M. René-Paul Savary. C’est faux !
M. Dominique Watrin. … elle qui n’a cessé de reporter aux calendes grecques la mise en œuvre de la promesse d’une grande loi d’accompagnement de la perte d’autonomie faite par Nicolas Sarkozy lui-même. C’est la vérité, monsieur Savary ! Vous n’avez rien fait !
Mme Christiane Demontès. Absolument !
M. Dominique Watrin. Il n’en reste pas moins que les objectifs affichés semblent plus modestes que prévu. Surtout, aucune traduction budgétaire ne serait possible avant 2015.
Pourtant, nous le constatons tous sur le terrain, il est urgent de revaloriser l’APA et d’augmenter la valeur du point de la convention collective. L’emploi dans le secteur de l’aide à la personne, pour peu qu’il soit qualifié et correctement rémunéré, peut être une chance pour notre pays. Selon l’Association des directeurs au service des personnes âgées, l’AD-PA, ce sont près de 25 000 emplois qui pourraient être créés dans ce domaine. Ce chiffre confirme que la solidarité, c’est aussi du développement territorial.
Quant à la branche famille – dont le déficit est estimé à 3 milliards d’euros pour 2014 –, elle verra cette année encore sa part de financement assurée par l’impôt croître de manière importante. Il s’agit là de la branche la plus fiscalisée de la sécurité sociale. Il faut dire que les revendications historiques du MEDEF sont claires : réduire à néant le financement socialisé de cette branche en le remplaçant par des taxes, des prélèvements et des impôts de toute nature. On comprend la stratégie du MEDEF : pousser toujours plus loin cette logique, pour qu’en définitive le maintien de cette branche dans la sécurité sociale n’ait plus aucun sens au regard de la structure de son financement.
C’est pourquoi nous contestons l’abaissement du plafond du quotient familial prévu à l’article 3 du projet de loi de finances pour 2014, mesure qui répond plus à une logique d’économies qu’à une logique de justice. À nos yeux, la branche famille n’est pas censée, en tant que telle, jouer un rôle redistributif. Le haut niveau de natalité de notre pays est une chance. La politique familiale ne doit distinguer entre les enfants nés en France ni en fonction de leur origine ni selon la richesse de leurs parents. Nous estimons en outre que si une redistribution des revenus doit être opérée, c’est d’une véritable réforme fiscale que nous avons besoin ! Pour notre part, nous serions prêts à accompagner une telle démarche, ambitieuse, pour autant que le Gouvernement soit prêt à la mettre en œuvre… Or aujourd’hui, l’abaissement du quotient familial et la modulation de l’allocation de base de la PAJE selon le niveau de ressources des parents touchent non seulement les familles riches, mais aussi les foyers aux revenus moyens.
De la même manière, nous sommes opposés à la baisse des cotisations patronales au titre de la branche famille. Non seulement cette faveur est injuste au regard des efforts demandés aux salariés, mais elle engendre de l’instabilité pour la branche. Ma collègue Isabelle Pasquet l’a déjà montré.
De plus, les mécanismes choisis complexifient grandement le financement et la gestion de la branche famille, alors même que l’on parle ici de simplification. L’instauration de ces mesures aboutit au gel du montant des composantes de la PAJE et des allocations de logement, qui touchera toutes les familles : je le répète, il ne s’agit pas des seules familles riches !
Faute de temps, je passerai rapidement sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles, me bornant à m’associer aux propos de M. Godefroy : l’État n’a pas à se désengager du financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, étant donné qu’il assume, à cet égard, une double responsabilité.
Madame la ministre, mes chers collègues, vous l’aurez compris, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 souffre à nos yeux d’une réelle insuffisance. La sécurité sociale sera, l’an prochain plus encore que cette année, victime des choix du Gouvernement en matière de financement. Ce n’est pas à la Commission européenne de dicter ses impératifs et de peser en faveur d’une harmonisation par le bas des différents systèmes de protection sociale.
Notre pays doit rester fidèle au programme du Conseil national de la Résistance et à l’œuvre fondatrice d’Ambroise Croizat. Notre système de protection sociale a prouvé, en 2008 et en 2009, qu’il pouvait être un formidable amortisseur de crise.
