’appliquent aux impositions dues au titre des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2014.
Toutefois, les exonérations attachées aux dépenses libératoires engagées, au titre de ces mêmes impositions, du 1er janvier 2014 jusqu’à la publication de la présente loi sont maintenues sur le fondement des dispositions en vigueur à la date du versement effectif de ces dépenses.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 117 est présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 141 rectifié est présenté par M. Delahaye et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Francis Delattre, pour présenter l'amendement n° 117.
M. Francis Delattre. L’apprentissage est vraiment d’actualité, monsieur le secrétaire d'État, puisque le Premier ministre vient d’annoncer que 200 millions d’euros supplémentaires seront dégagés et votés dès la semaine prochaine pour relancer l’apprentissage et s’efforcer d’atteindre l’objectif présidentiel de 500 000 apprentis en 2017. Nous n’avons donc fait que devancer les souhaits présidentiels ! Ce débat est vraiment intéressant… (Sourires sur les travées de l'UMP.)
J’en viens à l’amendement n° 117. Vous avez compris que la formation professionnelle et l’apprentissage faisaient partie de nos priorités. Toutefois, s’agissant de l’article 2 que nous voulons supprimer, ce sont non pas les montants en cause que nous contestons, mais la réorientation du dispositif vers les régions. Schématiquement, les régions doivent bénéficier à peu près de 47 %, quand ce système viserait à leur attribuer environ 55 % du montant des taxes.
Or cela nous paraît dommageable, car on voit bien que c’est en réalité un moyen pour le Gouvernement de compenser le fait que les régions n’ont pas reçu les dotations attendues, comme toutes les autres collectivités territoriales d'ailleurs. Surtout, on va priver de moyens des organismes qui font leurs preuves tous les jours dans le domaine de l’apprentissage, que ce soient les centres de formation d’apprentis, les lycées professionnels ou, surtout, les chambres consulaires, chambres de commerce et chambres de métiers, qui sont au cœur de la question de l’apprentissage.
L’objet de cet amendement est donc de revenir à la situation actuelle. La répartition entre les acteurs qui est proposée ne semble pas poser de problème majeur – si ce n’est qu’enlever des moyens à ceux qui sont au cœur du problème aura nécessairement des conséquences dommageables.
On voit bien aussi que cet article traduit une légère défiance du Gouvernement actuel envers les chambres de commerce et les chambres consulaires en général. Or, en tant qu’élus, nous sommes bien obligés de reconnaître que les chambres consulaires sont tout à fait opérationnelles pour ce qui concerne la formation professionnelle et qu’elles obtiennent des résultats, notamment en raison de leur proximité avec les entreprises.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons supprimer l’article 2.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Excellent !
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour présenter l'amendement n° 141 rectifié.
M. Vincent Delahaye. On a déjà beaucoup parlé de l’apprentissage, mais je crois qu’il s'agit d’un sujet très important. Je suis heureux de constater que le Premier ministre est parvenu à trouver 200 millions d’euros. Après nous avoir dit que c’était impossible, il trouve finalement une somme aussi importante, par je ne sais quelle suppression de dépenses ici ou là !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Oh, cela m’étonnerait !
M. Vincent Delahaye. Cela dit, je suis effectivement opposé à la nouvelle répartition proposée, qui renforce le financement des régions, mais, en revanche, entrave sérieusement la liberté donnée aux entreprises d’affecter leur taxe d’apprentissage à tel ou tel établissement. Un grand nombre d’établissements d’enseignement supérieur ou de formation des apprentis vont, dans les prochains mois et les prochaines années, se retrouver en difficulté si la répartition, telle qu’elle a été proposée en loi de finances initiale et telle qu’elle est confirmée ici, se trouve maintenue.
C'est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement de suppression de l’article 2. Je souhaite que l’on revienne sur ce sujet, qu’on le prenne à bras-le-corps, en y apportant bien sûr les financements supplémentaires dont on vient de parler, mais aussi en revoyant cette répartition qui peut, à mon avis, causer beaucoup de dégâts.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je rappelle aux auteurs de ces deux amendements identiques que le débat sur ce sujet a déjà eu lieu en loi de finances pour 2014. Faut-il rappeler que notre collègue François Patriat, rapporteur spécial, a publié en mars dernier un rapport d’information – il pourra nous en instruire, puisqu’il vient à l’instant de nous rejoindre dans cet hémicycle – appelant à « une réforme profonde et urgente », autour de trois principes : simplification, décentralisation et paritarisme.
C’est précisément sur la base de ces recommandations que nous avons adopté à l’automne dernier la réforme de la taxe d’apprentissage, en la simplifiant, en affectant le produit de la contribution supplémentaire à l’apprentissage directement aux centres de formation des apprentis et en fixant un niveau minimal de ressources pour les régions.
Je suis d’autant plus favorable, à titre personnel, à la réforme proposée par le Gouvernement que celui-ci maintient le principe de libre affectation par les entreprises de la part hors quota tout en en limitant le champ. C’était un point sur lequel François Patriat avait attiré notre attention.
Cette orientation se justifie par le fait que 15 % de la collecte de la taxe d’apprentissage, soit environ 300 millions d’euros, ne font l’objet d’aucun vœu d’affectation par les entreprises redevables de la taxe.
Tous ces éléments me conduisent à penser que le dispositif mis en place à cet article 2 est tout à fait légitime. Je suis dès lors, à titre personnel – et je l’ai dit à la commission – défavorable à ces deux amendements identiques de suppression. La commission a, là encore, exprimé un avis opposé à celui de son rapporteur général et a souhaité l’adoption de ces amendements identiques.
Aussi, je le répète, je suis défavorable à titre personnel à ces deux amendements identiques, auxquels la commission des finances a donné ce matin un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement ne peut qu’être défavorable à la suppression d’un article qu’il a lui-même proposé.
L’objet de cette disposition est de revenir sur la répartition des fonds, avec les précautions qu’a soulignées M. le rapporteur général et qui correspondent aux préoccupations d’un certain nombre de sénateurs. Cet article fait suite à une invalidation du Conseil constitutionnel, laquelle est intervenue plus pour des raisons de forme que pour des raisons de fond. Il y a lieu de revenir à la version qui avait été adoptée en loi de finances initiale.
À propos de la remarque un peu ironique sur l’annonce d’une enveloppe supplémentaire de 200 millions d’euros en faveur de l’apprentissage, je souligne que c’est ce que j’avais laissé entendre tout à l’heure – ceux qui étaient là au moment où a été abordée cette question le savent. Je laisse bien sûr au Premier ministre le soin de préciser la forme du dispositif, ce qu’il aura certainement l’occasion de faire ce soir.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous aviez compris au travers de mes propos tout à l’heure que le Gouvernement était bien sûr favorable à l’apprentissage et qu’il entendait prendre des mesures dans ce domaine. Vous en connaîtrez le détail au moment où le Premier ministre sera conduit à les préciser.
En tout cas, sur le volume, il y a évidemment une différence significative entre les 200 millions d’euros annoncés par le Premier ministre et le coût de plus d’un milliard d’euros que représente l’amendement n° 28 rectifié, que vous avez précédemment adopté et sur lequel nous demanderons tout à l’heure une seconde délibération.
Le Gouvernement est donc défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. Monsieur Delattre, l’amendement n° 117 est-il maintenu ?
M. Francis Delattre. Les divergences apparues entre M. le rapporteur général et la commission des finances font que, en réalité, l’adoption tout à l'heure de l’amendement de Mme Lienemann nous rassure sur l’implication des entreprises et des véritables acteurs de la formation par alternance. En outre, notre collègue Patriat nous paraît tout à fait responsable sur ce dossier. Il est président de région, il a de l’expérience, et je crois beaucoup aux expériences et aux expérimentations.
Sous réserve de la confirmation de tous ces éléments et eu égard aux 200 millions d’euros annoncés pour la formation en alternance, il me paraît raisonnable de retirer cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 117 est retiré.
Monsieur Delahaye, l’amendement n° 141 rectifié est-il maintenu ?
M. Vincent Delahaye. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 141 rectifié est retiré.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je ferai tout de même remarquer qu’il est question de deux choses différentes. L’article 2 traite du régime de la taxe d’apprentissage, et la question est de savoir quel est le degré de liberté des entreprises dans l’affectation de leurs fonds.
Le système, tel qu’il a été réformé, fait une place plus importante à la dépense collective qui est mise en œuvre par les régions et une place moins importante à la dépense qui est décidée librement par les entreprises. Cette modification, qui me semble devoir être soulignée, a motivé les oppositions que nous avions, cher collègue Delattre, exprimées très fortement lors de la discussion de la loi de finances pour 2014. Toutefois, peu importe, il ne s’agit certainement pas de refaire en loi de finances rectificative le débat de la loi de finances initiale.
Je voudrais malgré tout, sur cette question de l’apprentissage et de l’alternance, pointer une nouvelle fois les incohérences du Gouvernement dans ses relations avec le monde des entreprises, cette espèce de « Je t’aime, moi non plus », ce pas de danse étonnant auquel se livre le Premier ministre avec les responsables des entreprises.
Tantôt on taxe, tantôt on allège ; tantôt on augmente les crédits pour l’apprentissage, tantôt – nous l’évoquions précédemment – on diminue de moitié les incitations fiscales au même dispositif d’apprentissage ou d’alternance : mes chers collègues, il y a vraiment de quoi en perdre le peu de latin qu’il nous reste !
Je tenais simplement à faire remarquer que la ligne directrice de ce projet de loi de finances rectificative et de l’action développée par le Gouvernement à l’égard des entreprises est tout simplement – pardonnez-moi de le dire, monsieur le secrétaire d'État ! – l’incohérence la plus totale.
M. le président. L'amendement n° 203 rectifié, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 24
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
5° À l’article L. 6242-3-1, aux premier (deux fois) et second alinéas de l’article L. 6252-4-1 et au c du 1° du I de l'article 23 de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011, la référence : « article 230 H du code général des impôts » est remplacée par la référence : « article 1609 quinvicies du code général des impôts ».
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, si vous me le permettez, je présenterai en même temps les amendements nos 5 et 204.
M. le président. J’appelle donc en discussion les amendements nos 5 et 204.
L'amendement n° 5, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A. – Après l’alinéa 29
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
II bis. – L’article L. 214-15 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « ci-après reproduites : » sont supprimés ;
2° Les deuxième à douzième alinéas sont supprimés.
B. – Alinéa 41
Après la référence :
II,
insérer la référence :
II bis,
L'amendement n° 204, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 33
Remplacer la date :
30 juin
par la date :
15 juillet
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° 203 rectifié est un amendement de coordination qui vise à tirer les conséquences du décret du 26 mai 2014 portant incorporation au code général des impôts de divers textes complétant certaines dispositions de ce code.
L’amendement n° 5 est un amendement de coordination rédactionnelle.
Quant à l’amendement n° 204, il tend à faire coïncider la date de versement de la contribution supplémentaire à l’apprentissage et de la taxe d’apprentissage, en décalant la date du 30 juin au 15 juillet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article est adopté.)
Articles additionnels après l’article 2
M. le président. L'amendement n° 81, présenté par M. du Luart et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le dernier alinéa du I de l’article 209 du code général des impôts est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Elle est également majorée du montant des provisions régulièrement constituées et devenues sans objet, lorsque leur constitution avait fait apparaître un déficit fiscal qui n’a pu être entièrement déduit des bénéfices imposables. Cette majoration est limitée à la partie dudit déficit non imputée sur les bénéfices imposables. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Francis Delattre.
M. Francis Delattre. Mon collègue Roland du Luart, qui a dû s’absenter, m’a demandé de défendre cet amendement, bien que je ne sois pas un grand spécialiste de la question dont il s'agit ici.
Cet amendement a pour objet d’éviter aux entreprises respectant leurs obligations comptables et fiscales de se trouver dans une situation où elles pourraient être amenées à acquitter un impôt sur les sociétés sur des bénéfices qui, en réalité, n’existent pas.
Vous trouverez, mes chers collègues, des éléments d’explication assez pertinents du dispositif qu’il propose dans l’objet de l’amendement, lequel est relativement technique. Je rappelle simplement qu’est visée, en l’espèce, l’application des dispositions de l’alinéa 3 du I de l’article 209 du code général des impôts relatives à la limite d’imputation du report déficitaire sur les bénéfices de l’exercice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cette mesure est très technique, comme vous l’avez vous-même indiqué, monsieur Delattre. Certes, elle permet d’éviter des cas de taxation de profits non réalisés. Toutefois, elle pourrait remettre en cause le principe de limitation d’imputation des déficits au profit de certaines grandes entreprises. Ce n’est pas que nous n’aimons pas les grandes entreprises, mais nous devons nous assurer qu’il n’y a pas là une source d’optimisation ou de maximisation !
Les dispositions de cet amendement posent plusieurs difficultés : comment déterminer que c’est la provision, et non les autres charges, qui a engendré un déficit ? Pourquoi faire un sort particulier à la provision dans la règle de la limitation de l’imputation des déficits reportables ? Enfin, pourquoi relever le plafond d’imputation, alors que l’entreprise peut, de toute façon, reporter indéfiniment les déficits ?
Autant de questionnements techniques qui nous conduisent à penser qu’un trop grand flou règne sur les effets réels de cet amendement. C’est la raison pour laquelle l’éclairage de M. le secrétaire d'État nous serait fort utile.
La commission souhaite donc entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je vais m’efforcer de vous apporter cet éclairage, monsieur le rapporteur général, mais vous avez déjà donné de nombreux éléments dans votre amorce de réponse !
Le dispositif qui est proposé prévoit de décomposer le déficit reportable pour lui appliquer des règles différentes selon la nature de la charge d’origine. Il s’agit, plus précisément, de distinguer parmi les déficits reportables ceux qui concernent les provisions reprises parce que devenues sans objet.
Un tel système nécessiterait de lourds mécanismes de mise en œuvre pour suivre précisément la déduction du déficit suscité par les provisions. Le raisonnement que vous proposez, monsieur Delattre, pourrait être invoqué s’agissant d’autres types de charges et pourrait en définitive priver de sa substance la mesure de plafonnement d’imputation des déficits.
De toute façon, cette proposition repose sur un postulat erroné. Le rapporteur général l’a dit, si nous avons souhaité encadrer les mécanismes de report en avant des déficits antérieurs en instituant un plafond annuel, je vous rappelle que cette possibilité de report est illimitée dans le temps, de sorte qu’elle ne crée aucune perte définitive de droit à déduction. Les pertes antérieures seront toujours déductibles, dans la limite du plafond annuel d’un million d’euros.
Il n’y a donc pas lieu d’adopter cet amendement. Je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Delattre, l'amendement n° 81 est-il maintenu ?
M. Francis Delattre. J’imagine que mon collègue Roland du Luart prendra contact avec M. le rapporteur général…
Je retire donc cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 81 est retiré.
L'amendement n° 137, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre II du titre Ier du livre Ier du code monétaire et financier est complété par une section ainsi rédigée :
« Section …
« Choix du mode de paiement chez un commerçant
« Art. L. 112-13 – Dans les communes d’intérêt touristique ou thermales et dans le périmètre des zones touristiques d’affluence exceptionnelle ou d’animation culturelle permanente tels que définis à l’article L. 3132-25 du code du travail, il est appliqué une taxe spéciale sur le chiffre d’affaires des commerçants, tels que définis à l’article L. 121-1 du code du commerce, qui ne proposent pas deux moyens de paiement sans condition de plafond minimal. Le taux de cette taxe est fixé par décret.
« Art. L. 112-14 – Les infractions aux dispositions de l'article L. 112-13 sont constatées par des agents désignés par arrêté du ministre chargé du budget. Le commerçant ayant agi en violation des dispositions du même article est passible d'une amende dont le montant est fixé par décret. »
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Au travers de cet amendement, j’espère obtenir de la part du Gouvernement un mécanisme permettant de faire évoluer les modes de paiement acceptés par les commerçants, particulièrement en cette période de saison estivale, pendant laquelle de nombreux touristes se rendent dans notre pays.
Si les commerçants sont obligés d’accepter les paiements en espèces, ils ne sont, en revanche, pas tenus d’accepter d’autre moyen de règlement, qu’il s’agisse des chèques ou des cartes bancaires. Les commerçants peuvent refuser les paiements par carte bancaire en dessous d’un certain montant. Quant aux chèques, ils peuvent également les refuser, compte tenu de l’absence de crédibilité de ce moyen de paiement.
Moyennant quoi, de nombreux commerçants, surtout dans les zones touristiques, n’acceptent que le paiement en espèces, parfois pour des sommes importantes, notamment dans la restauration ou l’hôtellerie. Je propose donc un mécanisme qui se veut coercitif si les commerçants n’acceptent pas au moins deux modes de paiement. Si le consommateur n’a pas d’espèces, le commerçant doit être tenu d’accepter soit les cartes bancaires soit les chèques.
Monsieur le secrétaire d'État, j’ai déjà proposé ce dispositif à plusieurs reprises. Il est vrai que cette question relève davantage du secteur de la consommation, mais la discussion de la loi de finances est toujours pour moi l’occasion de rappeler au gouvernement ses promesses sur ce sujet. En effet, quelle que soit la tendance politique de celui-ci, les services s’emploient à trouver des mécanismes qui, malheureusement, ne parviennent jamais devant nous.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Si les intentions de l’auteur de cet amendement sont claires, les modalités du dispositif proposé restent très floues.
Au regard de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, une telle disposition serait très vraisemblablement censurée au titre de l’incompétence négative. En outre, on peut se demander si la voie fiscale ne paraît pas la plus appropriée pour atteindre le but recherché.
La commission, qui m’a suivi sur ce point, demande donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous proposez une taxe qui pèserait sur les commerçants. Le Gouvernement n’y est pas favorable, pour plusieurs raisons.
Je partage bien sûr l’analyse qui vient d’être faite à l’instant par M. le rapporteur général, mais je vous rappelle que, en France, les transactions en espèces sont déjà proportionnellement assez faibles : seuls 55 % des paiements sont faits en espèces, contre 75 % en Allemagne par exemple. S’agissant des moyens de paiements scripturaux, la carte bancaire est le premier instrument de paiement, et de loin : elle représente 46 % des transactions en 2012. La France est donc déjà très en avance par rapport à de nombreux autres pays de la zone euro.
Concernant le cas particulier des communes d’intérêt touristique ou des communes thermales, celles-ci sont déjà fortement incitées à accepter divers moyens de paiement. Car plus les commerçants acceptent de moyens de paiement, plus grande est, en effet, la probabilité que le client réalise une opération commerciale. La discrimination entre les différents types de commerçants suivant leur lieu de résidence est donc très difficile à comprendre.
Un certain nombre d’éléments juridiques nous conduisent à vous demander, monsieur le sénateur, de retirer votre amendement ; à défaut, le Gouvernement y sera défavorable.
M. le président. Monsieur Dominati, l'amendement n° 137 est-il maintenu ?
M. Philippe Dominati. M. le secrétaire d'État m’a lu la réponse usuelle de ses services, ce que je regrette. Je souhaitais simplement défendre le consommateur, d’autant plus s’il est de nationalité étrangère. Ne pas accepter de cartes de crédit, notamment internationales, dans les zones touristiques, et obliger le client à payer uniquement en espèces à l’ère du paiement numérique, ce n’est pas tout à fait ce que j’appelle la modernité ! Cependant, si telle est la position du Gouvernement, nous aurons d’autres occasions de reparler de cette question.
Je retire donc mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 137 est retiré.
Article 2 bis (nouveau)
L’article 1601 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, les mots : « d’un plafond individuel fixé par référence au » sont remplacés par le mot : « du » ;
2° Le troisième alinéa est remplacé par huit alinéas ainsi rédigés :
« Ce plafond prévu au même I est décomposé en deux sous-plafonds : un sous-plafond relatif à la somme des produits du droit fixe défini au a du présent article, du droit additionnel défini au b du présent article et de l’article 3 de la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et un sous-plafond relatif au produit du droit additionnel pour le financement d’actions de formation défini au c du présent article.
« Ces deux sous-plafonds sont obtenus en répartissant le plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 précitée au prorata des émissions perçues entre les différentes composantes de la taxe figurant dans les rôles généraux de l’année précédant l’année de référence.
« Pour l’application du premier sous-plafond susmentionné, il est créé auprès de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat un fonds de financement et d’accompagnement alimenté par un prélèvement sur les établissements du réseau situés dans les régions où le fonds de roulement agrégé de tous les établissements constaté à la fin de l’année 2013 est supérieur à quatre mois de charges, après déduction des réserves pour investissements votées en assemblée générale et faisant l’objet d’un marché public ou de l’accord des cofinanceurs et de la tutelle.
« En 2014, le prélèvement sur la partie de fonds de roulement agrégé constaté à la fin de l’année 2013 excédant quatre mois de charges, après déduction des réserves pour investissements définies ci-dessus, est fixé à 50 % pour chaque région concernée. Dans chaque région, le prélèvement est effectué pour chaque établissement concerné par titre de perception, après calcul de la direction régionale des finances publiques, et reversé au fonds de financement et d’accompagnement.
« Le fonds de roulement est défini, pour chaque établissement, par différence entre les ressources stables (capitaux propres, provisions, dettes d’emprunt) et les emplois durables (actif immobilisé). Les charges prises en compte pour ramener le fonds de roulement à une durée sont les charges décaissables non exceptionnelles (charges d’exploitation moins provisions pour dépréciation, moins dotations aux amortissements et plus les charges financières).
