Mme Esther Benbassa. Cet amendement tend à inscrire dans la loi organique la nécessité d’allouer aux parlementaires des moyens pour assumer leurs frais de mandat et la rémunération de leurs collaborateurs, qui sont des éléments indispensables au bon fonctionnement des assemblées et à l’indépendance de l’action des parlementaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements, qui empiètent sur les prérogatives des assemblées parlementaires et de leur bureau.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Ces questions relèvent de la vie interne des assemblées. Le Gouvernement s’en remet donc à la sagesse du Sénat.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 34 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 2 ter (nouveau)
Le 1° du I des articles L.O. 489, L.O. 516 et L.O. 544 du code électoral est abrogé. – (Adopté.)
Article 2 quater (nouveau)
I. – L’article 4 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les fonctions de membre du Conseil constitutionnel sont incompatibles avec l’exercice de la profession d’avocat. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2014.
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 83 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 2 quater.
(L’article 2 quater est adopté.)
Article 3
I A (nouveau). – L’ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique pour l’application de l’article 23 de la Constitution est ainsi modifiée :
1° La deuxième phrase du premier alinéa de l’article 1er est complétée par les mots : « et ne peut percevoir aucune indemnité en tant que parlementaire » ;
2° Après le mot : « placé », la fin de l’article 4 est ainsi rédigée : « d’office, pendant la durée de ses fonctions, en position de disponibilité ou dans la position équivalente prévue par son statut ne lui permettant pas d’acquérir de droits à l’avancement et de droits à pension. »
I. – L’article 5 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Au second alinéa, le mot : « six » est remplacé par le mot : « trois » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Cette indemnité ne peut être perçue par l’intéressé s’il a omis de déclarer à la Haute Autorité de la transparence de la vie publique, au titre de la loi n° … du … relative à la transparence de la vie publique, tout ou partie de son patrimoine ou de ses intérêts. »
II (nouveau). – L’article 6 de la même ordonnance est abrogé.
III (nouveau). – Le 2° du I A du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2014.
M. le président. L’amendement n° 84 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7
Remplacer les mots :
Autorité de
par les mots :
Autorité pour
II. – Après l’alinéa 8
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... – L’article 7 de la même ordonnance est abrogé.
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Cet amendement est purement rédactionnel, puisqu’il s’agit de remplacer la mention « Haute Autorité de la transparence de la vie publique » par la mention « Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
Article 4
Après la trente et unième ligne du tableau annexé à la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
Haute Autorité de la transparence de la vie publique |
Président |
» |
M. le président. L’amendement n° 85 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
Autorité de
par les mots :
Autorité pour
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Cet amendement a exactement le même objet que l’amendement précédent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 4, modifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’article 4.)
Article 4 bis A (nouveau)
L’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l’élection du Président de la République au suffrage universel est ainsi modifié :
1° Avant le dernier alinéa du I, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les déclarations de situation patrimoniale remises par les candidats dans les conditions prévues au quatrième alinéa du présent I sont transmises à la Haute Autorité de la transparence de la vie publique. Si la Haute Autorité constate que le candidat a omis de déclarer une partie substantielle de son patrimoine ou en a fourni une évaluation mensongère, elle saisit la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques. Cette saisine est rendue publique. En fonction du nombre et de la gravité des irrégularités, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques peut réduire le montant du remboursement forfaitaire prévu au V du présent article.
« La déclaration de situation patrimoniale remise à l’issue des fonctions dans les conditions prévues au quatrième alinéa du présent I est transmise à la Haute Autorité de la transparence de la vie publique. Si la Haute Autorité constate que cette déclaration n’est pas exhaustive, exacte ou sincère ou si elle constate une évolution de situation patrimoniale pour laquelle elle ne dispose pas d’explications suffisantes, elle rend public ce constat. » ;
2° À la première phrase du dernier alinéa du III, le mot : « au » est remplacé par la référence : « aux I et ».
M. le président. L’amendement n° 86 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Nous avions adopté un amendement qui étendait la déclaration de patrimoine aux candidats. L’amendement n° 86 rectifié vise à supprimer cette obligation de déclaration de patrimoine imposée aux candidats. En effet, cette disposition est inapplicable,…
M. Gérard Longuet. Absolument !
M. Alain Anziani. … car la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique va se trouver submergée de milliers, voire de dizaines de milliers de déclarations de patrimoine ; elle n’aura évidemment pas le temps de les examiner. Or notre but est de permettre un contrôle effectif entre le moment du dépôt de la déclaration et le moment de l’élection.