Toute mesure de restriction des prestations familiales ou d’austérité imposée à l’hôpital, tout retard pris dans la correction des inégalités sociales et territoriales de santé ou dans l’accompagnement de la perte d’autonomie sont des reculs qui nous plongent chaque année un peu plus dans la crise. C’est pourquoi nous aurions souhaité que ce PLFSS donne un nouveau souffle à notre sécurité sociale, et qu’il relève d’une tout autre ambition ! (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier.
Mme Michelle Meunier. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 visait à répondre à une urgence : endiguer la dérive des déficits mettant en péril notre système de protection sociale et, partant, notre modèle social tout entier.
Depuis, grâce aux efforts de chacun, le déficit a pu être atténué, dans un contexte pourtant difficile, et même très difficile. L’objectif d’atteindre, cette année, un niveau proche de celui que connaissait notre pays avant la crise économique et sociale de 2008 est toujours d’actualité, et c’est tant mieux !
Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale poursuit, prolonge, renforce cette stratégie de redressement, en l’appuyant sur des réformes structurelles engagées par le Gouvernement en vue de moderniser notre système de protection sociale tout en favorisant la croissance et l’emploi. Il mettra notamment en œuvre la réforme des retraites et celle de la sécurisation de l’emploi, ainsi que la stratégie nationale de santé, que Mme la ministre nous a récemment présentée.
Il s’agit également de traduire les mesures annoncées en juin dernier par le Premier ministre pour assurer la pérennité de la branche famille et rendre notre politique familiale plus juste. C’est sur ce point que je centrerai mon propos.
Mme Bertinotti l’a rappelé au début de nos débats, la politique familiale française est un grand atout pour notre pays. Toutefois, le déficit de la branche famille de la sécurité sociale, creusé – faut-il le rappeler ? – sous la précédente mandature, s’élève à 2,5 milliards d’euros : cette situation compromet gravement la pérennité des interventions.
Par ailleurs, certains dispositifs sont mal ciblés, mal adaptés aux besoins actuels des familles et ne répondent pas à l’impératif de justice sociale qui doit être le nôtre.
Dès lors, il convient de réagir et de proposer, dès cette année, une réforme de bon sens, garantissant l’avenir de notre système de protection sociale, assurant plus de justice entre les familles et créant de nouveaux dispositifs, adaptés aux réalités d’aujourd’hui et aux besoins des Françaises et des Français.
Commençons par le redressement des comptes sociaux, qui, nous le savons bien, est une impérieuse nécessité.
Pour un effort d’économie de 8,5 milliards d’euros concernant l’ensemble de la sécurité sociale, la politique familiale contribuera à hauteur de 200 millions d’euros en 2014. En 2017, au terme de la montée en charge des mesures introduites par le présent projet de loi, elle y participera à hauteur de 760 millions d’euros, notamment par la modulation du montant de la PAJE et par la suppression de la majoration du complément de libre choix d’activité, le CLCA ; j’y reviendrai.
Parallèlement, la branche famille recevra des recettes supplémentaires, supérieures à 1 milliard d’euros.
Cet apport de nouvelles ressources provient de l’affectation intégrale à la branche famille du produit de la baisse du plafond de l’avantage fiscal découlant de la présence d’enfants au foyer. En effet, le plafond du quotient familial –mécanisme qui permet aux ménages imposables d’obtenir une réduction d’impôt en fonction de leurs revenus et du nombre d’enfants à charge – sera ramené de 2 000 à 1 500 euros par demi-part.
Soyons précis, car ce sujet le mérite : la perte de l’avantage fiscal n’interviendra qu’à partir de 5 850 euros de revenus mensuels pour un foyer comptant deux enfants. Concrètement, 13 % des foyers fiscaux seront touchés par cette mesure, alors que le quotient familial concerne, lui, près de la moitié des foyers fiscaux, soit 18 millions de personnes. Le quotient familial n’est donc pas supprimé ; c’est l’avantage fiscal en découlant qui est plafonné.
