M. Philippe Esnol. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui revêt un grand intérêt pour nombre d’entre nous qui avons, ou avons eu, en tant qu’élus locaux, l’expérience de la gestion des services publics locaux.

Les collectivités territoriales de différents niveaux assument une part croissante des services rendus à la population, au côté de l’État sinon parfois à sa place. Aujourd’hui, elles sont des acteurs majeurs des services publics de notre pays. Elles se sont vu confier la responsabilité de gérer certains d’entre eux. Elles ont également prouvé leur capacité à imaginer et à inventer de nouvelles formes de service public local. Le Sénat, qui représente les collectivités territoriales, mesure pleinement leur apport au service public, qui est majeur, et la reconnaissance dont elles doivent bénéficier en la matière.

Dans ce contexte, la création d’un nouvel outil de gouvernance au profit de l’action publique locale, permettant de mieux concilier la maîtrise de son service public par la collectivité avec les atouts de la gestion déléguée en termes d’efficacité, répond à un enjeu qui nous intéresse au plus haut point.

Tel est précisément l’objet de cette proposition de loi qui, comme son intitulé l’indique, vise à créer une nouvelle forme juridique de société d’économie mixte, assortie des garanties nécessaires à son bon fonctionnement.

Le premier intérêt de ce texte est de forger un nouvel outil juridique à la disposition des collectivités territoriales dans la gestion de leurs services publics locaux.

Mes chers collègues, vous le savez, les collectivités locales ont, à ce jour, la possibilité de recourir à une forme juridique fort usitée et utile, la société d’économie mixte, ou SEM. L’objet des SEM à opération unique, telles qu’elles sont définies par la présente proposition de loi, est de compléter le régime juridique des SEM tout en s’inspirant d’un outil proche et déjà reconnu par le droit communautaire sous la dénomination de partenariat public-privé institutionnel, ou PPPI.

Dans sa communication du 5 février 2008, la Commission européenne définissait le PPPI comme « une coopération entre des partenaires publics et privés qui établissent une entité à capital mixte qui exécute des marchés publics ou des concessions ». Pour celles et ceux que l’expérience, ces dernières années, des partenariats public-privé a laissés froids ou méfiants, il est clair que cette forme juridique apparaît comme beaucoup plus sécurisante.

La proposition de loi de nos collègues tend ainsi à créer des SEM contrat, qui ne seraient autres que des sociétés anonymes constituées par au moins deux actionnaires, dont une personne publique détenant entre 34 % et 85 % du capital et une personne privée. Autre spécificité de cette proposition de loi : la création ad hoc. La SEM contrat aurait un objet unique, la réalisation d’une opération de service public, de construction ou d’aménagement. Il s’agit donc bel et bien d’une structure de mission, dont la disparition est programmée à l’achèvement de ladite mission.

Nous sommes par conséquent en présence d’un outil de modernisation de la gestion publique locale, placé à la disposition des collectivités territoriales.

Chacun voyant bien l’intérêt d’un tel outil, quelles sont maintenant les garanties apportées à son fonctionnement ?

Il importe effectivement que le dispositif présente toutes les garanties de sécurité juridique pour les collectivités qui seraient amenées à y avoir recours, au niveau des relations instaurées avec les entités du secteur privé cocontractantes. Sur ce point, les améliorations apportées au texte par la commission des lois ont été significatives et je tiens à saluer l’excellent travail de son rapporteur, Jacques Mézard.

D’abord, dans un souci de précision, à la dénomination initiale de « SEM contrat » a été préférée celle, plus parlante, de « SEM à opération unique ». Cette modification a le mérite de la clarté et permet de comprendre, dès l’énoncé de son nom, de quel type d’outil juridique nous parlons.

Pour le reste, je ne vais bien évidemment pas reprendre l’ensemble des éléments qui viennent enrichir le texte. Je me contenterai de citer les avancées essentielles enregistrées dans le domaine sensible de la sécurité juridique, rendu d’autant plus crucial qu’il s’agit de la gestion d’un service public.