Une telle disposition relève donc du vœu pieux et n’a pas de sens. C’est pourquoi nous vous proposons de la supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 86 rectifié, mais il me semble qu’il y a une confusion, monsieur Anziani.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Voilà l’une des situations critiques organisées par le projet de loi organique que nous présente le Gouvernement, qu’il ait été ou non modifié par la commission des lois : au moment de l’élection, qu’il s’agisse d’une élection législative, sénatoriale, municipale, départementale ou régionale, notre législation va instituer une inégalité de statut entre les candidats, que j’avais évoquée vendredi dernier.
Si nous avions la certitude que le tampon « bon pour honnêteté reconnue » délivré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie politique valait quelque chose, nous pourrions dire que le candidat sortant, qui s’est soumis à l’obligation de publication de son patrimoine, de ses revenus, de ses intérêts et a donc obtenu le label « bon pour le service honnête », dispose d’un avantage. Vis-à-vis de ses concurrents, ce serait même une forme de déloyauté, puisqu’il serait reconnu honnête, alors que ses concurrents, n’étant pas soumis à la même obligation, ne bénéficieraient pas du label délivré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et pourraient être soupçonnés, n’ayant pas apporté la preuve de leur honnêteté, de ne pas être honnêtes.
En réalité, la plupart de nos compatriotes vont retenir la situation inverse : le candidat sortant sera transparent et on pourra lui reprocher d’être trop investi dans l’économie privée ou, au contraire, de ne rien y connaître du tout, d’avoir accumulé du bien au terme de sa carrière professionnelle ou, au contraire, de ne pas en avoir accumulé, etc. Quelqu’un sera toujours mécontent et le candidat sortant sera donc en situation de faiblesse.
L’argument de M. Anziani est totalement pertinent : il est impossible de demander à une commission de délivrer des labels à des milliers de candidats. Nous voyons en effet à chaque élection qu’il y a, à la fois, moins d’électeurs et plus de candidats. Les dossiers seraient donc trop nombreux.
Je ne me priverai pas, cependant, du plaisir de souligner une contradiction du projet de loi organique, qui instaure une inégalité devant le suffrage universel entre les candidats « transparents » et les autres.
À ceux qui sont transparents, le label ne conférera pas pour autant une probité absolue aux yeux des électeurs. En effet, ces derniers se souviendront toujours que M. Cahuzac a fait toutes les déclarations à la commission administrative compétente, ce qui ne l’a nullement empêché de mener des activités parallèles, auxquelles cette commission a été absolument incapable, hélas, de mettre fin en temps et en heure.
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.
M. Alain Anziani. Je dois à la vérité de dire que je suis allé trop vite. Il me faut donc rétablir le sens de notre amendement : le texte visé par la demande de suppression ne concerne pas l’ensemble des candidats, mais uniquement ceux à l’élection présidentielle.
M. Gérard Longuet. A fortiori pour l’élection la plus importante !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Nous avons débattu vendredi dernier du sujet évoqué par M. Longuet, lorsque le rapporteur de la commission des lois nous a proposé, au dernier moment, un amendement relatif à la publication : selon lui, il ne fallait pas procéder à une publication dans l’année précédant une élection, car il y aurait une distorsion.
Par ailleurs, en 2017, se présenteront peut-être contre les députés de l’actuelle majorité d’anciens députés, qui, pour leur part, ne seront pas soumis à la publication des résultats. La majorité, comme l’opposition, a tout intérêt à regarder de plus près cette différence de traitement !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Je tiens à préciser pourquoi la commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 86 rectifié défendu par M. Anziani, qui a trait à l’élection présidentielle.
Nous souhaitons que l’on ne mélange pas deux procédures.
M. Jean-Jacques Hyest. Voilà !
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. Il y a, d’une part, les déclarations de patrimoine transmises à la Haute Autorité, laquelle prend après contrôle, en cas de non-transmission ou de transmission fallacieuse, erronée ou mensongère, un certain nombre de dispositions prévues par le présent projet de loi. Il y a, d’autre part, les comptes de campagne, contrôlés par la Commission nationale des comptes de campagne. Même si la question peut se poser, nous avons bel et bien décidé que ces deux instances resteraient distinctes pour le moment.
À l’Assemblée nationale, M. Dosière avait imaginé que l’on puisse pénaliser le remboursement des dépenses de campagne en cas de non-déclaration ou de déclaration de patrimoine fallacieuse. Il a semblé à notre commission que ce dispositif était susceptible de créer une véritable confusion. Mieux vaut distinguer la déclaration de patrimoine, d’un côté, et les comptes de campagne, de l’autre, avec deux instances de contrôle distinctes. C’est plus clair !
Pour cette raison, la commission est favorable à cet amendement tendant à la suppression de l’article 4 bis A introduit par l’Assemblée nationale.
M. le président. En conséquence, l’article 4 bis A est supprimé.
Article 4 bis
À la fin de l’article 4 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 précitée, la référence : « loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 » est remplacée par la référence : « loi organique n° … du … relative à la transparence de la vie publique ».
M. le président. L’amendement n° 87 rectifié, présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel, est ainsi libellé :
Au début de cet article
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
I. – Au quatrième alinéa du I de l’article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 précitée, les mots : « de l’article L.O. 135-1 » sont remplacés par les mots : « aux articles L.O. 136-4 et L.O. 136-5 ».
La parole est à M. Alain Anziani.
M. Alain Anziani. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. La commission y était favorable alors que l’article 1er subsistait. Désormais, l’objet de cet amendement pose un petit problème.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour explication de vote.
M. Alain Anziani. Compte tenu des observations éclairées formulées par le rapporteur de la commission des lois, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 87 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’article 4 bis.
(L'article 4 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 4 bis
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 23 rectifié est présenté par Mmes Rossignol, Alquier et M. André, MM. Andreoni, Antiste, Antoinette, Assouline, Auban et D. Bailly, Mme Bataille, MM. Bérit-Débat, Berson, Berthou et Besson, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel et M. Bourquin, Mme Bourzai, MM. Boutant, Caffet et Camani, Mme Campion, M. Carrère, Mme Cartron, MM. Carvounas, Cazeau, Chastan et Chiron, Mme Claireaux, MM. Collomb, Cornano, Courteau, Daudigny, Daunis, Delebarre et Demerliat, Mme Demontès, MM. Desplan, Dilain et Domeizel, Mme Durrieu, M. Eblé, Mme Emery-Dumas, M. Esnol, Mme Espagnac, MM. Fauconnier, Fichet, Filleul et Frécon, Mme Génisson, M. Germain, Mmes Ghali et D. Gillot, MM. J. Gillot, Godefroy, Gorce, Guérini, Guillaume, Haut et Hervé, Mme Herviaux, MM. Jeannerot, Kaltenbach et Kerdraon, Mmes Khiari et Klès, MM. Krattinger, Labazée et S. Larcher, Mme Laurent-Perrigot, MM. Leconte et Le Menn, Mme Lepage, MM. J.C. Leroy et Le Vern, Mme Lienemann, MM. Lorgeoux, Lozach, Madec, Madrelle, Magner, Marc, Massion et Mazuir, Mmes Meunier et D. Michel, MM. Miquel, Mirassou, Mohamed Soilihi, Navarro et Néri, Mme Nicoux, MM. Pastor, Patient, Patriat, Percheron, Peyronnet, Piras, Poher et Povinelli, Mme Printz, MM. Rainaud, Raoul, Rebsamen, Reiner, Richard, Ries, Roger et Rome, Mme Schillinger, M. Sutour, Mme Tasca et MM. Teston, Teulade, Todeschini, Tuheiava, Vairetto, Vallini, Vandierendonck, Vaugrenard, Vergoz, Vincent et Yung.
L’amendement n° 88 rectifié est présenté par MM. Sueur, Anziani et J.P. Michel.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 4 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le 6° de l’article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, il est ajouté un 6° bis ainsi rédigé :
« 6° bis La liste des subventions versées sur proposition des membres du Parlement, en vertu des crédits ouverts dans les lois de finances de l’année précédant celle du dépôt du projet de loi de finances de l’année. Cette liste retrace, pour chaque département, collectivité d’outre-mer et pour la Nouvelle-Calédonie :
« a) l’ensemble des subventions pour travaux divers d’intérêt local accordées par le ministre de l’intérieur ;
« b) l’ensemble des subventions accordées à des associations par les ministres compétents ;
« Elle indique, pour chaque subvention, le nom du bénéficiaire, le montant versé, la nature du projet financé, le programme budgétaire concerné et le nom du membre du Parlement qui a proposé la subvention. »
La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour présenter l’amendement n° 23 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Ah, le bel amendement ! (Sourires.)
Mme Laurence Rossignol. Je ne vous épargnerai pas, mes chers collègues, la description de la réserve parlementaire, même si certains d’entre vous en connaissent depuis très longtemps le fonctionnement,…
Mme Nathalie Goulet. Mais combien ?
Mme Laurence Rossignol. … alors que vous ignoriez peut-être son existence quand vous avez été élus pour la première fois. Seulement, puisque nous ne parlons pas qu’entre nous mais que nous nous adressons aussi au public présent dans les tribunes et aux lecteurs du Journal officiel, j’expliquerai en quelques mots ce dont il s’agit.
La réserve parlementaire est une somme inscrite au budget, de 150 millions d’euros, dévolue aux deux assemblées et dont les parlementaires, députés et sénateurs, prescrivent l’attribution à des collectivités territoriales ou à des associations.
Une fois cela posé, j’ai tout dit et rien dit. Je n’ai pas précisé notamment comment cette somme est répartie entre les parlementaires au sein de chacune des assemblées ni comment on peut en contrôler l’usage.
Comme je l’ai déjà indiqué, certains d’entre vous, élus avant moi au Sénat, m’ont raconté qu’ils ignoraient l’existence de la réserve parlementaire lorsqu’ils sont arrivés ici.
Mme Nathalie Goulet et M. Henri de Raincourt. C’est vrai !
Mme Laurence Rossignol. Ils ne savaient donc pas qu’ils pouvaient en bénéficier. Ils ne savaient pas non plus comment y accéder, cette somme ayant été répartie, durant très longtemps, entre les parlementaires puissants : les présidents des assemblées et des commissions des finances, les rapporteurs,...
Depuis deux ans, nous y avons mis bon ordre en répartissant la réserve parlementaire par groupe à hauteur de 150 000 euros pour chaque sénateur.
Tandis que nous débattons de transparence depuis plusieurs jours, nous n’avons pas encore évoqué la question de la transparence de la réserve parlementaire. Si l’on peut débattre du degré de transparence pour notre patrimoine privé, il s’agit là, en revanche, d’argent public, destiné à des réalisations publiques.
L’amendement que je vous propose, avec mes collègues du groupe socialiste, tend donc simplement à instaurer la transparence de la réserve parlementaire. Pour ce faire, il sera obligatoire d’indiquer le montant perçu par chaque parlementaire, à quelle collectivité et à quel projet d’investissement cette somme a été consacrée et pour quel montant.
Je vous le dis tranquillement : en ce qui concerne l’avenir de la réserve parlementaire, il n’y a que deux solutions possibles, la transparence ou la suppression !
M. Henri de Raincourt. Très bien !
Mme Laurence Rossignol. On peut débattre de sa suppression, si vous le préférez. Pour ma part, j’ai tendance à considérer que si nous supprimions en cette période difficile cette contribution de 150 millions d’euros qui bénéficie aux territoires, celle-ci ne serait pas automatiquement sanctuarisée au profit des collectivités.
Cela étant, la réserve parlementaire n’est acceptable aujourd’hui que dans la mesure où elle est transparente. Il est absolument anormal que nous, parlementaires, ne sachions pas à quelle destination cet argent public est dévolu. N’oublions pas que ces fonds ne relèvent pas de l’autonomie des assemblées. Nous pouvons donc légiférer sans porter atteinte à ce principe.
J’ajoute, pour finir de vous convaincre – mais sans doute le savez-vous déjà –, qu’un contribuable et une association ont obtenu du tribunal administratif de Paris la publication de la réserve parlementaire de 2011.
Mme Jacqueline Gourault. Absolument !
M. Jean-Claude Requier. Pour les communes !
Mme Laurence Rossignol. C’est dire si l’opacité, à laquelle notre assemblée s’est attachée durant si longtemps, était anormale au regard des règles élémentaires de la transparence que garantit le droit administratif français.
Un contribuable a donc obtenu la publication de la réserve parlementaire de 2011 pour les communes. Ce sera également le cas pour les associations, mais cela exige un travail de recollement dans les ministères, ce qui est plus complexe que d’obtenir la transmission de documents par le ministère de l’intérieur.
Si vous n’adoptez pas cet amendement, l’année prochaine, un autre contribuable obtiendra, sur la base des mêmes règles, de la même loi et de la jurisprudence du tribunal administratif, la publication de la réserve de 2012, puis un autre, l’année suivante, de la réserve de 2013.
Vous avez le droit de penser que c’est une bonne façon d’administrer notre pays et de garantir à nos concitoyens la transparence à laquelle ils peuvent légitimement nous demander de nous soumettre, mais cela aurait pour conséquence d’engorger inutilement les tribunaux administratifs. Cela reviendrait surtout à s’accrocher à une opacité inutile et inefficace qui serait, par ailleurs, facteur d’une immense suspicion. Or je crains que nous n’ayons déjà, depuis le début de nos discussions, suffisamment alimenté la suspicion de nos concitoyens. Voilà pourquoi je vous propose de voter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Anziani, pour présenter l’amendement n° 88 rectifié.
M. Alain Anziani. Je reprendrai tous les mots de Laurence Rossignol.
Quel est le rôle d’un parlementaire ? Élaborer et voter la loi ? Contrôler l’action du Gouvernement ? Certainement ! Mais il n’est pas au cœur de sa fonction – je n’emploie plus le mot « métier » ! – de répartir des subventions.
Si nous devions considérer que cette répartition fait partie de nos attributions, alors il faudrait établir un certain nombre de critères objectifs. Or il n’y en a pas aujourd’hui. Nous sommes, les uns et les autres, plutôt sollicités par nos amis politiques que par ceux d’un autre bord. (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
MM. Philippe Bas et Henri de Raincourt. Pas du tout !
M. Alain Anziani. J’ai dit « plutôt », et je pense n’être pas loin de la vérité. Libre à chacun d’être hypocrite en la matière...
Le véritable scandale, c’est l’attribution d’une réserve parlementaire dix ou vingt fois supérieure à un tel plutôt qu’à tel autre.
Mmes Nathalie Goulet et Jacqueline Gourault. C’est vrai !
M. Alain Anziani. Comment expliquer qu’existent dans une république de telles disparités entre parlementaires ? Il n’y a aucune raison !
Je partage l’avis de Mme Rossignol : ce n’est pas le moment de priver nos collectivités locales de ces 150 millions d’euros de réserve parlementaire, car elles ne pourraient sans doute pas retrouver de tels montants. Mais instaurons au moins une transparence totale !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Sueur, rapporteur. J’approuve tout à fait ces deux amendements identiques, sur lesquels la commission a émis un avis favorable.
Il est bon que nous puissions enfin aborder ce sujet dans nos assemblées. Il n’y a en effet aucune raison de ne pas dire la vérité et de ne pas établir la transparence pour ce qui est de l’affectation de fonds publics votés par le Parlement et figurant au budget de l’État, au sein des crédits du ministère de l’intérieur.
Je suis tout à fait certain que la publication de la réserve renforcera les pratiques vertueuses qui, depuis quelque temps, notamment au Sénat, tendent à une répartition équitable des fonds entre les parlementaires. Que l’on sache à quelles communes ou, le cas échéant, à quelles associations les crédits ont été affectés me paraît naturel, car il y va ainsi de toute subvention à caractère public.
Toutes sortes de considérations peuvent être prises en compte. Pour ma part, je suis de ceux qui examinent les demandes dans l’ordre où elles arrivent à partir du mois de janvier. Je privilégie aussi le soutien aux petites communes, parce que beaucoup d’entre elles rencontrent des difficultés pour réaliser un certain nombre de travaux et d’investissements. Que nous puissions contribuer au financement de leurs projets est bénéfique ! (MM. Philippe Bas et Gérard Longuet acquiescent.)
Au total, je revendique pleinement les choix qui sont faits, très naturellement, dans mon département. Au reste, ils sont parfaitement publics, et l’on en parle souvent.
Il me paraît certain que la transparence permettra l’équité et préviendra toute situation susceptible d’être critiquée. Les sommes en question continueront de bénéficier, du moins je l’espère, à de petites communes et à de petites collectivités territoriales, auxquelles elles sont souvent très utiles.