Au-delà des recettes supplémentaires – non négligeables, on en conviendra – qu’apporte cette mesure, il s’agit d’un acte de justice sociale et fiscale. Rappelons-le, un tiers de cette dépense fiscale profite aujourd’hui aux 10 % des Français les plus riches.
Au titre des recettes nouvelles, ajoutons que la baisse de la cotisation patronale à la branche famille prévue par la réforme des retraites sera intégralement compensée à la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF.
Venons-en à présent aux dépenses relatives à la branche famille.
Qu’il s’agisse de mesures d’économies ou de solidarité, le but est toujours d’améliorer concrètement notre système redistributif, en ciblant les familles qui en ont le plus besoin et en augmentant le montant des allocations qui leur sont versées.
Nous y parviendrons d’abord par l’augmentation du complément familial pour les familles nombreuses vivant sous le seuil de pauvreté. Le complément familial qui leur est versé sera ainsi majoré de 50 %, au-delà de l’inflation, à l’horizon 2018. La première revalorisation aura lieu au 1er avril de l’année prochaine et, à terme, 385 000 familles en bénéficieront.
En outre, est prévue une augmentation de 25 % de l’allocation de soutien familial à l’horizon 2018. De nature réglementaire, cette disposition annoncée par le Gouvernement n’est bien sûr pas incluse dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais elle est loin d’être négligeable !
J’en viens maintenant à deux mesures présentées comme étant des mesures d’économie, qui visent à recentrer sur les familles modestes des prestations sous conditions de ressources, marquant ainsi notre souci de justice.
Il s’agit tout d’abord du recentrage de la prestation d’accueil du jeune enfant. Le montant de l’allocation de base sera modulé selon le niveau de ressources des familles, pour les enfants nés à partir du 1er avril 2014. Les conditions d’attribution de l’allocation de base de la PAJE ne sont pas modifiées, mais son montant – 184 euros par mois – sera divisé par deux pour les ménages les plus favorisés. Le Haut Conseil de la famille estime que quelque 10 % des bénéficiaires actuels seront concernés.
Il s’agit ensuite de la suppression de la majoration du montant du complément de libre choix d’activité, le CLCA, pour les familles les plus aisées. À l’heure actuelle, en effet, les familles ne remplissant pas les conditions de revenu ouvrant l’accès à l’allocation de base de la PAJE reçoivent tout de même son équivalent par le biais de la majoration du CLCA. Celui-ci sera désormais identique pour toutes les familles.
Cette mesure vient compléter le dispositif que nous avons adopté en septembre dernier, lors de l’examen du projet de loi relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes. Rappelons que le congé parental est une possibilité offerte aux deux parents, dont les bénéficiaires sont à 96 % des femmes. S’ensuit pour elles un retrait du marché de l’emploi qui leur est souvent préjudiciable et dont découlent des inégalités professionnelles et salariales.
La modification du CLCA permettra d’accroître le niveau d’emploi des femmes en limitant leur temps de retrait de la sphère professionnelle, de favoriser un meilleur partage des responsabilités au sein du couple et de contribuer au développement de l’offre d’accueil de la petite enfance, sans lequel l’investissement des femmes sur le marché de l’emploi est difficile, voire impossible.
À cet égard, la convention d’objectifs et de gestion de la Caisse nationale d’allocations familiales signée en juillet dernier, qui prévoit notamment le développement des services aux familles et l’amélioration de l’accès de celles-ci aux droits, traduit la volonté du Gouvernement de développer les modes de garde pour les jeunes enfants. Ainsi, près de 275 000 nouvelles solutions d’accueil sont prévues.
Depuis le temps que ce sujet est sur le tapis – ou plutôt sous le tapis, là où l’avait glissé l’ancienne majorité –, nous ne pouvons que nous réjouir de le voir enfin traité !
Réponses nouvelles aux besoins des familles, soutien à la parentalité, solidarités accrues envers les plus fragiles et les plus démunis : ces éléments, madame la ministre, conjugués à l’indispensable redressement des comptes sociaux, nous ont convaincus, mes collègues socialistes et moi-même, que le présent texte est un bon projet de loi de financement de la sécurité sociale ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Robert Tropeano.
M. Robert Tropeano. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après avoir connu un déficit abyssal mettant en péril l’ensemble de notre système de protection sociale, le financement de la sécurité sociale pour 2014 constitue une nouvelle étape du rétablissement des comptes sociaux de la France, déjà amorcé l’année dernière.
Toutefois, malgré ces premiers résultats, le déficit reste encore trop important. Alors que plus de huit Français sur dix se déclaraient récemment inquiets de la capacité de la France à financer son système de sécurité sociale, il est plus que jamais nécessaire de réaffirmer à quel point celui-ci est un puissant facteur de cohésion sociale. La Cour des comptes l’a rappelé dans son dernier rapport : « préserver la sécurité sociale, revenir rapidement à l’équilibre des comptes sociaux, faire reculer la dette pour ne pas la faire porter par une génération supplémentaire, est une priorité ».
Nous ne pourrons tenir cet engagement qu’en engageant une réforme structurelle de la protection sociale et de son financement. Le 8 février dernier, à Grenoble, lors de la présentation de la stratégie nationale de santé, le Premier ministre déclarait : « Il faut engager sans tarder une réforme de fond, une réforme structurelle de notre système de santé. » Malheureusement, on ne peut que constater que, cette année encore, les mesures structurelles manquent.
En prendre est pourtant aujourd’hui une impérieuse nécessité ! Madame la ministre, le 23 septembre dernier, en présentant la feuille de route de la stratégie nationale de santé, vous avez reconnu que l’on ne pouvait se contenter d’ajustements ponctuels et que la France devait se doter d’une stratégie de santé globale pour les années qui viennent. Nous devons prendre en charge certains risques qui sont aujourd’hui insuffisamment couverts, comme la dépendance. Il nous faut absolument infléchir durablement l’évolution tendancielle des dépenses, en particulier de celles de la branche maladie. À défaut, le déficit chronique de l’assurance maladie remettra en question, à plus ou moins long terme, notre protection sociale. La santé de tous est un bien précieux et il nous appartient d’agir sans attendre pour assurer la pérennité d’un système de santé solidaire et égalitaire.
Madame la ministre, votre projet de loi comporte, certes, de bonnes dispositions. Je pense notamment aux expérimentations portant sur le déploiement de la télémédecine, engagé par la loi HPST. Nous le savons bien, la télémédecine, sans être une solution miracle, peut sans conteste apporter une réponse à l’absence de médecins dans des zones sous-médicalisées. Elle restaure le lien entre patients et soignants et permet de réintroduire une certaine égalité territoriale entre les Français. Un patient victime d’un accident vasculaire cérébral, par exemple, doit pouvoir être pris en charge de la même façon en zone urbaine ou en zone rurale. Dans ce type de situation, la télémédecine peut sauver des vies ! Je regrette toutefois que, quatre ans après le vote de la loi HPST, nous n’en soyons toujours qu’au stade des expérimentations : nous avons pris beaucoup de retard. Pourtant, des expériences ont déjà été menées avec succès sur notre territoire : je pense par exemple au robot d’échographie à distance mis au point il y a plusieurs années par le professeur Arbeille.
Je me félicite également des mesures concernant le renforcement de l’aide au sevrage tabagique. C’est une avancée très positive, mais peut-être aurions-nous pu, là encore, aller plus loin, en envisageant le remboursement intégral, préconisé par la Haute Autorité de santé depuis 2005. Eu égard à son impact économique, une telle mesure serait particulièrement efficace. La consommation de tabac est en effet responsable à hauteur de plus de 10 % de la mortalité prématurée annuelle, et plus de 3 % du budget de l’assurance maladie sert à couvrir les dépenses liées au traitement des trois principales affections de longue durée dont elle favorise l’apparition. Le Royaume-Uni et le Québec ont mis en place cette disposition avec succès.
Nous saluons en outre les nouvelles mesures relatives à la contraception des mineurs. Appliquer le tiers payant aux consultations et aux examens préalables à la prescription de la contraception chez les mineures de plus de 15 ans est une très bonne idée. Nous ne pouvons qu’être favorables à ce dispositif, qui prolonge les efforts de lutte contre la survenue de grossesses non désirées chez les adolescentes.
Parmi les mesures importantes, madame la ministre, figure l’économie de 800 millions d’euros engendrée par le report de la revalorisation des pensions de retraite, que mon groupe, comme beaucoup d’autres ici, avait rejeté lors de l’examen du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites.
Quant à votre choix de reconduire le mécanisme d’affectation de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, au Fonds de solidarité vieillesse, nous ne pouvons l’accepter. Nous avons eu un long débat sur ce sujet l’année dernière. Vous vous étiez alors engagée, madame la ministre, à ce que, après 2013, cette contribution finance la future réforme de la dépendance. Son affectation au Fonds de solidarité vieillesse ne devait être qu’exceptionnelle.
Par ailleurs, madame la ministre, vous avez choisi de réintroduire, par voie d’amendement devant l’Assemblée nationale, une disposition de la loi sur la sécurisation de l’emploi que le Conseil constitutionnel avait censurée. Le nouvel article 12 ter donne la possibilité aux partenaires sociaux de recommander un ou plusieurs organismes assureurs par branche professionnelle.
Vous affirmez que les entreprises auront le choix de leur assureur, mais si elles ne choisissent pas l’un de ceux que recommande la branche, leur forfait social sera majoré. Ajoutons que la branche pourra n’en recommander qu’un : dans ces conditions, peut-on réellement parler de liberté ? Lors de l’examen du projet de loi sur la sécurisation de l’emploi, nous avions proposé que les accords ne puissent emporter la recommandation d’un organisme unique.
Enfin, j’évoquerai une question d’actualité, concernant la cigarette électronique. Une majorité de députés européens viennent de refuser de la considérer comme un médicament : quelle est votre position ? Envisagez-vous, au moins, d’accorder un statut pharmaceutique aux cigarettes électroniques contenant de la nicotine ? Cela permettrait d’instaurer une classification unique, et donc une réglementation comparable, pour l’ensemble des produits délivrant de la nicotine en vue de la réduction ou de l’arrêt du tabagisme.
Pour conclure, madame la ministre, le groupe RDSE sera particulièrement attentif au débat qui va s’ouvrir et à la discussion des amendements. Nous souhaitons que les différents groupes politiques du Sénat parviennent à s’entendre pour participer au redressement du financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur quelques travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Gérard Dériot. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Gérard Dériot. Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous voici réunis pour débattre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, dans un contexte économique et social qui ne cesse de se dégrader.
Cette lente et inexorable détérioration, qu’accompagnent la course folle du chômage et l’explosion des prélèvements, provoque sur le terrain beaucoup d’inquiétude, d’incompréhension, mais aussi de colère et de désespérance.
Ce contexte nous incite à une grande humilité. Reconnaissons que, au cours de la précédente législature, humilité et sens de la mesure ont trop souvent manqué à l’opposition d’alors.
M. Jean-François Husson. Eh oui !
M. Gérard Dériot. À l’époque, beaucoup niaient la nécessité des réformes et promettaient de trouver des solutions miracles, une fois arrivés au pouvoir. « Le changement », ce devait être « maintenant » : ce slogan n’a même pas deux ans et il a eu le triste destin d’une feuille morte balayée par la bourrasque…
Mme Isabelle Debré. Eh oui !
M. Gérard Dériot. En 2013, la dégradation de la conjoncture et son incidence sur l’évolution des ressources ont donné un coup d’arrêt à l’amélioration de la situation financière de la sécurité sociale. Elles sont bien loin, les promesses entendues hier d’équilibrer les comptes en deux ans : il n’y a malheureusement pas eu de solution miracle ! Les déficits continuent de s’accumuler et pèsent comme une épée de Damoclès sur les générations futures.
Je ne développerai pas davantage l’analyse générale de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, mes amis, au premier rang desquels Alain Milon, l’ayant très bien fait tout à l'heure. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Claude Lenoir. Excellemment !
M. Gérard Dériot. Je centrerai mon propos sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles, à laquelle je demeure très attentif.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. C’est vrai !
M. Gérard Dériot. Je le disais à l’instant, la situation requiert de l’humilité, mais aussi de l’honnêteté. C’est pourquoi je n’hésiterai pas à faire miennes un certain nombre de remarques du rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, notre collègue Jean-Pierre Godefroy.
Je voudrais d’abord me réjouir du taux historiquement bas d’accidents du travail : trente-cinq accidents du travail avec arrêt pour 1 000 salariés. Il diminue depuis sept ans au rythme annuel de 3,3 %.
Au-delà de la légitime réparation, l’action de la branche en faveur de la prévention est donc bénéfique et permet de promouvoir dans le tissu économique les pratiques adaptées, en encourageant, par exemple, l’employeur à mieux s’équiper ou à revoir l’organisation du travail.
Cette prise de conscience limite, pour des millions de salariés, d’ouvriers, d’artisans, d’employés et de techniciens, les risques liés à une chute ou à un incident sur un équipement professionnel, à des postures pénibles, à des accidents de trajet. Ces actions de prévention sont essentielles, et c’est l’honneur de l’ensemble des partenaires sociaux de l’avoir bien compris et de s’être largement investis.
Toute réduction des marges de manœuvre financières de la branche viendrait donc compromettre ces actions indispensables de prévention. Or, il est à craindre que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 ne marque un désengagement coupable de l’État.
En effet, le retour à l’équilibre de la branche est extrêmement fragile. Les efforts engagés ces dernières années pour rétablir la situation et rembourser la dette de 2 milliards d’euros causée par la crise de 2009 pourraient être mis à mal si les excédents prévus ne sont plus au rendez-vous. Sur ce sujet comme sur d’autres, l’action publique gagnerait à être un minimum pérenne.
Or, s’agissant des recettes, j’approuve la sagesse du rapporteur, qui a souligné l’impossibilité d’augmenter aujourd’hui les cotisations patronales, tout en regrettant que cette sagesse ne soit pas partagée au plus haut niveau de l’État !
Au-delà de la conjoncture, les marges de manœuvre de la branche sont menacées, par exemple, par l’absence de dotation de l’État au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante en 2014.
En 2001, le législateur avait prévu un financement annuel du FIVA, par le biais non seulement d’un transfert de la branche AT-MP, voté chaque année en loi de financement de la sécurité sociale, mais également d’une dotation annuelle de l’État inscrite en loi de finances.
Bien que le financement de l’indemnisation rapide et intégrale des dommages effroyables causés par l’amiante soit pleinement légitime, l’État ne prévoit, pour la deuxième année consécutive, aucune dotation pour ce fonds, alors que la dotation de la branche AT-MP fait plus que tripler.
Je partage pleinement le mécontentement du rapporteur devant le caractère inacceptable de cette décision. Elle est tout à fait choquante au regard de la part de responsabilité de l’État dans le scandale de l’amiante. Je le rappelle, l’État est responsable à la fois au titre de son action régalienne et comme employeur.
En outre, nos inquiétudes sur le devenir de la branche sont renforcées par la mise en place prochaine du compte de prévention de la pénibilité, actuellement examinée par l’Assemblée nationale dans le cadre de la discussion du projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites. Quelle sera son incidence sur le fonctionnement des services de la branche AT-MP dans les caisses d’assurance retraite et de la santé au travail, les CARSAT ? Dans quelle mesure la mise en place du compte de prévention de la pénibilité affectera-t-elle la branche ? Quels pourraient être les contours de l’avenant à la prochaine convention d’objectifs et de gestion liant la branche AT-MP à la tutelle que vous avez, madame la ministre, déjà annoncé ?
Il ne faudrait pas que la création de ce compte de prévention de la pénibilité vienne paralyser la branche AT-MP et l’empêche d’exercer son cœur de métier, à savoir prévenir, réparer et tarifer les risques professionnels. À l’heure où les réformes importantes engagées ces dernières années portent leurs fruits pour simplifier la tarification du risque aux entreprises et améliorer la politique de prévention, la branche AT-MP ne doit pas être abandonnée.
Telles sont les quelques remarques que je voulais faire sur le volet AT-MP du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014. (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Lenoir. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.