Sommaire
Présidence de M. Jean-Pierre Raffarin
Secrétaires :
MM. Jean Desessard, François Fortassin.
2. Candidatures à deux commissions mixtes paritaires
3. Organisme extraparlementaire
5. Formation aux gestes de premiers secours et permis de conduire. – Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission
Discussion générale (suite) : MM. Jean Boyer, Michel Le Scouarnec, Roger Madec, Gilbert Barbier, Mme Esther Benbassa, MM. Jean-René Lecerf, Maurice Antiste.
M. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale.
Clôture de la discussion générale.
Article additionnel avant l’article unique
Amendement n° 1 de M. Jean Boyer. – Retrait.
M. Jean-Pierre Leleux, auteur de la proposition de loi.
Amendement n° 2 rectifié bis de M. Jean-Pierre Leleux. – M. Jean-Pierre Leleux.
Amendement n° 3 rectifié de M. Jean-Pierre Leleux. – M. Jean-Pierre Leleux.
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois ; M. André Vallini, secrétaire d'État. – Rejet des amendements nos 2 rectifié bis et 3 rectifié.
Amendement n° 4 rectifié de M. Jean-Pierre Leleux. – M. Jean-Pierre Leleux, Mme la rapporteur, MM. André Vallini, secrétaire d'État ; Jean-Claude Lenoir, René-Paul Savary, Gilbert Barbier.
M. Jean-Pierre Leleux. – Retrait de l’amendement n° 4 rectifié.
M. André Vallini, secrétaire d'État.
MM. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois ; André Vallini, secrétaire d'État.
Adoption de l’article unique de la proposition de loi dans le texte de la commission.
6. Nomination de membres d’une commission mixte paritaire.
7. Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire.
9. Don de jours de repos à un parent d'enfant gravement malade. – Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission
Discussion générale : M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social ; Mme Catherine Deroche, rapporteur de la commission des affaires sociales.
MM. Dominique Watrin, Jacky Le Menn, Gérard Roche, Mme Aline Archimbaud, MM. Gilbert Barbier, René-Paul Savary, Philippe Bas.
M. François Rebsamen, ministre.
Clôture de la discussion générale.
Article additionnel avant l'article 1er
Amendement n° 3 de M. Dominique Watrin. – M. Dominique Watrin, Mme la rapporteur, MM. François Rebsamen, ministre ; Maurice Vincent. – Rejet.
Amendement n° 2 de M. Jacky Le Menn. – M. Jacky Le Menn, Mme la rapporteur, M. François Rebsamen, ministre. – Rejet.
Amendement n° 1 rectifié de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud. – Retrait.
Adoption de l'article.
Adoption définitive de la proposition de loi dans le texte de la commission.
10. Modifications de l'ordre du jour
11. Ordre du jour
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Pierre Raffarin
vice-président
Secrétaires :
M. Jean Desessard,
M. François Fortassin.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Candidatures à deux commissions mixtes paritaires
M. le président. J’informe le Sénat que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale m’a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats qu’elle présente à la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.
Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
J’informe le Sénat que la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a fait connaître qu’elle a procédé à la désignation des candidats à une éventuelle commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, actuellement en cours d’examen.
Cette liste a été affichée conformément à l’article 12, alinéa 4, du règlement et sera ratifiée si aucune opposition n’est faite dans le délai d’une heure.
3
Organisme extraparlementaire
M. le président. J’informe le Sénat que M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation d’un sénateur appelé à siéger au sein du Comité national de l’eau.
Conformément à l’article 9 du règlement, la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire est invitée à présenter une candidature.
La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par le règlement.
4
Dépôt d'un avis
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de Mme la présidente de la commission permanente du congrès de la Nouvelle-Calédonie l’avis formulé par la commission permanente du congrès de la Nouvelle-Calédonie au cours de sa séance publique du mercredi 30 avril 2014 sur le projet d’ordonnance portant extension et adaptation à la Nouvelle-Calédonie de l’application des dispositions du livre IV du code de commerce relevant de la compétence de l’État en matière de pouvoirs d’enquête, de voies de recours, de sanctions et d’infractions.
Ces documents ont été transmis à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale.
5
Formation aux gestes de premiers secours et permis de conduire
Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe UMP, la suite de la discussion de la proposition de loi visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire, présentée par M. Jean-Pierre Leleux et plusieurs de ses collègues (proposition n° 355 [2011-2012], texte de la commission n° 123, rapport n° 122).
Je rappelle que nous avions commencé l’examen de cette proposition de loi lors de notre séance du 19 novembre dernier, au cours de laquelle l’auteur de la proposition de loi, la rapporteur et la ministre étaient intervenus.
Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean Boyer.
M. Jean Boyer. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, retracer l’histoire du permis de conduire, c’est remonter jusqu’à l’année 1922, date à laquelle il est apparu dans le code de la route, en remplacement du certificat de capacité dont la détention était jusqu’alors obligatoire pour pouvoir conduire des véhicules terrestres à moteur.
L’histoire du permis de conduire en France remonte au XIXe siècle, plus exactement à la loi du 30 mai 1851. Ce texte fondateur pour la sécurité routière a servi de fondement juridique à plusieurs codes de la route. À cette époque, la traction était surtout assurée par le cheval. Il faudra attendre le décret du 27 mai 1921 pour que les prescriptions s’appliquent à tous les usagers, quelle que soit la route.
Le 16 août 1889, Léon Serpollet passa le premier examen de conduite, sur un tricycle de sa conception. L’intéressé obtint d’ailleurs en 1891 la première autorisation de circuler à 16 kilomètres à l’heure. La duchesse d’Uzès fut la première femme française à obtenir un certificat de capacité, en mai 1898, mais aussi à recevoir une contravention, avec son fils, le 3 juillet 1898, pour excès de vitesse : elle avait roulé à 40 kilomètres à l’heure dans le bois de Boulogne, au lieu des 20 kilomètres à l’heure autorisés.
La première réglementation en la matière, instaurant le certificat de capacité, est l’ordonnance du 14 août 1893, prise par le préfet de police de la Seine Louis Lépine et généralisée à l’ensemble du territoire le 10 mars 1899. À l’époque, c’était un ingénieur des mines qui faisait passer l’examen. Les critères de réussite étaient les suivants : savoir démarrer, se diriger, s’arrêter et avoir quelques notions de dépannage. La vitesse était limitée à 20 kilomètres à l’heure en rase campagne et à 12 kilomètres à l’heure en agglomération.
Ce propos synthétique sur l’histoire du permis de conduire m’amène au 31 décembre 1922, date du décret instaurant le premier permis de conduire. L’arrêté du 16 mars 1923 introduit les catégories de permis A et B.
Entre les deux guerres, le nombre de véhicules augmente, qu’il s’agisse des motocyclettes ou des véhicules de tourisme, dont le nombre passe de 157 272 en 1920 à 1 800 000 en 1940. Cette expansion conduit progressivement à une réflexion sur les modes de répression destinés à faire respecter le code de la route. Un décret du 12 avril 1927 prévoit une mesure innovante et importante : la suspension du permis de conduire.
À partir des années trente, l’enseignement de la conduite commence à se professionnaliser. En 1937 naissent les voiturettes pouvant être conduites sans permis, sous certaines conditions.
Entre 1944 et 1989, le permis se modernise. En 1954, les exigences s’affirment pour les permis C et D. Le décret du 5 février 1969 limite la vitesse à 50 kilomètres à l’heure pour les conducteurs titulaires d’un permis depuis moins d’un an, identifiés par un macaron apposé sur le pare-brise. Entre 1970 et 1980, un certain nombre d’ajustements ont lieu. En 1989 se met en place le permis moderne, avec l’introduction de la conduite accompagnée et de compléments pour les permis spéciaux. Dans les années 2000, des mesures visant à renforcer la sécurité sont mises en œuvre.
Lorsque nous circulons, nous sommes confrontés aux imprudences, à l’inconscience de certains conducteurs. Serait-il envisageable que les pouvoirs publics affectent un agent de contrôle à chaque usager ? C’est impossible ! La sécurité n’est-elle pas un état d’esprit, résultant d’une prise de conscience individuelle et collective qui doit émerger dès le plus jeune âge ? Nous avons un permis de conduire, pas un permis de nuire ! La vie n’a pas de prix.
La science s’investit généreusement dans la lutte contre les maladies, mais chacun d’entre nous doit être conscient de ses responsabilités pour ce qui concerne non seulement sa vie personnelle, mais aussi celle des autres. Une contradiction heurte toutefois le bon sens : alors que l’on ne doit pas rouler à plus de 50 kilomètres à l’heure en agglomération, à plus de 90, de 110 ou de 130 kilomètres à l’heure en dehors selon les routes, les performances des voitures permettent de dépasser largement ces limites !
Comme dans d’autres domaines, il existe des incohérences fondamentales entre le vouloir et le pouvoir. En l’espèce, les contradictions peuvent être terribles. Dans le même ordre d’idées, on sait que le tabac tue, mais on le laisse en circulation ; on sait que la vitesse excessive est mortelle, mais on accepte qu’elle soit possible !
Si la lutte contre le cancer est à la fois individuelle et collective, la sécurité routière doit reposer essentiellement sur la responsabilité individuelle.
J’avais déposé un amendement sur le texte, mais j’annonce par avance son retrait, les informations obtenues lors de la séance du 19 novembre dernier m’ayant donné satisfaction.
L’importance de la responsabilité individuelle rend nécessaire une information régulière, commençant dès l’école et actualisée au moins tous les cinq ans à partir d’un certain âge. Une telle mise à jour permettrait de parfaire les connaissances en matière de réglementation, de techniques et de structures. Ainsi, nous pourrions réduire davantage encore le nombre des accidents mortels constatés sur notre réseau routier, tant national que local.
Certes, notre lutte contre certaines maladies terribles n’a pas obtenu tous les résultats espérés. En revanche, grâce à une volonté à la fois individuelle et collective, nous pourrions combattre le fléau persistant de la mort sur notre réseau routier. Sauvegarder notre corps, c’est éviter sa mort. Travaillons-y ensemble ! Notre combat doit être individuel, mais aussi civique, humain et collectif. C’est un combat permanent, toujours inachevé, et nous devons sensibiliser avant de sanctionner.
Oui, monsieur le secrétaire d’État, c’est un bel objectif à atteindre, un objectif citoyen auquel nous devons plus que jamais nous attacher.
La mort sur la route n’a pas d’âge, pas de profession, pas de couleur, pas de sexe, pas d’heure, elle ne connaît pas de frontières administratives : elle est simplement et terriblement la mort.
Par notre prudence solidaire, nous pouvons différer notre départ dans l’au-delà, mais aussi celui des autres. C’est un beau combat, que nous devons mener collectivement. (Applaudissements sur diverses travées.)
M. André Vallini, secrétaire d'État chargé de la réforme territoriale. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, je ne referai pas l’historique du permis de conduire, Jean Boyer venant de le retracer magistralement.
La présente proposition de loi visait à l’origine à instaurer une épreuve supplémentaire au permis de conduire, destinée à vérifier que le candidat maîtrise bien les notions élémentaires de premiers secours. En l’occurrence, il s’agissait de l’alerte des secours, du balisage des lieux de l’accident, de la ventilation, de la compression et de la sauvegarde de la vie des blessés.
Comment être contre ? L’acquisition de notions de secourisme est importante, voire indispensable. Elle a une incidence directe sur la survie des personnes blessées. Nous en conviendrons tous facilement, mes chers collègues.
Certes, cette question se pose particulièrement sur les routes, où les risques d’accident sont malheureusement encore trop élevés. Notre pays connaît toutefois une nette progression dans ce domaine, puisqu’une récente enquête européenne le classe au troisième rang des plus fortes réductions du nombre d’accidents mortels, la baisse de celui-ci étant de plus de 8 % par an en moyenne. Pour autant, les efforts doivent être poursuivis.
Mais cette question ne concerne pas uniquement la préparation du permis de conduire.
Ainsi, l’acquisition de la capacité à faire face à une situation de danger et à mettre en œuvre tous les éléments de protection et de sauvegarde de la vie de personnes fragilisées ou blessées apparaît comme un nouveau facteur primordial d’amélioration de notre prévention routière, et au-delà de la vie collective. Il n’est d’ailleurs pas très positif qu’en France ces formations aux gestes de premiers secours relèvent d’une démarche individuelle et soient payantes. Cela explique en partie que moins de la moitié des Français aient bénéficié d’une telle formation. Il faut passer à la vitesse supérieure ; il y va de l’intérêt général, et nous partageons tous ici cette conviction.
Il s’agit d’un enjeu de santé publique. Ainsi, il nous semblerait normal et très utile que les pouvoirs publics participent à une démarche de généralisation de l’apprentissage des gestes de premiers secours, par une large campagne de formation. Celle-ci pourrait être mise en œuvre en s’appuyant sur un partenariat avec les collectivités locales. Ces dernières ont récemment installé de très nombreux défibrillateurs dans les lieux recevant du public. Là encore, une meilleure information de nos concitoyens sur l’utilisation de ces moyens modernes d’assistance devrait être mise en place.
Nous pourrions également impliquer les services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS. En effet, ce sont des acteurs locaux de proximité reconnus en la matière et dont l’efficacité est très appréciée par la population.
De même, il existe d’autres partenaires potentiels, comme les associations de secourisme ou humanitaires, telle la Croix-Rouge, qui, elles aussi, sont compétentes et volontaires.
Nous pensons qu’une formation initiale de base doit être apportée le plus tôt possible. Pour sensibiliser les élèves à la prévention et à l’apprentissage des gestes de premiers secours, la scolarité au collège et au lycée représente une période privilégiée.
À ce propos, des actions de formation aux premiers secours en collège et en lycée sont déjà menées dans le cadre du comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté, le CESC. Ce dispositif est notamment destiné à organiser l’éducation à la citoyenneté et à la prévention des comportements à risques.
En outre, les élèves relevant des voies technologique ou professionnelle suivent une formation de sauveteur secouriste du travail, dans le cadre de l’enseignement sur la santé et la sécurité au travail dans certaines spécialités qui leur est dispensé.
Des initiatives existent donc au-delà de la seule préparation au permis de conduire. Il est nécessaire de les développer et de les renforcer, car les élèves d’aujourd’hui sont les conducteurs de demain.
Si tous les enfants vont à l’école, tous ne passent pas le permis de conduire, pour différents motifs, de coût, d’accessibilité ou de simple nécessité. Là encore, l’école doit être un lieu de correction des inégalités, où le maximum de chances de réussite doit être donné à chacun.
Cela étant dit, nous approuvons les modifications apportées par la commission à cette proposition de loi.
Nous ne souhaitons pas rajouter une épreuve à un examen comme celui du permis de conduire – devenu en France beaucoup trop difficile d’accès –, avec toutes les difficultés supplémentaires de mise en œuvre que cela suppose, comme la formation des moniteurs ou le recrutement de nouveaux examinateurs compétents dans le domaine du secourisme. Alors que les examinateurs pour la formation pratique sont déjà trop peu nombreux, cela aurait pour conséquence d’allonger les délais de passage du permis, qui sont déjà extrêmement longs : plus de trois mois en moyenne en 2013.
Nous préférons donc que la loi prévoie, conformément à la rédaction actuelle du texte, un enseignement obligatoire des notions élémentaires de premiers secours, pour l’heure méconnues, sans instaurer un contrôle de connaissances conditionnant l’obtention du permis de conduire.
Nous voterons en faveur de l’adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements sur diverses travées.)
M. le président. La parole est à M. Roger Madec.
M. Roger Madec. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi est à la fois simple et positive dans sa forme et incontestable dans sa finalité. Qui ne serait d’accord pour instituer une formation à cinq gestes de base propres à sauver ou du moins à prévenir une perte de chance de survie en cas d’accident de la circulation ? Personne.
En effet, réduire le nombre de victimes de la route en développant l’acquisition de connaissances en matière de gestes de premiers secours est une intention tout à fait louable et un objectif partagé par tous.
Si notre pays a engagé, depuis maintenant de nombreuses années, une politique audacieuse en matière de sécurité routière s’appuyant sur un arsenal répressif qui donne des résultats, il est absolument nécessaire aujourd'hui de nous doter de dispositifs de prévention.
En effet, aujourd’hui encore, nous déplorons trop de victimes de la route. Selon la prévention routière, 3 250 personnes ont perdu la vie en 2013 sur les routes françaises, contre 3 653 en 2012. Ainsi, 403 vies ont été épargnées en 2013. Il s’agit de la plus forte baisse de la mortalité constatée depuis 2006.
Cependant, nous devons aller plus loin pour atteindre l’objectif, fixé par le Gouvernement, de ramener cette mortalité sous la barre des 3 000 victimes : nos collègues ont souhaité accompagner cette volonté en renforçant l’arsenal législatif existant.
L’apprentissage des gestes de premiers secours par les conducteurs est une mesure préconisée aussi bien par les associations de secourisme ou d’usagers que par les services de secours. En effet, les automobilistes témoins d’accidents de la circulation ont un rôle essentiel à jouer, agir dans les toutes premières minutes étant primordial.
Pourtant, selon la Croix-Rouge, seulement 46 % de nos compatriotes auraient suivi une formation aux premiers secours.