« Il est opéré en fin d’exercice 2014, au profit du budget général, un prélèvement sur le fonds de financement et d’accompagnement précédemment défini, correspondant à la différence entre le premier sous-plafond susmentionné et la somme des ressources fiscales perçues par l’ensemble des bénéficiaires au titre du droit fixe défini au a et du droit additionnel défini au b du présent article et de l’article 3 de la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 précitée.
« Une fois ce prélèvement opéré, la partie restant disponible de ce fonds de financement et d’accompagnement géré par l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat est utilisée pour financer la mutualisation et la péréquation au sein du réseau.
« Pour l’application du second sous-plafond susmentionné, un sous-plafond individuel relatif au produit du droit additionnel pour le financement d’actions de formation est obtenu, pour chaque bénéficiaire, en répartissant ce sous-plafond au prorata des émissions perçues figurant dans les rôles généraux de l’année précédant l’année de référence. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 6, présenté par M. Marc, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le troisième alinéa de l’article 1601 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« Ce plafond individuel est fixé par une délibération en assemblée générale de l’assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat, selon des modalités de mise en œuvre fixées par décret, répartissant le montant prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 précitée pour chaque bénéficiaire ainsi que pour les bénéficiaires mentionnés à l’article 1er de la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. À défaut d’adoption de cette délibération, ce plafond individuel est obtenu par répartition du montant précité au prorata des émissions perçues figurant dans les rôles généraux de l’année précédant l’année de référence. »
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’Assemblée nationale a introduit dans le texte cet article 2 bis, qui nous paraît complexe, comme souvent les dispositions qui concernent le financement des réseaux consulaires. Lors des débats à l’Assemblée nationale, la commission des finances comme le Gouvernement ont soulevé des problèmes rédactionnels, mais aussi de fond.
Dans ces conditions, et compte tenu des incertitudes existantes, il nous a paru nécessaire de simplifier considérablement le dispositif, ce qui est l’objet de notre amendement.
D’une part, il tend à confirmer la faculté de modulation de plafond par l’assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat tenant compte de la santé financière des établissements régionaux, selon des règles établies « en interne » par le réseau consulaire. C'est une forme de souplesse qui nous accordons à l’assemblée permanente.
D’autre part, il vise à maintenir le principe, actuellement prévu par le code général des impôts, de la répartition au prorata des recettes des chambres en cas d’absence de délibération de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat.
Mes chers collègues, telles sont les éléments de précision et de simplification qu’il nous a paru utile d’apporter au travers de cet amendement.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 79 est présenté par M. Reichardt.
L'amendement n° 202 est présenté par M. Patriat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 6
Après les mots :
il est
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
opéré en fin d’exercice, au profit du budget général, un prélèvement sur le fonds visé au 6° de l’article 5-8 du code de l’artisanat, correspondant à la différence entre le premier sous-plafond susmentionné et la somme des ressources fiscales perçues par l’ensemble des bénéficiaires au titre du droit fixe défini au a et du droit additionnel défini au b du présent article et de l’article 3 de la loi n° 48-977 du 16 juin 1948 relative à la taxe pour frais de chambre de métiers applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.
II. – Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application du second sous-plafond susmentionné, un sous-plafond individuel relatif au produit du droit additionnel pour le financement d’actions de formation est obtenu pour chaque bénéficiaire en répartissant ce sous-plafond au prorata des émissions perçues figurant dans les rôles généraux de l’année précédant l’année de référence.
III. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article 5-8 du code de l’artisanat est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Elle gère, dans des conditions définies par décret en Conseil d’État, le fonds de financement et d’accompagnement du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat. Ce fonds est destiné à fournir aux chambres de métiers et de l’artisanat une ressource collective pour la mise en œuvre des mutualisations et restructurations obligatoires ou décidées par son assemblée générale. Le fonds est alimenté par une contribution obligatoire de chaque établissement du réseau des chambres de métiers et de l’artisanat. Le montant global annuel de la dotation et son affectation sont définis chaque année par l’assemblée générale de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat.
« En 2014, ce fonds est alimenté par un prélèvement sur les chambres de métiers et de l’artisanat de région, les chambres de métiers et de l’artisanat départementales, les chambres de métiers d’Alsace et de Moselle et la chambre de métiers et de l’artisanat de Mayotte, dont le fonds de roulement constaté à fin 2012, hors réserves affectées à des investissements votés et formellement validés par la tutelle, est supérieur à quatre mois de charges. Le prélèvement est fixé pour tous les établissements concernés à 50 % de la partie excédant quatre mois de charges, hors réserves affectées. »
L’amendement n° 79 n'est pas soutenu.
La parole est à M. François Patriat, pour présenter l'amendement n° 202.
M. François Patriat. Cet amendement vise les plafonds individuels applicables à chaque bénéficiaire de la taxe pour frais de chambres de métiers et de l’artisanat, qui a été instaurée dans le code général des impôts, comme notre rapporteur vient de l’expliquer excellemment.
Or ce dispositif pose un certain nombre de difficultés.
Tout d’abord, la réduction des ressources fiscales est calculée de façon homothétique entre tous les établissements, sans tenir compte de la situation de chaque chambre de métiers et de l’artisanat, ou CMA.
Ensuite, le plafonnement individuel des ressources fiscales, principales ressources propres des chambres, conduira, par effet de levier, à la baisse des autres financements et partenariats, aggravant la situation des chambres.
L’article 2 bis du projet de loi de finances rectificative pour 2014, introduit par l’Assemblée nationale, remplace le plafonnement proportionnel par un prélèvement global de montant identique, opéré dès 2014 et ciblé sur les excédents de réserves des chambres de métiers et de l’artisanat.
Ce prélèvement serait effectué sur un fonds de péréquation ad hoc. La suppression du plafond individuel est, en effet, indispensable pour éviter que le résultat annuel de certaines chambres ne soit déficitaire, ce qui leur poserait des difficultés pour lever l’emprunt auprès des autres financeurs, quand bien même elles pourraient puiser, in fine, dans leurs réserves.
Lors de l’assemblée générale de l’assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat, l’APCMA, les CMA avaient adopté, à 80 %, une délibération favorable à la mise en œuvre de ce dispositif.
Neutre pour l’État, cette proposition de transfert qui, je vous le rappelle, mes chers collègues, a reçu l’approbation du Gouvernement à l’Assemblée nationale, évite l’appauvrissement des chambres de métiers et de l’artisanat en difficulté. Elle permet également de constituer un fonds de mutualisation et de péréquation destiné à ces chambres, qui répond aux exigences de sécurité juridique soulevées par le secrétariat d’État au budget. Je vous invite donc à l’adopter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 202 ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur Patriat, la commission des finances adhère à l’esprit de votre amendement. Toutefois, je vous invite à vous rallier à l’amendement n° 6 de la commission, qui vise les mêmes objectifs et dont les dispositions me paraissent plus simples.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Tout à fait !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cela dit, le Gouvernement aura peut-être une autre lecture que la mienne. Monsieur le secrétaire d'État, j’attends de savoir comment vous arbitrerez entre les deux options qui vous sont soumises ! (M. le secrétaire d’État sourit.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Ces deux amendements visent à modifier un mécanisme de péréquation mis en place par le vote d’un amendement déposé à l’Assemblée nationale.
Ce mécanisme vise à instaurer une péréquation entre les chambres de métiers et de l’artisanat, afin d’aider les chambres qui font face à des difficultés financières. En effet, on le sait, la situation de ces structures consulaires est très hétérogène suivant les départements.
L’article 2 bis, qui a été créé par cet amendement, souffre néanmoins de quelques imperfections. C'est la raison pour laquelle j’ai souhaité que la suite de l’examen du collectif budgétaire soit mise à profit pour améliorer sa rédaction. Je me félicite donc que le Sénat ait rejoint notre préoccupation de mettre en place un mécanisme solide de péréquation entre les CMA et qu’il ait travaillé à l’amender.
Les dispositions de l’amendement n° 202 de M. Patriat permettent de ne pas s’éloigner du mécanisme adopté par l’Assemblée nationale : elles maintiennent le principe d’un fonds abondé par un prélèvement opéré sur certaines chambres, tout en apportant des améliorations au dispositif.
Le Gouvernement est plus favorable à cet amendement qu’à l'amendement n° 6 de la commission, dont les dispositions ont le mérite de la simplicité, mais nous semblent s’écarter trop fortement de la solution imaginée par les députés. En effet, elles impliquent que l’on abandonne l’idée, à laquelle le Gouvernement tient, d’un fonds de péréquation. Par ailleurs, elles pourraient ne pas être opérationnelles dans l’hypothèse où aucune délibération ne serait votée pour fixer la répartition des plafonds individuels des CMA : il n’y aurait, alors, pas de péréquation.
C’est pourquoi le Gouvernement invite le Sénat à adopter l’amendement n° 202 de M. Patriat…
M. François Patriat. Identique à l'amendement n° 79 de M. Reichardt !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … identique à l'amendement n° 79 de M. Reichardt, en effet, plutôt que l'amendement n° 6 de la commission.
M. François Patriat. Merci, monsieur le secrétaire d'État !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. M. le secrétaire d’État a utilisé un mot qui, chez moi, fait mouche, celui de « péréquation », en estimant que cet objectif serait mieux servi par l'amendement de M. Patriat.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est le péréquateur général ! (Sourires.)
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Pour ce qui concerne le financement des chambres de métiers et de l’artisanat, cet objectif me paraît tout à fait louable.
Dès lors, si les membres de la commission des finances n’y voient pas d’objection, je retire l’amendement n° 6 de la commission, et me rallie volontiers au dispositif proposé par François Patriat.
M. Francis Delattre. Et par M. Reichardt !
M. François Patriat. Je l’ai dit ! (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 6 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 202.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 bis, modifié.
(L'article 2 bis est adopté.)
Article 2 ter (nouveau)
I. – La section I bis du chapitre III du titre III de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts est complétée par un article 1628 ter ainsi rédigé :
« Art. 1628 ter. – En cas de non-présentation du permis de conduire en vue de son renouvellement, celui-ci est soumis à un droit de timbre dont le tarif est fixé à 25 €. »
II. – Après la neuvième ligne du tableau du second alinéa du I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, est insérée une ligne ainsi rédigée :
«
Article 1628 ter du code général des impôts |
Agence nationale des titres sécurisés |
4 000 |
»
III. – Le produit du droit de timbre mentionné à l’article 1628 ter du code général des impôts est affecté à l’Agence nationale des titres sécurisés dans la limite du plafond prévu au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012.
IV. – Le présent article entre en vigueur le 1er septembre 2014. – (Adopté.)
Article 2 quater (nouveau)
La dernière colonne du tableau du second alinéa du I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 est ainsi modifiée :
1° À la vingt-septième ligne, le montant : « 24 000 » est remplacé par le montant : « 28 000 » ;
2° À la quarante-septième ligne, le montant : « 122 000 » est remplacé par le montant : « 118 000 ».
M. le président. L'amendement n° 143, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Cet amendement tend à supprimer l’article 2 quater, qui semble avoir été introduit à l’Assemblée nationale à titre de contrepartie, dans le cadre de la négociation menée autour du pacte de responsabilité.
Cet article prévoit d’augmenter de 4 millions d’euros le plafond du produit des ressources et impositions affecté cette année au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz, le CNV, au détriment du financement de l'archéologie préventive. Une telle disposition ne me paraît pas vraiment justifiée sur le fond. En tout état de cause, nous n’avons pas reçu d’explication, à part la nécessité d’assurer au CNV les ressources nécessaires à la réalisation de ses missions.
Pour ma part, j’aurais aimé pouvoir disposer des comptes de cet établissement public, afin d’analyser si sa situation justifie cette augmentation du plafond. Certes, quand le Premier ministre vient de trouver 200 millions d’euros pour l’apprentissage, 4 millions d’euros, ce n’est pas le bout du monde ! Cela étant, je suis toujours ennuyé par ces différents établissements publics que l’on appelle « opérateurs de l’État » et par les plafonds de dépenses qu’on leur accorde.
Dans ces conditions, je demande la suppression de l’article 2 quater.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le relèvement du plafond de la taxe sur les spectacles de variétés répond au souci de garantir au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz la perception d’un produit d’un niveau suffisant pour assurer ses missions, dans un contexte économique que l’on sait particulièrement difficile pour le secteur du spectacle vivant.
L’abaissement du plafond de la redevance d’archéologie préventive proposée en contrepartie permet de gager cette évolution. Elle ne devrait pas emporter de conséquences sur les ressources de l’Institut national de recherches archéologiques préventives, l’INRAP, en 2014, au regard du niveau de redevances attendu. Dès lors, l’article 2 quater me semble avoir du sens.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement de suppression n° 143.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 2 quater.
(L'article 2 quater est adopté.)
Articles additionnels après l’article 2 quater
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 82 rectifié, présenté par M. Miquel, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est instauré une taxe additionnelle à la taxe prévue à l’article 1011 bis du code général des impôts, qui est due annuellement.
II. – La taxe est assise :
a) Pour les véhicules de tourisme au sens de l’article 1010 du même code qui ont fait l’objet d’une réception communautaire au sens de la directive 2007/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007, établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules sur le nombre de grammes d’oxydes d’azote et de particules fines émis par kilomètre ;
b) Pour les véhicules de tourisme au sens de l’article 1010 dudit code autres que ceux mentionnés au a, sur la puissance administrative.
III. – Le tarif de la taxe est déterminé conformément au tableau suivant :
Année de première mise en circulation du véhicule |
Essence et assimilé |
Diesel et assimilé |
Jusqu’au 31 décembre 1996 |
70 |
200 |
De 1997 à 2000 |
45 |
150 |
De 2001 à 2005 |
45 |
100 |
De 206 à 2010 |
45 |
50 |
À compter de 2011 |
20 |
30 |
Les mots « diesel et assimilé » désignent les véhicules ayant une motorisation au gazole ainsi que les véhicules combinant une motorisation électrique et une motorisation au gazole émettant plus de 110 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre parcouru.
Les mots « essence et assimilé » désignent des véhicules autres que ceux mentionnés au précédent alinéa.
Ce tarif ne s’applique pas aux véhicules fonctionnant exclusivement au moyen de l’énergie électrique.
La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Monsieur le secrétaire d'État, il s'agit là d’un amendement d’appel.
Nous avons des difficultés à gérer la pollution, alors que, comme chacun sait, les émissions de particules fines sont dangereuses pour la santé.
Nos constructeurs ont mis en place des dispositifs tout à fait efficaces. Je pense, notamment, aux filtres à particules, qui permettent de limiter les émissions de particules fines. Il faut savoir qu’un véhicule diesel qui sort des usines aujourd'hui pollue six cents fois moins qu’un véhicule construit avant 2005 ! Des filtres à NOx, c'est-à-dire à oxydes d’azote, ont aussi été installés, qui permettent de capter tous les NOx par injection d’urée. Ces différents dispositifs participent à une moindre pollution.
Néanmoins, si les véhicules lourds, en particulier les camions, ont été équipés de filtres à NOx depuis longtemps, ils n’ont été dotés de filtres à particules que très récemment. Nous avons donc tout un parc de véhicules, plus ou moins anciens, qui émettent des particules fines en quantité. Au reste, en dehors du secteur automobile et des transports, les pollutions domestiques, celles qui sont liées au chauffage, sont elles aussi des sources importantes d’émission de particules fines.
Pour l’heure, le bonus-malus ne tient compte que des émissions de CO2. Or, aujourd'hui, nous avons des véhicules à essence, à injection directe, qui produisent aussi des particules fines en quantité importante, sans être équipés de filtres à particules. Dans ces conditions, je souhaite que nous réfléchissions à l’ajout de l’émission de particules fines dans les critères de fixation du bonus-malus. Tel est l’objet de cet amendement.
Je sais qu’il n’est pas opportun aujourd'hui de créer une taxe nouvelle, et je ne me fais pas beaucoup d’illusion sur le sort qui sera réservé à mon amendement. Je voulais néanmoins sensibiliser notre assemblée à ce problème de pollution important, qui met notre santé en danger. Les particules fines, en particulier, peuvent provoquer des cancers. Nous devons donc lutter contre ces émissions et essayer de mettre en place des dispositifs nous permettant de renouveler le vieux parc automobile, qui en est une source importante.
M. le président. L'amendement n° 185, présenté par Mme Archimbaud, MM. Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 1011 bis du code général des impôts, il est inséré un article 1011 bis… ainsi rédigé :
« Art. 1011-bis-… – I. – Il est institué une taxe additionnelle à la taxe prévue à l’article 1011 bis.
« II. – Cette taxe est assise :
« a) Pour les véhicules de tourisme au sens de l’article 1010 du présent code qui ont fait l’objet d’une réception communautaire au sens de la directive 2007/46/ CE du Parlement européen et du Conseil du 5 septembre 2007 établissant un cadre pour la réception des véhicules à moteur, de leurs remorques et des systèmes, des composants et des entités techniques destinés à ces véhicules, sur le nombre de grammes d’oxydes d’azote et de particules fines émis par kilomètre ;
« b) Pour les véhicules de tourisme au sens du même article 1010 autres que ceux mentionnés au a du présent article sur la puissance administrative.
« III. – Le barème des tarifs ainsi que les modalités d’application sont définis par décret. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Je veux tout d'abord remercier Gérard Miquel. En effet, si nous proposons des solutions différentes, nous partageons la même préoccupation : souligner devant cette assemblée et auprès du Gouvernement qu’il y a là une question à régler de façon urgente.
Cet amendement vise à ajouter au malus automobile, qui ne concerne aujourd'hui que les émissions de gaz à effet de serre, une composante assise sur les émissions de polluants que sont les oxydes d'azote – les NOx – et les particules fines.
Le bonus-malus existant aujourd'hui incite à lutter uniquement contre les émissions de CO2, responsables du dérèglement climatique, mais pas contre la pollution de l’air. Par conséquent, un certain nombre de véhicules, émettant relativement peu de CO2, sont éligibles à l’actuel bonus, alors même qu’ils émettent énormément de particules fines et de NOx, des substances particulièrement dangereuses pour la santé.
Depuis juin 2012, les particules fines sont désormais classées par l’Organisation mondiale de la santé dans la catégorie 1, c'est-à-dire aux risques cancérigènes non pas probables, mais certains. Il s’agit de la catégorie la plus dangereuse pour l’homme. Au-delà des cancers du poumon, elles entraînent un certain nombre de maladies graves, dont des maladies pulmonaires et cardiovasculaires.
À cet égard, permettez-moi de rappeler quelques chiffres, qui doivent nous conduire à nous interroger et à dissuader de reporter cette question à l’année prochaine : selon l’InVS, l’Institut de veille sanitaire, quelque 15 000 personnes meurent chaque année en France à cause des particules fines. En Île-de-France, plus de 3 millions de personnes respirent un air qui ne respecte pas les seuils de pollution aujourd'hui autorisés.
La logique veut non pas qu’on choisisse entre la lutte contre le dérèglement climatique et celle contre la pollution de l’air, mais qu’on lie les deux questions.
C’est pourquoi nous proposons de rééquilibrer le malus automobile, pour qu’il prenne également en compte la pollution de l’air. Ce nouveau dispositif permettrait de dégager des recettes, qui auraient vocation, par exemple, à alimenter un bonus de volume équivalent, défini dans le compte d’affectation spéciale concerné.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ces deux amendements tendent à instaurer un malus automobile lié à l’émission de substances polluantes telles que les oxydes d’azote et les particules fines, avec une nuance : l’amendement n° 82 rectifié présenté par notre collègue Gérard Miquel vise tous les véhicules, qu’il s’agisse des véhicules neufs ou des véhicules d’occasion, alors que l’amendement n° 185 présenté par notre collègue Aline Archimbaud vise les seuls véhicules neufs. Pour autant, mon argumentation vaudra pour les deux amendements.
Même si la commission des finances partage la préoccupation de santé publique qui sous-tend ces amendements, il lui est apparu qu’une réflexion approfondie, fondée sur une étude d’impact et des évaluations chiffrées, serait utile fort souhaitable.
Il faudrait notamment savoir quelles pourraient être les conséquences d’une telle disposition pour l’industrie automobile, actuellement en difficulté, mais aussi pour les ménages qui devraient acquitter cette taxe.
À la différence de l’amendement de M. Miquel, la taxe proposée par Mme Archimbaud serait non pas annuelle, mais acquittée sur le premier certificat d’immatriculation. Elle affecterait les ventes de véhicules neufs ; c’est l’industrie automobile qui prendrait cette mesure de plein fouet. En outre, il conviendrait de vérifier la cohérence du malus proposé avec le malus existant portant sur les émissions de CO2 et d’examiner comment on pourrait articuler les deux critères.
Cette question mérite donc d’être traitée de manière plus globale, en cherchant les solutions de nature à accélérer le renouvellement du parc automobile, tout en accompagnant les ménages modestes dans cette évolution. Cette préoccupation n’est pas récente : cette question a déjà été évoquée à de nombreuses reprises, lors de l’examen des projets de finances notamment, et elle ressurgira dans les mois qui viennent avec la discussion du projet de loi de transition énergétique, qui traitera des évolutions climatiques et des questions énergétiques.
Pour l’heure, la commission des finances vous invite, mes chers collègues, à bien vouloir retirer vos amendements respectifs.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de M. le rapporteur général.
Madame, monsieur le sénateur, vous proposez d’instaurer des taxes additionnelles, selon, certes, des modalités différentes.
Le Gouvernement tient à rappeler qu’il a fait adopter l’an dernier cinq mesures visant à lutter contre la pollution atmosphérique : le renchérissement du tarif de la taxe sur les véhicules de société, le renchérissement du malus automobile, l’introduction d’une composante carbone dans le tarif de la taxe intérieure de consommation sur les carburants, enfin, l’extension du champ de la TGAP Air, la taxe générale sur les activités polluantes, à de nouveaux polluants.
