Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Je ne cessais d’approuver les propos de M. Legendre : est-ce de la fatigue ? (Sourires.)
M. Jacques Legendre. De la bonne fatigue ! (Nouveaux sourires.)
M. Vincent Peillon, ministre. Vous l’aurez compris, notre objectif n’est pas la réforme du baccalauréat ou de l’enseignement secondaire, qui viendra en son temps. Commençons par mener à bien cette première réforme.
Nous voulons rapprocher les trois baccalauréats. Nous n’arriverons à surmonter les difficultés tellement anciennes de hiérarchisation entre les trois catégories de lycées et entre les filières à l’intérieur même du lycée général qu’avec des réformes beaucoup plus audacieuses que celles qui ont été menées précédemment. Il faudra aussi évoquer l’articulation entre le lycée et les premières années des études supérieures. Ces questions doivent être traitées en bloc.
Vous le savez, nous avons décidé de réserver les sections de technicien supérieur et d’IUT aux élèves issus des baccalauréats technologiques et professionnels, qui en ont été évincés ces dernières années. Car quand il n’y a pas perspective de progression, il y a dévalorisation de la formation.
Ce chantier ne sera pas abandonné. Vous évoquez les nombreux travaux que vous avez réalisés, dont nous pouvons partager une partie des conclusions. Certains rapports ont même été, et c’est naturel, adoptés à l’unanimité.
Dès lors, la question que doivent se poser tous ceux qui aiment l’école est la suivante : pourquoi tant de propositions, tant de bonnes intentions, n’ont-elles pas trouvé de traduction dans les faits ? Nous devons donc analyser les obstacles qui se dressent depuis trente ans sur le chemin des réformes. Nous verrons alors mieux comment les surmonter.
D’ailleurs, c’est le sens de la démarche scientifique. C’est en analysant les obstacles surmontés et les erreurs rectifiées que la science se développe.
Le projet de refondation de l’école – c’est peut-être difficile à comprendre au départ, entre le texte, le rapport d’orientation, la programmation et les annonces qui peuvent être faites – est fondé sur une méthodologie ordonnée. Commençons par le commencement, c'est-à-dire ce qui est le plus facile, pour ensuite réduire les difficultés et avancer progressivement. La réforme du lycée viendra ensuite, je l’espère avec une inspiration aussi ambitieuse et, si possible, le même consensus.
Je n’ai pas souligné par hasard au début de la discussion générale le caractère consensuel de ce texte. Réforme des rythmes, priorité au primaire, formation des enseignants : je savais que tout le monde était d’accord. On voit la difficulté quand on passe à la mise en œuvre.
Sur le collège et sur le lycée, le ministère a démarré les discussions, comme sur l’éducation prioritaire ou sur le métier d’enseignant. Mais là, vous le savez, nous sommes loin d’avoir trouvé les consensus. Il faudra un peu plus de temps pour mettre en œuvre cette grande réforme, pour qu’elle produise enfin des résultats.
Mme la présidente. L'amendement n° 127, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. P. Laurent, Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2, seconde phrase
Remplacer cette phrase par deux phrases ainsi rédigées :
Il comporte la vérification d’un niveau de culture défini par les programmes du lycée, ainsi que le contrôle des connaissances et des compétences dans des enseignements suivis par l’élève en dernière année. Ce contrôle est effectué indépendamment dans chacun de ces enseignements.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Cet amendement tend à revenir à la rédaction initiale du projet de loi avant son examen à l’Assemblée nationale, ce qui est assez rare pour être souligné.
En effet, cette nouvelle formulation ouvre la porte à une réforme du baccalauréat qui pourrait passer, en partie ou en totalité, en contrôle en cours de formation sur les années de cycle terminale, voire sur les trois années pour la voie professionnelle. Cela ne manquerait pas de décrédibiliser le bac pro. Vous le savez, je plaide au contraire pour sa revalorisation grâce à la possibilité d’un retour vers un passage en quatre ans, qui n’interdirait pas, d’ailleurs, des possibilités en trois ans.
Attachés au diplôme national du bac, nous nous inquiétons de la réforme qui pourrait s’engager ainsi au détour d’un amendement.
Pour avoir participé aux travaux d’un groupe de travail sur le bac il y a quelques années au sein de la commission de la culture, je sais la forte portée symbolique que cet examen revêt et je n’ignore pas que toute réforme « à la hussarde » du bac serait assez largement incomprise.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. La rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale paraît plus souple et plus favorable à l’interdisciplinarité. Aussi, la commission est défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 37.
(L'article 37 est adopté.)
Article additionnel après l'article 37
Mme la présidente. L'amendement n° 371, présenté par Mme Gonthier-Maurin, MM. P. Laurent, Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 37
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 335-1 du code de l'éducation est ainsi rédigé :
« Les formations sous statut scolaire ou étudiant permettent une entrée dans la vie professionnelle aux différents niveaux de qualification exigés par l’évolution des métiers. Elles permettent également la poursuite d’études autorisant des réorientations par le développement de passerelles au sein et entre les trois voies. »
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Aujourd’hui, un élève sur quatre sortant de troisième poursuit ses études dans la voie professionnelle, en CAP ou en bac professionnel, très majoritairement sous statut scolaire, même si les formations sous statut d’apprenti se sont développées ces dernières années.
Cette voie de formation en lycée a fortement contribué, avec la création du bac professionnel en 1985, à l’élévation du taux de bacheliers de notre pays.
Avec la voie technologique, la voie professionnelle sous statut scolaire constitue, ainsi, une spécificité française, à laquelle nous sommes très attachés. Elle participe pleinement à la diversification des voies de réussite pour les jeunes, notamment dans les milieux populaires. Je rappelle qu’elle compte dans ses rangs 56 % de jeunes de milieux populaires, quand la voie générale en compte 23 %.
La formation professionnelle initiale est marquée par l’existence d’un système dual, puisque les jeunes peuvent opter pour des formations sous statut scolaire, mais aussi sous statut salarié avec l’apprentissage.
Cependant, avant d’être celui du jeune, ce choix appartient d’abord à l’entreprise. En effet, les candidats à l’apprentissage sont naturellement sélectionnés par les employeurs d’après les critères classiques de recrutement des salariés. Nous savons que les jeunes sont confrontés à des problèmes de discriminations. Dans de nombreuses filières, les élèves les plus fragiles scolairement et socialement se concentrent ainsi dans les lycées.
La formation professionnelle initiale est également aujourd’hui marquée par la volonté des jeunes et de leurs familles de poursuivre les études après le bac professionnel, ce qui n’était pas l’objet de ce diplôme au moment de sa création.
Cette aspiration rencontre les besoins de l’économie. Dans de nombreux métiers, les recrutements se font en effet maintenant à partir du niveau III. C’est la raison pour laquelle l’offre de formation sous statut scolaire doit se construire dans les lycées publics, dans le cadre de parcours complets et lisibles par les jeunes et leurs familles.
La formation professionnelle initiale a connu bien des bouleversements ces dernières années avec une réforme qui, au motif affiché de l’égalité des trois voies, a instauré le bac professionnel en trois ans au lieu de quatre, et a entraîné la quasi-disparition du diplôme intermédiaire que constitue le BEP.
En tant que rapporteur pour avis sur le budget de l’enseignement scolaire, je puis vous assurer que je ne finis pas de mesurer les conséquences de cette réforme, qui a ébranlé en profondeur tout le système.
Sa mise en œuvre interroge aujourd’hui l’architecture des formations dans certaines filières, je pense en particulier à la filière sanitaire et sociale en pré-bac comme en post-bac.
Elle doit absolument faire l’objet d’un bilan, tout comme la réforme de la voie technologique et générale.
La région d’Île-de-France, très engagée sur cette question – je salue l’engagement de ma collègue et amie Henriette Zoughebi – avec le travail mené sur la lutte contre le décrochage dans le cadre de l’observatoire régional pour la réussite scolaire et la mixité sociale, envisage ainsi d’expérimenter avec les académies la mise en place de ces passerelles.
En l’état actuel du projet de loi, les évolutions et les enjeux liés à la poursuite d’études, à la construction de parcours diversifiés, à la nécessité d’une complémentarité entre la formation scolaire et la formation salariée ne sont pas évoqués.
C’est pourquoi nous proposons, au travers de cet amendement, de préciser le sens et les missions spécifiques de l’enseignement professionnel sous statut scolaire, à savoir permettre une entrée dans la vie professionnelle aux différents niveaux de qualification exigés par l’évolution des métiers, rendre possible la poursuite d’études et offrir des possibilités de réorientation par le développement de passerelles entre les filières de formation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Nous partageons bien sûr les propos que vous venez de tenir, madame Gonthier-Maurin. À nos yeux, cet amendement est satisfait par le droit existant, notamment par les articles L. 335–4, L. 335–9, L. 336–1 et L. 337–1 du code de l’éducation. Aussi, je vous demande de bien vouloir le retirer.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Madame Gonthier-Maurin, l'amendement n° 371 est-il maintenu ?
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Non, madame la présidente, je fais confiance à Mme la rapporteur.
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Vous n’aurez pas à le regretter.
Mme la présidente. L'amendement n° 371 est retiré.
Section 8
La formation en alternance
Article 38
(Non modifié)
I. – L’article L. 337-3 du code de l’éducation est abrogé.
II. – Le premier alinéa de l’article L. 337-3-1 du même code est ainsi modifié :
1° Les mots : « ou accompli la scolarité du premier cycle de l’enseignement secondaire » sont supprimés ;
2° Sont ajoutés les mots : « tout en leur permettant de poursuivre l’acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture mentionné à l’article L. 122-1-1 ».
III. – Au second alinéa de l’article L. 6222-1 du code du travail, les mots : « au cours de l’année civile » et les mots : « ou avoir suivi une formation prévue à l’article L. 337-3-1 du code de l’éducation » sont supprimés.
IV. – L’article L. 6222-20 du même code est abrogé.
V. – À l’article L. 6222-21 du même code, les mots : « ou en application de l’article L. 6222-20 » sont supprimés.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, sur l'article.
Mme Françoise Férat. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je suis très attachée à la suppression de l’article 38 de ce projet de loi.
Je ne me lasserai jamais de répéter combien l’apprentissage et la formation professionnelle sont des voies d’excellence, qui permettent à des jeunes, pour près de 80 % d’entre eux, de trouver un emploi. Nous parlons, ici, de jeunes qui ont sélectionné leur parcours professionnel après un choix parfaitement mûri.
Face aux difficultés que rencontrent les jeunes à l’heure actuelle pour trouver un emploi, il paraît important de promouvoir la diversité des intelligences. Est-il besoin de rappeler ici que cette semaine ont eu lieu au Sénat la 13e édition des Rencontres sénatoriales de l’apprentissage,…
Mme Catherine Morin-Desailly. Très bien !
Mme Françoise Férat. … sur le thème « L’apprentissage, construction d’un parcours professionnel » ? Au travers de ces mots, tout est dit.
Penser que l’apprentissage puisse enfermer trop tôt des jeunes dans une filière n’est pas exact. C’est oublier que ces jeunes ont fait le choix d’un parcours en manifestant une motivation forte, épanouissante, et en bénéficiant de l’accompagnement de l’entreprise, qui n’a pas d’intérêts financiers, contrairement à ce qu’on a pu entendre ici ou là. En revanche, l’entreprise s’investit en temps et en patience pour la transmission d’un savoir-faire.
L’apprentissage est pourvoyeur d’emplois et forme à des métiers qui connaissent aujourd’hui une pénurie de main-d’œuvre.
C’est pourquoi il serait souhaitable de voter la suppression de l’article 38 de ce texte, notamment en ce qu’il limite le dispositif d’initiation aux métiers en alternance, le DIMA.
Au-delà des débats sur l’apprentissage junior et la limitation du DIMA, une difficulté demeure. Avec la rédaction actuelle de l’article 38, on en arrive à la situation incohérente où un jeune qui sort de troisième en ayant acquis le socle commun de connaissances ne pourra pas entrer en formation par apprentissage avant la date anniversaire de ses quinze ans, et ce même s’il aura quinze ans au cours de l’année civile.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 76 est présenté par Mmes Férat, Morin-Desailly et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants-UC.
L’amendement n° 222 est présenté par MM. Carle, Bordier et Chauveau, Mme Duchêne, MM. Dufaut, A. Dupont et Duvernois, Mme Farreyrol, MM. B. Fournier, J.C. Gaudin, Grosdidier, Humbert, Leleux et Martin, Mme Mélot, M. Nachbar, Mme Primas et MM. Savin, Soilihi, Vendegou et Lenoir.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Françoise Férat, pour présenter l’amendement no 76.
Mme Françoise Férat. Vous l’aurez bien compris, je suis pour la suppression de cet article, qui vise à abroger le dispositif de la loi dite « Cherpion ».
Ce dispositif, selon moi, répondait bien à un besoin spécifique de jeunes de moins de seize ans ayant terminé, c’est important de le redire, leur parcours au collège et ayant, c’est tout aussi important de le souligner, une idée claire de leur projet professionnel.
Il convient donc de maintenir ce dispositif, car l’apprentissage est une voie d’excellence.
Mme Catherine Morin-Desailly. C’est vrai !
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 222.
Mme Colette Mélot. Nous avons été nombreux à nous exprimer sur les avantages de la diversification des parcours, sur l’importance des stages, sur l’apprentissage et sur tous les dispositifs qui permettent aux jeunes de mieux connaître les voies dans lesquelles ils peuvent s’épanouir.
Il est fort dommageable de laisser des jeunes dans des classes où ils ne s’épanouissent pas et où ils sont en situation d’échec. Leur offrir une occasion de réussir autrement grâce à l’apprentissage peut être un facteur déclenchant.
Il est primordial de supprimer cet article pour ne pas abroger la loi dite « Cherpion », qui a introduit un dispositif d’initiation aux métiers en alternance pour les jeunes de quinze ans.
Ce dispositif doit être mis en œuvre, car il répond à une véritable demande de diversification des parcours à partir de la quatrième. Il n’est pas du tout en opposition avec la maîtrise du socle commun de connaissances et de compétences, dont l’acquisition peut continuer jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire, de même que l’apprentissage d’une langue vivante peut se poursuivre durant le DIMA.
Ce dispositif, qui permet à des élèves sous statut scolaire d’entrer dans la voie professionnelle, est souhaité par de nombreuses familles. L’apprentissage de la « main » est aussi une filière d’excellence.
M. Jacques Legendre. Effectivement !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Vincent Peillon, ministre. Qu’il me soit permis de revenir, une fois encore, sur l’exactitude des faits, et je demande bien sûr à chacun de procéder aux vérifications nécessaires.
L’article 38 du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République vise à supprimer deux dispositions relatives à une orientation trop précoce : ce qui s’appelait l’apprentissage junior et l’accès au DIMA pour les jeunes de moins de quinze ans.
L’apprentissage junior n’est pas lié à la loi Cherpion ni au DIMA. Il est aujourd’hui obsolète, contraire au droit européen et son abrogation n’est guère contestée. Elle avait d’ailleurs été annoncée par la majorité précédente, mais celle-ci ne l’avait finalement pas mise en œuvre. En l’occurrence, nous ne faisons qu’ordonner les choses.
Ce dispositif n’avait fonctionné que sur l’année 2006–2007 ; il avait concerné une centaine de jeunes. C’est dès 2007 que le précédent gouvernement avait indiqué qu’il souhaitait le supprimer. Je ne sais pourquoi il n’est pas passé à l’acte, mais, dans les faits, cela ne changeait rien.
Le DIMA, dispositif d’initiation aux métiers en alternance, a été introduit par la loi Cherpion en juillet 2011.
Tel qu’il avait été conçu par la loi Cherpion, le DIMA permettait d’écarter dès quatorze ans un jeune de la scolarité normale du collège et de l’occuper – car il n’est pas encore en stage, contrairement à ce que j’entends ! – en lui faisant plus ou moins découvrir un champ professionnel – il faut voir, sur le terrain, ce que cela a donné – en attendant qu’il trouve un contrat d’apprentissage, qui venait assez rarement, parce que les entreprises n’ont pas envie de donner un contrat professionnel, de surcroît dans la situation économique actuelle, à un jeune de quatorze ans, préférant prendre de plus âgés ?
Théoriquement en tout cas, dès que ce contrat aurait été trouvé et signé, donc éventuellement dès quatorze ans ou au bout de quelques mois, le jeune pouvait sortir du DIMA pour entrer en apprentissage.
En pratique, sachez tout de même – et, là encore, cela renvoie à des déclarations – que ce dispositif n’a jamais été mis en place tel qu’il avait été initialement conçu, puisqu’il devait être appliqué à la rentrée 2012 et que l’alternance politique m’a conduit à ne pas le mettre en œuvre.
Ainsi, les jeunes qui ont entamé un DIMA pour l’année scolaire 2012–2013 sont entrés dans un dispositif corrigé déjà par ma circulaire de rentrée 2012. L’article 38 du projet de loi est donc au-delà de quatorze ans.
Cet article 38 supprime les dispositions qui font du DIMA un dispositif d’orientation précoce et un sas d’attente d’un contrat d’apprentissage. Il en fait un dispositif de découverte de la formation par apprentissage dans le cadre de la dernière année de scolarité au collège : un jeune doit avoir quinze ans révolus – là est la différence – pour entrer dans ce dispositif ; le collège doit lui permettre de poursuivre – ce n’était pas le cas – l’acquisition du socle commun, de telle sorte que ce jeune puisse faire un autre choix d’orientation en fin de troisième, s’il le souhaite, en particulier si le DIMA ne s’est pas avéré concluant pour lui. Vous évoquez sans cesse des passerelles : en voilà une qui manquait !
Le projet de loi maintient, je le redis, la possibilité pour des jeunes de plus de quinze ans d’accéder à une classe de troisième « préparatoire à l’apprentissage ». Cette classe répond à un besoin réel de certains jeunes. Aujourd'hui, ils sont 7 000 à être concernés, ce qui n’est pas un nombre considérable.
En outre, je rappelle que les entreprises n’étaient pas du tout demandeuses d’apprentis de quatorze ans, car ce n’est pas ce qu’elles souhaitent, et, donc, l’offre de stages ne suivait pas.
Enfin, la possibilité d’entrer en apprentissage à quatorze ans contredit la directive européenne 94/33/CE du 22 juin 1994 relative à la protection des jeunes au travail.
La loi de 2011 était une loi idéologique dans sa formulation, qui n’était même pas efficace – elle n’a donné aucun résultat – et qui contrevenait à la fois au droit et au progrès. Nous gardons l’apprentissage, auquel je crois, sous statut scolaire. Nous devons construire une offre de stages ; ce n’était pas l’objectif de cette loi.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
Mme Françoise Cartron, rapporteur. Défavorable, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, pour explication de vote.
Mme Françoise Férat. Monsieur le ministre, je le dis en toute objectivité, j’ai besoin de comprendre. J’ai sous les yeux la fameuse directive que vous avez évoquée, qui dispose : « Sans préjudice de règles plus favorables aux jeunes, notamment celles assurant par la formation leur insertion professionnelle et sauf dérogations limitées à certains travaux légers… ». Manifestement nous n’avons pas la même appréhension du texte, car, selon moi, il existe bien des possibilités de dérogations.
Vous avez également dit que le dispositif n’avait pas réellement fonctionné depuis 2006. Moi qui ai la chance, à travers l’enseignement agricole, de parcourir la France, je peux vous donner un exemple tout à fait vérifiable qui se passe en Vendée, un département que je connais un peu, même si ce n’est pas le mien : cette année, 1 300 apprentis ont trouvé un maître de stage, mais 100 jeunes sont concernés par la fixation de l’âge minimal à quinze ans. N’allez pas croire que ces pauvres enfants seraient retirés du collège sans avoir une formation convenable ! Ces 100 jeunes ont bien acquis le socle commun, n’ont pas quinze ans et vont devoir attendre leur date anniversaire. Que vont faire ces jeunes ? Le maître de stage qu’ils ont trouvé va-t-il patienter ? On m’a répondu qu’ils iront en seconde au lycée. Très honnêtement, ils ont choisi un parcours, ils n’éprouveront pas d’intérêt pour suivre pendant cette période les enseignements lycéens.
C’est un véritable problème, monsieur le ministre. Je ne sais comment le résoudre.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 76 et 222.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)