À ce jour, la réglementation n’impose aucune connaissance des gestes de premiers secours lors de l’examen du permis de conduire. C’est cette carence que la présente proposition de loi tend à combler, en instaurant une troisième épreuve au permis de conduire, visant à sanctionner une formation aux notions élémentaires de premiers secours.
Si tout le monde partage le constat que, à la suite d’un accident de la route, la survie des blessés est liée à leur prise en charge précoce par les services de secours, on observe trop souvent que plus de 50 % des victimes de la route succombent dans les premières minutes suivant l’accident.
La rapidité de la prise en charge des victimes dépend donc, en premier lieu, de la réaction des témoins de l’accident. Une étude de l’Organisation mondiale de la santé démontre que, si les témoins sont incapables d’analyser le degré de gravité de la situation, n’appellent pas à l’aide et ne pratiquent pas les soins de base avant que les services de secours arrivent sur place, les accidents ont des conséquences plus importantes en termes de vies humaines.
Chacun d’entre nous a pu constater, lors d’accidents de la route, que l’état de panique des témoins peut engendrer un oubli des gestes essentiels consistant à alerter les services de secours ou à protéger le lieu de l’accident.
Par comparaison avec ses voisins européens, notre pays accuse un retard important en matière d’apprentissage des gestes de premiers secours. Ce constat est alarmant, d’autant que des dispositifs de formation existent.
Ainsi, au travers de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique et de celle du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, le législateur a introduit une obligation de formation aux gestes de premiers secours au bénéfice des élèves des premier et second degrés. Cependant, cette obligation est mal respectée, essentiellement par manque de moyens, puisque seulement 20 % des élèves de troisième sont formés chaque année. En outre, la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière a, pour la première fois, pris en compte la préoccupation de mettre en place une sensibilisation obligatoire des candidats aux permis de conduire à la formation aux premiers secours. Toutefois, en l’absence de décrets d’application, ces dispositions sont demeurées lettre morte.
D’autres initiatives parlementaires ont été prises, comme celle du président Jean-Pierre Sueur, qui avait pour objet d’intégrer une formation obligatoire aux premiers secours dans l’examen des permis de conduire des véhicules destinés au transport de personnes. À l’Assemblée nationale, une proposition de loi similaire à celle qui est soumise cet après-midi au Sénat avait été rejetée, en octobre 2012, au motif que ses dispositions relevaient du domaine réglementaire, et non du domaine législatif.
Je souhaite attirer l’attention de notre assemblée sur le principal écueil que présente cette proposition de loi : l’instauration d’une troisième épreuve à l’examen du permis de conduire.
Nous sommes tous convaincus que, en l’état actuel des choses, détenir le permis de conduire est une nécessité pour le quotidien d’un grand nombre de nos concitoyens. Or la mise en place de ce dispositif engendrerait nécessairement un surcoût, que certains jugent modeste, mais qui pèserait sur les candidats au permis de conduire.
Si la formation aux gestes de premiers secours repose sur les moniteurs des auto-écoles, il est certain que ceux-ci répercuteront son coût sur celui de la formation dispensée, déjà fort onéreuse. De même, dans l’hypothèse où les candidats se formeraient auprès d’associations agréées, ils devraient assumer le coût financier de cette prestation. Or le coût de la formation à la conduite reste, en France, bien trop élevé, notamment dans certaines régions, où il atteint des sommets inacceptables. Nous devons rester vigilants sur le pouvoir d’achat de nos compatriotes. Je considère donc qu’alourdir la charge financière de la préparation à l’examen du permis de conduire serait un mauvais signal.
En outre, si la formation aux gestes de premiers secours doit s’effectuer par le biais des associations de secourisme, comme l’envisagent les auteurs de la proposition de loi, il n’est pas certain que ces associations puissent répondre à l’accroissement de la demande qui en résulterait. Cette situation entraînerait forcément un allongement très important des délais d’obtention du permis de conduire.
Devant ce constat, la commission des lois de notre assemblée a adopté un amendement tendant à récrire l’article unique de cette proposition de loi, en conservant l’esprit du dispositif tout en le simplifiant. À cet égard, je veux saluer l’excellent travail de notre collègue Catherine Troendle, rapporteur du texte au nom de la commission des lois.
Le texte soumis à l’examen du Sénat prévoit de créer non plus une troisième épreuve à l’examen du permis de conduire, mais une obligation de vérification, par les examinateurs, que les candidats maîtrisent les actions élémentaires consistant à alerter les secours, à baliser et à sécuriser la zone de l’accident, à accomplir les gestes de secours les plus simples.
La solution proposée par notre rapporteur présente l’avantage de ne pas engendrer de surcoût, pour les candidats comme pour les enseignants. En effet, la formation à ces notions sera intégrée aux cours théoriques et sera sanctionnée, lors de l’examen, par un certain nombre de questions spécifiques. Ainsi, il s’agira de modifier la banque des questions, pour inclure dans son champ ces notions de premiers secours. Cette modification pourrait intervenir par voie réglementaire.
Le Gouvernement a d’ailleurs souhaité engager une réflexion sur le permis de conduire. En septembre dernier, le ministre de l’intérieur, Manuel Valls, aujourd'hui Premier ministre, avait installé une commission pour la réforme du permis de conduire en lui donnant pour mission de réduire les délais entre le passage de l’épreuve du code et le début des heures de conduite, de réfléchir sur la fiscalité et sur la mise en place de mesures de long terme propres à réduire le nombre d’accidents impliquant de jeunes conducteurs. Cette commission devrait remettre son rapport au ministre de l’intérieur dans quelques semaines.
L’adoption par le Parlement de la présente proposition de loi pourrait permettre au Gouvernement d’intégrer ces dispositions nouvelles à son projet de réforme du permis de conduire.
Concernant l’objection selon laquelle le dispositif de cette proposition de loi relève du domaine réglementaire, je souscris à l’analyse développée par notre rapporteur et approuvée par la commission des lois. Je ne reviendrai pas sur la carence de l’administration à changer les règles ; en revanche, face au drame des morts de la route, je considère qu’il y a urgence à agir. Le Parlement est dans son droit en intervenant, c’est pourquoi l’examen en séance publique de la présente proposition de loi est une nécessité. Le groupe socialiste votera naturellement en faveur de l’adoption de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le rapporteur, mes chers collègues, notre pays a longtemps détenu, en Occident, le triste record de la mortalité sur les routes. Des infrastructures routières inadaptées, un parc automobile dangereux, mais aussi un apprentissage défectueux des comportements responsables ont longtemps contribué à faire des routes françaises des zones de quasi-non-droit, réalité que l’on a trop longtemps voulu dissimuler sous un prétendu « tropisme latin ».
Le triste record de 16 545 tués en 1972 – soit 45 morts par jour ! – fit enfin prendre conscience aux pouvoirs publics et à nos concitoyens de la nécessité d’agir pour sauver des vies. Cela doit être souligné, les majorités successives ont toutes mis en œuvre des politiques volontaristes qui ont permis de ramener les chiffres de la mortalité routière à des niveaux moins inacceptables : il faut ici encore rappeler l’action décisive du président Chirac, qui fit de la sécurité routière l’une des priorités de son second mandat.
Si l’adoption d’une conduite responsable et civilisée est l’affaire de tous, la politique de la sécurité routière ne doit pas se fonder sur un seul aspect répressif, comme nos concitoyens en ont parfois la sensation. C’est la raison pour laquelle l’intention des auteurs de la proposition de loi, qui souhaitent rendre obligatoire la formation aux premiers secours lors de la préparation à l’examen du permis de conduire, nous apparaît non seulement louable, mais encore pertinente.
Chacun s’accorde sur l’importance vitale d’une prise en charge rapide et appropriée des victimes d’un accident de la route, sachant par exemple que des lésions irréversibles surviennent après trois minutes d’arrêt cardiaque. Le délai moyen d’intervention des services de secours étant de dix minutes, le rôle des témoins d’un accident apparaît d’autant plus capital pour accomplir, dès les premiers instants, les gestes de première nécessité, à défaut d’une prise en charge médicale d’urgence.
Pourtant, comme le relevait notre rapporteur, la formation aux gestes de premiers secours demeure insuffisante dans notre pays, puisqu’elle ne revêt aucun caractère systématique et relève de l’initiative individuelle. Nous regrettons qu’un peu moins de la moitié de la population française seulement ait bénéficié d’une telle formation, même si une sensibilisation à ces gestes est mise en œuvre tant bien que mal dans les collèges, avec des moyens insuffisants.
En tout état de cause, la proposition de loi de nos collègues part d’une bonne intention et s’inscrit dans la continuité de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, qui créa une obligation de sensibilisation des candidats aux permis de conduire à la formation aux premiers secours.
Toutefois, comme cela a déjà été souligné, cette disposition est restée lettre morte, faute d’édiction des décrets d’application. On peut bien sûr s’interroger sur le fait de savoir s’il revient au législateur de pallier l’inertie du pouvoir réglementaire, dans une matière ne relevant pas du domaine de la loi, mais on peut aussi penser, comme les auteurs du texte, que je salue, que cela ne saurait justifier que l’on reste inactif.
Pour autant, le choix de faire de la formation pratique aux gestes de premiers secours le sujet d’une épreuve à part entière de l’examen du permis de conduire ne va pas sans soulever un certain nombre de difficultés. Sachez gré au médecin que je suis d’être particulièrement vigilant sur le contenu de la formation à ces premiers gestes, et d’abord de celle qui est dispensée aux moniteurs d’auto-école. Les « cinq gestes qui sauvent » visés par le texte – alerter, baliser, ventiler, comprimer et sauvegarder – ne font plus consensus aujourd’hui dans la communauté médicale. On ne peut pas non plus obliger les candidats au permis de conduire à passer un brevet de secourisme, sauf à induire un surcoût considérable.
C’est d’ailleurs sur l’aspect financier que le texte initial soulevait également des difficultés, dans la mesure où le coût de la formation à ces gestes, qu’elle soit assurée par les moniteurs d’auto-école ou par les associations de secourisme, ne peut être que répercuté sur les candidats. Nous savons pourtant que le coût global du permis de conduire est déjà élevé, alors que l’examen est le plus souvent passé par des personnes qui ne sont pas encore sur le marché du travail. En outre, avoir le permis est bien souvent la clef pour décrocher un emploi, en particulier dans les territoires ruraux ou mal desservis par les transports. Dans ces conditions, il ne paraissait pas raisonnable de renchérir encore le coût du permis, au risque d’exclure certaines populations.
Pour l’ensemble de ces raisons, le dispositif retenu par la commission des lois, consistant à enseigner des comportements simples, nous semble plus pragmatique et, surtout, plus facile à mettre en œuvre, tout en respectant l’esprit du texte initial.
Certes, la mise en œuvre des bons réflexes à avoir en cas d’accident ne remplacera jamais les gestes de secours effectués par un personnel médical, mais elle permettra au moins de faciliter le travail des secours, ne serait-ce qu’en conditionnant les automobilistes à les avertir en premier réflexe.
Par ailleurs, sur un plan pratique, cet apprentissage spécifique n’engendrera pas de surcoût pour les candidats au permis de conduire, ni d’allongement indu des délais de passage des examens.
Mes chers collègues, convaincus que la sécurité routière est un enjeu qui nécessite la mobilisation et l’éducation de tous, les membres de mon groupe approuvent sans réserve cette proposition de loi, dans la rédaction retenue par la commission des lois. (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui vise à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation de l’examen du permis de conduire. L’exposé des motifs est limpide : il s’agit de sauver des vies.
Le nombre des blessés et des tués sur la route, s’il est en constante baisse depuis de nombreuses années, reste trop élevé. Le bilan provisoire pour le premier semestre de 2013 fait état de plus de 32 000 blessés et de 1 440 tués sur nos routes.
Les auteurs de la présente proposition de loi le rappellent, les premières minutes qui suivent un accident sont décisives. Selon les estimations disponibles, ce sont de 250 à 350 vies qui pourraient être sauvées chaque année si les témoins présents sur les lieux d’un accident possédaient la connaissance des gestes de premiers secours. Qui pourrait alors ne pas voter une mesure dont la finalité est incontestable ?
Toutes les études en la matière montrent que les Français sont mal et peu formés aux gestes de premiers secours. Le rapport de notre collègue Catherine Troendlé cite à cet égard un chiffre édifiant : selon une enquête menée par la Croix-Rouge en 2013, seulement 55 % des personnes interrogées indiquent que leur premier geste en cas d’accident serait d’avertir les secours. Dans le même sens, 50 % des personnes interrogées ne savent pas dûment placer un triangle de signalisation, et donc protéger les lieux de l’accident.
Toutefois, si l’amélioration de la formation de nos concitoyens aux gestes de premiers secours apparaît comme une nécessité évidente, une lecture attentive du texte initial soulève de nombreuses questions et nous conduit à être pour le moins réservés quant à l’opportunité de l’adopter.
D’abord, cela a été dit à de nombreuses reprises, les dispositions prévues par ce texte relèvent non pas du domaine de la loi, mais bien de celui du règlement. C’est d’ailleurs ce motif qui avait conduit au rejet par l’Assemblée nationale d’une proposition similaire l’année dernière. Nous sommes attachés au respect de la Constitution et nous devons être vigilants à ne pas outrepasser, si louable l’intention des auteurs du texte soit-elle, les prérogatives que celle-ci nous donne.
Ensuite, il existe des dispositifs généraux de formation aux premiers secours.
La loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière a créé une obligation de sensibilisation des candidats au permis de conduire à la formation aux premiers secours. Cette obligation est restée lettre morte, faute de décret d’application. Le groupe écologiste estime qu’il convient de faire appliquer la loi existante avant d’en élaborer une nouvelle, en favorisant ainsi l’inflation législative.
Enfin, le permis de conduire est déjà un Graal suffisamment difficile à atteindre pour que la mise en place de ces mesures ne vienne pas compliquer davantage encore l’obtention de ce qui représente pour beaucoup un sésame pour l’emploi et l’autonomie.
Pour toutes ces raisons, il aurait été difficile d’adopter le texte en l’état. Je veux donc saluer ici le travail de Mme la rapporteur, qui a su entendre ces griefs et nous proposer un texte plus en phase avec la réalité de notre société.
En effet, l’adoption du texte dans sa version initiale, qui prévoyait l’instauration d’une épreuve supplémentaire au permis de conduite, aurait probablement eu pour conséquence une augmentation du coût et des délais d’obtention du permis de conduire.
Le texte tel qu’amendé par la commission revient sur l’instauration de cette troisième épreuve ; nous nous en félicitons. Il instaure, en revanche, une obligation, pour les examinateurs, de s’assurer que les candidats maîtrisent les actes simples mais fondamentaux consistant à alerter les secours, à sécuriser et à baliser la zone de l’accident et, si nécessaire, à accomplir les gestes de secours de base.
Considérant que cette mesure est bénéfique, le groupe écologiste votera le texte tel qu’issu des travaux de la commission des lois.
J’aimerais toutefois rappeler qu’il faut également que cette formation, tellement nécessaire, soit mise en œuvre de manière effective dans le cadre de l’école et du travail, afin que les connaissances en matière de premiers secours de l’ensemble de nos concitoyens soient approfondies et réactualisées tout au long de la vie. (Applaudissements sur diverses travées.)
M. le président. La parole est à M. Jean-René Lecerf.
M. Jean-René Lecerf. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous ne devrions pas débattre de cette proposition de loi, puisque l’article 16 de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière dispose déjà que les candidats au permis de conduire doivent être sensibilisés, dans le cadre de leur formation, aux notions élémentaires de premiers secours.
Je connais bien ce dossier, porté par Didier Burggraeve – qui fut conseiller municipal de Lys-lez-Lannoy, commune de mon département du Nord –, au côté de notre ancienne et regrettée collègue Dinah Derycke et de bien des parlementaires du Nord de toutes tendances. On doit d’ailleurs la rédaction de l’article 16 de la loi de 2003 à l’adoption de deux amendements identiques présentés par les députés du Nord Patrick Delnatte et Francis Vercamer.
Une fois encore, nous sommes confrontés à un problème d’application des lois, puisque le décret en Conseil d’État qui devait fixer les modalités d’application de la réforme de 2003 n’a jamais été pris.
Mes chers collègues, je vous épargnerai mes commentaires sur l’obligation, pour l’exécutif, de prendre en compte la volonté du législateur et sur les risques de l’interprétation d’une compétence liée en un pouvoir discrétionnaire. Ces questions sont trop connues pour que l’on s’y attarde et elles concernent tous les gouvernements, par-delà les alternances.
Notre collègue Jean-Pierre Leleux a donc remis l’ouvrage sur le métier avec cette proposition de loi relative à l’introduction d’une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire.
Le travail de la commission des lois et celui de notre rapporteur Catherine Troendlé ont permis d’adoucir les aspérités qui auraient pu mener, une fois de plus, à une impasse.
Nous avons sur toutes les travées de cet hémicycle, du moins je l’espère, le souhait d’aboutir enfin à un texte législatif clair permettant d’envisager, après confirmation par l'Assemblée nationale, la formation de tous nos concitoyens usagers de la route aux gestes qui sauvent. La mise en œuvre de ceux-ci est de nature à permettre le maintien en vie de blessés en situation de détresse qui, sinon, décèdent avant l’arrivée des secours.
