M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
Mme Marie-Thérèse Bruguière. Parfait !
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quand nous parlons d’artisanat, de commerce et petites entreprises, nous parlons de la première entreprise de France ! Nous parlons de plus de 3 millions d’emplois. Nous parlons de maillage du territoire, de lien social ; nous parlons d’innovation, de dynamisme et d’une part majeure de notre économie, puisque ce secteur représente à lui seul 25 % de notre PIB. Oui, nous parlons d’un véritable poumon économique que nous devons stimuler, conforter, accompagner !
Le projet de loi qui nous est aujourd’hui présenté est un signal fort envoyé à tous ces professionnels qui attendaient, nous le savons bien, des mesures destinées à favoriser, dans des conditions propices, le développement de leurs activités.
Au-delà, ces mesures, qui toucheront aussi bien au droit public qu’au droit privé, intéresseront également les élus locaux et les consommateurs, qui ont à cœur de préserver les commerces de proximité et l’activité des artisans.
Ne nous voilons pas la face, les artisans tendent de plus en plus à disparaître des centres-villes au profit d’importantes zones industrielles en périphérie des villes et villages.
Force est de le constater, les commerces de proximité sont en danger. Avec leur disparition, ce sont nos bourgs et nos villages qui se sclérosent et se meurent. Nous ne pouvons pas l’accepter. Et ce gouvernement – je me réjouis de votre action, monsieur le ministre – ne pouvait pas laisser faire plus longtemps. Il a agi, et bien agi.
Parce que ces activités sont au centre de la vie locale, parce qu’elles participent à son dynamisme et à la qualité de vie à laquelle chacun aspire, nous devions prendre les mesures qui s’imposaient, afin de remédier à ce déclin. J’approuve, j’apprécie et je soutiens la possibilité ainsi donnée de conclure des contrats de revitalisation commerciale, à titre expérimental, pour favoriser la redynamisation du commerce.
Monsieur le ministre, je félicite le Gouvernement d’avoir pris ces mesures justes, nécessaires et tant attendues, sur lesquelles je reviendrai de manière plus détaillée.
L’une des mesures phares du texte concerne les baux commerciaux. Le renchérissement de ceux-ci au cours des vingt dernières années, auquel s’ajoutent les charges locatives, ne pouvait pas nous laisser indifférents. La hausse des loyers n’étant plus supportable, de nombreuses activités et des commerces indépendants n’ont eu d’autre choix que de fermer. Je pense à tous ces commerces de détail, à ces ateliers d’artisans qui n’ont pas trouvé de repreneur, tandis que nous avons vu fleurir à leur place des chaînes de magasins, des banques et j’en passe...
La richesse naît, dit-on, de la diversité ; ne perdons jamais de vue ce concept. Justement, cette diversité, c’est ce que nous étions en train de perdre. C’est pourquoi les mesures proposées visent à corriger des injustices.
Ce projet de loi permettra d’indexer les loyers sur l’indice des loyers commerciaux, en corrélation avec l’activité des commerces et la variation des prix, l’objectif étant de lisser les hausses de prix des loyers à 10 % par rapport à l’année précédente.
Par ailleurs, ce texte affirme clairement les obligations du bailleur et du locataire.
À cet égard, permettez-moi de revenir sur quelques mesures phares : la réalisation d’un état des lieux contradictoire, un inventaire des charges et des impôts, le renforcement des procédures de conciliation et de médiation et, enfin, l’instauration d’un droit de préférence pour le locataire en cas de cession.
Ces mesures me semblent aller dans la bonne direction, vers plus d’équilibre et de justice, tout en tenant compte des besoins réels. Je tenais à le souligner et à le saluer.
En outre, vous vous êtes saisi, monsieur le ministre, de la question du droit de préemption par les communes, que vous avez étendu aux EPCI pour les fonds de commerce.
La puissance publique doit pouvoir, grâce au renforcement de ses leviers d’action, préserver son centre-ville, ses activités avec une pluralité commerciale lorsqu’elle le juge nécessaire et si elle estime que l’intérêt général est menacé. Voilà des mesures pleines de bon sens, auxquelles je souscris totalement.
Enfin, concernant le statut de l’artisan, ce texte redonne tout son sens à cette qualité, qui ne pourra être attribuée qu’aux personnes qualifiées et exerçant, de surcroît, un métier artisanal à proprement parler. Il y en a assez, je crois, des usurpations en tout genre.
Je salue votre action, monsieur le rapporteur, sur le plan général bien sûr et, notamment, pour ce qui concerne l’adoption de vos amendements relatifs à la vérification des compétences artisanales.
J’émettrai quelques réserves, toutefois, au sujet des conjoints d’artisan, car il me semble que la protection de ces derniers n’est pas aujourd'hui optimale, ce qui n’est pas sans poser plusieurs problèmes.
M. Jean-Claude Lenoir. C’est bien vrai, malheureusement !
M. Roland Courteau. Je me réjouis que vous souteniez cette disposition, monsieur Lenoir…
En conclusion, je suis satisfait, monsieur le ministre, que le Gouvernement que vous représentez sur ce texte se soit saisi de la question de l’artisanat, du commerce et des très petites entreprises, afin d’apporter les outils nécessaires pour aller vers plus d’efficacité et, surtout, pour redonner ses lettres de noblesse à cette branche de notre économie, trop longtemps laissée de côté.
Bien entendu, je défendrai et voterai ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu.
M. Gérard Cornu. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à l’instar de plusieurs orateurs m’ayant précédé, je tiens à adresser tous mes vœux de prompt rétablissement à Mme Fourneyron.
À cet égard, je veux d’ailleurs saluer le travail des services du ministère, qui ont assuré la continuité de l’État entre une ancienne ministre, Mme Pinel, et la nouvelle ministre. Ils ont élaboré ce projet de loi, pour l’essentiel consensuel, sans aspérité, ni orientation politique très marquée. Certes, celui-ci n’est pas très ambitieux, alors qu’il prétend défendre le commerce, l’artisanat et les TPE.
Certains collègues ont abondamment évoqué l’urbanisme commercial. À ce sujet, quelques amendements adoptés en commission vont dans le bon sens. Toutefois, pour l’essentiel, je regrette que l’urbanisme commercial demeure dans notre pays un urbanisme d’exception, contrairement à ce qui se pratique chez nos voisins européens.
Je le regrette d’autant plus vivement que les intercommunalités réaliseront désormais – M. Bérit-Débat l’a souligné à juste titre – les schémas de cohérence territoriale avec un volet commercial. Je suis favorable au rétablissement du document d’aménagement commercial, le DAC, dans le SCOT. Il est plus simple d’avoir trois volets : un volet commercial, avec le DAC, un volet transports, avec le plan de déplacements urbains, et un volet logement, avec le programme local de l’habitat. C’est, me semble-t-il, une bonne chose pour l’aménagement du territoire.
Je ne crois pas du tout que l’accroissement du nombre de membres de la Commission nationale d’aménagement commercial et des commissions départementales d’aménagement commercial soit un facteur de simplification ou une garantie de proximité du terrain dans la prise de décision.
Plus surprenant, il n’y a rien dans ce texte sur le commerce en ligne, qui connaît pourtant une croissance exponentielle, bouleverse les habitudes de consommation de nos concitoyens et a des effets sur le commerce traditionnel, notamment le commerce de proximité, mais pas seulement.
Afin de ne pas dépasser le temps qui m’est imparti, monsieur le président, j’ai choisi de concentrer mon intervention sur deux sujets qui me sont chers : le FISAC, qui a été largement évoqué, et le droit de préemption commercial. Pour moi, ce sont deux outils indispensables au développement et même à la survie du commerce de proximité, surtout en milieu rural.
Permettez-moi, tout d’abord, de rappeler une évidence. Le FISAC est un outil précieux, et les sénateurs le savent bien, sur toutes les travées de cet hémicycle. J’ai pu le mesurer en tant que rapporteur de cette partie du projet de loi de finances lorsqu’il s’est agi de défendre les crédits alloués à ce fonds, alors menacés de réduction.
En effet, les élus locaux ne peuvent que souscrire à cet outil. Il permet à nos communes de garder des commerces de bouche en particulier, qui sont soumis à des mises aux normes techniques de plus en plus précises et coûteuses.
Je le dis clairement, je ne peux donc que regretter la perspective de restriction budgétaire induite dans ce texte, avec la suppression, comme l’a souligné Mme Lamure, des dispositions en vertu desquelles les ressources du fonds représentent a minima 15 % de la taxe sur les surfaces commerciales, ou TASCOM. À l’instar de Mme Schurch et de M. Labbé, je regrette la destruction du lien de solidarité entre les grands et les petits commerces. Il me semble important de préserver ce lien et de maintenir le seuil minimal de 15 % de la TASCOM. Je ne partage donc pas l’optimisme de notre collègue Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Lenoir. C’est parce que M. Requier est un homme du Sud, élu du Lot ! Tout s’explique ! (Sourires.)
M. Gérard Cornu. À mon avis, cela entraînera mécaniquement une baisse du budget du FISAC, un fonds pourtant fortement demandé pour sauvegarder le commerce de proximité.
Monsieur le ministre, nous comptons sur vous pour le préserver.
M. Jean-Claude Lenoir. Oui !
M. Gérard Cornu. Il s’agira évidemment d’arbitrages interministériels. Sachez que le FISAC a été toujours défendu ici, sur toutes les travées. Malheureusement, les services de Bercy procèdent toujours à des réductions – il y a des contraintes budgétaires –, et le FISAC a souvent été amputé, sous des gouvernements de toutes tendances politiques d’ailleurs. Nous comptons donc vraiment sur vous pour défendre ce bel instrument d’aménagement du territoire.
J’en viens maintenant au droit de préemption.
Le droit de préemption conféré aux maires sur les cessions de fonds de commerce ou artisanaux et sur les baux commerciaux a presque dix ans maintenant. Il a été introduit dans la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, dont j’étais le rapporteur au Sénat, au travers d’un amendement que j’avais présenté et beaucoup défendu à l’époque, car il s’agit d’un outil vraiment concret à la disposition de l’élu local.
Ce dispositif, précisé par un décret de la fin de l’année 2007, a été élargi par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie aux terrains destinés à porter des commerces d’une surface de vente comprise entre 300 mètres carrés et 1 000 mètres carrés.
L’article 7 du présent projet de loi vise à rendre plus efficace le droit de préemption commercial, en permettant à la commune de déléguer tout ou partie des compétences afférentes à l’EPCI dont elle est membre, l’établissement pouvant éventuellement ensuite déléguer au concessionnaire d’une opération d’aménagement.
À ce sujet, ont été adoptés des amendements visant à étendre un peu plus la liste des personnes susceptibles de se voir déléguer le droit de préemption et à améliorer l’information de la collectivité qui exerce son droit de préemption.
Le défenseur du commerce de proximité et de la vitalité de nos villages que je suis ne peut que se réjouir de tels aménagements, inspirés par la pratique et l’expérience.
Comme cela a souvent été dit, les commerçants, artisans et petites entreprises font la richesse de notre pays ; ils le font même vivre. Saturés de réglementation, ils ne demandent qu’à travailler en paix. Éventuellement, ils veulent qu’on leur simplifie les démarches administratives et qu’on les rende plus efficientes. (Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste.)
Bref, ce texte marque un recul pour ce qui concerne le FISAC, mais présente une petite avancée technique s’agissant du droit de préemption, ainsi qu’une avancée significative sur le bail dérogatoire de deux ans à trois ans et sur le droit préférentiel du locataire du bail en cas de vente. Tout cela est très intéressant.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Gérard Cornu. Globalement, il y a des avancées, mais certaines dispositions ne nous plaisent pas trop. Par conséquent, je m’abstiendrai sur ce texte. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Arnaud Montebourg, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, tout d’abord, je tiens à vous remercier de la tonalité de la discussion qui s’est engagée, sur la base d’un texte ayant déjà rassemblé largement l’Assemblée nationale.
Ce projet de loi est aujourd'hui soumis à votre examen, afin d’être amélioré. Certains ont d’ailleurs employé le mot de « co-construction », qui me semble parfaitement exact. En effet, les sujets dont il sera question sont maîtrisés par les parlementaires, qui mesurent la portée de leurs implications concrètes et des détails qui pourraient nuire à l’effet attendu, en engendrant des conséquences perverses. Parfois, les parlementaires maîtrisent la loi mieux que certaines administrations, qui font réciter un catéchisme à leur ministre. (Marques d’approbation sur plusieurs travées.)
Je fais donc confiance au Sénat pour trouver les voies et moyens de la sagesse.
M. Jean-Claude Lenoir. Vous êtes le bienvenu ! (Sourires.)
M. Arnaud Montebourg, ministre. C’est dans cet état d’esprit, mesdames, messieurs les sénateurs, que je voudrais répondre à quelques-unes de vos objections, bien que je constate un certain accord, ce dont je me félicite et vous remercie, sur un certain nombre de questions, qui représentent des progrès indéniables.
À l’évidence, les baux commerciaux font l’objet, sur l’ensemble des travées de cet hémicycle, d’un consensus. À cet égard, je voudrais saluer le travail important réalisé par M. le rapporteur Yannick Vaugrenard, lequel, en se félicitant du caractère équilibré du texte, a employé une expression que je juge à la fois forte et juste : il a en effet parlé d’un texte d’« apaisement ».
En effet, les échanges souvent très difficiles entre les artisans et les auto-entrepreneurs ont permis de trouver un point de rassemblement, qui est aujourd’hui salué des deux côtés de l’échiquier politique. Il faut en remercier Mme Sylvia Pinel, qui m’a précédé dans mes fonctions, et le travail des parlementaires de terrain, en particulier de M. le rapporteur, qui ont contribué, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, à faire disparaître les antagonismes.
Nous sommes parvenus à ce point d’équilibre grâce à un certain nombre de décisions importantes, saluées par les chambres de commerce et d’industrie, les associations d’auto-entrepreneurs, l’UPA, l’Union professionnelle artisanale, ainsi qu’un certain nombre de professionnels, œuvrant aussi bien dans le secteur des travaux publics que de l’alimentation et des services. Nous les avons rencontrés, avec le Premier ministre, à Matignon. Ils nous ont dit le bien qu’ils pensaient de ce texte et la façon dont il fallait l’envisager.
Je ne peux que constater ces points de rassemblement et d’équilibre, sur lesquels nous pourrons nous appuyer pour travailler ensuite dans le détail. Toutefois, si la loi se perd dans le détail, elle prend la valeur du règlement. Le Gouvernement n’est pas toujours favorable à une telle évolution. Pour autant, si vous souhaitez, mesdames, messieurs les sénateurs, améliorer ce projet de loi, nous en discuterons de bonne foi et en franchise, comme il se doit, s’agissant d’un texte de rassemblement, d’équilibre et d’apaisement.
Au demeurant, j’ai noté un certain nombre de points d’interrogation. Avant d’aborder la question passionnée du FISAC, peut-être évoquerais-je rapidement celle de la conjoncture.
Le ministre de l’économie n’est pas indifférent à la situation des très petites entreprises et de l’artisanat, ne serait-ce que par contraste avec celle des PME de plus de cinquante salariés. Il ne vous a sans doute pas échappé que nous observons au premier trimestre 2014, sur fond de reprise des investissements et d’une activité de production industrielle assez significative dans un certain nombre de secteurs industriels, que je surveille comme le lait sur le feu en tant que ministre du redressement productif, une chute spectaculaire de 28 % des faillites dans les PME de plus de cinquante salariés. Tel n’est pas le cas s’agissant des TPE. Nous avons donc à analyser ce phénomène, que Mmes Schurch et Lamure ont d’ailleurs évoqué.
Nous sommes attentifs à l’amélioration de la conjoncture, car nous avons un problème non seulement d’offre, mais aussi de demande. Le Gouvernement, si je me réfère aux annonces faites par Manuel Valls après le conseil des ministres qui s’est tenu ce matin, a prévu un volet relatif à l’amélioration de l’offre des entreprises de ce pays, qui n’exclut pas, je l’ai rappelé tout à l’heure à la tribune, les très petites entreprises, le commerce et l’artisanat. Ainsi, un certain nombre d’exonérations, d’abaissements de cotisation, de ristournes, salués par l’Union professionnelle des artisans, « première entreprise de France », comme ils se plaisent à le dire, concernera ce secteur à hauteur d’un milliard d’euros.
Il s’agit d’un point important. Je pense notamment aux difficultés de trésorerie des professionnels de ce secteur, qui les mènent parfois injustement, alors que leurs carnets de commande sont remplis, au tribunal de commerce pour défaillance et dépôt de bilan. Je n’oublie pas non plus le durcissement en matière de crédits et les difficultés de financement des très petites entreprises. L’accumulation de tels freins engendre, dans notre pays, un problème de financement de l’économie réelle, dont le secteur bancaire s’est éloigné. Cette question relève de mes responsabilités, ainsi que de celles de Michel Sapin. Je le rappelle, nous avons dû créer une banque alternative, la Banque publique d’investissement, qui introduit une concurrence justifiée à l’activité bancaire privée, de manière que l’économie réelle puisse trouver des financements.
Toutes ces mesures sont-elles suffisantes ? Les rapports du médiateur du crédit aux entreprises ou les enquêtes réalisées par les organisations professionnelles et les syndicats des petits entrepreneurs, notamment la CGPME, la Confédération générale des petites et moyennes entreprises, montrent qu’il existe un problème d’accès au crédit pour les entreprises modestes, de taille petite ou moyenne. Il faudra que nous nous saisissions – pas forcément au travers d’une loi d’ailleurs – de ces sujets.
Ainsi, la surveillance de la conjoncture constitue à nos yeux un point important.
Je n’oublie pas que le Premier ministre a annoncé ce matin un soutien au pouvoir d’achat des ménages. Certes, des non-revalorisations des prestations sociales sont prévues : il n’y aura donc ni baisse ni augmentation. Je rappelle que nous sommes en période d’inflation très faible : 0,5 % dans la zone euro et à peu près l’équivalent en France.
Dans ce contexte, nous mettons en place des mesures de stimulation du pouvoir d’achat des ménages. Je souhaite vous rendre attentifs à cette question, mesdames, messieurs les sénateurs, car il s’agit d’introduire un équilibre : rechercher la croissance, c’est améliorer l’offre productive, dont les TPE ne sont pas exclues – ce qui est bien ! –, mais c’est aussi stimuler, avec modération et efficacité, le pouvoir d’achat des ménages.
J’espère avoir ainsi répondu aux remarques fort justifiées apparues au cours du débat.
Sur la question passionnée, presque passionnelle, du FISAC, j’ai entendu beaucoup de choses. Je rappelle que Mme Pinel, qui m’a précédé, a trouvé 13 millions d’euros dans les caisses au titre du FISAC pour 1 600 projets en cours d’instruction. Or il aurait fallu au moins 35 millions d’euros pour les seuls projets déjà instruits à son arrivée, en 2012.
M. Philippe Kaltenbach. Voilà les chiffres !
M. Claude Bérit-Débat. Tout à fait !
M. Arnaud Montebourg, ministre. J’ai été étonné d’entendre que, en cette période de disette budgétaire, nous aurions dû être au rendez-vous des engagements pris de façon inconsidérée. Le Gouvernement n’a pas pu servir la cause de tous les dossiers qui s’étaient empilés sur le bureau du prédécesseur de Mme Pinel, mais il a tout de même fait un effort en procédant à un réabondement du fonds à hauteur de 35 millions d’euros en 2013 (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), ce qui a permis de traiter les dossiers en attente.
Il est donc assez curieux de se voir accuser d’une turpitude qui est celle de ceux que vous avez soutenus, mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition.
M. Roland Courteau. Eh oui !
M. Arnaud Montebourg, ministre. S’il s’agit bien d’une turpitude, et non de mœurs politiques condamnables…
M. Jean-Claude Lenoir. Ne dites pas cela au Sénat, monsieur le ministre !
M. Jean-Claude Lenoir. Retirez-le !
M. Arnaud Montebourg, ministre. Je veux bien retirer ce que vous voulez, mais les mots ont un sens. On ne peut pas accuser autrui de ce que l’on fait soi-même : Nemo auditur propriam turpitudinem allegans. Tel est le proverbe du juriste, nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. C’est la raison pour laquelle j’ai employé ce beau mot de « turpitude », qui correspond parfaitement à la situation décrite. (M. le président de la commission applaudit.)
On nous a également reproché l’absence de lien entre le FISAC et la TASCOM. C’est pourtant un dispositif qui a été créé par le côté droit de l’hémicycle ! Peut-on nous en faire le reproche ? Peut-être nous reproche-t-on de ne pas le rétablir ?
Nous avons mis en place, comme cela a été rappelé par certains sénateurs, une boîte à outils, qui est désormais à la disposition des élus, afin de réguler le commerce. Je pense aux contrats de revitalisation commerciale, tels qu’ils ont été décrits par M. Jean-Claude Requier et évoqués par d’autres de ses collègues, au droit de préemption, soutenu tout à l’heure par Mme le rapporteur pour avis de la commission des lois, que je remercie. Il s’agit également des dispositifs d’aide au cinéma – je me tourne à cet égard vers M. le rapporteur pour avis Didier Marie, qui a évoqué ce sujet –, qui nous permettent d’intervenir en liaison avec le ministère de la culture. Tous ces outils dédiés à la régulation du commerce permettent à nos territoires de faire face aux difficultés qu’ils rencontrent.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’attire votre attention sur le fait que le Gouvernement est ouvert à la discussion : nous ne pourrons pas être d’accord avec toutes les propositions, qu’elles émanent de la majorité ou de l’opposition, mais nous nous dirons les choses, dans le respect des convictions de chacun.
C’est donc dans cet état d’esprit que je veux aborder la discussion des articles.
Pour en revenir au FISAC, à propos duquel certains d’entre vous ne sont pas tout à fait satisfaits, la transparence sera au rendez-vous. Les appels d’offres seront faits au niveau national, en rapport avec les enveloppes disponibles par avance, afin d’éviter le saupoudrage. La préférence sera donnée, finalement, aux projets déterminants, notamment d’aménagement. Nous éviterons une distribution selon les affinités territoriales, voire en l’absence d’affinités, puisque les décisions se prennent sur instruction administrative objective.
Tel est, mesdames, messieurs les sénateurs, l’état d’esprit dans lequel nous pouvons travailler. L’artisanat, le commerce, les très petites entreprises, ont besoin du soutien de la nation, et, surtout, de sa reconnaissance. Le travail que vous faites ici, aux côtés du Gouvernement, y participe, et je tenais à vous en remercier particulièrement. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La discussion générale est close.
Avant d’engager la discussion des articles, je dois vous dire, mes chers collègues, que je suspendrai la séance à dix-huit heures vingt-cinq, puisque la conférence des présidents se tiendra à dix-huit heures trente en présence de M. le Premier ministre. En conséquence, nous reprendrons nos travaux à vingt et une heures.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
TITRE Ier
ADAPTATION DU RÉGIME DES BAUX COMMERCIAUX
Article additionnel avant l'article 1er AA
M. le président. L'amendement n° 193, présenté par M. Vaugrenard, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er AA
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 145-2 du code de commerce est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. – En cas d'exercice du droit de préemption sur un fonds artisanal ou un fonds de commerce en application du premier alinéa de l'article L. 214-2 du code de l'urbanisme, le bail du local ou de l'immeuble reste soumis aux dispositions du présent chapitre.
« Si la préemption ne porte que sur un bail commercial, le défaut d'exploitation ne peut être invoqué par le bailleur pour y mettre fin dans le délai prévu par l'article L. 214-2 du même code pour sa rétrocession à un nouvel exploitant. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Yannick Vaugrenard, rapporteur. Cet amendement vise à sécuriser l'exercice du droit de préemption commercial par les communes.
L'absence d'articulation claire entre les dispositions du code de l'urbanisme sur le droit de préemption commercial et les dispositions du code de commerce sur les baux commerciaux a pour conséquence que les communes qui préemptent un fonds artisanal ou de commerce ne sont pas couvertes par les règles très protectrices du régime des baux commerciaux. Cet amendement tend à résoudre une telle difficulté.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Je souhaite avoir quelques précisions sur cet amendement. S’agit-il, comme il m’a semblé le comprendre, de permettre aux communes, lorsqu’elles préemptent un bail commercial vide, d’éviter que le propriétaire des murs ne récupère le bail ?
M. Yannick Vaugrenard, rapporteur. Tout à fait !
M. Gérard Cornu. Dans ces conditions, il s’agit d’un amendement important, auquel je souscris totalement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, avant l'article 1er AA.
Article 1er AA (nouveau)
L’article L. 145–3 du code de commerce est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux contrats de mise à disposition d’emplacement situé dans l’enceinte d’un lieu de vente et dont il profite de la chalandise, dès lors que l’emplacement n’a pas d’accès direct sur l’extérieur ou sur le mail commercial, que son exploitation est soumise au respect des horaires d’ouverture et de fermeture du lieu de vente et que les parties ont expressément exclu ces contrats du champ d’application du statut des baux commerciaux. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 119 rectifié ter, présenté par M. Houel, Mmes Lamure et Mélot et MM. Cambon, Dulait, G. Bailly, Grignon, Ferrand, Chauveau, Billard, Magras, Fouché, Doligé, Lefèvre, Laménie, Milon et Beaumont, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables non plus aux contrats de mise à disposition d’emplacement pouvant être modifié à tout moment, situé dans l’enceinte d’un lieu de vente entendu comme unité économique organisée, ayant une clientèle principalement touristique et dont l’opérateur fournit à ses contractants, pouvant être déplacés à tout moment, des services visant à optimiser leur chiffre d’affaires, dès lors que les parties ont expressément exclu ces contrats du champ d’application du statut des baux commerciaux. »
La parole est à Mme Colette Mélot.