M. Gilbert Barbier. Très bien !

Mme Muguette Dini. … à l’expérimentation du tiers payant pour les étudiants ou à la création d’indemnités journalières maladie pour les exploitants agricoles.

Je m’arrêterai sur les propositions en faveur d’une meilleure répartition territoriale des médecins et d’une plus grande coordination des soins.

La création du praticien territorial de médecine générale, l’assouplissement du contrat d’engagement de service public et la valorisation de la coordination des soins, notamment en niveau pluridisciplinaire, sont des propositions qui nous semblent intéressantes. Nous vous encourageons cependant à aller plus loin et plus vite.

Depuis plusieurs années, notre groupe soutient qu’une meilleure répartition territoriale des professionnels de santé libéraux passe également par une adaptation de la formation des professions de santé et une évolution du mode d’exercice de ces derniers. Nous n’avons que trop tardé à les mettre en œuvre.

Il est indispensable de faire mieux connaître la médecine générale et d’en vanter les attraits à tous les étudiants engagés dans le cursus des études médicales.

Nous devons également répondre aux aspirations des jeunes médecins, mettre un terme à leur isolement, en faisant de l’exercice regroupé la norme et en favorisant les approches pluridisciplinaires.

La question du choix du lieu d’installation et du maintien dans l’activité des professionnels de santé doit être replacée dans un contexte de développement local et d’aménagement du territoire. La problématique simplement sanitaire doit être dépassée. En effet, il est difficile pour un médecin de s’installer avec sa famille dans une zone où son conjoint aura peu de possibilités de trouver un emploi, où ses enfants manqueront d’infrastructures scolaires, où services publics et commerces disparaissent.

La rénovation du cadre de la coopération entre professionnels de santé s’impose également. Il est en effet urgent non seulement de recentrer les médecins sur leur cœur de métier, mais également de libérer du « temps médical ».

Cette hétérogénéité dans la répartition territoriale des professionnels de santé a pour première conséquence un accès inégal de nos concitoyens à l’offre de soins.

Il faut aussi signaler une envolée importante des dépenses de soins de ville dans les zones surdotées.

Pour l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, une offre de soins pléthorique générerait une demande de soins « injustifiée » des patients. Une maîtrise des flux des professionnels de santé dans ces zones à forte densité conduirait donc à une maîtrise des dépenses de santé.

Nous déplorons que le projet de loi de financement de la sécurité sociale n’ait rien d’offensif en matière d’économies. Le dernier rapport de la MECSS fait état de 28 % d’actes superflus, mais aucune mesure n’est envisagée pour remédier à ce dysfonctionnement. Mon collègue Jean-Marie Vanlerenberghe a pourtant rappelé que 12 milliards d’euros sur les 55 milliards d’euros pris en charge dans le cadre de la T2A pourraient ainsi être économisés.

J’en viens à ma dernière remarque, qui porte sur l’hôpital public, ou plutôt sur le portrait qu’en a dressé Mme la ministre des affaires sociales. Elle a déclaré que la politique menée ces dernières années avait été néfaste pour l’hôpital public, à qui elle reproche une gestion d’entreprise. Une bonne gestion serait-elle absolument antinomique avec de bons soins ?

Mes collègues et moi-même avons auditionné les représentants de l’hôpital public, et nous avons été surpris du décalage entre leur discours et celui de Mme la ministre. Ces derniers parlent d’une T2A salutaire pour l’hôpital public, sur lequel elle a eu un véritable effet booster, même s’ils font le constat des limites de ce dispositif. Nous nous étonnons donc de l’analyse de Mme la ministre.

En résumé, nous ne pouvons nous satisfaire d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale qui tend à préconiser des prélèvements supplémentaires inacceptables sans proposer d’économie substantielle ou de réforme sérieuse et approfondie de l’offre de soins.

Vous l’aurez compris, notre groupe votera donc contre le texte. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Plancade.

M. Jean-Pierre Plancade. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, 190 milliards d’euros, c’est le montant du déficit cumulé de la sécurité sociale depuis 2002 ! La crise économique a largement contribué à l’effondrement des recettes et certains mauvais choix de nos prédécesseurs ont fait le reste.

Dans ces conditions, il faut reconnaître que le redressement des comptes sociaux est une tâche pour le moins ardue. Pour autant, l’équilibre des comptes sociaux ne doit pas être un vain mot, et c’est même, selon nous, un objectif qu’il faudra atteindre avant la fin du quinquennat.

En 2010, la situation de la sécurité sociale était particulièrement alarmante : son déficit avait alors atteint un niveau inégalé et mettait en péril tout notre système de protection sociale. Force est de reconnaître que nous sommes aujourd’hui sur la bonne voie, puisque vous proposez, mesdames les ministres, de ramener le déficit du régime général à 11,4 milliards d’euros et celui du Fonds de solidarité vieillesse à 2,6 milliards d’euros, soit un déficit total de 13,9 milliards d’euros en 2013.

D’ailleurs, comme cela a été rappelé par le rapporteur pour avis de la commission des finances, sans les dispositions votées en loi de finances rectificative cet été et sans les mesures d’économies contenues dans ce PLFSS, le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse atteindrait 24,9 milliards d’euros à la fin de 2013. Nous ne pouvons donc qu’affirmer notre accord pour la voie que vous nous proposez, d’autant que vous avez fait le choix de ne pas demander d’efforts supplémentaires aux assurés, mis à rude épreuve – il faut bien le reconnaître – depuis plusieurs années.

Ainsi, d’après une enquête récente, un Français sur cinq renoncerait à se faire soigner : 57 % s’en priveraient par faute de moyens et 41 % en raison d’un mauvais remboursement des soins. Je tiens d’ailleurs à vous alerter sur la situation sanitaire et sociale particulièrement préoccupante de nos étudiants dont l’accès aux soins est de plus en plus difficile. Comment cela est-il encore possible alors que notre système de protection sociale est souvent considéré comme un modèle ? Les nombreux déremboursements de médicaments, les franchises médicales et l’envolée des dépassements d’honoraires, notamment, ont causé de nombreux dégâts.

Les mesures que vous nous proposez aujourd’hui, mesdames les ministres, doivent permettre à la fois de réduire les déficits et d’apporter de véritables réponses aux assurés. Ce texte s’inscrit dans une démarche d’équité et de justice sociale que je tenais à souligner.

Il est important que nous assurions à l’ensemble de nos concitoyens l’accès aux soins dans de bonnes conditions. Cela passe notamment par une meilleure articulation des professionnels de santé autour du parcours de soins du patient. Je pense tout particulièrement à la création des 200 contrats de praticien territorial, destinés à lutter contre la désertification des zones médicales. Se soigner devient parfois un véritable parcours du combattant, et certains patients sont contraints de parcourir de nombreux kilomètres pour se rendre chez un spécialiste, parfois même un généraliste. Garantir l’accès aux soins sur l’ensemble du territoire doit être une priorité, d’autant que le médecin, principalement dans les petits villages, est bien souvent synonyme de survie.

Votre texte comporte également des améliorations de la prise en charge de nos concitoyens les plus vulnérables.

Ainsi, je suis très favorable à l’expérimentation du versement du complément de mode de garde en tiers payant pour les familles modestes. Certaines d’entre elles, obligées de faire l’avance de frais, renoncent à faire garder leur enfant par une assistante maternelle, système jugé trop onéreux. Cette décision impacte très sérieusement le retour à l’emploi des parents ; le plus souvent, c’est la mère qui doit d’ailleurs mettre son activité professionnelle entre parenthèses.

Je pense aussi à la possibilité pour les travailleurs de l’amiante de liquider leur pension dès soixante ans en cas de carrière complète.

Comment ne pas se féliciter également du remboursement à 100 % de la contraception pour les mineures et de l’IVG ? Il s’agit là de deux avancées importantes pour les droits des femmes.

Enfin, vous avez annoncé des moyens supplémentaires pour mener à leur terme le plan Alzheimer et le plan solidarité grand âge, qui correspondent à deux grands défis que nous aurons à relever. Le redressement pérenne de nos comptes sociaux ne saurait toutefois se faire sans de véritables mesures structurelles. S’il est nécessaire de prendre, comme vous le faites, des mesures d’économies, il n’en est pas moins indispensable de repenser le financement de notre système de santé. Il est temps que nous nous engagions sur la voie d’une réforme profonde.

Mesdames les ministres, le projet de loi que vous nous proposez permettra d’amorcer le redressement de la sécurité sociale. Nous devons cependant rester vigilants. Nous proposerons plusieurs amendements pour améliorer le texte voté par nos collègues députés.

C’est dans cet esprit, reposant sur deux axes – soutien et force de proposition – que la majorité des membres du RDSE et l’ensemble des sénateurs radicaux de gauche approuveront le projet de loi de financement de la sécurité sociale, dans le seul but de sauvegarder, d’améliorer et de rendre plus juste notre système de protection sociale, ciment de notre pacte républicain. (Applaudissements sur les travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Mes collègues, je tiens à vous rappeler que la commission des affaires sociales se réunira immédiatement après la suspension de séance, afin de poursuivre l’examen des amendements.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (suite)

8

Demande d’avis sur un projet de nomination

M. le président. Conformément aux dispositions de la loi organique n° 2010-837 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution et en application de l’article 10 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983, M. le Premier ministre, par lettre en date du 12 novembre 2012, a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître l’avis de la commission du Sénat compétente en matière de transports sur le projet de nomination de M. Augustin de Romanet de Beaune pour exercer les fonctions de président-directeur général de la société Aéroports de Paris

Cette demande d’avis a été transmise à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.

Acte est donné de cette communication.

9

Nomination de membres de commissions

M. le président. Je rappelle au Sénat que le groupe de l’UDI-UC a présenté une candidature pour la commission des affaires économiques et une candidature pour la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.

Le délai prévu par l’article 8 du règlement est expiré.

La présidence n’a reçu aucune opposition.

En conséquence, je déclare ces candidatures ratifiées et je proclame :

- M. Jean-Claude Merceron, membre de la commission des affaires économiques, en remplacement de M. Vincent Capo-Canellas, démissionnaire ;

- M. Vincent Capo-Canellas, membre de la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique, en remplacement de M. Jean-Claude Merceron, démissionnaire.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures quarante-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures quarante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

10

Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’une proposition de loi organique

M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi organique relative à la nomination des dirigeants de BPI-Groupe, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 8 novembre 2012.

11

Discussion générale (interruption de la discussion)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Discussion générale (suite)

Financement de la sécurité sociale pour 2013

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à M. Jean Desessard.

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : projet de loi de financement de la sécurité sociale de financement de la sécurité sociale pour 2013
Première partie

M. Jean Desessard. Monsieur le président, madame la ministre de la santé, mes chers collègues, au début de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’impératif d’un redressement des comptes sociaux qui ne soit pas pour autant effectué au détriment de la santé des Français est très souvent revenu dans les propos. Cette idée forte – cet « élément de langage », comme l’on dit maintenant – a été tellement répétée que je me suis demandé si c’était de l’info ou de l’intox.

Bien sûr, nous partageons le souci de répondre aux besoins présents et futurs de nos concitoyens, mais une telle attitude ne relevait-elle pas de la méthode Coué ? Qu’allions-nous proposer de différent ? Comment allions-nous pallier le déficit chronique de la sécurité sociale, ce « marronnier » annuel, comme diraient les journalistes ? Comment allions-nous réagir aux envolées lyriques sur notre incapacité à y faire face ?

Eh bien, je dois dire qu’à la lecture du projet de loi je me suis senti rassuré. En effet, dans la suite logique du projet de loi de finances rectificative pour 2012, adopté cet été, l’accent a été mis sur la participation de chacun en fonction de ses moyens et sur la mise à contribution de formes de revenus jusque-là peu – voire pas – sollicitées, afin de ne pas privilégier une nouvelle fois déremboursements et autres taxations sur les consultations médicales.

L’augmentation de la taxe sur les stock-options pour les entreprises et les bénéficiaires ou encore celle du taux du forfait social sont de bonnes mesures : elles dissuadent les entreprises de verser de trop fortes « rémunérations complémentaires », à l’instar de celles dont on parle souvent depuis 2008, à savoir les bonus des traders.

Toutefois, d’autres formes de contributions doivent être trouvées, de même que d’autres exceptions ou « niches sociales » doivent être minorées.

Parmi les pistes, je pense bien sûr à celles défendues par ma collègue Aline Archimbaud pour taxer des produits dont l’abus est nocif pour la santé, faire évoluer les comportements et permettre des actions de prévention. Ces actions, aux yeux de certains, apparaissent comme des coûts supplémentaires au lancement, mais, à terme, elles viennent diminuer les coûts de prise en charge des maladies auxquelles ces produits concourent.

Ainsi que le souligne le dossier de presse de présentation du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la « progression des besoins de soins résulte notamment d’un nombre croissant de patients soignés pour des pathologies lourdes ou chroniques », comme les cancers.

Il en va un peu de même de notre « problème » économique et écologique : les investissements dans la transition écologique peuvent apparaître comme un luxe en temps de crise, alors même qu’ils lui apportent une réponse.

Bref, en matière de santé comme ailleurs, il s’agit d’anticiper, et de ne pas le faire trop tard.

Mes chers collègues, je vous entends déjà me rétorquer que vous êtes tous écologistes !

M. Jean-Pierre Plancade. On n’a rien dit !

M. Jean Desessard. Mais il y a deux catégories d’écologistes : ceux qui souhaitent agir tout de suite et ceux qui veulent reporter l’action à demain.

M. Jean-Pierre Plancade. Demain, c’est demain !

M. Jean Desessard. Anticiper est d’autant plus nécessaire quand on sait que les scénarios de réduction des déficits du PLFSS se fondent sur des hypothèses de croissance et d’augmentation de la masse salariale, pour 2013 et jusqu’à 2017, largement sujettes à caution.

M. Philippe Bas. Parfaitement !

M. Jean Desessard. Mon cher collègue, nous essaierons de faire mentir les chiffres !

Je ne développerai pas plus avant ces considérations d’ordre général sur les recettes.

S’agissant maintenant des dépenses, à quoi a-t-on décidé de les affecter ? Quelles priorités, quelle vision de la société peut-on lire dans les orientations prises ?

Avec Aline Archimbaud, nous nous sommes répartis l’examen des quatre branches : tandis qu’elle étudiait les dispositions du projet concernant la santé et les accidents du travail, je travaillais sur celles relatives à la vieillesse et à la famille. J’aurais pu être content, car, sur ces deux dernières parties, il n’y avait pas grand-chose à dire, et peu de sujets à traiter. Mais peut-on être satisfait pour autant ? Au contraire, le moindre développement des branches vieillesse et famille traduit un léger malaise, celui de ne toujours pas pouvoir accorder à ces postes l’attention qu’ils exigent.

Commençons, mes chers collègues, par la branche vieillesse. J’y inclurai la question des retraites et des contributions nouvellement demandées aux retraités ; vous comprendrez aisément pourquoi.

Dans cet hémicycle, il y a une quinzaine de jours, nous avons examiné la proposition de loi de notre collègue Gérard Roche tendant à élargir la contribution de solidarité pour l’autonomie aux travailleurs non salariés et aux retraités et à compenser aux départements la moitié de leurs dépenses d’allocation personnalisée d’autonomie. Intervenant alors dans le débat, j’avais insisté sur la « caducité » de cette proposition, eu égard à l’article 16 du présent projet de loi.

La contribution des retraités a beaucoup été décriée lors de l’examen du texte de M. Roche à l’Assemblée nationale et ici même. D’ailleurs, dans la rue, beaucoup nous ont interpellés. Pourtant, aujourd’hui, les personnes âgées bénéficient, en moyenne, d’un niveau de vie proche de celui des actifs, et la mesure ne concerne pas les petites retraites. Mais, bien sûr, cela ne se sait pas assez…

Il ne s’agit pas de nier les difficultés rencontrées par nombre des retraités. Pensons notamment aux retraités agricoles, dont les pensions restent plus faibles que la moyenne et qui, pour pouvoir accéder à leurs droits, doivent justifier d’un seuil d’années de cotisation qu’on n’exige pas des autres professions, alors même que leurs horaires hebdomadaires ont largement dépassé les 35 heures et que la convergence de leur niveau de vie avec celui des autres actifs – laquelle est un des objectifs de la politique agricole commune – est loin d’être acquise. D’ailleurs, mon collègue Joël Labbé fera des propositions à ce sujet.

Pour tenir compte du spectre important de la situation des retraités, qui est une réalité, je présenterai un amendement, déposé par les membres de mon groupe, visant à introduire une progressivité dans le montant de la contribution de solidarité, mesure qui nous paraît plus juste et qui devrait également inspirer la CSG.

Toujours à ce sujet, je vous rappelle la situation des personnes en fin de parcours professionnel qui ne trouvent pas d’emploi et qui ont acquis suffisamment de trimestres, mais qui n’ont pas atteint l’âge légal de la retraite. L’abandon de l’allocation équivalent retraite au 1er janvier 2011 n’a été que partiellement comblé par la mise en place de l’allocation transitoire de solidarité. J’espère que l’examen prochain du projet de loi de finances permettra à nouveau d’évoquer ce point.

J’en viens maintenant à la branche famille.

Les dispositions la concernant sont peu nombreuses dans le projet de loi. Plusieurs membres du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales l’ont regretté. D’ailleurs, la CNAF a émis un avis défavorable sur le texte, essentiellement, semble-t-il, en raison d’un décalage de calendrier, une avancée vers une meilleure adéquation des dispositifs aux besoins des familles nous ayant été promise lors de la conférence sociale.

À cet égard, l’article 71 du texte, qui prévoit d’étendre les expérimentations du versement en tiers payant menées par le conseil général de l’Essonne, est intéressant puisqu’il permet aux familles à revenus modestes de ne pas faire l’avance des frais pour la garde de leurs enfants. D’ailleurs, nous présenterons des amendements visant à s’assurer que les conditions seront réunies pour réussir ces expérimentations, notamment sur les territoires sous tension, où les offres de garde sont insuffisantes.

C’est de toutes ces questions qu’il conviendra de discuter, s’il nous est permis d’examiner aussi bien le volet recettes que le volet dépenses du présent projet de loi…

Mes chers collègues, j’espère que nous pourrons évoquer ces sujets ! (Mme Laurence Cohen, par un geste, exprime son interrogation.)

Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Nous l’espérons aussi !

M. Jean Desessard. En conclusion, j’aimerais ouvrir quelques pistes de réflexion.

Dans ce projet de loi, nous essayons autant que possible de traduire une certaine vision de la société. C’est, par exemple, le sens des propositions de nouvelles recettes, que j’évoquais tout à l’heure, découlant de la taxation de produits dont l’abus participe à une dégradation de l’état de santé.

Mais, pour bon nombre de nos concitoyens, cette séquence du PLFSS peut paraître peu compréhensible. En effet, elle semble procéder à des comptes d’apothicaires – ce qui, du reste, nous ne nous éloigne pas trop du sujet ! (Sourires.)

Nous devrions donc nous astreindre à un effort de lisibilité et, peut-être, pour cela, envisager, à terme, l’examen de ce type de textes à la lumière d’indicateurs sensibles de notre société, comme l’indice de santé sociale. Il s’agit de mesurer, en fonction des âges de la vie – et bien en fonction de ce critère –, si les besoins fondamentaux sont satisfaits et, par là même, de sortir des oppositions entre « retraités », « actifs » et « jeunes » et de rejeter les corporatismes, lesquels, se fondant sur le fantasme de privilèges supposés, conduisent à monter les gens les uns contre les autres.

Le PLFSS doit traduire une vision du vivre-ensemble ; il doit unifier pour construire un projet commun.

Permettez-moi d’adresser quelques mots à mes collègues siégeant sur les travées de gauche.

M. Dominique Watrin. Il y en a, en effet !

M. Jean Desessard. La société d’aujourd’hui connaît une mutation. Nous ne sommes plus au lendemain de la guerre. Le monde du travail a changé ; la place du travail a changé. Le temps où l’on exerçait la même activité tout au long de sa vie est révolu. Dès lors, on est bien obligé d’envisager les cotisations sur une autre base que la masse salariale ; on doit bien tenir compte de la santé environnementale, et envisager cette mutation économique.

Par conséquent, vous avez raison, mes chers collègues, il ne faut pas tout abandonner. Mais il faut quand même aussi réfléchir au nouveau contrat social !

Lors du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, dont je souhaite, madame la ministre, qu’il soit porteur d’une vision d’avenir, nous devons retrouver le nouveau pacte de la sécurité sociale, de la santé sociale, le nouveau contrat de solidarité sociale, pour tenir compte de cette mutation économique.

M. Dominique Watrin. Et donc taxer la richesse financière !

M. Jean Desessard. Si nous voterons le texte qui est soumis à notre examen, nous serons attentifs à l’avènement d’un projet de sécurité sociale qui tienne compte des mutations économiques, sociales et écologiques de notre société. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Bas.

M. Philippe Bas. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en débattant du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le Parlement exerce chaque année une prérogative essentielle que la Constitution ne lui reconnaît d’ailleurs que depuis seize ans. Comme chaque année, je ne peux m’empêcher de penser avec une certaine reconnaissance au Président Jacques Chirac, à Alain Juppé et à Jacques Barrot, qui prirent l’initiative de ce progrès majeur des droits du Parlement.

Il nous appartient d’être à la hauteur de cette grande ambition, qui consiste à ce que le Parlement prenne ses responsabilités pour permettre à la solidarité nationale de s’exercer pleinement, tout en veillant à sauvegarder les équilibres financiers dont dépend l’avenir de la protection sociale. Nous savons bien, en effet, qu’une solidarité durable ne peut être financée à crédit ou alimentée par un excès de prélèvements sur l’activité et sur l’emploi. C’est à cette aune que les mérites d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale se mesurent, et j’avoue que je ne suis guère convaincu, madame la ministre, par la manière dont vous avez tenté de relever, pour la première fois, ce défi.

Je veux revenir, en premier lieu, sur la trajectoire dans laquelle vous inscrivez nos comptes sociaux pour les quatre années à venir, en insistant sur la question des recettes. Les montants et les taux d’évolution que vous avez retenus pour 2013, et au-delà de 2013, ne relèvent pas de prévisions réalistes. Vos engagements resteront un vœu pieux s’ils ne sont pas prolongés par un vigoureux effort de redressement, conduit avec détermination, dans la durée, et portant d’abord sur les dépenses. Or, malgré l’optimisme dont témoignent vos objectifs, ou plutôt vos espérances, vous osez encore prévoir le maintien d’un déficit de 10 milliards d’euros en 2017. C’est à l’évidence un résultat insuffisant au terme d’une si longue période,…

Mme Christiane Demontès. Vous êtes mal placé pour donner des leçons !

M. Philippe Bas. … mais, de surcroît, vous ne vous donnez même pas les moyens d’atteindre cet objectif et vous ne cherchez pas à l’atteindre par les bons moyens !

Certes, les hypothèses de croissance ressemblent, par nature, aux bulletins météorologiques : relativement fiables pour le futur immédiat, elles sont aléatoires à plus de quatre ou six mois. Une chose paraît claire, cependant, si l’on se réfère au consensus des économistes : les mois à venir seront plus proches de la stagnation, voire de la récession, que du taux de croissance pourtant médiocre de 0,8 % sur lequel vous avez fondé vos projets de budget pour 2013.

Les conséquences négatives de cette conjoncture pour les recettes de la sécurité sociale sont déjà fortes et vont encore s’aggraver, ce qui nous inquiète profondément et devrait vous inquiéter aussi.

Vous avez massivement augmenté les prélèvements depuis juillet dernier : 7 milliards d’euros dans le collectif budgétaire, 20 milliards d’euros en loi de finances initiale et, maintenant, près de 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires en loi de financement de la sécurité sociale.

Cette politique ne peut donner les mêmes résultats en termes de réduction des déficits qu’une politique de maîtrise renforcée de la dépense, car elle appauvrit les Français et leurs entreprises, aggravant une crise qui diminue déjà les rentrées fiscales et sociales. La hausse brutale des prélèvements, plutôt que le freinage puissant des dépenses par des réformes structurelles et une gestion exigeante, est une solution de facilité.

Je reviendrai dans un instant sur certaines des hausses de prélèvements proposées pour 2013. Cependant, avant même que cette loi de financement ait été adoptée, le Premier ministre vient de rendre caduc l’engagement, figurant dans l’annexe B du projet de loi, de ne pas créer de nouvelles recettes après l’année 2013. Il a en effet décidé une importante réforme du financement de la sécurité sociale, dont les principes, sinon les modalités, semblent d’ailleurs analogues à ceux de la réforme que nous avions adoptée en février 2012 et que vous aviez décidé, en toute hâte, d’abroger dès juillet.

Les Français ont le tournis ! Ils veulent qu’un cap soit donné et qu’il soit tenu. Il est normal que vous corrigiez le plus vite possible vos erreurs, mais la politique financière et sociale de la France demande de la constance. C’est la condition pour créer la confiance des consommateurs, des épargnants, des opérateurs économiques, de nos partenaires européens et aussi des marchés, car ceux-ci existent, et nous avons besoin d’eux pour financer notre dette au moindre coût. Or, de la constance, justement, vous n’en avez pas !