Le rapporteur a ainsi tenu à préciser les conditions dans lesquelles la personne publique définit, dans le cadre d’une délibération, les caractères constitutifs de la future SEM. Je note avec satisfaction que ces derniers incluent notamment, outre les caractéristiques principales de gouvernance de la future structure et la nature de l’opération faisant l’objet du contrat, la question évidemment fondamentale du coût prévisionnel global de l’opération pour le budget de la personne publique. C’est là un point essentiel au regard de la bonne gouvernance !

Autre élément important de sécurité juridique, un nouvel article est inséré dans le code général des collectivités territoriales, visant à déterminer les principes d’encadrement de la procédure et de la sélection du futur actionnaire opérateur, à travers un appel public à manifestation d’intérêt. Il est évident que cette procédure de rapprochement des deux entités publique et privée doit être d’une transparence absolue afin de garantir son caractère irréprochable.

Pour conclure, mes chers collègues, la présente proposition de loi me paraît forger des instruments de gouvernance locale utiles pour les collectivités dans une optique de gestion de leurs services publics locaux.

Par ailleurs, grâce à la qualité et au sérieux de son travail, la commission des lois a apporté des précisions supplémentaires importantes dans l’encadrement du dispositif. Je pense par exemple à la faculté, pour la personne publique qui serait minoritaire au sein de la SEM à opération unique, de disposer néanmoins d’une minorité de blocage et de la présidence des organes de direction, afin de préserver son influence et sa latitude de décision dans la gestion du service public local. Voilà, plus que d’autres encore, un élément de sécurisation juridique essentiel.

Pour toutes ces raisons, parce que le dispositif dont nous parlons conduit à des avancées qui s’avéreront utiles à de nombreuses collectivités, parce que nous l’avons assorti de toutes les garanties juridiques nécessaires, le groupe RDSE soutiendra cette proposition de loi. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Chiron.

M. Jacques Chiron. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez-moi de saluer tout particulièrement nos trois collègues qui sont à l’initiative de cette proposition de loi, Jean-Léonce Dupont, Daniel Raoul et Antoine Lefèvre, même si Jacques Mézard en a par la suite été le « ciseleur », si je puis m’exprimer ainsi.

Les lois de décentralisation, renforcées par la réforme territoriale en cours, transfèrent de nombreuses compétences et responsabilités aux collectivités locales. Ces transferts s’étendent du premier niveau de service public jusqu’à l’aménagement du territoire : politiques foncières, politiques d’urbanisme, de logement, politiques relatives aux déplacements, politiques de l’eau, politiques en faveur du développement économique, etc.

Les collectivités ont donc aujourd’hui toute l’autorité et la légitimité nécessaires pour façonner l’avenir de nos territoires. Et c’est heureux ! Les élus locaux, en effet, sont au cœur des enjeux et en prise avec la réalité de ces territoires. Ils sont le lien, précieux, entre les acteurs du quotidien et les pouvoirs publics.

Ils doivent toutefois faire face à un contexte économique et financier très contraint, dans lequel des charges toujours plus importantes leur incombent. Dans ce contexte, il est plus que jamais nécessaire d’optimiser le fonctionnement des services publics locaux et de savoir s’associer les acteurs des territoires, notamment du monde économique, pour mener un travail commun et accompagner les collectivités dans le portage d’opérations d’intérêt public.

Dans cet esprit, la SEM contrat, que la commission des lois propose, à juste titre, de dénommer SEM à opération unique – SEMOP, ai-je envie de dire –, constitue un véritable outil au service des collectivités locales et des projets d’intérêt public, outil qui peut, par ailleurs, contribuer à dynamiser l’activité économique locale.

Ce nouveau dispositif propose effectivement une forme renouvelée de partenariat public-privé, plus efficace et sécurisée que les PPP classiques que nous connaissons et qui ont largement montré leurs limites, tant par la complexité de leur montage que par leur coût exorbitant pour le contribuable.

M. Roland Courteau. Exactement !

M. Jacques Chiron. En quelque sorte, la SEM à opération unique constitue une troisième voie possible pour l’exécution d’un service public.

Au-delà de l’avantage économique réel et évident que cette solution apporte au niveau des finances des collectivités locales, d’autres avancées sont notables. Le dispositif permet notamment aux opérations publiques de bénéficier des compétences et de la capacité d’innovation de l’entreprise privée qui sera retenue, je le rappelle, après mise en concurrence préalable à la constitution de la SEM. Cette forme de gouvernance est un véritable gage de l’implication de l’actionnaire privé dans l’activité de la structure.

M. Roland Courteau. Très bien !

M. Jacques Chiron. Par ailleurs, la nécessité pour les collectivités locales de détenir la majorité du capital des SEM traditionnelles freine aujourd’hui l’investissement et le lancement de véritables partenariats public-privé, de sorte qu’en France, le capital des entreprises privées dans les structures mixtes reste faible. Nous sommes l’un des rares pays européens à encadrer si strictement la répartition du capital des SEM.

Si l’on peut entendre les réserves exprimées par certains concernant les risques, notamment financiers, encourus par la personne publique dans le cadre d’une SEM à opération unique, rappelons que la commission des lois présente plusieurs amendements importants, que je vous appelle d’ailleurs à soutenir, pour anticiper les éventuelles dérives.

Ses propositions tendent à renforcer l’influence de la collectivité au sein de la société. Ainsi, la personne publique, qui pourrait désormais détenir une minorité du capital de la société, disposerait dans ce cas d’une minorité de blocage et de la présidence des organes de direction. Ces deux éléments permettent à la collectivité d’exercer un droit de regard et d’avoir une voix déterminante dans la politique conduite par la SEM. Le fait de détenir un droit de blocage peut se révéler très utile dans certains cas, notamment si le capital de la structure évolue. Imaginons, par exemple, l’entrée d’acteurs étrangers au contrat dans ce capital – certains cas ont pu se présenter – : la personne publique pourra manifester son désaccord en bloquant toute possibilité en la matière.

Avec, en outre, la clarification des étapes du montage de la société, nous disposons ainsi de mesures prémunissant contre toute dérive et permettant à la collectivité un contrôle sur les décisions et les modalités de fonctionnement de la SEM.

Par ailleurs, la gouvernance des projets, telle qu’elle est proposée dans le cadre de la SEM à opération unique, permet aussi une revalorisation du rôle des collectivités publiques et de leurs acteurs, tant élus que fonctionnaires, dans les contrats de partenariat. Concrètement, les collectivités pourraient renforcer leur contrôle de la bonne exécution du contrat tout au long de la procédure, sous l’angle de la réalisation du projet comme sous celui du contrôle budgétaire.

Enfin, et je conclurai sur ce point, les SEM de ce type sont aujourd’hui pleinement reconnues par la jurisprudence européenne, sous la forme des partenariats public-privé institutionnalisés. Elles existent ainsi dans de nombreux pays d’Europe, notamment en Allemagne, en Italie et en Espagne, dans les domaines des transports, des déchets, mais aussi en matière de gestion de l’eau. Cette expérience européenne montre que le co-investissement des secteurs public et privé est un levier important pour favoriser les programmes d’investissement locaux et en faire de véritables outils au service des territoires et de leur population.

J’espère donc que nous saurons, nous aussi, nous appuyer sur ce type de sociétés et, au travers de leur montage, faire confiance aux acteurs de nos territoires pour construire les projets structurants de demain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Je souhaite vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, de vos interventions : elles montrent bien la qualité du travail entrepris par les uns et les autres, d’ailleurs dans le prolongement exact des avancées, que je salue une nouvelle fois, réalisées au niveau des sociétés publiques locales.

Ce texte sera probablement adopté dans quelques minutes et je crois, messieurs les auteurs de cette proposition de loi, que vous serez alors remerciés d’avoir ouvert à nos collectivités locales la voie de dispositifs qui faciliteront leur mode de fonctionnement et, effectivement, comme cela a été souligné à de nombreuses reprises, participeront à la maîtrise des dépenses publiques, à un moment où nous devons tous y contribuer, chacun à sa façon.

Mon discours ne sera pas plus long, car nous devons, me semble-t-il, examiner quelques amendements qui viendront corroborer l’intérêt de ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. Voilà une intervention sobre et efficace !

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles du texte de la commission.

Proposition de loi tendant à créer des sociétés d’économie mixte à opération unique

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi permettant la création de sociétés d'économie mixte à opération unique
Article 1er bis (nouveau)

Article 1er

Le livre V de la première partie du code général des collectivités territoriales est complété par un titre IV ainsi rédigé :

« TITRE IV

« SOCIÉTÉS D’ÉCONOMIE MIXTE À OPÉRATION UNIQUE

« Art. L. 1541-1 (nouveau). – I. – Dans le cadre de ses compétences, une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales peut créer, avec au moins une personne privée, sélectionnée après une mise en concurrence, une société d’économie mixte à opération unique. »

« La société d’économie mixte à opération unique est constituée à titre exclusif en vue de la conclusion d’un contrat avec la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales dont l’objet est :

« 1° Soit la réalisation d’une opération de construction, de logement ou d’aménagement ;

« 2° Soit la gestion d’un service public ;

« 3° Soit toute autre opération d’intérêt général relevant de la compétence de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales.

« II. – Sous réserve des dispositions du présent titre, la société d’économie mixte à opération unique revêt la forme de société anonyme régie par le livre II du code de commerce et par le titre II du livre V de la première partie du présent code. Elle est composée, par dérogation à l’article L. 225-1 du code du commerce, d’au moins deux actionnaires. Elle ne peut pas prendre de participation dans des sociétés commerciales.

« III. – Les statuts de la société d’économie mixte à opération unique fixent le nombre de sièges d’administrateur ou de membres du conseil de surveillance dont dispose chaque actionnaire. Ils sont attribués en proportion du capital détenu, ce nombre étant, le cas échéant, arrondi à l’unité supérieure.

« Le président du conseil d’administration ou du conseil de surveillance est un représentant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales.

« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales détient entre 34 % et 85 % du capital de la société et 34 % au moins des voix dans les organes délibérants. La part de capital de la personne privée ne peut être inférieure à 15 %.

« IV. – La société d’économie mixte à opération unique est dissoute de plein droit à la réalisation ou à l’expiration de son objet.

« Art. L. 1541-2 (nouveau). – Par délibération de l’assemblée délibérante ou de l’organe délibérant, la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales définit ses besoins pour la réalisation de l’opération qui fait l’objet du contrat conclu avec la société d’économie mixte à opération unique.

« Cette délibération comporte notamment :

« 1° Les principales caractéristiques de la société d’économie mixte à opération unique : la part minimale et maximale de capital que la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales souhaite détenir ; les règles de gouvernance définies dans un pacte d’actionnaires ; la part de risque assumée par chaque actionnaire ;

« 2° La nature et les principales caractéristiques des équipements et des constructions projetés et leurs conditions de mise en œuvre par la société d’économie mixte à opération unique ;

« 3° La possibilité et le cadre dans lequel la société d’économie mixte à opération unique peut conclure un ou plusieurs contrats de sous-traitance ;

« 4° Le coût prévisionnel global de l’opération, en moyenne annuelle, pour la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales et la part dans sa capacité de financement annuelle ;

« 5° Le régime juridique du contrat conclu avec la société d’économie mixte à opération unique.

« Art. L. 1541-3 (nouveau). – I. – La personne privée, qualifiée d’actionnaire opérateur, est sélectionnée après une procédure d’appel public à manifestation d’intérêt.

« Le choix de l’actionnaire opérateur est soumis aux principes de liberté d’accès, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures.

« Ne peuvent soumissionner à une société d’économie mixte à opération unique les personnes mentionnées à l’article 8 de l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.

« Après avoir défini ses besoins, la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales procède à une publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes.

« Les offres des candidats déterminent la part de capital proposée au sein de la société d’économie mixte à opération unique ainsi que les moyens techniques et financiers permettant la réalisation de l’opération conclue avec la société d’économie mixte à opération unique.

« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales peut demander à chaque candidat toute précision ou tout complément sans que ces demandes n’aient pour effet de modifier les éléments fondamentaux des caractéristiques de la société d’économie mixte à opération unique ou du contrat conclu avec celle-ci, de fausser la concurrence ou d’avoir un effet discriminatoire entre les candidats.

« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales sélectionne le candidat ou, le cas échéant, les candidats ayant présenté l’offre économiquement la plus avantageuse, après vérification de leurs capacités techniques, opérationnelles et financières.

« II. – Le délai entre la date d’envoi de l’avis d’appel public à manifestation d’intérêt et la date limite de réception des candidatures ne peut être inférieur à quarante jours.

« Une prime allouée à tous les candidats ou à ceux dont les offres sont les mieux classées peut être prévue dans l’avis d’appel public à manifestation d’intérêt.

« Art. L. 1541-4 (nouveau). – Lorsque l’appel public à manifestation d’intérêt est infructueux en raison de l’absence de dépôt de candidature, de l’irrégularité des candidatures proposées ou du dépôt de candidatures ne répondant pas aux besoins de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales, la personne publique peut recourir à une procédure négociée avec publication d’un avis de publicité, dès lors que les conditions initiales de l’opération proposée ne sont pas substantiellement modifiées.

« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales peut ne pas publier l’avis prévu à l’alinéa précédent si elle inclut dans la procédure négociée les seuls candidats ayant soumis des offres conformes aux exigences formelles de l’appel public à manifestation d’intérêt.

« Art. L. 1541-5 (nouveau). – La conclusion du contrat entre la société d’économie mixte à opération unique et la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales obéit aux modalités applicables, selon le cas, aux délégations de service public, aux concessions de travaux, aux concessions d’aménagement ou aux marchés publics.

« Art. L. 1541-6 (nouveau). – I. – En cas de fusion ou de rattachement de la collectivité territoriale actionnaire avec une autre collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales, la collectivité territoriale actionnaire cède ses actions, à leur valeur nominale, à la date à laquelle la fusion ou le rattachement est devenu exécutoire.

« En cas de fusion ou de rattachement du groupement de collectivités territoriales actionnaire avec un autre groupement de collectivités territoriales, le groupement de collectivités territoriales actionnaire cède ses actions, à leur valeur nominale, à la date à laquelle la fusion ou le rattachement est devenu exécutoire.

« La collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales cessionnaire est substitué au cédant dans tous les actes, délibérations, contrats et décisions en lien avec l’objet de la société d’économie mixte à opération unique.

« II. – En cas de transfert de compétences de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales actionnaire au bénéfice d’une autre collectivité territoriale ou d’un autre groupement de collectivités territoriales, la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales actionnaire cède ses actions, à leur valeur nominale, à la date à laquelle le transfert de compétences est devenu exécutoire.

« Le groupement cessionnaire est substitué au cédant dans tous les actes, délibérations, contrats et décisions en lien avec l’objet de la société d’économie mixte à opération unique. »

M. le président. L’amendement n° 12, présenté par M. Lefèvre, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

après une mise en concurrence

insérer les mots :

dans les conditions définies à l’article L. 1541-3 du présent code

La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Cet amendement a pour objet d’affirmer clairement l’unicité de la procédure de mise en concurrence et de choix de l’actionnaire, dans le droit fil de la communication interprétative de la Commission européenne en date du 5 février 2008 et de la jurisprudence Acoset de la Cour de justice de l’Union européenne du 15 octobre 2009.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Mézard, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, sous réserve d’une rectification dont nous avons débattu ce matin et qui consiste à supprimer les mots : « du présent code ».

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Le Gouvernement soutient cet amendement tendant à compléter l’alinéa 4 et à éclairer le texte qui suit, et il émet donc un avis favorable.

M. le président. Que pensez-vous de la modification proposée par M. le rapporteur, monsieur Lefèvre ?

M. Antoine Lefèvre. Je suis totalement d’accord avec cette modification qui, effectivement, a été discutée en commission des lois.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Lefèvre, et ainsi libellé :

Alinéa 4

Après les mots :

après une mise en concurrence

insérer les mots :

dans les conditions définies à l’article L. 1541-3

Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par M. Hyest, Mme Troendlé et M. Lefèvre, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Supprimer les mots :

minimale et maximale

La parole est à M. Jean-Jacques Hyest.

M. Jean-Jacques Hyest. Pour que la mise en concurrence soit objective, tous les acteurs doivent être placés sur le même rang. Or tel n’est pas le cas si l’opérateur peut choisir la part de capital qu’il détient dans la structure. Imaginons que la collectivité annonce qu’elle prendra entre 34 % et 85 % du capital, alors que son niveau de participation peut changer complètement l’économie du contrat ! À mon avis, il faut que la collectivité indique, dès le départ, quelle sera sa part, celle-ci étant d’ailleurs déjà encadrée par l’alinéa 12 de cet article 1er. Par conséquent, il faudrait supprimer les mots « minimale et maximale ».

J’attire votre attention sur l’extrême vigilance dont nous devons faire preuve dans ce débat quant à la réelle concurrence entre les opérateurs. Si l’offre peut être tellement diversifiée, comment l’opérateur sera-t-il choisi ? Dans le passé, j’ai beaucoup pratiqué la loi Sapin, ainsi que d’autres dispositions, et il me semble que la vigilance s’impose à ce sujet. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement.

M. Daniel Raoul. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Mézard, rapporteur. La commission n’a pas suivi l’avis de son rapporteur et a émis un avis favorable sur cet amendement qui vise à supprimer la faculté laissée à la personne publique de définir une fourchette dans laquelle elle fixerait sa part de capital dans la SEM à opération unique.

La commission s’est interrogée sur l’existence de cette fourchette et ses membres ont estimé, dans leur majorité, que le principe même de fourchette pouvait avoir des conséquences sur le respect de l’égalité entre les candidats au cours de la procédure.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Le Gouvernement suit l’avis de la commission. Ayant bien entendu vos arguments, monsieur le sénateur, il lui apparaît que fixer un chiffre clair et net renforce la transparence.

J’entends bien, également, les arguments que le rapporteur a développés à titre personnel. Cette proposition peut conduire en effet à rigidifier le système…

M. Marc Daunis. Tout à fait !

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Elle a toutefois des effets protecteurs, c’est la raison pour laquelle le Gouvernement y est favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 15, présenté par MM. Vandierendonck, Raoul, Berson, Chastan et Chiron, Mme Claireaux, MM. Daunis, Fauconnier, Ries et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Après le mot :

gouvernance

insérer les mots :

et les modalités de contrôle dont la collectivité ou le groupement de collectivités souhaite disposer sur l’activité de la société,

La parole est à M. René Vandierendonck.

M. René Vandierendonck. Cet amendement est du même ordre que celui que vient de défendre le président Hyest : ce qui se conçoit bien gagne à être précisé !

Pour préserver la collectivité des aléas de l’exécution du contrat, notamment dans le cas où elle serait minoritaire dans le capital de la SEM – le Conseil d’État avait annoncé que cette situation se produirait « fréquemment » – et lui permettre de réaliser un contrôle effectif sur l’activité de la société, et notamment sur quelques décisions clés, il est proposé de compléter les éléments pouvant figurer au pacte d’actionnaires par les modalités d’organisation du contrôle de l’activité de la société.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Mézard, rapporteur. Cet amendement va dans le sens du travail que nous avons réalisé en commission pour préciser le fonctionnement de toute cette procédure. L’avis de la commission est donc favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Anne-Marie Escoffier, ministre déléguée. Tout au long du débat, nous avons beaucoup dit, les uns et les autres, qu’il fallait absolument renforcer le contrôle. Tel est bien l’objet de cet amendement qui recueille donc un avis favorable du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul, pour explication de vote.

M. Daniel Raoul. Je vais, bien sûr, voter cet amendement. J’ajoute que le contrôle de la collectivité, y compris sur les SPL, que nous avons évoquées, est sans doute le point le plus fragile de ces dispositifs.

Les collectivités doivent pouvoir les contrôler comme des services internes, autrement dit, en franglais, selon une procédure in house. Cela doit être rappelé à tout moment,…

M. Jacques Chiron. C’est vrai !

M. Daniel Raoul. … y compris en ce qui concerne ces SEM à vocation unique. Le contrôle des collectivités doit être efficace, sinon nous allons au-devant de contentieux importants.

M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.

M. Marc Daunis. Je partage l’avis qui vient d’être exprimé. J’étais plus réservé au sujet de l’amendement précédent présenté par notre collègue Jean-Jacques Hyest, car il me semblait que le degré de participation de la collectivité pouvait également constituer un des éléments de la réponse, et donc de l’offre.

Je construisais dans mon esprit un parallèle avec le fait de lancer un appel d’offres tout en ayant déjà fixé le prix de la prestation !

M. Jean-Jacques Hyest. Non, non, non !

M. Marc Daunis. C’est, bien sûr, excessif, et comparaison n’est pas raison. Je ne relevais ici que la démarche. Je ferme cette parenthèse, puisque l’amendement n° 1 rectifié a été adopté.

Au sujet du contrôle analogue, je m’aperçois, comme président d’une fédération régionale des entreprises publiques locales, les EPL, et dans le droit fil des propos de notre collègue Daniel Raoul, que certaine SPL n’ont pas encore adopté de règlement intérieur digne de ce nom, garantissant aux actionnaires que les collectivités exercent bien le contrôle analogue sur l’activité de la société.

M. Marc Daunis. Il conviendra donc, à mon sens, d’être particulièrement vigilant à ce sujet. Nous disposons là d’un outil prodigieux au service du développement des collectivités, cela a été dit, il nous faudra cependant être attentifs, d’abord, à ne pas fragiliser juridiquement le dispositif, au risque de nous retrouver un jour face à un arrêt d’une cour de justice de quelque nature que ce soit et, surtout, à éviter que les collectivités ne se trouvent dépossédées de l’outil lui-même.

Si celui-ci venait à échapper au contrôle de la collectivité, ou du groupement de collectivités, actionnaire, nous risquerions de faire à nouveau l’expérience de dérives du type de celles qui ont terni, à une certaine époque, – je parle sous le contrôle de personnes averties –, l’image de cet outil extraordinaire que sont les SEM, et les EPL en général.

M. Roland Courteau. Eh oui ! Très bien !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(L’amendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 13, présenté par M. Lefèvre, est ainsi libellé :

Alinéa 16

Après les mots :

les règles de gouvernance définies

insérer les mots :

, le cas échéant,

La parole est à M. Antoine Lefèvre.

M. Antoine Lefèvre. Il s’agit d’un amendement rédactionnel de précision.

Les règles de gouvernance peuvent être intégrées aux futurs statuts de la société ou faire l’objet d’un pacte extra-statutaire. Cette décision relève de la liberté conventionnelle des parties.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jacques Mézard, rapporteur. L’avis de la commission est favorable.

Je voudrais répondre à notre collègue Marc Daunis en rappelant que cette nouvelle structure est dotée d’une minorité de blocage et que sa gouvernance tombe systématiquement entre les mains de la collectivité. Ces éléments constituent des garanties extrêmement sérieuses.

Quant à l’appel à manifestation d’intérêts, il est permis de penser que la concurrence est normale et saine. La concurrence suppose d’ailleurs un certain niveau de contrôle, y compris, le cas échéant, la possibilité d’engager des recours.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?