Ainsi que vient de le souligner M. le rapporteur général, ces deux amendements ont des conséquences à la fois sur le pouvoir d’achat des ménages – notamment l’un d’entre eux – et sur l’industrie automobile. Aussi, le Gouvernement, loin de reporter cette discussion importante aux calendes grecques, souhaite que celle-ci trouve sa place dans le cadre du débat relatif à la transition énergétique ou lors de l’examen du projet de loi de finances initiale qui vous sera soumis à la fin de l’année.
Le bonus-malus a connu de nombreuses évolutions : on a pris en considération le CO2, puis les NOx ; on a supprimé le bonus ; on a durci le malus. Voilà une politique qui devient assez peu lisible. C’est pourquoi le Gouvernement souhaite inscrire son action dans la durée.
J’ai eu l’occasion d’examiner ce dossier. De mémoire, le principe du bonus-malus a coûté 1,5 milliard d’euros – je ne pense pas me tromper, je suis même quasiment sûr de ce chiffre ! – à l’État depuis sa création. Aujourd'hui, le système est quasiment à l’équilibre.
Il convient donc de travailler sur cette question. Dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique, une réflexion sera menée sur les véhicules hybrides, les véhicules électriques, les véhicules polluants et les NOx, qui sont un véritable sujet. Vous avez dit, monsieur le sénateur, qu’il s’agissait d’un amendement d’appel : nous l’avons entendu.
Dans ces conditions, je vous invite, madame, monsieur le sénateur, à retirer vos amendements respectifs ; à défaut, le Gouvernement y sera défavorable.
M. le président. Monsieur Miquel, l'amendement n° 82 rectifié est-il maintenu ?
M. Gérard Miquel. J’avais effectivement précisé qu’il s’agissait d’un amendement d’appel.
Toutefois, permettez-moi de saluer les efforts réalisés par nos constructeurs automobiles, qui ont été les premiers au monde à mettre en place un système de filtres à particules, validé par un organisme de contrôle indépendant suisse. Ce travail a été remarquable. Aussi, je ne voudrais pas qu’on imagine un système qui pénalise trop les véhicules neufs qui arrivent sur le marché. Le problème que nous devons régler, c’est le remplacement des vieux véhicules par un mécanisme dont je ne sais pas encore ce qu’il peut être.
En tout état de cause, il faut traiter le diesel et l’essence de la même manière. Il faut lutter contre la pollution, en tenant compte des émissions à la fois de particules fines et de CO2, afin de proposer le système de bonus-malus le plus approprié.
Dans ces conditions, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 82 rectifié est retiré.
Madame Archimbaud, l'amendement n° 185 est-il maintenu ?
Mme Aline Archimbaud. Oui, je le maintiens, monsieur le président, car je veux insister ici sur l’importance du problème qui se pose, ainsi que vient de le souligner mon collègue Gérard Miquel.
Sur le plan financier, les frais que représentent les dégâts sanitaires liés aux maladies induites par les particules fines sont considérables. Et je pense qu’on peut inciter l’industrie automobile à être plus compétitive, en lui demandant de fabriquer des modèles moins polluants, qui, par conséquent, se vendraient mieux.
En outre, toutes les études montrent qu’il existe une corrélation entre les maladies pulmonaires, notamment, et le fait d’habiter au bord d’une rocade ou d’une route passante. Or ce sont les ménages les plus modestes qui sont les plus exposés, car ils n’ont pas la possibilité de changer de lieu d’habitation.
C’est pourquoi je maintiens mon amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Je souscris aux propos de mes collègues et tiens à souligner plusieurs points.
Tout d’abord, les propositions de mes collègues Aline Archimbaud et Gérard Miquel s’inscrivent tout à fait dans le droit fil des textes qui sont actuellement publiés par l’Union européenne.
L’Union européenne propose un paquet de mesures « Air pur pour l’Europe », composé de cinq textes, auquel s’ajoute une proposition de règlement en date du 30 janvier 2014 pour ce qui concerne la réglementation des véhicules diesel, qui insiste sur la nécessité de lutter pour la qualité de l’air pur, après que nous nous sommes battus, avec un certain succès, contre les émissions de gaz à effet de serre, les émissions de CO2, notamment, et, accessoirement, les émissions de méthane.
Il se trouve que je suis rapporteur de cet ensemble de mesures pour le Sénat, au nom de la commission des affaires européennes. Cela fait deux ou trois ans que l’on nous dit qu’on a besoin d’études ! Cela tombe bien : dans ce paquet, une étude d’impact très fournie a été réalisée à l'échelon européen, en soulignant les conséquences nationales ; je la transmettrai à M. le rapporteur général.
D’après cette étude, il ne s’agit pas simplement d’une question sanitaire, et les véhicules anciens ne sont pas les seuls en cause. En effet, bien que les véhicules soient passés de la norme Euro 1 à la norme Euro 5, mise en service en 2009 et qui était beaucoup plus exigeante, il se trouve que les véhicules Euro 5 émettent 25 % d’oxyde d’azote de plus que les précédents, à tel point que l’on prépare une norme Euro 6 à l’horizon de 2017.
Toutes les voitures vendues entre 2009 et 2017 produisent donc malheureusement davantage d’oxyde d’azote que les voitures fabriquées antérieurement. C’est un paradoxe, que ce paquet « Air pur pour l’Europe » met en lumière.
Sur le plan économique, la Commission européenne justifie ce nouveau paquet pour des raisons sanitaires, bien sûr, mais aussi pour des raisons économiques.
Elle souligne que l’amélioration de la qualité de l’air offre également des perspectives économiques, notamment aux secteurs des technologies propres de l’Union européenne. Elle observe que les grandes sociétés d’ingénierie de l’Union européenne tirent 40 % de leurs recettes de leurs activités environnementales. Aussi, elle estime qu’une politique plus exigeante permettra à l’industrie de l’Union européenne de conserver sa longueur d’avance.
Elle indique même que les bénéfices strictement économiques attendus doivent équilibrer les coûts induits par les nouvelles dispositions. Elle table, notamment grâce aux effets du programme de recherche et d’innovation de l’Union dénommé « Horizon 2020 », sur la création de 40 000 emplois dans ce secteur à cette échéance.
À titre d’exemple, elle relève que la Chine a récemment annoncé qu’elle investirait, durant les cinq prochaines années, quelque 0,4 % de son PIB par an dans la lutte contre la pollution atmosphérique à Pékin. Il ne s’agit donc pas là d’une simple lubie écologique – respirer de l’air pur ! C’est un combat sanitaire et économique.
L’Union européenne, dont la France, doit avoir une longueur d’avance en la matière. Nous sommes là totalement en phase avec la réglementation européenne. Ne prenons pas de retard ! M. le rapporteur général, ne vous servez pas de l’étude d’impact pour reporter cette question. Je vous enverrai le dossier, qui est colossal. Le Sénat a une excellente commission des affaires européennes, et la Commission européenne travaille d’ores et déjà sur ces questions. Elle vous montrera en quoi tout cela a une véritable valeur économique.
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Mes chers collègues, je vous prie d’excuser mon extinction de voix, conséquence d’une pollution due non pas aux particules fines, mais aux climatiseurs, ce qui n’est pas mieux…
Je partage les attendus de l’amendement qui nous est proposé, mais le véhicule utilisé me pose problème.
En effet, la taxation, qui est toujours l’outil utilisé pour résoudre un problème, ne me semble pas être la bonne solution. Il conviendrait plutôt d’obliger l’industrie automobile à fabriquer des véhicules qui intègrent véritablement la réduction de toutes les pollutions : outre les gaz à effet de serre, il faut viser toutes les poussières dès la construction.
Prévoir des taxations revient à faire payer le consommateur. Or j’aimerais que l’on examine cette question en amont et que l’on ne demande pas toujours au consommateur de payer. Ceux qui ont les véhicules les plus polluants sont ceux qui, parfois, habitent loin des villes dans lesquelles ils travaillent parce qu’ils n’ont pas trouvé de quoi se loger dans des conditions correctes. Ne leur infligeons donc pas une double peine !
Votre amendement est intéressant, ma chère collègue, mais vous ne proposez pas le bon véhicule pour répondre à ce problème. C’est pourquoi nous nous abstiendrons.
M. le président. L'amendement n° 139 rectifié, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La section V du chapitre premier du titre III de la deuxième partie du livre premier du code général des impôts est abrogée.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Voilà quelques semaines, les Français ont rempli leur déclaration d’impôt sur papier ou sur internet. Par ignorance ou par réflexe d’habitude, en tout cas plus ou moins machinalement, j’imagine, la plupart d’entre eux ont coché la case relative à la contribution à l’audiovisuel public, redevance qui a été très fortement augmentée dans le dernier budget, au détriment du pouvoir d’achat des Français. Nous le savons, ce sujet passionne régulièrement notre hémicycle.
On est en droit de se demander combien de temps cette redevance vivra encore, alors que le paysage audiovisuel ne cesse d’évoluer.
Pour couvrir l’événement sportif de grande envergure qui est en train d’avoir lieu au Brésil, diverses chaînes de notre pays et de nombreux autres pays se sont livrées à une concurrence acharnée. Or l’audiovisuel public français fut complètement absent de cette compétition à laquelle n’ont pris part qu’une chaîne privée française et des chaînes payantes françaises ou étrangères. Il y a là quelque chose d’assez frappant dans la mesure où cet événement ne se déroule que tous les quatre ans et que, durant ces quatre ans, les peuples s’emballent pour leur équipe nationale. Pourtant, les chaînes de l’audiovisuel public français, celles qui devraient donc relayer cet enthousiasme et suivre le parcours de l’équipe nationale, sont absentes de la compétition pour la retransmission des matchs. Bien entendu, dans ces conditions, la seule chaîne française à avoir acquis le droit de retransmettre des matchs est une chaîne privée.
M. Christian Bourquin. Il est étonnant d’entendre cela dans la bouche d’un libéral !
M. Philippe Dominati. Pendant combien de temps encore France Télévisions entretiendra-t-elle un certain nombre de chaînes appelées à figurer sur la mosaïque que l’on voit apparaître lorsqu’on allume son poste de télévision ? Chacun le sait, cette mosaïque offre une vue synthétique d’un bouquet d’une centaine de chaînes, auxquelles s’ajoutent encore cent cinquante chaînes payantes pour peu que l’on ait souscrit un abonnement. En fin de compte, il y a plus de chaînes dans votre téléviseur que de boulangeries dans votre département !
Mais beaucoup d’amateurs de football ont également cherché à suivre la Coupe du monde sur internet. Or ceux-là ne sont pas concernés par la redevance.
Tout cela montre bien que cette contribution à l’audiovisuel public est un vestige du passé. Elle appartient à l’histoire de notre fiscalité. Bien sûr, l’audiovisuel public a besoin de ressources, mais la redevance n’est plus à propos.
Alors, monsieur le secrétaire d'État, pour quand en prévoyez-vous la disparition ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Sachant que, selon la loi de finances initiale, la contribution à l’audiovisuel public devrait représenter une recette de 3,6 milliards d’euros, sa suppression déstabiliserait très gravement France Télévisions, Radio France, Arte France, France Médias Monde et l’Institut national de l’audiovisuel. En outre, elle se traduirait par une charge supplémentaire pour le budget de l’État, car il faudrait compenser, au moins partiellement, cette disparition.
M. Philippe Dominati. Alors, que France Télévisions entre dans la compétition avec les chaînes privées pour la retransmission de la Coupe du monde !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Or vous demandez par ailleurs à l’État de faire des économies.
Cette mesure n’est donc pas possible dans le contexte budgétaire que vous connaissez.
En revanche, comme cela a été dit en commission, il paraît souhaitable de poursuivre la réflexion sur une évolution de l’assiette de la contribution à l’audiovisuel public, afin de l’adapter notamment aux nouveaux supports numériques.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Tout à fait !
M. Le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, je ne vous communiquerai aucune date de suppression de la contribution à l’audiovisuel public. Pour de nombreuses raisons, le Gouvernement est attaché à cette contribution, tout comme les Français d’ailleurs.
Je ne suis pas encore familier de votre hémicycle, mais j’ai cru comprendre que ce sujet animait régulièrement vos débats. J’imagine que ce sera encore le cas lorsqu’il s’agira de fixer le montant ou l’assiette de cette contribution, voire sa forme, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015.
Monsieur le sénateur, permettez-moi d’apporter une précision à la suite de vos explications : sur sa déclaration de revenus, il ne faut cocher la case que si l’on ne possède pas de téléviseur. Depuis quelques années, en effet, la preuve est inversée.
Toujours est-il que le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement visant à priver l’ensemble de l’audiovisuel public, dont France Télévisions fait évidemment partie, de plus de 3 milliards d’euros de recettes.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.
M. Daniel Raoul. M. le secrétaire d’État vient de rappeler que l’on ne payait pas la contribution à l’audiovisuel public quand on ne possédait pas de téléviseur. Or, avec l’évolution des nouvelles technologies, en particulier avec le haut débit sur les tablettes, on peut recevoir en direct la télévision sans posséder de téléviseur. Il y a là une injustice à corriger.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est pour cela qu’il faut élargir l’assiette de la redevance !
M. le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Nous sommes évidemment opposés à cet amendement dont l’adoption porterait un coup supplémentaire aux moyens de France Télévisions. Je rappelle que toute une série de mesures budgétaires ont déjà été prises qui réduisent de manière inquiétante les ressources du service public de télévision.
L’argument qui a été avancé pour justifier cet amendement me semble assez fallacieux. En effet, on pourrait parler longuement des logiques spéculatives qui sont à l’œuvre quant aux droits de retransmission télévisuelle des grands événements sportifs comme la Coupe du monde de football. Ce sont elles qui poussent à la privatisation des retransmissions et qui plongent d’ailleurs un certain nombre de chaînes dans des difficultés financières croissantes. Les logiques de rentabilisation privée de ces événements sont en train de déstabiliser le budget des chaînes du service public.
Or France Télévisions, il faut le souligner, est le seul groupe audiovisuel qui s’efforce de s’intéresser à des événements sportifs qui ne sont pas rentables et de les rendre accessibles. Il retransmet ainsi des compétitions sportives qui seraient invisibles à la télévision si les seules logiques financières spéculatives devaient prévaloir.
Ce n’est donc vraiment pas le moment d’affaiblir le service public France Télévisions.
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Après l’article 2 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L'article 1609 sexdecies B du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « en France, y compris dans les départements d'outre-mer, de vidéogrammes destinés à l'usage privé du public » sont remplacés par les mots : « de vidéogrammes destinés à l'usage privé du public établi en France métropolitaine et dans les départements d'outre-mer » ;
2° Sont ajoutés trois alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu'une personne non établie en France est redevable de cette taxe, elle est tenue de souscrire une déclaration dont le modèle est fixé par l'administration. Cette déclaration est déposée, accompagnée du paiement, dans les conditions fixées en matière de taxe sur le chiffre d'affaires.
« Cette déclaration est souscrite par le redevable par l'intermédiaire d'un représentant établi en France, accrédité par l'administration fiscale, qui s'engage à remplir les formalités lui incombant, à acquitter les prélèvements à sa place et à tenir un registre des opérations relevant de ce régime d'imposition à la disposition de l'administration fiscale de l'État membre de consommation. Le registre des opérations est suffisamment détaillé pour permettre à l'administration de l'État membre de consommation de vérifier l'exactitude de la déclaration des prélèvements susvisés.
« Lorsque le redevable, qu'il soit établi dans l'Union européenne ou hors de celle-ci, n'a pas de représentant tel que défini à l'alinéa précédent, il souscrit cette déclaration, dans les mêmes conditions que celles prévues par le régime spécial de déclaration de la taxe sur la valeur ajoutée visé à l'article 298 sexdecies F, auprès du service des impôts des entreprises étrangères de la direction des résidents à l'étranger et des services généraux. »
II. - Le I entre en vigueur à compter du 1er septembre 2014.
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. Cet amendement tend à préciser les modalités d’extension aux acteurs de l'internet établis hors de France de la taxe actuelle sur la fourniture de vidéogrammes à la demande prévue par l’article 30 de la loi n° 2013-1279 du 29 décembre 2013 de finances rectificative pour 2013 modifiant l’article 1609 sexdecies B du code général des impôts.
Le rendement de cette taxe doit représenter quelque 30 millions d’euros, uniquement à la charge des sites internet établis en France. Or, à partir du mois de septembre 2014, le leader américain Netflix de fourniture de vidéos en ligne à la demande prévoit d’ouvrir ses services aux consommateurs français depuis le territoire luxembourgeois, afin de s’exonérer des règles propres au soutien à la culture qui prévalent dans notre pays.
Mme Nathalie Goulet. Oui !
M. Philippe Marini. Afin d’assurer un traitement fiscal neutre et équitable entre les acteurs de la vidéo en ligne établis en France et à l’étranger, il est proposé d’assujettir à cette taxe les fournisseurs étrangers de vidéo à destination du public français dans le cadre d’une obligation déclarative auprès de l’administration fiscale, et plus particulièrement du service des impôts des entreprises étrangères au sein de la Direction des résidents à l'étranger et des services généraux.
Cette extension de périmètre d’une taxe existante ne créerait donc aucune charge supplémentaire pour les entreprises françaises. Au contraire, la mise en place d’un tel dispositif s’inscrirait dans une logique globale de soutien accru aux industries et activités culturelles. En effet, d’une part, le prélèvement de cette taxe serait effectué au bénéfice du Centre national du cinéma et de l'image animée, notre très cher CNC, souvent évoqué dans nos débats, d’autre part, l'élargissement de l'assiette proposé pourrait s’inscrire dans une réflexion plus globale sur la contribution des acteurs étrangers et une réduction des taux actuels.
Monsieur le secrétaire d'État, dans l’esprit de ma proposition de loi pour une fiscalité numérique neutre et équitable, que votre collègue Mme Pellerin a ensevelie sous les fleurs, si j’ose ainsi m’exprimer (Sourires.), et dont est issu cet amendement, il convient de réaffirmer que les grands opérateurs de services internet établis à l’étranger, qui tirent leurs bénéfices des infrastructures et des services publics situés sur le territoire national, et qui, surtout, font appel au pouvoir d'achat des consommateurs français, doivent également participer à l’effort contributif et fiscal.
Monsieur le secrétaire d’État, j’ai eu le sentiment que le Gouvernement avait entendu cette préoccupation en insérant dans la loi de finances rectificative pour 2013 une disposition tendant à définir les redevables de cette taxe comme les « personnes, qu’elles soient établies en France ou hors de France ». Cependant, l’application de ce dispositif est suspendue, dans l’attente d’une réponse de la Commission européenne sur sa conformité au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État.
Cet amendement me donne donc l’occasion de vous interroger, monsieur le secrétaire d'État, sur l’état de la procédure en cours et de proposer des modalités pratiques d’assujettissement des acteurs étrangers à compter du 1er septembre 2014.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’examen de cet amendement permet de faire utilement le point sur une question importante et de savoir où en est le dialogue avec la Commission européenne. Le Gouvernement dispose sans doute d’informations utiles à ce sujet. Cet amendement, dont l’objet prévoit une entrée en vigueur très proche, pourra sans doute être retiré après que le Gouvernement aura présenté la situation et les perspectives en la matière.
Par conséquent, la commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement connaît la position de la Haute Assemblée sur ce sujet. Il partage la préoccupation et l’objectif qui viennent d’être rappelés par Philippe Marini et le rapporteur général.
Le dispositif actuel a été voté à la fin de l’année 2013. Il répond à votre souhait de voir les opérateurs étrangers soumis à la taxe sur la vidéo. Les services en ligne, je vous le rappelle, seront également soumis à la TVA en 2015. L’adoption de votre amendement, monsieur Marini, obligerait à reprendre tout le processus de négociation avec la Commission, ce qui retarderait l’entrée en vigueur du dispositif.
Vous m’interrogez sur l’état de la négociation en cours. Je ne peux que vous confirmer qu’elle est en cours. J’ai bien conscience que cette réponse ne peut pas vous satisfaire entièrement, mais vous avez vous-même dit que la mise en œuvre du dispositif adopté à la fin de l’année 2013 nécessite l’agrément de la Commission. Or, à cette heure, il n’a pas encore été obtenu.
Je me suis déjà rapproché de ma collègue en charge de ce dossier, qui m’a dit diligenter les procédures requises auprès de la Commission afin de permettre le financement équilibré que vous appelez de vos vœux, et qui est une préoccupation commune. Il devient en effet urgent d’étendre aux acteurs de l’internet établis hors de France le paiement de cette taxe, compte tenu de l’apparition imminente sur notre marché d’un certain nombre d’entre eux.
Je vous prie donc, monsieur Marini, de bien vouloir retirer votre amendement, dont j’ai bien compris le sens. En effet, s’il était adopté, il créerait certaines difficultés, voire des incertitudes juridiques. Je pense que votre but était d’obtenir des informations. Elles sont certes encore un peu vagues, mais elles seront précisées dans les prochaines semaines.
M. le président. Monsieur Marini, en définitive, l'amendement n° 76 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Monsieur le secrétaire d’État, je ne vous cache pas une certaine déception. Il me semble que le Gouvernement n’est pas exagérément pugnace dans cette affaire. J’ai eu le sentiment que Mme la ministre de la culture était désireuse de voir ce dossier avancer, mais je ne sais pas si cette préoccupation est relayée avec assez de conviction du côté de la rue de Bercy. Mais vous avez tant à faire ! Dès lors, la culture ne figure peut-être pas au tout premier rang de vos préoccupations immédiates…
Je souhaite néanmoins que nous prenions position aussi rapidement que possible sur la procédure. Je préconise ici une déclaration obligatoire du chiffre d’affaires – jusqu’ici, le texte en vigueur ne le prévoit pas –, à laquelle les acteurs établis hors de France devraient se plier. Je ne sais pas si nous avons questionné la Commission européenne sur cette proposition technique. À mon sens, faute d’un mécanisme de cette nature, le système ne fonctionnera pas concrètement.
Je pense aussi que la France aurait tout avantage à se rapprocher d’autres États membres de l’Union européenne, qui peuvent avoir les mêmes intérêts et se trouver dans la même situation que nous.
Évidemment, mon amendement tendant à prévoir une entrée en vigueur du dispositif au 1er septembre prochain, je reconnais qu’il est un peu ambitieux. Je ne verrais pas d’inconvénient à repousser cette date au 1er janvier 2015.
Il me semble néanmoins qu’un dispositif permettant de faire pression sur la Commission européenne et de l’obliger à nous répondre dans un délai raisonnable, même si elle est en fin de mandat, serait utile.
Je rappelle enfin, monsieur le secrétaire d’État, que nous avons su faire preuve de volontarisme dans le domaine du livre électronique. Nous avons en effet adopté un taux de TVA réduit de 2,1 %, dont je n’étais d’ailleurs pas, pour ma part, un partisan inconditionnel, mais cette disposition nationale a fait avancer le débat, ainsi que l’environnement juridique européen.
Cet amendement pourrait donc être un signal. C’est en tant que tel que je vous le proposais. Sincèrement, je ne vois pas bien quels inconvénients présenterait son adoption. (M. Jean-Claude Requier opine.)
M. le président. Monsieur Marini, dois-je comprendre que vous maintenez votre amendement ?
M. Philippe Marini. Disons, monsieur le président, qu’en cet instant je ne suis pas encore tout à fait convaincu de la nécessité de le retirer. (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Jean-Marc Todeschini. Bon courage !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Merci de ces encouragements ! (Sourires.)
Je dirai en langage diplomatique à M. Marini que, si blocage il y a, il ne vient pas de Bercy. Bercy a bien compris l’intérêt de l’adoption et surtout de la mise en œuvre du dispositif qui a été voté ici et dont M. Marini propose l’extension.
Le secrétaire d’État au budget ne peut pas aller jusqu’à vous dire : « Ayez confiance ! », mais sachez qu’il veillera à obtenir un accord – c’est évidemment ce que nous souhaitons – ou tout au moins une réponse claire de la part de la Commission sur ce sujet, en exerçant les pressions nécessaires et en procédant aux bonnes consultations.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous rencontrons exactement le même problème avec la loi « anti-Amazon », que nous venons de voter dans cette assemblée et dont la Commission européenne s’apprête à différer l’application. Le rapporteur, notre collègue Bariza Khiari, sait les problèmes que nous allons rencontrer avec cette loi. Il s’agit bien de la même problématique. Du reste, c’est aussi la même problématique fiscale.
Si vous avancez, monsieur le président de la commission, sur ces problèmes, pensez au même moment au problème d’Amazon et de ce type de groupe, qui porte atteinte, directement ou indirectement, à l’industrie culturelle française.
M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour explication de vote.
M. André Gattolin. Je soutiendrai l’amendement de M Marini, non parce que j’en partage totalement les tenants et les aboutissants, mais, plus largement, parce que le problème et la solution sont ici les mêmes : c’est l’Europe.
L’Europe en soi n’est pas un problème. Ce qui l’est, c’est l’absence, sinon d’harmonie fiscale, au moins de convergence fiscale pour faire face aux phénomènes de dumping fiscal, puisque c’est ainsi qu’on peut appeler ce que font le Luxembourg et l’Irlande en matière d’impôt sur les sociétés ou de TVA.
La vraie difficulté ne se situe pas nécessairement au niveau de la Commission européenne, même si l’on peut contester le fait qu’il n’y ait qu’une politique de concurrence et qu’il n’y ait pas de politique industrielle. De ce fait, si nous voulons demain rattraper notre retard dans le domaine des nouvelles technologies, nous ne pourrons pas intervenir de manière sectorisée et forte là où le financement privé à l’échelon européen est insuffisant.
En l’espèce la vraie difficulté se situe au niveau des États. M. Marini a eu la gentillesse de m’associer à un certain nombre d’entretiens voilà un peu plus d’un an et demi, dans le cadre de la commission des affaires européennes. J’ai ainsi eu l’occasion d’auditionner l’ambassadeur d’Irlande et une partie de l’équipe gouvernementale de ce pays, qui prenait alors la présidence de l’Union. Lorsque j’ai interrogé l’ambassadeur d’Irlande sur le dumping fiscal, il m’a rétorqué que nous, les Français, nous avions le crédit d’impôt recherche et m’a signalé que tous les chercheurs irlandais quittaient leur pays pour venir en France.
Il faut donc que tous les États essaient d’harmoniser leurs pratiques et fassent preuve d’intelligence collective s’agissant de leurs instruments d’action économique et fiscaux.
Je ne veux pas dédouaner – surtout pas ! – le Luxembourg ou l’Irlande, dont les pratiques sont à une autre échelle, mais le fait est que nous jouons tous de nos petites marges nationales, si bien que nous ne parvenons pas à nous mettre autour d’une table entre Européens afin d’essayer de dégager des logiques communes, des besoins industriels communs, car nous sommes dépassés.
Mme Merkel a beau déclarer qu’elle veut un internet européen, M. Hollande a beau lui emboîter le pas, quand la commission des affaires européennes s’est rendue dans les ministères à Berlin, personne n’a été capable de nous dire ce qu’est une Europe de l’internet.
Une réflexion sur ces questions s’impose. Elle nous obligera à remettre un peu à plat et en cohérence nos instruments d’intervention économique, qui sont essentiellement fiscaux.
Si cet amendement est maintenu, je le voterai donc, par principe.
M. le président. Monsieur Marini, l'amendement n° 76 est-il maintenu ?
M. Philippe Marini. Non, monsieur le président. Mais je retire cet amendement (M. André Gattolin manifeste son désappointement.) en espérant, monsieur le secrétaire d’État, que vous ferez preuve de pugnacité lors des négociations avec la Commission.
Je rappelle qu’il s’agit bien de rendre ce prélèvement applicable aux acteurs de l’internet établis hors de France, et ce dans un délai aussi bref que possible, de manière à éviter que le marché de la vidéo à la demande soit véritablement déséquilibré par les prises de positions de Netflix, dont la part de marché ne peut que s’accroître substantiellement dans les mois qui viennent.
Il serait tout à fait anormal que cet acteur puisse bénéficier d’un régime fiscal plus favorable que celui qui s’applique aux acteurs établis en France et intervenant sur le marché français.
Je crois comprendre, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez cette problématique bien en tête et je souhaite que vous fassiez avancer ce dossier avec toute la pugnacité voulue.
M. le président. L'amendement n° 76 est retiré.
TITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES À L’ÉQUILIBRE DES RESSOURCES ET DES CHARGES
Articles additionnels avant l'article 3
M. le président. L'amendement n° 61, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2014, ce montant est égal à 41 623 544 000 €. »
II. – L’accroissement du prélèvement sur recettes découlant du I ci-dessus est compensé à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Comme nous l’avons déjà indiqué lors de précédents débats, ainsi que dans la discussion générale, la décision de réduire les dépenses publiques et les moyens des collectivités territoriales est un mauvais choix d’un point de vue économique et social.
Le budget général prévoyait une réduction globale – décidée de manière unilatérale et arbitraire – des concours budgétaires de l’État aux collectivités territoriales, en particulier de la dotation globale de fonctionnement, qui constitue le principal apport de l’État aux budgets locaux.
Une telle orientation, qui risque malheureusement de se prolonger dans les années à venir, est puissamment récessive puisque les élus locaux, confrontés à une progression de leurs dépenses, qu’ils ne contrôlent pas nécessairement, risquent fort d’avoir à multiplier les arbitrages délicats. Ils devront ainsi effectuer des arbitrages entre dépenses courantes, notamment du fait de la persistance des difficultés sociales, et dépenses d’investissement, lesquelles sont pourtant indispensables, ne serait-ce que pour l’activité de nombre de secteurs économiques.
On ne peut dire des collectivités territoriales qu’elles font un mauvais usage des sommes qui leur sont allouées. Il est évident qu’une bonne partie de l’activité de secteurs comme le bâtiment, les travaux publics et d’autres encore – je n’ose citer l’action culturelle, qui doit beaucoup plus à l’argent des collectivités locales qu’au budget de l’État – est liée aux engagements des collectivités territoriales.
Brider les moyens financiers des collectivités locales, au risque d’ailleurs de limiter leur action à la seule déclinaison locale de politiques nationales, est un non-sens économique et social. Rien, dans les faits, ne justifie que les collectivités locales soient, ainsi que nous l’avons vu lors de la discussion de la loi de finances initiale, mises à contribution pour la réduction du déficit général, d’autant que l’aggravation des déficits semble bien plus liée à la diminution des recettes fiscales qu’à un surcroît de dépenses publiques.
Dans un contexte de récession à tendance déflationniste, aucune économie ne peut sortir du marasme sans une relance de la dépense publique, génératrice d’activité et donc, en bout de course, de recettes fiscales.
Il convient donc d’inverser la tendance actuelle, qui ne fait que conforter la récession et contribue à l’augmentation du chômage dans notre pays.
C’est pourquoi nous proposons de maintenir la dotation globale de fonctionnement au moins à son niveau antérieur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission ne peut qu’être défavorable à cet amendement, qui tend à revenir sur la baisse de 1,5 milliard d’euros des dotations aux collectivités territoriales décidée au titre de l’année 2014.
C’est certes un effort important qui est demandé là aux collectivités territoriales. Cependant, le redressement de nos finances publiques impose que toutes les administrations consentent un effort : l’État, la sécurité sociale, mais aussi les collectivités.
Cet amendement tend à revenir sur le pacte de confiance et de responsabilité.
Mme Françoise Férat. Justement !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je ne peux donc qu’y être défavorable.
De plus, sachez que les dotations globales de fonctionnement ont déjà été notifiées aux collectivités. Votre proposition reviendrait donc à remettre en cause une notification déjà effectuée.
Mme Nathalie Goulet. C’est peut-être une nouvelle qui leur ferait plaisir !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Or réaliser une telle opération en cours de route représenterait un travail assez considérable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement émet le même avis que la commission.
Je ne comprends pas les quolibets qu’attire l’argument selon lequel revenir en milieu d’année sur le montant de la DGF poserait un certain nombre de problèmes techniques. C’est une réalité ! Il y a 36 000 communes, quelques dizaines de milliers de communautés de communes, les départements et les régions… Vous imaginez la complexité du dispositif !
Ce n’est certes pas un argument de fond, mais c’est bien un argument que les responsables de la gestion d’une administration peuvent prendre en compte.
Sur le fond, je vois bien dans quel débat vous souhaitez que l’on s’engage ; nous l’avons déjà abordé et je pense que nous aurons l’occasion de le reprendre très largement dans les prochaines semaines.
M. Francis Delattre. Oui, on va en reparler !
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. L’examen de cet amendement est l’occasion de rappeler que les efforts demandés aux collectivités locales dans le cadre du plan d’économies sont bien supérieurs aux efforts que l’État impose à ses propres services.
Quand l’État considère que son propre budget a une tendance naturelle à l’augmentation et que donc, si cette tendance n’est pas suivie, il fait des économies, les collectivités territoriales sont confrontées, elles, à une véritable diminution de la dotation globale de fonctionnement.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Tout à fait !
M. Vincent Delahaye. Je souhaiterais, monsieur le secrétaire d’État, que l’on applique aux collectivités locales le même principe que celui qui vaut pour les administrations d’État !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très juste !
M. Vincent Delahaye. Il n’y a pas de raison de traiter différemment l’État et les collectivités territoriales, alors que celles-ci assurent des services de proximité et investissent énormément. Qu’est-ce qui peut bien justifier une telle différence de traitement ?
J’ai entendu l’argument selon lequel il est très compliqué de revenir en milieu d’année sur des montants qui ont déjà été notifiés. Cela étant, sur le fond, je considère que la diminution programmée de 11 milliards d’euros des dotations aux collectivités locales va faire très mal, beaucoup plus mal que ne le feront dans les services et chez les opérateurs de l’État les diminutions prévues sur les missions.
Dans la mesure où nous sommes en cours d’exercice, je ne voterai pas cet amendement, mais je l’aurais voté en loi de finances initiale.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. Sur la forme, indépendamment des implications que cela peut avoir, tout est possible en loi de finances rectificative.
Cela dit, je voudrais dire à M. le secrétaire d’État et surtout à nos collègues, notamment à gauche, que nous ne devons pas perdre notre identité. Ce que l’on entend et que l’on constate sur le terrain, c’est que les collectivités locales ont besoin de moyens ; et surtout qu’elles ont besoin que l’on ne leur en retire pas. Or c’est bien ce qui se passe actuellement.
Je parlais de notre identité, car notre attitude est constante : en loi de finances initiale, nous avions présenté cet amendement et nous le déposons de nouveau aujourd'hui puisque le problème persiste. Nous sommes bel et bien confrontés à une récession. Il suffit d’écouter, par exemple, la Fédération nationale du bâtiment et des travaux publics, qui fait état de la baisse des constructions et de l’augmentation du nombre de chômeurs dans le secteur.
Face à une telle situation, peut-on vraiment se cacher derrière une argutie invoquant la complexité d’une opération qu’il faudrait réaliser en cours d’année ? Est-ce à dire qu’au mois de juillet on ne sait plus faire ce que l’on savait faire en janvier ?
Je veux rappeler que le gouvernement d’avant 2012 avait ponctionné les collectivités locales…
M. Francis Delattre. Certes, mais de moins de 200 millions d’euros !
M. Thierry Foucaud. Oui, la première ponction s’élevait à 180 millions d’euros. Il reste que, à l’époque, toute la partie gauche de l’hémicycle rouspétait ! Or, aujourd'hui, nous en sommes à 3,6 milliards !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très juste !
M. Thierry Foucaud. Nous, nous ne bougeons pas et notre identité nous conduit à écouter ce que nous disent ces collectivités et à mettre à nouveau à leur disposition les moyens qui étaient les leurs, car il s’agit uniquement de cela.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je sais l’attachement du Sénat aux collectivités territoriales. Je me dois cependant de corriger un certain nombre de contre-vérités.
L’État s’applique-t-il à lui-même un traitement moins défavorable que celui qu’il demande aux collectivités locales ? Non, c’est faux ! (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Francis Delattre. C’est vrai !
Mme Nicole Bricq. N’accusez pas le gouvernement actuel : cela fait des années que ça dure !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Pourquoi est-ce faux ?
D’abord, nous parlons des dotations de l’État aux collectivités territoriales et non de l’ensemble des recettes des collectivités territoriales. Or, pour une partie significative d’entre elles, ces recettes sont dynamiques, surtout s’agissant de celles du bloc communal, j’en conviens.
Les observations des dernières années montrent d’ailleurs que, nonobstant les baisses des dotations aux collectivités territoriales, leurs budgets de fonctionnement ont augmenté. En effet, pour mesurer l’évolution des recettes des collectivités territoriales dans leur ensemble, il faut aussi prendre en compte la revalorisation des bases des valeurs locatives, – décidée chaque année par le Parlement, l’Assemblée nationale et le Sénat faisant preuve d’unité sur ce point –et l’augmentation de l’assiette de ces valeurs en raison de l’augmentation du nombre des locaux taxés ou de leur extension.
En valeur, pour les prochaines années, il est prévu que les dépenses de l’État diminuent. Nous aurons l’occasion demain, à l’Assemblée nationale, puis très prochainement au Sénat, d’indiquer très précisément les volumes de la diminution en valeur des dépenses de l’État : pour 2015, je peux déjà vous le dire aujourd'hui, cette baisse se chiffrera à 1 milliard d’euros. Je préciserai demain à l’Assemblée nationale quels seront les volumes des diminutions en 2016 et en 2017. En tout cas, en valeur, les dépenses des administrations publiques vont diminuer.
Compte tenu des éléments que je viens de donner et selon les prévisions, les dépenses des collectivités territoriales resteront stables en volume et enregistreront donc, nonobstant les baisses de dotation de l’État à ces collectivités, une augmentation en valeur.
Nous aurons l’occasion de débattre sur ce point, mais il est faux de dire que l’État s’octroierait un traitement plus favorable que celui qu’il inflige aux collectivités territoriales. Pardonnez-moi d’insister sur ce point et de le faire de manière un peu vive, mais je ne peux que réagir ainsi aux allégations que j’ai entendues.
Qui plus est, j’ai eu connaissance d’un certain nombre de projets, émanant de responsables politiques, issus plutôt de l’opposition de droite, qui prévoient non pas 50 milliards d’euros d’économies, comme nous, mais 80, 100, 130 milliards, voire encore plus ! Quand j’ai examiné dans le détail les projets de M. Mariton, de M. Carrez ou de l’ex-président Coppé, par exemple, j’ai pu constater qu’ils recommandaient, concernant les collectivités territoriales, des diminutions de recettes et de dépenses bien plus importantes que celles que nous proposerons dans les prochains textes.
Après tout, il serait plus facile pour moi de laisser glisser tous les arguments pour sortir de ce débat plus rapidement ! Mais force est, à un moment, de dire ce qui est. Nous souhaitons réduire les déficits publics. Or, dans les comptes et les déficits publics, figurent aussi les dépenses des collectivités territoriales. Nous voulons modérer les dépenses publiques d’une façon générale et, dans le programme de 50 milliards d’euros d’économies, nous estimons avoir établi une répartition juste, dont nous aurons l’occasion de débattre sereinement et, je l’espère, le plus objectivement possible.
M. le président. La parole est M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d'État, en ordre de grandeur, de quoi parle-t-on ? D’une purge de 11 milliards d’euros sur les dotations de l’État d’ici à 2017. Ce montant, à quoi faut-il le comparer ? Au total de l’enveloppe normée, qui est de l’ordre de 65 milliards d’euros. Cela représente donc une baisse de 17 % !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Vous rapportez cette diminution à l’enveloppe normée. Pas moi !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. L’enveloppe normée, c’est l’ensemble des ressources de transfert de l’État aux collectivités territoriales.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. C’est l’ensemble des ressources des collectivités territoriales.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le secrétaire d’État, parmi les ressources des collectivités territoriales, il y a, comme vous l’avez rappelé vous-même, de la fiscalité.
Il est tout à fait clair qu’à partir d’un certain moment, compte tenu des charges fixes de ces collectivités, de la structure par âges du personnel fonctionnaire, il n’est pas possible de faire autrement que de décider de majorer les taux des impôts locaux.
On voit bien que l’État s’efforce de mettre un grand nombre de collectivités territoriales en situation d’accusé ! Il leur dit : « Je réduis vos dotations, donc vos ressources. Débrouillez-vous comme vous voudrez avec les charges que vous avez à couvrir. Si vous relevez les taux d’imposition, je vous désignerai à la vindicte de l’opinion publique ! »
Nous sommes nombreux à voir comment ce raisonnement prend naissance et nous le dénonçons. Il semble quand même assez logique, monsieur le secrétaire d’État, qu’ici, au Sénat, on vous le dise ! Nous sommes là pour ça !
M. Jean-Marc Todeschini. N’y aurait-il pas bientôt des élections sénatoriales ?... (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Comme le demandait M. Delahaye, il conviendrait de traiter les budgets locaux et le budget de l’État de manière équitable.
Pour ce qui est des dépenses, il faut comparer, d’un côté, 11 milliards d’euros de baisse de la dotation à 220 milliards ou 230 milliards d’euros de dépenses totales. Là, il ne s’agit pas de tendance ; il s’agit d’euros réels, courants !
Alors, monsieur le secrétaire d’État, pour nous prouver que l’État est traité à parité avec les collectivités territoriales, expliquez-nous que les crédits des administrations centrales de l’État baisseront dans les mêmes proportions et durant le même laps de temps que ceux des collectivités ! Pardonnez-moi, mais je n’en suis pas encore convaincu ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Vincent Delahaye applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le président Marini, avec tout le respect que je vous dois, je vous répondrai que vous n’avez pas le droit de dire cela !
En réagissant tout à l’heure à l’intervention de votre collègue, je voulais simplement vous informer du traitement que l’État s’inflige à lui-même. Je puis vous assurer que l’élaboration du budget pour 2015 occupe en ce moment les jours et les nuits d’un certain nombre de ministres, avec les réactions que vous pouvez imaginer, courantes dans ce genre de situations.
Nous mettrons un point d’honneur à ce que l’État soit exemplaire, et à ce que la part de 11 milliards d’euros, sur les 50 milliards d’euros d’économies prévus, corresponde strictement à la part de la dépense publique que représentent les budgets des uns et des autres.
Nous aurons l’occasion de vous le prouver ultérieurement, chiffres à l’appui. Nous pourrons prendre tous les référentiels que vous voudrez – l’enveloppe normée des dotations, l’ensemble des dépenses ou l’ensemble des recettes – et faire tous les calculs et toutes les comparaisons que vous souhaiterez.
Toutefois, avant que nous ayons ce débat, je ne voudrais pas que certains se livrent à des caricatures et tiennent des propos qui me semblent réducteurs et peu objectifs.
Pour autant, bien entendu, je n’ignore pas que nous éprouverons quelques difficultés à converger sur la déclinaison et l’adoption des mesures que nous vous proposerons. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jean-Marc Todeschini. Il y a des élections sénatoriales dans l’air !
M. le président. L'amendement n° 60, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 3
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L’article L. 2334-3 est ainsi modifié :
a) Les deuxième et troisième alinéas sont supprimés ;
b) Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« - communes de 0 à 1 999 habitants ; »
2° Au second alinéa du 1° du I de l’article L. 2334-7, l’année : « 2011 » est remplacée par l’année : « 2014 » et le montant : « 64,46 euros » est remplacé par le montant : « 79,38 euros ».
II. – L’augmentation du prélèvement sur recettes résultant de l’application des dispositions ci-dessus n’est pas prise en compte dans l’évolution des concours de l’État fixée par l’article 13 de la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.
III. – L’augmentation du prélèvement sur recettes résultant de l’application des dispositions ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement des taux d’imposition des plus-values à long terme visés à l’article 219 du code général des impôts.
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le secrétaire d’État, les collectivités territoriales, contrairement à l’État, ne fabriquent pas de la dette et du déficit. Or l’État leur demande, non pas de faire des économies, mais de réduire des dépenses publiques incompressibles. Je partage complètement le point de vue de M. le président de la commission des finances sur les frais fixes des collectivités, et je voudrais à cet égard prendre deux exemples.
Premièrement, selon l’ADEME, entre 2005 et 2012, les collectivités ont vu leurs dépenses d’énergie augmenter de 35 %, alors que leur consommation baissait dans le même temps de 9,4 %. Sont ainsi punis ceux qui gèrent correctement.
Deuxièmement, dans leur mariage forcé avec l’État, les communes ont dû assumer ces dernières années des dépenses abandonnées par le budget général. Cette situation a encore été illustrée, très récemment, par la réforme des rythmes scolaires, qui est intervenue en cours d’année et qui présente, à l’instar du RSA, toutes les apparences du transfert de charges très imparfaitement compensé.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Un milliard d’euros de dépenses au titre de la réforme des rythmes scolaires !
M. Thierry Foucaud. On peut toujours gloser sur les dépenses votées par les élus locaux, mais une bonne part de la hausse de celles-ci est liée aux transferts de charges à fort potentiel de croissance.
Ainsi, le RSA, s’il est bien utile pour maintenir une certaine forme de paix sociale, est aussi très sensible à la conjoncture et aux accords UNEDIC, qui excluent peu à peu de l’indemnisation telle ou telle catégorie de chômeurs.
Il faut de l’argent pour assumer ces dépenses publiques que les collectivités ne peuvent pas diminuer !
Sans doute les élections sénatoriales approchent-elles, monsieur Todeschini, mais, pour notre part, c’est de tout temps que nous défendons les collectivités territoriales, et nous continuons de les défendre une fois élus.
C’est d’ailleurs dans cet esprit que nous avons déposé le présent amendement, qui tend à renforcer les moyens des communes les plus modestes, c'est-à-dire, bien souvent, des communes rurales
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission ne peut qu’être défavorable à cet amendement, qui vise à augmenter le montant par habitant de la dotation de base perçue par les communes de moins de 1 000 habitants, pour l’aligner sur celui des communes comprises entre 1 000 et 2 000 habitants.
Cet amendement reprend en fait partiellement la proposition de loi de notre collègue Gérard Le Cam, discutée au Sénat en octobre dernier. Je rappellerai donc les raisons qui nous avaient conduits, à l’époque, à rejeter cette proposition de loi.
Tout d’abord, le coût de cette mesure est important : il est évalué à 150 millions d’euros par an. Bien sûr, on peut toujours considérer qu’il n’est pas impossible de trouver une telle somme, ne serait-ce qu’en la prenant ailleurs.
Mais surtout, cet effort financier n’est pas orienté vers les communes les plus modestes, contrairement à ce que vous prétendez, monsieur Foucaud, mais vers les communes de moins de 1 000 habitants. Or je rappelle que près de 20 % de ces communes ont un revenu par habitant supérieur à la moyenne nationale et que l’effort fiscal de ces strates est nettement moins fort que celui des autres communes, en dehors des plus grandes agglomérations. C’est ce qui avait conduit la commission des finances à objecter que ce dispositif n’était pas ciblé de manière à atteindre l’objectif affiché.
J’ajoute que, comme l’avait souligné Jean Germain dans son rapport, le dispositif ne vise pas le bon article du code : en l’état, il aurait pour conséquence, notamment, de modifier les strates utilisées pour comparer l’effort fiscal des communes.
En d’autres termes, l’amendement serait défavorable aux communes de moins de 1 000 habitants et aurait ainsi l’effet inverse de celui que vous recherchez. C’est une raison supplémentaire d’être totalement opposé à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Dans cette discussion, je ne partage absolument pas la position de M. le secrétaire d’État.
Je considère, pour ma part, que les dépenses de l’État comprennent les dotations aux collectivités. Or, dans les trois ans qui viennent, on aura bien prélevé 11 milliards d’euros sur ces dotations, qui s’élèvent à 60 milliards d’euros environ. C’est forcément nettement plus que tous les efforts qui seront consentis par ailleurs.
Peut-être que certains ministres ont des difficultés à dormir en essayant de boucler leur budget pour 2015, mais je peux vous dire que les maires et les présidents de conseils généraux et régionaux s’interrogent aussi beaucoup sur la manière de boucler leurs budgets.
Ils voient en effet augmenter la TVA – comme vous le savez, nous ne la récupérons pas –, ils constatent que les traitements des fonctionnaires de catégorie C ont été revalorisés par des décisions nationales qui s’imposent à nous – je vous rappelle que la moitié de nos dépenses sont des dépenses de personnel – et ils se rendent bien compte que la réforme des rythmes scolaires leur coûte de l’argent.
Au final, on impose beaucoup de choses aux collectivités, puis on leur annonce qu’on va amputer leurs dotations de 11 milliards d’euros. Sachant que ces dotations s’élèvent à environ 60 milliards d’euros, sur les 220 milliards d’euros que représente l’ensemble des budgets des collectivités territoriales, cela équivaut à une suppression de 5 % des moyens alloués aux collectivités en l’espace de trois ans.
Quant aux autres recettes des collectivités, elles ne sont pas très dynamiques. Je ne sais pas si vous vous êtes penché sur, par exemple, l’évolution des droits de mutation, monsieur le secrétaire d’État, mais je ne connais guère d’endroits en France où cette recette soit très dynamique !
Nous sommes donc parfois, malheureusement, obligés d’ajuster les taux des impôts locaux, et cela ne nous amuse pas vraiment, croyez-le bien !
Quant aux « maires bâtisseurs », qui construisent de nouveaux logements – c’est ce que je fais dans ma ville –, en raison des deux ou trois ans de retard que l’INSEE a pris dans le recensement, ils sont sanctionnés, car il faut malgré tout, en attendant, financer des services très coûteux pour les nouveaux habitants – crèches, écoles, etc.
J’estime donc que l’effort qui nous est demandé est plus élevé que celui qui est exigé des ministres et des services de l’État. Je ne suis pas opposé à ce que les collectivités fassent des efforts, à condition qu’ils soient identiques à ceux que l’État s’impose à lui-même. Et je serais heureux que l’on puisse se mettre autour d’une table pour trouver un accord sur ce point.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote.
M. Thierry Foucaud. À travers cet amendement, nous posons la question importante des moyens des communes rurales.
Dernièrement, l’Association des maires de France, l’AMF, indiquait que la déperdition des moyens était plus importante en milieu rural qu’en zone urbaine ; il faut prendre cela en compte.
Je veux bien admettre la position de M. le rapporteur général, qui estime que nous devrions retravailler notre amendement, même si j’aurais aimé avoir davantage d’explications.
J’accepterais donc de le retirer moyennant l’engagement de lancer une réflexion sur cette question des communes rurales, à partir du travail réalisé par Gérard Le Cam et d’autres au sein de la commission des finances, tel Jean Germain.
Je ferai en outre observer à M. Delahaye que, si nous avons perdu des recettes dynamiques, c’est aussi parce que nous avons perdu des recettes de taxe professionnelle.
C’est pourquoi nous voulons agir avec détermination sur la question des moyens des collectivités territoriales.
Autre exemple de la perte de moyens des collectivités : l’enseignement de la natation. Nous avons 4 600 piscines en France. Or, aujourd’hui, en raison des fortes dépenses de fonctionnement qui s’imposent aux collectivités, la réhabilitation d’une piscine va entraîner sa fermeture durant neuf ou douze mois, contre trois à six mois auparavant. Certes, il en résultera quelques économies de fonctionnement pour les collectivités, qui récupéreront ainsi quelques marges pour financer d’autres projets en cours. Mais, de façon très concrète, le nombre d’enfants sachant nager à la sortie de l’école primaire, qui a déjà enregistré une baisse de 30 %, diminuera encore !
Voilà une illustration des effets de la baisse des dépenses publiques sur la vie de nos concitoyens.
Je pourrais prendre d’autres exemples, notamment dans le domaine de la culture. Les collectivités territoriales contribuent au financement de la culture à hauteur de 7,6 milliards d'euros. Les conseils régionaux dépensent 650 millions d'euros à ce titre. Si la réforme territoriale proposée par le Gouvernement est adoptée, comment les collectivités feront-elles pour consacrer les mêmes moyens à cette particularité française qu’est le soutien public à la culture ?
M. Christian Bourquin. Et à l’économie !
M. Thierry Foucaud. Absolument !
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Du reste, si les intermittents du spectacle obtiennent aujourd'hui satisfaction, ils seront à nouveau en difficulté demain, car les collectivités auront moins de moyens à consacrer à la culture.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Il y a un constat sur lequel nous pouvons tous nous retrouver, c’est que les déficits sont beaucoup trop élevés, que la dette est beaucoup trop importante et que les impôts sont trop lourds pour nos concitoyens. À partir de ce constat, il faut trouver des solutions. Pour ce faire, chacun y va de sa vérité, de ses réponses. Alors, regardons ce que proposent concrètement les uns et les autres.
Au cours des années passées, les collectivités locales ont déjà souffert. L’État doit quasiment 4 milliards d'euros aux départements au titre des allocations individuelles de solidarité, RSA, APA, PCH. Le problème ne date donc pas d’aujourd'hui ! La charge est très lourde pour les collectivités locales.
Les droits de mutation ont diminué, c’est vrai, du fait de la crise, et cette diminution n’a pas été compensée.
On nous dit qu’il ne faut pas prélever sur les dotations aux collectivités locales. Bien sûr, personne ne le souhaite. Au contraire, tout le monde voudrait les augmenter ! Cependant, lorsque le gouvernement actuel annonce, dans le cadre du pacte de solidarité et de responsabilité, qu’il faut faire 50 milliards d'euros d’économies, ce qui est énorme, l’opposition répond qu’il faut en faire 100 milliards. C’est dans le programme de l’UMP !
M. Francis Delattre. Vous pourriez nous en montrer un exemplaire, de ce programme ?...
M. Didier Guillaume. C’est un député drômois qui l’a écrit ; je suis donc bien placé pour en parler ! (M. Francis Delattre proteste.)
Qui peut croire qu’on peut faire 100 milliards d'euros d’économies sans toucher aux collectivités locales ? Personne !
Notre objectif, c’est de faire les économies les plus équitables possible.
J’en viens à l’amendement de notre éminent collègue Thierry Foucaud. Il existe de grandes différences de richesse entre les communes. Dans mon département, certaines communes ont un potentiel fiscal par habitant supérieur à 3 500 euros, alors que, dans d’autres, il n’est que de 500 ou 600 euros. On pourrait aussi parler de cet écart-là !
La position du Gouvernement et de notre groupe consiste tout simplement à dire que tout le monde doit participer à l’effort de redressement des comptes.
Si la dette n’avait pas augmenté de 600 milliards d'euros au cours du précédent quinquennat, on n’en serait peut-être pas là ! (Mme Françoise Férat s’exclame.)
M. Francis Delattre. Il y a eu la crise !
M. Didier Guillaume. Dès lors qu’il faut réduire la dette et les déficits sans augmenter les impôts, tout le monde doit participer à l’effort.
Moi, je veux remercier le Gouvernement. Grâce à l’accord qui a été passé avec lui, pour la deuxième année consécutive, une majorité de conseils généraux ont une péréquation positive en matière d’allocations individuelles de solidarité. Bien sûr, on aimerait aller beaucoup plus loin, mais un effort a été fait.
Il faut regarder les choses de la façon la plus sereine et la plus tranquille possible. Certes, c’est un effort important qui est demandé aux collectivités, mais la cohérence du dispositif que nous soutenons repose sur l’idée selon laquelle tout le monde doit participer à l’effort commun. L’objectif, c’est de redresser la France, c’est de redresser ses comptes publics, c’est de faire en sorte que la France puisse redémarrer.
Il peut évidemment y avoir d’autres voies, d’autres politiques ; il n’existe pas de chemin unique ! Nous estimons cependant que nous sommes en train de prendre les mesures les plus justes possible pour le pays. Je pense par exemple à la baisse des impôts pour les plus modestes ; j’ai l’impression que le Sénat ne la votera pas, et ce sera vraiment dommage !
La cohérence de notre projet, c’est de faire en sorte que les efforts de redressement des finances soient le mieux répartis possible. Quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, quelles que soient les positions des uns et des autres, toutes respectables, il faut regarder les choses en face. Il y a ceux qui assument le fait que tout le monde, y compris les collectivités, doive participer, le fait que l’effort doive être réparti, même s’il peut sembler lourd, et ceux qui ne veulent pas « mettre les mains dans le cambouis ». Pour notre part, nous les y mettons parce qu’il est important que le redressement du pays se fasse dans la justice. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je donne acte à Thierry Foucaud de ce qu’il s’est dit prêt à envisager le retrait de son amendement.
Je partage, bien entendu, les intentions et les objectifs de nos collègues du groupe CRC et je voudrais attirer leur attention sur deux points.
Premièrement, dans un esprit proche de celui qui les a animés en déposant cet amendement, j’ai mis en place un groupe de réflexion sur la dotation globale de fonctionnement, qui constitue un enjeu éminemment important. Nous avons conduit un certain nombre d’auditions au cours des trois derniers mois. Nous avons réfléchi avec des experts aux moyens de répartir le plus équitablement possible l’effort demandé et aux ajustements complémentaires qu’il est souhaitable de prévoir. D’ici quelques mois – après septembre, sans doute –, j’aurai l’occasion de faire une communication sur le travail réalisé au sein de ce groupe, afin de porter les éléments de conclusion à la connaissance de la commission des finances.
Deuxièmement, comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, j’ai émis auprès du Gouvernement, plus particulièrement auprès de la ministre en charge du sujet et du secrétaire d’État André Vallini, le souhait que soit mis en place un dispositif complémentaire de péréquation, dans le but de réduire à très peu de chose les incidences pour les communes les plus modestes. Je crois savoir que le Gouvernement travaille à la recherche d’une solution technique qui permettrait d’éviter que les communes disposant de ressources modestes ne soient affectées d’une façon insupportable.
Monsieur Foucaud, mes chers collègues, je crois pouvoir dire que nous aurons à l’automne un débat fort utile sur cette question particulièrement sensible.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 60.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3 et état A annexé
I. – Pour 2014, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :
(En millions d’euros) |
|||
Ressources |
Charges |
Soldes |
|
Budget général |
|||
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
-9 629 |
-7 713 |
|
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
-4 313 |
-4 313 |
|
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
-5 316 |
-3 400 |
|
Recettes non fiscales |
549 |
||
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
-4 767 |
||
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
|||
Montants nets pour le budget général |
-4 767 |
-3 400 |
-1 367 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
|||
Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours |
-4 767 |
-3 400 |
|
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes |
|||
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
|||
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
|||
Comptes de concours financiers |
|||
Comptes de commerce (solde) |
|||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
|||
Solde pour les comptes spéciaux |
|||
Solde général |
-1 367 |
II. – Pour 2014 :
1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :
(En milliards d’euros) |
||
Besoin de financement |
||
Amortissement de la dette à moyen et long termes |
103,8 |
|
Dont amortissement de la dette à long terme |
41,8 |
|
Dont amortissement de la dette à moyen terme |
62,0 |
|
Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés) |
- |
|
Amortissement des autres dettes |
0,2 |
|
Déficit à financer |
71,9 |
|
Dont déficit budgétaire |
83,9 |
|
Dont dotation budgétaire du deuxième programme d’investissements d’avenir |
-12,0 |
|
Autres besoins de trésorerie |
2,4 |
|
Total |
178,3 |
|
Ressources de financement |
||
Émissions de dette à moyen et long termes nette des rachats |
173,0 |
|
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement |
1,5 |
|
Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme |
1,9 |
|
Variation des dépôts des correspondants |
- |
|
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État |
1,4 |
|
Autres ressources de trésorerie |
0,5 |
|
Total |
178,3 |
; |
2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.
III. – Le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État fixé pour 2014 par la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 demeure inchangé.
ÉTAT A
VOIES ET MOYENS POUR 2014 RÉVISÉS
BUDGET GÉNÉRAL
(En milliers d’euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Révision des évaluations pour 2014 |
1. Recettes fiscales |
||
11. Impôt sur le revenu |
-3 184 151 |
|
1101 |
Impôt sur le revenu |
-3 184 151 |
12. Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
181 443 |
|
1201 |
Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
181 443 |
13. Impôt sur les sociétés |
-4 434 000 |
|
1301 |
Impôt sur les sociétés |
-4 293 000 |
1302 |
Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés |
-141 000 |
14. Autres impôts directs et taxes assimilées |
13 280 |
|
1401 |
Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l’impôt sur le revenu |
-26 000 |
1402 |
Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes |
-604 000 |
1406 |
Impôt de solidarité sur la fortune |
637 748 |
1410 |
Cotisation minimale de taxe professionnelle |
30 000 |
1411 |
Cotisations perçues au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction |
5 000 |
1412 |
Taxe de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue |
5 000 |
1413 |
Taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité |
-21 070 |
1499 |
Recettes diverses |
-13 398 |
15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
247 892 |
|
1501 |
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
247 892 |
16. Taxe sur la valeur ajoutée |
-1 354 870 |
|
1601 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
-1 354 870 |
17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
-1 098 788 |
|
1701 |
Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d’offices |
-70 000 |
1703 |
Mutations à titre onéreux de meubles corporels |
-1 000 |
1705 |
Mutations à titre gratuit entre vifs (donations) |
-294 546 |
1706 |
Mutations à titre gratuit par décès |
-559 670 |
1711 |
Autres conventions et actes civils |
-33 408 |
1713 |
Taxe de publicité foncière |
18 000 |
1714 |
Prélèvement sur les sommes versées par les organismes d’assurances et assimilés à raison des contrats d’assurances en cas de décès |
3 401 |
1716 |
Recettes diverses et pénalités |
4 619 |
1721 |
Timbre unique |
40 037 |
1753 |
Autres taxes intérieures |
-82 147 |
1768 |
Taxe spéciale sur certains véhicules routiers |
-7 204 |
1774 |
Taxe spéciale sur la publicité télévisée |
873 |
1777 |
Taxe sur certaines dépenses de publicité |
-2 000 |
1780 |
Taxe de l’aviation civile |
14 000 |
1781 |
Taxe sur les installations nucléaires de base |
-2 692 |
1782 |
Taxes sur les stations et liaisons radioélectriques privées |
1 379 |
1785 |
Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs) |
-126 000 |
1786 |
Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos |
-33 000 |
1787 |
Prélèvement sur le produit brut des paris hippiques |
-16 000 |
1788 |
Prélèvement sur les paris sportifs |
8 000 |
1789 |
Prélèvement sur les jeux de cercle en ligne |
-5 000 |
1797 |
Taxe sur les transactions financières |
16 177 |
1799 |
Autres taxes |
27 393 |
2. Recettes non fiscales |
||
21. Dividendes et recettes assimilées |
873 900 |
|
2110 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises financières |
-66 000 |
2111 |
Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés |
213 000 |
2116 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers |
726 900 |
25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites |
-56 544 |
|
2510 |
Frais de poursuite |
-56 544 |
26. Divers |
-268 000 |
|
2603 |
Prélèvements sur les fonds d’épargne gérés par la Caisse des dépôts et consignations |
-368 000 |
2699 |
Autres produits divers |
100 000 |
Récapitulation des recettes du budget général
(En milliers d’euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Révision des évaluations pour 2014 |
1. Recettes fiscales |
-9 629 194 |
|
11 |
Impôt sur le revenu |
-3 184 151 |
12 |
Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
181 443 |
13 |
Impôt sur les sociétés |
-4 434 000 |
14 |
Autres impôts directs et taxes assimilées |
13 280 |
15 |
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
247 892 |
16 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
-1 354 870 |
17 |
Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
-1 098 788 |
2. Recettes non fiscales |
549 356 |
|
21 |
Dividendes et recettes assimilées |
873 900 |
25 |
Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites |
-56 544 |
26 |
Divers |
-268 000 |
Total des recettes, nettes des prélèvements |
-9 079 838 |
M. le président. L'amendement n° 206, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. Dans l’état A, modifier les évaluations de recettes comme suit :
I. – BUDGET GÉNÉRAL
1. Recettes fiscales
11. Impôt sur le revenu
Ligne 1101 Impôt sur le revenu
minorer de 1 680 000 000 €
II. Rédiger ainsi le tableau du I de l’article :
|
(En millions d’euros) |
|
|||
Ressources |
Charges |
Soldes |
|||
|
|
|
|
|
|
|
Budget général |
|
|
|
|
|
|
|
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Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
- 11 309 |
- 7 713 |
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A déduire : Remboursements et dégrèvements |
- 4 313 |
- 4 313 |
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Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
- 6 996 |
- 3 400 |
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Recettes non fiscales |
549 |
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Recettes totales nettes / dépenses nettes |
- 6 447 |
- 3 400 |
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A déduire : Prélèvements sur recettes au profit des |
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collectivités territoriales et de l'Union européenne |
0 |
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Montants nets pour le budget général |
- 6 447 |
- 3 400 |
- 3 047 |
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Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
0 |
0 |
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Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours |
- 6 447 |
- 3 400 |
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Budgets annexes |
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Contrôle et exploitation aériens |
0 |
0 |
0 |
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Publications officielles et information administrative |
0 |
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0 |
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Totaux pour les budgets annexes |
0 |
0 |
0 |
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Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
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Contrôle et exploitation aériens |
0 |
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Publications officielles et information administrative |
0 |
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Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
0 |
0 |
0 |
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Comptes spéciaux |
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Comptes d'affectation spéciale |
0 |
0 |
0 |
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Comptes de concours financiers |
0 |
0 |
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Comptes de commerce (solde) |
xx |
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0 |
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Comptes d'opérations monétaires (solde) |
xx |
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Solde pour les comptes spéciaux |
xx |
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0 |
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Solde général |
xx |
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- 3 047 |
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III. Rédiger ainsi le tableau du 1° du II de l’article :
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(En milliards d'euros) |
Besoin de financement |
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Amortissement de la dette à moyen et long termes ………………………………………………………….. |
103,8 |
dont amortissement de la dette à long terme |
41,8 |
dont amortissement de la dette à moyen terme |
62,0 |
dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés) |
- |
Amortissement des autres dettes ……………………………………………………………………………….. |
0,2 |
Déficit à financer ………………………………………………………………………………………………….. |
73,6 |
dont déficit budgétaire |
85,6 |
dont dotation budgétaire du deuxième programme d'investissements d'avenir |
-12,0 |
Autres besoins de trésorerie …………………………………………………………………………………….. |
2,4 |
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Total ……………………………………………………………………………………………………………. |
180,0 |
Ressources de financement |
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Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats……………………………………………… |
173,0 |
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement ……… |
1,5 |
Variation nette de l'encours des titres d'État à court terme ……………………………………… |
3,6 |
Variation des dépôts des correspondants ……………………………………………………. |
- |
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État |
1,4 |
Autres ressources de trésorerie ……………………………………………………. |
0,5 |
Total ……………………………………………………………………………………………………………. |
180,0 |
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Cet amendement est de nature strictement technique. Le Gouvernement dépose traditionnellement un tel amendement afin de tirer les conséquences sur l’équilibre budgétaire de l’ensemble des votes intervenus dans le cadre de l’examen de la première partie du projet de loi de finances rectificative. Ces votes conduisent en effet à accroître le déficit budgétaire de près de 1,7 milliard d'euros.
L’adoption de l’amendement n° 197 a rétabli le dispositif d’exonération des heures supplémentaires tel qu’il existait précédemment.
L’adoption de l’amendement n° 136, qui abaisse le droit de timbre applicable en matière de délivrance de passeport, n’a pas d’impact direct sur l’équilibre budgétaire de l’État au regard de la prévision de recettes, qui est affectée essentiellement à l’Agence nationale des titres sécurisés.
L’adoption de l’amendement n° 28 rectifié, qui instaure un crédit d’impôt sur les sociétés de 500 euros par mois et par apprenti, n’a pas d’impact sur l’équilibre de l’exercice 2014.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vos votes ont porté le déficit budgétaire à 85,6 milliards d'euros, …
M. Jean-Pierre Caffet. Ah, bravo !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. … ce qui représente une progression de 1,7 milliard d'euros par rapport au texte adopté par l’Assemblée nationale.
Le Gouvernement a fait le choix d’un rétablissement des comptes publics, condition indispensable pour conserver notre souveraineté, restaurer nos marges de manœuvre et soutenir la croissance et l’emploi. Or nous constatons que les votes de la Haute Assemblée induisent un creusement du déficit légèrement inférieur à 2 milliards d'euros.
La responsabilité du Gouvernement est de présenter devant le Parlement un projet de loi de finances rectificative cohérent avec les arbitrages relatifs au budget 2015-2017, qui sont en train d’être finalisés. Ce budget triennal permettra de documenter les 18 milliards d'euros d’économies dans le champ de l’État et de ses agences et d’apporter dans le même temps des moyens de financement nouveaux aux priorités gouvernementales : accélérer la croissance et faire progresser durablement l’emploi.
Par conséquent, le Gouvernement demandera qu’il soit procédé à une seconde délibération sur plusieurs articles de la première partie du projet de loi de finances rectificative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement du Gouvernement sur l’article d’équilibre permet de retracer l’impact budgétaire des votes intervenus au cours de l’examen de la première partie. Il s’agit donc d’un simple constat, qui, dès lors qu’il est conforme aux votes intervenus – personne ici ne peut en douter –, doit logiquement être approuvé par notre assemblée. Je vous invite donc, mes chers collègues, à voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Monsieur le secrétaire d'État, les Français en ont assez de vos discours sur cette croissance qui revient, ce retournement qui arrive, cette inversion qui revire, cette inflexion de la courbe du chômage – ils l’attendent toujours ! –, ces déficits qui sont sous contrôle, ces économies d’envergure que l’on engage, cette compétitivité qui devrait se redresser alors que son chantre, M. Gallois, a disparu avec vingt-neuf de ses trente propositions.
En réalité, le seul plan de redressement que confirme ce projet de loi de finances rectificative, c’est celui de la courbe des impôts. C’est la seule chose que la France connaît !
Vous nous reprochez d’avoir alourdi un peu la note. Nous sommes prêts à discuter d’économies si c’est nécessaire, monsieur le rapporteur général. Cependant, s'agissant des dépenses, y a-t-il, dans les documents fournis, le début de la recherche d’évaluations ou d’expérimentations de pilotage de l’efficience de la dépense publique, comme cela a été fait dans beaucoup de pays, et notamment en Suède et dans les autres pays nordiques ?
Des réformes structurelles sont indispensables, mais, comme nous l’avons vu ces dernières semaines, vous avez peur de la confrontation avec les réalités économiques et sociales du pays, vous montrez une vraie absence de courage.
Vous nous dites que nous alourdissons la note, mais ce que nous constatons, nous, c’est le retour des nationalisations partielles. La promotion de l’État stratège, c’est bien pour la communication, mais c’est souvent désastreux pour les finances publiques ! Monsieur le secrétaire d'État, combien nous coûtera l’affaire Alstom ?
M. Jean-Pierre Caffet. Rien !
M. Francis Delattre. Elle nous coûtera 2 milliards d'euros, qui ne serviront qu’à alléger la facture de General Electric – qui n’en demandait pas tant, puisque cette entreprise avait déjà choisi la France pour être sa plate-forme en Europe – et à dégager une belle plus-value pour M. Bouygues. Dans ce dossier qui nous coûte 2 milliards d'euros, on confond l’État stratège et l’État pompier ; encore que, pour M. Bouygues, il s’agisse plutôt de l’État providence...
Ce projet de loi de finances rectificative accroît le déficit budgétaire de près de 1,4 milliard d’euros. Où est le redressement des comptes quand vous voyez le déficit passer de 82,6 milliards à 83,9 milliards d’euros ?
Pire encore, les chiffrages sur les recettes attendues ont été diminués d’environ 5,3 milliards d’euros, mais je vous rappelle que, en 2013, les recettes ont été déficitaires de plus de 15 milliards d’euros. Aussi, permettez-nous de douter du montant que vous avancez, comme la Cour des comptes, d’ailleurs, qui pointe des problèmes d’anticipation, d’évaluation, de méthodologie.
Nous sommes aussi circonspects, monsieur le secrétaire d’État, devant le 1 % de croissance attendue, que tous les instituts contredisent, ce qui impacte nécessairement vos prévisions.
En réalité, sous la pression de ceux que l’on appelle les « frondeurs » du parti socialiste, vous avez seulement prévu quelques mesures, pour un montant de 1,6 milliard d’euros, en faveur des ménages nouvellement assujettis à l’impôt sur le revenu ; il fallait bien éteindre l’incendie ! Nous ne contestons pas de ce dispositif, contrairement à ce que certains ont pu prétendre, mais nous dénonçons le faible nombre de ses bénéficiaires : il ne va toucher que 3,6 millions des 37 millions de foyers fiscaux. Pour notre part, nous pensons que le nombre de foyers des couches moyennes qui auraient dû être aidés est plutôt de l’ordre de 10 millions.
En somme, les choses sont relativement simples : nous avons finalement un déficit aggravé et un recours à l’endettement qui sera nécessairement encore accru. Du reste, nous allons dépasser le seuil des 2 000 milliards de dettes, ce qui est évidemment très préoccupant.
En face, monsieur le secrétaire d’État, quelles économies enregistrons-nous réellement ? On ne trouve que 3,4 milliards d’euros d’annulations de crédits, dont 1,8 milliard d’euros qui proviennent de l’allégement des charges de la dette, phénomène conjoncturel, comme chacun sait.
M. Francis Delattre. En réalité, les annulations de crédits sur l’ensemble des ministères ne portent donc que sur 1,6 milliard d’euros.
Certes, comme vous nous l’avez dit, la réserve est maintenue à 6,6 milliards d’euros, mais, en fait, nous assistons à ce que la Cour des comptes appelle une altération des comptes de la nation. Comme son président, nous considérons qu’il n’y a plus de marges sur la fiscalité et que l’effort sur les dépenses est nettement insuffisant. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, je rappelle que nous n’en sommes pas encore au vote sur la première partie du projet de loi de finances rectificative. Nous en sommes toujours à l’examen de l’amendement n° 206.
Je le mets aux voix.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour explication de vote sur l’article.
M. Thierry Foucaud. Monsieur le président, cette explication de vote vaudra pour l’article 3 et pour l’ensemble de la première partie.
Au-delà de la mesure d’allégement de l’impôt sur le revenu des salariés payés au SMIC ou un peu au-delà, et qui correspond de fait à une prise en charge par l’État de la hausse des rémunérations qui aurait dû être financée par les entreprises, la première partie de ce collectif budgétaire laisse quelque peu sur sa faim celles et ceux qui attendaient du gouvernement de Manuel Valls la plus franche expression d’un attachement aux valeurs et idéaux de la gauche.
La réduction du coût de la dette publique n’est même pas utilisée par le Gouvernement pour procéder à un changement de priorités, et les annulations de crédits décrites dans l’article 4 semblent décidées au fil de l’eau, tout en ayant un caractère fortement prévisible.
Elles participent par ailleurs d’une démarche globale de baisse annoncée des prélèvements obligatoires comme de la dépense publique. Cela signifie qu’on ne proposera au contribuable, dans les mois et les années à venir, qu’un faux choix liant allégement de la pression fiscale et réduction de l’action publique. Pourtant, ce qui est en question, nous semble-t-il, c’est plutôt le renforcement de la qualité et de la diversité de l’action publique, pour que l’activité économique reparte, que la situation sociale connaisse quelques améliorations et que le pays se fixe enfin des objectifs de développement et de progrès.
L’impôt n’est pas un mal en soi, pourrait-on rétorquer au Premier ministre, pour peu qu’il s’attache à répondre à un besoin collectif.
Une contribution mise à la charge des entreprises pour financer les transports collectifs régionaux qui amènent leur personnel sur son lieu de travail ou véhiculent leur clientèle sur son lieu d’achat est un impôt intelligent, logique, dont le rendement peut d’ailleurs constituer un puissant vecteur d’investissement en la matière.
Il ne s’agit là que d’un exemple parmi d’autres, qui montre que nous devrions, monsieur le secrétaire d’État, prendre rendez-vous avant peu, afin d’examiner avec le plus grand sérieux la question de la réforme fiscale, du sens même de tel ou tel prélèvement, et de trouver d’autres outils budgétaires et politiques pour répondre aux attentes de nos concitoyens.
La satisfaction des besoins sociaux, la revalorisation de l’action et de la dépense publiques sont les voies par lesquelles nos budgets, que ce soit celui de l’État ou celui de la sécurité sociale, retrouveront le chemin de l’équilibre.
C’est au travers de prélèvements pleinement incitatifs, décourageant la spéculation, facilitant l’allocation de l’argent sur les dépenses les plus utiles socialement et économiquement que nous sortirons des ornières du passé.
Quand on songe que nous allons peut-être dépenser jusqu’à 50 milliards d’euros pour alléger les cotisations sociales des entreprises sans pour autant baisser du moindre point le taux des prélèvements obligatoires…
En tout état de cause, nous ne pouvons, eu égard à la teneur du débat qui vient d’avoir lieu, nous prononcer pour l’adoption de la première partie de ce collectif budgétaire. Vous l’aurez compris, le groupe CRC, partisan d’une autre politique budgétaire, ne peut donc que voter contre la partie « recettes » de ce texte.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Si vous le permettez, monsieur le président, je voudrais rappeler au Sénat, sous votre contrôle bienveillant, l’enchaînement de la fin de la discussion de la première partie.
Nous en sommes parvenus à l’article d’équilibre, lequel collationne simplement les votes que nous avons précédemment émis. Il intègre l’amendement que nous avons adopté voilà quelques instants, sur la proposition du Gouvernement. Comme il s’agit simplement de la prise en compte mécanique de tous les votes émis, il s’agit d’un vote purement technique, et il est nécessaire de voter cet article d’équilibre.
Comme il l’a déjà laissé entendre, le Gouvernement, n’étant pas satisfait de ce qu’a voté le Sénat, va demander une seconde délibération. La commission des finances devra alors examiner le ou les amendements déposés par le Gouvernement et aura besoin, pour cela, d’une brève suspension de séance.
Il n’est pas exclu que le Gouvernement demande au Sénat de se prononcer par un seul vote sur son ou ses amendements, les articles soumis à seconde délibération et l’ensemble de la première partie. Après que ceux qui le souhaitent auront expliqué leur vote, nous pourrons procéder à ce vote. En l’espèce, le scrutin public n’est pas de droit, mais sans doute y aura-t-il un groupe pour demander qu’il en soit organisé un. C’est ainsi que pourra se conclure l’examen de la partie ressources et de l’article d’équilibre.
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Seconde délibération
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, en application de l’article 43, alinéa 4, et de l’article 47 bis, alinéa 1, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une seconde délibération sur les articles 1er bis A, 1er bis B, 1er bis C, 1er bis, qui a été supprimé, 1er ter, et, pour coordination, sur l’article 3 et l’état A annexé au projet de loi de finances rectificative.
En outre, conformément à l’article 44, troisième alinéa, de la Constitution et à l’article 42, alinéa 7, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à un seul vote sur les articles et amendements qui font l’objet de cette seconde délibération ainsi que sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative.
M. le président. En application de l’article 47 bis, alinéa 1, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande au Sénat qu’il soit procédé à une seconde délibération sur les articles que M. le secrétaire d'État a indiqués.
La seconde délibération est de droit lorsqu’elle est demandée par le Gouvernement.
Aux termes de l’article 43, alinéa 5, du règlement du Sénat, « lorsqu’il y a lieu à seconde délibération, les textes adoptés lors de la première délibération sont renvoyés à la commission, qui doit présenter un nouveau rapport ».
Nous allons donc suspendre la séance pour permettre à la commission des finances de se réunir.
Monsieur le président de la commission, combien de temps, environ, cette réunion devrait-elle durer ?
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Une dizaine de minutes, monsieur le président.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt heures quinze.)
M. le président. La séance est reprise.
Je rappelle que, en application de l'article 44, troisième alinéa, de la Constitution, le Gouvernement a demandé au Sénat de se prononcer par un seul vote sur les articles et amendements soumis à seconde délibération, ainsi que sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative.
Conformément à l’article 42, alinéa 7, du règlement, nous procéderons donc de la manière suivante : je demanderai au Gouvernement de présenter chaque amendement, puis je demanderai l’avis de la commission des finances. Le vote sera réservé sur chaque amendement et sur chaque article soumis à seconde délibération.
Article 1er bis A (nouveau)
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 1er bis A dans cette rédaction :
I. – Après l’article 81 ter du code général des impôts, il est inséré un article 81 quater ainsi rédigé :
« Art. 81 quater. – I. – Sont exonérés de l’impôt sur le revenu :
« 1° Les salaires versés aux salariés au titre des heures supplémentaires de travail, définies à l’article L. 3121-11 du code du travail et, pour les salariés relevant de conventions de forfait annuel en heures, prévues à l’article L. 3121-42 du même code, des heures effectuées au-delà de 1 607 heures, ainsi que des heures effectuées en application de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 3123-7 du même code. Sont exonérés les salaires versés au titre des heures supplémentaires mentionnées à l’article L. 3122-4 du même code, à l’exception des heures effectuées entre 1 607 heures et la durée annuelle fixée par l’accord lorsqu’elle lui est inférieure.
« L’exonération mentionnée au premier alinéa est également applicable à la majoration de salaire versée, dans le cadre des conventions de forfait annuel en jours, en contrepartie de la renonciation par les salariés, au-delà du plafond de deux cent dix-huit jours mentionné à l’article L. 3121-44 du même code, à des jours de repos dans les conditions prévues à l’article L. 3121-45 du même code ;
« 2° Les salaires versés aux salariés à temps partiel au titre des heures complémentaires de travail définies au 4° de l’article L. 3123-14 et aux articles L. 3123-17 et L. 3123-18 du même code ;
« 3° Les salaires versés aux salariés par les particuliers employeurs au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent ;
« 4° Les salaires versés aux assistants maternels régis par les articles L. 421-1 et suivants et L. 423-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles au titre des heures supplémentaires qu’ils accomplissent au-delà d’une durée hebdomadaire de quarante-cinq heures, ainsi que les salaires qui leur sont versés au titre des heures complémentaires accomplies au sens de la convention collective nationale qui leur est applicable ;
« 5° Les éléments de rémunération versés aux agents publics titulaires ou non titulaires au titre, selon des modalités prévues par décret, des heures supplémentaires qu’ils réalisent ou du temps de travail additionnel effectif ;
« 6° Les salaires versés aux autres salariés dont la durée du travail ne relève pas des dispositions du titre II du livre Ier de la troisième partie du code du travail ou du chapitre III du titre Ier du livre VII du code rural et de la pêche maritime au titre, selon des modalités prévues par décret, des heures supplémentaires ou complémentaires de travail qu’ils effectuent ou, dans le cadre de conventions de forfait en jours, les salaires versés en contrepartie des jours de repos auxquels les salariés ont renoncé au-delà du plafond de deux cent dix-huit jours.
« II. – L’exonération prévue au I s’applique :
« 1° Aux rémunérations mentionnées aux 1° à 4° et au 6° du I et, en ce qui concerne la majoration salariale correspondante, dans la limite :
« a) Des taux prévus par la convention collective ou l’accord professionnel ou interprofessionnel applicable ;
« b) À défaut d’une telle convention ou d’un tel accord :
« – pour les heures supplémentaires, des taux de 25 % ou 50 %, selon le cas, prévus au premier alinéa de l’article L. 3121-22 du code du travail ;
« – pour les heures complémentaires, du taux de 25 % ;
« – pour les heures effectuées au-delà de 1 607 heures dans le cadre de la convention de forfait prévue à l’article L. 3121-46 du même code, du taux de 25 % de la rémunération horaire déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre d’heures de travail prévu dans le forfait, les heures au-delà de la durée légale étant pondérées en fonction des taux de majoration applicables à leur rémunération ;
« 2° À la majoration de salaire versée dans le cadre des conventions de forfait mentionnées au second alinéa du 1° et au 6° du I, dans la limite de la rémunération journalière déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle forfaitaire et le nombre de jours de travail prévu dans le forfait, majorée de 25 % ;
« 3° Aux éléments de rémunération mentionnés au 5° du I, dans la limite des dispositions applicables aux agents concernés.
« III. – Les I et II sont applicables sous réserve du respect par l’employeur des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail.
« Les I et II ne sont pas applicables lorsque les salaires ou éléments de rémunération qui y sont mentionnés se substituent à d’autres éléments de rémunération au sens de l’article 79 du présent code, à moins qu’un délai de douze mois ne se soit écoulé entre le dernier versement de l’élément de rémunération en tout ou partie supprimé et le premier versement des salaires ou éléments de rémunération précités.
« De même, ils ne sont pas applicables :
« – à la rémunération des heures complémentaires lorsque ces heures sont accomplies de manière régulière au sens de l’article L. 3123-15 du code du travail, sauf si elles sont intégrées à l’horaire contractuel de travail pendant une durée minimale fixée par décret ;
« – à la rémunération d’heures qui n’auraient pas été des heures supplémentaires sans abaissement, après le 1er octobre 2012, de la limite haute hebdomadaire mentionnée à l’article L. 3122-4 du même code. »
II. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° L’article L. 241-17 est ainsi rétabli :
« Art. L. 241-17. – I. – Toute heure supplémentaire ou complémentaire effectuée, lorsqu’elle entre dans le champ d’application du I de l’article 81 quater du code général des impôts, ouvre droit, dans les conditions et limites fixées par les dispositions de cet article, à une réduction de cotisations salariales de sécurité sociale proportionnelle à sa rémunération, dans la limite des cotisations et contributions d’origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi dont le salarié est redevable au titre de cette heure. Un décret détermine le taux de cette réduction.
« Ces dispositions sont applicables aux heures supplémentaires ou complémentaires effectuées par les salariés relevant des régimes spéciaux mentionnés à l’article L. 711-1 du présent code dans des conditions fixées par décret, compte tenu du niveau des cotisations dont sont redevables les personnes relevant de ces régimes et dans la limite mentionnée au premier alinéa du présent I.
« II. – La réduction de cotisations salariales de sécurité sociale prévue au I est imputée sur le montant des cotisations salariales de sécurité sociale dues pour chaque salarié concerné au titre de l’ensemble de sa rémunération.
« III. – Le cumul de cette réduction avec l’application de taux réduits en matière de cotisations salariales, d’assiettes ou de montants forfaitaires de cotisations ou avec l’application d’une autre exonération, totale ou partielle, de cotisations salariales de sécurité sociale ne peut être autorisé que dans des conditions fixées par décret. Ce décret tient compte du niveau des avantages sociaux octroyés aux salariés concernés.
« IV. – Le bénéfice de la réduction est subordonné à la mise à disposition du service des impôts compétent et des agents chargés du contrôle, mentionnés à l’article L. 243-7 du présent code et à l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par l’employeur, d’un document en vue du contrôle des dispositions du présent article dans des conditions fixées par décret. Pour les salaires pour lesquels il est fait usage des dispositifs mentionnés aux articles L. 133-8, L. 133-8-3 et L. 531-8 du présent code, les obligations déclaratives complémentaires sont prévues par décret. » ;
2° L’article L. 241-18 est ainsi rédigé :
« Art. L. 241-18. – I. – Toute heure supplémentaire effectuée par les salariés mentionnés au II de l’article L. 241-13, lorsqu’elle entre dans le champ d’application du I de l’article 81 quater du code général des impôts, ouvre droit à une déduction forfaitaire des cotisations patronales à hauteur d’un montant fixé par décret. Ce montant peut être majoré dans les entreprises employant au plus vingt salariés.
« II. – Une déduction forfaitaire égale à sept fois le montant défini au I est également applicable pour chaque jour de repos auquel renonce un salarié dans les conditions prévues par le second alinéa du 1° du I de l’article 81 quater du code général des impôts.
« III. – Le montant mentionné aux I et II est cumulable avec les autres dispositifs d’exonérations de cotisations patronales de sécurité sociale dans la limite des cotisations patronales de sécurité sociale, ainsi que des contributions patronales recouvrées suivant les mêmes règles, restant dues par l’employeur, et, pour le reliquat éventuel, dans la limite des cotisations salariales de sécurité sociale précomptées, au titre de l’ensemble de la rémunération du salarié concerné.
« Ce montant est déduit des sommes devant être versées par les employeurs aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 du présent code et L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime.
« Le bénéfice des déductions mentionnées aux I et II est subordonné au respect des conditions prévues au III de l’article 81 quater du code général des impôts.
« Le bénéfice de la majoration mentionnée au I est subordonné au respect des dispositions du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l’application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis.
« IV. – Les employeurs bénéficiant de la déduction forfaitaire se conforment aux obligations déclaratives prévues au IV de l’article L. 241-17 du présent code. »
III. – Les dispositions du II sont applicables aux rémunérations perçues à raison des heures de travail accomplies à compter du 1er janvier 2013.
IV. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
V. – La perte de recettes résultant pour l’État des I à III ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° A-1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement souhaite revenir sur les amendements nos 28 rectifié, 89, 136, 190, 197, ainsi que sur la suppression de l’article 1er bis.
En adoptant l’amendement n° 197, le Sénat a rétabli les avantages fiscaux et sociaux afférents à la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires. Or ces exonérations n’ont pas eu les effets escomptés sur la croissance et l’emploi. Par ailleurs, elles n’ont pas été financées, si ce n’est par un accroissement de notre endettement. Toutes les propositions du pacte de responsabilité et de solidarité ont traduit, au contraire, le souhait du Gouvernement de tirer les leçons du passé en faveur de l’emploi et de la croissance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, je présenterai de manière globale l’avis de la commission sur les amendements présentés par le Gouvernement dans le cadre de la seconde délibération.
Mes chers collègues, en tant que rapporteur général, j’ai indiqué à la commission des finances que cette seconde délibération permettait au Sénat de restituer au présent texte sa cohérence de départ, après les votes émis contre l’avis du Gouvernement et de la majorité qui le soutient, en particulier s’agissant du rétablissement de la défiscalisation des heures supplémentaires et de la création d’une réduction d’impôt pour les entreprises ayant des apprentis.
Dans ces conditions, et eu égard à ce qui m'a semblé être une cohérence retrouvée, j’ai invité la commission des finances à voter en faveur du texte modifié par les amendements que présente le Gouvernement sur les articles qui font l’objet de la seconde délibération. La commission des finances, après avoir pris connaissance de ces éléments et y avoir réfléchi, s’est prononcée, à une majorité de seize voix contre quinze, contre le texte qui résulterait de cette seconde délibération. Je me dois donc d’informer notre assemblée que la position de la commission des finances est, dès lors, défavorable sur l’ensemble des amendements.
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 1er bis B dans cette rédaction :
I. – Le I de l’article 953 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le montant : « 89 € » est remplacé par le montant : « 53 € » ;
2° Au deuxième alinéa, le montant : « 86 € » est remplacé par le montant : « 50 € » ;
3° Les troisième et quatrième alinéas sont ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa, le tarif du droit de timbre du passeport délivré à un mineur de quinze ans et plus est fixé à 27 €.
« Si le demandeur fournit deux photographies d'identité, tel que prévu à l'article 6-1 du décret n° 2005-1726 du 30 décembre 2005 précité, le montant du titre pour un mineur de quinze ans et plus est fixé à 22 €. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° A-2, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. L’adoption de l’amendement n° 136 conduit à réduire de 40 % le montant du droit de timbre pour l’obtention des passeports. Or cela est susceptible de mettre en péril l’accomplissement des missions de l'Agence nationale des titres sécurisés, qui a notamment en charge la gestion de près d’une quinzaine de titres sécurisés.
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 1er bis C dans cette rédaction :
I. – À compter de la promulgation de la présente loi et jusqu’au 31 décembre 2015, les entreprises qui recourent aux contrats d’apprentissage prévus à l’article L. 6221-1 du code du travail bénéficient d’une réduction d’impôt sur les sociétés égale à 500 € par mois et par apprenti lorsque ces embauches ont pour effet de porter la proportion de jeunes en apprentissage au-delà de 5 % de l’effectif total de l’entreprise et, pour les entreprises de moins de vingt salariés, dès le deuxième apprenti.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° A-3, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. L’amendement n° 28 rectifié a créé une réduction d’impôt sur les sociétés en faveur de l’apprentissage. Le Gouvernement partage l’objectif d’un développement de l'apprentissage, mais les modalités proposées par l'amendement ne sont pas satisfaisantes. D’où notre proposition de suppression.
M. le président. L'amendement n° A-4, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa du 1 de l'article 150-0 D est complété par les mots : « , ni au gain net mentionné au I de l'article 163 bis G » ;
2° Le II bis de l'article 150-0 D ter est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° À l'avantage et au gain mentionnés au dernier alinéa du 1 de l'article 150-0 D. »
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement souhaite rétablir l’article 1er bis, supprimé par votre assemblée. Cet article prévoit notamment de confirmer l’exclusion des gains de cession des bons de souscription de parts de créateurs d’entreprises – BSPCE – du champ des abattements proportionnels d’impôt sur le revenu, ainsi que du champ de l’abattement fixe de 500 000 euros.
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 1er ter dans cette rédaction :
I. – Le II de l’article 199 ter S du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Les trois dernières phrases du 1 sont supprimées ;
2° Le même 1 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Par exception :
« a) Lorsque le devis ou la facture visant tout ou partie des travaux financés ne permettent pas de justifier les informations figurant dans le descriptif mentionné au 5 du même I, l’entreprise réalisant ces travaux est redevable d’une amende égale à 10 % du montant des travaux non justifié. Cette amende ne peut excéder le montant du crédit d’impôt. Sans préjudice des dispositions du présent a, l’entreprise peut avoir recours à un tiers pour vérifier l’éligibilité des travaux. Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent a ;
« b) Lorsque la justification de la réalisation ou de l’éligibilité des travaux n’est pas apportée par le bénéficiaire dans le délai prévu au 5 dudit I, à l’exception des cas mentionnés au a du présent 1, l’État exige du bénéficiaire le remboursement de l’avantage indûment perçu. Celui-ci ne peut excéder le montant du crédit d’impôt majoré de 25 %. Un décret en Conseil d’État définit les modalités de restitution de l’avantage indu par le bénéficiaire de l’avance remboursable sans intérêt. » ;
3° Au 3, les références : « aux 1 et 2 » sont remplacées par les références : « au premier alinéa du 1 et au 2 ».
II. – Le I s’applique aux offres d’avance émises à compter de l’entrée en vigueur du décret prévu au a du 1 du II de l’article 199 ter S du code général des impôts, tel qu’il résulte de la présente loi et, au plus tard, au 1er janvier 2015.
L'amendement n° A-5, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5, troisième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. L’amendement n° 89 a prévu que les entreprises labellisées peuvent recourir à un tiers vérificateur pour attester de la réalisation des travaux effectués dans le cadre de l’écoprêt à taux zéro. Le Gouvernement a indiqué qu’il n’y était pas favorable tant que l’utilité des conditions de mise en œuvre d’une telle mesure n’avait pas été examinée en détail.
M. le président. Le Sénat a précédemment adopté l’article 3 et l’état A annexé dans cette rédaction :
I. – Pour 2014, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :
(En millions d’euros) |
|||
Ressources |
Charges |
Soldes |
|
Budget général |
|||
Recettes fiscales brutes dépenses brutes |
-11 309 |
-7 713 |
|
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
-4 313 |
-4 313 |
|
Recettes fiscales nettes dépenses nettes |
-6 996 |
-3 400 |
|
Recettes non fiscales |
549 |
||
Recettes totales nettes dépenses nettes |
-6 447 |
-3 400 |
|
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
|||
Montants nets pour le budget général |
-6 447 |
-3 400 |
-3 047 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
|||
Montants nets pour le budget général, compris fonds de concours |
-6 447 |
-3 400 |
|
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes |
|||
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes, compris fonds de concours |
|||
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
|||
Comptes de concours financiers |
|||
Comptes de commerce (solde) |
|||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
|||
Solde pour les comptes spéciaux |
|||
Solde général |
-3 047 |
II. – Pour 2014 :
1° Les ressources et les charges de trésorerie qui concourent à la réalisation de l’équilibre financier sont évaluées comme suit :
(En milliards d’euros) |
||
Besoin de financement |
||
Amortissement de la dette à moyen et long termes |
103,8 |
|
Dont amortissement de la dette à long terme |
41,8 |
|
Dont amortissement de la dette à moyen terme |
62,0 |
|
Dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés) |
- |
|
Amortissement des autres dettes |
0,2 |
|
Déficit à financer |
73,6 |
|
Dont déficit budgétaire |
85,6 |
|
Dont dotation budgétaire du deuxième programme d’investissements d’avenir |
-12,0 |
|
Autres besoins de trésorerie |
2,4 |
|
Total |
180,0 |
|
Ressources de financement |
||
Émissions de dette à moyen et long termes nette des rachats |
173,0 |
|
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement |
1,5 |
|
Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme |
3,6 |
|
Variation des dépôts des correspondants |
- |
|
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État |
1,4 |
|
Autres ressources de trésorerie |
0,5 |
|
Total |
180,0 |
; |
2° Le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an demeure inchangé.
III. – (Non modifié)
ÉTAT A
VOIES ET MOYENS POUR 2014 RÉVISÉS
BUDGET GÉNÉRAL
(En milliers d’euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Révision des évaluations pour 2014 |
1. Recettes fiscales |
||
11. Impôt sur le revenu |
-4 864 151 |
|
1101 |
Impôt sur le revenu |
-4 864 151 |
12. Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
181 443 |
|
1201 |
Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
181 443 |
13. Impôt sur les sociétés |
-4 434 000 |
|
1301 |
Impôt sur les sociétés |
-4 293 000 |
1302 |
Contribution sociale sur les bénéfices des sociétés |
-141 000 |
14. Autres impôts directs et taxes assimilées |
13 280 |
|
1401 |
Retenues à la source sur certains bénéfices non commerciaux et de l’impôt sur le revenu |
-26 000 |
1402 |
Retenues à la source et prélèvements sur les revenus de capitaux mobiliers et le prélèvement sur les bons anonymes |
-604 000 |
1406 |
Impôt de solidarité sur la fortune |
637 748 |
1410 |
Cotisation minimale de taxe professionnelle |
30 000 |
1411 |
Cotisations perçues au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction |
5 000 |
1412 |
Taxe de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue |
5 000 |
1413 |
Taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d’art, de collection et d’antiquité |
-21 070 |
1499 |
Recettes diverses |
-13 398 |
15. Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
247 892 |
|
1501 |
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
247 892 |
16. Taxe sur la valeur ajoutée |
-1 354 870 |
|
1601 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
-1 354 870 |
17. Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
-1 098 788 |
|
1701 |
Mutations à titre onéreux de créances, rentes, prix d’offices |
-70 000 |
1703 |
Mutations à titre onéreux de meubles corporels |
-1 000 |
1705 |
Mutations à titre gratuit entre vifs (donations) |
-294 546 |
1706 |
Mutations à titre gratuit par décès |
-559 670 |
1711 |
Autres conventions et actes civils |
-33 408 |
1713 |
Taxe de publicité foncière |
18 000 |
1714 |
Prélèvement sur les sommes versées par les organismes d’assurances et assimilés à raison des contrats d’assurances en cas de décès |
3 401 |
1716 |
Recettes diverses et pénalités |
4 619 |
1721 |
Timbre unique |
40 037 |
1753 |
Autres taxes intérieures |
-82 147 |
1768 |
Taxe spéciale sur certains véhicules routiers |
-7 204 |
1774 |
Taxe spéciale sur la publicité télévisée |
873 |
1777 |
Taxe sur certaines dépenses de publicité |
-2 000 |
1780 |
Taxe de l’aviation civile |
14 000 |
1781 |
Taxe sur les installations nucléaires de base |
-2 692 |
1782 |
Taxes sur les stations et liaisons radioélectriques privées |
1 379 |
1785 |
Produits des jeux exploités par la Française des jeux (hors paris sportifs) |
-126 000 |
1786 |
Prélèvements sur le produit des jeux dans les casinos |
-33 000 |
1787 |
Prélèvement sur le produit brut des paris hippiques |
-16 000 |
1788 |
Prélèvement sur les paris sportifs |
8 000 |
1789 |
Prélèvement sur les jeux de cercle en ligne |
-5 000 |
1797 |
Taxe sur les transactions financières |
16 177 |
1799 |
Autres taxes |
27 393 |
2. Recettes non fiscales |
||
21. Dividendes et recettes assimilées |
873 900 |
|
2110 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises financières |
-66 000 |
2111 |
Contribution de la Caisse des dépôts et consignations représentative de l’impôt sur les sociétés |
213 000 |
2116 |
Produits des participations de l’État dans des entreprises non financières et bénéfices des établissements publics non financiers |
726 900 |
25. Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites |
-56 544 |
|
2510 |
Frais de poursuite |
-56 544 |
26. Divers |
-268 000 |
|
2603 |
Prélèvements sur les fonds d’épargne gérés par la Caisse des dépôts et consignations |
-368 000 |
2699 |
Autres produits divers |
100 000 |
RÉCAPITULATION DES RECETTES DU BUDGET GÉNÉRAL
(En milliers d’euros) |
||
Numéro de ligne |
Intitulé de la recette |
Révision des évaluations pour 2014 |
1. Recettes fiscales |
-11 309 194 |
|
11 |
Impôt sur le revenu |
-4 864 151 |
12 |
Autres impôts directs perçus par voie d’émission de rôles |
181 443 |
13 |
Impôt sur les sociétés |
-4 434 000 |
14 |
Autres impôts directs et taxes assimilées |
13 280 |
15 |
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques |
247 892 |
16 |
Taxe sur la valeur ajoutée |
-1 354 870 |
17 |
Enregistrement, timbre, autres contributions et taxes indirectes |
-1 098 788 |
2. Recettes non fiscales |
549 356 |
|
21 |
Dividendes et recettes assimilées |
873 900 |
25 |
Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuites |
-56 544 |
26 |
Divers |
-268 000 |
Total des recettes, nettes des prélèvements |
-10 759 838 |
L'amendement n° A-6, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. Dans l’état A, modifier les évaluations de recettes comme suit :
I. – BUDGET GÉNÉRAL
1. Recettes fiscales
11. Impôt sur le revenu
Ligne 1101 Impôt sur le revenu
majorer de 1 680 000 000 €
II. Rédiger ainsi le tableau du I de l’article :
|
|
(En millions d’euros) |
||
Ressources |
Charges |
Soldes |
||
|
Budget général |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
- 9 629 |
- 7 713 |
|
|
A déduire : Remboursements et dégrèvements |
- 4 313 |
- 4 313 |
|
|
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
- 5 316 |
- 3 400 |
|
|
Recettes non fiscales |
549 |
|
|
|
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
- 4 767 |
- 3 400 |
|
|
A déduire : Prélèvements sur recettes au profit des |
|
|
|
|
collectivités territoriales et de l'Union européenne |
0 |
|
|
|
Montants nets pour le budget général |
- 4 767 |
- 3 400 |
- 1 367 |
|
|
|
|
|
|
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
0 |
0 |
|
|
Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours |
- 4 767 |
- 3 400 |
|
|
|
|
|
|
|
Budgets annexes |
|
|
|
|
Contrôle et exploitation aériens |
0 |
0 |
0 |
|
Publications officielles et information administrative |
0 |
|
0 |
|
Totaux pour les budgets annexes |
0 |
0 |
0 |
|
|
|
|
|
|
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|
|
|
|
Contrôle et exploitation aériens |
0 |
|
|
|
Publications officielles et information administrative |
0 |
|
|
|
Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
0 |
0 |
0 |
|
|
|
|
|
|
Comptes spéciaux |
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Comptes d'affectation spéciale |
0 |
0 |
0 |
|
Comptes de concours financiers |
0 |
0 |
|
|
Comptes de commerce (solde) |
xx |
|
0 |
|
Comptes d'opérations monétaires (solde) |
xx |
|
|
|
Solde pour les comptes spéciaux |
xx |
|
0 |
|
|
|
|
|
|
Solde général |
xx |
|
- 1 367 |
III. Rédiger ainsi le tableau du 1° du II de l’article :
(En milliards d'euros) |
|
Besoin de financement |
|
|
|
Amortissement de la dette à moyen et long termes ………………………………………………………….. |
103,8 |
dont amortissement de la dette à long terme |
41,8 |
dont amortissement de la dette à moyen terme |
62,0 |
dont suppléments d'indexation versés à l'échéance (titres indexés) |
- |
Amortissement des autres dettes ……………………………………………………………………………….. |
0,2 |
Déficit à financer ………………………………………………………………………………………………….. |
71,9 |
dont déficit budgétaire |
83,9 |
dont dotation budgétaire du deuxième programme d'investissements d'avenir |
-12,0 |
Autres besoins de trésorerie …………………………………………………………………………………….. |
2,4 |
|
|
Total ……………………………………………………………………………………………………………. |
178,3 |
|
|
Ressources de financement |
|
|
|
Émissions de dette à moyen et long termes nettes des rachats……………………………………………… |
173,0 |
Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement ……… |
1,5 |
Variation nette de l'encours des titres d'État à court terme ……………………………………… |
1,9 |
Variation des dépôts des correspondants ……………………………………………………. |
- |
Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État |
1,4 |
Autres ressources de trésorerie ……………………………………………………. |
0,5 |
|
|
Total ……………………………………………………………………………………………………………. |
178,3 |
La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Par coordination, le Gouvernement tire les conséquences des amendements de seconde délibération sur l’article d’équilibre du projet de loi de finances. Au terme de cette seconde délibération, le solde budgétaire ressortirait au montant négatif de 83,9 milliards d’euros, montant stable par rapport au texte adopté par l’Assemblée nationale et donc par rapport au texte déposé par le Gouvernement.
M. le président. Le vote est réservé.
Vote sur la seconde délibération et sur l’ensemble de la première partie
M. le président. Avant de passer au vote unique portant sur les articles modifiés par les amendements soumis à seconde délibération et sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui me l’ont demandée pour expliquer leur vote.
Je rappelle au Sénat que, conformément à l'article 42 de la loi organique relative aux lois de finances du 1er août 2001 et à l'article 47 bis, alinéa 2, du règlement du Sénat, « lorsque le Sénat n'adopte pas la première partie du projet de loi de finances, l’ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté ».
La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons annoncé lors de la discussion générale que le groupe RDSE voterait quasi unanimement ce collectif budgétaire, en dépit de quelques réserves et bien que ce texte soit, à l’origine, assez peu étoffé.
Dans cette première partie relative aux ressources figure principalement la réduction d’impôt de 350 euros par personne pour les ménages modestes, prévue à l’article 1er. Nous soutenons cette mesure en faveur des plus fragiles.
Nous en avons eu une nouvelle fois la preuve au cours de la discussion de ce collectif budgétaire, les assiettes de nos impôts, en particulier celle de l’impôt sur le revenu et celle de l’impôt sur les sociétés, sont « mitées » par une multitude de niches fiscales et sociales qui renforcent le sentiment d’injustice et d’iniquité.
Dans ce contexte, augmenter les taux applicables aux plus favorisés et limiter les effets de l’entrée dans le barème de l’impôt pour les plus modestes est de peu d’utilité.
Quoi qu’il en soit, dans l’attente d’une réforme globale et de la création d’un impôt personnel unique et progressif sur le revenu qui pourrait être acquitté par chaque citoyen en fonction de ses capacités contributives – une réforme dont nous espérons, monsieur le secrétaire d'État, que le Gouvernement n’en a pas abandonné l’idée –, il nous semble nécessaire de préserver certains foyers fiscaux dont les revenus n’augmentent pas des effets de l’entrée dans l’imposition ou d’une augmentation de cette dernière, qui peuvent être, pour de nombreuses familles, très difficiles à supporter. C’est pourquoi nous nous félicitons que l’article 1er de ce projet de loi de finances rectificative n’ait pas été supprimé.
Nous voterons donc très majoritairement cette première partie, même privée de l’article additionnel après l’article 1er tendant à rétablir la défiscalisation des heures supplémentaires, qui fut adopté par notre assemblée hier soir et qu’une large majorité des membres du RDSE avait soutenu.
Cela étant, nous regrettons vivement que le Gouvernement revienne sur l’amendement que nous avions fait adopter à l’article 1er ter, relatif à l’écoprêt à taux zéro. La possibilité de recourir à un « tiers vérificateur » pour s’assurer de l’éligibilité des travaux est en effet indispensable pour ne pas faire peser sur les TPE et PME du bâtiment une responsabilité qu’elles ne peuvent en aucun cas assumer.
Nous voterons très majoritairement la première partie et donc les amendements présentés par le Gouvernement dans le cadre de cette seconde délibération, car nous trouverions regrettable de nous priver de la discussion de la deuxième partie, qui comprend un certain nombre de dispositions très importantes et sur laquelle ont été déposés des amendements qui ne le sont pas moins.
Je pense, par exemple, à l’article 5 sexies, relatif à la taxe communale sur la consommation finale d’électricité, la TCCFE.
Notre groupe est à l’origine d’une proposition de loi, adoptée à l’unanimité par le Sénat le 29 avril dernier, visant à rétablir la situation antérieure aux modifications introduites par l’article 45 de la loi de finances rectificative pour 2013, lequel prévoit le transfert systématique du produit de cette taxe des communes vers l’autorité organisatrice de la distribution d’électricité. Ce transfert, s’il n’est pas remis en cause, se traduira par une diminution de ressources tout à fait substantielle pour nombre de communes de plus de 2 000 habitants. Or la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale à l’article 5 sexies conduirait à l’effet exactement inverse à celui qui est recherché et confirmerait donc ce transfert systématique. L’adoption du présent texte en l’état serait donc très grave.
C’est la raison pour laquelle, à l’instar du rapporteur général, nous proposons de corriger cette erreur rédactionnelle aux conséquences désastreuses. J’espère donc que, si nous n’avons pas la chance d’examiner les amendements déposés à cet effet, l’initiative en question sera reprise à l’Assemblée nationale.
Pouvez-vous, monsieur le ministre, puisque vous avez confirmé la volonté du Gouvernement de rendre le produit de cette taxe aux communes, nous en assurer ?
Parce que nous souhaitons que le Sénat discute réellement des textes budgétaires et qu’il contribue à leur enrichissement, mais aussi parce que ces textes sont au fondement du pacte majoritaire et républicain, nous voterons très majoritairement en faveur de la première partie et donc des amendements du Gouvernement soumis à seconde délibération, même si nous regrettons le recours répété à cette procédure bien peu respectueuse des droits du Parlement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Au moment d’émettre un vote sur la première partie, relative aux recettes, je crois utile de replacer ce collectif dans le contexte économique et social que connaît notre pays.
Nous traversons une situation extrêmement difficile, qui n’est pas nouvelle. En tout cas, elle nous oblige à répondre à un triple défi.
Le premier défi est la restauration de la compétitivité de notre appareil productif, dont chacun conviendra qu’il est passablement délabré, comme en témoigne le déficit récurrent et massif de notre balance commerciale.
Le deuxième défi consiste à inverser, enfin, la spirale des déficits et de la dette, qui pèsent incontestablement sur la croissance. Je rappellerai simplement que cela fait quarante ans que la France n’a pas voté un budget en équilibre : depuis 1974 !
Le troisième défi est le soutien du pouvoir d’achat de nos concitoyens, notamment des plus défavorisés d’entre eux, dans un contexte de ralentissement de la croissance et alors que l’environnement international n’est pas particulièrement florissant en termes d’activité économique.
La réalisation concomitante de ces trois objectifs est difficile parce qu’ils sont partiellement contradictoires. Le Gouvernement a défini une stratégie, une cohérence, qui s’incarne en partie dans ce projet de loi de finances rectificative et en partie dans le collectif social que nous examinerons la semaine prochaine.
Ce projet de loi de finances rectificative répond à deux des grands objectifs que je viens de mentionner.
Ce texte contribue d’abord à la réduction des déficits, dont je maintiens qu’il s’agit d’un impératif absolu : 1,6 milliard d’euros d’économies, sur plus de 350 milliards de dépenses du budget de l’État. Il le fait de manière mesurée, en vertu du souci de limiter l’impact récessif que la diminution de la dépense publique a sur la croissance.
Ensuite, ce projet de loi de finances rectificative soutient de manière plus significative le pouvoir d’achat de nos concitoyens les plus défavorisés.
Cette politique fiscale, vous en conviendrez, chers collègues, est aux antipodes de celle que nous avons connue au cours de 2007 à 2012, dont les symboles les plus marquants ont été l’instauration du bouclier fiscal et la baisse massive de l’impôt sur les sociétés.
Avec ce collectif, mes chers collègues, ce sont près de 4 millions de nos concitoyens qui, soit échapperont à l’impôt sur le revenu, alors que les mesures des années précédentes – y compris celles de 2009, 2010 et 2011 – les faisaient entrer dans le barème, soit verront diminuer le montant de cet impôt de manière sensible. Il y en a tout de même pour un milliard d’euros : l’effort est donc loin d’être négligeable !
De son côté, le collectif social traitera de l’autre impératif, celui qui consiste à restaurer la compétitivité de notre appareil productif. Car, sans compétitivité, sans de nouvelles marges pour les entreprises, nous n’aurons pas d’emplois supplémentaires.
Mes chers collègues, j’ai la conviction que le vote que nous allons émettre est important. Il s’agit de dire si, oui ou non, nous sommes d’accord avec la stratégie définie par le Gouvernement, que je qualifierai de courageuse et d’extrêmement cohérente, car non seulement elle vise à atteindre les trois objectifs majeurs que je viens de mentionner, mais elle témoigne en même temps d’un effort de justice que personne, me semble-t-il, ne pourra contester sur la base de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. André Gattolin.
M. André Gattolin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il n’y aura pas de suspense : la totalité des membres du groupe écologiste voteront cette première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2014, notamment parce qu’il comporte des mesures sociales et fiscales en faveur des foyers les plus défavorisés extrêmement importantes à nos yeux.
Nous la voterons aussi parce que la seconde délibération permet de revenir sur l’adoption de l’amendement rétablissant la défiscalisation des heures supplémentaires à laquelle nous étions opposés. Bien sûr, nous aurions aimé que certains des autres amendements qui avaient nos faveurs soient retenus, y compris – même s’il s’agit d’une mesure très symbolique – celui portant sur la question des passeports. En l’espèce, le débat reste ouvert…
Nous la voterons enfin parce que, bien que ne participant plus au Gouvernement et donc, d’une certaine manière, ne faisant plus partie de la majorité gouvernementale, nous restons ancrés dans la majorité présidentielle. Nous pensons que les choses doivent évoluer. Nous sommes un parti minoritaire au sein d’une majorité qui connaît des difficultés, ne nous le cachons pas. Or nous ne tenons pas à ajouter une pierre au fardeau que cette dernière porte actuellement.
En outre, par nature, nous votons toujours la première partie d’une loi de finances, afin de pouvoir discuter de la deuxième partie. Certes, si cette discussion n’a pas lieu, nous nous épargnerons certains des débats houleux que j’ai évoqués dans la discussion générale. J’en veux pour exemple certaines décisions prises dans le cadre des investissements d’avenir. On peut me donner toutes les explications possibles d’un point de vue comptable ou technique, je considère, sans pour autant juger de la qualité ou de la sincérité du budget de la défense, que les personnes ayant organisé les transferts du ministère de l’écologie vers le ministère de la défense ont commis une maladresse absolument inouïe. Je crois d’ailleurs que notre groupe aurait été beaucoup plus divisé sur ce sujet que sur la première partie du projet de loi de finances rectificative.
En tout état de cause, le débat doit continuer et, dans ce cadre, je veux rappeler au Gouvernement qu’il a des partenaires à sa disposition. Il est essentiel que nous débattions véritablement. La transition écologique et énergétique qui s’engage ne pourra se faire sans nous, à moins qu’il ne s’agisse d’une transition au rabais, auquel cas il est inutile que nous tentions de dialoguer ensemble.
De même que la compétitivité est évoquée à propos de chaque projet de loi, de même les dimensions relatives au développement durable, à l’économie, à l’écologie dans la perspective d’une transformation de notre société doivent être présentes dans chacune de nos actions.
Sur les questions du bonus-malus et du diesel, il faut avancer, indépendamment de la forme que pourraient prendre les décisions en la matière. Il faut en discuter ! On ne peut pas continuer à nous expliquer, de loi de finances en loi de finances, que des études sont nécessaires, que la question mérite débat. Non ! Les faits sont établis ! Engageons simplement le dialogue, donnons-nous des perspectives intelligentes, même si, bien sûr, le contexte politique est difficile !
Nous ne sommes pas les derniers à défendre l’idée que des efforts s’imposent en matière économique. Nous ne sommes favorables ni à la surconsommation ni au surendettement – ce n’est pas dans les gènes de la pensée écologiste –, mais il faut que nous soyons justes socialement et, surtout, visionnaires !
Soyons visionnaires pour permettre la transformation écologique de la société et laisser les révolutions technologiques actuelles se dérouler ! Tout doit être mis en cohérence et les politiques fiscales, financières, budgétaires doivent tenir compte de cet horizon.
Je le répète, nous soutenons la volonté qui s’est exprimée lors de la discussion de cette première partie du projet de loi de finances rectificative et, par conséquent, nous la voterons. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye.
M. Vincent Delahaye. Nous sommes tous préoccupés, peut-être à des degrés divers, par la situation économique et financière catastrophique de notre pays. Pour notre part, en tout cas, l’inquiétude est très grande.
L’examen de ce projet de loi de finances rectificative nous a permis d’évoquer précisément la situation financière et, à ce titre, je voudrais revenir sur deux, au moins, des trois objectifs assignés à la politique gouvernementale.
Je commencerai par le dernier, à savoir l’inversion des courbes des déficits et de la dette. Pardonnez-moi, monsieur Caffet, mais, pour l’instant, je ne vois rien venir !
M. Jean-Pierre Caffet. Vous avez augmenté la dette de 600 milliards d’euros ! Cessez de nous faire la leçon !
M. Vincent Delahaye. Ce projet de loi de finances rectificative aggrave le déficit de 1,4 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale. Le Gouvernement annonce désormais un déficit s’élevant à 83,9 milliards d’euros contre 74,9 milliards d’euros l’année dernière, comme nous le verrons la semaine prochaine lors de l’examen du projet de loi de règlement. Il s’agit non pas d’une diminution, mais d’une augmentation du déficit, sans parler de la dette qui, comme vous le savez tous, mes chers collègues, a dépassé les 2 000 milliards d’euros, alors qu’elle n’atteignait que 1 750 milliards d’euros en mai 2012.
Pour l’instant, ces courbes ne se sont donc pas inversées. Elles sont loin d’être stabilisées et continuent malheureusement à progresser. Cette situation nous inquiète tout particulièrement !
Que nous propose-t-on dans ce projet de loi de finances rectificative pour 2014 ? Je me cantonne ici, bien sûr, au seul texte sur lequel nous nous prononçons ce soir. Sans doute trouverons-nous plus de mesures dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, mais, pour l’instant, ces deux textes ne sont pas fusionnés.
Pour ma part, je pensais trouver dans le présent projet de loi plus de mesures en faveur de la compétitivité de nos entreprises, puisque c’est là une priorité également marquée. En fait, le texte formalise un cadeau électoral du Premier ministre et comprend des articles ajoutés par l’Assemblée nationale, notamment cette mesure faisant progresser la taxe de séjour dans des proportions démentielles. On s’est peut-être dit que le secteur du tourisme ne fonctionnait pas si mal en France et que l’on pouvait lui asséner un petit coup !
Vraiment, mes chers collègues, je me pose des questions sur la stratégie globale du Gouvernement. Il faut aller beaucoup plus loin en matière d’aide aux entreprises et à la création d’emplois, car ce sont bien les entreprises qui sont en capacité de créer des emplois. Malheureusement, ce projet de loi de finances rectificative ne s’engage pas vraiment dans cette direction. Je dirai même qu’il suit une direction opposée, dès lors qu’il prolonge d’un an la contribution exceptionnelle sur l’impôt sur les sociétés. Instaurée en 2011, celle-ci sera supprimée à la fin de 2016 : voilà de l’exceptionnel qui dure ! Malheureusement, notre amendement visant à réduire l’impôt sur les sociétés dès cette année n’a pas été adopté et nous le déplorons.
Nous voterons contre cette première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2014, même si nous aurions aimé, comme chaque fois, discuter de sa deuxième partie…
M. Jean-Pierre Caffet. Comme d’habitude !
M. Vincent Delahaye. Nous estimons que les efforts de réduction des dépenses sont nettement insuffisants et qu’ils ne sont pas répartis de manière juste ni équitable entre les différents niveaux, comme je l’ai déjà souligné.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les leçons, ça suffit !
M. Vincent Delahaye. Il faut aller bien au-delà. Pour cela, nous avons besoin de réformes de structure, et non d’une petite boîte à outils pour bricoleur du dimanche. Malheureusement, nous ne voyons pas venir les réformes de fond nécessaires, et la carte des régions proposée la semaine dernière ne mérite certainement pas ce qualificatif. Tout le monde est capable de redessiner une carte des régions ; aller au-delà est nettement plus difficile !
Il est grand temps que la France trouve ou retrouve une méthode de réforme un peu plus consensuelle. D’une certaine manière, nous pourrions presque nous accorder sur le diagnostic, mais nous devrions nous attacher à adopter un fonctionnement digne d’une démocratie adulte, comme les pays nordiques savent le faire, de façon à aller vraiment au fond des problèmes. Voilà ce dont nous avons besoin aujourd’hui. Malheureusement, nous n’avons pas du tout l’impression que ce projet de loi de finances rectificative nous engage dans cette direction. Dès lors, il est clair que nous ne voterons pas cette première partie !
M. le président. La parole est à M. Philippe Adnot.
M. Philippe Adnot. Par principe, je vote toujours la première partie des projets de loi de finances, afin de pouvoir discuter les amendements que nous avons préparés sur les articles de la deuxième partie.
Cependant, depuis des semaines, on nous propose en permanence des dépenses nouvelles, ce qui va à l’encontre des objectifs fixés, à savoir la maîtrise de la dépense publique. Nous entendons dire au Gouvernement qu’il ne peut pas mettre en œuvre des politiques contradictoires avec, d’un côté, un prélèvement de 11 milliards d’euros sur les dotations des collectivités territoriales et, de l’autre, des décisions contribuant quotidiennement à accroître la dépense, les charges, les normes et les contraintes.
C’est pourquoi, pour ma part, je ne voterai pas cette première partie.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais avant tout remercier nos collaborateurs du secrétariat de la commission des finances, qui ont l’habitude, comme c’était déjà le cas sous d’autres gouvernements, de traiter ces questions au quotidien, au fur et à mesure de l’examen des textes. Ils sont l’infrastructure indispensable à nos travaux.
De la même manière, je tiens à remercier le service de la séance, les services des comptes rendus, les présidents qui se sont succédé au plateau et, enfin, M. le rapporteur général, qui s’est montré, comme d’ordinaire, tout à fait pédagogue dans ses présentations et a restitué avec exactitude et avec soin les positions de la commission des finances, y compris lorsqu’il ne les approuvait pas sur le fond. Il l’a fait avec beaucoup de courtoisie et d’élégance.
Je voudrais également remercier les membres des groupes qui ont fait vivre cette discussion, chacun avec son tempérament comme il se doit.
Veuillez accepter enfin mes remerciements, monsieur le secrétaire d’État au budget. J’y associe M. le ministre des finances et des comptes publics, Michel Sapin, qui a pu effectuer un passage dans cet hémicycle. Celui-ci fut relativement bref, mais nous savons ce que sont les charges du ministre et nous le comprenons fort bien.
Vous qui nous avez accompagnés pendant la discussion de ces articles, vous auriez souhaité que notre travail commun se poursuive au-delà de cette première partie du projet de loi de finances rectificative. Il semble probable que le Sénat soit sur le point de prendre une décision semblable à celles qu’il a déjà prises sur l’ensemble des textes de loi du champ économique, social et financier depuis quelque temps déjà.
M. Daniel Raoul. C’est faux !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il ne faut pas en être surpris, monsieur le secrétaire d’État. Certes, des analyses différentes peuvent conduire à des votes identiques, mais ces votes reflètent la situation politique du Sénat et le fait que les différents groupes qui les expriment ne peuvent en aucun cas être solidaires de la politique mise en œuvre par ce gouvernement.
Je ne développerai pas ce point. Je me bornerai simplement à dire que l’écart entre les paroles et les actes est beaucoup trop grand à notre gré.
Certes, vous êtes des experts en communication, notamment le nouveau Premier ministre,…
M. Jean-Marc Todeschini. Vous avez la mémoire courte !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. … mais cela ne suffit pas ! Pour façonner la réalité, il faudrait aller bien au-delà, parvenir à résoudre des contradictions redoutables et tourner le dos aux demi-mesures auxquelles vous vous limitez forcément, compte tenu de toutes sortes de facteurs objectifs.
Enfin, vous avez découvert au cours des dernières semaines et des derniers mois qu’il était absolument urgent et nécessaire de s’intéresser à quatre millions de nos concitoyens et de faire un effort de justice auquel, manifestement, vous n’aviez pas pensé lors de l’élaboration de la loi de finances initiale. Aujourd’hui, cela éclate aux yeux, mais, voilà quelques mois, ce n’était pas un souci majeur du Gouvernement.
Cela s’appelle de l’opportunisme ! Nous sommes loin d’une politique acharnée de réduction des déficits publics et de lutte pour la compétitivité de notre pays !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État. Je serai très bref, mesdames, messieurs les sénateurs.
Concernant la taxe sur la consommation finale d’électricité, je ne doute pas que la rédaction de l’article 5 sexies pourra être améliorée pour mieux respecter le souhait consensuel, comme l’a démontré l’initiative du groupe RDSE au sein de cette assemblée, de rendre les communes de plus de 2 000 habitants affectataires de plein droit de cette taxe. Je souhaitais donc apporter des assurances sur ce point, et ce sans volonté aucune de négocier ou d’arracher un vote.
Pour le reste, je m’en tiendrai simplement aux traditionnels remerciements, puisque je crois comprendre, sans préjuger du vote, que nous nous approchons de la fin de l’examen de ce texte.
Je remercie donc l’ensemble des intervenants de leur courtoisie et de leur patience. Les débats ont parfois été passionnés, mais, pardonnez-moi de le dire, ils le sont souvent plus à l’Assemblée nationale, où ils sont également plus bruyants. Je me suis efforcé d’être précis et, avec l’examen du projet de loi de règlement, celui du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale et le débat d’orientation des finances publiques, nous aurons l’occasion de reprendre la discussion et de donner suite aux propos provocateurs que vient de tenir M. le président Philippe Marini.
Tout en remerciant la présidence et l’ensemble des services du Sénat, je vous laisse maintenant voter en toute sérénité, ce qui est, me semble-t-il, une des caractéristiques de cette assemblée.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, par un vote unique, les articles modifiés par les amendements soumis à seconde délibération, ainsi que l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2014.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 217 :
Nombre de votants | 345 |
Nombre de suffrages exprimés | 341 |
Pour l’adoption | 154 |
Contre | 187 |
Le Sénat n’a pas adopté les articles modifiés par les amendements soumis à seconde délibération, ainsi que l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances rectificative pour 2014.
En conséquence, l’ensemble du projet de loi est considéré comme rejeté.
7
Décret complétant l’ordre du jour de la session extraordinaire
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République en date de ce jour complétant le décret du 17 juin 2014 portant convocation du Parlement en session extraordinaire à compter du 1er juillet 2014.
Ce décret ajoute à l’ordre du jour de la présente session extraordinaire le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des États-Unis d’Amérique en vue d’améliorer le respect des obligations fiscales à l’échelle internationale et de mettre en œuvre la loi relative au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers, dite « loi FATCA ».
Acte est donné de cette communication.
8
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mercredi 9 juillet 2014, à quatorze heures trente et le soir :
1. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant réforme ferroviaire (n° 650, 2013-2014) ;
Rapport de M. Michel Teston, fait au nom de la commission du développement durable (n° 681, 2013-2014) ;
Texte de la commission (n° 682, 2013-2014) ;
Avis de M. François Patriat, fait au nom de la commission des finances (n° 652, 2013-2014).
2. Proposition de loi organique, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la nomination des dirigeants de la SNCF (n° 651, 2013-2014) ;
Rapport de M. Michel Teston, fait au nom de la commission du développement durable (n° 681, 2013-2014) ;
Texte de la commission (n° 683, 2013-2014).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinquante.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART