Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. J’ai beaucoup d’amitié pour vous, mon intervention commence donc mal (Sourires.), parce que je ne peux pas ne pas réagir. Vous avez mis en place la semaine de quatre jours. Où sont allés les enfants ? Chez eux ! Quelle garantie l’État a-t-il apportée ?
M. Jacques Chiron. Aucune !
M. Vincent Peillon, ministre. Les enfants de milieu modeste, quand ils ne sont plus à l’école, où sont-ils ? Ils ne sont pas au centre équestre !
Mme Françoise Laborde. C’est vrai !
M. Vincent Peillon, ministre. Et maintenant, vous demandez la garantie de l’État ? Mais vous n’avez pas dû lire le texte ! (Eh oui ! sur les travées du groupe socialiste.-Mme Sophie Primas proteste.)
Pour un projet éducatif de territoire, pour la réforme des rythmes scolaires, il y a une garantie d’État ! Aucun projet ne sera signé si le directeur académique des services de l’éducation nationale ne le valide pas.
Ce que vous nous demandez, nous le faisons ! Ce que vous nous demandez, vous l’avez défait précédemment ! Ayez un peu de cohérence, et d’obligeance aussi, s’il vous plaît ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je voudrais rebondir sur ce qui vient d’être dit, en anticipant un peu sur ce que je voulais exposer plus tard dans la discussion.
Il faut être honnête. (Ah ! sur les travées du groupe socialiste.) Quand la suppression du samedi matin a été décrétée, il n’a jamais été dit que le reste de la semaine scolaire devait s’organiser sur quatre jours seulement. Le choix de travailler également le mercredi matin, donc de travailler quatre jours et demi ou quatre jours, a été laissé aux équipes éducatives, et donc aux élus qui accompagnent l’organisation de l’école.
Dans la majeure partie des cas, cependant, les équipes éducatives, car je pense que les élus se sont ralliés à leur point de vue, ont choisi les quatre jours. Il est donc un peu trop facile de rejeter la responsabilité sur les seuls élus de droite ou du centre, qui auraient absolument voulu que l’on passe soudainement de quatre jours et demi à quatre jours. Je tenais tout de même à rappeler que cela n’est pas conforme à la vérité historique !
M. Jacques Chiron. En tout cas, ce n’est pas la faute du Gouvernement !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Étant donné l’heure, il n’est peut-être pas utile que nous nous lancions dans un grand débat sur les responsabilités des uns et des autres, mais je voudrais simplement faire remarquer que la réforme des quatre jours avait été à l’époque assez largement approuvée par la société française. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme Dominique Gillot. C’étaient des promesses électorales !
M. Jacques Legendre. Je rappelle également que la possibilité de choix laissée aux équipes enseignantes a parfois été perçue comme un acquis, à tel point que l’on a aujourd’hui du mal à faire marche arrière et à élargir à nouveau le dispositif. Il faut simplement le constater !
Alors, puisqu’il est nécessaire de revoir les rythmes scolaires, je le crois profondément, mais que, sur ce point, sans doute, une difficulté est apparue au moment de modifier à nouveau l’organisation, nous pensons simplement qu’il aurait été plus judicieux, monsieur le ministre, de pratiquer d’avantage la concertation (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.), afin de faire disparaître les incompréhensions ou les difficultés qui pourraient surgir ici et là, quitte à retarder d’un an le démarrage de l’opération. (Protestations sur les mêmes travées.)
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Mais cela fait deux ans qu’il y a concertation sur le sujet !
M. Jacques Chiron. Tout de même !
M. Jacques Legendre. J’ajoute qu’utiliser comme argument essentiel un appât financier, au demeurant très modeste, et annoncer que ceux qui ne se précipiteraient pas en seraient privés l’année suivante n’était sans doute pas la meilleure manière de motiver les uns et les autres.
J’observe d’ailleurs que, parmi les communes qui ne se sont pas senties en état d’appliquer tout de suite la réforme, il n’y a pas simplement des rétrogrades qui refusent d’obéir au ministère, il y a des communes de toutes tendances, qui ont estimé, de bonne foi, qu’elles n’étaient pas immédiatement capables de le faire.
M. Jacques-Bernard Magner. L’inverse est vrai aussi, il y a des communes de droite qui l’appliquent !
M. David Assouline. Celles qui ne le font pas ne nous demandent pas pour autant d’arrêter !
M. Jacques Legendre. Je ne pense pas que Mme Aubry ait décidé de retarder d’un an l’application de la réforme à Lille pour vous déplaire, monsieur le ministre ! Comme d’autres élus de toutes tendances et de toutes couleurs politiques, elle a estimé préférable de prendre le temps nécessaire. Il serait raisonnable d’en tirer les conséquences au moment du vote de cette loi !
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour explication de vote.
Mme Françoise Laborde. Je reconnais que je vais être un peu polémique… Nous avons fait de la philosophie précédemment, et c’était d’un plus haut niveau, mais tant pis ! Je ne peux pas m’en empêcher ! (Sourires.)
Mme Catherine Morin-Desailly. On ne polémique pas, on discute !
M. David Assouline. Laissez parler Mme Laborde !
Mme Françoise Laborde. Je ne raconterais pas l’histoire de la même façon. Quand le président Sarkozy a décidé que nous passerions de quatre jours et demi à quatre jours, j’ai compris que, comme à Paris, on travaillait le samedi matin, cela facilitait les départs en vacances ou en week-end, surtout pour ceux qui habitent Neuilly ! (M. Jacques Legendre proteste.)
M. Jacques Chiron. Voilà !
Mme Françoise Laborde. J’ai compris également que, pour les familles séparées, il était plus simple de disposer du samedi matin, parce que l’on n’habite pas toujours dans la même rue…
Mme Catherine Morin-Desailly. Ça, c’est vrai !
Mme Françoise Laborde. Tout cela partait donc d’un bon sentiment, et j’ai pu croire un temps – étais-je naïve ! - que nous allions troquer le samedi matin contre le mercredi matin, comme cela se fait en Haute-Garonne.
Mais pas du tout ! Tout le monde s’est emparé du sujet, et a trouvé que quatre jours, c’était merveilleux ! La Haute-Garonne a fait un peu de résistance ― M. le ministre est d’ailleurs venu il y a peu à Toulouse ―, en obtenant dérogation sur dérogation. Elle était en avance sur son temps, et n’a plus besoin de dérogation !
On ne peut donc pas laisser dire n’importe quoi. Quatre jours et demi, cela signifiait passer du samedi matin au mercredi matin, et non supprimer d’un seul coup le mercredi !
Mme Catherine Morin-Desailly. Exactement !
Mme Françoise Laborde. Merci M. Sarkozy !
Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Gillot, pour explication de vote.
Mme Dominique Gillot. Je partage tout à fait l’analyse de Mme Laborde, mais je voudrais ajouter un autre argument.
Avec la suppression du samedi matin, l’éducation nationale a économisé deux heures de cours dispensés à tous les élèves pour les redistribuer ensuite à quelques élèves sous forme de soutien individualisé.
Des centaines de milliers d’enfants ont donc été privés de deux heures d’enseignement qui ont été redistribuées à quelques autres, cela permettant, ensuite, de dévitaliser les RASED, ces dispositifs de soutien aux enfants.
Mme Françoise Laborde. Tout à fait !
Mme Dominique Gillot. Aujourd’hui, il s’agit effectivement de restructurer le temps de l’enfant, mais il est difficile de revenir aux 26 heures d’enseignement devant tous les enfants. Les enseignants doivent 27 heures de service par semaine, qui sont réparties de manière cohérente, avec 24 heures d’enseignement en classe. Il est proposé en outre, à travers le projet éducatif territorial, de compléter les activités éducatives, qui, en leur ouvrant l’esprit, permettront aux enfants d’être plus agiles et mieux disposés pour les apprentissages scolaires.
N’oublions donc pas qu’au-delà de la satisfaction d’une promesse électorale du candidat Sarkozy, la semaine de quatre jours a été une bonne occasion pour l’éducation nationale d’économiser un certain nombre d’heures d’enseignement et de les convertir.
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas vrai !
Mme la présidente. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Marie-Christine Blandin, présidente de la commission de la culture. Mes chers collègues, ce débat salutaire montre que nos convictions sont semblables pour ce qui est de notre ambition pour l’école, différentes sur la façon de réussir dans notre démarche et très différentes au sujet de l’avenir, de l’application de ces mesures et des contentieux possibles !
Mais ce n’est pas l’objet de mon propos. Je ne souhaite en cet instant que vous donner quelques indications relatives à nos travaux, mes chers collègues.
Il nous reste 229 amendements à examiner, autant dire que ceux qui croyaient pouvoir en terminer cette nuit se trompaient !
En général, nous traitons quinze amendements par heure, ce qui conduirait à clore ce débat samedi, vers vingt heures. Mais, et c’est une très mauvaise nouvelle, depuis ce matin, nous examinons plutôt dix amendements à l’heure… Si nous en restons à ce rythme, nous prendrons le goûter ensemble dimanche ! (Sourires.)
M. Dominique Bailly. Vous cassez l’ambiance, madame la présidente !
Mme Françoise Laborde. En voilà une manière de ramener le calme !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques n° 226 et n° 343 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Madame Gillot, l’amendement n° 329 est-il maintenu ?
Mme Dominique Gillot. Nous nous sommes déjà beaucoup exprimés sur ce sujet, mais je voulais attirer l’attention sur la distinction à faire entre activités périscolaires et activités éducatives complémentaires.
Le périscolaire a un statut particulier, c’est un service qui est organisé par les collectivités locales pour aider les parents qui ne peuvent pas récupérer leurs enfants après le temps scolaire. Cela justifie qu’il s’agisse d’activités tarifées.
Je forme le vœu que le nouveau temps scolaire, c’est-à-dire le temps éducatif rendu possible avec le projet éducatif de territoire, soit consacré à des activités éducatives complémentaires, ouvertes à tous les enfants, sans obligation de tarification.
Je sais bien que cela ressortit à la liberté et à l’autonomie des communes et que nous ne pouvons pas l’inscrire dans la loi, mais il me semble important que le débat rende compte de ce souci que les activités éducatives complémentaires profitent à tous les enfants, sans distinction de ressources familiales.
Cela étant dit, je retire cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 329 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 7 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Monsieur Gattolin, maintenez-vous l’amendement n° 173 ?
M. André Gattolin. Non, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 173 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 8 rectifié.
J'ai été saisie d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 235 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 171 |
Contre | 175 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 9 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 46.
(L'article 46 est adopté.)
Article additionnel après l'article 46
Mme la présidente. L'amendement n° 41 rectifié, présenté par M. Carle, Mme Primas, MM. Humbert et B. Fournier, Mmes Mélot et Duchêne et M. Duvernois, est ainsi libellé :
Après l'article 46
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La première phrase de l’article L. 521-1 du code de l’éducation est ainsi rédigée :
« L’année scolaire comporte trente-six semaines au moins qui peuvent être réparties en cinq périodes de travail, séparées par quatre périodes de vacance des classes pour tenir compte des contingences calendaires et des jours fériés. »
La parole est à Mme Sophie Primas.
Mme Sophie Primas. La réforme des rythmes scolaires dont nous venons de parler avec véhémence vise à mieux répartir les heures de classe, afin de pouvoir programmer les enseignements à des moments où la faculté de concentration des élèves est la plus grande, et nous en sommes tout à fait d’accord.
Si les répartitions quotidienne et hebdomadaire des heures d’enseignement sont essentielles, l’organisation annuelle l’est tout autant, et elle doit garantir, autant que faire se peut, un équilibre entre les périodes de travail et les périodes de vacances. Or, aujourd'hui, selon les zones et le positionnement des jours fériés, le troisième trimestre peut compter jusqu’à onze semaines.
Depuis 2010, une grande concertation est menée sur les rythmes scolaires, qui associe des chronobiologistes, l’Académie nationale de pharmacie et l’Académie nationale de médecine. Cette dernière a rendu, sous son timbre, un rapport qui relance la question du rythme « 7-2 », réforme engagée depuis 1980, puis abandonnée en raison de la mise en œuvre des zonages.
Cet amendement a pour objet de faciliter la mise en œuvre de l’organisation calendaire, afin de programmer, au cours de l’année, une véritable alternance entre, au plus, sept semaines de cours et deux semaines de vacances, tout en maintenant des zonages respectant les intérêts économiques et sociaux de notre pays.
Monsieur le ministre, vous avez annoncé le lancement d’une concertation. Quand débutera-t-elle et selon quelles modalités ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Je déduis de vos propos, madame Primas, que vous êtes favorable à une réorganisation du calendrier des vacances scolaires. Mais que devient alors la concertation, terme que vous avez vous-même employé ? Vous le comprendrez aisément, émettre un avis favorable sur votre amendement reviendrait à tourner le dos à la concertation mise en place par M. le ministre de l’éducation nationale depuis sa prise de fonctions.
Vous avez trouvé insuffisante la concertation qui a été engagée au sujet de la semaine de quatre jours et demi : comment pouvez-vous nous demandez d’adopter un amendement qui s’appuierait sur une concertation a minima ?
Je vous demande, ma chère collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, la commission émettra un avis défavorable, car il serait contraire à la méthode de travail pratiquée depuis des mois !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Primas, l'amendement n° 41 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sophie Primas. Il s’agit évidemment d’un amendement d’appel. Nous souhaiterions connaître le calendrier de cette concertation, ainsi que les modalités relatives à la participation des acteurs économiques.
Si j’obtiens une réponse documentée de M. le ministre, je suis prête à retirer mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Madame la sénatrice, nous avons installé un comité de suivi de la réforme des rythmes scolaires au sein duquel siègent des représentants de toutes les associations d’élus. Ce comité dressera un état des lieux des mesures qui ont été prises cette année. À la rentrée scolaire 2013-2014, 22 % des élèves passeront à la semaine de quatre jours et demi ; il en restera donc 78 % pour la rentrée 2014-2015. Ce sont de véritables travaux d’Hercule !
Dans cette concertation, nous déterminerons ce que sera le bon calendrier pour cette véritable révolution dans la mesure où l’organisation annuelle posera nombre de problèmes.
Je tiens à vous le rappeler, j’avais mis cette question sur la table au début de la concertation que j’avais engagée. Ce sont les associations que vous me reprochez de ne pas avoir consultées qui m’ont demandé de ne pas traiter tout de suite cette question de l’organisation annuelle.
Mme la présidente. Qu’en est-il en définitive de votre amendement, ma chère collègue ?
Mme Sophie Primas. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 41 rectifié est retiré.
Article 47
Il est institué, pour les années scolaires 2013-2014 et 2014-2015, un fonds en faveur des communes et, lorsque les dépenses de fonctionnement des écoles leur ont été transférées, des établissements publics de coopération intercommunale, afin de contribuer au développement d’une offre d’activités périscolaires au bénéfice des élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ou privées sous contrat dont les enseignements sont répartis sur neuf demi-journées par semaine.
Les aides apportées par le fonds sont calculées en fonction du nombre d’élèves éligibles scolarisés dans la commune ou les communes membres de l’établissement de coopération intercommunale et comportent :
1° Un montant forfaitaire par élève versé aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale dont les écoles organisent les enseignements sur neuf demi-journées à la rentrée scolaire 2013-2014. Le versement de ce montant forfaitaire ne peut être renouvelé au titre de l’année 2014-2015 ;
2° Une majoration forfaitaire par élève réservée aux communes mentionnées aux articles L. 2334-18-4 et L. 2334-22-1 du code général des collectivités territoriales ainsi qu’aux communes des départements d’outre-mer et de Saint-Pierre-et-Miquelon bénéficiant de la quote-part de la dotation d’aménagement prévue au quatrième alinéa de l’article L. 2334-13 du même code et à la collectivité de Saint-Martin. Pour les communes dont les écoles organisent les enseignements sur neuf demi-journées à la rentrée scolaire 2013-2014, le versement de cette majoration forfaitaire est reconduit au titre de l’année 2014-2015. Les communes dont les écoles organisent les enseignements sur neuf demi-journées à compter de la rentrée 2014-2015 bénéficient de la majoration au titre de cette année.
Les aides versées au titre du présent fonds pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ne sont pas prises en compte dans le calcul des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat mentionnées à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 442-5 du code de l’éducation.
La gestion du fonds est confiée pour le compte de l’État à l’Agence de services et de paiement.
Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. Il précise notamment les modalités d’attribution du fonds et de calcul des aides attribuées aux établissements public de coopération intercommunale auxquels ont été transférées les dépenses de fonctionnement des écoles.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, sur l'article.
Mme Catherine Morin-Desailly. L’article 47 du projet de loi institue un fonds d’aide aux communes pour la mise en place de la réforme des rythmes scolaires. Il s’agit, j’y insiste, du seul article de ce texte qui concerne les temps scolaires. À cet égard, je formulerai deux remarques.
D’une part, comme nous l’avons rappelé lors de la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable, le terme de « refondation » n’est pas pertinent, car nous n’aurons jamais débattu de la refonte des temps de l’enfant – nous le faisons maintenant ! – et des temps de l’éducation, qui sont de nature à créer les bonnes conditions de l’apprentissage.
D’autre part, le fait d’évoquer la réforme des rythmes scolaires par le seul biais du financement dans les collectivités dénote malheureusement une vision réductrice du rôle et de la place des collectivités et de leurs représentants dans le système éducatif.
Monsieur le ministre, gouverner, c’est choisir, avez-vous dit ! Certes, mais il ne faut pas choisir à la place des autres : il faut choisir avec eux.
Les critiques qui ont été formulées à propos de la mise en œuvre de la réforme persistent. Rappellerai-je les avis négatifs qu’a recueillis le décret avant sa publication ? Mais permettez-moi d’insister surtout sur le faible taux d’application des nouveaux rythmes scolaires, et ce quelle que soit la sensibilité politique des responsables des communes : quasiment 75 % des communes préfèrent attendre la rentrée de 2014-2015.
Nous avons présenté précédemment un amendement pour faire en sorte que les collectivités locales soient mieux associées aux réformes de l’éducation, afin de tirer les conséquences de ce qui s’est passé en ce début d’année.
Le délai accordé pour la mise en place des nouveaux rythmes scolaires avant la rentrée de 2013 est limité. Il n’est pas suffisant pour permettre à tous les acteurs – les élèves et leurs parents, les enseignants, les associations culturelles et sportives et les collectivités – de se concerter, en vue de mettre en place un cadre satisfaisant pour les enfants. Monsieur le ministre, vous avez très largement sous-estimé l’effet dominos créé par le changement des rythmes scolaires sur le temps extrascolaire.
Par ailleurs, je formulerai une critique majeure.
Cette réforme a été d’emblée généralisée à tout le territoire et à toutes les communes, quelle que soit leur taille. Dans les communes importantes, cette modification peut être absorbée assez facilement, mais elle pose des problèmes quasi insolubles dans les plus petites, comme cela a été rappelé à de nombreuses reprises au cours de la discussion.
Monsieur le ministre, les collectivités sont très inquiètes face à ce qu’elles considèrent être une forme de désengagement de l’État dans la responsabilité éducative.
Ainsi, l’absence de précision sur le temps des enseignants empêche de mesurer les conséquences induites en termes de réorganisation et de responsabilité pour les services périscolaires.
Les élus sont également inquiets quant au financement de cette réforme. Non pas qu’ils ne priorisent pas l’école sur leur territoire, bien au contraire – ils font d’ailleurs des efforts majeurs en ce sens –, mais la réforme des rythmes scolaires, avec le passage à la semaine de quatre jours et demi, représentera un coût important, que les communes et les EPCI compétents en matière scolaire ne pourront assumer seuls.
La contrepartie proposée par le fonds en faveur des communes prévu à l’article 47 ne compense pas suffisamment la surcharge financière induite. De plus, on le sait déjà, les crédits de ce fonds seront moindres en 2014, alors que près des trois quarts des communes n’appliqueront la réforme que cette année-là.
Oserais-je ajouter que c’est à partir de cette même année que les dotations versées par l’État aux collectivités locales diminueront terriblement ? Nous aurons alors à redouter un effet de ciseaux supplémentaire.
Par ailleurs, j’aimerais, monsieur le ministre, que vous nous éclairiez sur les sources de financement de ce fonds. S’il revient à la CNAF, la Caisse nationale des allocations familiales, d’abonder ce fonds, nous aimerions savoir pour quel montant et, surtout, au détriment de quelle politique. C’est une question d’autant plus importante que la convention d’objectifs et de moyens est en cours de négociation et que l’évolution des crédits du Fonds national d’action sociale n’est pas connue.
Je crains, mes chers collègues, que les sommes octroyées aux collectivités au titre de ce fonds ne leur soient tout simplement reprises d’une autre main, au détriment de la politique sociale qu’elles mènent, notamment en faveur de la petite enfance, et des politiques de la ville, c'est-à-dire au détriment des parents.
Finalement, c’est toute la politique d’accompagnement des enfants en dehors de l’école qui serait remise en question. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons, monsieur le ministre, avoir l’assurance qu’il n’en sera pas ainsi.
Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, sur l'article.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. La réforme des rythmes scolaires a fait l’objet de débats vifs et d’oppositions certaines. On se souvient des grèves des enseignants du primaire, du rejet des instances consultatives et de l’opposition de maires.
Les rythmes scolaires peuvent être un paramètre susceptible de favoriser la réussite des élèves, mais, seuls, ils ne suffiront jamais à lutter contre l’échec scolaire.
La réforme telle qu’elle est prévue nous inquiète, car elle risque de déstabiliser l’école par manque de clarté, s’agissant tant de ses visées que de ses modalités d’application.
Quant au délai de mise en œuvre par les communes, ils sont extrêmement serrés, comme on l’a vu.
Le débat a finalement perdu de sa dimension éducative pour se trouver arbitré et jaugé à l’aune des capacités financières des communes, qui ont la charge de mettre en œuvre ces réformes.
La question se pose également des rôles respectifs du scolaire et du périscolaire ; selon nous, ils ne sont pas suffisamment précisés. Des activités pédagogiques pourront être mises en place, mais le Gouvernement ne dit pas au service de quel projet éducatif. La brièveté du temps accordé à ces activités – de 30 à 45 minutes – en réduit la portée et soulève la question du personnel encadrant ; la solution ne peut résider dans l’assouplissement des normes d’encadrement, qui risquerait de nuire à la sécurité des enfants.
Sans périmètre précis, cette réforme risque d’aggraver les inégalités territoriales devant le service public de l’éducation nationale, inégalités que la droite a déjà amplifiées pendant dix ans.
En effet, si le coût de la réforme n’est pas précisément évalué – les estimations les plus abouties le situent à environ 150 euros par élève –, on sait qu’il sera trop élevé pour que les communes les plus pauvres puissent le supporter. Dès lors, comment pourront-elles prendre en charge les nouvelles activités pédagogiques périscolaires ? Comment feront-elles face à l’augmentation de la demande en matière de transports scolaires, de cantine et de centres de loisirs qui résultera de la scolarisation le mercredi matin ?
On nous répond qu’une dotation exceptionnelle de 250 millions d’euros sera octroyée aux communes. Seulement, ce financement est largement insuffisant, sans compter qu’il est mobilisé davantage à des fins d’incitation et qu’il ne pourra pas être maintenu dans la durée. Du reste, en dépit de ce fonds d’incitation, la majorité des communes ont décidé de reporter l’application de ces dispositions en 2014.
Mes chers collègues, nous ne comprenons décidément pas la précipitation avec laquelle cette réforme a été menée. Nous aurions préféré que l’on prenne davantage le temps de la réflexion !