Chacun se félicite des progrès accomplis ces dernières années grâce à la politique de sécurité routière. Menée sur le long terme, cette politique résulte d’une volonté sans faille des pouvoirs publics, qui n’ont pas hésité à prendre des mesures d’abord impopulaires pour parvenir à diviser par plus de quatre la mortalité sur la route depuis 1972, alors même que le nombre de véhicules et le trafic ont plus que doublé.
Certes, des améliorations demeurent indispensables et des progrès sont encore possibles.
On glose beaucoup, par exemple, sur l’abaissement de 90 à 80 kilomètres à l’heure de la vitesse maximale autorisée sur les routes départementales, mesure qui n’est pas jugée unanimement pertinente.
En tout état de cause, l’adoption de la proposition de loi qui est aujourd’hui soumise à notre examen permettrait d’économiser bien des vies, tant d’ailleurs sur la route que dans la vie quotidienne, sans présenter de véritables inconvénients. Jamais un « bilan coûts-avantages », pour employer cette expression chère aux spécialistes de droit public, ne m’est apparu aussi satisfaisant !
Faisons cependant justice des critiques habituelles qu’inspire cette réforme. Aux côtés des pesanteurs administratives, elles expliquent largement le retard de sa mise en œuvre.
Tout d’abord, un tel dispositif relèverait de la compétence du pouvoir réglementaire, et non de celle du législateur. Loin de moi l’idée de m’affranchir des fourches caudines des articles 34 et 37 de notre Constitution, mais je crois que, même pour les tenants les plus convaincus de la rationalisation du parlementarisme, l’idée fondamentale consistait bien à donner au législateur la maîtrise de l’essentiel sans l’encombrer de l’accessoire, fût-il lui-même fort important. Or, quoi de plus essentiel, mes chers collègues, que d’épargner des vies humaines et d’éviter autant que faire se peut la répétition de ces drames qu’ont connus trop de familles, trop de parents, trop de conjoints, trop d’enfants ?
On nous dit encore de laisser cette responsabilité aux bons soins de l’éducation nationale. Mais le bilan de l’action de celle-ci en ce domaine s’avère souvent – pas toujours, il est vrai – bien décevant ! Le pourcentage d’enfants d’une classe d’âge donnée initiés aux gestes qui sauvent demeure infime. De surcroît, le temps qui sépare cette formation du moment où celle-ci pourra servir dans la dure réalité risque de compromettre l’efficacité, voire la pertinence, des interventions. Dès lors, une telle formation ne peut être sanctionnée que dans le cadre de l’examen du permis de conduire, les candidats étant amenés à prendre sur la route des responsabilités nouvelles.
Enfin, on objecte parfois qu’une telle mesure engendrera un coût supplémentaire alors même que le permis de conduire est déjà fort onéreux pour beaucoup de nos concitoyens. Cependant, toutes les estimations financières s’avèrent largement rassurantes, et ce surcoût ne saurait être comparé au coût de bien des infractions au code de la route ou des remises à niveau qui permettent à ceux qui veulent préserver leur droit de conduire de récupérer quelques précieux points. En outre, cet effort supplémentaire doit être mis en regard des vies épargnées, des handicaps évités ou minimisés.
Faut-il encore, pour ceux qui resteraient à convaincre, faire un peu de droit comparé ? En Autriche, par exemple, 40 000 personnes sont formées chaque année aux gestes de premiers secours, depuis 1971, dans le cadre de la préparation du permis de conduire. L’Allemagne, la Suisse, le Danemark ont adopté avec succès des dispositifs similaires.
En cette période d’échéances électorales successives où l’on ne nous épargne pas les sondages, permettez-moi, mes chers collègues, de vous livrer quelques chiffres propres à vous faire rêver ! Selon une enquête réalisée pour la Croix-Rouge française en septembre dernier, sur la base d’un échantillon de 1 020 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, 69 % de nos compatriotes aimeraient suivre une formation aux gestes qui sauvent adaptée aux accidents de la route, 91 % estiment important de connaître ces gestes de premiers secours, 94 % pensent que les Français ne les connaissent pas suffisamment, et 98 % souhaitent que la formation aux premiers secours lors de la préparation du permis de conduire revête un caractère obligatoire, les 2 % restants se partageant équitablement entre « avis contraires » et « sans opinion » !
Par conséquent, en adoptant la proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Leleux, que je remercie de sa détermination, de sa persévérance et de sa patience, notre assemblée ne risque guère de heurter l’opinion. Mes chers collègues, ne boudons pas ce plaisir supplémentaire ! En ce qui le concerne, le groupe UMP apportera son plein soutien à cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et au banc de la commission. – Mme Esther Benbassa applaudit également.)
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste.
M. Maurice Antiste. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteur, mes chers collègues, nous avons tous ici un même objectif : celui de réduire le nombre des victimes d’accidents de la route. Pour l’atteindre, il est essentiel que tout citoyen sache réagir en pareille situation, ce qui pour l’heure n’est absolument pas le cas.
En effet, plusieurs études ont démontré que les Français ont encore quelques lacunes dans la pratique des gestes qui sauvent, notamment en cas d’accidents routiers, et que certaines personnes présentes sur les lieux préfèrent rester passives, par ignorance ou par peur d’aggraver les blessures des victimes. Cette carence est d’autant plus préjudiciable que les secours mettent, en moyenne, treize minutes pour parvenir sur le lieu de l’accident en milieu urbain, et entre vingt et trente minutes en rase campagne.
Indiscutablement, l’apprentissage des gestes de premiers secours est la condition sine qua non pour une prise en charge en amont des victimes, qui permettra de secourir, voire de sauver, un proche ou toute personne victime d’un accident, en attendant l’arrivée des secours.
D’ailleurs, ce n’est pas la première fois que l’on y pense, puisque la proposition de loi « cinq gestes qui sauvent », déposée en 1967, visait déjà à inculquer la conduite à tenir en présence d’un accident dans la rue ou sur la route, sur la base de mots-clés : « alerter », « baliser », « ventiler », « comprimer » et « sauvegarder ». Elle a été repoussée puis ce projet a été abandonné par les nouveaux pouvoirs publics au début des années quatre-vingt. Par la suite, plusieurs autres propositions de loi et des amendements allant dans ce sens ont été déposés, mais ils sont restés lettre morte.
Introduire une obligation de formation aux premiers secours dans le cadre de la préparation du permis de conduire me paraît donc judicieux et indispensable, d’autant qu’il s’agit de ne retenir que les gestes essentiels de survie que tous les usagers de la route devraient connaître, apprendre au moyen d’exercices et mémoriser jusqu’à ce qu’ils deviennent des réflexes. En effet, la rapidité d’action et d’exécution des gestes de premiers secours est déterminante, en amont de l’intervention des professionnels.
De surcroît, au regard de la loi de modernisation de la sécurité civile, tout citoyen doit être un acteur de celle-ci ! À cet égard, l’initiation aux cinq gestes qui sauvent permettra de toucher automatiquement un public nombreux, qui ne suivrait pas spontanément une formation entière de prévention et secours civiques de niveau 1, ou PSC 1.
Conscient de l’enjeu, j’ai mis en place depuis quelques années déjà, en ma qualité de maire de la ville du François, en Martinique, une formation de ce type, dans le cadre d’un plan pluriannuel de constitution de ressources de première intervention. Ce dispositif repose sur le volontariat. À ce jour, près de 500 citoyens de ma ville, de tous âges, ont acquis le PSC 1.
J’envisage d’ailleurs d’interpeller le ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche sur ce sujet, car j’estime nécessaire, voire indispensable, que tous nos enseignants soient formés à ces premiers gestes, à tous les niveaux de la scolarité. Dans ma ville, ils sont très fortement incités à suivre les cours que nous dispensons gratuitement. Cet acquis sera particulièrement précieux dans le cadre de la gestion d’une crise, en cas de survenance d’une catastrophe naturelle, telle qu’un séisme ou un cyclone, phénomènes qui représentent une menace majeure dans nos territoires ultramarins.
À terme, la mise en œuvre de cette mesure garantirait à coup sûr la présence, dans chaque famille, d’une personne rompue aux gestes de premiers secours. L’adjonction d’un module qui leur soit consacré dans la formation au permis de conduire me semble donc une nécessité particulièrement impérieuse.
De plus, l’obligation de suivre une telle formation en vue de la conquête du précieux « papier rose » existe déjà dans des pays européens tels que l’Autriche, l’Allemagne, la Suisse et le Danemark, qui subordonnent l’attribution du permis de conduire à la réussite à un examen de secourisme. Ce ne serait donc pas une innovation.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je voterai cette judicieuse proposition de loi ! (Applaudissements.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation, de la réforme de l'État et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, veuillez tout d’abord excuser l’absence de M. le ministre de l’intérieur, retenu par d’autres obligations.
En écoutant l’ensemble des orateurs, en lisant le rapport de Mme Troendlé, j’ai pu constater à nouveau à quel point la cause de la sécurité routière transcende tous les clivages.
Comme M. Barbier, je pense qu’un virage décisif a été pris lors du second mandat de Jacques Chirac, sous votre impulsion, monsieur le président Raffarin.
M. Jean-Claude Lenoir. Oui !
M. André Vallini, secrétaire d'État. Sans vouloir faire de jeu de mots déplacé, je dirai qu’on est alors passé à la vitesse supérieure en matière de sécurité routière. Depuis, les pouvoirs publics n’ont pas relâché la pression sur les automobilistes : depuis une quinzaine d’années, tous les gouvernements successifs – le vôtre, monsieur Raffarin, ceux de François Fillon, celui de Jean-Marc Ayrault, celui de Manuel Valls aujourd'hui – ont choisi de faire de la sécurité routière un axe majeur de leur action. Cet après-midi, je constate que cette cause fédère l’ensemble des sensibilités politiques représentées au Sénat.
Le dispositif qui vous est aujourd'hui présenté, après l’examen du texte par la commission des lois, a le mérite d’éviter l’écueil de l’instauration d’une troisième épreuve à l’examen du permis de conduire, mesure dont le coût aurait été très élevé.
Il s’agit, plus simplement et, sans doute, plus efficacement, d’instituer une obligation de formation aux notions élémentaires de premiers secours. On s’étonne même qu’il ait fallu attendre aussi longtemps un tel texte ! La commission des lois du Sénat s’est ralliée à l’unanimité à cette proposition raisonnable.
L’article unique du texte n’entre pas dans les détails de cette formation, mais votre rapport, madame Troendlé, en esquisse les grands traits. Le Gouvernement souscrit à vos objectifs, dont certains sont partiellement satisfaits. Je pense notamment aux programmes de formation à la conduite pour les enseignants ou à l’inclusion de questions sur le thème des premiers secours dans l’épreuve théorique du permis de conduire. Cela étant, ces dispositions doivent être renforcées, et les mesures présentées vont dans ce sens.
Par conséquent, le Gouvernement réserve un accueil très favorable à ce texte, sous réserve, bien sûr, de l’examen des amendements.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire
Article additionnel avant l’article unique
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par M. J. Boyer, est ainsi libellé :
Avant l’article unique
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Il est institué pour les cycles 3 des écoles primaires publiques et privées sous contrat d'association, un permis piéton.
Il comprendra également une formation aux premiers secours, ainsi que les connaissances élémentaires des véhicules terrestres à moteur.
Cet amendement a été retiré.
Article unique
Le chapitre Ier du titre II du livre II du code de la route est complété par un article L. 221-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 221-3. – Les candidats à l’examen du permis de conduire sont formés aux notions élémentaires de premiers secours en cas d’accident de la circulation.
« Cette formation est sanctionnée dans le cadre de l’examen du permis de conduire.
« Le contenu de cette formation et les modalités de vérification de son assimilation par les candidats sont fixés par voie réglementaire. »
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, auteur de la proposition de loi, sur l'article.
M. Jean-Pierre Leleux, auteur de la proposition de loi. L’article unique de la proposition de loi est extrêmement simple, à l’image de la mesure de bon sens qu’il prévoit : comme l’a dit M. le secrétaire d’État, elle aurait déjà dû être adoptée depuis longtemps.
Pour être simple, cette mesure n’en permettra pas moins à la France de rattraper son retard par rapport à ses partenaires européens et de répondre à une attente de nos concitoyens, qui, comme l’a indiqué Jean-René Lecerf, la jugent à plus de 95 % absolument nécessaire.
En effet, lorsqu’un accident de la route se produit, les premiers à arriver sur les lieux sont d’autres conducteurs. Il importe donc d’enseigner aux usagers de la route ces gestes très simples permettant de secourir, voire de sauver, les victimes. Comme l’a dit Mme Benbassa, entre 250 et 350 vies pourraient être ainsi sauvées chaque année. Pour notre pays, l’adoption du texte entraînerait donc une nouvelle réduction du nombre de tués sur les routes.
Encore faut-il, cependant, que le conducteur qui arrive sur le lieu de l’accident ne cède pas à la panique, qu’il ait été formé aux gestes à accomplir et même, en quelque sorte, conditionné, par le biais d’automatismes, de moyens mnémotechniques.
Tel est l’objet de cette proposition de loi, qui tend à rendre obligatoire une formation aux gestes de premiers secours.
Certains orateurs ont évoqué les « cinq gestes qui sauvent ». Ce sont d'abord des gestes d’alerte – prévenir les secours et baliser –, mais également des gestes élémentaires de survie. À cet égard, je sais les craintes que peut susciter la perspective de l’intervention d’un témoin dont la formation n’aurait pas été suffisante.
Je tiens à remercier la commission des lois, son président, Jean-Pierre Sueur, et sa rapporteur, Catherine Troendlé, d’avoir accompagné notre démarche en évitant l’écueil d’un renvoi au domaine réglementaire et, surtout, en ayant l’intelligence et la sagesse d’écarter l’instauration d’une troisième épreuve à l’examen du permis de conduire, pour lui substituer la présentation d’une simple attestation délivrée par une association agréée en matière de protection civile.
Sans entrer dans le domaine réglementaire, j’aimerais cependant que l’article définisse mieux le périmètre de la formation ; j’y reviendrai dans un instant en présentant les amendements que nous avons déposés.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 2 rectifié bis, présenté par M. Leleux, Mme Cayeux, MM. Cambon, Gournac, Lefèvre et Gaillard, Mme Giudicelli, Mlle Joissains, M. Cointat, Mmes Duchêne, Sittler, Deroche et Férat et MM. Pierre, Couderc, B. Fournier, Pinton et P. Leroy, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
Cette formation
insérer les mots :
aux gestes de survie comprenant, outre l’alerte des secours et la protection des lieux, ceux pour faire face à la détresse respiratoire et aux hémorragies externes
La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.
M. Jean-Pierre Leleux. Depuis trente ans, la traduction réglementaire et législative de la volonté que nous formulons a connu un certain nombre d’échecs, et je sais que la prudence commande de ne pas empiéter sur le domaine du pouvoir réglementaire.
Toutefois, il me semble que, pour parvenir à une rédaction reflétant les intentions exprimées par les différents orateurs, il conviendrait de faire référence dans le texte « aux gestes de survie comprenant, outre l’alerte des secours et la protection des lieux, ceux pour faire face à la détresse respiratoire et aux hémorragies externes ». Cette formulation recouvre les cinq gestes décrits dans tous les ouvrages de vulgarisation du secourisme, notamment dans ce livre tout récemment paru, Les premiers secours pour les nuls. (L’orateur brandit le livre.)
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié, présenté par M. Leleux, Mme Cayeux, MM. Cambon, Gournac, Lefèvre et Gaillard, Mlle Joissains, M. Cointat, Mmes Duchêne, Sittler et Férat, MM. Pierre, Couderc, B. Fournier, Pinton et P. Leroy et Mmes Giudicelli et Deroche, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
Cette formation
insérer les mots :
aux gestes de survie
La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.
M. Jean-Pierre Leleux. Il s'agit d’un amendement de repli.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Troendlé, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Ces amendements tendent à définir la formation aux premiers secours que la proposition de loi vise à instaurer.
Cependant, les différents responsables que j’ai pu auditionner, notamment ceux des sapeurs-pompiers et le président du SAMU, ont tous souligné que procéder à la ventilation des accidentés de la route n’était pas forcément opportun. En tout état de cause, il me semble préférable de laisser au pouvoir réglementaire le soin de définir le contenu de cette formation, afin de pouvoir l’adapter en fonction des avancées des techniques et des connaissances médicales, qui évoluent régulièrement.
Si le principe d’une formation obligatoire aux notions élémentaires de premiers secours doit nécessairement figurer dans la loi, y définir aussi précisément le contenu de cette formation risquerait donc, à mon sens, d'être contre-productif.
Par conséquent, je demande le retrait des amendements nos 2 rectifié bis et 3 rectifié ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Même avis, pour les raisons fort bien exposées par Mme la rapporteur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Leleux. Je comprends qu’il faille prendre des précautions, mais je souligne que, dans tous les textes en vigueur ailleurs en Europe, l’apprentissage de ce que l’on appelle les gestes de survie est inclus dans la formation aux premiers secours. Nous risquons d’accroître notre retard dans ce domaine par rapport à nos voisins.
