Mme Catherine Procaccia. C’est vrai !

M. Hervé Marseille. Alors, pourquoi adopter cette démarche, si ce n’est pour donner satisfaction à certains partenaires sociaux ?

En conclusion, ni les assurés, ni les entreprises, ni les mutuelles et sociétés d’assurance n’ont vocation à être affectés au nom de la sécurisation de l’emploi : on peut malheureusement craindre qu’il ne s’agisse, en réalité, que de sécuriser le financement de certaines institutions…

C’est là pour nous une préoccupation majeure, monsieur le ministre, et les amendements que nous allons présenter tendent à améliorer la lisibilité et la transparence du dispositif. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)

M. le président. La parole est à M. André Reichardt, sur l’article.

M. André Reichardt. Je tiens tout d’abord à remercier vivement M. Daudigny d’avoir bien voulu me céder son tour de parole.

Cela a été dit, le projet de loi que nous examinons transcrit l’accord national interprofessionnel sur l’emploi conclu le 11 janvier 2013 entre un certain nombre de partenaires sociaux. L’article 1er de ce projet de loi est la transposition des articles 1 et 2 de l’ANI.

Celui-ci institue une obligation de mise en œuvre d’un dispositif généralisé de couverture complémentaire santé pour toutes les entreprises de notre pays à compter du 1er janvier 2016. Il précise notamment le calendrier et les modalités selon lesquels les branches, puis les entreprises, seront appelées à négocier et à mettre en place ce dispositif. Permettez-moi de les rappeler, afin d’éclairer la seconde partie de mon intervention.

D’ici au 1er juin 2013, les branches professionnelles non couvertes devront lancer des négociations sur ce point. Elles porteront principalement sur la définition du contenu et du niveau des garanties accordées, sur la répartition de la charge des cotisations entre employeur et salariés, ainsi que sur les modalités de choix du ou des organismes assurant la couverture complémentaire. À défaut de la conclusion d’un accord de branche avant le 1er juillet 2014, il reviendra aux entreprises de négocier sur ces sujets. En tout état de cause, au 1er janvier 2016, toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, devront permettre à leurs salariés de bénéficier d’une couverture complémentaire santé collective.

Cette mesure constitue, de la part des employeurs, une compensation – et même « la » compensation, selon certains – de l’accord donné par les organisations syndicales signataires à diverses dispositions visant, notamment, à favoriser la flexibilité dans les entreprises.

Je voudrais formuler deux observations à cet égard.

En premier lieu, s’il convient, bien entendu, de se féliciter de la conclusion d’un accord que les partenaires sociaux signataires s’entendent à juger équilibré, permettez-moi néanmoins, monsieur le ministre, de m’interroger sur les charges supplémentaires que cette obligation d’instaurer une complémentaire santé ne manquera pas de faire peser sur les nombreuses entreprises n’en disposant pas à l’heure actuelle.

Était-ce le bon moment pour créer cette contrainte supplémentaire ? Nous le savons, les entreprises ont déjà de gros problèmes de compétitivité-coût. Pour un certain nombre d’entre elles – en particulier les TPE, les artisans, les petits commerces, voire les PME –, les coûts supplémentaires liés à l’instauration d’une complémentaire santé ne feront que dégrader plus encore leur compétitivité.

Certes, je comprends la position des organisations professionnelles de l’artisanat et des PME qui ont accepté de signer cet accord, considérant les difficultés accrues de recrutement, particulièrement de main-d’œuvre qualifiée, que les entreprises qu’elles représentent n’auraient pas manqué de connaître dans le cas contraire. Pour autant, je suis persuadé que, dans le contexte économique actuel, ces coûts supplémentaires ne seront pas sans incidence sur la trésorerie de celles-ci. Je forme le vœu que, in fine, cela ne provoque pas, pour notre pays, des difficultés sociales plus grandes que celles que ce projet de loi vise à combattre.

En second lieu, la coexistence de cet accord national interprofessionnel, a fortiori retranscrit dans une loi, avec le régime local d’assurance maladie d’Alsace-Moselle pose problème. On me permettra, en tant qu’Alsacien, d’insister sur ce point.

Bien entendu, comme chaque fois, les partenaires sociaux n’ont pas pris en compte, dans leur accord, la spécificité de l’Alsace-Moselle. Il convient donc d’y remédier dans ce projet de loi, pour éviter que les salariés des trois départements de l’Est ne soient désavantagés par rapport à leurs collègues des autres régions, qui bénéficieront d’un pack santé meilleur que ce que prévoit à l’heure actuelle le régime local d’assurance maladie. En effet, alors que, jusqu’ici, le régime local d’assurance maladie offrait de meilleures prestations à ses ressortissants, salariés et ayants droit, que celles du régime général, la mise en œuvre de l’ANI de janvier 2013 aboutira, de fait, à inverser la situation.

Les députés, sollicités sur ce point, ont d’ores et déjà tenu compte de ce problème, en adoptant un amendement qui oblige le Gouvernement à remettre au Parlement, avant le 1er septembre 2013, un rapport sur « l’articulation du régime local d’assurance maladie complémentaire obligatoire des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle et la généralisation de la complémentaire santé ». À l’article 1er, ils ont aussi mentionné, pour les négociations à l’échelon des branches, la nécessité de prendre en compte la couverture complémentaire dont sont déjà bénéficiaires les ressortissants de ce régime local.

Pour autant, la question des négociations dans les entreprises elles-mêmes, prévues dans un second temps, n’est pas réglée. Il convient donc de prévoir, pour les négociations à cet échelon, une disposition analogue à celle d’ores et déjà mise en place pour les branches.

En qualité de président de la commission d’harmonisation du droit local d’Alsace-Moselle, j’ai déposé, comme d’autres collègues, un amendement en ce sens, que je souhaite voir adopter le moment venu. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

M. le président. La parole est à M. René Teulade, sur l’article.

M. René Teulade. Un tiers des Français ont déjà renoncé à se soigner. Ce constat terrifiant témoigne de l’impérieuse nécessité de faire de l’accès aux soins une priorité politique, d’où l’importance du présent projet de loi.

Les effets délétères de la crise économique induisent des sacrifices, qui atteignent leur paroxysme quand ils touchent au bien le plus sacré de l’être humain : la santé. Je n’insisterai jamais assez, d’ailleurs, sur le fait que la santé n’est pas une charge, même si elle a un coût ; c’est un investissement, et même le meilleur des investissements, puisqu’il porte sur l’être humain, qui est aussi un producteur de richesses.

À cet égard, il n’est pas anodin de relever le retour de la malaria en Grèce ou la propagation d’épidémies de tuberculose dans plusieurs de nos territoires.

Sans surprise, le renoncement aux soins s’explique majoritairement par des raisons d’ordre pécuniaire. La question du remboursement des soins est donc fondamentale. Depuis plusieurs décennies, les complémentaires santé se sont développées, afin de compléter au mieux les prestations versées par la sécurité sociale.

Devant cette évolution, loin d’être dénuée de sens, j’appelle de mes vœux la poursuite du débat, notamment à l’échelle des départements, sur la place des organismes complémentaires, et en particulier des mutuelles, au sein de notre système de santé. Cela me paraît non seulement d’actualité, mais surtout essentiel, dans la perspective de mettre en place une régulation plus efficace de notre système de protection sociale.

Ainsi, l’article 1er, en imposant l’instauration d’une complémentaire santé collective pour tous les salariés et en améliorant la portabilité des couvertures santé et prévoyance des demandeurs d’emploi, constitue une avancée majeure dans l’amélioration de l’accès aux soins pour tous.

Pour autant, aussi primordiale soit-elle, cette avancée ne demeure, nous en sommes tous convaincus, qu’une étape en vue de la généralisation de la complémentaire santé à tous les Français. En l’occurrence, je songe aux étudiants, dont près d’un quart n’ont pas de mutuelle, et aux retraités, dont il faudra également se préoccuper. D’ici à la fin du quinquennat, il faudra veiller à instaurer des dispositifs qui permettent à tous de bénéficier d’une couverture santé de qualité.

Par ailleurs, s’agissant des appels d’offres pour la passation de marchés avec les organismes assureurs, les amendements adoptés par l’Assemblée nationale ont été bienvenus ; l’impartialité et l’égalité de traitement sont les conditions sine qua non de l’instauration d’une procédure de mise en concurrence juste et réglementaire.

Cependant, je souhaiterais appeler l’attention de M. le ministre sur deux points.

Premièrement, dans un avis en date du 29 mars, l’Autorité de la concurrence a préconisé que les clauses de désignation ou de recommandation portent « nécessairement sur plusieurs organismes ». Ainsi, sans remettre en cause la clause de désignation, dont l’énoncé, il faut le reconnaître, est un peu sibyllin dans l’accord national interprofessionnel du 11 janvier dernier, j’aimerais que le Gouvernement nous fasse connaître son avis sur cette éventualité.

Deuxièmement, en vue de renforcer l’égalité de traitement entre les compagnies d’assurance, les institutions de prévoyance et les mutuelles, il paraîtrait opportun de faire évoluer la législation ayant trait au régime de coassurance, afin de sécuriser juridiquement cette pratique, aujourd’hui interdite aux mutuelles. Surtout, il faudrait que nous évitions que ne s’instaure la pratique, qui commence pourtant à se faire jour, du bonus-malus dans le domaine de la santé. Selon ce système, ceux qui ont la chance de ne pas être malades verraient leurs cotisations de complémentaire santé diminuer, tandis que ceux qui ont la malchance de l’être les verraient augmenter ! Ce serait là une remise en cause fondamentale du principe de solidarité entre les générations. Il faudra y faire très attention, en particulier au moment de l’attribution des contrats.

Par conséquent, à titre personnel, je me réjouis de la teneur de cet article, qui pose les jalons de la mise en place d’une couverture santé de qualité pour tous.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. René Teulade. Toutefois, à l’heure où les sacrifices en matière de santé s’alourdissent, il est important de poursuivre nos efforts. Souvenons-nous du programme du Conseil national de la Résistance, qui visait notamment à « assurer à tous les citoyens des moyens d’existence », cette existence aujourd’hui dramatiquement abandonnée sur les rives du désespoir par un nombre toujours croissant de nos concitoyens. Il nous faut tous lutter énergiquement, ensemble, pour faire face à cette situation.

M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel

M. le président. La séance est reprise.

Article 1er (début)
Dossier législatif : projet de loi relatif à la sécurisation de l'emploi
Discussion générale

4

Questions cribles thématiques

Situation des hôpitaux

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur la situation des hôpitaux.

Je rappelle que l’auteur de la question et le ministre, pour sa réponse, disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée maximale d’une minute peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique.

Ce débat est retransmis en direct sur la chaîne Public Sénat et sur France 3 ; il importe que chacun des orateurs respecte son temps de parole.

La parole est à M. Alain Milon.

M. Alain Milon. Madame la ministre, ma question portera sur les enjeux de la formation des jeunes dans le domaine de la santé.

Dans le contexte budgétaire fortement tendu que connaissent les établissements de santé publics, le dispositif des emplois d’avenir n’est pas contraignant en matière d’objectifs quantitatifs de recrutement, compte tenu des tensions affectant les effectifs de la fonction publique hospitalière.

En revanche, l’objectif affiché d’offrir une véritable insertion professionnelle à des jeunes peu ou pas qualifiés suppose la construction de parcours de formation permettant l’acquisition de qualifications reconnues.

Les jeunes recrutés dans le secteur public sanitaire pourront indifféremment, à l’issue d’un parcours de formation de trois ans, être employés dans le secteur public ou le secteur privé.

Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, si le Gouvernement envisage d’ouvrir les instituts de formation d’aides-soignants, les IFAS, aux titulaires d’emplois d’avenir ayant souscrit aux obligations de recrutement de ces établissements ?

Par ailleurs, je souhaite avoir des précisions sur l’avenir des écoles de formation paramédicale qui sont aujourd’hui rattachées aux établissements publics de santé.

Je rappelle que la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a décentralisé, au profit des régions, les formations sanitaires et sociales. Mais l’État a conservé des compétences telles que la délivrance des diplômes, la définition du contenu des formations, la fixation du nombre d’étudiants par filière et la répartition des quotas par région.

La réforme dite « LMD » – licence-master-doctorat – inclut progressivement les formations paramédicales visées dans le code de la santé publique pour donner, au-delà du diplôme professionnel, une équivalence universitaire aux étudiants.

Pouvez-vous nous indiquer, madame la ministre, si le Gouvernement envisage de conserver aux écoles de formation paramédicale le caractère d’écoles d’application professionnelle ou s’il prévoit de les intégrer aux cursus universitaires, sans lien avec les établissements publics de santé ?

M. Alain Fouché. Très bonne question !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. C’est en effet une très bonne question, comme toujours de la part de M. Milon ! (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)

Monsieur le sénateur, l'hôpital est pleinement engagé dans l'effort de formation des jeunes. Vous l'avez souligné, nous avons besoin de personnels de diverses qualifications à l’hôpital et dans le secteur médicosocial. C'est la raison pour laquelle nous allons consentir un effort particulier en faveur des jeunes sans qualification. Ainsi, d'ici à 2015, il est prévu de créer 9 700 emplois d'avenir, 1 630 l’ayant d'ores et déjà été dans le secteur sanitaire et social.

Toutefois, pour que l’entrée de ces jeunes dans le secteur médicosocial soit réellement porteuse d’avenir, il faut leur garantir une remise ou une mise à niveau et, dans un second temps, leur permettre de s'insérer durablement.

Contrairement à ce qui se pratique dans d'autres secteurs, mon ministère a d'ores et déjà prévu de consacrer 13 millions d'euros, en 2013, à la formation initiale des jeunes concernés. Au-delà, il nous faut engager une concertation avec les partenaires sociaux pour étudier dans quelles conditions nous pourrons amener ces jeunes au niveau qui leur permettra de passer, par exemple, le concours d’aide-soignant.

Monsieur le sénateur, vous m’avez également demandé si la formation aux professions paramédicales, désormais universitaire, conserverait son caractère professionnalisant. Je vous réponds clairement par l’affirmative. Si ces formations s'inscrivent effectivement dans le cursus universitaire, elles demeurent d'application professionnelle. Il faut donc que le lien avec le secteur professionnel soit non seulement garanti, mais renforcé.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.

M. Alain Milon. La question des équivalences universitaires est un sujet d’inquiétude important pour les établissements hospitaliers. Il est nécessaire que le caractère professionnel de la formation soit maintenu, de manière que les hôpitaux n'aient pas à compléter celle-ci.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Madame la ministre, la situation financière des hôpitaux demeure préoccupante. C’est à compter de 2006 qu’ils sont globalement devenus déficitaires. Leurs déficits, depuis lors, ne se résorbent que lentement.

Les causes de cette situation sont connues : une moindre progression des dotations de l’assurance maladie associée au doublement des investissements entre 2002 et 2008, ces investissements étant financés par l’endettement.

À ces tensions budgétaires s’ajoutent aujourd’hui des difficultés majeures en matière d’accès au crédit, notamment à la suite de l’affaire des emprunts toxiques.

Au final, alors que le déficit global avait atteint 710 millions d’euros en 2007, il était toujours, en 2010, de 488 millions d’euros.

Or, on le sait, d’importantes sources d’économies existent à l’hôpital.

En amont du système, d’abord, il conviendrait de développer des maisons médicales de garde pour désengorger les urgences. Une consultation dans une telle structure revenant à 62 euros, contre 240 euros dans un service des urgences, 1,5 milliard d’euros pourraient ainsi être économisés.

Une autre source majeure d’économies tient bien sûr à l’informatisation du système et à la mise en place du DMP, le dossier médical personnel. Une telle informatisation contribuerait à résorber les actes inutiles à l’hôpital, qui représentent 28 % du total des actes, selon l’évaluation de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale du Sénat, la MECSS, confortée par un rapport de l’Académie nationale de médecine rendu public le 10 avril. Le coût des actes inutiles atteindrait donc 12 milliards d’euros au regard de la tarification à l’activité, la T2A. Il ne faut pas non plus oublier la charge des 35 heures et des heures supplémentaires, dont le seul solde aurait coûté 500 millions d’euros à l’État l’année dernière.

Enfin, la réforme du médicament, avec la promotion du générique, profiterait également au secteur hospitalier.

Tout cela nécessite la mise en place d’un plan global pour l’hôpital, que nous réclamions déjà au gouvernement précédent. Madame la ministre, un tel plan va-t-il enfin être mis en œuvre ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, l'avenir de l'hôpital est une préoccupation majeure pour le Gouvernement. L’hôpital, dont l'excellence est reconnue, est évidemment l’un des piliers de notre système de santé. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour rendre hommage à toutes celles et à tous ceux qui travaillent dans le secteur hospitalier, avec une exigence d'excellence à la fois professionnelle et sociale.

Des efforts importants ont d'ores et déjà été accomplis. Vous indiquez que les établissements hospitaliers sont en déficit. Néanmoins, la situation s’est globalement améliorée ; en réalité, les déficits se concentrent sur quelques établissements bien identifiés.

Par ailleurs, la stratégie d'investissements hospitaliers mise en place par le Gouvernement prévoit bien évidemment des contreparties en matière de retour à l'équilibre.

Néanmoins, des mesures s'imposent pour permettre à l'hôpital de fonctionner dans de meilleures conditions financières. D'abord, le Gouvernement lui a facilité l'accès au crédit. Ensuite, en aval, vous avez parfaitement raison de souligner, monsieur le sénateur, qu’il faut faire en sorte que des patients n’ayant pas besoin d'être traités à l'hôpital puissent être mieux soignés ou mieux pris en charge en ville. Enfin, informatiser, renforcer la mutualisation des coûts et améliorer la gestion des achats est une priorité.

Pour conclure, la difficile question des génériques doit être posée. Sa difficulté tient au fait que les médicaments prescrits à l'hôpital ne sont pas souvent substituables en ville. C’est pourquoi nous avons engagé une réflexion globale sur le médicament, qui devra également contribuer à améliorer le fonctionnement de l'hôpital.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour la réplique.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais vous n’avez rien dit sur les actes inutiles ou superfétatoires. Il est tout de même curieux que ce sujet ne soit jamais abordé, alors qu’il y a là une source évidente d’économies à terme. Je le répète, l'Académie nationale de médecine vient de confirmer l’analyse de la MECSS.

Madame la ministre, le Gouvernement a-t-il l’intention de mettre en place un plan global pour l’hôpital qui prendrait en compte cette problématique ? Vous avez évoqué une réflexion sur le médicament. Il convient d’aborder enfin cette question, qui est essentielle compte tenu de l’ampleur des économies possibles.

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny.

M. Yves Daudigny. Madame la ministre, en moins d’un an, vous avez engagé de nombreux changements, et ce dans une conjoncture économique extrêmement difficile, dans le cadre d’un système de santé figé par un cloisonnement devenu contre-productif sur tous les plans : économique, sanitaire et social.

L’objectif principal de décloisonnement qui était justement celui de la loi HPST du 21 juillet 2009 n’a pas été atteint. Cela n’était pas possible, en réalité, pour deux raisons : d’une part, en supprimant le service public hospitalier, cette loi a privé notre système de santé de ce qui a fait de lui l’un des meilleurs et constitue son socle, à savoir l’hôpital et les valeurs qu’il porte ; d’autre part, ses promoteurs ont cru pouvoir soumettre l’hôpital à une hiérarchie pratiquement césarienne, alors qu’il ne s’organise et ne se conduit pas sans les professionnels de santé qui le font vivre, ni a fortiori contre eux.

C’est bien pourquoi, madame la ministre, votre première préoccupation a été de revoir la politique hospitalière, tandis que vos premières décisions ont visé à réintroduire le service public hospitalier – ce qui s’est traduit, dès la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, par la suppression de la convergence tarifaire entre le privé et le public – et à rétablir la confiance par la concertation et le dialogue.

Des travaux de la mission conduite par Édouard Couty et chargée d’élaborer ce « pacte de confiance » indispensable, vous avez retenu treize engagements pour l’hôpital public, qui s’inscrivent de façon cohérente dans la stratégie nationale de santé définie par le Premier ministre.

Là réside certainement le changement profond de politique, car nous n’avions pas connu, de longue date, un projet aussi ambitieux, inscrit dans la durée et construit sur la solidarité.

Un certain nombre de mesures ont d’ores et déjà été prises s’agissant de la fin de la convergence tarifaire, du financement et de la sécurisation des personnels.

Vous vous êtes également donné pour objectif de renforcer la démocratie à l’hôpital pour associer l’ensemble des acteurs légitimes que sont les professionnels de santé, les élus locaux et les usagers et leur redonner toute leur place.

Pouvez-vous, madame la ministre, préciser aujourd’hui à la représentation nationale quel est l’état d’avancement de ces chantiers ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le sénateur, je vous remercie de souligner que la reconnaissance de l’importance de la place de l’hôpital dans notre système de santé a été une priorité de mon action et de celle du Gouvernement.

Dans cet esprit, j’ai mis en place un pacte de confiance, fondé sur les conclusions du rapport rédigé par M. Couty au terme d’une longue concertation avec l’ensemble des acteurs. Il s’agit maintenant de mettre en œuvre les treize engagements que j’ai pris à l’issue de ce travail. Cela se fera selon un calendrier qui est aujourd’hui déterminé.

Dans un premier temps, une concertation, suivie d’une négociation, va s’engager avec les organisations représentatives, en vue d’améliorer les conditions de travail des personnels et de mettre en place un observatoire du dialogue social. En effet, je tiens à le redire, l’hôpital public, c’est évidemment une structure, mais ce sont aussi, et surtout, des hommes et des femmes, des médecins, des personnels soignants ou non soignants, engagés au quotidien pour faire en sorte que nos concitoyens soient accueillis dans les meilleures conditions possibles.

Dans un deuxième temps, je publierai, vers l’été, un ensemble de décrets et de circulaires visant par exemple à revoir la gouvernance à l’hôpital, c’est-à-dire l’équilibre entre les médecins et la direction, et à déterminer les schémas régionaux d’investissements en santé, qui doivent donner de la force à nos hôpitaux publics.

Enfin, viendra le temps des dispositions législatives, avec l’élaboration de la loi de financement de la sécurité sociale, qui actera la fin du « tout-T2A », et la présentation, en 2014, d’un texte relatif à l’organisation des soins.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, le Gouvernement est aujourd’hui pleinement engagé pour faire de notre hôpital public un atout au service de nos concitoyens et de nos territoires.

M. Jean Desessard. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour la réplique.

M. Yves Daudigny. Madame la ministre, je vous remercie de vos paroles, qui ouvrent des perspectives. Votre action conjugue des mesures immédiates, pragmatiques, concrètes, et une vision d’avenir de notre système de santé, en particulier de l’hôpital public.

Même si l’aspect financier ne constituait pas le cœur de ma question, qu’il me soit permis, en tant que rapporteur général de la commission des affaires sociales du Sénat, de souligner que les résultats obtenus en 2012 en matière de dépenses de santé permettent un effet de base favorable pour l’année 2013.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen.

Mme Laurence Cohen. Nombre des difficultés rencontrées par les hôpitaux sont liées à la restriction des moyens décidée par le précédent gouvernement, conformément à la sacro-sainte loi de la diminution des dépenses publiques.

Les effets négatifs de l’application de la loi HPST, dite loi Bachelot, et de la T2A ne cessent de se faire sentir, aussi bien du côté des patients que de celui des praticiens, d’où l’importance de se fixer des objectifs ambitieux et de rompre avec les logiques suivies jusqu’à présent.

L’hôpital est en souffrance, et l’onde de choc est considérable : manque flagrant de lits, nombre de médecins plus qu’insuffisant, délais d’attente inacceptables pour obtenir un rendez-vous avec un spécialiste.

Il est impossible de parler ici de tous les hôpitaux au bord de l’explosion. Je vous invite à vous rendre sur le site internet de la coordination des hôpitaux et maternités de proximité : ce qu’on y découvre est édifiant ! Je veux une nouvelle fois, madame la ministre, attirer votre attention sur ce qui se passe à l’Hôtel-Dieu, dont la situation mérite une vaste mobilisation des pouvoirs publics et rend urgente l’adoption, proposée par le groupe CRC, d’un moratoire sur toutes les restructurations et fermetures en cours.

Le désarroi des personnels hospitaliers est profond. Vous avez fait mention du rapport Couty : il comporte effectivement des pistes intéressantes, mais je ne suis pas persuadée qu’elles répondent aux inquiétudes des professionnels et des patients.

Ma question est simple : comptez-vous, madame la ministre, proposer la suppression de la taxe sur les salaires, ce qui permettrait de résoudre en partie les difficultés financières des hôpitaux et ne serait que justice, dans la mesure où le secteur privé en bénéficie déjà ?