Très franchement, si l’on n’apprend aux futurs conducteurs qu’à alerter et à baliser les lieux de l’accident, des blessés pourront mourir d’une régurgitation alors que le geste qui sauve est extrêmement simple : il suffit d’ouvrir légèrement la bouche de la victime et d’enlever tout ce qui peut gêner la respiration. Libérer les voies respiratoires ou opérer une compression pour stopper une hémorragie externe ne présente absolument aucun danger. L’enseignement de ces gestes figure dans toutes les formations aujourd'hui dispensées en Europe en vue de l’obtention du permis de conduire.
Je ne présume pas du contenu du futur décret d’application, mais j’aurais aimé que la loi dispose que la formation comprendra l’apprentissage de ces gestes de survie. Sinon, nous ne ferons aujourd'hui qu’un petit pas dans la bonne direction, qui restera insuffisant…
Je maintiens donc les amendements nos 2 rectifié bis et 3 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 4 rectifié, présenté par M. Leleux, Mme Cayeux, MM. Cambon, Gournac, Lefèvre et Gaillard, Mme Giudicelli, Mlle Joissains, M. Cointat, Mmes Duchêne, Sittler, Deroche et Férat et MM. Pierre, Couderc, B. Fournier, Pinton et P. Leroy, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un comité de suivi est chargé d’évaluer son application et de s’assurer que cette dernière répond aux exigences définies. À cet effet, il demande un rapport au Gouvernement sur la mise en œuvre des dispositions votées.
Ce comité comprend deux députés et deux sénateurs, désignés par les commissions des lois auxquelles ils appartiennent.
La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.
M. Jean-Pierre Leleux. Cet amendement tend simplement à instaurer un comité de suivi, comprenant deux députés et deux sénateurs, chargé d’observer les effets de la mise en œuvre du texte en termes de mortalité par accidents de la route. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, l’Académie nationale de médecine estime qu’entre 250 et 350 vies pourraient être sauvées chaque année. Ces chiffres, fondés sur quelques analyses statistiques, mériteraient d'être vérifiés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Troendlé, rapporteur. Cet amendement a pour objet de créer un comité de suivi composé de deux députés et de deux sénateurs appartenant aux commissions des lois de chacune des assemblées. Ce comité serait chargé d’évaluer les effets des mesures prises en application du présent texte et de vérifier que le décret d’application a été effectivement pris.
Le mécanisme m'apparaît très lourd, sachant que les décrets d’application des lois font déjà l’objet d’un suivi particulier par la commission des lois.
Je demande donc le retrait de l'amendement ; sinon, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Une nouvelle fois, Mme la rapporteur a exprimé exactement ce que je m’apprêtais à dire. Pour les mêmes raisons que la commission, le Gouvernement est lui aussi défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Leleux. Je prends acte de ces avis défavorables, mais j’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, que vous précisiez le point de vue du Gouvernement. Le décret à venir inclura-t-il ou non l’apprentissage des gestes de survie dans la formation aux premiers secours ? Je souhaite que vous preniez position devant notre assemblée sur ce point, fondamental à mes yeux.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, le secourisme est une matière qui évolue, et les spécialistes considèrent que ce sujet doit être traité avec beaucoup de précision.
D’abord, les enseignants de la conduite et de la sécurité routière ne sont pas habilités à dispenser des formations de secourisme. Ils n’en ont pas la compétence. Rendre obligatoire, ainsi que vous le proposez, une formation à des gestes tels que la ventilation cardiaque ou la compression d’hémorragies externes supposerait donc nécessairement soit de recourir à des intervenants extérieurs aptes à dispenser ces formations, soit de former les personnes chargées de l’enseignement de la conduite. Dans les deux cas, l’incidence financière de la mesure serait importante, voire considérable.
Ensuite, les autorités médicales, dans leur diversité, sont partagées quant à l’opportunité de favoriser ce type d’interventions, dont les effets aggravent parfois la situation de la victime. Je vous renvoie une nouvelle fois aux débats parlementaires de l’année dernière, qui ont abouti au rejet de la proposition de loi visant à instaurer une formation aux cinq gestes qui sauvent.
En revanche, il est possible et souhaitable, dans le cadre de l’apprentissage de la conduite, d’enseigner aux élèves des comportements simples à observer en cas d’accident de la circulation : savoir protéger les lieux de l’accident, savoir transmettre un message aux secours et savoir évaluer sa compétence à pratiquer ou non un geste de secours, si et seulement si l’on a été formé à cette fin.
Le nouveau programme de formation, le REMC – le référentiel pour l’éducation à une mobilité citoyenne –, qui entrera en vigueur le 1er juillet 2014, met précisément l’accent sur la transmission de ces compétences. La vérification de leur assimilation pourra s'effectuer dans le cadre des épreuves de l’examen du permis de conduire.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement s'est opposé à vos amendements nos 2 rectifié bis et 3 rectifié.
Cela étant dit, afin de vous rassurer pleinement, je m'engage à ce que le Gouvernement prenne toutes les dispositions nécessaires pour que la loi que le Sénat va sans doute voter aujourd'hui trouve une traduction concrète. Il m'est difficile d'être plus précis encore, mais je prends devant vous l’engagement que le Gouvernement travaillera dans le sens que vous souhaitez, de façon concertée avec les professionnels, notamment le corps médical, qui, je le redis, est partagé sur l’opportunité d’enseigner des gestes de premiers secours, que l’on croit très faciles à faire, mais qui peuvent parfois s'avérer – pardonnez-moi l’expression – « contre-productifs ». (M. Gilbert Barbier acquiesce.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Un regard rapide jeté sur notre ordre du jour pourrait conduire à penser que nous nous attardons sur des textes que certains qualifieraient de « mineurs ». Pourtant, cette proposition de loi ne l’est pas. Elle participe d’une politique menée depuis longtemps pour réduire le nombre d’accidents, de tués et de blessés sur la route.
Cette proposition de loi, qui sera sans doute dans un instant adoptée à l’unanimité, est donc un texte important, car elle a trait à une cause nationale. Je tiens à rappeler que, voilà exactement dix ans, c’est M. Raffarin, qui préside aujourd’hui cette séance, qui a pris, en tant que Premier ministre, des initiatives courageuses en vue de renforcer la sécurité routière.
Lorsque nous débattons de ce sujet, beaucoup attribuent les progrès obtenus en matière de sécurité routière à l’amélioration des infrastructures et de la conception des véhicules, mais la véritable cause en est le changement de comportement des automobilistes français. Monsieur le président, c'est parce que vous avez pris la décision courageuse d’installer des radars que celui-ci a évolué. Je voulais simplement en rendre témoignage, car votre action a contribué à l’obtention de résultats significatifs, qui ne demandent qu’à être renforcés. À cet égard, l’adoption de cette proposition de loi ne pourra qu’aller dans le bon sens.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je souhaite à mon tour rassurer notre collègue Jean-Pierre Leleux, qui reste manifestement dubitatif.
Des efforts ont effectivement été réalisés sous l’impulsion du gouvernement Raffarin et ils trouvent une traduction concrète dans les départements. Ainsi, le nombre de tués sur la route ne cesse de diminuer dans le mien, où l’on en compte maintenant moins de trente par an, grâce notamment à des mesures prises à l’échelon local : je pense à l’amélioration des courbes de virages, à l’adaptation de la vitesse maximale, à la hausse ou à la baisse selon les cas pour qu’elle soit compréhensible par les conducteurs et, ainsi, respectée.
Dans le même esprit, nous avons mené une action de formation aux gestes de premiers secours dans les collèges, qui relèvent du conseil général. En effet, il me paraît tout à fait essentiel de sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge. Cette formation peut être dispensée par les SDIS – dans la mesure où ils continuent à dépendre du département ! –, la Croix-Rouge ou d’autres organismes associatifs compétents. J’ajoute qu’une telle action permet en outre de toucher les parents.
C’est donc dans cette voie qu’il faut poursuivre, en prenant un décret définissant précisément une démarche cohérente, car il convient que la formation dispensée soit la même, que ce soit à l’école ou lors de la préparation du permis de conduire. Cela permettrait d’améliorer encore la situation en matière d’accidentologie routière.
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Mon collègue Leleux pourrait s’étonner que je ne soutienne pas ses amendements, mais M. le secrétaire d’État a soulevé un argument extrêmement important : la médecine d’urgence a beaucoup évolué. Il faut bien reconnaître que, par le passé, l’intervention de personnes disposant d’une formation réduite en matière de secourisme a été à l’origine d’un certain nombre de tétraplégies, résultant de manipulations intempestives pour sortir les blessés des véhicules.
Quant à la ventilation d’un blessé, encore faut-il la réaliser correctement. On sait très bien qu’une hyperventilation, en cas de fracture du thorax, peut provoquer un pneumothorax conduisant au décès du patient.
Par conséquent, en tant que médecin, j’estime que les blessés ont de meilleures chances de s’en sortir si les non-spécialistes ne les touchent pas !
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Leleux.
M. Jean-Pierre Leleux. Je voterai bien entendu avec enthousiasme la proposition de loi dans le texte de la commission, même non amendé, mais je souhaite insister encore une fois sur l’importance de la teneur du futur décret.
Notre collègue Barbier vient de nous dire que des non-spécialistes ne doivent surtout pas toucher aux blessés. Dans ce cas, on ne les sauvera pas ! Selon la revue éditée par l’Association nationale des instructeurs et moniteurs de secourisme, les traumatismes médullaires sont rares : ils concernent de 2 % à 5 % des accidentés graves, dont seulement de 1 % à 2 % présentent une fracture cervicale instable. Que fait-on pour les quelque 98 % de blessés qui ne sont pas dans ce cas ? On les laisse mourir ? Avec des gestes non dangereux, extrêmement simples à réaliser, on peut sauver des vies, pour autant que l’on intervienne dans les quinze à soixante secondes suivant l’accident.
Ces gestes, je le répète, sont décrits dans Les premiers secours pour les nuls. Il vaudrait mieux, selon moi, les enseigner aux futurs conducteurs de façon pratique pendant une demi-heure ou une heure. Il ne s’agit pas de pratiquer une compression ou la respiration artificielle ; il s’agit simplement de libérer les voies respiratoires d’une personne en situation de détresse.
Cela étant dit, dans la mesure où M. le secrétaire d'État s’est engagé sur la prise en compte, dans le décret, des préoccupations que j’ai exprimées, je retire bien volontiers l'amendement n° 4 rectifié. Je voterai l’article unique avec plaisir, sachant que c’est déjà un pas considérable dans la bonne direction.
M. André Vallini, secrétaire d’État. Voulant faire preuve à mon tour de bonne volonté, monsieur le sénateur, je propose que l’administration prenne l’attache de Mme la rapporteur et de vous-même pour qu’exécutif et législatif rédigent ensemble, en quelque sorte, le décret. Nous avons tous le même objectif.
M. Jean-Pierre Leleux. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État.
M. le président. La parole à M. le président de la commission.
M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais remercier celles et ceux qui ont œuvré pour ce texte, en particulier M. Leleux et la rapporteur, Mme Troendlé.
Il est vrai, monsieur le président Raffarin, que l’impulsion donnée par le président Jacques Chirac et vous-même a été très importante. Nous ne pouvons que nous réjouir que, par la suite, tous les Présidents de la République et tous les Premiers ministres successifs aient persévéré sur ce chemin, ce qui a permis de réduire le nombre de tués sur la route. Ceux-ci étant néanmoins toujours trop nombreux, il nous faut continuer notre action.
Par ailleurs, vous avez bien voulu citer dans votre rapport, madame Troendlé, la proposition de loi que j’avais déposée à la suite d’un accident tragique qui s’était produit à La Ferté-Saint-Aubin, dans mon département : croyant bien faire, le conducteur d’un autobus avait déplacé son véhicule sous lequel se trouvait un jeune homme et, pensant délivrer celui-ci, il l’avait tué.
À la suite de ce terrible accident, je me suis préoccupé, à la demande instante et légitime de la famille, de son avocate et de la population, de la formation aux premiers secours des conducteurs de transport routier de personnes. Je n’ai pas réussi à faire adopter cette proposition de loi, que j’ai ensuite déposée à nouveau sous forme d’amendement à trois ou quatre reprises.
On m’a toujours objecté que le contenu de la formation des personnes habilitées à conduire des véhicules de transport collectif était défini par des règles européennes et que, cette formation comportant treize ou quatorze modules, un renforcement de l’apprentissage des gestes de premiers secours s’opérerait au détriment des autres modules. Je me suis fâché, j’ai rencontré les ministres compétents, et nous avons finalement obtenu une modification de ces règles.
Je tiens cependant à aborder une nouvelle fois le sujet, car il me paraît impérieux que les conducteurs de véhicules de transport collectif de personnes disposent d’une formation solide en matière de secourisme, au même titre, d'ailleurs, que les moniteurs d’auto-école.
Je forme bien sûr le vœu, monsieur le secrétaire d’État, que le décret d’application de ce texte soit rédigé rapidement, en concertation, comme vous l’avez proposé, avec M. Leleux, Mme Troendlé et nos collègues de la commission intéressés.
Je forme également le vœu que cette proposition de loi soit examinée par l’Assemblée nationale dans des délais raisonnables. On constate en effet une énorme déperdition dans le travail parlementaire, tenant au fait qu’un grand nombre de propositions de loi adoptées par l’une des deux assemblées, fût-ce à l’unanimité, ne sont jamais inscrites à l’ordre du jour de l’autre assemblée. Je pense que nous devrions y réfléchir. Il est de la responsabilité de tous les groupes politiques de faire en sorte qu’une proposition de loi ayant été examinée par l’une des deux chambres le soit également par l’autre, a fortiori si elle a été adoptée. Pour l’heure, nous ne pouvons que déplorer que beaucoup de temps et de travail soit perdu.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. André Vallini, secrétaire d'État. Matignon et le ministère de l’intérieur m’avaient donné pour consigne de m’en remettre, sur ce texte, à la sagesse de la Haute Assemblée. Toutefois, étant donné la teneur des débats et le consensus qui s’est dégagé, j’émets, au nom du Gouvernement, un avis favorable sur la proposition de loi, en prenant l’engagement que le décret sera pris pendant l’été.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi visant à introduire une formation pratique aux gestes de premiers secours dans la préparation du permis de conduire.
(La proposition de loi est adoptée.)
M. le président. Je constate que la proposition de loi a été adoptée à l’unanimité des présents.
6
Nomination de membres d’une commission mixte paritaire.
M. le président. Il va être procédé à la nomination de sept membres titulaires et de sept membres suppléants de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.
La liste des candidats établie par la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale a été affichée conformément à l’article 12 du règlement.
Je n’ai reçu aucune opposition.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean-Pierre Sueur, Jean-Pierre Michel, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, M. Jean-Jacques Hyest, Mme Catherine Troendlé et M. François Zocchetto ;
Suppléants : Mme Esther Benbassa, MM. Jean-Patrick Courtois, Michel Delebarre, Yves Détraigne, Jacques Mézard, François Pillet et René Vandierendonck.
7
Nomination de membres d’une éventuelle commission mixte paritaire.
M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats a été affichée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :
Titulaires : MM. Jean-Pierre Sueur, Jean-Pierre Michel, Thani Mohamed Soilihi, Mme Cécile Cukierman, M. Jean-Jacques Hyest, Mme Catherine Troendlé et M. François Zocchetto ;
Suppléants : Mme Esther Benbassa, MM. Jean-Patrick Courtois, Michel Delebarre, Yves Détraigne, Jacques Mézard, François Pillet et René Vandierendonck.
Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le président du Sénat en aura été informé.
8
Dépôt d'un document
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre la convention entre l’État et le Centre national d’études spatiales relative au programme d’investissements d’avenir, action « Espace » du programme « projets thématiques d’excellence ».
Acte est donné du dépôt de ce document.
Il a été transmis à la commission des finances et à la commission des affaires économiques.
9
Don de jours de repos à un parent d'enfant gravement malade
Adoption définitive d'une proposition de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe UMP, la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à permettre le don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade (proposition n° 301 [2011-2012], texte de la commission n° 457, rapport n° 456).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. François Rebsamen, ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, il revient à la Haute Assemblée d’examiner aujourd’hui la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à permettre le don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade.
Déposé par le député UMP de la Loire Paul Salen, ce texte tend à autoriser un salarié à renoncer, anonymement et sans contrepartie, avec l’accord de son employeur, à des jours de repos, au profit d’un autre salarié de l’entreprise ayant la charge d’un enfant de moins de 20 ans atteint d’une maladie grave ou d’un handicap ou victime d’un accident rendant nécessaire une « présence soutenue ».
Il est vrai qu’il n’est de plus grande injustice que de voir son enfant frappé par une maladie grave.
Tous les types de jours de repos sont concernés par le dispositif de cette proposition de loi – RTT, jours de récupération ou congés payés ordinaires –, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé. Cependant, pour les congés annuels ordinaires, seuls peuvent faire l’objet d’un don les jours au-delà du vingt-quatrième.
D’emblée, je veux dire que je comprends tout à fait les motivations louables, humaines, qui ont présidé au dépôt de ce texte. Le député Paul Salen s’est inspiré de l’initiative de salariés de sa circonscription : en 2009, touchés par le drame que vivait l’un de leurs collègues, ils avaient mobilisé 170 jours de RTT pour lui permettre de rester au chevet de son enfant atteint d’un cancer en phase terminale.
Cette démarche est empreinte d’un grand humanisme. Le don est un acte suffisamment rare, dans notre société où beaucoup de choses s’achètent ou s’échangent, pour être souligné. Le don n’appelle rien en retour, il s’agit d’un acte gratuit, de pure générosité.
Cette proposition de loi appelle toutefois une position nuancée de la part du Gouvernement.
Mais avant d’aborder la question au fond, je voudrais dire ma compassion pour les parents qui subissent la terrible épreuve de la maladie d’un enfant. Cette tragédie et la douleur qu’elle provoque s’accommodent mal des contraintes administratives et légales. Comment ne pas comprendre que des parents veuillent accompagner leur enfant gravement malade, parfois jusqu’à la mort, en restant auprès de lui ? Comment accepter que la loi soit un frein à ce qui semble légitime ?
Le code du travail permet déjà à un parent d’un enfant gravement malade de s’absenter, au titre d’un congé de présence parentale, d’une durée de 310 jours sur une période maximale de trois ans. Cependant, un temps imparti est par nature arbitraire. Le passage d’un seuil à l’autre a systématiquement quelque chose d’injuste, et même, dans certaines situations dramatiques, de profondément injuste.
Pour autant, nous devons tout de même nous interroger sur l’opportunité de légiférer en la matière, alors que beaucoup estiment qu’il y a trop de lois, que les règles du code du travail sont déjà suffisamment lourdes et complexes, et qu’un effort de simplification est demandé sur toutes les travées.
Je voudrais émettre des réserves, tenant d’abord au fait que les jours de repos répondent à un impératif de protection de la santé des salariés. Le droit du travail dans son ensemble s’est construit autour de ce principe : aux sociétés d’entraide, inspirées par la solidarité, a succédé la codification par la loi, le règlement, pour protéger les salariés, assurer leur sécurité, leur permettre de préserver leur santé. Les jours de repos, conquis progressivement et de haute lutte, répondent, dans l’histoire du droit du travail, à un impératif de protection des salariés. Ils doivent donc être préservés autant que possible. En tant que gouvernants et législateurs, nous sommes aussi les gardiens d’un ordre public social qui ne peut être défait, même pour les motifs les plus honorables.
Un autre élément doit nous pousser à nous interroger : le congé est non pas un capital ou un patrimoine, mais un droit. En ce sens, il ne peut, a priori, s’échanger ; de la même manière, on ne peut échanger d’autres droits tels que ceux aux indemnités de chômage ou de maladie. Le congé a vocation à être pris, pas à être échangé, fût-ce dans le cadre d’un aussi beau geste que le don.
Je ne trouve pas souhaitable que la solidarité résulte de l’assemblage de dons individuels, de jours de congés en l’occurrence ; elle est d’abord collective et mutualisée : c’est la seule qui ne soit pas aléatoire. Si l’on y réfléchit plus avant, la mise en œuvre concrète de ce genre de dons serait nécessairement imparfaite et risquerait d’être inégale entre salariés, selon le mode d’aménagement du temps de travail –nombre de parlementaires sont opposés aux RTT, ce régime peut donc être amené à évoluer –, les durées différentes des congés, la taille de l’entreprise ou le pouvoir décisionnaire de l’employeur.
Je mesure combien ce que je suis en train de dire pourra sembler iconoclaste à l’extérieur de cet hémicycle, mais je suis obligé de tenir ces propos, parce que, en tant que gouvernants et représentants de la nation, l’une de nos missions est de maintenir les conditions de l’égalité.
Pour autant, il ne s’agit bien évidemment pas de briser les élans de solidarité. Si de telles pratiques de don venaient à l’emporter, on ne pourrait que se féliciter de la mobilisation, de l’altruisme d’hommes et de femmes qui décident de perdre – je ne dirai pas « sacrifier » – une partie de leurs droits par solidarité face à une situation humainement insupportable et déchirante.
Mais ne pas interdire signifie-t-il généraliser ? Je pose la question aux législateurs que vous êtes. Je le crois, l’instrument de la loi n’est pas le bon. Lorsque d’autres modes de régulation existent et qu’ils sont plus pertinents, il est inutile et superfétatoire de légiférer.
Des entreprises ont souhaité s’engager dans cette voie. L’une d’entre elles a signé avec certains syndicats un accord d’entreprise sur l’« absence enfant gravement malade », dispositif ouvrant la possibilité de dons de congés entre collègues de travail venant compléter un congé de vingt jours rémunéré à 75 % du salaire. Après le recours à ces vingt jours de congé, une période de recueil de dons de congés, limitée à deux semaines, peut être ouverte.
D’autres exemples pourraient être cités. Je pense à Casino : un accord d’entreprise a institué un fonds dénommé « plan congé de l’aidant familial », dont l’objet est de financer le maintien de la rémunération de salariés absents au titre d’un tel congé. Ce fonds est alimenté par des dons de RTT ou de congés, plafonnés à un certain nombre de jours.
Par ailleurs, un décret, paru au Journal officiel le 20 janvier 2013, a élargi aux fonctionnaires le bénéfice du congé de solidarité familiale, ceux-ci pouvant également être confrontés, en tant que parents, à des situations dramatiques. Le Gouvernement promeut donc, lui aussi, des avancées sur ce sujet, corrigeant l’inégalité qui existait entre salariés du public et salariés du privé afin de permettre à tous d’accompagner au mieux la fin de vie d’un être cher. Le droit du travail évolue ainsi pour mieux répondre aux besoins des salariés et des familles.
Enfin, le droit du travail se construit aussi sur des accords passés entre les partenaires sociaux. À cet égard, je dois dire que deux organisations patronales et deux organisations syndicales, parmi les plus représentatives, sont très réservées à l’endroit d’une telle initiative législative – je dis bien « législative » – en la matière.
Attaché au dialogue social à la française, je plaiderais plutôt pour une concertation préalable avec les organisations syndicales et patronales, en vue de faire évoluer nos pratiques et notre droit.
Telles sont donc, mesdames, messieurs les sénateurs, les réserves que je voulais exprimer au nom du Gouvernement sur cette proposition de loi. À mon sens, le législateur doit savoir prendre la distance nécessaire et surtout faire confiance aux partenaires sociaux, à leur capacité à conclure des accords quand le besoin s’en fait sentir. La loi, je l’ai dit, n’est pas le seul instrument de régulation ; on peut aussi faire appel à l’intelligence collective des forces sociales, qui savent passer des accords dans les entreprises.
Par-delà les complexités que l’adoption du présent texte risque de susciter et les contentieux qui pourraient émerger par la suite, notamment à propos de la définition précise de ce qu’est un accident grave, légiférer pour instaurer un don de congés individuel revient, je le dis comme je le ressens, à renoncer à un choix collectif de solidarité qui fonde notre société et, au-delà, les valeurs de la gauche, pour le remplacer par une somme de choix individuels qui, aussi généreux soient-ils, restent individuels et ne sauraient constituer les fondements de notre vie en commun.
Vous l’aurez compris, le Gouvernement considère que la loi ne peut répondre à ces situations de détresse. Mais, face à des épreuves aussi douloureuses, il n’existe pas de bonne solution ; aussi le Gouvernement s’en remettra-t-il à la sagesse du Parlement. (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.)
Mme Catherine Procaccia. Heureusement…
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi visant à permettre le don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade, déposée par le député Paul Salen, a été adoptée par l’Assemblée nationale le 25 janvier 2012 et transmise au Sénat. Je salue à cet égard les propos tenus tout à l’heure par M. le président Sueur sur le retard trop souvent pris dans l’examen des propositions de loi par la seconde assemblée saisie.
La présente proposition de loi s’inscrit dans la lignée de plusieurs textes tendant à permettre aux salariés et aux fonctionnaires de concilier les événements les plus tragiques de l’existence – maladie, décès d’un proche – avec leur vie professionnelle. Déjà possible dans le cadre d’un accord collectif dans les entreprises du secteur privé, le don de jours de repos n’est pas prévu dans le secteur public. Certains employeurs publics locaux ont néanmoins décidé d’organiser des mécanismes analogues, généralement pour répondre à une situation individuelle précise, mais sur un fondement légal incertain.
Portée par une véritable attente au sein de la population, cette volonté de solidarité, même si les modalités de sa traduction pourraient à terme être précisées, demande à être pleinement soutenue par le législateur. Le groupe UMP, qui a inscrit ce texte à l’ordre du jour qui lui est réservé, juge important de consacrer par la loi, tout en prévoyant, naturellement, certaines garanties fondamentales, la possibilité du don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade, afin notamment de permettre aux agents de la fonction publique de bénéficier de ce système.
De nombreuses entreprises, le groupe Casino, le groupe PSA, la compagnie d’assurances April, Merial, mais également la Mutualité sociale agricole de Picardie et l’Association pour l’emploi des cadres, ont, au cours des deux dernières années, mis en place par voie d’accord des mécanismes de don de jours de repos pour permettre à un salarié d’accompagner un enfant malade. À plusieurs reprises, comme dans l’accord signé au sein du groupe PSA, les négociations ont été engagées à la demande de salariés désireux de venir en aide à un de leurs collègues.
La possibilité pour les salariés et fonctionnaires d’exprimer leur solidarité envers un collègue suscite une véritable attente, et la presse s’est fait l’écho de cas où le don de jours de RTT s’est révélé impossible, faute de dispositions légales.
Certes, il existe déjà, dans le droit du travail, différents dispositifs permettant de prendre soin d’un enfant malade. Les absences pour enfant malade sont prévues par le code du travail. Par ailleurs, le passage à temps partiel est de droit pour s’occuper d’un enfant atteint d’une pathologie grave.
Enfin, un mécanisme spécifique pour ces cas graves, nécessitant une présence soutenue, a été mis en œuvre au travers du congé de présence parentale – c’est l’article L. 1225-62 du code du travail –, dont le bénéfice a été étendu il y a trente ans aux fonctionnaires, par la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.
Ce mécanisme, complété par plusieurs textes, dont la loi du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, ouvre la possibilité d’interrompre son activité à tout salarié, sans condition d’ancienneté, si l’enfant à charge, au sens des prestations familiales, est atteint d’une maladie ou d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité, rendant indispensables une présence soutenue à ses côtés et des soins contraignants.
À l’issue du congé de présence parentale, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente. Le congé peut être écourté, dans des conditions prévues à l’article L. 1225-52 du code du travail, en cas de diminution importante des ressources du ménage ou, tragiquement, de décès de l’enfant. Dans ces cas également, le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente.
Le cadre existant permet aux parents de faire face aux cas les plus graves concernant leurs enfants. Il est cependant très contraignant pour les familles concernées, ce qui a incité plusieurs salariés ou employés de la fonction publique, informés de la situation d’un parent, à vouloir lui venir en aide par le don de jours de RTT.
Les différents congés prévus actuellement par la législation ne sont pas rémunérés, sauf accord collectif pour les salariés du secteur privé. Toutefois, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 a créé une allocation journalière de présence parentale, servie par les caisses d’allocations familiales, pour les parents qui réduisent leur activité professionnelle pendant plus de quatre mois. Le montant de cette allocation est cependant plafonné à un peu plus de 945 euros par mois pour un couple et son attribution est soumise au respect d’un plafond de revenus.
Les jours non travaillés et rémunérés dans le cadre des accords de réduction du temps de travail antérieurs à la loi du 20 août 2008 sont, dès lors, un moyen de permettre l’absence d’une personne sans perte financière pour celle-ci. C’est donc un choix généreux et logique, de la part des collègues d’un parent, de vouloir mettre à disposition une partie des jours dont ils disposent au-delà des quatre semaines légales de congés payés.
Seules de grandes entreprises ont actuellement mis en place des systèmes de don de jours de RTT, le plus souvent à la demande de salariés. Ainsi, ce sont les entreprises où la négociation professionnelle est la plus active qui offrent à leurs salariés la possibilité de mettre en œuvre ce mécanisme de solidarité. Les salariés des autres entreprises ne disposent d’aucun moyen de faire don des jours de repos dont ils disposent.
Surtout, un tel dispositif ne peut être mis en place, à l’heure actuelle, dans la fonction publique, sauf à sortir de la légalité. Or les cas douloureux qui ont retenu l’attention des médias montrent que cette solution répond concrètement aux besoins des familles et que l’aspiration des collègues de l’un des parents à l’aider est réelle. Ils appellent donc une réponse urgente.
La proposition de loi soumise à notre examen ne vise pas à se substituer aux accords déjà passés au sein des entreprises pour permettre le don de jours de repos. Elle étend simplement cette possibilité à l’ensemble des salariés, sous réserve de l’accord de l’employeur, ainsi qu’à la fonction publique, selon des modalités définies par décret. Elle offre un cadre et des garanties minimales, qui seront susceptibles de précisions ultérieures si la mise en œuvre du dispositif l’impose.
Les modalités du don et les motifs pour lesquels il peut intervenir sont encadrés par la proposition de loi.
L’article 1er ouvre la possibilité, pour tout salarié, de faire don de jours de repos dont il dispose à un de ses collègues ayant la charge d’un enfant gravement malade. Conformément aux dispositions du code du travail, ce don ne peut porter que sur les jours disponibles au-delà de quatre semaines de congés payés. Le don peut donc porter sur les jours correspondant à la cinquième semaine de congés payés et sur les jours compensateurs accordés à certains salariés qui travaillent au-delà de trente-cinq heures hebdomadaires.
Ce don ne peut se faire qu’à partir d’une démarche individuelle et volontaire. Il est soumis à l’accord du chef d’entreprise, en raison de l’incidence du transfert des jours de congés sur l’organisation du travail. Le don se fait pour un collègue déterminé. Il n’y a donc pas de don a priori pour tout collègue susceptible de se trouver dans la situation prévue par le texte. Conformément aux règles générales en matière de don en droit français, celui-ci doit être anonyme et gratuit, c’est-à-dire sans contrepartie. L’anonymat du don sera néanmoins quelque peu relativisé selon la taille de la structure : garanti dans une grande entreprise, il se trouvera nécessairement amoindri dans une PME. L’anonymat et la gratuité protègent le donateur et le donataire, et il conviendra que l’employeur veille à ce que le don volontaire ne devienne pas une obligation imposée à certains salariés ou que le salarié qui reçoit les jours ne soit pas l’obligé de ses collègues donateurs. Je récuse donc le terme de « charité », que l’on a pu lire parfois dans la presse ; il s’agit bien plutôt d’une démarche de partage, entre collègues, des conséquences d’une situation nécessairement injuste, la première des injustices étant la survenue de la maladie.
Concrètement, le don de jours de repos augmente le nombre de jours disponibles pour un salarié ayant la charge d’un enfant gravement malade. Il dispose donc de temps pour être présent auprès de son enfant, sans diminution de salaire ou de droits à retraite. Par ailleurs, dans les entreprises où un compte épargne-temps a été mis en place, les jours de repos donnés seront affectés et pourront donc faire l’objet d’une conversion en argent ou être utilisés pour un départ anticipé à la retraite.
Le mécanisme proposé sera rendu applicable à la fonction publique au travers de l’article 2 de la proposition de loi, qui renvoie à un décret.
La réalité de la situation dans laquelle se trouve une personne du fait de la particulière gravité de la maladie, du handicap ou de l’accident dont a été victime un de ses enfants est attestée par un certificat médical détaillé, établi par le médecin qui suit l’enfant au titre de la pathologie en cause. La proposition de loi ne précise pas qui doit être destinataire de ce certificat, mais il semble logique que ce soit l’employeur, car c’est lui qui est appelé à autoriser les dons de jours de repos.
La proposition de loi déposée par M. Paul Salen et adoptée par l’Assemblée nationale tend d’abord à poser le principe et les principales modalités du don de jours de repos. C’est au sein des entreprises que se négociera une partie des modalités pratiques du don, tenant au rôle des représentants de l’employeur, notamment des services des ressources humaines, ou à l’organisation de l’entreprise. Les dispositions réglementaires prévoiront le détail de l’organisation pour la fonction publique.
La commission des affaires sociales a fait le choix de ne pas retarder encore l’adoption de ce texte et n’a donc adopté aucun amendement. Par conséquent, je vous invite, mes chers collègues, à voter ce texte sans modification. Il ne répond certes pas à toutes les situations, mais même s’il ne devait permettre qu’à quelques enfants malades de bénéficier de la présence de leurs parents à leurs côtés, cela justifierait que nous le votions. (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer en commission des affaires sociales, les parlementaires du groupe CRC sont, comme vous tous, émus par ces femmes et ces hommes qui, confrontés à la maladie grave de leur enfant, à un accident important ou à la fin de vie de celui-ci, se retrouvent dans des situations complexes. En effet, les dispositifs existants, comme les absences pour enfant malade prévues à l’article L. 1225-61 du code du travail ou le congé de présence parentale, présentent d’importants inconvénients : ils sont trop limités dans le temps et insuffisamment rémunérés.
La proposition de loi se fixe donc comme objectif noble de permettre à ces parents, déjà en souffrance psychique, de pouvoir rester plus longtemps auprès de leur enfant pour augmenter ses chances de guérison. En sécurisant juridiquement les dons de jours de repos dans le privé et en étendant le dispositif au public, elle prétend leur éviter la précarité économique.
Comme vous, nous sommes, au groupe CRC, convaincus qu’il convient de mieux accompagner les familles. Le faible nombre de familles concernées chaque année, tout au plus 1 500 par an, nous conforte d’ailleurs dans l’idée que c’est possible.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Dominique Watrin. Toutefois, nous considérons que votre proposition de loi ne permet pas de répondre à ces objectifs et à ces ambitions louables. Elle ne garantit en rien qu’un parent concerné puisse disposer de tout le temps nécessaire pour accompagner autant que de besoin son enfant. Car le don, théoriquement anonyme et gratuit, reposera sur l’aléa et peut-être même sur l’injustice ! La perception du nombre de jours de repos pourra être fonction de la place dans la hiérarchie, du capital de sympathie ou encore du nombre de fois où le salarié aura déjà lui-même cédé des jours de repos. De la sorte, deux salariés d’une même entreprise placés face à des besoins identiques pourraient ne pas bénéficier du même traitement.
L’auteur et les rapporteurs de la proposition de loi citent volontiers comme exemples emblématiques le cas de ce père de famille de chez Badoit qui a pu cumuler 170 jours de repos grâce à la solidarité de ses collègues ou bien, plus récemment, de ce fonctionnaire de police qui avait cumulé la promesse de plus de 150 jours de RTT, mais qui n’a pu en profiter compte tenu de l’état actuel du droit. On évoque aussi volontiers les accords collectifs chez Badoit justement, 2 500 salariés, dans le groupe PSA, 90 000 à 100 000 salariés, ou chez Casino, 73 000 emplois. Mais comment un salarié d’une très petite entreprise confronté à la même souffrance psychique et à la précarité économique pourrait-il cumuler autant de jours de repos et donc de possibilités d’accompagner son enfant ?
Ce qu’il faudrait, c’est créer un vrai droit, garanti à tous et non hypothéqué sur les relations amicales et sociales que l’on a pu tisser ; un vrai droit qui ne dépende pas du bon vouloir des autres salariés, de leur propre état de fatigue ou tout simplement du besoin de prendre la totalité de leurs jours de congés ; un droit qui évite la culpabilisation de l’autre.
Qui plus est, la proposition de loi, et cela nous ennuie quelque peu, prévoit que l’employeur pourrait s’opposer à l’élan solidaire exprimé par des salariés. Autrement dit, on entend créer un droit qui serait doublement putatif, dépendant tout à la fois des collègues de travail et de l’employeur.
Ce n’est pas, mes chers collègues, l’idée que nous nous faisons, pour notre part, du mot « solidarité ». S’il faut effectivement renforcer et sécuriser la solidarité locale, il faut aussi sécuriser la solidarité nationale.
Et je vous le dis, nous n’avons pas de leçon d’humanité à recevoir, notamment de la part de l’auteur de la proposition de loi, qui a déclaré dans la presse que les élus seraient en quelque sorte irresponsables s’ils ne votaient pas cette loi et, plus encore, s’ils avaient l’outrecuidance de déposer des amendements ! À l’évidence, avec de tels messages adressés aujourd'hui aux parlementaires, on imagine ce que sera demain la pression sur les salariés culpabilisés.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ça, c’est sûr !
M. Dominique Watrin. Nous, sénateurs CRC, sommes fiers d’assumer notre responsabilité de législateur. Et c’est notre rôle de parlementaires communistes, de parlementaires de gauche de faire avancer le droit social ! C’est pourquoi, bien que limités par l’article 40 de la Constitution, nous proposerons que soit engagée sans délai une étude de faisabilité. Celle-ci montrerait, j’en suis certain, qu’il est possible, à condition évidemment d’en avoir la volonté politique, de dégager quelques dizaines de millions d’euros pour améliorer le dispositif de l’allocation journalière de présence parentale, en la portant notamment à 90 % du salaire net.
Car il faudra qu’on nous explique ! Le Gouvernement est capable de distribuer 30 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales aux entreprises sans la moindre contrepartie, mais il ne pourrait pas dégager quelques dizaines de millions d’euros pour améliorer le sort de ces parents ?
Enfin, cerise sur le gâteau, c’est aux salariés, déjà en peine, qu’il est demandé ici d’être généreux, la notion de partage s’appliquant uniquement entre salariés. Est-ce faire preuve de dogmatisme que de poser la question de la solidarité verticale ? La vérité, c’est que vous appelez les salariés, les ouvriers, les agents publics, y compris les petites gens, à se substituer à la solidarité nationale, alors qu’ils doivent eux-mêmes faire face à des difficultés. La vérité, c’est que votre proposition de loi, présentée comme généreuse, exonérera totalement les employeurs de leurs responsabilités. Pis, elle va créer, je l’ai dit, des situations d’injustice intolérables entre ceux qui pourront et ceux qui ne pourront pas collecter des jours de repos.
Oui, sécurisons juridiquement les accords collectifs et les démarches individuelles de solidarité ! Mais oui, parce que nous sommes des législateurs responsables, parce que nous sommes garants de l’égalité de traitement entre les citoyens, ayons aussi l’ambition de porter l’exigence d’une solidarité universelle !
Pour toutes ces raisons, le groupe CRC ne votera pas la proposition de loi.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte qui nous est proposé aujourd'hui est la conséquence d’actions généreuses, celles de salariés ayant fait don de leurs jours de repos pour aider un collègue parent d’enfant malade à demeurer auprès de lui pendant sa longue hospitalisation ; M. le ministre et Mme la rapporteur viennent de le rappeler.
Nous devons avant tout nous interroger sur la cause de ces dons. En effet, il existe déjà dans notre droit une panoplie de congés liés à des circonstances familiales.
Certains de ces congés ne sont pas indemnisés. Je pense au congé pour enfant malade d’une durée de trois ou cinq jours par an, qui s’applique dans le cas d’affections relativement bénignes, ou au congé de soutien familial, entre trois mois et un an, pour venir en aide à un membre de la famille atteint d’un handicap ou d’une perte d’autonomie particulièrement grave.
D’autres congés sont indemnisés. C’est le cas du congé de solidarité familiale, d’une durée de trois mois renouvelables, qui permet d’assister un proche souffrant d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital ou en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable. L’indemnité est aujourd'hui de 54,82 euros dans la limite de vingt et un jours ; elle n’est pas cumulable avec d’autres prestations.
Le congé de présence parentale est celui qui semble le plus adapté à la situation qui nous préoccupe. Il est attribué pour une période maximale de quatorze mois et il est indemnisé par la sécurité sociale, sous forme d’une allocation journalière de présence parentale. L’enfant doit avoir moins de vingt ans, le parent doit en assurer la charge effective et le congé peut être renouvelé si nécessaire. L’allocation est de 50,74 euros par jours pour un parent seul et de 42,71 euros pour un couple. Un complément peut être versé par la caisse d’allocations familiales sous forme d’un remboursement de frais de 109,24 euros par mois. J’ajoute que ce remboursement est soumis à un plafond de revenus et tient compte du nombre total d’enfants à charge.
Il est bien évident que ce n’est pas avec les sommes que je viens de citer qu’une personne ou une famille peut vivre, a fortiori avec un enfant malade ou hospitalisé.
Nous savons tous ce qui se passe alors : les parents les moins fortunés – c’est encore plus vrai lorsqu’il s’agit de femmes – utilisent d’autres congés, notamment leurs propres congés maladie. Au demeurant, la situation qu’ils vivent les conduit souvent à avoir eux-mêmes un besoin absolu non seulement de disponibilité, mais aussi de repos. Ces arrangements sont parfaitement compréhensibles, mais ils ne sont pas légaux et peuvent faire courir des risques aux salariés sur le plan professionnel.
Confrontés à des situations dramatiques dans des entreprises, les salariés collègues de parents en difficulté ont mis en œuvre des initiatives généreuses. Ils ont donné une partie de leurs jours de repos pour leur permettre d’être avec leur enfant. Ce sont des gestes remarquables, d’une grande humanité, des gestes fraternels dans un monde que l’on dit trop souvent individualiste et égoïste. En tant qu’êtres humains, ils nous apportent un espoir. En revanche, en tant que législateurs, ils nous interrogent. Comment devons-nous répondre ?
Le texte nous propose une généralisation de ce système. Soit ! Cependant, si les initiatives des salariés ont eu lieu, c’est bien parce que les dispositifs légaux existants ne répondent pas correctement aux besoins et sont insuffisants, surtout sur le plan financier.
Ce sont environ 1 000 à 1 500 familles qui sont concernées chaque année. À combien s’élèverait l’augmentation du montant de l’allocation journalière de présence parentale pour permettre à ces familles de s’occuper de leur enfant gravement malade ? On nous dit que le contexte budgétaire ne se prête pas aux dépenses, qu’il faut au contraire faire des économies ; nous le croyons volontiers. Reste que nous savons aussi que les sommes concernées ici sont très peu de choses au regard des masses budgétaires en jeu et qu’elles auraient une valeur considérable, et à nos yeux peu discutable, pour les familles. C’est donc là avant tout, nous semble-t-il, qu’il faut agir. Un relèvement des plafonds de ressources serait une mesure minimale. J’ajoute que cela aurait un avantage considérable par rapport à ce qui nous est proposé ce soir : la garantie d’exister pour tous, dans les mêmes conditions.
Il est de notre rôle de législateur d’entamer un dialogue sur cette question avec le Gouvernement pour régler cette affaire de manière équitable.
Il me semble, ainsi qu’aux collègues de notre formation politique, qu’il est particulièrement difficile de légiférer en matière de générosité ; vous l’avez vous-même noté voilà quelques instants, monsieur le ministre. On peut, et c’est notre cas, souscrire pleinement aux initiatives individuelles ou collectives, je le répète, généreuses des salariés, ne pas vouloir les empêcher, bien entendu, et même les soutenir. Toutefois, notre rôle de législateur se situe au-delà. Il nous appartient de travailler pour l’intérêt général et de faire en sorte que chacun dispose, en vertu de la loi, des mêmes droits et des mêmes devoirs. Or le texte qui nous est proposé ne répond pas à cette obligation.
Permettez-moi de faire quelques observations.
Il y a d’abord une évidence : le salarié parent qui travaille dans une entreprise de 500 salariés – M. Watrin l’a souligné – obtiendrait vraisemblablement beaucoup plus de journées que celui qui travaille dans une entreprise de 30 personnes. Le dispositif proposé est donc structurellement biaisé. Nous ne pouvons pas inscrire dans la loi une telle inégalité, qui serait l’un des fondements du texte.
Comment l’anonymat du don, surtout dans une PME, serait-il garanti ? Le salarié qui reçoit devrait-il alors se sentir redevable auprès des autres salariés ? Ne risque-t-on pas d’assister à des pressions, à des conflits si des salariés ne peuvent pas, voire ne veulent pas donner des jours de repos ? Certains ne risquent-ils pas d’être rétifs si leur générosité a pour eux des conséquences fiscales et sociales négatives ? D’autant que le texte ne fixe comme seule borne que les vingt-quatre jours de congés annuels. N’y a-t-il pas alors un risque de stigmatisation, ce qui irait à l’encontre des objectifs visés ?
L’idée d’une chaîne de solidarité est très belle, mais nous devons être très attentifs aux difficultés que je viens de soulever.
Par ailleurs, comment s’organisera concrètement l’opération ? Les salariés ont des métiers différents. Ils ne sont pas interchangeables.
En outre, comment seront formalisés la demande du salarié et l’accord de l’employeur ? La réponse à cette question n’est pas sans importance en cas d’accident du travail du salarié offrant des jours de repos.
Le texte de la proposition de loi ne prévoit pas la signature d’un accord. Pourtant, c’est bien par ce canal que sont intervenues les opérations de dons ayant déjà eu lieu, par exemple dans l’entreprise Merial ou l’entreprise Badoit dans la Loire.
L’employeur apportera-t-il une participation sous une forme restant à définir ? Laquelle ? Des jours de congé supplémentaires ? S’il n’y a pas d’accord, ce point reste soumis à sa seule bonne volonté, même si personne n’en doute. Mais, surtout, en l’absence d’accord, nous restons dans le flou : un mouvement spontané, généreux, mais aux conséquences juridiques et pratiques imprévisibles.
Enfin, pour les fonctions publiques, le texte de la proposition de loi prévoit un décret. C’est reconnaître ainsi que nous interviendrions aux limites du domaine réglementaire.
Au total, nous constatons que les élans de générosité des salariés pour soutenir des parents d’enfant malade suscitent l’émotion et le soutien non seulement de nos compatriotes, mais aussi des médias. Nous recevons cela, en tant que législateurs, comme un appel à agir. Nous devons donc nous garder de notre premier mouvement, qui nous pousse naturellement vers la générosité. Jusqu’à présent, le don de jours de repos s’est effectué dans les entreprises, par voie d’accord, de façon ponctuelle et sans intervention législative. Au demeurant, rien ne l’interdit.
Pour autant, cette voie, remarquable sur le plan humain, n’est, je le répète, pas satisfaisante sur le plan juridique. De surcroît, elle n’est pas vraiment généralisable. Elle pourrait même mettre en péril les dispositifs existants, alors qu’il conviendrait au contraire de les renforcer. Il faudra d’ailleurs bien s’atteler à cette tâche, et nous devrons tout mettre en œuvre pour travailler sur ce volet de la protection sociale, afin de le faire avancer.
Compte tenu de toutes ces interrogations, le groupe socialiste s’abstiendra.
M. le président. La parole est à M. Gérard Roche.
M. Gérard Roche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de vous donner la position du groupe UDI-UC sur la proposition de loi, je souhaite revenir sur la situation à laquelle elle envisage d’apporter, en partie seulement, une solution.
Nous évoquons ici le cas d’un enfant de moins de vingt ans atteint d’une maladie grave qui va nécessiter une hospitalisation de longue durée dans un service hospitalier très hautement spécialisé et souvent très éloigné du domicile des parents. L’enfant souffre de sa maladie, des soins douloureux qui lui sont prodigués ou d’une immobilisation qui lui est imposée, et ses parents pensent que leur présence constante auprès de lui atténue ce traumatisme.
Face à cette situation, si les deux parents travaillent, on sait que l’un des deux – souvent la mère – quittera son emploi, ce qui aura pour conséquence le risque de perdre cet emploi et, en tout état de cause, la perte de revenus.
Dans le cas d’une famille monoparentale, la cessation d’activité du parent est quasiment impossible, et il ne peut alors compter que sur ses droits à congés pour être présent auprès de son enfant.
Ces parents, seuls ou en couple, qui ne peuvent se priver de leur salaire s’arrangent ainsi pour cumuler les congés non encore pris ou pour anticiper sur ceux à venir. Dans certains services, en particulier chez les fonctionnaires hospitaliers ou les policiers, ils cumulent leurs jours de récupération liés à des services de nuit, de week-end et de présences exceptionnelles. Malgré tous ces efforts et l’aide d’autres membres de leur famille, ils n’arrivent pas toujours à assurer auprès de leur enfant la présence permanente dont on sait qu’elle contribue grandement à l’amélioration de l’état de santé de ce dernier et, on l’espère, à sa guérison.
Aux termes de la proposition de loi, afin d’augmenter la durée de présence des parents auprès de leur enfant, certains de leurs collègues pourront, s’ils le souhaitent, leur donner des jours de congés de RTT, assurant ainsi le travail à leur place. On comprend bien qu’il ne sera pas toujours possible, dans certaines entreprises, de remplacer quelqu’un à son poste, la proposition ne pourra alors s’appliquer. Laissons au bon sens de chacun, salariés et employeurs, l’intelligence d’apprécier la possibilité ou non de le faire !
Je rappelle au passage qu’il est interdit qu’un salarié prenne moins de quatre semaines de congés par an ; cette proposition de loi ne changera rien à cette interdiction. Il s’agira donc, pour chaque salarié donateur, d’offrir quelques jours au parent concerné, au gré de ses souhaits et de ses possibilités. C’est évidemment l’addition de ces quelques jours donnés par plusieurs salariés qui rendra cette initiative réellement efficace. Cela ne concerne donc pas les petites entreprises ayant peu d’employés, le nombre de jours donnés cumulés n’étant pas suffisamment important pour être significatif.
Combien de cas seraient-ils concernés chaque année par les dispositions de la proposition de loi ? Les statistiques hospitalières évoquent environ 1 800 cas par an. Tous les parents concernés ne vont pas être des salariés. Tous les parents concernés ne vont pas être des parents isolés sans famille proche et coopérante. Tous les parents concernés ne vont pas être éloignés des lieux de soin de leur enfant.
Ces situations resteront donc des exceptions. C’est donc par quelques dizaines qu’on comptera les parents qui auront besoin de ces dons de jours et par quelques centaines les salariés qui seront amenés à les leur donner. Ne traitons pas ce sujet comme s’il concernait des millions de personnes !
Je trouve à ce texte bien des vertus humaines : on est là devant des dispositions qui vont permettre à certaines personnes d’en aider une autre, dans un moment particulièrement douloureux et stressant. On permet à des femmes et à des hommes de manifester leur empathie, leur amitié, leur générosité et leur solidarité à l’égard d’une ou d’un collègue malheureux et désemparé. Rien n’est imposé, ni aux salariés ni aux employeurs !
Je sais que certains ont signalé l’inégalité de traitement entre petites et grandes entreprises. Je sais que l’on peut être accusé de substituer les solidarités personnelles au droit public et social. Mais nous souhaitons, par ce texte, donner la priorité au pragmatisme sur le dogmatisme et laisser, pour une fois, les sentiments s’exprimer en permettant un geste d’humanité entre les personnes qui travaillent et vivent ensemble. C’est la raison pour laquelle je vous encourage, mes chers collègues, à voter le texte. C’est en tout cas ce que fera notre groupe. (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi concerne les parents d’un enfant gravement malade qui travaillent et qui ont besoin de dégager du temps pour l’accompagner durant cette période particulièrement douloureuse. C’est un objectif qui, je le sais – j’en ai eu la confirmation lors de nos échanges en commission –, est partagé sur toutes les travées de cet hémicycle.
Ce dispositif concerne en moyenne 1 500 familles par an. Il s’agit donc de situations exceptionnelles. Ces maladies très lourdes ne laissent malheureusement pas souvent l’espoir d’une issue heureuse et se traduisent par des périodes de grande détresse au cours desquelles les médecins attestent qu’une présence affective est indispensable.
Spontanément et à plusieurs reprises, il est arrivé que des salariés décident de faire don de jours de repos à l’un de leurs collègues afin que celui-ci puisse passer plus de temps auprès de son enfant. Il s’agit d’un geste de générosité collective spontané, mais qui ne manque pas de nous interroger, au moins à deux égards.
Tout d’abord, cette situation souligne que la solidarité nationale, organisée par la loi, est incomplète sur ce point et nécessite d’être améliorée.
Il existe déjà en droit du travail, comme l’a rappelé Mme la rapporteur, plusieurs dispositifs permettant de prendre soin d’un enfant malade : absence pour enfant malade – trois ou cinq jours par an –, passage à temps partiel de droit, congé de présence parentale. En tout, le nombre maximal de jours de congés dont le salarié peut bénéficier au titre du congé de présence parentale est de 310 jours ouvrés, soit quatorze mois, dans une période dont la durée est fixée, pour un même enfant et par maladie, accident ou handicap, à trois ans. Cependant, ce cadre juridique est contraignant pour les familles et les rémunérations prévues – les chiffres viennent d’être cités – empêchent, de fait, beaucoup de parents aux revenus modestes d’avoir recours à ces congés prévus par la loi.
C’est cette insuffisance qui a poussé certains salariés à se substituer généreusement et spontanément à la solidarité nationale. Or c’est cette substitution que la proposition de loi nous suggère aujourd’hui de faciliter, en lui offrant un cadre légal.
Certains de nos collègues trouvent cela choquant et en appellent à une réforme d’ampleur de la solidarité nationale pour les parents d’un enfant malade. C’est également ce que je souhaite à terme. Pour autant, doit-on refuser tout aménagement transitoire ? Que proposer en attendant à ces 1 500 familles qui se trouvent dans des situations à la fois très douloureuses et exceptionnelles ?
Ensuite, ce geste de générosité collective constaté dans plusieurs entreprises soulève la question de l’instauration d’une inégalité de fait entre les travailleurs. En effet, tous les travailleurs ne sont pas salariés. En outre, parmi les salariés, la négociation de tels arrangements ne semble en l’état possible que dans des entreprises assez grandes. Elle a par ailleurs échoué, à plusieurs reprises, à se mettre en place dans le secteur public.
La proposition de loi, je le concède, ne répond pas à toutes ces interrogations. Toutefois, je constate que, en offrant un cadre à ce qui relevait pour l’instant de l’improvisation, elle permettra d’élargir de fait le nombre de salariés pouvant bénéficier du dispositif, notamment tous les salariés du secteur public, au sein duquel le don de jours de repos, autorisé pour l’instant dans le cadre d’un accord collectif dans les entreprises du secteur privé, n’était pas prévu, et donc légalement impossible.
N’oublions pas que la proposition de loi est sérieusement encadrée, puisqu’elle ne remet pas en cause le droit fondamental à quatre semaines de congés payés et qu’elle garantit par ailleurs le principe de l’anonymat du don.
En l’occurrence, ma conviction est que le mieux est l’ennemi du bien. Oui, la solidarité nationale a les moyens d’améliorer ce dispositif ! Oui, cela serait utile ! Mais cela se fera-t-il effectivement et, si oui, quand ?
Pour notre part, nous sommes pragmatiques. Nous connaissons la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui le Gouvernement, qui mobilise son énergie à la recherche de milliards d’euros. Ce genre de réforme d’ampleur sera difficile à mettre en œuvre et devra sans doute attendre des jours meilleurs.
De manière générale, je suis favorable aux initiatives parlementaires quand elles améliorent la situation. Ces initiatives ne sont jamais parfaites – celle-ci ne l’est pas non plus, mais vous savez également que nous avons des possibilités restreintes –, mais cette proposition de loi améliore la situation des parents confrontés à la maladie d’un enfant. Il sera toujours possible, par la suite, d’adopter ce dispositif dans le cadre d’un projet de loi.
Les récentes élections municipales nous ont rappelé, encore une fois, combien nos concitoyens souhaitaient que les responsables politiques sortent de leur bulle et soient beaucoup plus à l’écoute de leurs problèmes de la vie quotidienne et de leurs souffrances. Quand un formidable élan de générosité et de solidarité se manifeste dans la société civile, nous avons le devoir de le relayer et, à tout le moins, de lui donner la possibilité de s’exprimer légalement.
Monsieur le ministre, vous avez indiqué que vous vous en remettiez à la sagesse du Sénat. Pour sa part, en toute conscience et après avoir mûrement réfléchi, le groupe écologiste, pour les raisons que j’ai exposées, votera en faveur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. - M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une initiative généreuse a inspiré la proposition de loi dont nous discutons à présent ; depuis janvier 2012, date à laquelle elle a été adoptée par l’Assemblée nationale, plusieurs entreprises ont mis en place un mécanisme de dons de jours de repos entre salariés. Aujourd’hui, c’est, d’une part, l’occasion de saluer ces initiatives de solidarité et, d’autre part, de proposer un dispositif légal permettant de les étendre.
Ces expériences témoignent de l’insuffisance du dispositif dont bénéficient actuellement les parents d’un enfant gravement malade. Le sujet est d’importance, puisque 1 500 enfants environ seraient en permanence en phase terminale en France.
Pour avoir exercé durant dix ans en chirurgie infantile, je peux témoigner du drame que représente pour les parents le fait de ne pas pouvoir être présent continuellement aux côtés de leur enfant ; c’est un drame aussi pour l’enfant, qui, même s’il est entouré par le personnel médical et paramédical, ne retrouve pas forcément auprès d’eux le bien-être que ses parents peuvent lui procurer. C’est pourquoi des initiatives ont été prises pour permettre aux parents de rester le plus longtemps possible aux côtés de leur enfant malade. Je pense par exemple au CHU de Dijon, que vous connaissez bien, monsieur le ministre.
Si des salariés se sont mobilisés, c’est parce que le congé de présence parentale n’offre pas suffisamment de garanties. Ce congé n’est pas rémunéré, mais il peut être accompagné d’une allocation journalière de présence parentale, dont les modalités techniques viennent d’être précisées. C’est cette insuffisance qui a incité ces salariés à être solidaires.
Le texte propose de pallier les manques de la législation actuelle en se fondant sur ces initiatives. On compléterait ainsi la solidarité nationale par une solidarité au sein de l’entreprise ou des collectivités publiques. Il nous offre donc l’occasion d’améliorer la situation des parents d’un enfant gravement malade sans toucher aux finances publiques.
La proposition de loi semble répondre à un réel besoin.
S’il est démontré que les expériences de solidarité sont possibles sans l’intervention du législateur – c’est votre position, monsieur le ministre –, force est de constater que seules de grandes entreprises ont les moyens de les mettre en œuvre. En outre, comme Mme la rapporteur l’a souligné, les agents de la fonction publique ne disposent pas de moyens légaux pour mettre en place un tel mécanisme. Ces lacunes ont suscité une certaine émotion, qui s’est notamment manifestée par une pétition visant à soutenir l’adoption de cette proposition de loi.
L’Assemblée nationale a largement amélioré le texte initial, qui compte désormais deux articles. Elle a en particulier précisé le caractère anonyme et gratuit du don – c’est très important –, ce qui permet une protection du donateur et du donataire, conforme au statut que l’on trouve dans d’autres domaines. Nous en discutons souvent, madame la rapporteur, au sein du conseil de surveillance de l’Agence de la biomédecine. Le respect des périodes minimales de congé pour le donateur, le maintien de la rémunération et des droits liés à l’ancienneté pour le bénéficiaire constituent d’autres garanties importantes.
L’article 2 prévoit l’extension du dispositif aux agents de la fonction publique, ce qui me paraît capital.
La proposition de loi, qui a été inspirée par plusieurs initiatives spontanées, pose néanmoins un certain nombre de questions et ne permettra évidemment pas de régler la totalité du problème.
Se pose ainsi la question de l’intervention du législateur dans un domaine où la solidarité s’est construite sans la loi. Il ne faut toutefois pas négliger la puissance symbolique d’un tel texte, qui prévoit que, en ce domaine, la solidarité se joue au niveau de l’entreprise. La proposition de loi, et c’est la critique la plus forte qu’on puisse lui adresser, crée un risque d’inégalité en fonction de la taille de l’entreprise et, au sein d’une même structure, en fonction du capital de sympathie de la personne concernée – il y a là un véritable problème – ou de sa place dans la hiérarchie. Elle permet la solidarité, mais ne l’assure pas. Elle n’offre pas de solution certaine et prévisible pour les parents concernés.
Reste que la proposition de loi répond à un besoin immédiat, en particulier, je le répète, pour les agents de la fonction publique. Même si elle ne comble pas les lacunes du dispositif actuel, elle contribuera indéniablement, dans la limite que nous impose l’article 40 de la Constitution, à améliorer la situation de parents qui vivent un moment particulièrement difficile. C’est pourquoi nous serons très nombreux au sein du groupe du RDSE à lui apporter notre soutien. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Philippe Bas. Très bien !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary.
M. René-Paul Savary. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, on le sait, accompagner un enfant malade est une épreuve que doivent malheureusement endurer certains parents. Ces parents – ces héros ! – n’ont pas assez de leurs jours de repos légaux pour être suffisamment présents auprès de leur enfant et pour le conduire à ses activités, à ses soins ou à ses consultations médicales, à toute heure du jour et, parfois, malheureusement, de la nuit. Cette proposition de loi est donc indispensable. Son adoption devrait même être une évidence tant nos concitoyens sont généreux dans ces situations difficiles.
Bien sûr, il existe aujourd'hui, cela a été rappelé, l’allocation journalière de présence parentale, mais elle est contingentée. Un couple peut disposer au maximum de 942 euros par mois. À la peine d’avoir un enfant gravement malade viennent donc s’ajouter les difficultés financières.
Des initiatives de dons de RTT ont été prises dans divers départements et entreprises, mais, faute d’encadrement légal, de nombreux acteurs privés ou publics refusent parfois de mettre en œuvre ce procédé qui fait du don d’heures de RTT ou de récupération au parent d’un enfant gravement malade une action collective déterminante.
Cette proposition de loi est d’autant plus souhaitable qu’elle n’impose pas une généralisation de la pratique. Seuls sont concernés les salariés ayant un enfant de moins de vingt ans atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité. N’ayez donc aucune crainte, monsieur le ministre, son effet sera particulièrement limité.
Cette possibilité, qui offrirait une plus grande souplesse aux acteurs économiques, serait ouverte aux salariés même en l’absence d’un accord collectif et ne coûterait rien aux employeurs. Dans une période où l’on recherche la compétitivité, cet aspect mérite d’être souligné. Enfin, ce don de RTT serait effectué de manière anonyme par les salariés.
Cet acte de solidarité me paraît donc présenter toutes les garanties nécessaires pour pouvoir être inscrit dans le cadre de la loi, d’autant qu’il peut devenir un véritable projet d’entreprise, bien entendu dans celles qui ont taille humaine. Aider un parent qui a un enfant gravement malade, c’est permettre à tous les salariés de se souder face à une difficulté, de mieux se connaître, de tisser des relations différentes, plus humaines que les simples relations de travail. Au final, une telle solidarité devrait conforter l’esprit d’équipe au sein de l’entreprise.
Notons-le, quel bonheur d’examiner une proposition de loi qui n’a pas de répercussion financière pour nos concitoyens ou pour nos entreprises ! Nous serions tous ravis, j’en suis sûr, monsieur le ministre, si nous en avions plus souvent l’occasion. Ce texte est d’autant plus un bonheur que la solidarité dans notre pays est malheureusement financée à crédit. Songez à la dette de la protection sociale, qui est étalée d’année en année, transférée à une caisse d’amortissement et laissée aux générations futures !
Permettez-moi de rappeler, puisque c’est M. Raffarin qui préside la séance aujourd’hui, l’instauration de la journée de solidarité. Même si elle a fait grincer quelques dents au départ, cette journée s’est généralisée. Un jour de RTT – au départ, il s’agissait du lundi de Pentecôte – est désormais travaillé, dans les entreprises et dans les collectivités, ce qui permet de financer la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées, à hauteur de 2 milliards d’euros. Voilà qui n’est pas négligeable !
Cette journée étant acceptée par nos concitoyens, peut-être pourrait-on en étendre le principe ? Il a ainsi été proposé de financer la protection sociale à l’aide d’une seconde journée de solidarité et de mettre à contribution l’ensemble des salariés et des non-salariés, afin notamment de financer la dépendance.
À cet égard, monsieur le ministre, il me semble qu’un projet de loi sur la dépendance avait été annoncé. Pourriez-vous nous donner des précisions et nous indiquer s’il nous sera soumis prochainement, même si un tel texte ne relève pas directement de votre ressort ? Nous avions commencé à travailler sur le sujet, notamment avec les présidents de conseil général. J’ai moi-même eu l’occasion, avec mon ami Gérard Roche, de participer à un certain nombre de discussions, car le texte plaçait les départements au centre du dispositif. Les conseils généraux – les futurs conseils départementaux – étant appelés à disparaître, il faudra revoir le dispositif envisagé pour l’accompagnement de la dépendance.
J’en reviens à la solidarité, qui est notre propos d’aujourd’hui.
La solidarité étant essentielle, cette proposition de loi est utile. Elle est même l’expression du modèle français : il faut une loi pour permettre aux salariés d’avoir un comportement civique et solidaire. Notre société est en effet si complexe qu’elle a besoin d’un cadre, de normes.
Cette proposition de loi permettra de mettre en œuvre une action humaine déterminante pour certaines familles. Voilà pourquoi, vous l’aurez compris, je la soutiens avec vigueur. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Bas.
M. Philippe Bas. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai bien écouté les différentes interventions. L’essentiel me paraît avoir été dit dans ce débat.
Pour ma part, je ne voudrais pas qu’on oppose générosité et solidarité. Les deux sont nécessaires. Il y a, au titre de la solidarité, le congé de présence parentale et l’allocation journalière de présence parentale. L’un et l’autre sont indispensables. Il y a, au titre de la générosité, des expérimentations, des innovations sociales, qu’il s’agit tout simplement de réguler par ce texte.
La cause est noble, elle est légitime. Chacun l’a dit à cette tribune, y compris ceux qui ont émis des réserves sur le texte. Au fond, toutes ces réserves sont opposables à tout geste de générosité, à toute action philanthropique ou caritative, qui, par essence, postule qu’il ne s’agit pas de droit, qu’il ne s’agit pas non plus de redistribution sociale généralisée, mais qu’il s’agit d’actions laissées à l’initiative et à la liberté de chacun afin de colmater les brèches de notre système social. C’est ainsi que, à côté du RSA, nous avons toujours les Restaurants du cœur. De la même façon, nous aurons, à côté du congé de présence parentale, le don de jours de RTT.
Ce don est libre, spontané, volontaire. Il s’agit d’un « don éthique », pour reprendre une expression qui est plutôt utilisée en matière de don du sang par exemple. Il s’agit d’un don gratuit, anonyme, encadré par un certain nombre de dispositions afin d’éviter qu’on fasse n’importe quoi lors de ces expérimentations et de ces innovations sociales.
Il est toujours nécessaire d’organiser le bénévolat quand il existe. On ne peut pas imaginer une société qui, grâce à la performance de ses systèmes sociaux, pourrait se passer de l’entraide et de gestes de fraternité entre ses membres. C’est tout le sens, je crois, de cette proposition de loi.
Ce texte n’est pas idéal, mais il est vrai que si notre système de protection sociale permettait, grâce au congé de présence parentale et à l’allocation journalière de présence parentale, de faire face à toutes les situations de détresse familiale causées par l’empêchement de la mère ou du père…
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Les deux parents doivent être présents en phase terminale !
M. Philippe Bas. … d’accompagner un enfant gravement malade lors de ses soins ou d’être à la maison lors de sa convalescence ou pour un traitement, nous n’aurions pas besoin de débattre de cette proposition de loi. C’est bien qu’il manque quelque chose.
J’ai moi-même essayé voilà quelques années d’apporter ma pierre à l’amélioration de ce régime. Force est de constater que si la loi de 2006 que j’avais eu l’honneur de présenter au nom du gouvernement de l’époque a amélioré la situation en matière d’allocation journalière de présence parentale, le nombre de bénéficiaires – il est passé de 3 600 à la fin de l’année 2004 à 5 747 en 2013 – est encore très insuffisant par rapport au nombre de familles ayant besoin de cette aide.
Si le Gouvernement nous proposait d’améliorer le régime de solidarité, j’y serais pour ma part tout à fait ouvert, mais ce n’est pas ce qu’il fait. Il se contente d’émettre des réserves sur la proposition de loi, sans pour autant nous proposer de solution pour permettre aux familles en souffrance de faire face à leurs difficultés extrêmes. En l’absence de solution alternative, il n’y a pas vraiment de bonne raison de différer l’adoption du texte.
Bien sûr, on pourra dire qu’il manque des précisions ici ou là. Le dispositif proposé reposant sur la bonne volonté des uns et des autres, l’employeur pourra refuser d’accorder le congé, comme pour toute journée de réduction du temps de travail ou pour tout congé, en arguant que la production serait compromise si le salarié s’absentait. Le congé de présence parentale en revanche, lui, est de droit. Il suffit d’informer l’employeur quarante-huit heures à l’avance.
Oui, le système de solidarité présente des avantages ! Pour autant, même si le dispositif qui nous est proposé est imparfait, s’il n’est pas général, s’il ne repose que sur l’entraide des salariés entre eux et s’il ne s’appliquera pas à l’aide que peuvent apporter des retraités – certains le font d’ailleurs très généreusement – dans ce type de situation, même si, à l’évidence, il ne couvrira pas toutes les situations dans de bonnes conditions, même si on peut formuler toutes sortes d’objections, ce ne sont pas des raisons pour refuser de l’adopter.
Je souhaite que nous ne tirions pas argument de telle ou telle imperfection du texte pour adopter des amendements qui n’auraient pas d’autre effet, en réalité, que d’imposer de trop longs délais, puisque la proposition de loi devrait alors être réexaminée à l’Assemblée nationale. Ce serait tout de même dommage !
Mes chers collègues, nous ne sommes pas en présence d’une entorse à nos grands principes de solidarité. Nous sommes en présence d’un texte inspiré par un grand humanisme et qui n’a pas la prétention, malheureusement, de faire cesser des souffrances qu’il permettra seulement, en toute modestie, de mieux accompagner. Il faut donc l’adopter sans hésiter et sans l’amender. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. François Rebsamen, ministre. Je tiens à remercier les orateurs de la qualité de leurs interventions, qui ont précisé le sens qu’il fallait donner à cette proposition de loi. Je crois que tout a été dit. J’ajouterai simplement, après les envolées lyriques de Philippe Bas, que l’acte de solidarité qui a inspiré la proposition de loi s’est produit alors qu’elle n’existait pas encore. L’adoption de ce texte généralisera à l’ensemble des entreprises la possibilité d’accomplir des actes de solidarité similaires.
J’ai tout de même un regret à exprimer. L’employeur n’est pas appelé à participer à cette forme de solidarité ; peut-être est-ce d'ailleurs pour cette raison que les principales organisations patronales ne voulaient pas en entendre parler. Cependant, je le dis à nouveau, la position du Gouvernement est de s’en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à permettre le don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade
Article additionnel avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 3, présenté par M. Watrin, Mmes David, Cohen et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant le coût pour la protection sociale et les avantages pour les assurés sociaux d’une disposition portant l’allocation journalière de présence parentale à 90 % du salaire précédemment versé par l’employeur au parent bénéficiaire dudit congé, sans toutefois que le montant de cette allocation puisse être inférieur au seuil de pauvreté.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Je voudrais moi aussi me féliciter de la qualité du débat en séance publique. En commission, nos arguments avaient suscité une levée de boucliers.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Pas de ma part !
M. Dominique Watrin. On nous a pratiquement reproché de manquer d’humanité et d’être des dogmatiques bornés. J’observe cependant que certains de nos arguments ont été partiellement repris par le ministre ainsi que par des orateurs appartenant à d’autres groupes. Nous avons donc joué un rôle utile pour faire avancer le dossier.
Notre but n’est pas de casser la proposition de loi, mais de rendre le dispositif universel pour créer des droits pour tous. La précarité économique ne doit pas s’ajouter à la souffrance psychologique !
Nous n’opposons pas – je le redis parce que je crois qu’il y a un malentendu – la solidarité individuelle et locale, qui peut se manifester au sein de l’entreprise dans le cadre d’accords collectifs, et la solidarité nationale. Cependant, force est de constater – je ne vais pas refaire ma démonstration concernant les grandes entreprises – qu’il restera un vide si la proposition de loi était adoptée en l’état. Tout le monde ne sera pas sur un pied d’égalité.
Nous ne partons pas de rien en matière de solidarité nationale. Comme cela a été rappelé par plusieurs orateurs, il existe déjà le congé de présence parentale et l’allocation journalière de présence parentale. Appuyons-nous sur ces dispositifs. Nous avons constaté leurs insuffisances, mais il est possible de travailler sans attendre à leur amélioration. Ces deux dispositifs permettent de bénéficier de 310 jours de congés renouvelables sur une période de trois ans.
Le seul problème de l’allocation journalière de présence parentale, c’est qu’elle est plafonnée à 945 euros par mois pour un couple. Notre amendement vise donc à inscrire dans la proposition de loi le principe d’une revalorisation sensible de cette allocation, qui serait portée à 90 % du salaire net. C’est parce que nous sommes limités par l’article 40 de la Constitution que nous nous contentons de demander un rapport. J’espère toutefois, au vu de ce qui a été dit, qu’il ne sera pas nécessaire d’attendre six mois pour que notre proposition soit mise en œuvre ; le collectif budgétaire qui sera présenté au mois de juin pourrait en être l’occasion.
C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter notre amendement et à demander au Gouvernement d’agir au plus vite.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il ne m’est jamais venu à l’idée de vous reprocher de défendre vos convictions en matière de solidarité nationale. Je reconnais votre constance à cet égard. Les débats en commission ont d’ailleurs été très respectueux et très sereins.
Cela étant, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable. L’adoption de votre amendement modifierait la proposition de loi et entraînerait donc son renvoi à l’Assemblée nationale, puisque la procédure accélérée n’a pas été engagée.
M. Roger Karoutchi. Le texte ne reviendrait au Sénat que dans un an !
Mme Catherine Procaccia. Ou peut-être même deux !
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Le dispositif prévu par la proposition de loi peut tout à fait n’être que transitoire, si le Gouvernement prend l’engagement de chercher un moyen d’améliorer la situation. Il doit même être transitoire, car les familles supportent des coûts très élevés : il faut parfois se rendre pendant des mois dans une ville éloignée, et donc prévoir la garde des autres enfants, d’autant que la présence des deux parents peut être nécessaire, par exemple lorsque l’enfant malade est en fin de vie. Or, ne rêvons pas, dans le contexte actuel, il sera difficile d’augmenter l’allocation journalière de présence parentale.
Philippe Bas l’a bien dit, il faut adopter cette proposition de loi rapidement et en l’état.
M. Roger Karoutchi. Oui !
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Si les temps administratif et législatif sont longs, le temps de la maladie peut quant à lui être très court. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Rebsamen, ministre. Monsieur Watrin, nous avons entendu vos arguments, et personne ne vous fait ici le moindre procès d’intention. L’article 40 de la Constitution n’a d’ailleurs même pas été invoqué.
Je pense moi aussi que le mieux serait que vous retiriez votre amendement. Nous en avons compris le sens ; j’ai d'ailleurs insisté moi-même sur les questions que soulève cette proposition de loi.
M. le président. Monsieur Watrin, l'amendement n° 3 est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Maurice Vincent, pour explication de vote.
M. Maurice Vincent. Je suis un élu du département de la Loire, où se trouve la source de l’eau Badoit ; je m’exprime d'ailleurs aussi au nom de Jean-Claude Frécon, qui partage mon sentiment.
Même si la proposition de loi est imparfaite, il est souhaitable, pour les quelques familles confrontées à de graves difficultés, qu’elle soit adoptée rapidement. C'est pourquoi je ne prendrai part au vote sur aucun des amendements. Je tiens toutefois à souligner à mon tour que, comme vient de le dire Mme la rapporteur, le dispositif proposé ne saurait être que transitoire, compte tenu de ses imperfections. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Catherine Procaccia. Bravo !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 3.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 1er
(Non modifié)
La sous-section 2 de la section 4 du chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail est ainsi modifiée :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Congés pour maladie d’un enfant » ;
2° Il est ajouté un paragraphe 3 ainsi rédigé :
« Paragraphe 3
« Don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade
« Art. L. 1225-65-1. – Un salarié peut, sur sa demande et en accord avec l’employeur, renoncer anonymement et sans contrepartie à tout ou partie de ses jours de repos non pris, qu’ils aient été affectés ou non sur un compte épargne temps, au bénéfice d’un autre salarié de l’entreprise qui assume la charge d’un enfant âgé de moins de vingt ans atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants. Le congé annuel ne peut être cédé que pour sa durée excédant vingt-quatre jours ouvrables.
« Le salarié bénéficiaire d’un ou plusieurs jours cédés en application du premier alinéa bénéficie du maintien de sa rémunération pendant sa période d’absence. Cette période d’absence est assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits que le salarié tient de son ancienneté. Le salarié conserve le bénéfice de tous les avantages qu’il avait acquis avant le début de sa période d’absence.
« Art. L. 1225-65-2. – La particulière gravité de la maladie, du handicap ou de l’accident mentionnés au premier alinéa de l’article L. 1225-65-1 ainsi que le caractère indispensable d’une présence soutenue et de soins contraignants sont attestés par un certificat médical détaillé, établi par le médecin qui suit l’enfant au titre de la maladie, du handicap ou de l’accident. »
M. le président. L'amendement n° 2, présenté par MM. Le Menn et Jeannerot, Mmes Alquier, Campion, Claireaux, Demontès et Bordas, MM. Cazeau, Daudigny et Godefroy, Mmes Emery-Dumas, Génisson, Ghali et Meunier, MM. Kerdraon, Labazée, J.C. Leroy, Poher et Vergoz, Mmes Printz, Schillinger et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
1° Première phrase
Après les mots :
jours de repos
insérer les mots :
et jours de congés prévus à l’article L. 3141-1
et après le mot :
enfant
insérer les mots :
ou d’un jeune
2° Dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Les jours de congés cédés ne peuvent avoir pour effet de réduire la durée du congé pris en deçà de vingt-quatre jours ouvrables.
II. – Alinéa 7, deuxième phrase
Remplacer les mots :
Cette période d’absence
par les mots :
Celle-ci
III. – Alinéa 8
Après le mot :
enfant
insérer les mots :
ou le jeune
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Il s’agit d’un amendement de précision, qui comporte en outre quelques éléments rédactionnels. Nous en avons déjà débattu ce matin en commission ; si ce qui m’a été répondu alors m’est répété, j’adopterai sans doute la même position.
Cet amendement vise à établir clairement la distinction entre la notion de jours de repos, qui renvoie aux jours acquis par le salarié en fonction de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise – jours de récupération, jours d’aménagement et de réduction du temps de travail, etc. –, et la notion de congés payés. Cette dernière, partie intégrante de l’ordre public social, est strictement encadrée par le droit de l’Union européenne en matière de durée minimale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous avons en effet déjà discuté de cet amendement en commission.
La proposition de loi indique clairement que le don de jours de congés ne s’applique que pour la cinquième semaine de congés éventuelle ou les jours de RTT. La durée de vingt-quatre jours ouvrables est donc incompressible.
Vous proposez également une modification sémantique consistant à faire référence au jeune en plus de l’enfant. Nous avons choisi de nous en tenir au terme « enfant », qui est celui utilisé en matière de prestations sociales. Il y a des enfants mineurs et des enfants majeurs. Le dispositif s’appliquera aux enfants de moins de vingt ans. Nous pensons en effet que, même si la présence parentale peut-être nécessaire au-delà de cet âge, elle l’est tout de même davantage auparavant ; c’est d'ailleurs ce que disent les équipes soignantes.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Rebsamen, ministre. Monsieur Le Menn, j’ai examiné attentivement votre amendement, qui apporte effectivement un certain nombre de clarifications.
Il tend ainsi à prévoir que non seulement les jours de repos, mais aussi les jours de congés, dans les limites fixées par le texte, pourront être donnés par le salarié. Il vise également à ajouter le mot « jeune » après le mot « enfant », ce qui évitera, à mon sens, des contentieux futurs.
Ces améliorations rédactionnelles me semblent bienvenues. C’est pourquoi j’y suis favorable.
M. le président. Monsieur Le Menn, l’amendement n° 2 est-il maintenu ?
M. Jacky Le Menn. Ce matin, en commission, je ne connaissais pas les arguments de M. le ministre. J’avais donc caressé l’idée de retirer cet amendement, même si je pensais qu’il apportait des précisions importantes.
Après avoir entendu l’avis du Gouvernement, je me sens conforté dans ma première analyse. Par conséquent, je le maintiens.
M. le président. L'amendement n° 1 rectifié, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« L'employeur peut attribuer au salarié qui assume la charge d'un enfant à charge atteint d'une maladie, d'un handicap ou victime d'un accident d'une particulière gravité rendant indispensables une présence soutenue et des soins contraignants des jours de repos en supplément de ceux dont il dispose.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement vise à lever une ambiguïté et à dissiper des inquiétudes, en précisant que l’employeur peut attribuer au salarié qui assume la charge d’un enfant gravement malade des jours de repos en supplément de ceux dont il dispose. Cette mesure nous a été proposée par un syndicat.
Cela étant, à ce point de la discussion, je vais le retirer.
M. Roger Karoutchi. Très bien !
Mme Aline Archimbaud. Je préfère en effet me ranger aux arguments de Mme la rapporteur : cette initiative parlementaire répond à une urgence et vise à mettre en place un dispositif transitoire, en attendant une meilleure solution.
En outre, j’ai appris que ce droit existait déjà, c’est-à-dire qu’un employeur peut donner des jours de congés en pareil cas.
Dans ces conditions, je retire mon amendement. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application de l’article 1er aux agents publics civils et militaires. – (Adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l'ensemble de la proposition de loi visant à permettre le don de jours de repos à un parent d’enfant gravement malade.
(La proposition de loi est définitivement adoptée.) – (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Je veux remercier les membres de la commission. Nos débats ont été sereins et respectueux de toutes les convictions. Madame la présidente de la commission, je vous suis reconnaissante d’avoir permis la réalisation de ce travail de qualité. Je remercie également les fonctionnaires du Sénat qui nous ont aidés dans notre tâche.
Nous devons également féliciter le député Paul Salen de son initiative.
Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour que le texte ne soit que transitoire, ce que tout le monde espère.
Mes chers collègues, les familles concernées, dont certaines sont présentes dans les tribunes, vous remercient par ma voix de leur permettre de faire face à ces moments difficiles. Merci pour les enfants ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP, de l'UDI-UC et du groupe écologiste. – M. Gilbert Barbier applaudit également.)
M. le président. Madame la rapporteur, c’est moi qui vous remercie. Il est des débats plus faciles et plus agréables à présider que d’autres !
10
Modifications de l'ordre du jour
M. le président. Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande de modifier l’ordre du jour du mercredi 14 mai.
En raison du report du projet de loi relatif à la désignation des conseillers prud’hommes à une date ultérieure, le Sénat examinera, l’après-midi et le soir, la proposition de loi relative aux moniteurs de ski et la suite de la proposition de loi tendant au développement, à l’encadrement des stages et à l’amélioration du statut des stagiaires.
Le délai limite de dépôt des amendements de séance sur le premier de ces deux textes pourrait être fixé au mardi 13 mai à onze heures et le temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale serait d’une heure.
Par ailleurs, la séance pourrait débuter à quinze heures.
En outre, le Gouvernement demande de compléter l’ordre du jour du jeudi 15 mai par l’examen, l’après-midi et le soir, du projet de loi relatif aux activités privées de protection des navires.
Le délai limite de dépôt des amendements de séance sur ce texte pourrait être fixé au mercredi 14 mai à seize heures et le temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale serait de une heure trente.
Il n’y a pas d’observation ?...
Acte est donné de cette demande.
11
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 5 mai 2014 :
À seize heures :
1. Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l’interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié (n° 455, 2013-2014) ;
Rapport de M. Daniel Raoul, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 485, 2013-2014) ;
Texte de la commission (n° 486, 2013-2014).
Le soir :
2. Suite éventuelle de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à l’interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié.
3. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre les violences à l’égard des femmes et la violence domestique (n° 369, 2013-2014) ;
Rapport de Mme Joëlle Garriaud-Maylam, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 436, 2013-2014) ;
Texte de la commission (n° 437, 2013-2014).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures trente-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART