Sommaire
Présidence de M. Charles Guené
Secrétaires :
Mmes Odette Herviaux, Marie-Noëlle Lienemann.
2. Loi de finances rectificative pour 2012. – Suite de la discussion d’un projet de loi
MM. Philippe Dallier, Jean-Pierre Caffet, Mme Annie David, M. le président.
MM. Jacques Legendre, Pierre Bordier.
Amendement no 114 de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. – MM. Philippe Dallier, François Marc, rapporteur général de la commission des finances ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget ; Mmes Bariza Khiari, Hélène Lipietz, M. Jacques Legendre. – Rejet.
Amendement no 231 de la commission. – MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Adoption.
Amendement n° 156 rectifié de M. Jean-Pierre Leleux. – Retrait.
Amendement n° 60 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin. – MM. Michel Billout, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 24
Amendement n° 63 rectifié de M. Dominique Watrin. – MM. Dominique Watrin, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 72 de M. Thierry Foucaud. – MM. Éric Bocquet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 196 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 125 de Mme Corinne Bouchoux et sous-amendement no 235 rectifié ter de M. Yvon Collin. – Mme Hélène Lipietz, MM. Nicolas Alfonsi, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Pierre Jarlier, Francis Delattre. – Rejet du sous-amendement et de l'amendement.
Amendement n° 73 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Éric Bocquet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 75 de M. Thierry Foucaud. – MM. Éric Bocquet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 195 de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Philippe Dallier, Francis Delattre. – Rejet.
Amendement n° 210 de M. Gérard Miquel. – M. Jean-Pierre Caffet. – Retrait.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Richard Yung, Robert del Picchia, René-Paul Savary, Jean-Yves Leconte.
Amendements identiques nos 17 rectifié ter de M. Christophe-André Frassa, 43 de M. Robert del Picchia et 138 rectifié de M. Jean Arthuis. – MM. Christophe-André Frassa, Robert del Picchia, Jean Arthuis, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Louis Duvernois, Christian Cointat, André Ferrand, Mme Nathalie Goulet. – Retrait de l’amendement no 138 rectifié ; rejet des amendements nos 17 rectifié ter et 43
Amendement n° 119 de M. Jean-Yves Leconte. – MM. Jean-Yves Leconte, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Retrait.
Reprise de l’amendement no 119 par M. Albéric de Montgolfier. – MM. Albéric de Montgolfier, Christian Cointat, Mme Joëlle Garriaud-Maylam. – Rejet de l’amendement no 119 rectifié.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l’article 25
Amendement n° 65 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Dominique Watrin, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Mme Annie David. – Retrait.
Reprise de l’amendement no 65 rectifié par M. Jean Arthuis. – M. Jean Arthuis. – Retrait de l’amendement no 65 rectifié bis.
Amendement n° 71 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Éric Bocquet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Francis Delattre. – Rejet.
Amendement n° 64 rectifié de M. Thierry Foucaud. – MM. Éric Bocquet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet.
Amendement n° 227 de M. Richard Yung. – Retrait.
Amendement n° 23 de M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis. – MM. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales, rapporteur pour avis ; François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Mmes Isabelle Debré, Annie David.
Amendements nos 115 de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et 191 rectifié de M. Philippe Dominati. – MM. Philippe Dominati, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Mme Isabelle Debré. – Rejet de l’amendement no 115 ; adoption de l’amendement no 191 rectifié.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 26
Amendement n° 5 rectifié de Mme Isabelle Pasquet. – MM. Dominique Watrin, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Yves Daudigny, rapporteur pour avis ; Mme Catherine Procaccia. – Rejet.
Amendements nos 6 rectifié quater et 7 rectifié de Mme Annie David. – Mme Annie David, MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Mme Nathalie Goulet. – Adoption de l'amendement no 6 rectifié quater insérant un article additionnel ; retrait de l’amendement no 7 rectifié.
3. Modification de l'ordre du jour
Suspension et reprise de la séance
4. Loi de finances rectificative pour 2012. – Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
Mmes Isabelle Debré, Frédérique Espagnac, M. Roger Karoutchi.
Amendements identiques nos 106 de Mme Isabelle Debré, 130 rectifié de M. Hervé Marseille et 204 de M. Jacques Mézard. – MM. Serge Dassault, Hervé Marseille, Jean-Pierre Chevènement, François Marc, rapporteur général de la commission des finances ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget ; Philippe Marini, président de la commission des finances ; Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales, rapporteur pour avis ; Alain Richard, Mmes Isabelle Debré, Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Jean Arthuis, Philippe Dallier. – Retrait de l’amendement no 204 ; rejet, par scrutin public, des amendements nos 106 et 130 rectifié.
Amendements identiques nos 111 de M. Francis Delattre et 129 de M. Hervé Marseille. – MM. Philippe Dallier, Hervé Marseille, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 92 de M. Philippe Marini. – M. Philippe Marini.
Amendement n° 109 de Mme Isabelle Debré. – Mme Isabelle Debré.
Amendements nos 110, 193 et 194 de M. Philippe Dominati. – M. Philippe Dominati.
Amendement n° 211 de Mme Frédérique Espagnac. – Mme Frédérique Espagnac.
Amendement n° 212 rectifié de M. Georges Patient. – M. Jean-Pierre Caffet.
MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet des amendements nos 92, 109, 110, 193 et 194 ; adoption de l’amendement no 211 ; retrait de l’amendement no 212 rectifié.
Amendements identiques nos 108 de Mme Marie-Hélène Des Esgaulx et 128 rectifié de M. Hervé Marseille. – Mme Isabelle Debré, MM. Hervé Marseille, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 27
Amendements nos 39 rectifié à 41 de la commission. – MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Alain Richard. – Adoption des amendements nos 39 rectifié et 40 insérant deux articles additionnels ; retrait de l’amendement no 41.
Amendement n° 228 de M. Pierre Jarlier. – MM. Pierre Jarlier, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; le président de la commission, Jean Arthuis. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 213 de M. Jean-Pierre Sueur. – MM. Jean-Pierre Sueur, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Retrait.
Amendement n° 38 rectifié de la commission et sous-amendement no 236 rectifié de M. Jean Arthuis. – MM. François Marc, rapporteur général ; Jean Arthuis, Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Pierre Jarlier, Jean-Claude Frécon, Philippe Dallier, Alain Richard. – Retrait du sous-amendement no 236 rectifié ; adoption de l'amendement n° 38 rectifié insérant un article additionnel.
Amendement no 229 de M. François Patriat. – MM. Jean-Pierre Caffet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 27 bis (nouveau). – Adoption
M. René-Paul Savary.
Amendement n° 153 de M. Philippe Dallier. – MM. Philippe Dallier, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; le président de la commission. – Rejet.
Adoption de l'article.
M. Richard Yung, Mme Aline Archimbaud, MM. Yves Daudigny, rapporteur pour avis ; Dominique Watrin, Mme Catherine Procaccia, M. René-Paul Savary.
Amendement n° 116 de Mme Catherine Procaccia. – MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Yves Daudigny, rapporteur pour avis. – Rejet.
Amendement n° 214 rectifié de M. Yves Daudigny. – M. Yves Daudigny.
Amendement n° 10 rectifié bis de Mme Catherine Procaccia. – Mme Catherine Procaccia.
MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Mme Catherine Procaccia, MM. Yves Daudigny, Jacky Le Menn, Philippe Dallier. – Adoption de l’amendement no 214 rectifié ; rejet de l’amendement no 10 rectifié bis.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l’article 29
Amendement n° 157 rectifié bis de Mme Éliane Assassi. – Mme Éliane Assassi.
Amendements nos 154 rectifié bis, 124 rectifié bis et 155 rectifié bis de Mme Hélène Lipietz. – Mme Hélène Lipietz.
Amendement n° 215 rectifié de M. Jean-Yves Leconte. – M. Richard Yung.
MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Mmes Éliane Assassi, Hélène Lipietz, M. Richard Yung. – Retrait des amendements nos 154 rectifié bis, 124 rectifié bis et 215 rectifié ; rejet des amendements nos 157 rectifié bis et 155 rectifié bis.
PRÉSIDENCE DE Mme Bariza Khiari
Mmes Joëlle Garriaud-Maylam, Claudine Lepage, MM. louis Duvernois, Robert del Picchia, Christophe-André Frassa.
Amendement n° 18 rectifié de M. Christophe-André Frassa. – MM. Christophe-André Frassa, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Mme Kalliopi Ango Ela, M. Christian Cointat. – Rejet.
Amendement n° 105 de M. André Ferrand. – M. André Ferrand.
Amendement n° 79 de M. Robert del Picchia. – M. Robert del Picchia.
Amendement n° 205 de M. Robert del Picchia. – M. Robert del Picchia.
MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet des amendements nos 105, 79 et 205.
Amendement n° 42 de la commission. – M. François Marc, rapporteur général.
Amendement n° 216 de M. Jean-Yves Leconte. – M. Jean-Yves Leconte.
MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Jean-Yves Leconte. – Retrait de l’amendement no 216 ; adoption de l’amendement no 42.
Amendement n° 202 rectifié bis de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. – Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Christian Cointat. – Retrait.
Amendement n° 203 rectifié bis de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. – Mme Joëlle Garriaud-Maylam, MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l’article 30
Amendement n° 230 de M. Georges Patient. – MM. Jean-Pierre Caffet, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; le président de la commission. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Article 31 (nouveau). – Adoption
Amendement n° 140 rectifié de M. Jean Arthuis. – MM. Aymeri de Montesquiou, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; le président de la commission, Mme Nathalie Goulet, M. Pierre Jarlier. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l’article 32
Amendement n° 143 rectifié bis de M. Jean Arthuis. – Non soutenu.
M. François Marc, rapporteur général.
Amendements identiques nos 146 rectifié de M. Yves Détraigne et 175 rectifié de M. René-Paul Savary. – Mme Nathalie Goulet, MM. René-Paul Savary, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué. – Rejet des deux amendements.
Amendements nos 162 rectifié bis et 163 rectifié bis de M. Jacques Mézard. – MM. Nicolas Alfonsi, François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; René-Paul Savary, le président de la commission. – Retrait des deux amendements.
Amendement n° 172 rectifié de M. François Fortassin repris par la commission sous le n° 257. – MM. François Marc, rapporteur général ; Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; Pierre Jarlier. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Demande de coordination sur l’article 19. – MM. Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; François Marc, rapporteur général ; Christian Cointat. – La coordination est ordonnée.
Amendement no B-1 du Gouvernement. – MM. Jérôme Cahuzac, ministre délégué ; François Marc, rapporteur général. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
MM. le président de la commission, Jérôme Cahuzac, ministre délégué, Philippe Dallier, Mme Nathalie Goulet, M. Richard Yung, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Nicolas Alfonsi, Jean-Vincent Placé.
Adoption, par scrutin public, du projet de loi.
5. Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité
6. Dépôt de rapports du Gouvernement
7. Organisme extraparlementaire
compte rendu intégral
Présidence de M. Charles Guené
vice-président
Secrétaires :
Mme Odette Herviaux,
Mme Marie-Noëlle Lienemann.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Loi de finances rectificative pour 2012
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012 (projet n° 687, rapport n° 689, avis nos 690 et 691).
Rappels au règlement
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour un rappel au règlement.
M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je donnerai à mon rappel au règlement la forme d’un vœu.
Hier, après le dîner, est survenu un incident auquel nous n’avons pas voulu, sur le coup, accorder plus d’importance qu’il n’en méritait. Sur un échange pas forcément plus chaud que d’autres, l’un de nos collègues de la majorité a cru bon de traverser l’hémicycle et s’est planté devant un collègue de notre groupe pour lui dire combien il était mécontent de ses propos. Il était tard, il faisait chaud, tout le monde était fatigué…
En ce jour d’ouverture des jeux Olympiques, je forme donc le vœu que nous respections la devise « Plus vite, plus haut, plus fort » et que nous défendions nos convictions dans l’esprit du baron de Coubertin, en restant tous fair-play !
M. Jean-Pierre Caffet. Monsieur le président, puisque j’ai cru comprendre qu’il était question de moi dans le précédent rappel au règlement, je tiens à dire que je ne regrette pas ce que j’ai fait.
Monsieur Dallier, j’ai fait l’objet d’une mise en cause par votre collègue Francis Delattre et je suis allé le voir simplement pour lui conseiller de cesser les attaques ad hominem auxquelles il avait commencé à se livrer. Je répète donc que je ne regrette rien et, s’il le faut, je recommencerai !
Le débat d’hier a montré que l’opposition utilisait toutes les possibilités ouvertes par le règlement pour faire durer la discussion, parfois au-delà du raisonnable. Notre détermination à faire en sorte que le Sénat adopte ce projet de loi est totale : nous utiliserons, nous aussi, toutes les ressources de la procédure qui s’offriront à nous. Soyez sûr d’une chose : nous avons tout notre temps !
M. Philippe Dallier. Nous aussi !
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour un rappel au règlement.
Mme Annie David. À mon tour, je formerai un vœu : je souhaite que nos débats reprennent dans une atmosphère tout à fait républicaine et que chacun respecte l’institution, en commençant par ne pas dépasser son temps de parole, par exemple ; je souhaite que chacun se limite au contenu des amendements qui nous sont présentés, sans faire de procès d’intention à l’autre camp.
J’espère donc que nos débats reprendront dans de très bonnes conditions et que nous parviendrons enfin à adopter ce projet de loi.
Évidemment, ce texte ne convient qu’à une partie de cet hémicycle, la majorité sénatoriale : j’en suis désolée ! Mais pendant dix ans, nous avons vécu la situation inverse…
M. Philippe Dallier. Et vous avez fait ce que nous faisons !
Mme Annie David. Nous avons effectivement eu parfois, ces derniers jours, des débats très intenses !
Que chacun respecte ses adversaires et utilise le règlement à bon escient, sans échanger d’insultes ni de noms d’oiseaux. Hier, l’énervement jouant, certains propos sont allés un peu loin et la situation ne pouvait qu’empirer. Je forme donc le vœu que la discussion reprenne dans de bonnes conditions.
M. le président. Mes chers collègues, acte vous est donné de vos rappels au règlement. Tout le monde peut désormais admettre que l’incident est clos.
Nous reprenons la discussion des articles de la seconde partie du projet de loi de finances rectificative pour 2012.
SECONDE PARTIE (suite)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
TITRE III
DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – MESURES FISCALES NON RATTACHÉES
M. le président. Dans la discussion des articles de la seconde partie, nous abordons l’examen, au sein du titre III, de l’article 24.
Article 24
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° L’article 278-0 bis est ainsi modifié :
a) Le A est complété par un 3° ainsi rédigé :
« 3° Les livres, y compris leur location. Le présent 3° s’applique aux livres sur tout type de support physique, y compris ceux fournis par téléchargement. » ;
b) Il est ajouté un F ainsi rédigé :
« F. – 1° Les spectacles suivants : théâtres, théâtres de chansonniers, cirques, concerts, spectacles de variétés, à l’exception de ceux qui sont donnés dans les établissements où il est d’usage de consommer pendant les séances ;
« 2° Le prix du billet d’entrée donnant exclusivement accès à des concerts donnés dans des établissements où il est servi facultativement des consommations pendant le spectacle et dont l’exploitant est titulaire de la licence de la catégorie mentionnée au 1° de l’article D. 7122-1 du code du travail. » ;
2° Le 6° de l’article 278 bis est abrogé ;
2°bis (nouveau) L’article 279 est ainsi modifié :
a) Les deuxième à sixième alinéas du b bis sont supprimés ;
b) Le b bis a est abrogé ;
2°ter (nouveau) Après le mot : « réduit », la fin du c de l’article 281 quater est ainsi rédigée : « de 5,5 % dans les conditions prévues au 2° du F de l’article 278-0 bis. » ;
3° Le 2° du 1 du I de l’article 297 est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, la référence : « au 1° » est remplacée par les références : « aux 1° et 3° » ;
b) Au dernier alinéa, la référence : « et E » est remplacée par les références : « , E et F ».
II. – Le I s’applique aux opérations pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée est exigible à compter du 1er janvier 2013.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, sur l’article.
M. Jacques Legendre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, certains sujets sont susceptibles, je le crois, de nous rassembler. Parmi ceux-ci figure la politique du livre : la défense du livre et de l’existence, sur l’ensemble du territoire national, d’un réseau de librairies capable de jouer les médiateurs entre un public qui aime lire et les auteurs qu’il s’agit de promouvoir. Ce réseau va des auteurs aux lecteurs, en passant par les libraires.
Dans le passé, cette politique a été soutenue par de grandes figures de nos différentes formations. Sur la proposition de M. Jack Lang, nous avons soutenu le prix unique du livre. L’an dernier encore, le Sénat a soutenu aussi le prix unique du livre numérique, et nous pouvons tous être fiers de ce beau combat. Un consensus s’est manifesté également quand, dans le passé, nous avons tenu à ce que le livre bénéficie d’un taux minoré de TVA.
L’an dernier, nous avons eu un débat quand il a semblé utile de faire passer ce taux minoré de 5,5 % à 7 % pour toute une série de produits, dont le livre. À l’époque, la commission de la culture, à l’unanimité, avait souligné les difficultés liées à ce relèvement du taux de TVA, parce que les libraires risquaient, sur ce point, d’être victimes de la bonne idée que nous avions soutenue auparavant, à savoir le prix unique du livre. En effet, le prix du livre est fixé non par le libraire, mais par l’éditeur. Le relèvement du taux de TVA risquait donc d’être supporté non pas par l’éditeur, mais par le libraire, en fin de course, à un moment où les libraires connaissaient une situation relativement difficile, parce qu’ils doivent faire face à la concurrence de nouveaux modes de distribution du livre – on le voit bien avec l’action d’une grande société venue de l’extérieur, Amazon – et parce qu’ils doivent également s’adapter à la concurrence, ou à la complémentarité, du livre numérique. Voilà pourquoi, mes chers collègues, il me semble intéressant d’ouvrir un débat sur l’abaissement de 7 % à 5,5 % du taux de TVA sur le livre numérique. En ce qui nous concerne, nous ne saurions être choqués par cette proposition.
En revanche, il nous paraît plus grave de penser que l’on aurait réglé le problème du livre en baissant le taux de TVA. Les représentants des libraires auditionnés par la commission de la culture, mercredi dernier, nous ont rappelé que le retour au taux réduit de TVA de 5,5 % impliquerait de modifier une nouvelle fois un million de prix dans les bases de données interprofessionnelles, ce qui représente un coût, qu’un risque de bug informatique existait, que leur fragilité économique était inquiétante et que leur avenir ne dépendait donc pas uniquement du taux de la TVA. La ministre de la culture elle-même estime que la librairie indépendante, pour se maintenir, devrait atteindre un taux de rentabilité de 2 % en fin d’année. Or, d’après une étude récente réalisée par Xerfi, ce taux avoisinait 0,3 % en 2009 et il s’est encore dégradé depuis. Nous devons donc être particulièrement vigilants !
Les libraires indépendants ont présenté une proposition très constructive : ils suggèrent de maintenir le taux de TVA à 7 % jusqu’au 1er janvier 2013, parce que cette mesure permettrait de dégager près de 50 millions d’euros, au lieu de 30 millions d’euros si la baisse du taux était appliquée dès la fin de l’été. Ce surplus de recettes de 20 millions d’euros pourrait alimenter un fonds de soutien à la librairie indépendante qui délivrerait des prêts de trésorerie et des aides à l’exploitation. Ce fonds contribuerait à préserver la diversité culturelle ainsi que la présence et l’emploi culturels sur nos territoires.
Monsieur le ministre, nous ne comprenons pas que le Gouvernement n’accède pas à cette proposition qui semble constructive. Nous sommes prêts – au moins ceux d’entre nous qui sont membres de la commission de la culture – à voter cet abaissement du taux de TVA à 5,5 % si le Gouvernement donne une suite favorable à cette proposition des libraires. Sinon, il nous faudra reconnaître que nous avons laissé passer une occasion d’aider efficacement les libraires qui en ont actuellement bien besoin !
J’espère donc que la cause de la lecture et du livre pourra nous rassembler, même en cet été un peu chaud ! (Mme Joëlle Garriaud-Maylam applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Bordier, sur l’article.
M. Pierre Bordier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant que membre de la commission des affaires culturelles, je ne peux que me réjouir pour nos libraires de la baisse de la TVA sur le livre, mais je nuancerai mon propos en raison du coût que représente cette mesure pour les finances publiques.
Fallait-il rouvrir le débat sur la TVA alors que notre déficit public est au plus haut et que le rétablissement de notre situation financière, comme dans tous les autres pays d’Europe, doit être la priorité des priorités ?
Dans ce projet de loi de finances rectificative, le Gouvernement a fait le choix de la rigueur, n’hésitant pas à revenir sur des dispositions adoptées lors du quinquennat précédent qui visaient à améliorer le pouvoir d’achat des salariés, telles que la défiscalisation des heures supplémentaires ou le forfait social. Aussi est-il surprenant que deux secteurs viennent échapper à cette rigueur, le Gouvernement revenant sur deux niches : le secteur du livre et, après l’adoption d’un amendement des députés socialistes, le spectacle vivant.
Je m’interroge sur les raisons de ce choix, sachant que le taux réduit de TVA de 5,5 % est actuellement réservé à des services de première nécessité pour les ménages les plus faibles – par exemple, les équipements pour personnes handicapées ou les produits alimentaires.
Peut-on attendre de cette mesure, comme le revendique l’exposé des motifs, qu’elle assure « la promotion de la lecture » et « facilite l’accès de tous à la culture », alors qu’il ne s’agira que de quelques centimes de moins sur l’achat d’un livre par le consommateur ?
Pour l’économie du secteur, le bénéfice à retirer de cette mesure me semble très relatif au regard de son poids budgétaire. Les problèmes des libraires tiennent non pas seulement au prix du livre – à 7 %, la TVA restait modique –, mais plutôt à d’autres sujets, tels que les inégalités de distribution ou l’irruption du numérique...
Dans un paysage institutionnel, économique et technologique en pleine mutation, les acteurs traditionnels de la « chaîne du livre » sont inquiets. Comme l’a souligné notre collègue Jacques Legendre lors de la réunion de la commission de la culture, nous serons loin d’avoir accompli quelque chose pour eux lorsque nous aurons ramené le taux de TVA de 7 % à 5,5 %.
Il me semble aussi que le fait d’accorder une dérogation pour le livre et pour le spectacle vivant sera difficile à justifier vis-à-vis des autres secteurs restant soumis au taux réduit de TVA de 7 % : le secteur du bâtiment touché par la crise ne serait-il pas également fondé à demander un retour au taux de 5,5 %, sans parler du secteur de la restauration ou des transports ?
Tous avaient accepté d’être soumis à un taux réduit de 7 %, dès lors – et c’est très important – qu’il n’y avait pas d’exemption, dès lors que tout le monde était à 7 %. Créer une exception ne peut que susciter un sentiment d’injustice et d’insatisfaction ! Nous pouvons dès lors nous attendre à de nombreuses sollicitations lors de la prochaine loi de finances…
Étant pour ma part soucieux de l’aide au secteur culturel dans son ensemble, j’estime de plus qu’une grave inégalité est créée. Pourquoi étendre la TVA à taux réduit au spectacle vivant, et non au cinéma ou aux musées ? Pourquoi provoquer une division interne entre les différents acteurs de la culture ?
Il ne me choquait pas que la TVA qui leur était désormais appliquée soit à 7 % ; mais dès lors que le livre et le spectacle vivant seraient fondés par leur finalité culturelle à revenir au taux de 5,5 %, il faudrait qu’il en aille de même pour l’ensemble du secteur culturel. C’est pourquoi, si cet article devait être adopté, il me semblerait indispensable de lui associer le cinéma, qui s’ouvre, comme le livre, au défi du numérique.
J’avais déposé en ce sens, avec plusieurs collègues de la commission de la culture, l'amendement n° 156 rectifié. Le livre et le cinéma, qui ont toujours été au cœur de l’exception culturelle française, auraient ainsi été associés à ce taux de TVA particulièrement bienveillant. Mais vous aurez compris qu’il s’agissait d’un amendement d’appel : je le retire donc dès maintenant.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 114 est présenté par Mme Des Esgaulx et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 137 rectifié est présenté par MM. Arthuis, Dubois, J. Boyer, Delahaye, Marseille, Roche et Détraigne et Mme Férat.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l'amendement n° 114.
M. Philippe Dallier. Cet amendement a été excellemment défendu par notre collègue Pierre Bordier. Le livre n’est effectivement pas un produit comme les autres et l’on peut comprendre que, y compris au sein du même groupe, les opinions puissent diverger.
Cela étant dit, nous allons ouvrir la boîte de Pandore, et bien d’autres pourraient effectivement monter au créneau pour demander à bénéficier également d’un abaissement du taux de TVA. Il ne nous semble pas nécessaire de prendre le risque. C’est la raison pour laquelle nous proposons de supprimer l’article 24.
M. le président. L’amendement n° 137 rectifié n’est pas défendu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 114 ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’avis de la commission est bien sûr défavorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Le Gouvernement est défavorable à l’adoption de cet amendement. Il l’est pour une question de principe, d’abord : moins il y aura de taxes affectées, mieux le budget se portera et plus l’État retrouvera la maîtrise de ses politiques publiques. Nous avons trop de taxes affectées qui rendent de fait les organismes bénéficiaires indépendants de la volonté politique, alors même qu’ils dépendent de celle-ci.
Quant au sujet lui-même, l’accord avec le monde de la culture sur cette baisse de la TVA au 1er janvier sans qu’il y ait de mesures entre le moment où le Parlement est saisi et celui auquel cette baisse s’appliquera me paraît suffisamment convaincant pour demander au Sénat d’en rester au texte du Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Bariza Khiari, pour explication de vote.
Mme Bariza Khiari. Il convient à notre avis de réaffirmer le caractère spécifique du livre, qui a toujours bénéficié d’une législation propre. Je remarque que nous sommes d’accord pour dire que ce n’est pas un produit comme les autres, mais nous divergeons sur les aides à apporter à ce secteur.
Nous ne méconnaissons pas les contraintes techniques particulières du secteur de la librairie. Il s’agit de préserver et de développer un élément qui favorise la culture. C’est l’accès à la lecture, donc à la culture, qui serait atteint en fragilisant tout le réseau des libraires, notamment indépendants.
Ramener le taux de TVA à 5,5 % est une bonne mesure que nous voterons. A contrario, nous voterons contre l’amendement n° 114.
M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour explication de vote.
Mme Hélène Lipietz. Les sénatrices et sénateurs écologistes se félicitent de l’abandon de la TVA à 7 % sur le livre, qu’il soit papier ou numérique, ainsi que sur le spectacle vivant.
Nous saluons cet engagement tenu par M. le Président de la République, qui permettra de redonner un peu d’air à un secteur fortement affecté par un contexte économique très difficile. La commission de la culture a d’ailleurs auditionné, la semaine dernière, des représentants des librairies françaises qui nous ont expliqué que, pour eux, le passage de la TVA à 7 % équivalait à une remise en cause de la loi de 1981 sur le prix unique du livre.
C’est la raison pour laquelle les élus écologistes voteront contre l’amendement n° 114.
M. le président. La parole est à M. Jacques Legendre, pour explication de vote.
M. Jacques Legendre. Nous aurions pu nous retrouver aujourd’hui sur l’abaissement de la TVA à 5,5 % et les mesures pratiques permettant de rendre cet abaissement efficace.
Je regrette, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas accepté de donner toute sa portée à cet effort qui ne peut être que limité. C’est en effet une bonne chose d’avoir créé un taux de TVA minoré à 7 % et de s’efforcer d’y rassembler le maximum de produits ; les exceptions, c’est vrai, sont dangereuses. Cependant, le livre n’est pas un produit comme les autres. Nous en sommes tous convaincus et je regrette, monsieur le ministre, que vous soyez enfermé dans ce domaine dans une vision assez étroite des choses.
Dans ces conditions, je ne pourrai bien évidemment pas m’opposer à l’abaissement de la TVA à 5,5 %, mais je ne pourrai pas non plus voter cette mesure sans accompagnement : je m’abstiendrai donc.
M. le président. L'amendement n° 231, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par six alinéas ainsi rédigés :
« F. – 1° Les spectacles suivants :
a) Les théâtres ;
b) Les théâtres de chansonniers ;
c) Les cirques ;
d) Les concerts ;
e) Les spectacles de variétés, à l’exception de ceux qui sont donnés dans des établissements où il est d’usage de consommer pendant les séances ;
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 156 rectifié, présenté par MM. Leleux, Bordier, Chauveau et Ferrand et Mme Cayeux, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Les droits d'entrée dans les salles de spectacles cinématographiques quels que soient le procédé de fixation ou de transmission et la nature du support des œuvres ou documents audiovisuels qui sont présentés. » ;
II. - Alinéa 10
Après la référence :
b bis
insérer les mots :
et le b quinquies
III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été précédemment retiré par son auteur.
L'amendement n° 60, présenté par Mmes Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Les droits d’entrée dans les salles de spectacles cinématographiques quels que soient le procédé de fixation ou de transmission et la nature du support des livres ou documents audiovisuels qui sont présentés. » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Michel Billout.
M. Michel Billout. Vous le savez, le groupe communiste républicain et citoyen est particulièrement attaché au rétablissement du taux de TVA réduit à 5,5 % sur l’ensemble des biens culturels que le gouvernement précédent avait relevé à 7 % en décembre 2011. Nous avons déjà eu l’occasion de nous exprimer plusieurs fois sur ce sujet.
Nous avons à ce titre déposé le 9 mai dernier une proposition de loi visant à abroger les dispositions du projet de loi de finances rectificative de décembre 2011 ayant porté à 7 % le taux de TVA sur les livres, le cinéma et les spectacles culturels.
Nous approuvons donc la décision du Gouvernement de rétablir le taux de TVA réduit à 5,5 % sur les livres, ainsi que l’extension de ce dernier au secteur du spectacle vivant lors de l’examen du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale. Les députés du groupe de la gauche démocrate et républicaine ont d’ailleurs déposé un amendement en ce sens.
Alors que se déroule le festival d’Avignon, événement emblématique du spectacle vivant, ce rétablissement est un geste fort à l’égard de l’ensemble des acteurs de ce secteur artistique.
Cependant – cela a déjà été dénoncé ici –, le secteur du cinéma demeure assujetti au taux de TVA de 7 %, et nous le regrettons profondément. Arguer de la bonne santé économique du secteur cinématographique ne nous semble pas satisfaisant, pas plus que d’opposer le faible coût de la répercussion de cette augmentation du taux de TVA sur les tickets de cinéma – de l’ordre de dix centimes par place, entend-on –, d’autant que la bonne santé du secteur reste à démontrer, ou pour le moins à nuancer. Si les salles du secteur marchand, comme les multiplexes, se portent bien, la réalité est sans doute plus difficile pour les salles municipales ou associatives, alors que ce sont elles qui assurent le plus souvent un haut niveau de programmation.
La question est en réalité tout autre ; elle est symbolique et non financière, et c’est pourquoi elle est si importante. Il s’agit de protéger les œuvres culturelles dans leur ensemble, d’envisager des mesures globales répondant à la fameuse « exception culturelle » dont la France a toujours été porteuse. Le cinéma fait partie intégrante de la culture, il ne saurait être distingué des autres secteurs culturels du seul fait qu’il serait moins en difficulté.
Pour toutes ces raisons, nous déplorons cette nouvelle distinction entre les secteurs culturels fondée sur des critères économiques. La culture ne doit pas être traitée comme un bien marchand ordinaire, et c’est ce que porte au fond notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cette proposition est fort sympathique et la commission aurait pu, dans l’esprit, y être favorable. Son coût est cependant estimé à 20 millions d’euros. Par conséquent, compte tenu de la nécessité pour nous d’être très rigoureux quant aux exigences budgétaires, la commission des finances a du mal à émettre un avis favorable. Elle a néanmoins souhaité entendre l’avis du Gouvernement.
J’ai cru comprendre que la commission de la culture, de son côté, n’était elle-même pas favorable à l’adoption de cet amendement, considérant que le cinéma et le livre différaient en termes de facilité d’accès. Monsieur le ministre délégué, nous souhaitons entendre votre point de vue mais, en tout état de cause, la commission des finances est plutôt défavorable à l’amendement, vu le coût qu’il représente.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le sénateur, le geste serait effectivement fort : un geste à 20 millions d’euros ! Malheureusement, le Gouvernement ne peut pas vous suivre dans cette voie et émet donc un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 27, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
...) Le m. est abrogé.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 24, modifié.
(L'article 24 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 24
M. le président. L'amendement n° 63 rectifié, présenté par MM. Watrin et Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 199 sexdecies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 4 est ainsi rédigé :
« 4. L'aide prend la forme d'un crédit d'impôt sur le revenu égal à 50 % des dépenses mentionnées au 3 au titre des services définis aux articles L. 7231-1 et D. 7231-1 du code du travail, supportées au titre de l'emploi, à leur résidence, d'un salarié ou en cas de recours à une association, une entreprise ou un organisme.
Le crédit d'impôt est imputé sur l'impôt sur le revenu après imputation des réductions d'impôt mentionnées aux articles 199 quater B à 200 bis, des crédits d'impôt et des prélèvements ou retenues non libératoires. S'il excède l'impôt dû, l'excédent est restitué. » ;
2° Le 5 est ainsi rédigé :
« 5. L'aide est accordée sur présentation des pièces justifiant du paiement des salaires et des cotisations sociales, de l'identité du bénéficiaire, de la nature et du montant des prestations réellement effectuées payées à l'association, l'entreprise ou l'organisme définis au 1. » ;
3° Le 6 est abrogé.
II. - Les pertes de recettes pour l'État résultant des dispositions ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Notre groupe s’est de longue date interrogé sur la question des crédits et réductions d’impôt, des dispositifs relativement coûteux pour les finances publiques qui se sont d’autant plus développés que les politiques publiques, en bien des domaines, ont connu une lente mais sûre réduction de leur financement.
Le cas de la réduction d’impôt « emplois à domicile » est tout à fait intéressant. Mise en place par un gouvernement de gauche, la réduction d’impôt a connu un certain nombre d’évolutions, la plus sensible étant celle du plafond des dépenses éligibles, mais aussi le taux de la réduction et, plus encore, la définition des dépenses ouvrant droit à ce qui est d’ailleurs devenu un crédit d’impôt pour certains contribuables, à savoir les salariés, et une simple réduction d’impôt pour d’autres, notamment les retraités.
À dire vrai, le caractère assez largement dérogatoire du droit commun des réductions et crédits d’impôt qui affectent les « emplois à domicile » n’a pas été résolu, loin de là, en distinguant, comme le texte actuel du code général des impôts le fait, la nature des bénéficiaires.
La question du coût éventuel de la disposition ne peut se poser qu’en résolvant de manière globale la problématique des « niches fiscales », en leur imposant notamment un plafonnement général plus adapté aux exigences de justice fiscale.
Nous ne pensons pas, dans le même temps, qu’il soit bienvenu de laisser perdurer une différence de traitement qui amène aujourd’hui un certain nombre de personnes âgées, retraités disposant de faibles ressources, à renoncer aux services d’aide ménagère ou d’aide à domicile pouvant leur être utiles.
Nous sommes donc favorables au retour à une égalité de traitement entre contribuables et souhaitons que le débat tranche, dès ce collectif ou dans le plus proche avenir, le problème des niches fiscales.
C’est au bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement va dans un sens que nous cautionnons, puisqu’il vise à mettre fin à une forme de discrimination, à laquelle beaucoup d’entre nous, à l’instar de nos collègues du groupe CRC, souhaitent naturellement mettre un terme. L’objectif est donc louable.
Pour autant, nous nous livrons à un exercice budgétaire, même s’il est restreint. Cet amendement représenterait un coût, certes non exactement chiffré, de l’ordre d’environ un milliard d’euros. Ce coût est en tout état de cause potentiellement très important.
En outre – je reviens toujours au même argument –, nous allons logiquement, dans les prochaines semaines, tenter d’échafauder un nouveau dispositif relatif à l’impôt sur le revenu.
Je vous invite donc, monsieur le sénateur, à retirer pour l’instant cet amendement et à présenter votre proposition à cet égard à l’occasion de notre future réflexion sur l’impôt sur le revenu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Son coût – un milliard d’euros – le rend impossible à accepter pour le Gouvernement, ce dont je suis désolé.
M. le président. Monsieur Watrin, l’amendement n° 63 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 63 rectifié est retiré.
L’amendement n° 13 rectifié bis, présenté par M. Dassault, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 200 sexies du code général des impôts est abrogé.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 72, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au 1. de l’article 200-0 A du code général des impôts, le montant : « 18 000 € » est remplacé par le montant : « 10 000 € ».
II. - Le I est applicable à compter de l’imposition des revenus de 2012.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s’il s’agit, dans le présent projet de loi de finances rectificative, de déterminer des recettes nouvelles pour les années à venir, il est également possible de proposer de réduire la dépense fiscale.
C’est ainsi que l’amendement n° 72 vise à revenir sur les conditions de plafonnement des réductions et crédits d’impôt.
Nous ne sommes pas opposés à la floraison des niches fiscales uniquement parce que cela nuit à la situation budgétaire de l’État et que, d’une certaine manière, l’origine des déficits cumulés comme de la dette publique est sans doute à rechercher dans cette course au moins-disant fiscal qui anime l’Europe depuis une bonne trentaine d’années.
Nous sommes d’abord opposés aux niches fiscales parce qu’elles participent d’une rupture du principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt. En privant, au bénéfice de quelques uns ou d’un nombre limité de contribuables, l’État de ressources parfois très importantes – n’en étions-nous pas à verser 700 millions d’euros à 20 000 bénéficiaires du bouclier fiscal ? –, nous le privons par là même des moyens de répondre aux attentes de la collectivité.
Les niches fiscales, pour le seul impôt sur le revenu, représentent un coût de l’ordre de 40 milliards d’euros – et je ne prends en compte que ce qui peut être chiffré –, c’est-à-dire entre les deux tiers et les quatre cinquièmes du rendement même de l’impôt.
C’est bien de cela dont il est question ici.
Il faut donc, à notre avis, sensiblement réduire les niches existantes, quitte à les remplacer par une dépense publique nouvelle, et partir de principes tendant à les centrer sur quelques points clés.
Que les particuliers fassent quelque don aux œuvres d’utilité publique, qu’ils placent leurs enfants en crèche collective ou qu’ils participent à la vie démocratique du pays en aidant le parti politique ou le syndicat de leur choix ne nous semble pas problématique.
En revanche, le fait qu’ils ne soient en situation d’investir dans l’économie que parés de la certitude qu’ils pourront éponger avec l’argent public les conséquences de leur prise de risque nous convient beaucoup moins et ne nous semble pas adapté à la situation.
Qui sont ces libéraux, mes chers collègues, qui ont toujours besoin de l’État pour engager leurs capitaux dans telle ou telle entreprise ?
L’amendement n° 72 vise donc à rectifier quelque peu les conditions du plafonnement des niches fiscales, ce dernier étant nécessaire pour éviter une trop grande inégalité devant l’impôt et pour dégager quelques ressources budgétaires de plus pour l’État.
C’est donc au bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances est favorable au principe de l’amendement présenté, et le groupe socialiste s’était d’ailleurs déjà prononcé en ce sens.
Pour autant, il y a lieu, là encore, de s’inscrire dans la logique que j’évoquais tout à l’heure : c’est dans le cadre d’une réforme plus globale des impositions sur le revenu que la question pourrait à mon avis être abordée.
Cet amendement aurait donc davantage vocation à s’inscrire dans le projet de loi de finances initiale pour 2013.
M. le ministre saura certainement nous éclairer sur ce point, mais sa position devrait logiquement être la même que celle qu’il a défendue tout à l’heure.
La commission des finances demande donc à l’auteur de l’amendement de bien vouloir le retirer.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. Monsieur le sénateur, la réforme fiscale, notamment celle qui est relative à l’impôt sur le revenu, sera présentée au Parlement lors de l’examen du projet de budget pour 2013. Cela a été clairement indiqué, et nous y travaillons d’ores et déjà.
À cet égard, le plafonnement global des niches a été envisagé en prenant comme référence non plus un pourcentage du revenu fiscal de référence, mais bien une valeur absolue. Le montant de 10 000 euros a été évoqué et sera, je le crois, confirmé.
Il restera à faire un travail de transfert de la réduction d’assiette en réduction d’impôt, puisque, vous le savez, nombre de niches fiscales sont des mesures d’assiette et non pas de réductions d’impôt. Or on ne peut plafonner que lorsqu’il s’agit de réduction d’impôt et non pas lorsqu’il s’agit de mesures d’assiette. Le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif vont donc devoir s’atteler à un travail de très grande ampleur.
Adopter aujourd’hui cet amendement serait tout à fait prématuré. Je vous suggère donc de le retirer, sous le bénéfice des indications que je viens de vous donner. Sachez, monsieur le sénateur, que, sur ce sujet, le Gouvernement vous donne un rendez-vous très ferme en loi de finances initiale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. On ne lâchera pas !
M. le président. Monsieur Bocquet, l’amendement n° 72 est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 72 est retiré.
L’amendement n° 196, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le i de l’article 279 du code général des impôts, il est inséré un i bis ainsi rédigé :
« i bis. Les services fournis par les entreprises de pompes funèbres ainsi que la livraison de biens qui s’y rapportent ; »
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Les dépenses liées aux obsèques constituent des dépenses de première nécessité. La plupart d’entre elles sont obligatoires, quand elles ne sont pas incontournables.
Ces dépenses funéraires, auxquelles chacun se trouve malheureusement confronté, sont soumises, pour l’essentiel, à une TVA à taux normal de 19,6 %, seuls les transports par véhicules funéraires étant assujettis à une TVA de 5,5 %.
Outre les incohérences fiscales que présente cette taxation – transport du corps du défunt taxé à 5,5 % alors que l’ambulance n’est pas assujettie à la TVA, porteurs à 19,6 % alors que le corbillard l’est à 5,5 %, et j’en passe –, que penser de cet impôt sur la mort qui s’applique sans distinction à tous nos concitoyens ?
La France est l’un des seuls pays de l’Union européenne à appliquer une TVA à taux normal sur les dépenses d’obsèques. En effet, en application de la sixième directive du Conseil de l’Union européenne du 17 mai 1977, qui dispose que les services et produits fournis par les entreprises de pompes funèbres et de crémation peuvent bénéficier d’un taux réduit de TVA, la plupart des pays membres de l’Union européenne appliquent un taux réduit. Dans les zones frontalières, cette situation entraîne donc des distorsions de concurrence pour les entreprises.
L’application de cette législation fiscale européenne ne représenterait, pour le budget de l’État, qu’une diminution brute de 145 millions d’euros, alors qu’elle se traduirait, pour chaque famille dans le malheur concernée, par un gain de pouvoir d’achat.
L’application d’une telle mesure permettrait donc de rendre un peu plus supportable le coût financier d’un événement qui fait la douleur des familles. Elle contribuerait en outre à l’harmonisation des taxations nationales à l’échelle européenne. Enfin, elle permettrait d’augmenter le pouvoir d’achat de l’ensemble des Français, à l’instar de ce que vous cherchez à faire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ce sujet n’est pas inconnu des sénateurs, puisque plusieurs rapports sur ce thème ont déjà été publiés.
Il est vrai que les obsèques d’une personne sont soumises à de nombreuses taxes, à l’échelon tant local que national, avec la TVA. Il est également vrai que le taux de TVA varie selon les actes pratiqués lors de cet événement, actes qui participent aux frais d’obsèques.
Par conséquent, on ne peut que saluer la volonté de cohérence qui guide la démarche de notre collègue. Il rejoint en cela les sénateurs Jean-Pierre Sueur et Jean-René Lecerf, qui, dans un rapport récent, préconisaient l’instauration d’un seul taux de TVA sur l’ensemble des actes liés aux obsèques.
Dans l’esprit, on ne peut donc que rejoindre le souhait émis dans cet amendement.
Cependant, est-ce le moment de mettre en œuvre une diminution de TVA pour une partie des actes dont il est question ? Cela aurait un coût. Monsieur le ministre, quel est votre sentiment sur le sujet ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, monsieur le sénateur.
Il est vrai que l’augmentation du taux réduit de TVA de 5,5 % à 7 % a incontestablement amputé le pouvoir d’achat des Français. C’est un débat que vous avez eu l’année dernière avec le gouvernement qui a proposé cette augmentation, acceptée par la majorité de l’époque. Nous avions alors dénoncé cette attaque incontestable au pouvoir d’achat. Je rappelle en effet que le passage de 5,5 % à 7 % a représenté une diminution du pouvoir d’achat de l’ordre de 2 milliards d’euros.
Cela a été voté. Dès lors, donner l’impression de revenir, globalement ou par étapes, sur cette mesure, donnerait une impression de revanche, de riposte, qui ne serait probablement pas souhaitable et qui serait d’ailleurs peu appréciée par les parlementaires de l’opposition. (Rires ironiques sur les travées de l’UMP.)
M. Philippe Dallier. Je me demandais comment cela allait finir !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Au moins à cet égard, émettre un avis favorable sur cet amendement ne serait donc pas bien perçu.
J’ajoute que l’application de la disposition proposée représenterait un coût que l’état de nos finances publiques ne peut supporter.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement. Il le fait à regret, car, je le sais, nous avons tous eu à subir cette épreuve dans nos vies personnelles. Il s’agit de moments particulièrement douloureux pour les familles, encore que je ne sois pas certain qu’un coût moindre puisse, de quelque façon que ce soit, en atténuer le chagrin.
Mme Catherine Procaccia. C’est la mort de votre amendement, monsieur Dominati ! (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 125, présenté par Mmes Bouchoux et Blandin, MM. Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 302 bis ZE du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :
« Cette contribution est due par toute personne qui procède à la cession de tels droits. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la cession visée au premier alinéa est réalisée par une personne dont le domicile fiscal ou le siège social n’est pas situé en France, la contribution est perçue par la voie d’une retenue à la source dont le redevable est le cessionnaire des droits.
II. - L’article L. 411-2 du code du sport est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Une partie du produit de cette contribution est destinée à financer l’Agence française de lutte contre le dopage, dans la limite de 4 millions d’euros par an. »
La parole est à Mme Hélène Lipietz.
Mme Hélène Lipietz. Instaurée en 1999, la taxe dite Buffet, au taux de 5 %, s’applique à la commercialisation des droits de retransmission télévisée des manifestations sportives françaises diffusées en France.
Cette taxe permet notamment d’abonder le Centre national pour le développement du sport, ou CNDS. Pour l’année 2012, cette somme s’élevait 43,4 millions d’euros. Plus de dix ans après la mise en place de cette taxe, le groupe écologiste pense qu’il convient de réfléchir à l’opportunité de l’étendre aux droits télévisés des manifestations sportives étrangères, et ce pour plusieurs raisons.
En premier lieu, l’état de nos finances publiques le justifie amplement. Il nous faut, en outre, introduire plus de justice dans notre politique fiscale.
En deuxième lieu, la baisse des coûts d’acquisition de certains droits sportifs en France, et plus particulièrement la dépendance de cette taxe aux droits de la Ligue 1 de football, doivent nous inciter à être vigilants afin de garantir le financement du CNDS. Pour rappel, les droits de la Ligue 1 s’élevaient à 668 millions d’euros pour la période 2008-2012. Ils sont, hélas ! descendus à 510 millions d’euros pour 2012-2016. Ces sommes sont pourtant nécessaires pour que le CNDS puisse assurer ses missions, qui sont, je vous le rappelle, le développement de la pratique sportive sur le territoire pour tous les publics, ainsi que la contribution à l’aménagement du territoire, plus spécifiquement par l’attribution de subventions pour la réalisation de stades.
Enfin, en troisième lieu, les offres proposées par les diffuseurs et les modes de diffusion n’ont rien à voir avec ceux de 1999. Aujourd’hui, via Internet, vous pouvez disposer de nombreuses chaînes diffusant des compétitions étrangères – championnats de football, tournois de tennis,… –, dans lesquelles on retrouve de nombreux sportifs français. Pourquoi maintenir cette distorsion de concurrence entre les institutions sportives étrangères et françaises, sur le marché de vente des droits ?
Le coût, pour les opérateurs concernés, serait assez limité. Le montant de la taxe s’élèverait à un million d’euros en moyenne. On estime que cette taxe à l’assiette élargie rapporterait de 15 à 20 millions d’euros par an, ce qui n’est pas négligeable.
Enfin, comme nous sommes très attachés, « écologistement parlant », à la lutte contre le dopage, nous proposons d’affecter une partie du produit du prélèvement à l’Agence française de lutte contre le dopage.
M. le président. Le sous-amendement n° 235 rectifié ter, présenté par MM. Collin, Mézard, Mazars et Alfonsi, est ainsi libellé :
Amendement n° 125, alinéas 9 et 10
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi.
M. Nicolas Alfonsi. En ces temps d’ouverture des jeux Olympiques de Londres, vous comprendrez aisément que mon côté sportif, même aujourd'hui, m’incite à déposer ce sous-amendement avec mon groupe. (Sourires.)
Nous voulons conserver l’affectation actuelle de la contribution sur la cession des droits d’exploitation audiovisuelle des manifestations sportives.
En effet, comme cela figure dans l’exposé des motifs du sous-amendement, il nous semble juste que cette taxe, dont l’amendement n° 125 tend à élargir l’assiette, continue d’alimenter le budget de l’établissement public chargé du développement du sport, un acteur essentiel pour la progression des pratiques sportives amateurs.
Je tiens à préciser que le sous-amendement ne remet aucunement en cause le financement affecté à la lutte contre le dopage, un combat que nous soutenons vigoureusement. Les auteurs de l’amendement n° 125 proposent une ressource de remplacement, et non de complément, pour l’Agence française de lutte contre le dopage.
Nous souhaitons que l’État maintienne sa dotation à l’Agence et que les recettes de la contribution sur les droits audiovisuels restent affectées au développement du sport amateur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° 125 et le sous-amendement n° 235 rectifié ter, qui lui est associé, visent à étendre l’assiette de la taxe Buffet.
Actuellement, cette taxe frappe à hauteur de 5 % de leur montant les droits de diffusion en France des seuls événements sportifs relevant d’organisateurs français. Son produit, qui est de l’ordre de 43 millions d’euros, est affecté au CNDS, l’éventuel surplus allant à l’État.
Je comprends donc très bien le sens de la démarche des auteurs de l’amendement et du sous-amendement. Aujourd'hui, les jeux Olympiques, les Coupes du monde de football et la Ligue des champions ne sont pas concernés par l’assiette de la taxe.
Un tel phénomène pourrait même, dans une certaine mesure, créer une distorsion de concurrence entre organisateurs étrangers et organisateurs français, au détriment de ces derniers, ce qui n’est pas idéal.
Mais l’amendement n° 125 suscite tout de même la perplexité.
D’abord, d’un point de vue technique et juridique, la différence entre taxe française, dont les redevables sont les organisateurs eux-mêmes, et la taxe étrangère, dont les redevables seraient les diffuseurs, serait-elle parfaitement régulière ? C’est une véritable question.
Ensuite, on peut s’interroger sur les effets d’une telle extension d’assiette sur les redevables. Quel serait le montant récupéré ? Et qui paierait quoi ?
Enfin, la proposition d’affecter une partie du produit de la taxe à l’Agence française de lutte contre le dopage pose un problème d’une autre nature, celui des besoins de financement de cette agence et de son indépendance. Faut-il vraiment mélanger les sujets ? Nous nous sommes interrogés sur ce point au sein de la commission des finances. Nous souhaiterions avoir l’éclairage du Gouvernement à cet égard.
Par cohérence, la commission émet le même avis sur le sous-amendement n° 235 rectifié ter, qui vient d’être défendu par notre ami Nicolas Alfonsi et qui tend à la suppression de l’affectation de 4 millions d’euros à l’Agence de lutte contre le dopage.
Quoi qu’il en soit, le sujet est intéressant. Notre souci aujourd'hui étant non pas de créer de nouvelles dépenses, mais de trouver de nouvelles recettes, on ne peut pas être hostile a priori aux exigences budgétaires qui animent les auteurs de l’amendement et du sous-amendement. En revanche, il faut peut-être améliorer le dispositif. Nous souhaitons connaître l’avis du Gouvernement, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement et ce sous-amendement sont frappés au coin de la meilleure des inspirations.
Pour autant, élargir l’assiette comme vous le proposez, madame la sénatrice, risque de poser des difficultés techniques. Certes, on peut examiner cela. Mais je ne suis pas aujourd'hui en capacité de vous affirmer que ces difficultés pourraient être réglées. Et voter une disposition législative sans être certain qu’elle puisse s’appliquer, c’est affaiblir la loi, la rendre bavarde et déconsidérer le travail législatif.
Par conséquent, au regard de cette considération – nous pourrons peut-être y apporter des améliorations dans les temps à venir –, je ne suis déjà pas favorable à l’amendement n° 125.
Se pose un deuxième problème, de nature juridique celui-là. Des opérateurs situés à l’étranger peuvent se trouver frappés fiscalement dans l’État de résidence. Or les conventions fiscales sont formelles. Le principe de non-double imposition est un principe universel, auquel se heurterait une volonté de taxer en France une activité qui est déjà taxée à ce titre à l’étranger. Il serait donc tout à fait illusoire d’espérer de quelconques recettes d’une telle taxation ; et si nous mettions en pratique une telle collecte, nous serions immanquablement condamnés, avec des obligations de restitution et probablement des intérêts moratoires.
Et dès lors que l’amendement n° 125 ne me paraît pas devoir être accepté, il en va de même, me semble-t-il, pour le sous-amendement n° 235 rectifié ter.
De toute manière, je ne suis pas favorable à ce sous-amendement pour une raison de principe. Je ne pense pas que l’affectation des taxes soit une bonne chose. Les opérateurs qui en bénéficient finissent par être plus puissants que le ministre de tutelle, car ils disposent de plus de moyens. Certains parlementaires ayant exercé des responsabilités gouvernementales pourraient peut-être en témoigner. L’État doit retrouver toutes ses prérogatives, notamment via la maîtrise budgétaire, et indiquer aux opérateurs la politique voulue par le Gouvernement. Ce n’est pas aux opérateurs de faire prévaloir leurs vues au détriment du pouvoir politique, seul légitime, car investi par le suffrage universel.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 125 et le sous-amendement n° 235 rectifié ter.
M. le président. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.
M. Pierre Jarlier. Si l’amendement n° 125 pose peut-être quelques difficultés techniques, nous pourrions mettre à profit le délai qui nous sépare de la commission mixte paritaire pour les régler.
Et cet amendement me paraît tout de même très intéressant, parce qu’il va permettre de supprimer des distorsions de concurrence entre les opérateurs français et étrangers. C’est donc une bonne initiative.
Comme l’a indiqué M. le rapporteur général, il n’y a pas de raisons que des événements majeurs internationaux ne fassent pas l’objet d’un prélèvement.
En outre, nous sommes nombreux à juger nécessaire d’abonder le CNDS. Les intercommunalités ont des demandes importantes, par exemple s’agissant du renouvellement du parc des équipements sportifs. Or les financements ont tendance se raréfier en ce moment.
Mme Annie David. Ça, c’est sûr !
M. Pierre Jarlier. Nous avons donc besoin de les conforter.
Je suis aussi favorable au sous-amendement n° 235 rectifié ter. S’il faut évidemment assurer le financement de l’Agence française de lutte contre le dopage, il n’est pas du tout certain, avec le dispositif proposé à l’amendement n° 125, que l’État abondera le budget de l’Agence à due concurrence. En effet, il pourra procéder à une régulation.
Je soutiens donc l’amendement n° 125 et le sous-amendement n° 235 rectifié ter.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. L’amendement n° 125 est incontestablement empreint de bonnes intentions, mais il est totalement irréaliste.
Les grandes compétitions internationales ont des organisateurs internationaux, par exemple l’UEFA et les fédérations internationales pour le football. Ces organisateurs lancent des appels d’offre, puis transmettent aux candidats un cahier des charges, dans lequel il y a toujours un volet fiscal. Pour pouvoir accueillir la Coupe de monde de football en 1998, nous avons dû modifier notre législation, notamment en matière de taxes sur la publicité.
Si nous adoptions le dispositif qui nous est proposé aujourd'hui, nous serions ensuite contraints de modifier notre législation fiscale presque à chaque événement sportif d’importance mondiale.
En revanche, le problème du dopage reste pendant. Si nous voulons garantir l’indépendance de l’Agence, il faut donner à cette dernière les moyens de fonctionner correctement.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 235 rectifié ter.
(Le sous-amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 73 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le premier alinéa du III de l’article 1417 du code général des impôts est complété par les mots : « ou, si elle y est inférieure, comme la révision des valeurs locatives cadastrales adoptée en loi de finances. »
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par le relèvement du taux de l’impôt sur les sociétés.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Entre autres dommages collatéraux du gel du barème de l’impôt sur le revenu figure le droit connexe des contribuables de la taxe d’habitation à bénéficier d’un plafonnement de leur cotisation annuelle d’imposition locale.
Chacun des 32 millions de contribuables de la taxe d’habitation, nombre à rapprocher des 36 millions d’assujettis à l’impôt sur le revenu, sait pertinemment que, s’il est non imposable au titre de l’impôt sur le revenu, il peut bénéficier d’un allégement, voire d’une exonération intégrale de son imposition.
Le niveau de l’abattement pratiqué sur le revenu pour déterminer la cotisation de taxe d’habitation évolue comme la première tranche du barème de l’impôt.
En 2012, l’exonération de taxe d’habitation est accordée aux contribuables disposant de moins de 10 024 euros de revenu annuel par part, et un plafonnement est accordé aux contribuables déclarant un revenu de 23 572 euros pour la première part.
Soyons précis : le gel du barème de l’impôt sur le revenu, tel que décidé par le précédent gouvernement, risque fort de rendre redevables d’une cotisation des salariés modestes jusqu’ici exonérés et va faire « sortir » du champ du plafonnement une part croissante des salariés modestes et moyens qui en bénéficiaient jusqu’alors.
Les effets du gel du barème sur la fiscalité locale, c’est un peu, en quelque sorte, la prime de rentrée scolaire offerte par l’ancien pouvoir. (Sourires sur les travées du groupe CRC.)
Par cet amendement, nous voulons donc remédier au problème. Nous proposons que les seuils évoluent, sinon comme le barème de l’impôt sur le revenu, au moins comme les valeurs locatives cadastrales. Jusqu’à plus ample informé, celles-ci continuent de constituer la base d’imposition à la taxe d’habitation.
Rappelons que le revenu des redevables demeure pris en compte pour ce qui est du recouvrement.
C’est donc sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement tend à réévaluer les seuils de revenus ouvrant droit à exonération et abattement au titre de la fiscalité locale à hauteur de la revalorisation annuelle des valeurs locatives. Je souhaite connaître l’avis du Gouvernement à cet égard.
Les auteurs de l’amendement proposent que les seuils d’exonération et d’abattement de la fiscalité locale soient réévalués comme les valeurs locatives, soit de 1,8 % en 2012, alors que, selon la règle actuelle, les seuils de revenus sont indexés, chaque année, comme la limite supérieure de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.
Mais les auteurs de l’amendement posent clairement la question des conséquences du gel du barème de l’impôt sur le revenu sur les contribuables âgés aux revenus modestes, qui voient disparaître les avantages dont ils bénéficiaient au titre de la fiscalité locale. Vous avez cité des exemples, et je pourrais en trouver d’autres. Il y a incontestablement des effets pervers redoutables pour cette catégorie de nos concitoyens.
Ces considérations incitent à accueillir favorablement l’amendement. Mais ce dernier se heurte aussi à plusieurs obstacles.
D’abord, cet amendement permettrait d’établir une règle définitive, alors que le gel n’est que temporaire. Cela pose un problème juridique.
En outre, la revalorisation annuelle des bases, qui est la référence choisie, n’est pas souvent plus élevée que le taux d’inflation raisonnable budgétairement.
Enfin, le coût pour l’État serait important : 219 millions d’euros en 2013.
Par conséquent, si le souci de préserver les avantages dont bénéficiait une population assez exposée, car âgée, est légitime – c’est un point de vue que nous sommes nombreux, je pense, à partager –, le coût d’une telle mesure serait, j’imagine, assez important. Peut-être vaudrait-il donc mieux inscrire cette problématique dans le cadre de la réflexion globale sur l’impôt sur le revenu que vous envisagez pour l’automne, monsieur le ministre.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Nous avons bien vu les conséquences en cascade de la non-indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu. Il ne faut pas confondre les causes et les conséquences, ni traiter une conséquence sans s’attaquer à la cause initiale. Pour des raisons budgétaires, qu’au nom du Gouvernement j’assume totalement, il n’a pas été décidé dans ce collectif de traiter cette cause. Dès lors, ne pas assumer ces conséquences en tentant d’en pallier les effets, en niant à l’impôt sur le revenu son caractère objectif quant à la réalité des revenus ne me paraîtrait pas la bonne solution.
Soyons lucides sur ce que sont les causes et les conséquences ; évitons de pervertir davantage encore notre système de prélèvements national ou local et attachons-nous pendant cette mandature à corriger les excès structurels que nous connaissons depuis longtemps comme les excès conjoncturels que nous constatons depuis quelques années.
M. le président. Monsieur Bocquet, l'amendement n° 73 rectifié est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 73 rectifié est retiré.
L'amendement n° 75, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Les quatorzième, vingt-troisième à vingt-septième et trente-quatrième lignes du tableau figurant au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 sont supprimées.
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Quand il s’agit de trouver quelques recettes de poche, le droit budgétaire en débusque parfois en se servant allégrement dans la caisse des autres...
Nous avons maintes fois connu et le plus souvent condamné la méthode fort éprouvée qui consistait à saisir des recettes par prélèvement sur les fonds disponibles de tel organisme, pourvu d’une mission de service public, ou de tel autre, bénéficiant a priori de recettes dédiées de nature fiscale.
Ainsi avions-nous vu, il y a quelques temps, Mme Boutin alimenter l’action gouvernementale sur le logement en ponctionnant les ressources du 1 % patronal, ou le gouvernement précédent régler une partie de son absence de politique culturelle et patrimoniale en ponctionnant les réserves et ressources du Centre national du cinéma. Dans le cas qui nous préoccupe, ce sont les ressources des centres techniques interprofessionnels qui ont été visées.
L’idée qui avait animé le Gouvernement était simple : les éventuels excédents de trésorerie des centres techniques étaient mis en coupe réglée, et l’État mettait à son compte « tout ce qui dépassait ». Ces centres techniques ont, pourtant, un rôle qui est loin d’être négligeable dans l’activité économique du pays, notamment en termes d’innovation.
En effet, les travaux que peuvent mener ces organismes participent de l’effort de recherche-développement des secteurs professionnels auxquels ils sont rattachés, effort qui est, en quelque sorte, mutualisé au travers des cotisations versées par les entreprises de la profession ou de l’interprofession.
Ces centres techniques industriels sont au nombre de seize, je ne les énumérerai pas tous ; ils vont du Centre d’études et de recherches de l’industrie du béton, le CERIB, au Centre technique du cuir, chaussures, maroquinerie, le CTC, en passant par le Centre technique de l’industrie du décolletage, le CTDEC. Ils emploient ensemble pas moins de 2 500 personnes, dont une moitié d’ingénieurs, permettant de fait aux petites et moyennes entreprises, les PME, et aux entreprises de taille intermédiaire, les ETI, de leur secteur d’activité de bénéficier des apports techniques et technologiques indispensables à leur développement.
Le maintien de leurs ressources va de pair avec la capacité qu’ils conserveront de mettre en œuvre leurs missions de service public, celles-ci étant l’un des paramètres de notre tant espéré « redressement productif ».
Sous le bénéfice de ces observations, nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances demande le retrait de cet amendement, qui rouvre le débat sur le plafonnement des taxes affectées aux opérateurs. Or le Gouvernement a annoncé son intention de renforcer le dispositif à l’occasion du projet de loi de finances pour 2013. Il est donc préférable, c’est l’avis qui a prévalu au sein de la commission des finances, de retirer cet amendement, qui pourra être réexaminé dans le cadre de la discussion globale qui aura lieu à l’automne.
Toutefois, je souhaite, monsieur le ministre, obtenir une précision. Cet amendement vise à prendre en compte les centres techniques industriels, qui ne sont pas des opérateurs de l’État. Il serait intéressant que nous disposions d’une analyse détaillée sur ce point. Nous pourrions ainsi mieux percevoir l’étendue de l’ensemble des ajustements qui sont souhaités. Cette précision nous aiderait dans l’élaboration des propositions à venir.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je partage l’avis du rapporteur général.
Permettez-moi, toutefois, d’apporter deux précisions.
D’abord, il s’agit d’argent public ; le produit de cette collecte n’appartient pas à leurs affectataires, mais relève bien de l’État. Celui-ci peut donc considérer – j’ai déjà fait cette remarque tout à l’heure à propos d’opérateurs dans le domaine sportif – que ces sommes, de fait, lui reviennent et les affectataires doivent cesser de croire que, parce que le produit de cette taxe leur est affecté, sa progression leur revient de droit et que cette affectation est immuable.
L’État, après avoir affecté cette taxe, a le droit soit de la plafonner soit de la reprendre. En tout cas, il a un droit de regard important sur l’usage qui peut en être fait. Je plaide vigoureusement, mesdames, messieurs les sénateurs, pour que l’État retrouve ses prérogatives en la matière. C’est l’État qui lève l’argent public et il en est comptable devant nos concitoyens. Les affectataires ne sont que des opérateurs à qui l’État, qui a un droit de regard sur le montant de cette taxe et sur l’usage qui en est fait, confie une mission.
Il me semble que, au moins sur le principe, nous pourrions être d’accord.
De surcroît, j’approuve l’idée du plafonnement, qui a d’ailleurs été opéré par la majorité précédente. Au risque de choquer la majorité actuelle, je pense que, à l’époque, le plafonnement de ce montant fut une bonne chose. Au demeurant, il n’y eut pas d’écrêtement : les moyens ont donc été maintenus.
En revanche, dès lors qu’une taxe est dynamique au-delà de ce qui a été envisagé, que le montant perçu par les affectataires est estimé comme suffisant à leur action, il n’est pas acceptable que ceux-ci puissent juger normal de bénéficier intégralement de ce dynamisme, privant ainsi l’État d’un surplus de recettes.
Je suggère donc qu’on en reste pour l’instant aux dispositions en vigueur et je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Bocquet, l'amendement n° 75 est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 75 est retiré.
L'amendement n° 195, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault, est ainsi libellé :
Après l'article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – A l'antépénultième ligne du tableau du I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, le montant : « 117 000 » est remplacé par le montant : « 93 600 ».
II. – La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. - La perte de recettes résultant du I ci-dessus pour la Société du Grand Paris est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dominati.
M. Philippe Dominati. Monsieur le ministre, depuis 1945, l’État a le monopole des transports collectifs en Île-de-France.
Tous les gouvernements, de gauche comme de droite, partagent, de manière générale, à peu près la même vision, une vision colbertiste, selon laquelle il doit exister un monopole pour l’organisation des transports publics en Île-de-France. Finalement, cette région est la seule en France à être sous ce statut, ainsi que l’une des rares maintenant en Europe.
Le précédent Président de la République a lancé le concept nécessaire et innovant du Grand Paris. L’ancien gouvernement n’a peut-être pas bien traduit, dans son application législative, ce concept, et la loi relative au Grand Paris, telle qu’elle a été élaborée, est sujette à critique ; pour ma part, je reconnais que je n’ai pas voté un certain nombre de ses dispositions.
Ce concept doit être amplifié et ce sera probablement l’une des tâches ou l’une des orientations du Président de la République et du Gouvernement.
Sur le plan technique, le monopole des transports en Île-de-France est totalement insatisfaisant. Aux trois sociétés d’État existantes a été ajoutée une quatrième, dénommée la Société du Grand Paris, qui probablement échouera, comme ce fut déjà le cas des trois autres sociétés d’État. Pourtant, on a taxé les Parisiens, ainsi que les entreprises, avec une taxe spéciale d’équipement. Mais l’État n’a pas donné à cette société l’argent qui devait lui revenir, c'est-à-dire les 4 milliards d'euros issus de l’industrie automobile.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Que ne l’avez-vous fait quand vous aviez la majorité !
M. Philippe Dominati. Ce sont autant de dysfonctionnements.
La Société du Grand Paris, quant à elle, dispose pour l’instant d’une trésorerie abondante parce que, en réalité, les travaux n’ont pas commencé. Cette trésorerie est donc, selon moi, largement suffisante.
L’amendement que je propose vise donc à réduire de 20 % la taxe spéciale d’équipement payée uniquement par les Franciliens pour l’année 2012 puisque, en réalité, la Société du Grand Paris n’aura pas besoin de cet argent avant 2013. Pourquoi les Franciliens feraient-ils la trésorerie d’une société d’État qui n’en a pas besoin ?
Au-delà de l’aspect technique, cet amendement a pour objet de susciter la réflexion du Gouvernement. C’est la première fois – c’est important sur le plan du phasage – que la Présidence de la République, le Gouvernement, la région d’Île-de-France, la mairie de Paris sont de même sensibilité politique. Nicolas Sarkozy avait lancé le concept du Grand Paris ; c’était nécessaire pour notre pays, pour notre capitale. Il faudra que, très rapidement, vous nous fassiez part des orientations que vous envisagez de prendre pour redonner un dynamisme à notre pays, notamment à sa capitale. Au cours du débat, M. Hamon a trouvé curieux que je souligne le manque de dynamisme économique de la capitale ; ce dynamisme pourrait être réactivé sur le plan régional.
Ce sont des pistes de travail. Dans l’immédiat, vous pouvez donner satisfaction aux Franciliens en diminuant la taxe spéciale d’équipement de 20 %.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je suis défavorable à cet amendement, que ses auteurs avaient déjà déposé, puis retiré dans le cadre de la loi de finances pour 2012, n’ayant pas, semble-t-il, obtenu beaucoup d’appuis en vue de l’adoption de ce dispositif.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Leurs amis n’en voulaient pas !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La réduction de 20 % d’une des trois sources de financement du syndicat du Grand Paris ne me semble en tout cas pas souhaitable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à votre amendement, monsieur Dominati.
Vous vous préoccupez depuis longtemps de ce projet, qui, comme vous l’avez vous-même rappelé, a été lancé par le précédent Président de la République.
Cette question de trésorerie me semblait avoir été réglée par la majorité précédente, à laquelle vous apparteniez,…
M. Philippe Dallier. En effet !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. … au travers d’une diminution de la dotation d’État de 6 millions d'euros. Ce sont donc, à l’époque, les finances de l’État que vous aviez décidé de soulager, peut-être plus que celles de chacun des Parisiens auxquels vous avez fait référence.
Les projets du Grand Paris sont nombreux, leur budgétisation peut être délicate, et une diminution des ressources rendrait plus improbable leur financement. Je suggère donc que nous en restions à cette délicatesse sans nous aventurer vers l’improbabilité.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je comprends la question soulevée par notre collègue Philippe Dominati et par les cosignataires de cet amendement.
Effectivement, les taxes qui ont été prélevées vont à la Société du Grand Paris, mais les choses sont très compliquées à mettre en œuvre. À ma connaissance, des sondages sont actuellement réalisés pour voir où pourrait passer ce fameux « super métro », mais il n’y a pas que cela. Viennent s’ajouter des interrogations politiques.
Ainsi, Mme Duflot, à peine installée, a déclaré – de manière assez étonnante, d’ailleurs, puisqu’elle est élue d’Île-de-France – qu’elle souhaitait rouvrir le dossier, laissant entendre qu’il pourrait être complètement remis à plat ou abandonné.
On se souvient également que l’ancienne opposition, autrement dit l’actuelle majorité, était très critique sur l’idée même de la création de la Société du Grand Paris. Le président de la région d’Île-de-France, qui est à la tête du syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, n’avait pas manqué de pousser de hauts cris pour réclamer la dissolution de la Société du Grand Paris et la reprise en charge par le STIF de ce projet. Nous ne savons pas aujourd'hui dans quelle direction nous allons.
Donc, la Société du Grand Paris, la SGP, existe. Elle continue à mener les travaux, les enquêtes techniques nécessaires à l’avancée de ce projet, mais nous demeurons dans une grande incertitude. Pour autant, les Franciliens versent des taxes afin d’alimenter cette société.
Certes, comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre – j’étais d'ailleurs à l’origine de cette initiative –, nous avions opéré un prélèvement sur les ressources affectées à la SGP pour financer en partie l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU.
Même si je n’ai guère envie de voter cet amendement, sur lequel je vais vraisemblablement m’abstenir, je pense, monsieur le ministre, qu’il est grand temps que le Gouvernement nous dise ce qu’il entend faire. Il ne faudrait pas que nous perdions trop de temps, car le projet du super métro du Grand Paris est très attendu.
On a souvent comparé le Grand Paris avec le Grand Londres. Lorsqu’on lit dans la presse les articles relatifs à l’organisation des jeux Olympiques, on se rend compte que la difficulté la plus souvent relevée à Londres en ce moment, malgré les travaux fort nombreux qui ont été réalisés, a trait aux transports en commun.
Si effectivement la ville de Londres s’est dotée bien tardivement de l’équivalent d’un RER pour les déplacements entre l’Est et l’Ouest, on voit bien les difficultés que cela représente pour une métropole de cette taille. Paris était en avance sur Londres et l’est encore aujourd'hui, mais il n’est pas certain que cette situation perdure. Nous devons aller de l’avant, de manière résolue.
Aujourd'hui, nous sommes dans une phase d’attente. Le Gouvernement doit nous dire le plus rapidement possible dans quelle direction il souhaite aller. S’il maintient le projet, ce que je souhaite absolument, en particulier pour l’est de la métropole, il doit alors nous dire comment il entend le financer. La plus grande incertitude règne.
M. Robert del Picchia. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Il est vrai que nous aurions besoin d’avoir des précisions sur le Grand Paris. Nous n’avons jamais vraiment su à quoi cette expression correspondait d’un point de vue géographique avant que nous ne le découvrions avec le tracé du métro automatique. Ce projet, qui constitue l’essentiel du Grand Paris, est une injustice pour l’ensemble des départements de la grande couronne.
Aux termes de l’article 6 de la loi de 1977, les transports en commun relèvent de la responsabilité de la région. Le problème vient du fait que le STIF était la chasse gardée des grands corps de l’État, qui ont tout fait, et qui font encore tout, pour en garder la maîtrise. Aujourd'hui, le STIF est dirigé par les élus, formellement par le président de la région.
Les promoteurs voulaient absolument que le centre d’affaires de la Défense, qui est certes important, soit à moins de 30 minutes de l’aéroport de Roissy, qui est situé dans mon département. Pour résumer, nous avions le droit de voir passer les trains à grande vitesse... Nous nous sommes battus pour obtenir des correspondances.
À l’époque, nous n’avons eu de cesse de répéter que la région parisienne faisait partie du Grand Paris. À mon sens, en matière de transports en commun, c’est une grave erreur de considérer qu’il y a, d’un côté, le Grand Paris et, de l’autre, la région parisienne, parce que nous cotisons tous ! Nous, les banlieusards, nous finançons le tramway de Paris et les Parisiens financent la carte Navigo : c’est de la solidarité.
Au vu de l’état du réseau parisien, je ne suis pas favorable, mon cher collègue, à une raréfaction des financements. Si le noyau dur du réseau fonctionne bien, je peux vous dire qu’il n’en va pas de même à la périphérie ! Diminuer les financements enverrait un très mauvais signal.
Aujourd'hui, nombre d’élus de la grande couronne souhaitent développer les tangentielles Est et Ouest pour former un réseau interbanlieues à 10 ou 15 kilomètres du périphérique, et non à 2 kilomètres. Nous aurions besoin que les priorités soient clairement définies. Les travaux de la tangentielle Nord ont démarré ; il faut maintenant des moyens pour pouvoir entamer ceux de la tangentielle Ouest.
La réalisation de cette rocade interbanlieues est nécessaire pour éviter à de nombreux banlieusards d’être obligés de passer par les gares parisiennes pour atteindre les pôles d’emploi que sont, notamment, Roissy ou La Défense.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il va parler encore combien de temps ?
M. Francis Delattre. Une réflexion devrait être engagée. Je ne comprends pas qu’on prenne le prétexte d’un excès de trésorerie pour supprimer des crédits, alors que la remise à niveau de l’ensemble du réseau parisien nécessitera des financements énormes.
M. Jean-Pierre Caffet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dominati, pour explication de vote.
M. Philippe Dominati. Je ferai deux observations.
D’abord, monsieur le rapporteur général, vous avez évoqué le débat sur la loi de finances pour 2012 et le retrait de mon amendement, sur la suggestion de Mme Bricq, qui occupait alors votre fonction. À l’époque, elle voulait convoquer le président de la Société du Grand Paris pour obtenir une réponse au problème que j’avais soulevé de savoir s’il y avait réellement de la trésorerie disponible. J’aurais aimé savoir si vous aviez obtenu des informations. C’est pourquoi je suis quelque peu surpris de votre réponse.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Est-ce que c’est une explication de vote ?
M. Philippe Dominati. Ensuite, je voudrais dire à mes collègues qu’il ne s’agit pas de préciser dans le détail les travaux qui doivent être faits.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le règlement n’est pas respecté, ils discutent entre eux !
M. Philippe Dominati. Je faisais simplement remarquer que, dans toutes les grandes régions d’Europe, il y a des modèles de financement des transports collectifs qui marchent, sauf en Île-de-France. Et je ne crois pas que les contribuables franciliens ou les usagers soient particulièrement satisfaits. Cela va-t-il durer encore longtemps ?
Après l’échec du système des monopoles, qui veulent conserver la maîtrise du STIF, une réforme a été menée, à laquelle j’ai participé, comme d’autres ici, pour redonner aux élus locaux le pouvoir. Moyennant quoi, on a créé une nouvelle société d’État.
Je veux simplement dire que le modèle de financement et de développement des transports en Île-de-France ne fonctionne pas. Il appartient au Gouvernement de prendre ses responsabilités, mais nous examinerons cela lors de prochaines discussions budgétaires. Si l’Île-de-France est l’une des seules régions en Europe où le système ne fonctionne pas, c’est parce qu’il est basé sur le tout-État. Résultat, le coût des travaux et des frais de fonctionnement sont plus élevés que partout ailleurs !
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le président, je voudrais qu’il soit dit à nos collègues que, après la présentation d’un amendement, son auteur ne peut intervenir que pour une explication de vote. Le règlement doit être respecté. L’ancienne majorité s’y employait ; il doit en aller de même aujourd'hui. (Rires sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Dallier. C’est l’hôpital qui se moque de la charité ! Pas vous, pas ça !
M. le président. Ma chère collègue, je vous signale que le règlement est respecté. M. Dominati a présenté son amendement, avant de reprendre la parole pour une explication de vote.
Je mets aux voix l'amendement n° 195.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 94, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 541-10-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le 3° du II est ainsi rédigé :
« 3° Les publications de la presse d’information politique et générale » ;
2° Au VI, après le mot : « décoration », la fin du 1° est ainsi rédigée : « et des papiers à usage fiduciaire. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les amendements nos 148 rectifié et 167 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 148 rectifié bis est présenté par M. Détraigne, Mme Férat, MM. Dubois, J. Boyer, Deneux et Marseille et Mme Morin-Desailly.
L'amendement n° 167 rectifié bis est présenté par MM. Vall, Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano et Vendasi.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après la section IV bis du chapitre III du titre IV de la première partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré une section IV ter ainsi rédigée :
« Section IV ter
« Taxe sur les systèmes relatifs à la prise en charge de la fin de vie des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers
« Art. 1011 quater. – Il est institué une taxe due par les systèmes approuvés et agréés de traitement des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement.
« Cette taxe est assise :
« – sur le produit encaissé net annuel des coûts unitaires mentionnés aux troisième et cinquième alinéas de l’article L. 541-10-2 précité s’agissant des systèmes agréés ;
« – sur le coût annuel engagé par le producteur afin d’assurer ses obligations pour les déchets issus de ses propres équipements électriques et électroniques ménagers s’agissant des systèmes approuvés.
« Le taux de la taxe est fixé à 0,6 %.
« Les assujettis liquident et acquittent cette taxe à compter du 1er septembre 2012. »
II. – Les troisième et cinquième alinéas de l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement et l’article 1011 quater du code général des impôts sont applicables jusqu’au 31 décembre 2019.
III. – Un rapport d’évaluation sur l’utilisation du produit de cette taxe ainsi que sur les systèmes relatifs à la prise en charge de la fin de vie des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers est remis au Parlement avant le 1er octobre 2018.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
L'amendement n° 210, présenté par M. Miquel, Mme M. André, MM. Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini, Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 24
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après la section IV bis du chapitre III du titre IV de la première partie du livre Ier du code général des impôts, il est inséré une section IV ter ainsi rédigée :
« Section IV ter
« Taxe sur les systèmes relatifs à la prise en charge de la fin de vie des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers
« Art. 1011 quater. - Les systèmes approuvés et agréés de traitement des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers mentionnés au quatrième alinéa de l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement sont soumis à une taxe destinée à l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie pour le financement de ses opérations de gestion des systèmes déclaratifs des flux de mise sur le marché des équipements électriques et électroniques ménagers et de suivi de la collecte et du traitement de ces équipements devenus déchets.
« Le taux de cette taxe est fixé en fonction des besoins de financement de l’agence pour conduire ces opérations, dans la limite de :
« - 0,3 % à 0,6 % du produit encaissé net annuel des coûts unitaires mentionnés aux troisième et cinquième alinéas de l’article L. 541-10-2 précité s’agissant des systèmes agréés ;
« - et de 0,3 % à 0,6 % du montant du coût annuel engagé par le producteur afin d’assurer ses obligations pour les déchets issus de ses propres équipements électriques et électroniques ménagers s’agissant des systèmes approuvés.
« Un décret en Conseil d’État détermine le taux, les modalités déclaratives et de perception de cette taxe. »
II. - Les troisième et cinquième alinéas de l’article L. 541-10-2 du code de l’environnement et l’article 1011 quater du code général des impôts sont applicables jusqu’au 31 décembre 2019.
III. - Un rapport d’évaluation sur l’utilisation du produit de cette taxe ainsi que sur les systèmes relatifs à la prise en charge de la fin de vie des déchets d’équipements électriques et électroniques ménagers est remis au Parlement avant le 1er octobre 2018.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Il est retiré, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 210 est retiré.
Article 25
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
A. – L’article L. 136-6 est ainsi modifié :
1° Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Sont également assujetties à la contribution les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts à raison du montant net des revenus, visés au a du I de l’article 164 B du même code, retenu pour l’établissement de l’impôt sur le revenu. » ;
2° À la première phrase du premier alinéa du III, les références : « I et II » sont remplacées par les références : « I à II » ;
B. – L’article L. 136-7 est ainsi modifié :
1° Après le I, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Sont également soumises à la contribution les plus-values imposées au prélèvement mentionné à l’article 244 bis A du code général des impôts lorsqu’elles sont réalisées, directement ou indirectement, par des personnes physiques. » ;
2° Le VI est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La contribution portant sur les plus-values mentionnées au I bis est assise, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que le prélèvement mentionné à l’article 244 bis A du code général des impôts. » ;
C (nouveau). – L’article L. 245-14 est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : « visés à » sont remplacés par les mots : « mentionnés aux I et II de » ;
2° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Sont également soumises à ce prélèvement, à raison des revenus mentionnés au I bis de l’article L. 136-6 du présent code, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts. » ;
D (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 245-15, les références : « I et II » sont remplacées par les références : « I à II ».
I bis (nouveau). – L’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est ainsi modifiée :
1° Le premier alinéa du I de l’article 15 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Sont également soumis à cette contribution les revenus désignés au I bis de l’article L. 136-6 du code de la sécurité sociale. » ;
2° À la première phrase du I de l’article 16, la référence : « au I » est remplacée par les références : « aux I et I bis ».
II. – A. – Les A et C du I et le 1° du I bis s’appliquent aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012.
B. – Les B et D du I et le 2° du I bis s’appliquent aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter de la date de publication de la présente loi.
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, sur l'article.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Il n’est pas anormal, particulièrement en période de crise, de demander aux Français de l’étranger de participer à l’effort fiscal national. C’est d’ailleurs ce qu’avait fait le gouvernement Fillon pour une partie d’entre eux avec l’exit tax.
Je rappelle aussi que les non-résidents s’acquittent déjà, comme les résidents, de l’impôt sur leurs revenus immobiliers, des taxes locales, ainsi que d’un impôt sur les plus-values de cession ou sur les loyers. Cela est tout à fait légitime et nul ne songe à le contester.
Mais, avec cet article 25, le Gouvernement affiche un étonnant mépris pour les engagements internationaux de la France. En tentant d’étendre aux revenus immobiliers des non-résidents l’assiette des prélèvements sociaux, il nie la jurisprudence communautaire, tout comme celle de la Cour de cassation, et il expose notre pays à une condamnation par la Cour de justice de l’Union européenne.
En vertu des conventions bilatérales de sécurité sociale, les Français de l’étranger s’acquittent de leurs cotisations sociales dans leur pays de résidence plutôt qu’en France. Revenir sur cet acquis reviendrait à instaurer une double imposition. Par ailleurs, obliger des étrangers à cotiser à notre sécurité sociale alors qu’ils ne peuvent pas en bénéficier pourrait être jugé comme inconstitutionnel. Ces risques juridiques justifient amplement les amendements de suppression que nous avons déposés sur cet article.
Nier ces risques est d’autant plus irresponsable qu’une condamnation de la France pourrait coûter très cher au budget de l’État.
Autre aberration, la mesure s’appliquerait aux revenus perçus depuis le 1er janvier 2012 et serait donc rétroactive, ce qui pourrait également donner lieu à des recours contentieux.
Au-delà des controverses juridiques, il faut faire preuve de pragmatisme. Une étude d’impact a-t-elle permis de comparer l’augmentation des recettes attendues de cette mesure avec le ralentissement économique qu’elle induira dans les zones où investissent le plus les non-résidents ? J’aimerais obtenir une réponse sur ce point. Avec cette disposition, la France va devenir, à l’échelon mondial, l’un des territoires où l’immobilier sera le plus lourdement taxé.
Concernant les revenus locatifs, un Britannique ou un Français résidant en Grande-Bretagne devra désormais supporter un taux d’imposition rédhibitoire de 55,5 %. Quant aux plus-values de cession, elles attendront des taux records s’il faut ajouter 15,5 % aux taux déjà particulièrement élevés au niveau international, qui peuvent atteindre 50 % pour les résidents de certains États dits « non coopératifs ».
Pourtant, le fait que des non-résidents investissent dans notre immobilier est source de richesse économique pour la France, en particulier dans les zones touristiques ou dans des zones rurales, qui se dépeuplent peu à peu. Dans bien des cas, ce sont eux qui apportent les ressources qui permettent de conserver, de restaurer et de valoriser notre patrimoine. Le Gouvernement préfère-t-il des ruines bien franco-françaises à des joyaux de notre histoire restaurés par des étrangers ?
Par ailleurs, à l’heure où le Gouvernement prétend mener une ambitieuse politique du logement, il me semble contradictoire d’alourdir la fiscalité immobilière, car cela ne manquera pas de se reporter sur les prix des loyers.
Enfin, je voudrais attirer votre attention sur le fait que seuls 30 % des biens des non-résidents correspondent à des investissements locatifs purs. Les 70 % restants sont des résidences secondaires, éventuellement louées de façon saisonnière. Dans le cas des Français de l’étranger, ces résidences secondaires sont des résidences uniques, car elles sont bien souvent leur seul pied-à-terre en France. Conserver un logement sur notre territoire est pour eux non pas un luxe, mais une nécessité, que ce soit pour revenir périodiquement voir leurs proches, pour les études de leurs enfants ou pour le jour où ils rentreront définitivement en France.
Puisque nous débattons ici du financement de la protection sociale, je vous rappellerai, pour conclure, que la majorité des Français de l’étranger ne sont pas en mesure de cotiser à la retraite française pendant les trimestres passés hors de France. Plus que d’autres compatriotes, il leur est donc important de mettre en œuvre des solutions de prévoyance en vue de leurs vieux jours.
L’acquisition d’un logement en France, loué en attendant la retraite, fait naturellement partie de ces stratégies, en particulier pour les familles modestes qui investissent toutes leurs économies dans ce bien. En alourdissant inconsidérément la fiscalité des non-résidents, ce sont donc encore une fois les classes moyennes et modestes que le Gouvernement va pénaliser. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, sur l'article.
M. Richard Yung. L’article 25 du projet de loi de finances rectificative prévoit d’assujettir les revenus immobiliers des non-résidents aux prélèvements sociaux. Ces revenus sont aujourd'hui soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu pour les revenus fonciers ou au prélèvement forfaitaire libératoire pour les plus-values immobilières.
Bien sûr, cette mesure suscite une certaine inquiétude, en particulier parmi les Français de l’étranger.
Mes chers collègues, permettez-moi d’évoquer un certain nombre de points pour lever ces craintes et ces malentendus.
Tout d’abord, ce dispositif n’est que la traduction de l’engagement qu’a pris François Hollande d’aligner la fiscalité de tous les revenus du capital – revenus du patrimoine et revenus de placement – sur celle des revenus du travail. Il répond également à la nécessité d’assurer le financement de la protection sociale.
Par ailleurs, cette mesure est juridiquement valable puisque la contribution sociale généralisée, la CSG, est non pas une cotisation sociale, mais une imposition dont le taux s’élève à 7,5 % sur les revenus d’activité ou de remplacement et à 8,2 % sur les revenus du capital. Selon la loi, son produit « est appelé à concourir de façon significative à l’équilibre financier des régimes obligatoires de base » de sécurité sociale. Il en va de même pour la contribution pour le remboursement de la dette sociale, la CRDS.
Je tiens aussi à rappeler que la plupart des conventions fiscales, qui prévoient l’imposition exclusive des revenus immobiliers dans l’État de situation des biens, continuent d’être en application.
Du point de vue du droit communautaire, la question est complexe puisque les jurisprudences de la Cour de justice de l’Union européenne, la CJUE, du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel diffèrent. Selon la CJUE, un contribuable non résident qui reçoit des revenus de source française, mais qui cotise au régime de sécurité sociale du pays dans lequel il réside, ne peut être imposé au titre de la CSG. Il faut toutefois souligner que cette jurisprudence ne vise que les revenus d’activité et de remplacement.
En outre, les exceptions seront assez nombreuses.
Je pense aux non-résidents « Schumacker ».
M. Robert del Picchia. À ne pas confondre avec Schumacher ! (Sourires.)
M. Richard Yung. Les personnes fiscalement domiciliées à l’étranger qui réalisent la totalité ou la quasi-totalité de leurs revenus en France sont déjà soumises aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine. Mais, conformément à la jurisprudence communautaire, les revenus d’activité ou de remplacement ne sont pas assujettis aux contributions sociales lorsqu’ils sont à la charge d’un régime obligatoire français d’assurance .maladie. Autrement dit, si vous êtes affilié à la sécurité sociale française, vous n’aurez pas à acquitter la CSG.
J’ajoute que les propriétaires qui ne tirent aucun revenu de la location de leur habitation en France ne seront pas concernés par cette loi, pas plus que les propriétaires non résidents qui sont éligibles au dispositif d’exonération des plus-values prévu au code général des impôts. À ce sujet, je vous renvoie au débat que nous avions eu sur la première cession d’habitation en France.
On peut donc estimer qu’entre 50 000 et 60 000 contribuables seront concernés, dont une partie de Français résidents à l’étranger.
J’espère, mes chers collègues, que ma démonstration vous aura convaincus de la justice de cette mesure.
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, sur l'article.
M. Robert del Picchia. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les explications hautement techniques de mon collègue Yung, je voudrais apporter un autre éclairage.
Je regrette que les nouveaux députés représentant les Français établis hors de France appartenant à la majorité présidentielle n’aient pas su vous expliquer qui sont nos compatriotes établis hors de France. Plus encore, je regrette qu’ils aient soutenu comme un seul homme cette nouvelle taxe qui stigmatise et pénalise nos concitoyens.
Mes chers collègues, qui sont ces Français de l’étranger dont nous parlons ?
Les Français de l’étranger sont comme les Français de France : il y a, parmi eux, des personnes riches – beaucoup moins toutefois que ce que soutiennent les journaux –, des personnes démunies – en beaucoup plus grand nombre que ce qu’affirme la presse – et une majorité de familles à revenus moyens. Pourquoi s’expatrient-ils ?
Contrairement à ce qu’affirment également trop souvent les médias, ce n’est pas pour échapper au fisc. Comme l’indique le rapport du directeur des Français de l’étranger, 55 % d’entre eux s’expatrient pour raisons professionnelles, surtout par crainte du niveau de chômage élevé en France et du risque de déclassement social en cas de perte d’emploi ; 27 % partent pour des motifs « familiaux ou personnels », peut-être aussi parce qu’ils sont mutés à l’étranger. Parmi les expatriés figurent, bien sûr, des étudiants, ainsi que des retraités qui, malgré leurs longues années de travail, ne disposent pas des revenus nécessaires pour vivre en France. Ils partent donc à l’étranger avec l’espoir d’y vivre un peu mieux.
Nos compatriotes expatriés qui ont gardé un logement en France pensent, d’abord, au jour où ils reviendront. Peut-être pensent-ils aussi à leur retraite, à leurs vacances ou à laisser un pied-à-terre à leurs enfants au moment des études, s’ils ont eu les moyens de les envoyer dans un établissement français à l’étranger.
M. Richard Yung. Oui, mais ils ne le louent pas, alors !
M. Robert del Picchia. Merci d’évoquer ce point, mon cher collègue !
Habitant Vienne, il m’arrive souvent de me rendre à Prague ou encore à Budapest. Je rencontre donc bon nombre de jeunes Français expatriés.
J’ai rencontré récemment un couple de jeunes Français qui venait de s’installer à Prague parce que le mari avait perdu son emploi en France. Ces personnes ont gardé le petit appartement qu’ils possédaient en France et l’ont mis en location, ayant besoin à la fois de revenus et d’une bouée de sauvetage pour le cas où leur expatriation échouerait. Cette location leur fournit une petite rente dont ils se servent non seulement pour vivre, mais aussi pour payer leur propre loyer à l’étranger, voire les frais de scolarité de leur enfant.
Est-il légal de leur faire supporter des contributions sociales, en plus de ce qu’ils paient déjà sur la location ? On peut en débattre longuement ; nous y reviendrons quand nous examinerons les amendements.
Pour ma part, il me semble qu’un tel assujettissement serait discriminatoire, d’une part, à l’égard des résidents en France qui, eux, bénéficient de la contrepartie des prélèvements sociaux et, d’autre part, envers les quelques expatriés mieux lotis financièrement. Ces derniers, aidés de leurs conseillers fiscaux, trouveront la parade ! D'après les experts-comptables, la solution serait même plutôt facile – je précise que, n’étant pas propriétaire d’appartement en France, je ne suis pas concerné. Il leur suffit, par exemple, d’acquérir d’autres biens immobiliers financés par l’emprunt : cela génère un déficit qui permet d’échapper à l’imposition. Soyez assurés que les riches recourront à ce procédé : c’est, paraît-il, un simple jeu d’écriture.
En revanche, les Français des classes moyennes, les jeunes familles que j’ai évoquées se trouveront dans une situation financière encore plus difficile parce que leurs revenus locatifs seront amputés de 15,5 %, surtout si l’on supprime tout à l'heure la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement français à l'étranger.
Au final, monsieur le ministre, les riches vivant à l’étranger le resteront et ceux qui tentent de s’en sortir devront peut-être vendre leurs biens ou s’appauvrir.
Entre dogmatisme politique et réalisme économique, il semble que le Gouvernement fait le mauvais choix. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l'article.
M. René-Paul Savary. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens au nom de Mme Christiane Kammermann, qui ne peut être parmi nous ce matin.
Comme elle, j’estime que les Français ne sont pas suffisamment tournés vers l’étranger et que les jeunes, notamment, ne sont pas assez incités à s’expatrier, alors qu’une telle expérience est tout à fait enrichissante.
L’article 25 du projet de loi de finances rectificative va justement à l’encontre de telles initiatives.
La mesure qu’il prévoit concerne environ 60 000 foyers, pour des rentrées fiscales attendues de l’ordre de 50 millions d’euros pour 2012, qui ne changeront pas fondamentalement l’état des finances publiques.
Sur le fond, pourquoi une personne qui ne bénéficie en rien du régime social français y contribuerait, a fortiori s’il s’agit d’un étranger ?
Comment le Gouvernement peut-il justifier, par exemple auprès d’un Australien qui aurait des revenus fonciers en France, qu’il lui faille payer ces prélèvements sociaux ?
La question se pose d’autant plus quand la personne concernée s’acquitte déjà d’une imposition sociale dans un autre État. Il faut, d’ailleurs, rappeler que seul un tiers environ des expatriés français sont inscrits au régime de la sécurité sociale.
Tout comme Mme Christiane Kammermann, je considère que cette mesure visant à imposer des non-résidents, qu’ils soient français ou étrangers, est abusive.
De surcroît, elle aura des conséquences importantes sur le lien qui existe entre la France et nos concitoyens établis à l’étranger, lesquels seront obligés de rompre définitivement avec leur pays, en abandonnant leur maison familiale.
Imaginez l’effet que ce prélèvement aura sur les propriétaires étrangers, déjà soumis à un prélèvement sur les plus-values immobilières fixé, je le rappelle, à 33,3 % ! Nous ne pouvons mieux faire pour détourner les investisseurs potentiels.
Sur le plan juridique, la Cour de Justice de l’Union européenne estime que la CSG est affectée au financement de la protection sociale française, et que l’absence de contrepartie pour des non-résidents qui ne sont pas affiliés à un régime de sécurité sociale doit les exonérer de l’acquittement de cet impôt. La Cour de cassation l’avait d'ailleurs elle aussi affirmé, dans un arrêt du 8 mars 2005.
Mes chers collègues, non seulement la question n’est pas nouvelle, mais elle a en plus été tranchée depuis longtemps !
Enfin, l’article 42 du traité instituant la Communauté européenne pose le principe de la coordination des régimes de sécurité sociale des différents États membres. Ainsi, en vertu des accords européens, les non-résidents qui sont affiliés à la sécurité sociale d’un autre État membre ne peuvent, dans le même temps, être affiliés à la sécurité sociale française.
C’est parce que l’article 25 ne respecte pas ce principe, que Mme Kammermann ne l’aurait pas voté. Je ne le voterai pas non plus. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, sur l’article.
M. Jean-Yves Leconte. Monsieur Savary, un jeune qui s’expatrie pour travailler n’a, en général, pas la chance d’être propriétaire foncier ! Votre exemple est donc mal choisi. (M. Robert del Picchia proteste.)
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sénateur représentant les Français établis hors de France, je soutiens la mesure prévue à l’article 25, sous réserve de l’adoption d’un amendement que je présenterai tout à l’heure, visant à supprimer l’effet rétroactif de la disposition.
S’il existait des droits d’auteurs sur les mesures fiscales et sociales, le président de la commission des finances, M. Marini, les percevrait ici puisque c’est lui qui, il y a peu de temps, avait préconisé l’adoption d’un tel dispositif.
Je soutiens cette mesure, tout d’abord parce qu’elle permet d’éviter les discriminations entre les bénéficiaires de revenus fonciers, selon qu’ils soient établis en France ou à l’étranger. En l’occurrence, la législation était jusqu’à présent favorable aux non-résidents.
Je défends, ensuite, depuis longtemps le principe d’une protection sociale dont le financement s’appuie non pas exclusivement sur les revenus du travail, mais aussi sur l’ensemble des revenus, notamment les revenus fonciers perçus en France.
En outre, dans certaines grandes villes, en particulier à Paris, les investisseurs non résidents étrangers participent largement à l’augmentation des prix, qui est source de difficultés pour les résidents.
Au demeurant, monsieur Savary, quelle que soit la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, votre argument sur la CSG ne tient pas ! En effet, il impliquerait, a contrario, que toute personne assujettie à la CSG et à la CRDS sur un petit revenu foncier devienne affiliée de droit à la sécurité sociale.
Enfin, il ne me semble pas aberrant que l’ensemble des propriétaires de biens situés en France participent au financement de la protection sociale, la valeur des premiers étant liée au niveau de la seconde.
En revanche, cette discrimination favorable, d’une certaine manière, aux Français de l’étranger étant supprimée, je souhaite attirer votre attention sur plusieurs problèmes.
En effet, à partir du moment où des non-résidents participent, par des prélèvements obligatoires, au financement de la protection sociale française, un certain nombre de dispositions de notre droit actuel doivent être modifiées. Je pense, en particulier, à l’impossibilité, mise en place par le gouvernement Fillon, d’adhérer au régime de base de la CNAV pour les personnes ayant cotisé à la retraite via la CFE, la caisse des Français de l’étranger, pendant toute leur carrière. Il faut revenir sur cette situation dès lors que les revenus des non-résidents financent la protection sociale. Pour les mêmes raisons, l’État doit participer au financement de la troisième catégorie solidaire de la CFE.
Par ailleurs, monsieur le ministre, deux autres discriminations doivent être analysées par vos services. Richard Yung a évoqué l’une d’entre elles, qui a attiré, encore au mois de juin dernier, l’attention du Défenseur des droits. Ce dernier a relevé que, en application de la jurisprudence « Schumacker », des modifications devaient être opérées dans la législation française pour rendre déductibles un certain nombre de charges.
En janvier dernier, vos services ont publié une directive tenant compte de cette jurisprudence. Toutefois, elle ne s’applique qu’aux personnes vivant dans l’espace économique européen. Il conviendrait d’étendre son application à tous les pays coopératifs en matière fiscale. Je sais bien que le précédent gouvernement a introduit Panama parmi ces États, grâce à la ratification « supersonique » d’une convention fiscale en décembre dernier, mais, à ces dysfonctionnements près, il me semble que vos services seraient inspirés et feraient preuve de cohérence en élargissant le champ d’application de cette directive.
Enfin, monsieur le ministre, j’attire votre attention sur les discriminations touchant les Français résidant à Monaco.
M. Christophe-André Frassa. Merci, monsieur Leconte ! (Sourires.)
M. Jean-Yves Leconte. Ces derniers sont souvent stigmatisés alors qu’ils sont réellement victimes de traitements différenciés inéquitables.
M. Robert del Picchia. Eh oui !
M. Jean-Yves Leconte. En conclusion, si nous appliquons les prélèvements obligatoires, tels que la CSG et la CRDS, aux non-résidents fiscaux en France, il serait logique de s’attaquer également à toutes les discriminations dont sont victimes les Français de l’étranger. Je tenais à faire cette mise au point.
Cela étant, je soutiens l’article 25 que je voterai, sous réserve de l’adoption de mon amendement.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 17 rectifié ter est présenté par MM. Frassa, Cantegrit, Cointat, Duvernois et Ferrand et Mmes Garriaud-Maylam et Kammermann.
L'amendement n° 43 est présenté par M. del Picchia.
L'amendement n° 138 rectifié est présenté par MM. Arthuis, Dubois, J. Boyer, Marseille, Deneux, Roche et Capo-Canellas.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour présenter l’amendement n° 17 rectifié ter.
M. Christophe-André Frassa. Cet amendement vise à supprimer l’article 25, qui prévoit d’étendre la CSG et la CRDS aux revenus tirés de biens immobiliers, loyers ou plus-values, par des non-résidents.
Ce dispositif ne tient pas compte du refus de la Cour de justice de l’Union européenne d’étendre la CSG et la CRDS aux revenus de source française, dès lors que les non-résidents sont assujettis à une imposition sociale dans un autre État membre.
À titre d’exemple, l’administration fiscale irlandaise, au titre du Finance act, impose que, pour tout revenu immobilier ayant sa source à l’étranger – en France en l’occurrence –, un résident en Irlande, travailleur indépendant, est assujetti aux charges sociales en Irlande, donc à l’USC, l’universal social charge, et au PRSI, pay related social insurance. Le résident irlandais, salarié ou de plus de 66 ans, est quant à lui assujetti à l’USC dans le même cas de figure.
L’article 25 du projet de loi de finances rectificative créerait donc une double imposition pour un résident irlandais affilié au régime de sécurité sociale. Ce serait contraire à la jurisprudence. En l’occurrence, pour un bien immobilier, le taux d’imposition cumulé serait porté à 64,5 %.
Monsieur le ministre, j’ai pris cet exemple à dessein, l’une de vos collègues ayant été, jusqu’à une date récente – peut-être l’est-elle encore, d’ailleurs – résidente française en Irlande. Je veux parler, vous l’avez compris, de Mme Hélène Conway Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l’étranger.
Les règlements communautaires nos 883/204, 987/209, 1408/71 et 574/72 pour la Suisse, découlent directement du Traité instituant la communauté européenne. Son article 42 CE pose le principe de la coordination des régimes de sécurité sociale des différents États membres. Les personnes auxquelles ces règlements sont applicables ne sont donc soumises qu’à la législation d’un seul État membre. En d’autres termes, en vertu des accords européens, les non-résidents affiliés à la sécurité sociale d’un autre État membre ne peuvent pas être également affiliés à la sécurité sociale française.
La nature de la CSG a été débattue par le passé. La Cour de cassation, suivant la décision de la Cour de justice de l’Union européenne, la considère non pas comme une imposition, mais comme une cotisation sociale.
Sa nature a été débattue, car elle obéit à un régime dual. La contribution sur les revenus d’activité et de remplacement est soumise aux règles d’assiette et de recouvrement des cotisations de sécurité sociale, tandis que la contribution sur les autres catégories de revenus relève des dispositions du code général des impôts.
Ainsi, la Cour de justice de l’Union européenne, statuant sur le régime de la contribution assise sur les revenus d’activité, considérait que, étant affectée exclusivement au financement du système de sécurité sociale et s’étant, pour partie au moins, substituée à des cotisations assises sur les revenus d’activité, elle revêtait le caractère de cotisations sociales au regard de la législation communautaire.
Dans un arrêt du 8 mars 2005, la Cour de cassation – je le dis pour M. Leconte, qui pensait pouvoir passer outre l’arrêt de la CJUE – a confirmé le caractère de cotisations sociales de la CSG et de la CRDS.
Par conséquent, les revenus du patrimoine perçus par les non-résidents sont exclus du champ des contributions sociales, même s’ils sont soumis à l’impôt sur le revenu en France, s’agissant de revenus de source française.
Pour conclure, je remercie mon collègue Jean-Yves Leconte de sa sollicitude. Je tiens à lui dire que, à voir la politique fiscale que le Gouvernement semble vouloir mettre en œuvre pour les Français de l’étranger, il est à craindre que les Français de Monaco, lesquels ont subi depuis 1963 un véritable régime discriminatoire, n’aient été les précurseurs de ce que qui va arriver à tous nos compatriotes expatriés. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Richard Yung. Quel malheur !
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour présenter l’amendement n° 43.
M. Robert del Picchia. La Cour de cassation, suivant la position de la CJUE, a confirmé la nature de cotisation sociale de la CSG et de la CRDS, car elles ont pour seule affectation le financement de la sécurité sociale.
Nous irions à nos risques et périls à l’encontre de la jurisprudence.
L’article 13 du règlement CEE n° 1408/71 établit qu’en matière de sécurité sociale les personnes ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre. À partir de ce principe, la CJUE a prohibé non seulement le cumul des législations, mais aussi les doubles assujettissements ou les doubles cotisations, considérées comme une entrave à la libre circulation des travailleurs.
Les Français résidant dans l’Union européenne peuvent se faire soigner en France, mais à condition de s’acquitter de cotisations dans leur pays d’accueil. Tel est le sens dudit article.
Quant aux Français résidant hors de l’Union européenne, à moins qu’ils ne souscrivent une assurance, ils n’ont droit à rien ! Contrairement à une idée reçue, les Français de l’étranger ne sont pas des nantis qui bénéficient de tous les avantages, sans aucune contrepartie. Loin s’en faut ! Ils n’ont pas droit à la sécurité sociale française ni à la carte vitale.
Pourquoi ? Tout simplement parce que le régime de la sécurité sociale, comme vous l’avez souligné à l’Assemblée nationale, monsieur le ministre, répond au principe de territorialité : pour pouvoir en bénéficier, il faut satisfaire à certaines conditions de résidence sur le territoire national.
Or la CSG et la CRDS figurent non pas dans le code général des impôts, mais dans le code de la sécurité sociale puisque, je le répète, elles ont comme unique objet le financement de la sécurité sociale. Elles ne sont donc applicables qu’aux personnes résidant sur notre territoire.
Monsieur le ministre, le seul motif avancé en faveur de l’article 25 de ce projet de loi est l’égalité de traitement entre redevables de l’impôt.
En fait d’égalité, adopter cet article reviendrait surtout à faire payer deux fois des cotisations sociales aux non-résidents.
Le total des prélèvements, pour un expatrié qui loue le logement qu’il a conservé en France, serait à un taux minimum de 35,5 %. Quant au total des prélèvements sur les plus-values immobilières pour les résidents hors Union européenne, il serait de près de 50 % – 33,33 % d’impôts plus 15,5 %. Sans compter l’imposition dans le pays de résidence.
Mes chers collègues, je vous demande d’adopter cet amendement de suppression afin d’éviter de créer une discrimination supplémentaire envers les non-résidents. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour présenter l’amendement n° 138 rectifié.
M. Jean Arthuis. Nos collègues Frassa et del Picchia ont excellemment posé les termes du problème.
J’ajouterai que les non-résidents sont non seulement nos compatriotes expatriés, mais également des investisseurs étrangers, qui détiennent en France des intérêts. Il est clair que cette disposition les perturbera quelque peu. Je ne suis pas sûr que cette innovation fiscale sera favorable au renforcement du marché immobilier en France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements visent à supprimer l’article 25 du projet de loi de finances rectificative, qui prévoit d’assujettir les revenus immobiliers des non-résidents à l’ensemble des prélèvements sociaux sur les revenus du capital.
La commission des finances s’était déjà investie sur ce sujet, Philippe Marini ayant proposé un dispositif similaire en décembre dernier.
La question essentielle est celle de la nature juridique de la CSG. Sur ce point, le Conseil constitutionnel a indiqué à plusieurs reprises qu’elle entrait dans la catégorie des impositions de toute nature et ne constituait pas une cotisation sociale.
M. Robert del Picchia. Alors, traitez-là comme un impôt !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. J’ajoute que, contrairement aux revenus d’activité et de remplacement, aucun critère relatif à l’affiliation à un régime de sécurité sociale français n’est prévu pour l’assujettissement à la CSG des revenus du patrimoine.
Le critère d’affiliation pour les revenus d’activité et les revenus de remplacement a été introduit a posteriori en 2001, pour tenir compte de la jurisprudence communautaire. Mais ce critère supplémentaire n’a pas été prévu pour les revenus du patrimoine.
Quant aux divergences de jurisprudence entre le Conseil constitutionnel, d’un côté, le Conseil d’État, la Cour de cassation et la Cour de justice de l’Union européenne, de l’autre, elles ont porté sur la seule CSG relative aux revenus d’activité et de remplacement, et non sur celle relative aux revenus du patrimoine.
M. Richard Yung. Très bien !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Dès lors, si, à l’instar du Conseil constitutionnel, on considère la CSG sur les revenus du patrimoine comme un impôt, et non comme une cotisation sociale, il paraît logique, par symétrie avec le droit fiscal – je rappelle que les revenus immobiliers des non-résidents sont soumis à l’impôt sur le revenu –, que ceux-ci soient également soumis aux prélèvements sociaux.
Dans ces conditions, l’article a toute sa signification et les amendements de suppression doivent être rejetés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’avis du Gouvernement est, évidemment, défavorable.
Les propos qui ont été tenus s’adressaient peut-être moins à ceux qui siègent dans cette enceinte qu’à d’autres. Trois questions ont été soulevées.
La première, d’ordre juridique, sera vite réglée. Confondre les revenus du patrimoine avec ceux du travail n’est pas raisonnable. Exciper de la jurisprudence européenne ou de celle de la Cour de cassation pour prétendre que les revenus concernés sont des revenus du patrimoine peut avoir deux explications : soit on en a fait une mauvaise lecture, soit on a reçu des informations erronées.
Le Conseil constitutionnel est clair : la CSG comme la CRDS sont des impositions de toute nature, bref, des impôts, et non des cotisations sociales.
Puisque cette loi de finances rectificative sera évidemment soumise au Conseil constitutionnel, je ne doute pas une seconde qu’il réaffirmera la nature de la CSG et celle de la CRDS.
Voilà au moins tout un pan de l’argumentation adverse qui ne devrait plus être repris dans cet hémicycle. C’est en tout cas le vœu que je forme.
Au-delà du débat juridique, mesdames, messieurs les sénateurs, quelques-uns d’entre vous ont cru opportun de soulever une deuxième question, qui est une question de fond : sous prétexte que telle ou telle contribution assurerait le financement de certaines prestations, ceux qui n’en bénéficieraient pas devraient en être exonérés. Quel raisonnement curieux ! Finalement l’impôt est envisagé comme une contribution consumériste et non comme une contribution universelle.
Il y a sûrement parmi vous des parlementaires dont les enfants ne sont plus scolarisés et dont les petits-enfants ne sont pas encore en âge de l’être. Doivent-ils pour autant être exonérés de la quote-part de leur impôt qui reviendrait à l’éducation nationale ? Tel est le raisonnement que certains d’entre vous ont tenu : dès lors que l’on ne bénéficie pas des prestations sociales que la CSG et la CRDS contribuent à financer, il faudrait être exonéré des ces impositions.
Si l’on pousse le raisonnement jusqu’à son terme, un citoyen qui estimerait faire son affaire de l’élimination des déchets ménagers serait en droit de s’exempter de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères. Chaque unité la plus élémentaire de notre société pourrait, ainsi, décider librement quelle contribution elle consent et quelle contribution elle refuse, en fonction de ses usages personnels. Au bout du compte, cela revient à nier totalement toute vie collective, toute vie sociale, toute mutualisation, bref, tout destin collectif.
Vous comprendrez, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement ne partage pas cette conception. Il souhaite que les impositions de toute nature, donc la CSG et la CRDS, soient affectées du caractère universel que suppose un destin collectif.
À la lecture du compte rendu de vos travaux, certains seront intéressés d’apprendre que, pour défendre des compatriotes expatriés, quelques-uns parmi vous ont cru bon de remettre en cause le principe fondamental du consentement à l’impôt, dont la finalité est d’assurer non seulement le fonctionnement, mais surtout le destin d’un pays et d’une communauté d’individus ayant décidé de mutualiser leur histoire, leur passé, leur présent, leur futur. À chacun d’avoir la conception qu’il souhaite !
La troisième question est d’ordre fiscal. C’est un débat intéressant, voire amusant.
En matière de fiscalité, il existe un principe auquel nombre d’entre vous se sont souvent référés par le passé : celui de la territorialité de l’impôt. J’ai cru comprendre que ce principe était aujourd’hui remis en cause par ceux qui rejettent les dispositions de l’article 25 du projet de loi.
Notre pays adhère au principe de territorialité, inscrit dans notre droit et sur lequel sont fondées toutes les conventions fiscales que nous avons pu signer.
Un seul pays, les États-Unis, conteste ce principe en lui préférant celui de nationalité, mais assorti de très nombreuses dérogations : dès lors que l’un de ses résidents travaille, où que ce soit, il doit des impôts à son État de nationalité et non à son État de résidence.
C’est d’ailleurs en s’inspirant du droit nord-américain que certains ont pu estimer que nos compatriotes expatriés devaient acquitter des impôts en France, lors même que c’était à l’étranger qu’ils produisaient la richesse.
J’ai même entendu certains représentants des Français de l’étranger s’indigner que puisse être émise, sur notre territoire, l’idée de voir les expatriés contribuer à la prospérité et aux ressources de l’Hexagone, puisque, précisément, étant expatriés, en vertu du principe de territorialité, ceux-ci n’avaient pas à acquitter la moindre contribution assise sur des revenus tirés d’un travail effectué à l’étranger.
Or ce sont les mêmes qui, aujourd’hui, récusent le principe de territorialité et se fondent sur le principe de nationalité qu’auparavant ils estimaient scandaleux !
Mesdames, messieurs les sénateurs, il faut choisir ! Si vous gardez en tête de telles idées, ne soyez pas surpris s’il est demandé un jour aux Français expatriés de contribuer, en France, à l’impôt sur le revenu, à la CSG et à la CRDS sur la totalité de leurs revenus, fussent-ils conquis en dehors de nos frontières !
Si cette perspective vous effraie, je vous conseille d’accepter le principe de territorialité : dès lors que des loyers sont perçus ou que des plus-values immobilières sont enregistrées en France, des impositions de toute nature telles que la CSG et la CRDS s’appliquent.
Récuser le principe de territorialité, c’est, je le répète, ouvrir la voie au principe de nationalité. Je suis prêt à vous suivre jusqu’au bout, mais je doute que telle soit votre intention. Je vous demande de faire preuve d’un peu de cohérence : retirez vos amendements et votez l’article 25.
M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois, pour explication de vote.
M. Louis Duvernois. Monsieur le ministre, on peut faire plusieurs lectures juridiques de cet article 25, qui étend le prélèvement social au taux de 15,5 % à tous les revenus fonciers et plus-values de cession que les non-résidents fiscaux tirent de leurs biens immobiliers situés en France.
Concrètement, il s’agit d’une véritable aberration, tant l’effet recherché s’écarte de la réalité des situations rencontrées sur tous les continents. Soyons clairs : on cherche, une fois de plus, dans la précipitation, à taxer pour taxer, sans discernement ni jugement sûr, en méconnaissance de cause, puisque ce prélèvement social de 15,5 % viendra s’ajouter aux taxes foncières et d’habitation déjà prélevées.
C’est ce que le Président de la République a appelé « l’effort juste » lors de son entretien télévisé du 14 juillet dernier.
Pour autant, le collectif budgétaire est-il aussi juste que le croit l’Élysée ? Certainement pas ! J’en veux pour preuve ce raisonnement de bon sens : nonobstant les propos tenus précédemment, pourquoi une personne non résidente fiscale, qui ne bénéficie en rien du système social français, devrait-elle être assujettie à un « prélèvement social », à la CSG et à la CRDS, qui, soulignons-le, sont des cotisations sociales et non des impôts, pour rembourser une dette sociale nationale ?
Pourquoi devrait-elle se soumettre à un « règlement rétroactif » de ce prélèvement social alors qu’elle s’acquitte déjà des taxes foncières et d’habitation liées à la propriété sur le territoire national ?
Une telle rétroactivité est-elle conforme à la législation française ? Nous en doutons.
Quoi qu’il en soit, ces nouvelles mesures gouvernementales ne manqueront pas d’ouvrir la voie à de nombreux contentieux avec les pouvoirs publics français concernés, dégradant, en outre, je le rappelle à mon tour, l’image de notre pays auprès des personnes établies à l’étranger ayant investi en France et contribuant au développement de notre économie sous des formes diverses.
En conséquence, monsieur le ministre, je ne voterai pas cet article 25, que je considère comme injuste et confiscatoire. (MM. Christian Cointat et Christophe-André Frassa applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que les choses soient claires, nous n’avons nullement l’intention d’accorder des avantages indus ou des prébendes aux Français établis hors de France. Tout ce que nous voulons, pour eux, c’est la justice et l’équité : ils doivent payer les impôts qu’ils doivent, ni plus ni moins.
J’ai apprécié, monsieur le ministre, votre grande plaidoirie. Elle était habile, élégante, mais force est de constater que vous maniez le sophisme avec un art consommé. Vous avez mêlé avec talent des idées totalement contradictoires !
Si vous pensez que l’impôt doit être lié à la nationalité, je vous dis : chiche ! Mais égalité de devoirs vaut égalité de droits !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Exactement !
M. Christian Cointat. Autrement dit, il faudra prévoir pour les Français établis hors de France la gratuité de l’enseignement. Les plus déshérités d’entre eux devront aussi avoir droit à l’aide sociale.
À l’heure actuelle, notre fonds d’aide sociale représente quinze fois moins que le montant des aides versées par les départements pour des cas similaires. En matière d’enseignement, c’est pareil, puisque l’effort de l’État est trois fois moindre pour les Français de l’étranger que pour les Français de France. Je pourrais multiplier les exemples !
Si nos impôts étaient payés sur la base de la nationalité, vous ne seriez pas gagnants sur le plan des finances, mais nous, si ! Restons dans le cadre de la territorialité, d’accord, mais en excluant, conformément à toutes les conventions fiscales, de payer deux fois l’impôt.
Que je sache, dans « contribution sociale généralisée », il y a le mot « sociale ». Il suffit de savoir lire : la CSG sert à financer l’aide sociale, un point c’est tout ! Le Conseil constitutionnel a considéré qu’elle entrait dans la catégorie des impositions de toute nature : soit. Mais dans ce cas il faudra se débrouiller pour que les Français de l’étranger ne paient pas leurs impôts une deuxième fois dans leur pays de résidence. Là est le problème.
Ne faussons pas le débat en cherchant, par-ci par-là, à imposer je ne sais quel dogme. Essayons de trouver véritablement la voie de la justice. Il n’y a aucune raison de demander des avantages pour les Français de l’étranger, mais ceux-ci doivent pouvoir être traités de manière équitable.
Cher collègue Jean-Yves Leconte, je vous le dis : je n’ai jamais hésité, quand j’estimais que la majorité précédente faisait des erreurs pour les ressortissants français à l’étranger, à critiquer ses propositions, à les attaquer, et je ne les votais pas !
M. Robert del Picchia. Il nous est arrivé de voter contre !
M. Christian Cointat. Absolument ! Je me suis fait menacer je ne sais combien de fois de me faire virer, mais ce n’est toujours pas arrivé. Il faut être honnête, savoir ce que l’on veut, avoir le courage de le dire et de le défendre.
M. Jean-Yves Leconte. J’ai dit ce que je pensais !
M. Christian Cointat. Monsieur le ministre, les non-résidents payent déjà des impôts sur les revenus perçus dans leur pays de résidence, bien sûr, mais aussi pour tous leurs revenus de source française. À l’heure actuelle, sachez tout de même que l’ensemble des non-résidents français rapportent à l’État autant, si ce n’est plus, que ce qu’ils coûtent dans le cadre du budget. Voilà qui n’est pas négligeable. Ne perdez pas de vue que ce sont pour nos finances, au minimum, des opérations blanches, si je puis dire.
La Cour de justice de l’Union européenne ne se prononce que sur les questions qu’on lui pose. Pour l’instant, elle a été saisie uniquement sur la partie « revenus », mais elle ne manquera pas de l’être sur la partie « patrimoine », et rien ne dit qu’elle ne se prononcera pas alors dans le même sens, en considérant la CSG et la CRDS comme des cotisations sociales. Nous verrons bien !
Je trouve que, pour si peu d’argent, finalement, il ne vaut peut-être pas la peine de prendre le risque de se faire condamner. C’est pourtant le choix que vous avez fait.
Comme l’a souligné fort justement M. Arthuis, le dispositif proposé est confiscatoire et découragera un certain nombre de personnes à investir en France, ce qui regrettable.
Vous avez supprimé la TVA sociale, qui permettait de faire payer aux produits importés une partie de notre aide sociale, préférant en faire supporter le financement par les produits fabriqués en France. Maintenant, vous voulez assujettir à la CSG des Français qui vivent hors de l’Hexagone et des étrangers qui, eux, n’y viendront plus.
Ce n’est pas la bonne solution. Comme vous, on peut tout mélanger et manier le sophisme : tout ce qui est rare est cher ; un cheval bon marché est rare ; donc un cheval bon marché est cher !
Monsieur le ministre, voilà une démonstration que vous auriez pu aussi nous faire. Alphonse Allais avait cette merveilleuse phrase, que je vous laisse méditer. « Il faut demander plus à l’impôt et moins aux contribuables. » (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. J’ai écouté avec attention votre analyse, monsieur le ministre. Il faudra effectivement aller jusqu’au bout et considérer que la CSG est un impôt. Nous devrons donc sans doute nous préparer à étatiser certaines branches de la protection sociale, tirer toutes les conséquences de cette analyse et sortir de l’ambiguïté actuelle.
Certes, on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment. Nous retrouvons là un débat que nous avons eu au début de la discussion de ce collectif budgétaire, au sujet du financement de la protection sociale.
Il nous faut reconnaître que la CSG est une imposition de toute nature. Il y aurait donc urgence, dans ces conditions, à revoir la présentation de nos comptes publics, notamment le financement de la protection sociale. Cela suppose de mieux préparer l’opinion publique aux réformes structurelles qui pourront contribuer à l’amélioration de la compétitivité, et donc au retour de l’emploi et du pouvoir d’achat.
M. Christian Cointat. Très bien !
M. Jean Arthuis. En tout état de cause, monsieur le ministre, je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 138 rectifié est retiré.
La parole est à M. André Ferrand, pour explication de vote.
M. André Ferrand. Monsieur le ministre, j’ai admiré votre démonstration, intellectuellement brillante, en trois points : le niveau juridique, celui du fond et l’aspect fiscal.
Pour ma part, je me placerai plus pragmatiquement sur le plan de l’intérêt de la France. Car c’est bien la question qui nous occupe ! Or sur ce plan, l’initiative que vous avez prise est mauvaise.
Je ne me placerai pas sur le plan juridique, car dans ce domaine les choses ne sont pas claires et personne ne peut être sûr de l’emporter de façon définitive.
Je parlerai plutôt de la situation des personnes, de ces expatriés, de ces Français de l’étranger qui servent la France. Je pense, en particulier, à tous ceux, nombreux, qui sont expatriés de longue date et ont fait souche dans leur pays d’accueil. Nous les rencontrons lors de nos voyages à travers le monde : ils sont originaires de la vallée de l’Ubaye – les fameux « Barcelonnettes du Mexique » ! –, basco-béarnais, bretons, charentais, alsaciens.
Ces expatriés français, majoritairement originaires des régions que je viens de citer, et qui ont souvent acquis la nationalité du pays dans lequel ils vivent, sont pour nous, vous le savez, des relais essentiels.
Là où ils travaillent et habitent avec leur famille, en général binationale, ils sont « dépositaires » de la France. Ils ont ainsi construit une grande partie de notre réseau d’écoles, car ils ont voulu conserver notre langue. Ils sont aussi très heureux d’avoir gardé une maison en France, dans leur province natale, comme c’est très souvent le cas.
Je puis vous assurer, monsieur le ministre, qu’une grande émotion s’est manifestée dans les réseaux d’expatriés depuis qu’ils ont pris connaissance de votre projet, et les réactions que nous avons recueillies ont été nombreuses. Je suis certain que nos collègues sénateurs des Français de l’étranger qui appartiennent à la majorité partagent mon point de vue.
Pour les raisons que je viens d’invoquer, cette initiative n’est ni bonne ni conforme à l’intérêt de notre pays.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Ayant participé, ainsi que plusieurs de mes collègues, à l’excellente commission d’enquête sur l’évasion fiscale mise en place sur l’initiative du groupe CRC, présidée par M. Philippe Dominati, et dont le talentueux rapporteur était M. Éric Bocquet, je ne voterai pas ces amendements de suppression.
M. Robert del Picchia. Ce n’est pas le sujet !
Mme Nathalie Goulet. Lors de leur audition, des syndicalistes du Trésor nous ont exposé le cas des faux expatriés. Le présent débat nous donne l’occasion, sinon de régler, tout au moins de « mettre sur le tapis » le problème de la fiscalité des expatriés.
M. Robert del Picchia. Il ne faut pas généraliser !
Mme Nathalie Goulet. J’avais formulé plusieurs observations concernant cet excellent rapport, qui comporte 59 propositions. J’espère que vous serez attentif à ce document, monsieur le ministre, car c’est un nid de suggestions intéressantes permettant d’améliorer cette justice fiscale et sociale que nous recherchons tous, et de rétablir notre équilibre budgétaire.
M. Christian Cointat. De toute façon, ces amendements ne passeront pas...
M. Robert del Picchia. Les expatriés ne sont pas tous des exilés fiscaux !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 17 rectifié ter et 43.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 119, présenté par M. Leconte, Mme Lepage et M. Yung, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Remplacer la date :
1er janvier 2012
par la date :
1er août 2012
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Il est précisé à l’alinéa 20 de l’article 25 que cet assujettissement, auquel je suis favorable, comme je l’ai indiqué, s’applique aux revenus perçus à compter du 1er janvier 2012. Il s’agit donc d’une mesure rétroactive.
Il convient de supprimer cet effet rétroactif, et ce pour trois raisons.
Premièrement, il convient de rétablir la sécurité juridique. Il paraît, en effet, difficile de dire, aujourd’hui, qu’une taxe s’appliquera au 1er janvier 2012.
Deuxièmement, il est préférable, pour notre réputation de parlementaire, de ne pas appliquer les mesures avant qu’elles n’aient été annoncées.
Troisièmement, certains de nos compatriotes, qui ont quitté notre pays en raison du contexte économique et se sont installés à l’étranger pour trouver du travail, parviennent tout juste à équilibrer leur budget familial, car ils doivent tenir compte de la recette de leurs revenus fonciers et du coût de la vie à l’étranger.
S’ils se trouvaient dans une situation similaire en France, me rétorquerez-vous, ils seraient d’ores et déjà assujettis à la CSG et à la CRDS. Il est donc logique qu’ils le deviennent. Après tout, je parlais moi-même, tout à l’heure, de non-discrimination...
Il serait toutefois préférable, pour leur permettre d’anticiper, de supprimer la rétroactivité de cette disposition. C’est la raison pour laquelle je propose d’appliquer la mesure à compter du 1er août 2012.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement représenterait une perte de recettes non encore chiffrée à ce stade.
Mme Catherine Procaccia. Elle n’est peut-être pas si importante !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. En outre, des difficultés techniques pourraient survenir, compte tenu du mode de recouvrement des prélèvements sur ces revenus.
Dans ces conditions, et eu égard à nos riches débats précédents, je demande à notre collègue Jean-Yves Leconte de bien vouloir retirer son amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable, car l’adoption de cet amendement ferait perdre la moitié de la recette que nous attendons de la disposition en 2012.
Par ailleurs, l’argument fondé sur la rétroactivité n’est pas recevable. Comme pour tout impôt sur le revenu ayant fait l’objet de modifications dans l’année en cours, il n’est retenu ni par le Conseil d’État ni par le Conseil constitutionnel.
Il n’y a pas, en l’occurrence, de rétroactivité. J’en veux pour preuve le fait que la récente modification du taux de l’impôt sur le revenu, qui est passé de 40 % à 41 % pour la tranche marginale, est intervenue en fin d’année pour les revenus de l’année en cours.
Je vous demande, monsieur le sénateur, de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. Monsieur Leconte, l’amendement n° 119 est-il maintenu ?
M. Jean-Yves Leconte. Je tiens aux principes que je viens de défendre, car ils me semblent importants.
J’accepte toutefois avec regret de retirer cet amendement, comme vous me le demandez.
Sachez néanmoins, monsieur le ministre, qu’il m’en coûte beaucoup, eu égard à la situation des personnes que je représente et dont je défends les intérêts.
Je compte sur l’engagement du Gouvernement et du Sénat pour défendre les principes que j’ai énoncés.
M. le président. L’amendement n° 119 est retiré.
M. Christophe-André Frassa. J’en reprends le texte.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 119 rectifié, présenté par M. Frassa.
La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour le défendre.
M. Christophe-André Frassa. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.
M. Albéric de Montgolfier. Je voterai cet amendement, même si je suis sensible aux arguments du ministre fondés sur la perte de recettes. Il est clair, par ailleurs, que nous ne sommes pas dans une situation de rétroactivité au sens juridique du terme.
Je trouve néanmoins difficilement concevable d’opérer systématiquement dans les projets de loi de finances ou les projets de loi de finances rectificative – même si cela n’est pas nouveau – des retours en arrière sur des impôts qui ont déjà été votés, voire liquidés. Nous en avons encore eu un exemple, hier, avec l’ISF, qui a été modifié et s’applique désormais à des contribuables n’ayant pas eu à souscrire, jusqu’à présent, de déclarations au titre de cet impôt. Je vise ceux dont le patrimoine est inférieur à 1,3 million d’euros. Du fait des dispositions votées hier, ceux-ci devront remplir une déclaration d’ISF en septembre ou en octobre. Il s’agit donc bien, dans certains cas, de rétroactivité.
Il faudrait un peu de stabilité pour que les contribuables sachent à quelle sauce ils vont être mangés, c’est-à-dire, concrètement, quel montant d’impôts ils devront acquitter pour l’année !
Sur le plan juridique, même s’il existe une jurisprudence très précise en matière de rétroactivité, il serait souhaitable, dans l’intérêt des contribuables, que la loi de finances fixe les règles d’une manière claire.
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Je partage le point de vue de mon ami Albéric de Montgolfier. Nous ne sommes pas dans une situation de rétroactivité au sens juridique du terme. Il n’en reste pas moins que la situation est grave puisque nous assistons à une dérive inconnue chez nos voisins : la loi subit des modifications incessantes, qui affectent nos concitoyens.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. À qui la faute ?
M. Christian Cointat. On voit se multiplier des situations de rétroactivité, peut-être factices sur le plan du droit, mais bien réelles dans les faits puisqu’elles trompent nos concitoyens.
Le principe de confiance légitime, qui est pourtant un élément essentiel du droit au sein de l’Union européenne, n’est pas respecté dans notre pays. C’est grave !
En vertu de ce principe de confiance légitime, bien supérieur à celui de la rétroactivité sur le plan juridique, je voterai cet amendement. Il est en effet indispensable que les citoyens sachent ce qui va leur arriver. Les engagements qu’ils prennent ne doivent pas constamment être remis en question. Car lorsque la parole de l’État est mise en doute, c’est tout l’État, et donc la France, qui en pâtit !
M. Christophe-André Frassa. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour explication de vote.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. C’est à la sécurité juridique que l’on juge un État de droit.
M. Christian Cointat. Très bien !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. C’est un critère essentiel, que nous opposons à un certain nombre d’États que je ne citerai pas.
Je n’aimerais pas que la France connaisse la même situation que ces pays. Je demande donc à mes collègues de ne pas voter cet amendement. (M. Christian Cointat et M. Christophe-André Frassa applaudissent.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 25.
(L’article 25 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 25
M. le président. L'amendement n° 65 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° À l’article 80 quinquies, les mots : « de la fraction des indemnités allouées aux victimes d’accidents du travail exonérée en application du 8° de l’article 81 et des indemnités » sont remplacés par les mots : « des indemnités qui, mentionnées au 8° de l’article 81, sont allouées aux victimes d’accidents du travail et de celles » ;
2° Au 8° de l’article 81, les mots : « à hauteur de 50 % de leur montant, ainsi que les » sont supprimés.
II. – Le I du présent article s’applique pour les rentes versées au titre de l’année 2012.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans une période où les comptes publics sont présentés comme en difficulté, chacun peut trouver des niches fiscales à supprimer là où il veut.
C’est ainsi qu’à l’automne 2009, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2010, certains de nos collègues ont proposé avec succès la suppression de l’exemption fiscale des indemnités versées aux salariés victimes d’accidents du travail ayant entraîné une incapacité temporaire.
Je ne reviens pas sur les arguments utilisés pour justifier la fin de cette exemption, destinée à élargir l’assiette de l’impôt sur le revenu pour recouvrer quelque 230 millions d’euros de recettes fiscales supplémentaires aux dépens des victimes d’accidents du travail.
À l’époque, nous avions fortement combattu cette mesure dont nous ne partageons évidemment pas la philosophie. Aujourd’hui, nous estimons que le temps est venu de la remettre en débat.
En 2009, d’ailleurs, la discussion sur la fiscalisation des indemnités temporaires versées en cas d’accident du travail nous avait empêchés d’aborder la vraie question de fond : celle de la sécurité au travail, des rythmes, des horaires et des contraintes diverses, notamment en termes de présence.
À votre avis, mes chers collègues, qu’est-ce qui coûte le plus cher à la collectivité : la non-imposition de ces indemnités ou la dégradation de la situation sanitaire d’une bonne part de la population, à mesure que se développent le travail précaire et des conditions de travail irrespectueuses des salariés ?
Il me semble possible de nous mettre d’accord sur ce constat et pour engager le Gouvernement à prendre les dispositions nécessaires.
J’ose espérer que l’ensemble de la majorité sénatoriale aura à cœur de confirmer son soutien à cet amendement, en faveur duquel elle a déjà voté, à l’automne dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances est défavorable à cet amendement aujourd’hui, mais elle souhaite que la question soit abordée au cours du débat budgétaire de l’automne prochain.
Compte tenu des contraintes budgétaires actuelles, il est difficile d’accepter la mesure proposée, dont le coût s’élève à 170 millions d’euros.
Nous sommes néanmoins tous sensibles à la nécessité de reconsidérer les dispositions très néfastes qui ont été prises à l’encontre des victimes d’accidents du travail. Je pense, d’ailleurs, que telle est bien l’intention du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Hélas, l’avis du Gouvernement est également défavorable.
Lorsque j’étais parlementaire de l’opposition, j’ai voté contre l’amendement Copé qui a introduit cette fiscalisation.
Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons corriger en une seule fois dans une loi de finances rectificative, dont l’ampleur et l’ambition ne sont peut-être pas celles que vous auriez attendues, tout ce qui a été fait pendant cinq ans.
Monsieur Watrin, je comprends votre déception et je regrette beaucoup de ne pas être en situation d’accepter votre amendement.
M. le président. Monsieur Watrin, l’amendement n° 65 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Je suis loin d’être satisfait par les explications de M. le rapporteur général et de M. le ministre.
Mardi matin, au cours de la séance des questions orales, j’ai soulevé la question de l’organisation du travail à La Poste, dont l’État détient 80 % du capital et où les conditions de travail se sont considérablement dégradées.
Par exemple, depuis la mise en place du système « facteur d’avenir », la charge qui pèse sur les facteurs s’est beaucoup alourdie et les médecins du travail constatent une explosion du nombre des arrêts maladie.
J’aurais voulu entendre M. le ministre annoncer que le Gouvernement allait effectivement agir pour améliorer les conditions de travail dans toutes les entreprises.
Je pense qu’une telle action permettrait de réaliser, dans tous les domaines, notamment au sein de l’assurance maladie, des économies considérables de nature à financer largement le dispositif que nous proposons.
Si donc le Gouvernement avait la volonté de peser sur les conditions de travail dans les entreprises, nous aurions les moyens d’assurer le financement de la mesure prévue par notre amendement. Je rappelle que la majorité sénatoriale a adopté une disposition similaire l’automne dernier.
C’est la raison pour laquelle je suis assez enclin à maintenir mon amendement, sauf indication contraire et même si on me promet que la question sera prochainement soulevée.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Watrin, j’ignorais que vous souhaitiez engager un débat que je ne fuis naturellement pas.
Nous savons qu’il existe un déport, l’assurance maladie prenant en charge des dépenses qui relèvent objectivement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, la branche AT-MP. L’Inspection générale des affaires sociales a chiffré ce déport à près d’1 milliard d’euros chaque année.
Le système de cotisations pour la branche AT-MP est un bon système, car il est à la fois incitatif et dissuasif. Les entreprises ont intérêt à mettre en œuvre des mécanismes de prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles : si elles ne le font pas, leurs cotisations s’alourdissent.
Si c’est cela que vous souhaitiez m’entendre dire, monsieur Watrin, je vous le dis : une autre politique sera mise en œuvre, de façon à faire le départ entre ce qui relève de l’assurance maladie, qui est assuré par la collectivité, et ce qui relève de la branche AT-MP, laquelle est financée par des cotisations incitatives et dissuasives dont tous les partenaires sociaux, notamment les chefs d’entreprise, reconnaissent les vertus.
Compte tenu de ces explications, monsieur Watrin, j’espère que vous accepterez de retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.
Mme Annie David. Nous avons bien entendu M. le ministre.
Le problème soulevé par l’amendement du groupe CRC présente deux aspects.
S’agissant, d’abord, du financement de la branche AT-MP, nous sommes tout à fait satisfaits, monsieur le ministre délégué, que vous alliez dans le sens que nous souhaitons.
Je vous signale, d’ailleurs, que deux de nos collègues de la commission des affaires sociales viennent de publier un rapport très intéressant sur ce sujet, intitulé « Le financement de la branche AT-MP : préserver le dialogue social - revenir à l’équilibre ». J’espère qu’un débat pourra avoir lieu sur la base de ce rapport, même si j’entends bien que ce n’est pas aujourd’hui le moment ;…
Mme Isabelle Debré. Nous en discuterons lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 !
Mme Annie David. … car il s’agit de la santé des travailleurs.
S’agissant, ensuite, de la fiscalisation des indemnités versées aux accidentés du travail, il faudra aussi que nous ayons un débat le moment venu.
Je vous rappelle, mes chers collègues que, en vertu d’accords de 1896 et 1906, un travailleur accidenté doit être remboursé intégralement, sans avoir à faire la preuve de l’imputabilité de la faute. Cet accord très ancien était encore d’actualité jusqu’à ce que le précédent gouvernement décide de soumettre à fiscalité les indemnités des accidentés du travail.
C’est ce second aspect, monsieur le ministre, que nous aimerions également mettre en débat.
Pour l’heure, nous acceptons de retirer l’amendement n° 65 rectifié.
Sachez, néanmoins, que nous serons très attentifs, lors de l’examen du prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, aux deux aspects que je viens d’aborder : le financement de la branche AT-MP et la défiscalisation, que nous souhaitons réintroduire, des indemnités versées aux accidentés ou aux malades du travail.
M. le président. L’amendement n° 65 rectifié est retiré.
M. Jean Arthuis. J’en reprends le texte.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 65 rectifié bis, présenté par M. Arthuis.
La parole est à M. Jean Arthuis, pour le défendre.
M. Jean Arthuis. M. Watrin, en présentant cet amendement, a rappelé que les comptes sont en difficulté.
Je veux simplement faire observer que ce ne sont pas les comptes publics qui sont en difficulté, mais qu’ils traduisent les difficultés de notre société.
Nous avons voté ce dispositif au Sénat, conscients qu’il s’agissait d’une niche fiscale et que les revenus qui se substituent au salaire entrent logiquement dans l’assiette des cotisations.
Enfin, j’observe que le braquet de ce matin est resté relativement modeste…
Quant à l’amendement n° 65 rectifié bis, je le retire.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. C’est un détournement de procédure !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est honteux !
M. le président. L’amendement n° 65 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 71 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts sont abrogés.
II. – Cette disposition s’applique aux gains réalisés à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, s’il fallait se convaincre du bien-fondé de cet amendement, nous pourrions citer largement les arguments que notre collègue Nicole Bricq développait ici-même, avant d’être appelée à d’autres fonctions.
Le 3 décembre 2011, par exemple, au cours de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2012, en défendant l’amendement n° II-352 qu’elle présentait au nom de la commission des finances, Mme Bricq a tenu les propos suivants : « Cet amendement vise à aller au bout de la démarche engagée par l’Assemblée nationale. Constatant que l’application, à compter de 2012, d’abattements sur le montant des plus-values de cession de valeurs mobilières allait engendrer une perte de recettes de l’ordre de 1 milliard d’euros à compter de 2014, les députés ont souhaité empêcher que pareil phénomène se produise. »
Elle soulignait, en outre, que l’Assemblée nationale souhaitait mettre en place un dispositif de remploi des plus-values ouvrant la voie à une exonération d’imposition sur la durée.
Cela dit, le système mis en place par les articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts est d’une remarquable complexité, qui pourtant n’empêche aucunement des pratiques d’optimisation fiscale que nous ne pouvons évidemment que réprouver au regard de la situation budgétaire générale.
Comme nous l’avons souvent dit, ce n’est pas aux comptes publics de porter le poids de l’affectation la plus « judicieuse », fiscalement parlant, de l’argent privé, ni d’assurer sa rentabilité au travers de règles fiscales allégées ou de contraintes fort minimales.
Pour ces motifs, à l’instar de ce qui a été voté l’automne dernier, j’invite le Sénat à adopter l’amendement n° 71 rectifié.
Par ailleurs, je vous signale que, compte tenu des formes toutes particulières de taxation des plus-values et de fixation de la contribution fiscale des sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés, la mesure que nous proposons trouvera à s’appliquer dès la promulgation de la loi de finances rectificative. Par conséquent, elle participera dès ce moment à l’amélioration des comptes publics.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est sympathique dans son principe. Nous sommes en phase puisque le Sénat a déjà voté l’abrogation de l’article 150-0 D du code général des impôts lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012, sur une initiative de notre collègue Nicole Bricq.
Nous savons que l’article 150-0 D ter est une niche qui coûte 275 millions d’euros et dont l’efficacité doit être prouvée.
Cela dit, l’adoption de l’amendement n° 71 rectifié n’aurait pas d’incidence sur les comptes de 2012, raison pour laquelle il est examiné dans la seconde partie du projet de loi de finances rectificative.
Dans ces conditions, monsieur Bocquet, peut-être pourriez-vous déposer de nouveau votre amendement lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2013 ?
En tout état de cause, dans la mesure où cette niche est fortement contestée au Sénat, je souhaiterais que le Gouvernement nous donne des indications complémentaires sur les engagements qu’il compte prendre en la matière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’avis du Gouvernement est défavorable, pour les raisons indiquées par le rapporteur général.
Le projet de loi de finances rectificative n’a pas pour objet de réformer la fiscalité, fût-ce celle des plus-values.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il le peut !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement présentera une barémisation des revenus du capital dans le projet de loi de finances initiale pour 2013.
Monsieur Bocquet, je comprends votre souhait de voir cette réforme intervenir maintenant. Mais ce n’est pas ce que souhaite le Gouvernement.
Pour une raison de calendrier, j’invite le Sénat à rejeter l’amendement n° 71 rectifié.
M. le président. Monsieur Éric Bocquet, l’amendement n° 71 rectifié est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Nous voulons répondre par des signaux forts au message donné lors des dernières élections. C’est pourquoi nous maintenons notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Sur la question que notre collègue Bocquet vient d’évoquer, la vérité d’hier n’est plus celle d’aujourd’hui…
Il en va de même à propos des délocalisations, dont nous avons longuement discuté parce qu’elles font l’actualité dans notre pays.
Ce matin, monsieur le ministre, le réveil a été cruel : nous avons appris que l’Île-de-France délocalise un centre d’appel au Maroc !
M. Placé, qui joue un rôle manifestement important, n’est pas présent dans notre hémicycle. Quoi qu’il en soit, l’annonce est retardée jusqu’à la semaine prochaine pour que le Gouvernement puisse intervenir.
De quoi s’agit-il ? Un appel d’offres a été lancé pour les services d’assistance téléphonique du Syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF. Or le seul critère qui semble être retenu, mes chers collègues du Front de gauche, ce n’est pas le maintien de l’emploi, mais c’est le coût !
En découleraient immédiatement 80 licenciements. Deux centres d’appels fermeraient, respectivement situés à Fontenay-le-Comte, en Vendée, et à Saint-Avold, en Moselle, deux communes où ils sont les plus gros employeurs ! Le plan social est annoncé.
M. Philippe Dallier. Bravo !
M. Francis Delattre. Monsieur le ministre, il faut réagir. Si, sur des sujets aussi importants, la parole publique est aussitôt démentie par les faits de façon aussi flagrante, nous allons tous avoir un problème de crédibilité.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous en avez déjà un !
M. Francis Delattre. Je compte sur vous pour empêcher cette délocalisation, sans doute intéressante pour le STIF puisque le coût d’une heure de centre d’appel serait de 14 euros au Maroc, contre 28 euros en Île-de-France. Toutefois, au moment où nous exprimons tous nos regrets de ne pas être intervenus face aux délocalisations industrielles,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous avez des regrets ?
M. Francis Delattre. … il serait paradoxal de laisser les délocalisations de services se poursuivre à un rythme aussi élevé.
Que reste-t-il de la parole de M. Montebourg, qui est chargé du redressement productif ? Quand il connaîtra de cette affaire, je crois qu’il va faire : « Vroum, vroum » ! (Sourires.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le niveau monte.
M. le président. L'amendement n° 64 rectifié, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la fin de la première phrase du 2° du 3. de l’article 158 du code général des impôts, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 20 % ».
II. – Le I ci-dessus est applicable pour l’établissement des impositions perçues en 2012.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Inspiré d’une proposition formulée par le Conseil des prélèvements obligatoires, le présent amendement vise à réduire de 40 % à 20 % le taux de l’abattement proportionnel sur le montant des dividendes perçus.
Le niveau de cet abattement, qui a remplacé l’avoir fiscal, pouvait se justifier dans le passé, quand le taux de l’impôt sur les sociétés était de l’ordre de 50 %. Or celui-ci est aujourd'hui de 33,33 %, le taux effectif s’élevant plutôt à 12 % ou 13 %, et l’on constate que, en pratique, il est très faible pour les grandes entreprises et plus élevé pour les petites.
En effet, comme chacun le sait, les unes pratiquent avec dextérité l’optimisation fiscale – il en fut question ces derniers temps –, et parfois plus, comme semble l’avoir clairement montré le travail accompli par la commission d’enquête du Sénat sur l’évasion fiscale (Mme Nathalie Goulet approuve.), quand les autres ont souvent au bilan des dettes envers la clientèle en souffrance. De plus, de nombreux bénéfices échappent à cette imposition grâce à divers dispositifs, notamment ce que nous appelons la « niche Copé ».
Dans son rapport sur la progressivité et les effets redistributifs des prélèvements obligatoires sur les ménages, le Conseil des prélèvements obligatoires a estimé à quelque 2 milliards d'euros le coût fiscal pour l’année 2009 de ce seul abattement sur les dividendes.
Bien entendu, nous visons ici les plus gros bénéficiaires de la dépense fiscale associée au crédit d’impôt sur les dividendes, qui ne fait que conforter leur situation déjà très privilégiée, et non les tout petits détenteurs de titres et de parts de société. Au travers de cet amendement, nous nous rallions à la juste position du Conseil des prélèvements obligatoires, qui a préconisé de réduire quelque peu la portée de la mesure.
Je me permets également de faire observer que la présente disposition a été votée en novembre dernier par le Sénat, dans sa configuration politique actuelle, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2012. Son adoption dans le cadre de ce collectif marquerait donc la constance et la continuité de la majorité sénatoriale, au service du redressement des comptes publics et de la justice fiscale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je confirme les propos qui viennent d’être tenus : cette disposition a bien été votée par le Sénat lors du projet de loi de finances pour 2012. Si elle était entrée en vigueur, elle aurait produit ses effets au cours de la présente année. Toutefois, si nous l’intégrons aujourd'hui dans le projet de loi de finances rectificative, elle n’aura pas d’incidence en 2012, mais seulement en 2013.
Or nous sommes convenus que toutes les mesures qui auraient un effet en 2013 et qui s’inscriraient dans le cadre d’une réforme globale de l’impôt sur le revenu seraient soumises à notre discussion à l’automne prochain.
Mes chers collègues, je partage votre philosophie et souscris à vos objectifs. Néanmoins, pour l’instant, je vous suggère de retirer cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’émets un avis défavorable, pour des raisons de calendrier déjà maintes fois évoquées. Nous ne pouvons corriger dans ce projet de loi de finances rectificative tout ce qui fut fait pendant cinq ans.
M. le président. Monsieur Bocquet, l'amendement n° 64 rectifié est-il maintenu ?
M. Éric Bocquet. Oui, je le maintiens, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 227, présenté par MM. Yung et Leconte, Mmes Lepage et M. André, MM. Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le 1 du I de l’article 244 bis A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« I. - 1. Sous réserve des conventions internationales, les plus-values, telles que définies aux e bis et e ter du I de l'article 164 B, réalisées par les personnes et organismes mentionnés au 2 du présent I lors de la cession des biens ou droits mentionnés au 3 du même I sont soumises à un prélèvement selon le taux fixé au premier alinéa de l'article 200 B. Par dérogation au présent alinéa, le taux est porté à 50 % lorsque les plus-values sont réalisées par ces mêmes personnes ou organismes lorsqu'ils sont domiciliés, établis ou constitués hors de France dans un État ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A.
« Le présent 1 n'est pas applicable aux cessions d'immeubles réalisées par des personnes physiques ou morales ou des organismes mentionnés au premier alinéa, qui exploitent en France une entreprise industrielle, commerciale ou agricole ou y exercent une profession non commerciale à laquelle ces immeubles sont affectés. Les immeubles doivent être inscrits, selon le cas, au bilan ou au tableau des immobilisations établis pour la détermination du résultat imposable de cette entreprise ou de cette profession.
« Les organisations internationales, les États étrangers, les banques centrales et les institutions financières publiques de ces États sont exonérés de ce prélèvement dans les conditions prévues à l'article 131 sexies. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été retiré.
L'amendement n° 208, présenté par MM. Percheron et Delebarre, est ainsi libellé :
Après l'article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 285 octies du code des douanes, il est inséré un article 285 nonies ainsi rédigé :
« Art. 285 nonies. – I. - À compter du 1er août 2012, il est institué une taxe de sureté portuaire au profit des ports maritimes de commerce.
« II. - La taxe est due par toute entreprise de commerce maritime et s’ajoute au prix acquitté par le client.
« III. - La taxe est assise sur le nombre de passagers et le volume de fret embarqués par l’entreprise de commerce maritime dans le port maritime.
« IV. - Son produit est arrêté chaque année par l’autorité portuaire après avis du concessionnaire, dans la limite d’un plafond fixé à la somme des dépenses liées aux installations et services de sécurité ainsi que des mesures prises dans le cadre des contrôles aux frontières de l’espace Schengen en application des engagements internationaux de la France constatés l’année précédente auxquelles s’ajoutent 2 %.
« V. - Le produit de la taxe est affecté dans chaque port au financement des installations et services de sûreté ainsi que des mesures prises dans le cadre des contrôles aux frontières de l’espace Schengen en application des engagements internationaux de la France.
« VI. - La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée par le service des douanes sous les mêmes règles, garanties, sanctions et privilèges qu’en matière de droit de douane.
« VII. - Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 23, présenté par M. Daudigny, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la troisième phrase du 5° et à la dernière phrase du 5° bis du II de l’article L. 136-2, le nombre : « trente » est remplacé par le nombre : « dix » ;
2° À la deuxième phrase du douzième alinéa de l’article L. 242-1, le nombre : « trente » est remplacé par le nombre : « dix ».
II – Le I s’applique aux indemnités versées à compter du 1er septembre 2012.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales, rapporteur pour avis. Au travers de cet amendement, nous souhaitons viser l’une des niches sociales les plus critiquées par les rapports d’évaluation réalisés ces dernières années, aussi bien par la Cour des comptes que par le Conseil des prélèvements obligatoires, à savoir les indemnités de rupture du contrat de travail ou de cessation des fonctions des dirigeants ou mandataires sociaux.
En matière de prélèvements sociaux, ces indemnités bénéficient d’une exemption d’assiette qui, selon le Comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, non seulement est source d’illisibilité et d’iniquité, mais encourage les pratiques d’optimisation. Le niveau de cette exemption et sa légitimité même devront donc, à notre sens, être sérieusement réexaminés.
Cet amendement vise, dans un premier temps, à réduire le champ des indemnités qui bénéficient de ce dispositif, les plus élevées d’entre elles, parfois qualifiées de « parachutes dorés », étant assujetties dès le premier euro ; il s'agit aujourd'hui des indemnités supérieures à trente fois le plafond de la sécurité sociale, soit près de 1,1 million d’euros.
Nous proposons d’abaisser le seuil à dix fois le plafond de la sécurité sociale, soit environ 360 000 euros. Sur proposition de la commission des affaires sociales, le Sénat avait déjà adopté un amendement en ce sens lors du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 25.
Article 26
I. – Le II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin de la première phrase, le taux : « 14 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;
2° La deuxième phrase est supprimée.
II. – Le premier alinéa de l’article L. 137-14 du même code est ainsi modifié :
1° À la première phrase, le taux : « 8 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;
2° La seconde phrase est supprimée.
III. – Le I est applicable aux options consenties et aux attributions effectuées à compter du 11 juillet 2012.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, sur l'article.
Mme Isabelle Debré. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, votre majorité a décidé d’une hausse du prélèvement social sur les stock-options et les attributions d’actions gratuites, en justifiant l’augmentation de ce prélèvement par la faible utilité sociale et économique de ces formes de rémunérations, qui ne seraient pas liées, selon vous, à la production de valeur.
Je suis profondément convaincue que vous commettez une erreur manifeste d’appréciation.
Vous confondez à l’évidence les stock-options et les rémunérations excessives des dirigeants d’entreprise, que nous condamnons bien évidemment.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vraiment ?
Mme Isabelle Debré. Il ne me paraît pas anormal que les entreprises cherchent à attirer vers elles les meilleurs managers.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ceux qui licencient et délocalisent le plus !
Mme Isabelle Debré. Les stock-options sont, dans cette perspective, un important élément de motivation des cadres dirigeants, qui doit être préservé. Il faut noter aussi qu’elles constituent une charge non pas pour les entreprises, mais pour leurs actionnaires qui acceptent, si elles sont levées, une dilution de leurs participations dans la société concernée.
En outre, comment pouvez-vous croire un instant que les stock-options ne sont pas liées à la production de valeur ? Bien au contraire, il est évidemment dans l’intérêt des cadres dirigeants de mettre en place dans leur entreprise une gestion efficace, créatrice de richesses.
J’aurais aimé que l’on puisse tenir compte tout particulièrement de la situation des start-up, dont la création suppose une prise de risque importante. En échange de salaires relativement bas, leurs fondateurs bénéficient souvent de l’attribution de stock-options, ce qui ne me paraît pas indécent, loin de là. Et que dire de votre position sur les actions gratuites qui, je le rappelle, bénéficient à la fois aux salariés et aux mandataires sociaux, sans, le plus souvent, que ces attributions constituent une charge pour les entreprises ? Il s’agit, là encore, d’un élément de motivation des forces vives de l’entreprise.
Je tiens, en outre, à rappeler que, depuis la loi du 3 décembre 2008 en faveur des revenus du travail, les mandataires sociaux ne peuvent bénéficier d’attributions d’actions gratuites qu’à une condition expresse : il faut que l’ensemble du personnel de la société et au moins 90 % du personnel des filiales françaises bénéficient soit de stock-options, soit d’actions gratuites, soit d’une majoration de l’intéressement ou de la participation par rapport au dispositif existant avant la promulgation de cette loi.
De façon générale, nous savons tous que nos entreprises, en particulier celles de taille moyenne, sont insuffisamment capitalisées et qu’il est de l’intérêt de tous de permettre aux salariés d’être associés au capital de leurs entreprises. Dès lors, gardez-vous de tout manichéisme et comprenez qu’il n’est pas dans l’intérêt de la nation d’alourdir les charges de nos entreprises et de les priver de formes de motivation en usage à peu près partout dans le monde.
Je ne voterai pas, dans ces conditions, votre proposition.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, sur l'article.
Mme Annie David. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, comme vous le savez, le groupe CRC est opposé au mécanisme même des stock-options, c’est-à-dire à la pratique consistant à octroyer à des salariés d’une entreprise, généralement les hauts dirigeants – Mme Debré l’a rappelé –, déjà les mieux rémunérés, le droit d’acheter une quantité d’actions à un prix fixe, non soumis à l’aléa de la bourse, afin de les revendre après que ces actions ont réalisé d’importants dividendes.
En ce sens, les stock-options constituent un complément de rémunération, à ceci près que, à la différence du salaire, elles sont inégalitaires, puisqu’elles sont réservées à une poignée de bénéficiaires et ne participent que partiellement au financement solidaire de notre protection sociale.
Mme Isabelle Debré. Et les actions gratuites pour les salariés ?
Mme Annie David. Je ne vous ai pas interrompue, madame Debré !
Mme Isabelle Debré. Une fois n’est pas coutume !
Mme Annie David. Je vous remercie donc de me laisser aller au bout de mon intervention.
De nombreux économistes présentent d’ailleurs les stock-options – et c’est aussi notre conviction – comme des éléments financiers nuisibles, qui peuvent sans doute satisfaire leurs quelques possesseurs, mais qui desservent les intérêts même de l’entreprise.
Aujourd’hui, les cadres dirigeants ont le regard fixé sur le cours de leurs actions, alors que, dans le passé, ils observaient les statistiques de production ou de réalisation d’objectifs. Ce qui compte pour eux, aujourd’hui, c’est de pouvoir mesurer quasiment dans l’instant les conséquences de leurs décisions sur les cours de bourse, donc, par voie de conséquence, sur la valeur de leur propre portefeuille d’actions.
Voilà comment, peu à peu, depuis les années quatre-vingt-dix, les stock-options sont devenues de véritables lignes directrices imposant aux salariés le tassement de leurs salaires et la dégradation de leurs conditions de travail. Car, dans les faits, plus on précarise les salariés, plus les actions grimpent.
Enfin, comment ignorer que les stock-options participent également de cet étau financier que nous ne cessons de dénoncer ? En effet, pour offrir des stock-options toujours plus importantes, les entreprises sont appelées à racheter leurs propres actions sur les marchés financiers, ce qui s’opère par un prélèvement sur les richesses produites dans les entreprises, c'est-à-dire, indirectement, sur les salaires.
Pour toutes ces raisons, nous considérons qu’il faut adopter des mécanismes fiscaux qui soient clairement désincitatifs et qui, progressivement, contraignent les employeurs à renoncer à l’attribution de stock-options.
Nous souscrivons donc pleinement aux dispositions de cet article et souhaitons que ce mouvement soit poursuivi dans le temps, jusqu’à imposer aux stock-options un niveau de prélèvements supérieur aux taux de cotisations sociales.
Mme Debré affirmait à l’instant qu’il était normal que les entreprises souhaitent attirer à elles les meilleurs éléments, les stock-options étant un moyen d’atteindre cet objectif.
Il convient de noter que les salariés victimes de rupture conventionnelle sont parallèlement de plus en plus nombreux dans les entreprises. Peut-être n’avons-nous pas le même souci de maintenir les salariés dans l’entreprise et de défendre leur pouvoir d’achat.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 115 est présenté par Mme Des Esgaulx et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L’amendement n° 192, déposé par MM. P. Dominati, Cambon, Gilles, J. Gautier, Beaumont et Dassault, et Mlle Joissains.
Tous deux sont ainsi rédigés :
Alinéa 7
Remplacer la date :
11 juillet
par la date :
1er août
La parole est à M. Philippe Dominati, pour défendre l’amendement n° 115.
M. Philippe Dominati. Cet amendement a pour objet d’aligner la date d’entrée en vigueur de la mesure proposée sur celle de la hausse du forfait social, autrement dit sur la date fixée par l’Assemblée nationale, différente de celle qu’a retenue initialement le Gouvernement.
Monsieur le président, je souhaite présenter également l’amendement n° 191 rectifié, qui concerne, lui aussi, un problème de date.
Les plans de stock-options sont difficiles à mettre en œuvre au sein d’une entreprise. Ils nécessitent un dialogue social. Le comité d’entreprise doit être consulté. Des réunions avec le personnel doivent être organisées. Ces plans doivent être approuvés lors d’une assemblée générale et validés par le conseil d’administration. Trois étapes significatives doivent donc être respectées.
Un certain nombre de plans d’attributions gratuites d’actions en cours doivent être modifiés du fait de l’évolution de la fiscalité.
L’amendement n° 191 rectifié a pour objet de faire en sorte que les plans engagés avant la date retenue par l’Assemblée nationale puissent relever de l’ancienne fiscalité. Il convient donc de retarder la date d’entrée en vigueur de la mesure que nous examinons et de la porter du 11 juillet au 1er août prochain. À défaut, ces plans d’attributions d’actions pourraient être remis en cause au cours de l’étape intermédiaire. Compte tenu de l’augmentation des charges patronales, la conséquence la plus néfaste pourrait être l’abandon pur et simple du plan prévu par l’entreprise, malgré l’important dialogue social qui a déjà eu lieu.
Une telle situation serait tout à fait anormale. Je pense cependant que tel n’est pas le souhait du Gouvernement, qui ne doit pas être à quinze jours près.
M. le président. L’amendement n° 192 n’est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 58 est présenté par Mme Des Esgaulx.
L'amendement n° 191 rectifié est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Gilles, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Toutefois, lorsque les plans d’attributions gratuites, pris en application d’un accord d’entreprise signé avant le 11 juillet 2012, n’ont pas été approuvés par le conseil d’administration avant cette même date, le I est applicable à compter du 1er août 2012.
L’amendement n° 58 n’est pas soutenu.
L’amendement n° 191 rectifié a été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 115 et 191 rectifié ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances est défavorable à l’amendement n° 115 car il lui semble nécessaire d’essayer d’éviter les comportements d’optimisation des employeurs, même si les risques en la matière sont assez limités d’ici au 1er août, vous en conviendrez, mes chers collègues.
En revanche, la commission est plutôt favorable à l’amendement n° 191 rectifié. L’intention de ses auteurs peut se comprendre, à savoir lutter contre l’optimisation et, dans le même temps, épargner les entreprises qui ont programmé depuis longtemps les opérations dont il s’agit.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour les mêmes raisons que la commission des finances, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 115. En revanche, il s’en remet à la sagesse du Sénat sur l’amendement n° 191 rectifié.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote sur l'amendement n° 115.
Mme Isabelle Debré. Cet amendement aurait pu faire consensus.
L’Assemblée nationale a décidé d’avancer la date d’entrée en vigueur de la hausse du prélèvement social sur les stock-options et les attributions gratuites d’actions au 11 juillet de cette année. Pourquoi, pour notre part, proposons-nous la date du 1er août ?
La date retenue par l’Assemblée nationale, outre son caractère rétroactif, n’a aucune logique, si ce n’est de correspondre à celle de l’examen du projet de loi de finances rectificative par sa commission des finances. Nos collègues de la majorité de l’Assemblée nationale penseraient-ils que la date d’entrée en vigueur de certaines mesures contenues dans le collectif budgétaire doit être identique à celle de l’examen de ce texte par leur commission des finances et préalable à celle de l’examen du projet de loi par le Sénat ? Quel manque de considération pour le travail de la commission des finances sénatoriale et de M. le rapporteur général !
M. Albéric de Montgolfier. Quel mépris pour le Sénat !
Mme Isabelle Debré. À quoi sert le Sénat ? C’est dans cet esprit que nous avions déposé cet amendement. Il me semble plus cohérent et plus décent à l’égard de la Haute Assemblée de retenir la date du 1er août. Monsieur le ministre, pouvez-vous me fournir des explications sur ce point ?
M. Albéric de Montgolfier. Le Sénat sert-il encore à quelque chose ?
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 115.
Mme Catherine Procaccia. Le Gouvernement ne répond pas ?
Mme Catherine Procaccia. Vous êtes en train de nier le rôle du Sénat !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Vous le voyez, le Sénat reconnaît son opposition !
M. le président. Je mets aux voix l'article 26, modifié.
(L'article 26 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 26
M. le président. L'amendement n° 5 rectifié, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Fischer, Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 2° bis de l’article 1001 du code général des impôts, le taux : « 7 % » est remplacé par le taux : « 3,5 % ».
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, pour moitié, par la hausse de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale et, pour moitié, par la hausse du taux mentionné à l’article L. 245-16 du même code.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Par le biais de cet amendement, nous proposons de supprimer le doublement de la taxe sur les contrats santé solidaires et responsables, ou taxe spéciale sur les conventions d’assurance, la TSCA.
En effet, cette disposition est contre-productive, notamment d’un point de vue sanitaire. Les contrats solidaires et responsables bénéficiaient d’une fiscalité dérogatoire aux contrats d’assurance dits « ordinaires », en raison des contraintes particulières qui pesaient sur eux. Ainsi, l’assureur doit respecter l’esprit du parcours de soins et, notamment, ne pas rembourser les franchises, la part du ticket modérateur majorée ou les dépassements d’honoraires des spécialistes consultés en dehors du parcours de soins.
En revanche, le contrat doit intégrer certains remboursements minimaux tels que le ticket modérateur sur la consultation, la pharmacie, les actes techniques ou le forfait hospitalier.
Ces contrats participent donc déjà à l’effort de réduction des dépenses de santé. En réalité, lorsque je dis « ces contrats, je devrais dire « les assurés, qui, en souscrivant de tels contrats, consentent à voir augmenté leur reste à charge en contrepartie d’une réduction fiscale et d’un montant de cotisations plus intéressant que celui des contrats ordinaires.
Depuis 2011, une double peine leur est imposée. Non seulement ils sont victimes de la hausse de la fiscalité applicable en la matière, mais ils continuent à supporter les contraintes spécifiques qui sont liées à ces contrats.
Selon moi, il faut mener une politique cohérente en matière de niches fiscales. L’efficacité de chaque dispositif doit être prise en compte. Or le mécanisme en cause s’est vu attribuer la note 3 par le comité d’évaluation. J’emploie volontairement le mot « mécanisme », car en l’occurrence le terme « niche » me semble inapproprié, dès lors qu’il s’agit d’une fiscalité dérogatoire, profitant à tous, jouant un véritable rôle en matière de santé publique.
Dans le contexte économique actuel, marqué par une baisse considérable du pouvoir d’achat, toute mesure qui pourrait avoir pour effet de provoquer ou d’accentuer le mouvement de démutualisation doit être proscrite. Sans le recours aux mutuelles complémentaires, un nombre de plus en plus élevé de nos concitoyens n’auront pas d’autre choix que de sélectionner les soins, de les retarder, voire de privilégier le recours aux services d’urgence, ou encore de renoncer à des politiques de prévention.
Le présent amendement a également pour objet de réparer au plus vite une injustice, créée, nous le constatons, par le précédent gouvernement et qui ponctionne les assurés sociaux de plus de 1 milliard d’euros par an.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission est défavorable à cet amendement, compte tenu du coût de la mesure proposée : 1 milliard d’euros. Néanmoins, elle se félicite que la question de l’accès aux soins et de la place des complémentaires, qui figure en filigrane dans ce texte, soit l’une des priorités affichées par le Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est une question à plus de 1 milliard d’euros. Le coût de la mesure proposée est un peu lourd pour le présent projet de loi de finances rectificative. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement, même s’il comprend les raisons qui ont conduit ses auteurs à le déposer et à l’avoir défendu avec des arguments qui résonnent.
Mme Annie David. Et pour le futur, monsieur le ministre ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis. L’amendement que nous examinons nous amène à évoquer la situation particulièrement inquiétante des étudiants en matière sanitaire et sociale.
Au mois de novembre dernier, la majorité sénatoriale avait adopté un amendement exonérant de TSCA les ressortissants du régime étudiant, mesure supprimée ultérieurement au cours de la navette par l’Assemblée nationale.
Lors de nos débats qui se sont déroulés le 8 novembre 2011, Mme la présidente de la commission des affaires sociales, Annie David, avait fait part de la préoccupation de l’ensemble des membres de notre commission sur cette question et de sa décision de mettre en place un groupe de travail « qui proposera soit de maintenir, si sa nécessité est reconnue, [cette] disposition […], soit de la reconsidérer dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale si elle ne répond finalement pas aux besoins ».
Ce groupe de travail est à la tâche et devrait être en mesure de présenter ses conclusions vers la fin du mois de septembre.
Les mutuelles étudiantes ont en effet appelé notre attention non seulement sur la question du doublement de la TSCA sur les contrats complémentaires solidaires et responsables, mais également sur les moyens d’action en matière de prévention et d’éducation à la santé, notamment à l’égard des services universitaires de médecine préventive, les programmes de prévention développés par les mutuelles étudiantes et les crédits des projets régionaux de santé.
Par ailleurs, toujours au mois de novembre dernier, nous avions regretté que la réforme de la TSCA réduisant l’écart de taux applicables entre les contrats complémentaires solidaires et responsables et les autres ait également pour conséquence de contribuer à faire perdre leur visibilité aux premiers, dont le régime de taxation préférentiel était jusqu’alors justement destiné à les promouvoir.
Il nous avait été répondu que cet effort de promotion avait atteint son objectif, puisque 90 % des contrats complémentaires santé étaient des contrats solidaires et responsables. Cela revenait évidemment à figer le jugement à un moment donné. La réalité n’est pas pour autant statique et la promotion de ce type de contrats doit être poursuivie.
Il appartiendra au Gouvernement d’en trouver l’équilibre avec les organismes d’assurance complémentaire, notamment au regard de l’entrée en vigueur de la directive Solvabilité II.
On le constate, dans le contexte économique actuel, l’efficience des décisions qui doivent être prises dépend fortement à la fois d’une appréhension globale de la situation des étudiants et d’une nécessaire révision des contrats complémentaires solidaires et responsables.
C’est ce sur quoi je tenais à appeler votre attention, monsieur le ministre.
Quant à l’amendement n° 5 rectifié, je suivrai l’avis du Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Monsieur Watrin, je voterai en faveur de votre amendement, si vous ne le retirez pas.
Dans cet hémicycle, j’ai toujours défendu les contrats responsables, contre l’avis d’une partie de la majorité de l’époque. Je me suis opposée à la première taxation de ces contrats. Et chaque fois, j’étais bien seule. Je suis heureuse de constater que, depuis deux ou trois ans, la gauche rejoint mon point de vue. Je reste toujours opposée à une taxation des contrats d’assurance car cela revient à taxer non pas les compagnies d’assurance, mais les assurés, puisque ce sont eux qui paient.
Monsieur Daudigny, vous avez évoqué le dossier de la sécurité sociale des étudiants traité avec Ronan Kerdraon. Je constate que vous avez été plus sensible que moi au lobbying auquel s’est livrée une mutuelle étudiante à ce sujet.
J’ai répondu pour ma part qu’il était prématuré de donner un quelconque avis sur la situation des mutuelles. Ronan Kerdraon et moi-même n’avons pas encore rassemblé les éléments de réponse : nous examinons actuellement la réalité des actions de prévention et la teneur des contrats que proposent les complémentaires afin de déterminer s’ils sont ou non véritablement différents.
Pour l’heure, je ne porte aucun jugement, car, je l’ai dit, il serait totalement prématuré de porter un avis, dans un sens ou dans l’autre, sur la situation des mutuelles, mais je souhaite que tout au moins les rapporteurs et les personnes qui ont participé au groupe de travail puissent en discuter avant de se faire les porte-parole des mutuelles étudiantes.
M. le président. Monsieur Watrin, l’amendement n° 5 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Watrin. Ce qu’a dit M. Daudigny va, certes, dans le bon sens, mais je n’ai pas entendu exactement le même discours de la part du Gouvernement. Or je réaffirme qu’il s’agit bien ici d’une question de santé publique et de justice, raison pour laquelle je ne peux que maintenir cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 6 rectifié quater, présenté par Mmes David, Pasquet et Cohen, MM. Fischer, Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 137-11 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
I. - Le I est ainsi modifié :
1° Au 1°, le taux « 16 % » est remplacé par le taux « 32 % » ;
2° Au troisième alinéa du 2°, le taux : « 12 % » est remplacé par le taux : « 24 % » et le taux : « 24 % » est remplacé par le taux : « 48 % ».
II. - Le 1° du I est applicable aux rentes versées à compter du 1er janvier 2013. Le 2° du I est applicable aux versements, comptabilisations ou mentions réalisés à compter des exercices ouverts après le 31 décembre 2012.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Si vous le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps l’amendement n° 7 rectifié puisqu’il a également rapport aux retraites chapeaux.
M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mmes David, Pasquet et Cohen, MM. Fischer, Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et qui est ainsi libellé :
Après l’article 26
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II bis de l’article L. 137–11 du code de la sécurité sociale, le mot : « huit » est remplacé par le mot : « cinq ».
Veuillez poursuivre, ma chère collègue.
Mme Annie David. Pour mon groupe, les retraites chapeaux constituent des mécanismes profondément inégalitaires puisqu’il s’agit de pensions « surcomplémentaires », généralement très généreuses, dont bénéficient à vie des dirigeants de grandes entreprises, d’ailleurs assez peu nombreux puisqu’ils sont à peine plus de 200 selon un article des Échos publié voilà moins d’un an.
Le débat sur les retraites chapeaux n’est pas nouveau puisque chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale et chaque projet de loi de finances, pour s’en tenir à ces deux exemples, est l’occasion pour nous de rappeler les abus que ces mécanismes permettent ou les scandales qu’ils engendrent.
Ainsi, en 2008, nous parlions de l’ancien P-DG de Carrefour, qui avait profité d’une retraite chapeau de 1,2 million d’euros. En 2009, c’était au tour du président de la Société Générale, qui, lui, avait perçu 1 million d’euros, montant d’ailleurs bien inférieur aux 2,2 millions d’euros par an que touchait l’ex-président de la société Vinci… En 2010, il s’agissait à nouveau de Carrefour, dont le directeur général avait négocié le droit à bénéficier d’une retraite chapeau de 500 000 euros à la seule condition de rester en poste au moins cinq ans.
On voit donc que, pour certains, la retraite, c’est 500 000 euros à vie dès lors qu’ils acceptent de rester cinq ans dans une entreprise, alors que, pour beaucoup d’autres, la rupture conventionnelle est le seul droit assorti à la précarité de leur emploi !
Ces exemples montrent combien la pratique des retraites chapeaux est scandaleuse, singulièrement au regard des politiques d’austérité salariale que ces mêmes entreprises imposent à leurs salariés.
Il nous apparaît donc particulièrement légitime que ces mécanismes, qui profitent majoritairement aux plus riches soient davantage soumis à contribution qu’ils ne le sont.
Nous n’ignorons pas les évolutions intervenues dans le passé, notamment l’instauration d’une taxation accrue de 30 % sur les rentes supérieures à huit fois le plafond de la sécurité sociale et la mise en place d’une contribution de 14 % à la charge des pensionnés.
Cependant, nous considérons qu’il faut aller plus loin dans la mesure où les sommes dont on parle ici sont autant d’argent qui manque dans les entreprises pour rémunérer le travail ou pour investir dans la recherche et le développement de l’entreprise.
C’est pourquoi nous proposons de hausser les taux qui s’appliquent à ces mécanismes.
Quant au taux spécifique de 30 % acquitté par les employeurs, nous le maintenons, mais non plus seulement pour les retraites chapeaux qui atteignent non plus huit fois mais cinq fois le plafond de la sécurité sociale.
En clair, le taux de contribution patronale de 30 % serait applicable dès lors que le montant de la retraite chapeau serait supérieur à 176 760 euros par an, contre 282 816 euros aujourd'hui.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement n° 6 rectifié quater vise à augmenter les différents taux des contributions employeurs sur les retraites chapeaux.
La commission est favorable à cet amendement, par coordination avec la hausse du forfait social qui touche d’autres retraites complémentaires.
La contribution patronale sur les retraites chapeaux peut être assise soit sur les rentes, soit sur les primes, soit sur la partie de la dotation aux provisions gérée en interne par l’entreprise.
Après avoir analysé ces dispositifs, la commission a émis un avis favorable.
En revanche, s’agissant de l’amendement n° 7 rectifié, qui a pour objet d’abaisser de huit à cinq plafonds annuels de la sécurité sociale le seuil d’assujettissement des retraites chapeaux à la contribution patronale additionnelle de 30 %, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement donne un avis défavorable à l’amendement n° 7 rectifié mais un avis favorable à l’amendement n° 6 rectifié quater, estimant que l’augmentation des contributions à la charge des entreprises sur les retraites chapeaux qu’elles servent est une mesure probablement nécessaire et heureuse pour les finances publiques.
Je vous remercie donc, madame David, d’avoir pris l’initiative de cette mesure et de nous aider, dans le cadre du présent projet de loi de finances rectificative, à restaurer les finances du pays.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je siège depuis 2007 dans cet hémicycle et, chaque fois que Mme David, qui pourra en témoigner, propose un amendement sur ce sujet, je le vote, que notre collègue soit dans l’opposition ou dans la majorité, moi étant entre les deux. (Exclamations amusées sur les travées de l'UMP.)
Par cohérence, je vais évidemment voter, comme je le fais chaque année, l’amendement n° 6 rectifié quater, en insistant, mes chers collègues, sur l’importance de l’image que donnent à l’extérieur nos débats en cette période extrêmement difficile.
Vous disiez tout à l’heure que le Sénat n’avait plus d’importance et ne votait qu’en fonction des positions de la commission des finances de l’Assemblée nationale. C’était un bon argument, mais je crois que nous avons aujourd'hui, avec cet amendement en particulier, l’occasion de montrer la solidarité dont sont capables les sénateurs pour amender un dispositif dont le moins que l’on puisse dire est qu’il est choquant.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 26.
Je vais mettre aux voix l'amendement n° 7 rectifié.
Mme Annie David. Je le retire, monsieur le président.
3
Modification de l'ordre du jour
M. le président. Par lettre en date de ce jour, M. Alain Vidalies, ministre chargé des relations avec le Parlement, demande au Sénat de poursuivre l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2012 ce soir, vendredi 27 juillet, éventuellement demain, samedi 28, et dimanche 29 juillet, le matin, l’après-midi et le soir.
M. Philippe Dallier. C’est pour nous faire peur ! (Rires.)
M. Jean-Pierre Caffet. Non, pour vous donner le temps de vous exprimer ! (Nouveaux rires.)
M. Philippe Dallier. C’est de la provocation !
M. le président. Acte est donné de cette demande.
Il n’y a pas d’opposition ?...
L’ordre du jour des séances d’aujourd’hui vendredi 27 juillet, et des samedi 28 et dimanche 29 juillet est ainsi fixé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures cinquante-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à douze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures cinquante-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
4
Loi de finances rectificative pour 2012
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2012.
Dans la discussion des articles de la seconde partie, nous en sommes parvenus à l’article 27.
Article 27
I. – L’article L. 137-16 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° À la fin du premier alinéa, le taux : « 8 % » est remplacé par le taux : « 20 % » ;
2° Après le même premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, ce taux est fixé à 8 % pour les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit. » ;
3° Les trois derniers alinéas sont remplacés par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le produit de cette contribution est réparti conformément au tableau suivant :
« |
Pour les rémunérations ou gains soumis à la contribution au taux de 20 % |
Pour les rémunérations ou gains soumis à la contribution au taux de 8 % |
||
Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés |
5 points |
5 points |
||
Caisse nationale d’assurance vieillesse |
6 points |
|||
Fonds mentionné à l’article L. 135-1 Dont section mentionnée à l’article L. 135-3-1 |
9 points 0,5 point |
3 points 0,5 point |
» |
I bis (nouveau). – Au 3° de l’article L. 135-3 et au 1° du I de l’article L. 135-3-1 du même code, la référence : « au 2° de » est remplacée par le mot : « à ».
I ter (nouveau). – Au 4° de l’article L. 241-2 du même code, la référence : « au 1° de » est remplacée par le mot : « à ».
I quater (nouveau). – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 241-3 du même code, la référence : « et L. 137-12 » est remplacée par les références : « , L. 137-12 et L. 137-15 ».
II. – Les I à I quater s’appliquent aux rémunérations ou gains versés à compter du 1er août 2012.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, sur l'article.
Mme Isabelle Debré. En voulant augmenter le forfait social qui pèse sur les entreprises pour les sommes qu’elles versent à leurs salariés au titre de la participation et de l’intéressement, la majorité de gauche commet une double faute.
C’est tout d’abord une faute politique, car, mes chers collègues, vous allez pénaliser tous les salariés, notamment les plus modestes, ceux pour qui les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement constituent souvent leur seule capacité d’épargne.
Et cette épargne, vous ne pouvez l’ignorer, est utilisée fréquemment – pour ne pas dire principalement – comme apport personnel pour l’acquisition de leur première résidence.
Vous semblez également négliger le fait que la participation et l’intéressement permettent aux salariés de préparer leur retraite au moyen des plans d’épargne pour la retraite collectifs, les PERCO, et que les sommes déposées par les salariés sur ces plans d’épargne bénéficient souvent d’un abondement des entreprises.
Avec l’augmentation du forfait social, vous prenez la lourde responsabilité de mettre à mal l’épargne des salariés de nos entreprises, leur capacité à construire des projets et à se projeter dans l’avenir.
Contrairement à ce que vous n’avez cessé d’affirmer au cours de la campagne électorale, avec cette mesure, vous vous attaquez bien aux classes moyennes, à tous les salariés, quel que soit leur salaire.
Vous commettez aussi une deuxième faute, celle-là économique.
Vous avez toujours considéré – à tort – la participation et l’intéressement comme un substitut de salaire. Il n’en est rien puisqu’il n’y a distribution d’un intéressement et d’une participation que lorsque la situation économique des entreprises le permet ou que les objectifs contenus dans les plans d’intéressement sont atteints.
Ces deux dispositifs sont par nature aléatoires et ne sauraient être assimilés au salaire, par nature pérenne, des collaborateurs de l’entreprise.
La participation et l’intéressement correspondent à un complément de rémunération qui récompense les efforts de tous les salariés dans l’entreprise. Quand des profits sont réalisés, ils sont redistribués, ce qui est une bonne chose, redistribution qui s’opère parfois selon la règle des trois tiers chère à notre collègue Serge Dassault : un tiers pour les salariés, un tiers pour les actionnaires, un tiers réinvesti dans l’entreprise.
En augmentant le forfait social, vous ignorez toutes les études – notamment celles du sociologue Patrick Guiol, qui figure au nombre des penseurs de la gauche – démontrant que la participation et l’intéressement agissent comme un puissant facteur de cohésion et sont une source de motivation collective dans les entreprises.
Enfin, cette épargne collectée est affectée le plus souvent au financement des entreprises en capital. Or une des faiblesses des entreprises françaises, en particulier celles de taille moyenne, est leur sous-capitalisation.
En condamnant cette épargne, vous contribuez à affaiblir la compétitivité de nos entreprises. Par méconnaissance des réalités économiques et sociales, et peut-être par démagogie, vous vous attaquez à l’un des éléments les plus emblématiques de la politique de rassemblement que prônait le général de Gaulle. Vous cassez des dispositifs qui ont fait leur preuve. Vous pourrez malheureusement mesurer dans les mois à venir les dégâts de la politique régressive que vous menez.
Vous comprendrez donc aisément qu’il me soit totalement impossible de voter cet article. (MM. Philippe Dallier et Serge Dassault applaudissent.)
M. Jean-Claude Frécon. On en est désolé, mais on comprend ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, sur l'article.
Mme Frédérique Espagnac. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 27, qui augmente le taux du forfait social en le portant de 8 % à 20 %, s'inscrit dans un devoir de rattrapage fiscal. Tout travail mérite salaire et tout salarié mérite protection sociale. Comment cette protection est-elle payée ? Dans notre système, elle prend la forme de cotisations salariales et patronales. Dans ces conditions, pourquoi certaines rémunérations échapperaient-elles à la solidarité nationale, alors qu’elles sont issues du même rapport salarial ?
Frappée du sceau de la justice fiscale, la mesure prévue à cet article est justifiée par la réduction des niches sociales voulue par le Président de la République. Des acteurs du financement social avaient proposé d’opter pour une hausse graduelle du taux, de deux points par an, mais la Cour des comptes a récemment bien souligné l’urgence qui s’imposait à la France d’amorcer, sans délai, son redressement.
Aussi, nous proposons de porter le taux à 20 %, ce qui permettra de répondre, dans la cohérence, à cet impératif. Même avec une telle augmentation, le taux des prélèvements sociaux sur les salaires resterait cependant encore deux fois plus élevé, culminant à 42 %.
À l’inverse, le taux du forfait social serait deux fois moins élevé, ce qui reste suffisant pour que l’employeur y garde un intérêt, sans que cela créé un effet d’aubaine ou grève excessivement les finances sociales. Notre objectif est en effet d’éviter la substitution d’une épargne salariale – soumise au couple CSG-CRDS, mais pas aux cotisations sociales – aux hausses de salaires.
Vous aviez évalué une perte de recettes pour la sécurité sociale de 5,6 milliards d'euros en 2012. Vous vous êtes pourtant contentés d'une augmentation du taux du forfait social de deux points, espérant pour 2012 un rendement de 2,5 milliards d’euros, alors même que la Cour des comptes proposait déjà de le porter à 19 %. Il était urgent d’agir, mais vous avez préféré attendre. C'est visiblement encore le cas aujourd'hui...
C’est vous, la droite, qui avez instauré cette taxe en 2009. Vous qui nous reprochez aujourd'hui d’assommer les classes moyennes, vous aviez alors conscience de la nécessité de rapprocher les taux, mais vous avez préféré laisser prospérer la dette. Nous ne voulons pas spolier les travailleurs, ces 10 millions de salariés qui bénéficient de l’épargne salariale.
Vous le savez bien, cette cotisation est depuis l’origine supportée par les employeurs, et non par les salariés, et il n’a jamais été question de modifier cette assiette.
Vous qui nous reprochez de prendre le risque de pénaliser l’épargne salariale avec cette mesure, auriez-vous oublié que vos hausses successives n’ont en rien pénalisé son essor ? L’épargne salariale bondissait encore de 15 % en 2011 !
Mes chers collègues, notre politique est imprégnée de transparence. François Hollande a promis de procéder à cette augmentation, nous sommes là aujourd’hui pour respecter cet engagement.
Notre volonté est de bâtir un cadre budgétaire juste et équitable. Dès lors, nous ne renoncerons pas à cette augmentation du taux du forfait social, qui rapportera dès 2012 près de 550 millions d’euros et 2,3 milliards d'euros en année pleine. Dès lors, nous ne renoncerons pas à faire contribuer plus justement tous les revenus du travail pour le redressement des comptes. Nous renoncerons en revanche à l’attentisme, au mensonge, oserais-je dire à la fourberie, et, le 4 août approchant, aux privilèges. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. Jean-Marc Todeschini. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, sur l'article.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons déjà abordé ce sujet, mais il me semble que la confusion demeure sur ce qu’il faut entendre par intéressement et par participation.
Dans tous les camps politiques, on a imaginé une autre forme de relations au sein des entreprises : certains ont privilégié le dialogue social, d'autres ont essayé des formules un peu plus conflictuelles, d’autres encore ont cru au pouvoir des syndicats ou des comités, d'autres enfin, comme le général de Gaulle, ont souhaité le faire par l'association capital-travail, l'intéressement et la participation.
Contrairement à ce que j’ai pu entendre, le problème n'est absolument pas de savoir si, oui ou non, il s’agit d’un substitut ou d’un complément de salaire. L'élément premier de la participation et de l'intéressement, c'est de changer l'état d'esprit au sein d'une entreprise.
Le salaire, c’est la contrepartie d'un travail : il doit être rémunéré de manière cohérente et correcte ; il correspond à un certain nombre d'heures de présence du salarié dans l'entreprise. En revanche, l’intéressement et la participation permettent au salarié d’évoluer au sein de son entreprise dans un climat différent, qui n'est plus du tout celui du temps des patrons du début du XXe siècle, de s’impliquer totalement, afin que l'ensemble de l'entreprise se porte mieux et que soit créé de l’emploi.
La répartition de la richesse créée par l’entreprise au profit de ceux-là mêmes qui l’ont permise, c'est cela l'intéressement et la participation ! Ce n'est pas un complément ou un substitut de salaire.
Vous cherchez des moyens de réduire les niches fiscales, vous voulez fiscaliser l'intéressement et la répartition de la même manière que les salaires. Or la méthode que vous employez est la négation même de l'intéressement et de la répartition ! Je le répète, ils sont la garantie d'un autre climat et d’un changement d’état d’esprit dans l’entreprise. Si on ne le comprend pas, alors ce dispositif perd tout son sens. Pourquoi un taux de 8 %, 20 % ou 12 % ? Cela n'a aucun sens ! Sauf à considérer que cela n’a rien à voir avec le salaire et que c’est un élément d'intégration sociale, d’équité, de justice.
À gauche, on se demande toujours : pourquoi le profit des entreprises ne bénéficierait-il qu'aux actionnaires ? On vous répond : banco ! Faisons de la participation et de l'intéressement pour que les salariés qui contribuent à la richesse de l'entreprise en profitent aussi. Et vous nous répondez que vous voulez fiscaliser ces outils comme si c'était du salaire. Il faut savoir !
De deux choses l'une : ou bien vous considérez que l'intéressement et la participation permettent un meilleur dialogue social, une meilleure intégration, une meilleure répartition des profits, lorsque l’entreprise en génère, et ce n'est pas du salaire ; ou bien vous considérez que ce n'est qu'un supplément de salaire et vous tuez alors l'idée même de participation.
Pour ma part, je suis totalement opposé à votre manière de procéder avec cet article 27. Je partage tout à fait l'analyse d’Isabelle Debré : ce n'est pas un complément de salaire, c'est un autre état d'esprit, une autre manière de voir la répartition des profits. Ne tuez pas cette idée en la réduisant à un complément de salaire !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 106 est présenté par Mme Debré, M. Dassault et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 130 rectifié est présenté par MM. Marseille, Dubois, J. Boyer, Maurey et Tandonnet et Mme Férat.
L'amendement n° 204 est présenté par MM. Mézard, Chevènement et Plancade.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Serge Dassault, pour présenter l'amendement n° 106.
M. Serge Dassault. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après la suppression de la déductibilité fiscale de la provision pour investissement dont nous avons débattu hier et que j'ai voulu empêcher sans succès, vous vous attaquez maintenant à la prime au travers de l’augmentation du forfait social.
Quel est le véritable objectif de cette opération ? J’en vois deux : soit il s’agit pour vous de récupérer de l’argent pour réduire le déficit budgétaire actuel – dans la situation que nous connaissons aujourd’hui, à la limite, pourquoi pas, même si cela me paraît dérisoire ? –, soit vous êtes animés par la volonté politique de supprimer la participation.
Lors des différentes interventions des membres de la majorité au cours de nos débats d’hier, j'ai cru comprendre que vous vous attaquiez à la participation, parce que, pour vous, seul comptait le salaire. Ce n'est pas du tout notre cas.
Je souhaite insister sur le fait que la participation et l’état d’esprit qu’elle suppose, c'est fondamental dans l'entreprise. Pour ma part, j'appelle cela la gestion participative : je prends en compte non seulement l'élément financier, mais aussi l'élément philosophique, l’élément de gestion du personnel dans l'entreprise.
Le personnel fait partie de l'entreprise. En effet, dans une entreprise, on compte quatre acteurs fondamentaux. Le plus important, ce n'est pas l'actionnaire, ce ne sont pas non plus les syndicats, ni même les salariés, c'est le client ! On l’oublie souvent, mais c'est pourtant lui qui gère l’entreprise, en décidant d'acheter ou de ne pas acheter. S'il n'achète pas, il n'y a pas d'entreprise, donc pas d'emploi. Par conséquent, il faut que l'entreprise marche, qu'il y ait un consensus, que tout le monde s’implique pour permettre des prix compétitifs, pour développer l'emploi et l'activité.
À cet effet, j'ai appliqué dans mes entreprises ce système de gestion participative, qui plaît au salarié, parce que cela améliore son intégration. Le salarié n'est pas seulement une main qui fait fonctionner une machine : c'est un esprit, un cœur. Il faut donc y être attentif, l’informer, lui donner des responsabilités, reconnaître sa dignité et le récompenser quand ça marche. C'est la participation !
Mes chers collègues, si, sur cette mesure, le Gouvernement est animé par des considérations plus financières que philosophiques, je suis moins hostile à cette augmentation, même s’il serait bon qu’elle fût moins forte.
Aujourd'hui, nous souhaitons la suppression de cet article et le maintien du taux de 8 % – ce qui n'est déjà pas si mal. À l’heure actuelle, pour l'entreprise, pour la réussite, pour l'emploi que vous cherchez tous, pour le développement de l'économie, il faut travailler ensemble. L'entreprise n'est pas un endroit où l'on se bat les uns contre les autres. « Le patron peut payer » : je ne connais que trop cette formule ! Non, le patron ne peut payer que s'il a de l'argent. Il est donc normal qu’il paye plus lorsqu'il dégage des bénéfices et qu’il paye moins lorsqu'il n'en fait pas assez.
Monsieur le ministre, éclairez-nous : quelle est votre véritable motivation, est-elle plus budgétaire que philosophique ?
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour présenter l'amendement n° 130 rectifié.
M. Hervé Marseille. Une hausse de 12 points du forfait social est manifestement une mesure inéquitable et inopportune, comme l'a rappelé Isabelle Debré.
En effet s’il est voté en l’état, l’article 27 aura de lourdes conséquences sur de nombreux salariés.
Une telle hausse incitera les entreprises à renoncer à se doter de mécanismes de participation sociale et privera donc leurs salariés d’accessoires de rémunération, de dispositifs de consolidation de leur prévoyance complémentaire et de retraite complémentaire.
J'ai été saisi, certainement comme un certain nombre d'entre vous, mes chers collègues, par une chaîne de supérettes qui emploie près de 14 000 collaborateurs et qui subira directement cette mesure. Cette entreprise développe depuis plus de 15 ans une politique visant à associer les salariés aux résultats de l’entreprise, bien au-delà des obligations légales. Elle a ainsi redistribué, cette année, 17 millions d'euros en intéressement et participation à l’ensemble de ses collaborateurs.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Pourquoi n’a-t-elle pas augmenté les salaires ?
M. Hervé Marseille. L’épargne salariale est un moyen efficace permettant aux salariés les plus modestes de se constituer de l’épargne. Taxer davantage la participation porterait clairement atteinte au pouvoir d'achat de nombreux salariés, dont l’épargne salariale est l’unique apport personnel à faire valoir, par exemple, lors d’une première acquisition immobilière.
Si cette mesure grève largement le pouvoir d’achat des Français, elle se traduit également par une charge financière supplémentaire pour les entreprises. Ainsi, l'entreprise que j'évoque estime à plus de 2 millions d'euros l’augmentation de charges résultant de cette mesure, ce qui se traduira inéluctablement par des choix.
C’est donc une double peine : on pénalise les entreprises dans leur capacité et on enlève aux salariés les plus modestes ce qui leur permet d’envisager un avenir meilleur.
En bref, cette mesure nous conduira à des difficultés en pleine période de crise. Partageant les préoccupations exprimées par notre collègue Isabelle Debré, nous demandons par conséquent la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour présenter l’amendement n° 204.
M. Jean-Pierre Chevènement. Mon argumentation sera totalement différente de celles qui ont été développées par mes collègues.
L’investissement et la participation constituent, pour les entreprises françaises, un outil important pour défendre leur capital contre les menaces d’offre publique d’achat ou de prise de participation qui peuvent porter atteinte à leur autonomie. Imposer davantage la participation et l’intéressement peut donc aller à l’encontre des objectifs de redressement de l’appareil productif que le Gouvernement s’est fixé, à juste titre.
Cet amendement, déposé par MM. Mézard, Plancade et moi-même, a pour but d’attirer votre attention sur cet aspect de la question, monsieur le ministre. On ne peut pas compter seulement sur le Fonds stratégique d’investissement ou sur l’appel au secours de l’État, comme cela a pu se faire en d’autres occasions.
Il faut aussi renforcer cette composante du capital de nos entreprises qui permet de les stabiliser. On sait que leurs marges de profit ne sont pas si élevées qu’elles les mettent à l’abri d’offres publiques d’achat sauvages.
Il faut donc que le Gouvernement revoie absolument sa position sur ces dispositions relatives à l’intéressement et à la participation. Je ne veux pas en faire une querelle idéologique : l’opposition capital-travail me paraît relativement dépassée…
M. Philippe Dallier. Pas pour tout le monde, apparemment !
M. Jean-Pierre Chevènement. Le véritable enjeu, c’est la préservation du tissu industriel français.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’avis de la commission risque d’être répétitif. Notre majorité souhaite préserver l’équilibre général du dispositif budgétaire qui nous est soumis : la commission émettra donc un avis défavorable sur tous les amendements qui portent préjudice à cet équilibre.
En l’occurrence, ces amendements tendent à supprimer l’article 27 qui porte le taux du forfait social de 8 % à 20 %, suppression qui entraînerait une perte de recettes de 550 millions d’euros sur l’année en cours et de 2,4 milliards d’euros en année pleine. Même si j’ai bien compris que des arguments très divers étaient invoqués à l’appui de ces amendements – notamment ceux de Jean-Pierre Chevènement –, la commission ne peut donc qu’émettre un avis défavorable.
Outre l’argument budgétaire que j’ai évoqué, vous savez, mes chers collègues, que l’épargne salariale est concentrée dans les grandes entreprises et qu’elle bénéficie surtout aux salariés dont les revenus sont les plus élevés…
Mme Catherine Procaccia et M. Philippe Dallier. Ce n’est pas vrai !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. C’est établi, mes chers collègues. Vous pourrez consulter les statistiques existant sur ce sujet, qui sont mentionnées dans mon rapport.
M. Philippe Dallier. Avez-vous seulement été salarié dans votre vie ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Ensuite, l’épargne salariale peut se substituer aux rémunérations salariales : il en résulte un effet pervers qui a été maintes fois dénoncé.
En outre, même au taux de 20 %, le forfait social reste inférieur au taux des cotisations patronales sur les salaires. On ne peut donc pas considérer que ce taux soit prohibitif.
Enfin, je précise que les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de prévoyance – en clair, les « complémentaires santé » – ne sont pas concernées par la hausse du forfait social.
Ces arguments donnent toute la pertinence nécessaire à l’avis défavorable de la commission des finances. Mes chers collègues, je vous invite donc à rejeter ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. Le Gouvernement, vous n’en serez pas surpris, est évidemment opposé à l’adoption de ces amendements de suppression.
Ce forfait social s’inscrit dans une quadruple perspective.
La première qui me vient à l’esprit est celle du rétablissement de nos finances publiques. Le nier serait hypocrite ! Nous avons besoin de cette recette, en 2012 et, bien sûr, en 2013. Il a toujours été dit que, si certains seraient davantage sollicités, tous le seraient néanmoins. Cette sollicitation s’adresse à des salariés, certes, mais nous appartenons tous au même pays : ce pays a donné sa parole, la mission qui m’a été confiée est de tout faire pour que cette parole soit respectée. Cette disposition s’inscrit donc dans cette volonté. Je comprends les inconvénients qui pourraient résulter de cette mesure, mais je souhaite que personne n’oublie la finalité à laquelle elle obéit.
La deuxième perspective n’est pas nouvelle. Le principe du forfait social a été posé en 2009. La majorité précédente a décidé de taxer à hauteur de 2 % des versements qui n’étaient pas taxés jusqu’alors. De 2 % en 2009, ce prélèvement est passé à 4 % en 2010, à 6 % en 2011 et à 8 % cette année. Nous n’avons rigoureusement rien inventé !
Il s’agit donc soit d’une question de principe – mais ce principe ne fait pas l’objet d’un débat –, soit d’une question de niveau. Sur ce dernier point, qui n’est pas médiocre, je ne pense pas que la discussion appelle des arguments aussi décisifs et entiers que ceux que j’ai pu entendre. En effet, j’admets une telle divergence d’appréciation sur des questions de principe, mais plus difficilement pour des questions de niveau. Je le répète, la majorité précédente a inventé le forfait social et, en quatre année, l’a porté de 0 % à 8 %.
La troisième perspective a été tracée par d’autres que les représentants du suffrage universel : la Cour des comptes, il y a longtemps, sous l’autorité de Philippe Séguin – peu suspect d’hérésie en gaullisme social ! –, avait indiqué, la première, qu’il n’était pas normal que ces versements échappent à toute cotisation. Elle recommandait que, sans atteindre le niveau des cotisations sur les salaires, situé entre 40 % et 45 %, cette contribution des entreprises soit fixée à un niveau proche de la moitié, c’est-à-dire 18 %.
Enfin, au-delà de ce point de vue d’expert, je voudrais mentionner une dernière perspective, d’ordre politique. J’ai en effet le souvenir que les députés centristes, mais néanmoins alliés à l’UMP, en tout cas pendant ces cinq dernières années, ont déposé des amendements visant à porter le taux du forfait à 19 %. Le Gouvernement vous propose de fixer ce taux à 20 % : cela n’a rien d’original, car la proposition est ancienne ; ce n’est pas une question de principe, car elle a été tranchée par la majorité précédente, il y a quatre ans. C’est peut-être une question de niveau : si tel est le cas, les échanges pourraient comporter des propos un peu moins décisifs.
Quoi qu’il en soit, le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je voudrais à mon tour exprimer les craintes que cet article m’inspire. Ces craintes relèvent de considérations d’ordre économique et social.
D’un point de vue économique, si l’épargne salariale est essentielle, c’est parce qu’elle permet notamment de créer de l’épargne longue dans les véhicules d’épargne retraite. Nous savons que notre système d’assurance vieillesse, avec ses différents niveaux – l’assurance obligatoire, les régimes complémentaires par répartition – nécessite un « troisième étage », un étage « surcomplémentaire ». Cet étage est bienvenu pour celles et ceux qui ont la possibilité de lui consacrer des versements volontaires et peuvent y être incités par des abondements de leur employeur.
Depuis vingt ans, j’ai toujours été de ceux qui pensent que l’épargne salariale doit trouver sa place et qu’elle a un rôle important à jouer dans le dialogue social au sein des entreprises. En effet, c’est ainsi que les partenaires sociaux, représentants de la direction et des salariés, appelés à dialoguer autour d’une table et à trouver des solutions empiriques pour définir des régimes, pour acquiescer au système d’abondement ou pour surveiller ensuite la gestion de ces fonds, progressent dans l’exercice de leurs responsabilités.
Notre économie a cruellement besoin de cette épargne longue : au regard des nouvelles règles comptables qui s’imposent, nous savons tous que la situation de la France en Europe est, hélas ! originale. La France est beaucoup plus vulnérable à la nouvelle normalisation comptable internationale entérinée par l’Union européenne, parce qu’elle a choisi – et personne, ici, ne penserait à revenir sur ce choix fondamental – de fonder la couverture du risque vieillesse sur des systèmes par répartition. De ce fait, l’espace disponible pour les régimes d’épargne retraite est plus réduit que dans d’autres pays. Or vous savez qu’en matière de répartition des actifs et de calcul des risques du système d’assurance, les normes ont de plus en plus un effet dissuasif quant à la détention d’actions. Dès lors, pénaliser la constitution de cette épargne longue, ralentir les flux qui lui permettront de se sédimenter davantage est, sans doute, une erreur économique, je n’hésite pas à le dire ! Seuls les fonds d’épargne retraite peuvent se permettre, aujourd’hui, de détenir dans leurs actifs plus de 50 % d’actions ou de placements en fonds propres – de l’ordre de 60 % pour les PERCO, si ma mémoire est bonne.
À cela s’ajoute la préoccupation que peut nous inspirer l’indépendance capitalistique de nos entreprises. Jean-Pierre Chevènement a évoqué ce point et il me remettait en mémoire l’épisode vécu par un grand groupe français du BTP, le groupe Eiffage. Ce groupe a pu sauver son indépendance, certes avec l’appui de la Caisse des dépôts et consignations, grâce aux 17 % du capital détenus par l’actionnariat salarié, au moment où un grand groupe espagnol du BTP – c’était un autre temps ! –, pris de rêves de grandeur, essayait d’en prendre le contrôle.
Certains se rappellent sans doute cet épisode qui a défrayé la chronique et les contentieux qui en ont résulté : toujours est-il que ce grand groupe étranger se trouvait très près de prendre le contrôle de cette entreprise française. Compte tenu de l’évolution de la situation économique et financière de l’Espagne lors des dernières années, il est vraisemblable que ce grand groupe aurait été démantelé peu après et que la perte, en termes d’emploi et de substance économique, aurait été considérable. Le fonds commun représentatif des salariés a donc été un élément essentiel dans la solution qui a assuré l’indépendance durable de cette entreprise.
Donc, sur le plan économique, je crois que cette hausse importante et brutale, monsieur le ministre, va avoir des conséquences défavorables, et je le déplore. Certes, vous l’avez dit, le forfait social n’est pas votre invention. Il a évolué selon une progression arithmétique d’année en année, mais, si vous nous aviez proposé 10 % ou 12 %, je crois que…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le ministre, je ne partage pas votre réaction.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Certes, une opposition s’oppose, c’est bien naturel.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Vous en avez l’expérience, vous l’avez fait fort bien !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Cela étant dit, au-delà du devoir d’opposition, il y a la réalité des choses, et la réalité est différente entre 10 % ou 12 % et 20 %. Les conséquences économiques seront différentes.
Or il convient d’ajouter, et je terminerai par là, des conséquences sociales qui sont loin d’être négligeables.
M. Dassault a évoqué l’industrie. Pour ma part, je voudrais évoquer le commerce (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) et un grand groupe intégré de la distribution qui mène une politique d’association de ses salariés au résultat de l’entreprise depuis plus de cinquante ans. Il nous indique que tous ses collaborateurs bénéficient d’une prime d’intéressement, d’une prime de participation supérieure à la participation légale, ce qui, pour 2012, représente 183 millions d’euros d’intéressement et participation dont bénéficient les 50 000 collaborateurs de l’entreprise, quel que soit leur niveau hiérarchique, caissières comprises.
La hausse brutale à 20 % peut pénaliser, me dit-on, les salariés les plus jeunes et les plus modestes, en particulier ceux de moins de vingt-cinq ans qui représentent les deux tiers des embauches annuelles de ce groupe. C’est tout de même bien une réalité qu’il faut écouter. Au demeurant, pour ces jeunes salariés, faciliter la constitution d’une épargne est un élément qui leur permettra de mener des projets et de faire face aux besoins de la vie.
Le montant moyen par collaborateur de cette épargne s’élève à 27 000 euros. (Mme Nathalie Goulet marque son impatience.) Il est prioritairement utilisé pour constituer l’apport nécessaire à l’acquisition de la résidence principale. Bien sûr, cette somme est d’autant plus vitale que l’on est sans doute plus modeste ou plus exactement que l’on a moins de capacité d’apporter des fonds propres pour contribuer à l’acquisition d’un bien immobilier à usage familial.
Par ailleurs, cette hausse brutale peut réduire l’emploi et l’investissement. Pour le groupe en question, la charge supplémentaire sera de 22 millions d’euros. Bien entendu, ce groupe, qui bénéficie d’une gestion avisée, tiendra compte de cette charge supplémentaire pour modifier certains de ses choix.
Enfin, il y a lieu de signaler que cette hausse brutale pénalisera le partage des résultats et l’actionnariat des salariés.
Je conclus en indiquant que, dans ce groupe…
M. Alain Richard. Ne vous dépêchez pas !
M. Jean-Pierre Caffet. Prenez votre temps !
M. Michel Berson. Vous vous exprimez depuis dix minutes !
M. Alain Richard. Prenez tout votre temps, monsieur le président !
Mme Annie David. C’est irrespectueux de l’institution !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Écoutez, je ne vous ai pas encombrés ce matin ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) Alors permettez-moi de compenser un peu et de vous dire, même si cela vous déplaît, qu’une hôtesse de caisse avec trois ans d’ancienneté perçoit une rémunération annuelle de 20 027 euros hors intéressement et participation (Mme Annie David s’exclame.), que les choix salariaux dans cette entreprise sont donc loin de pâtir de l’intéressement et de la participation, et que ceux-ci ne sont pas nécessairement les ennemis du salaire.
Par conséquent, avec cet exemple concret – pardonnez-moi, ce sont des données d’expérience –, je crois pouvoir dire qu’il serait plus sage, sauf si M. le ministre nous dit qu’il lui est possible de réduire sensiblement le taux de 20 % (M. Jean-Pierre Caffet s’esclaffe.), de repousser l’article 27. (M. Serge Dassault applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Daudigny, rapporteur général de la commission des affaires sociales, rapporteur pour avis. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, à cet instant du débat, j’exprime la voix de la majorité des membres de la commission des affaires sociales, particulièrement attachés à cet article 27 dont l’objet est de relever la contribution au budget de la sécurité sociale d’éléments de rémunération qui, aujourd’hui, y échappent largement.
Ces éléments exemptés d’imposition, de contribution sociale constituent, quoi que l’on puisse dire, de véritables niches sociales particulièrement appréciées et optimisées et, que cela plaise ou non de l’entendre, plus répandues dans les grandes entreprises que dans les petites et moyennes entreprises. Elles profitent davantage aux salariés de niveau élevé qu’à ceux qui sont au bas de l’échelle des salaires. Surtout, nul ne peut ignorer l’effet substitutif en termes de salaire et de rémunération que peut provoquer une utilisation trop large de ces dispositifs quand, nous le savons, les salaires sont, eux, assujettis à une contribution globale qui approche les 45 % à titre social.
Je formulerai quelques observations. Certaines ont déjà été évoquées, ce qui me permettra d’aller plus vite.
Première observation : le forfait social a été instauré en 2009 au taux de 2 % ; ce taux a été depuis multiplié par quatre.
Deuxième observation : le manque à gagner de recettes pour la sécurité sociale est estimé à 10 milliards d’euros, ce qui n’est pas du tout une petite somme.
Troisième observation : l’étude d’impact montre qu’entre 1999 et 2007 les sommes versées au titre de l’épargne salariale ont été multipliées par plus de deux, alors que la masse salariale augmentait de moins de 40 %.
Ceci m’amène à une quatrième observation, déjà faite par M. le ministre qui se référait lui-même à une grande personnalité, Philippe Séguin, alors président de la Cour des comptes – et nous avons tous en mémoire, ici, la qualité du travail qu’il a accompli –, lorsqu’il soulignait que des entreprises pouvaient préférer aux hausses de salaires des hausses sur ces accessoires.
Cinquième observation : l’attractivité de l’intéressement et de la participation n’est pas remise en cause. Le différentiel demeure important, du simple au double.
M. Philippe Dallier. Au rythme où vous y allez !
M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis. Pour l’instant, nous sommes dans la réalité, pas l’extrapolation ! Le taux de 20 % proposé à l’article 27, je le répète, correspond à moins de la moitié du taux – proche de 44 % – qui frappe l’ensemble des salaires.
Sixième observation : le texte prévoit que le taux actuel de 8 % sera maintenu pour les participations de l’entreprise à la prévoyance complémentaire collective. La mesure qui est proposée ne s’applique donc pas de façon aveugle.
Dernière observation : aujourd’hui, le forfait social au taux de 8 % est affecté à hauteur de cinq points à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés et à hauteur de trois points au Fonds de solidarité vieillesse, le FSV – dont nous constatons bien à chaque réunion combien il est dans une situation de déficit persistant –, soit 3 à 4 milliards d’euros qui s’ajoutent au déficit du régime général pour atteindre 20 milliards d’euros. Le produit supplémentaire généré par les dispositions de l’article 27 sera réparti pour moitié entre la Caisse nationale d’assurance vieillesse et le Fonds de solidarité vieillesse, c’est-à-dire deux organismes qui risquent de connaître de lourds déficits dans les années à venir.
En raison de ces différents éléments, nous sommes bien sûr résolument opposés aux amendements de suppression de l’article 27.
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Je formulerai un simple commentaire. Il y a deux types d’argumentaire assez différents pour s’opposer à cet article.
Le premier est fondé sur le pouvoir d’achat, en expliquant que l’augmentation de contribution sur cet élément de la rémunération risque de porter atteinte à certains éléments de la politique salariale. Il n’y a pas de meilleure démonstration que, lorsqu’on est en situation économique difficile et qu’on essaie de « booster » le pouvoir d’achat avec des mesures fiscales, on distribue en réalité du pouvoir d’achat aux ménages avec du déficit budgétaire. Je pense que ce n’est pas une voie d’avenir.
M. Philippe Dallier. Il faut dire ça là-bas ! (M. Philippe Dallier désigne du doigt les travées du groupe socialiste.)
M. Alain Richard. Précisément ! C’était exactement la même chose que la défiscalisation des heures supplémentaires, qui consistait à payer du complément de rémunération avec de la dette publique. On voit bien que c’est une politique qui ne peut pas mener loin.
Si, à l’avenir, les responsables d’entreprises sont amenés, dans l’équilibrage de leur politique salariale, à pondérer un peu différemment entre le salaire et les distributions sous forme d’intéressement ou de participation, ce choix ne sera pas guidé par l’artifice d’un écart massif entre le niveau de contribution sociale des uns et des autres.
J’ajoute d’ailleurs qu’au cours du dernier quinquennat, à deux reprises au moins, des mesures de réduction de durée de détention de ces éléments d’épargne ont été prises, monsieur le président de la commission des finances (M. le président de la commission des finances s’entretient avec un de ses collaborateurs.), mais je crois que son attention est portée ailleurs…
Je voudrais répondre au président de la commission des finances, et je n’ai encore consommé que le quart de son temps de parole, que l’argumentaire en faveur de l’épargne salariale me semble avoir été fragilisé par les mesures qu’il a approuvées du gouvernement précédent consistant à réduire, voire à supprimer les délais de détention des fonds en question. Il s’agit donc d’une mesure de rémunération pure et simple et d’un dopage de la rémunération avec du déficit budgétaire, ce qui n’est pas une bonne politique.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce n’étaient pas nécessairement de bonnes décisions. Mais le déficit budgétaire paie également 40 % de nos indemnités !
M. Alain Richard. Monsieur le président de la commission, je m’efforce de vous convaincre et je ne vous ai pas interrompu pendant vos onze minutes d’intervention.
En revanche, sur le tout autre argumentaire posé par M. Jean-Pierre Chevènement – et je sympathise pleinement avec son approche –, il me semble que ce qui est en jeu, c’est l’actionnariat salarié, et l’actionnariat salarié durable. Or il se trouve que les formes de rémunération dont nous parlons comportent un éventail complet qui ne débouche qu’assez rarement sur de l’actionnariat salarié.
C’est donc la politique de management des dirigeants d’entreprises qui est en jeu : veulent-il créer un rapport de confiance et une stabilité dans leur entreprise en distribuant de l’actionnariat salarié, même avec une contribution sociale de 20 % ? Je pense que, y compris avec un tel niveau de contribution, cela reste intéressant si leur politique est de donner une place aux salariés dans leur conseil d’administration.
Par conséquent, même avec un argumentaire portant sur la stabilité de l’entreprise et sur le rôle de l’intéressement comme élément de stabilité d’un certain nombre de grands groupes industriels, que lui comme moi avons éprouvé dans d’autres fonctions, le dirigeant d’entreprise qui veut intéresser les salariés, les faire participer à la gestion et leur donner un avantage sous forme de distribution d’actions a encore intérêt à le faire, même avec un forfait social de 20 %.
Donc, et je pense que le ministre délégué pourrait y réfléchir… (M. le ministre délégué s’entretient avec M. le président de la commission des finances.) Lui non plus n’écoute pas ! (Rires.)
MM. Robert del Picchia et Roger Karoutchi. On vous écoute, nous ! Continuez !
Mme Isabelle Debré. C’est un sujet important !
M. Alain Richard. Le Gouvernement pourrait utilement réfléchir à un avantage spécifique en matière de contribution sociale lorsqu’il s’agit de la constitution d’un actionnariat salarié stable : cela a du sens et ne coûte pas beaucoup d’argent. En revanche, utiliser le différentiel massif de contribution sociale de 8 % à 45 % pour optimiser sa politique salariale, je crois que c’est une vision du passé ! (MM. Jacky Le Menn et Richard Yung applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Debré, pour explication de vote.
Mme Isabelle Debré. Monsieur le ministre, je regrette que vous n’écoutiez pas réellement les orateurs. J’aimerais m’exprimer, mais peut-être dois-je attendre que vous y soyez disposé ?
Hier, je me suis adressé à votre collègue M. Hamon, qui, lui, m’a écoutée et répondu. Je lui signalais que l’on pouvait lire dans Les Échos un article intéressant, intitulé « Dommages collatéraux d’une nouvelle taxation ». Cet article a été signé par M. Jean-Pierre Balligand, ancien député PS de l’Aisne, MM. Laurent Bataille, Jean-Louis Beffa, Michel Bon et Jean-Marie Jestin, qui ne me semblent pas être étiquetés à droite.
Après m’être exprimée sur le fond, j’aimerais le faire sur la forme. Peut-être, monsieur le ministre, aurez-vous l’obligeance de me répondre, comme l’a fait hier M. Hamon, de façon exemplaire, agréable et attentive.
Je lui disais que l’on confondait peut-être vitesse et précipitation. (M. le ministre délégué continue de s’entretenir avec M. le président de la commission des finances.) Monsieur le ministre, je suis un peu étonnée par votre manque d’élégance : vous me tournez le dos quand je vous parle !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Philippe Marini l’empêche de vous écouter !
Mme Isabelle Debré. Pardonnez-moi, mais je n’ai pas pris beaucoup la parole et aimerais être considérée. (M. le ministre délégué et M. le président de la commission des finances se retournent et font face à l’orateur.) Merci de nous écouter, messieurs ! Nous faisons notre travail, comme vous le faites actuellement. C’est un sujet très important, qui concerne tous les salariés.
Vous avez dit tout à l’heure que l’intéressement et la participation concernaient surtout les grandes entreprises. Vous avez totalement raison, car la participation n’est obligatoire que dans les sociétés de plus de 50 salariés. Cependant, et c’est là où vous avez tort, mes chers collègues, elle s’adresse à tous les salariés, quel que soit leur niveau de salaire.
Mme Annie David. Elle est proportionnelle au niveau du salaire !
Mme Catherine Procaccia. Pas forcément !
Mme Isabelle Debré. M. le président Marini a dit, très justement, qu’il s’agissait d’un problème économique, puisque ces mécanismes protègent souvent les entreprises contre les OPA hostiles. Cela est également vrai.
Pour revenir sur la forme, je tiens à rappeler, monsieur le ministre, l’existence d’une instance, le Conseil d’orientation de la participation, de l’intéressement, de l’épargne salariale et de l’actionnariat salarié, ou COPIESAS, – autrefois appelée Conseil supérieur de la participation –, qui a été évoqué par M. Richard. Personne ne conteste que nous soyons en période de crise et que nous cherchions de l’argent. Vous assimilez l’épargne salariale à une niche sociale : pourquoi pas ? C’est votre choix et votre idée. Ce ne sont pas les nôtres. Mais, dès lors, pourquoi ne pas réfléchir tranquillement à la façon de remettre tous ces mécanismes à plat et, surtout, à la façon d’opérer une différence entre l’épargne longue et l’épargne courte, afin de ne pas les taxer de la même manière ?
Nous savons que nous allons au devant d’un problème relatif aux retraites. Or, nous le savons bien, la participation est le premier levier permettant d’accéder à l’acquisition de la résidence principale, et donc de préparer sa retraite. Pourquoi casser tous ces mécanismes ? Pourquoi ne pas attendre la discussion du projet de loi de finances pour 2013 ? (M. le ministre délégué s’entretient avec un de ses collaborateurs.) Mais vous ne m’écoutez toujours pas ! M. Hamon m’a confirmé l’intention du Gouvernement de réunir le COPIESAS. Pourquoi ne pas prendre le temps, deux ou trois mois, d’y réfléchir tranquillement ? Au COPIESAS siègent les partenaires sociaux, les acteurs économiques, les parlementaires, toutes les personnes qualifiées, en somme, pour réfléchir sereinement à ce sujet.
Pourquoi porter brutalement le taux à 20 %, et ne pas faire la différence entre épargne longue et épargne courte ? Prenons le temps, ne nous précipitons pas, et allons tranquillement écouter tout le monde.
Enfin, je vous recommande encore une fois, monsieur le ministre, la lecture de cet excellent article des Échos.
Et pardonnez-moi de ne même pas avoir dépassé le temps de parole qui m’était imparti ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Chevènement, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Chevènement. J’ai écouté avec beaucoup d’intérêt l’argumentation du ministre Cahuzac. Je dois dire que je partage l’objectif de rétablissement de l’équilibre des finances publiques, comme les autres signataires de l’amendement, nonobstant la diversité du groupe RDSE.
Je vais retirer l’amendement n° 204 déposé par le président du groupe RDSE, même si, à titre personnel, je voterai la suppression de l’article. Je désire ainsi lancer un signal d’alerte, dans le but d’attirer la vigilance du Sénat et des sénateurs de la majorité, dont je fais partie, sur le rôle de la participation et de l’intéressement dans la défense des fonds propres et, par conséquent, de l’autonomie de nos entreprises, face aux risques d’OPA sauvages.
J’ai entendu l’argument de M. Richard, selon lequel les grandes entreprises étaient les plus concernées par ces dispositions. Mais ce sont les très grandes, les grandes et les moyennes entreprises qui, justement, courent le plus ce risque d’OPA sauvage.
Monsieur le ministre, je souhaite donc que le Gouvernement trouve le moyen de réduire, ou d’étaler, l’ampleur de l’augmentation du prélèvement social, qui est tout de même considérable – il passerait en effet de 8 % à 20 % –, de façon à promouvoir ce que M. Richard a justement appelé un « actionnariat salarial durable ». Je pense que c’est un objectif que le Gouvernement doit se donner.
Il ne faut pas passer par pertes et profits – ce serait digne d’une querelle idéologique d’un autre temps –…
Mme Isabelle Debré. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Chevènement. … ces dispositions relatives à la participation des salariés au capital de l’entreprise, qui ne manquent pas d’attrait. Elles font partie d’une stratégie de défense de notre appareil productif.
Je retire donc l’amendement, même si, à titre personnel, je voterai la suppression de l’article 27.
M. le président. L’amendement n° 204 est retiré.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Le groupe CRC ne soutiendra évidemment pas ces amendements. En revanche, nous abondons dans le sens des propos tenus par le rapporteur de la commission des affaires sociales sur l’augmentation du forfait social.
Il est sans doute intéressant, comme le président de la commission des finances l’a fait, de se lancer dans un débat économique sur les moyens de relancer notre appareil industriel. Je suis néanmoins étonnée que cela vienne en fin de discussion – même si j’ignore si nous pourrons en venir à bout ! – sur le collectif budgétaire. Il y aurait en effet beaucoup à dire sur ce sujet.
Je tiens donc à signaler que nous nous opposons résolument à ces amendements, et que nous défendons l’article 27. Eu égard à l’évolution de la situation de l’emploi industriel depuis dix ans dans notre pays, la participation ne semble pas être un moyen pertinent pour préserver notre outil industriel.
Je confirme que l’intéressement ne concerne que certaines catégories de salariés. Les bons salaires constituent un autre moyen de favoriser l’épargne populaire.
Mme Annie David. Absolument !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Peut-être ne vous en étiez-vous pas aperçu, mais les personnes touchant un bon salaire peuvent très bien épargner, et elles ne s’en privent pas, d’ailleurs.
Selon vous, les petits montants de l’intéressement permettent effectivement d’assurer l’acquisition de son logement pour la retraite. Cela reste à prouver ! Il faut d’ailleurs noter que l’on ne peut utiliser l’intéressement pour l’achat d’une résidence secondaire.
Peut-être faudrait-il ouvrir un débat beaucoup plus large sur ce sujet ?
Mme Isabelle Debré. Oui !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il me semble en tout cas que ce n’est pas le lieu pour ce faire. Si vous avez l’intention de dormir ici ou d’y passer encore un ou deux jours, libre à vous ! Un débat économique sur cet article ne me paraît pas avoir de sens, car, franchement, les motifs permettant de vous démontrer que ces dispositifs ne sont pas efficaces ne manquent pas.
Enfin, je tiens à dire que le groupe CRC est tout à fait en faveur d’une imposition identique des revenus quelle qu’en soit l’origine. D’ailleurs, tout le monde sait que le recours à l’intéressement, qui consiste à offrir quelques avantages à quelques salariés, est motivé par la volonté de ne pas augmenter l’ensemble des salaires.
Mme Annie David. Exactement !
M. Christian Favier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. Compte tenu des propos péremptoires qui sont tenus sur la vie des entreprises, le monde économique et la réussite, il est étonnant que nous soyons encore confrontés à de telles difficultés et à une crise d’une telle ampleur.
Les gouvernements successifs se sont souvent mépris. Force est de constater que, pour faire avancer des idées aussi nobles que la participation – le général de Gaulle n’écrivait-il pas que la participation était la grande ambition de ce siècle –, il fallait imaginer des exonérations.
Les législateurs qui se sont succédé ont passé leur temps à instituer des exemptions de cotisations sociales.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Voilà le résultat !
M. Jean Arthuis. Ce peut être le ticket-restaurant ou encore le chèque-vacances. Il a fallu trouver de multiples raisons pour faire avancer de nouvelles formes de rémunération. Ceux qui sont confrontés à la gestion des ressources humaines dans l’entreprise essaient de faire de l’optimisation afin de payer moins de cotisations sociales.
Monsieur le ministre, vous prolongez et amplifiez ce que les gouvernements ont fait d’une manière un peu miséreuse. Plutôt que de reconnaître que nous nous sommes collectivement trompés, parce que nous avons multiplié les éléments de complexité, on préfère en rajouter un peu plus à chaque fois, en enveloppant le tout dans un beau discours. C’est merveilleux, mais cela ne marche pas !
Le forfait social sera augmenté, encore un peu plus, naturellement. Toutefois, monsieur le ministre, la participation est une si belle idée qu’elle pourrait vivre sans régime fiscal particulier ! Elle devrait être la conséquence de la qualité du dialogue social au sein de l’entreprise pour convenir de modalités de rémunération qui tiendraient compte des résultats, et qui assureraient une meilleure répartition des richesses.
Pourquoi faut-il que, chaque fois, il y ait un régime fiscal particulier ? Alain Richard insistait sur le « dopage ». Mais les 35 heures ne sont-elles pas une escroquerie collective ? Il n’y a pas plus beau dopage, puisqu’il a fallu imaginer, pour leur mise en place, une exemption de cotisations sociales qui a coûté près de 20 milliards d’euros ! Nous sommes dans un geste superbe, d’une ampleur sans précédent, qui nous met cependant dans une impasse économique.
Si vous acceptiez un jour d’alléger les cotisations sociales, il ne faudrait alors pas hésiter à soumettre toutes les formes de rémunération aux cotisations sociales de droit commun et à nous préserver de cette complexité, qui altère beaucoup l’esprit d’entreprise, et encourage puissamment la délocalisation d’activités et d’emplois.
Vous venez ensuite pleurer sur la perte de l’emploi. Ce matin, notre collègue Delattre nous rappelait une actualité brûlante. C’est vrai, le feu est dans la maison. Comment se fait-il que vous ayez manifesté autant d’entêtement dans votre opposition à l’allégement des cotisations sociales, c’est-à-dire au levier de compétitivité sans lequel je doute que nous puissions nous en sortir ?
Voilà pourquoi je voterai les amendements de suppression. Et si cela ne suffit pas, je voterai contre l’article 27.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Lorsque le général de Gaulle a lancé le débat sur cette belle idée que sont la participation et l’intéressement, il y avait, souvenons-nous-en, des opposants des deux côtés.
D’un côté, les syndicats trouvaient l’idée de l’association du capital et du travail fort dangereuse.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. Philippe Dallier. La lutte des classes pouvait, dans leur esprit, en pâtir.
De l’autre côté, le patronat ne semblait pas très emballé non plus (M. Roger Karoutchi opine.), si j’en crois ce que j’ai pu lire sur le sujet. Il a donc fallu inciter le patronat à se lancer dans ce beau projet d’association du capital et du travail. Voilà pourquoi il existe effectivement des différences entre ce qui peut être distribué sous forme de salaire et ce qui peut l’être sous forme d’intéressement et de participation. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) Je comprends tout à fait que Mme Borvo Cohen-Seat y soit opposée.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Merci !
M. Philippe Dallier. Lorsque vous affirmez qu’il ne s’agit plus d’un débat idéologique, mais de l’appréciation à porter sur le bon niveau de taxation applicable à ces deux dispositifs, j’aimerais le croire. J’ai tout de même de sérieux doutes. Je suis toujours persuadé que, dans cet hémicycle, un certain nombre de parlementaires ne partagent pas cet engouement pour la participation et l’intéressement, et qu’ils verraient bien cet instrument taxé de la même manière que le reste.
À mon sens, vous y allez trop fort, monsieur le ministre. Vous devez trouver 7 milliards d’euros cette année et vous portez le taux de la contribution de 8 % à 20 %. Faisons un petit calcul : comme vous devrez trouver entre 30 milliards et 35 milliards d’euros l’an prochain, vous allez porter le taux à plus de 40 %, soit l’équivalent de ce qui existe aujourd'hui pour les salaires.
C’est pourquoi nous trouvons qu’il s’agit d’une très mauvaise mesure.
Par ailleurs, on regrette souvent qu’il n’y ait pas beaucoup d’anciens salariés parmi les parlementaires. Or, pour ma part, j’ai été salarié pendant vingt ans. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.) C’était dans une grande entreprise. Je n’étais pas un cadre dirigeant ; au départ, je n’étais même pas cadre. Et j’ai bénéficié sinon tous les ans du moins presque chaque année des mesures d’intéressement et de participation, ce qui m’a permis de devenir actionnaire de la société.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tant mieux pour vous…
M. Philippe Dallier. Cela a été mon premier et mon seul apport pour l’acquisition d’un logement. Et c’est encore beaucoup le cas pour beaucoup de gens aujourd'hui. On dit souvent que la principale difficulté des jeunes pour acquérir un logement réside dans le problème de l’apport personnel. En l’occurrence, il s’agit d’un apport personnel efficace, ainsi d’ailleurs que d’un bon complément de retraite sur le long terme.
Mme Isabelle Debré. Exactement !
M. Philippe Dallier. J’étais actionnaire de mon entreprise lorsqu’une autre grande société, que je ne nommerai pas et dont je tairai l’identité du donneur d’ordre, a voulu en prendre le contrôle par un raid hostile. Et c’est parce que le personnel de mon entreprise détenait 8 % du capital que l’opération a échoué.
Par conséquent, les orientations que vous prenez m’inquiètent beaucoup. Si vous aviez décidé de porter le taux à 10 % ou 12 %, nous aurions pu débattre de votre proposition autrement qu’en termes idéologiques. Mais un taux de 20 % me semble tout à fait excessif !
M. Robert del Picchia. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Serge Dassault, pour explication de vote.
M. Serge Dassault. Je souhaite formuler une suggestion.
Il convient, me semble-t-il, de dissocier les questions budgétaires qui nous préoccupent aujourd'hui du problème de la participation, qui est en soi un vrai problème de relations sociales dans l’entreprise. Je déposerai d’ailleurs une proposition de loi relative à la participation en septembre ou en octobre, et nous ne parlerons pas de questions budgétaires à cette occasion.
En attendant, je vais vous soumettre une idée. (M. le ministre délégué s’entretient avec un sénateur du groupe socialiste.) Si vous voulez bien m’écouter, monsieur le ministre…
M. Serge Dassault. S’il s’agit vraiment d’un problème budgétaire, je propose, en gage de bonne volonté, de porter le taux de la contribution à 14 %, et non à 20 %, en espérant qu’il sera ramené à 8 % une fois que la situation financière le permettra.
Quoi qu’il en soit, il faut séparer le problème budgétaire, que je comprends très bien, de la question de la participation.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 106 et 130 rectifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 127 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 172 |
Pour l’adoption | 167 |
Contre | 176 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 222, présenté par MM. Delattre et de Legge, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer le taux :
20 %
par le taux :
10 %
II. – Alinéas 5, 6 et 7
Supprimer ces alinéas.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 223, présenté par MM. Delattre et de Legge, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer le taux :
20 %
par le taux :
15 %
II. – Alinéas 5, 6 et 7
Supprimer ces alinéas.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 111 est présenté par M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 129 est présenté par M. Marseille, Mme Férat et MM. Dubois, J. Boyer, Amoudry, Tandonnet et Roche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° À la fin du premier alinéa, le taux : « 8 % » est remplacé par les taux : « 12 % en 2012, 14 % en 2013, 16 % en 2014, 18 % en 2016 et 20 % en 2017 ».
II. - Alinéas 5, 6 et 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter l’amendement n° 111.
M. Philippe Dallier. Cet amendement vise à étaler l’augmentation du forfait social dans le temps, jusqu’en 2017. J’espère, à l’instar de notre collègue Serge Dassault, que la situation financière sera alors suffisamment rétablie pour nous permettre de faire machine arrière.
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour présenter l'amendement n° 129.
M. Hervé Marseille. Nous avons longuement débattu de l’intérêt de supprimer l’article 27. Les amendements de suppression n’ayant pas été adoptés, nous proposons à notre tour que la hausse soit modérée et lissée dans le temps.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques. Je comprends qu’il s’agit d’amendements de repli, et j’en devine l’esprit, qui est constructif.
Malheureusement, les contraintes que j’ai évoquées quand j’ai expliqué pourquoi il n’était pas possible d’en rester au taux actuel, c'est-à-dire 8 %, demeurent. C’est donc avec regret que le Gouvernement appelle au rejet de ces deux amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 111 et 129.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de neuf amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 92, présenté par M. Marini, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Toutefois, ce taux est fixé à 11 % pour les contributions des employeurs destinées au financement des prestations complémentaires de retraite et de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit et pour les abondements des employeurs à un plan d’épargne pour la retraite collectif mentionné à l’article L. 3334-2 du code du travail. »
La parole est à M. Philippe Marini.
M. Philippe Marini. C’est un amendement de neutralité, qui me paraît très raisonnable et qui se justifie par son texte même.
M. le président. L'amendement n° 24, présenté par M. Delahaye, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, ce taux est fixé à 8 % pour :
« - les contributions des employeurs destinées au financement des prestations de prévoyance versées au bénéfice de leurs salariés, anciens salariés et de leurs ayants droit,
« - la partie des sommes versées au titre de la participation des salariés qui excède le montant versé au titre du régime légal de participation prévu à l'article L. 3324-1 du code du travail. »
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 109, présenté par Mme Debré, M. Delattre et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le taux :
8 %
insérer les mots :
pour la part de la réserve spéciale de participation excédant le montant qui aurait résulté d'un calcul effectué en application de l'article L. 3324-1 du code du travail pour les entreprises ayant conclu un accord de participation dérogatoire prévu à l'article L. 3324-2 du code du travail ainsi que
La parole est à Mme Isabelle Debré.
Mme Isabelle Debré. La participation et l’intéressement constituent – nous l’avons dit tout à l’heure – la seule capacité d’épargne de bien des Français.
En alourdissant le forfait social qui pèse sur les entreprises pour les sommes qu’elles distribuent au titre de l’intéressement et de la participation, le Gouvernement envoie un très mauvais signal aux « petits » épargnants.
Je souhaite simplement rappeler que cette épargne est une épargne de long terme participant au financement des entreprises et de l’économie.
L’épargne salariale, c’est 10 millions de bénéficiaires, 260 000 entreprises concernées, 85 milliards d’euros d’encours et 16,3 milliards d’euros versés au 31 décembre 2011.
Le plan d’épargne pour la retraite collectif, le PERCO, qui permet aux salariés de se constituer une épargne retraite et qui est en principe bloqué jusqu’au départ du salarié, est diffusé dans 150 000 entreprises. Il concerne 1 million de salariés et représente 5 milliards d’euros d’encours.
Il est regrettable de pénaliser les entreprises et les épargnants comme vous le faites : l’intéressement et la participation constituent une épargne utile.
Cet amendement vise à exonérer du surcroît de charges la part de la participation supérieure au minimum légal, afin de reconnaître l’effort des entreprises ayant mis en place un régime de participation dérogatoire permettant un partage des résultats plus favorable à leurs salariés.
M. le président. L'amendement n° 110, présenté par M. P. Dominati et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après le taux :
8 %
insérer les mots :
pour les contributions des employeurs dans un régime de retraite revêtant un caractère collectif et obligatoire mis en place dans le cadre d’une des procédures mentionnées à l’article L. 911-1, pour les versements complémentaires de l’employeur dans un plan d’épargne pour la retraite collectif constitué conformément aux dispositions du chapitre IV du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail, et pour les sommes issues de la participation et de l’intéressement investies par le salarié dans ce même plan, ainsi que
L'amendement n° 193, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Gilles, Dallier, J. Gautier, Beaumont et Dassault, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que pour les sommes versées par l’entreprise en application de plans d’épargne constitués conformément aux dispositions du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail
L'amendement n° 194, présenté par MM. P. Dominati, Cambon, Gilles, Dallier, J. Gautier, Beaumont et Dassault, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que pour les sommes versées par l’entreprise en application de plans d’épargne constitués conformément aux dispositions du chapitre IV du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail
La parole est à M. Philippe Dominati, pour présenter ces trois amendements.
M. Philippe Dominati. L’amendement n° 110 consiste à favoriser les plans d’épargne longue, dont nous avons abondamment parlé.
Le projet de loi prévoit d’augmenter le forfait social pour l’ensemble de l’assiette, y compris les versements des entreprises ou des salariés aux plans d’épargne retraite et les versements aux régimes supplémentaires de retraite. Ces sommes constituent un investissement de long terme qu’il convient de préserver avec un régime fiscal attractif. À défaut, les salariés et les entreprises risquent d’être incités à placer les mêmes sommes à plus court terme.
Pour éviter un tel effet d’éviction et protéger la retraite des salariés, cet amendement vise à étendre la dérogation prévue pour les versements aux organismes de prévoyance aux versements au profit des régimes de retraite collectif et obligatoire ou dans le cadre d’un PERCO.
Cela correspond à l’esprit du rapport de la Cour des comptes pour favoriser l’épargne longue.
Les amendements nos 193 et 194 sont des amendements de repli, tendant à séparer en deux le dispositif prévu par l’amendement principal.
M. le président. L'amendement n° 211, présenté par Mmes Espagnac et M. André, MM. Berson, Botrel, Caffet, Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini, Yung et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que pour les sommes affectées à la réserve spéciale de participation conformément aux modalités définies à l’article L. 3323-3 du code du travail au sein des sociétés coopératives ouvrières de production soumises aux dispositions de la loi n° 78-763 du 19 juillet 1978 portant statut des sociétés coopératives ouvrières de production
La parole est à Mme Frédérique Espagnac.
Mme Frédérique Espagnac. Si le forfait social vient assujettir depuis 2009 les éléments de rémunération jusqu’alors exonérés de cotisations sociales, le taux existant est trop faible.
En effet, ces éléments d’imposition complémentaire, notamment l’épargne salariale et la participation, sont aujourd’hui soumis à un forfait de 8 %, auquel s’ajoute la seule CSG. Sachant que le taux de cotisations sociales pesant sur les salaires est de 42%, le rapport est de un à cinq. Dès lors, la tentation est grande pour les employeurs de substituer de tels avantages aux hausses de salaires directs.
Certes, l’épargne salariale, notamment l’épargne salariale solidaire, est une source de financements importants pour les entreprises. Mais, étant issue du travail, elle doit, comme les salaires, servir de base au financement des prestations sociales bénéficiant aux salariés. Le passage de 8 % à 20% du taux, prévu par le présent projet de loi de finances rectificative, était d’ailleurs, peu ou prou, celui qui était suggéré par la Cour des comptes – je l’ai indiqué tout à l’heure –, afin de concourir à l’effort juste qui nous incombe pour le rétablissement des comptes publics.
Cependant, si un tel principe est indispensable, des dérogations le sont tout autant. Le Gouvernement a fait le choix de la justice fiscale. Or celle-ci s’exprime aussi dans l’adaptation des mesures aux spécificités.
Des propositions ont été faites. Elles consistent en une hausse progressive ou en une différenciation des taux. Le choix d’un passage généralisé à 20 % est, me semble-t-il, le plus adapté. Je pense qu’il y a aujourd'hui urgence. Et c’est bien à un rapprochement fiscal rapide et efficace qu’il faut parvenir.
La différenciation du taux selon le type d’employeur, ou selon le type de fonds abondé, posait des difficultés juridiques et un problème de cohérence d’ensemble.
Néanmoins, l’amendement que je vous soumets vise à prendre en compte la spécificité des sociétés coopératives et participatives. En effet, le maintien à 8 % est à la fois nécessaire et possible.
Dans ces sociétés, la participation des salariés-associés représente en moyenne 40 % du capital social. En effet, les statuts limitant les possibilités de financement extérieur, les SCOP ne peuvent donc, pour l’essentiel, que compter sur leur propre investissement. Pour consolider leurs fonds propres, les SCOP n’ont ainsi d’autres choix que de recourir à la participation des salariés-associés.
Or l’augmentation du taux du forfait social de 8 % à 20 % entraînerait une diminution directe de leur capacité d’investissement. Au regard des chiffres de l’année 2010, cette augmentation entraînerait une diminution de la participation de près de 8 millions d’euros chaque année, menaçant directement leur pérennité.
Le maintien en l’état de l’article 27 du PLFR pour 2012 irait à l’encontre de la politique de développement des SCOP voulue par M. le ministre délégué à l’économie sociale et solidaire et à la consommation.
Monsieur le ministre, vous avez en effet prévu de réserver une partie des financements de la future banque publique d’investissement à la transmission et au rachat d’entreprises en SCOP, et de mettre en place un droit de préférence à égalité d’offre pour le rachat d’une entreprise par ses salariés.
Par l’amendement que je défends aujourd’hui, j’ai l’intime conviction que je m’inscris dans votre volonté de développer les sociétés coopératives.
C’est pourquoi je vous invite, mes chers collègues, à voter en faveur de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 212 rectifié, présenté par M. Patient, Mme Claireaux, MM. Desplan, J. Gillot, S. Larcher, Mohamed Soilihi, Tuheiava, Vergoz et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
et pour les contributions des employeurs des départements d’outre-mer sur le versement du bonus exceptionnel prévu à l’article 3 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 170, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
« Ce taux est de 16 % :
« - pour les sommes issues de la participation et de l’intéressement investies par le salarié dans un fonds commun de placement d’entreprise solidaire défini aux articles L. 3332-17 du code du travail et L. 214-39 du code monétaire et financier dans le cadre d’un plan d’épargne d’entreprise défini à l’article L. 3332-1 du code du travail ou d’un plan d’épargne pour la retraite collectif défini à l’article L. 3334-1 de ce même code ;
« - pour les versements complémentaires de l’employeur dans un fonds commun de placement d’entreprise solidaire défini à l’alinéa précédent. » ;
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur ces différents amendements ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les amendements nos 92, 109, 110, 193 et 194 procèdent de la même logique : il s’agit d’exonérer de la hausse du forfait social certains éléments de son assiette.
L’amendement n° 92 de M. Philippe Marini diffère sur la méthode. Il gage en quelque sorte le moindre taux, qu’il souhaite appliquer au PERCO : 11 % contre 20 %.
Pour autant la commission y est défavorable, comme elle l’est aux quatre autres amendements, pour les raisons déjà longuement évoquées précédemment.
L’amendement n° 211, défendu à l’instant par Frédérique Espagnac, vise à exonérer de la hausse du forfait social les sociétés coopératives et participatives, qui relèvent d’une situation tout à fait spécifique : la commission y est favorable.
Sur l’amendement n° 212 rectifié, la commission souhaite connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Par l’amendement n° 92, M. Marini souhaite favoriser d’une certaine manière l’épargne retraite par rapport à l’intéressement et à la participation. Je ne prétends pas être forcément le mieux placé pour distinguer entre les uns et les autres au regard de ce que, au nom du Gouvernement, je propose au Sénat d’adopter. Pour autant, compte tenu du débours qu’une telle disposition entraînerait pour les finances de l’État – je dois être vigilant à cet égard –, je ne peux accepter cet amendement.
M. Philippe Marini. Je suis déçu, mais pas surpris !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’amendement n° 109 de Mme Isabelle Debré consiste à créer une niche dans la niche en instaurant un régime particulier au sein même de la participation. Là encore, je ne prétends pas être plus légitime que vous, madame la sénatrice, – j’ai trouvé vos explications parfaitement sincères et peut-être même convaincantes – mais, pour les raisons déjà indiquées, je ne peux malheureusement pas accepter votre amendement.
Par son amendement de repli, M. Philippe Dominati demande que les salariés aient finalement le choix une fois que les entreprises ont effectué le versement ; autrement dit, le régime fiscal et social auquel les entreprises seraient soumises dépendrait d’un choix qui ne serait pas le leur mais celui des salariés. Il me semble que ce seul mécanisme pourrait justifier le rejet, mais, par ailleurs, il amputerait la recette espérée. Donc, à ce titre, je ne peux pas non plus accepter votre amendement, monsieur le sénateur, et j’espère que vous le comprendrez.
Sur l’amendement n° 212 rectifié de Georges Patient, qui consiste à exempter le bonus outre-mer résultant des accords Bino, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Enfin, concernant l’amendement n° 211, Mme Frédérique Espagnac propose, dans la ligne de ce que nous avons d’ailleurs déjà présenté et que le Sénat semble avoir accepté, un traitement particulier pour les SCOP. Le Gouvernement donne un avis favorable, comme il l’avait fait pour la disposition relative aux provisions pour investissement.
M. Philippe Marini. Quelle tristesse !
M. le président. Monsieur Caffet, l'amendement n° 212 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Caffet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 212 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 108 est présenté par Mme Des Esgaulx et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
L'amendement n° 128 rectifié est présenté par MM. Marseille, Dubois, J. Boyer, Roche, Tandonnet et Amoudry.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 11
Remplacer la date :
1er août 2012
par la date :
1er janvier 2013
La parole est à Mme Isabelle Debré, pour présenter l'amendement n° 108.
Mme Isabelle Debré. La date de prise d’effet de l’augmentation en une seule fois de douze points du forfait social fixée au 1er août 2012 n’en supprime pas le caractère profondément rétroactif au regard de la distribution des primes d’intéressement et de la réserve spéciale de participation à l’ensemble des salariés.
Cette disposition s’inscrit même totalement à rebours de la volonté du Gouvernement d’établir une loyauté fiscale et sociale.
Une telle augmentation aurait eu davantage sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 que dans un projet de loi de finances rectificative pour 2012.
En effet, l’année 2012 verra le versement de primes d’épargne salariale acquises au titre de 2011, dont le résultat est déjà clos. Augmenter de douze points le forfait social sur les sommes et les primes versées par les entreprises aura un très fort impact sur la trésorerie des entreprises. Celles-ci intègrent en effet dans leurs provisions à la fois les sommes dédiées et les prélèvements sociaux y afférent. Or une telle augmentation du forfait social n’a pu être légitimement provisionnée.
Afin de ne pas déstabiliser la situation financière déjà fragile des entreprises, en particulier des PME, il convient de repousser la date de prise d’effet d’une augmentation aussi massive du forfait social du 1er août 2012 au 1er janvier 2013.
M. le président. La parole est à M. Hervé Marseille, pour présenter l'amendement n° 128 rectifié.
M. Hervé Marseille. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’avis est défavorable, puisque ces amendements sont en totale contradiction avec la logique de rendement qui est recherchée par ce projet de loi de finances rectificative. Leur adoption coûterait 550 millions d’euros !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 108 et 128 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 27, modifié.
(L'article 27 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 27
M. le président. L'amendement n° 39 rectifié, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le cinquième alinéa du II quater de l’article 1411 du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale réalisée dans les conditions prévues par l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, la correction des abattements intercommunaux prévue au présent II quater continue à s’appliquer sur le territoire des établissements publics de coopération intercommunale préexistants à la fusion. »
II. – Le I entre en vigueur à compter des impositions établies au titre de 2013.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Les trois amendements nos 39 rectifié, 40 et 41 procèdent de la même philosophie. Si vous le permettez, monsieur le président, je les présenterai en même temps.
M. le président. J’appelle donc en discussion les deux amendements suivants.
L'amendement n° 40, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le IV de l’article 1638-0 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La réduction du taux de taxe d’habitation prévue au premier alinéa du présent paragraphe s’applique également aux communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale soumis au 1er janvier 2011 à la fiscalité propre additionnelle et qui applique, l’année précédant la fusion, les dispositions de l’article 1609 nonies C. »
L'amendement n° 41, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa du 1 du I de l’article 1647 D du code général des impôts, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l’établissement public de coopération intercommunale applique les dispositions de l’article 1609 nonies C à l’issue d’un changement de régime fiscal ou d’une fusion, la base minimum applicable la première année suivant le changement de régime fiscal ou la fusion est égale au montant de la base applicable sur le territoire de chacune des communes au cours de l’année du changement de régime fiscal ou de la fusion.
« À défaut de délibération de l’organe délibérant avant le 31 décembre de l’année suivant l'arrêté de fusion ou, en cas de changement de régime fiscal, le montant de la base minimum de la deuxième année est égal à la moyenne des bases minimales fixées par les conseils municipaux pour les contribuables dont le montant du chiffre d’affaires ou des recettes hors taxes au cours de la période de référence définie à l’article 1467 A est inférieur à 100 000 € et pour les autres contribuables. Pour l’application de cette disposition, les montants de base minimum sont pondérés par le nombre de locaux constatés sur l’ensemble des communes membres de l’établissement public de coopération intercommunal l’année précédente et augmentés de l’évolution des prix hors tabac. »
Veuillez poursuivre, monsieur le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit de profiter de ce projet de loi de finances rectificative pour apporter, dans l’urgence, quelques éléments de précision à des territoires qui connaissent en ce moment des fusions d’intercommunalités. Plusieurs départements nous ayant informés que quelques difficultés pouvaient surgir ici ou là, il s’agit donc de porter remède aux problèmes rencontrés sur le terrain dans la mise en œuvre de ces fusions consécutives à la loi sur les regroupements intercommunaux.
L’amendement n° 39 rectifié vise à maintenir la correction des abattements départementaux de taxe d’habitation en cas de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale. Il prévoit de corriger un oubli de la rédaction actuelle, en supprimant ces dysfonctionnements qui seraient susceptibles de constituer un frein aux opérations de fusion qui ont été encouragées par la loi de réforme territoriale votée en décembre 2010.
L’amendement n° 40 prévoit, quant à lui, de sécuriser l’interprétation de la loi concernant la réduction automatique du taux de taxe d’habitation en cas de fusion.
En cas de fusion de communautés, est prévu un mécanisme de réduction automatique des taux communaux de taxe d’habitation à hauteur de la part départementale transférée dans le cadre de la réforme de la taxe d’habitation.
La solution à retenir n’a pas été clairement explicitée lorsqu’une communauté de communes à fiscalité additionnelle en 2011 opte en faveur de la fiscalité professionnelle unique, la FPU, ou fusionne avec une autre communauté à FPU.
Il s’agit de sécuriser l’interprétation et de considérer que la non-application du dispositif de correction des taux pourrait se traduire, pour les communes concernées, par une hausse importante de leur fiscalité et, en l’occurrence, il y a quelques cas en France. En conséquence, il s’agit de porter remède à ces difficultés.
Enfin, l’amendement n° 41 vise à définir les modalités de mise en place d’une base minimum de cotisations foncières des entreprises, la CFE, à l’issue d’une fusion. De ce point de vue, le code général des impôts ne prévoyant pas l’obligation pour l’EPCI de procéder à une harmonisation du montant de la base minimum retenue alors que le taux de CFE sera, lui, harmonisé sur le territoire, le présent amendement vise à ce que l’harmonisation soit effectuée automatiquement par les services de l’État au titre de la deuxième année suivant la fusion.
Il s’agit, dans les trois cas, d’apporter quelques précisions utiles et de sécuriser les processus de fusion et de regroupement ainsi que de porter remède aux difficultés qui ont surgi au cours des mois précédents.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 39 rectifié qui vise à limiter les variations de cotisations de taxe d’habitation en cas de fusion d’EPCI. En tant qu’élus locaux nous avons tous, les uns et les autres, des exemples en tête. Cette disposition est donc particulièrement bienvenue.
Avec l’amendement n° 40, il s’agit, là encore, de tenter de régler des problèmes dont nous connaissons la réalité. Cet amendement a pour objet d’étendre la neutralisation de la double prise en compte du taux départemental de taxe d’habitation dans le cas particulier d’un EPCI à fiscalité additionnelle en 2011 devenu, par la suite, un établissement à fiscalité professionnelle unique et qui fusionne avec un EPCI à fiscalité professionnelle unique.
Il s’agit bien de répondre à une difficulté qu’aujourd’hui un certain nombre d’élus locaux rencontrent. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement ne peut que souscrire à votre initiative et est donc favorable à cet amendement, en vous remerciant d’avoir saisi l’occasion de l’examen de ce projet de loi de finances rectificative pour porter remède à ce problème qui est connu de nous tous depuis bien longtemps.
J’espère que vous ne m’en voudrez pas d’être moins favorable à l’amendement n° 41.
Le problème est identifié, là encore : il concerne non seulement les fusions d’EPCI mais aussi les créations ex nihilo et les rattachements de communes. Toutefois, le traitement de ce problème renvoie à une discussion budgétaire un peu plus complexe, un peu plus lourde de conséquences.
Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement afin que nous puissions prendre le temps de mesurer précisément les enjeux, ce que, à l’heure actuelle, le Gouvernement n’est pas en mesure de faire de façon satisfaisante.
Le Gouvernement est donc favorable aux amendements nos 39 rectifié et 40. En revanche, il demande le retrait de l’amendement n° 41, pour ne pas avoir à demander au Sénat de voter contre.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Les services du Gouvernement ne pourraient-ils pas mener quelques investigations avant la commission mixte paritaire ?
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote sur l'amendement n° 41.
M. Alain Richard. J’irai dans le sens du Gouvernement. À la lecture de l’amendement, il est clair que le dispositif s’applique de façon automatique au 31 décembre. Pour les quelques fusions qui seraient réalisées à l’amiable, donc sans décision du préfet, avant la fin de cette année, l’entrée en vigueur immédiate du dispositif risquerait de ne pas laisser un délai suffisant aux organes délibérants pour procéder au vote des nouvelles dispositions. Dans ce cas, c’est le système automatique qui s’appliquerait.
Il serait préférable que, localement, les services alertent les élus sur ce point et que, en cas de fusions entraînant des ajustements de fiscalité, notamment parce que les fiscalités préexistantes des communautés intéressées étaient différentes, cela soit reporté sur l’année 2013.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 27.
Je mets aux voix l'amendement n° 40.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 27.
Monsieur le rapporteur général de la commission des finances, l'amendement n° 41 est-il maintenu ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. J’ai noté que le ministre délégué, ainsi que ses services, avait bien conscience du problème, mais que les questions techniques relatives aux modalités de mise en œuvre des correctifs nécessaires nécessiteraient sans doute plusieurs semaines d’investigations.
Dans ces conditions, il me semble que l’on peut reporter la décision à la fin de l’année. Je retire donc l'amendement n° 41.
M. le président. L'amendement n° 41 est retiré.
L'amendement n° 228, présenté par M. Jarlier, est ainsi libellé :
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - En cas de fusion d’établissements publics de coopération intercommunale réalisée dans les conditions prévues par l’article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales, le taux de taxe d’habitation à prendre en compte pour le calcul des compensations d’exonérations pour un établissement public de coopération intercommunale issu d’une fusion est majoré en fonction des taux retenus déterminant les allocations compensatrices versées au profit des départements pour la taxe d’habitation.
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pierre Jarlier.
M. Pierre Jarlier. Cet amendement va dans le même sens que ceux du rapporteur général de la commission des finances. Il tend à corriger un oubli rédactionnel du législateur concernant les exonérations de taxe d’habitation en cas de fusion d’EPCI.
L’article 21 de la loi de finances pour 1992 a remplacé les dégrèvements de taxe d’habitation accordés aux personnes économiquement faibles par des exonérations. Les pertes de recettes subies par les collectivités locales et leurs groupements du fait de ces exonérations sont compensées par l’État.
La compensation, pour les communes et les EPCI, est égale au produit des bases par le taux de taxe d’habitation voté en 1991 par la collectivité. Toutefois, ce taux est majoré du taux départemental, compte tenu du transfert de la part départementale de cette taxe au profit du bloc communal à la suite de l’entrée en vigueur de la réforme de la taxe professionnelle.
En cas de fusion, cette compensation devrait logiquement être récupérée par le nouvel EPCI, ce qui n’est malheureusement pas le cas aujourd'hui. En 2011, plusieurs EPCI issus d’une fusion n’ont ainsi pas pu bénéficier de cette compensation.
Cet amendement tend à corriger cette situation en inscrivant clairement dans la loi les modalités de calcul de la compensation après fusion.
Les exonérations dont il s’agit concernent les personnes âgées à faibles revenus et les personnes handicapées. Les compensations étaient, il faut le savoir, totales pour chacun des EPCI et sont appelées à disparaître du fait de la fusion. La perte de bases de taxe d’habitation qui en découle peut atteindre 10 %, ce qui empêche certaines fusions d’aller jusqu’à leur terme.
Pour les zones rurales où les revenus sont parfois très faibles et le pourcentage de personnes âgées élevé, cette situation peut être tout à fait pénalisante en termes d’élargissement du champ de l’intercommunalité.
Nous suggérons donc de rétablir la compensation de ces exonérations pour permettre des fusions aujourd'hui bloquées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement tend à préciser que, en cas de fusion d’EPCI, le nouvel EPCI bénéficie des compensations d’exonération de taxe d’habitation attribuées aux anciens EPCI. Cette mesure paraît logique. J’ai indiqué aux membres de la commission des finances que j’étais a priori plutôt favorable à cet amendement, et mes collègues ont considéré que la mise en œuvre d’un tel dispositif avait effectivement du sens.
Cette récupération paraît donc logique, même si nous nous posons encore quelques questions sur les modalités de sa mise en œuvre, pour laquelle une expertise technique est nécessaire. Nous aimerions connaître votre point de vue sur ce sujet, monsieur le ministre délégué.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je comprends très bien la finalité de cet amendement qui tend, en toute cohérence, à appliquer au nouvel EPCI les règles qui s’appliquaient à l’un ou l’autre des EPCI préexistants ou aux deux.
Cet amendement a un coût, et vous en êtes d’ailleurs tellement convaincu, monsieur le sénateur, que vous avez dû le gager. Comme j’ignore le montant de ce coût, il m’est difficile de donner, en conscience, un avis favorable à votre amendement. Vous ne comprendriez pas, au vu des propos que j’ai tenus tout au long de ces débats, que je ne garde pas un œil vigilant sur le niveau des finances publiques.
Je crois, toujours en conscience, que ce coût pourrait être acceptable. Mais en l’absence de certitudes à cet égard, je ne peux pas donner un avis favorable. En revanche, je m’engage sincèrement à vous communiquer un chiffrage de ce coût en loi de finances initiale afin que nous puissions tenter, dans cette enceinte – et peut-être sur votre initiative, monsieur Jarlier –, de régler cette affaire en toute connaissance de cause.
Dès lors que le coût de cette mesure serait acceptable, modéré, le Gouvernement pourrait donner son accord. S’il paraissait excessif, très loyalement je vous l’indiquerai et assumerai ma demande de rejet de votre proposition.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je comprends que vous souhaitiez, les uns et les autres, que le Sénat se prononce, car cet amendement est parfaitement logique et sa finalité tout à fait admissible. J’espère que les arguments avancés par le Gouvernement pour ne pas l’accepter sont compris de tous.
Si cet amendement est rejeté, ce que je souhaite, nous reviendrons sur cette question en loi de finances initiale. Je m’engage devant vous à disposer, à ce moment-là, du chiffrage de ce coût afin que votre assemblée puisse, je le répète, se prononcer en toute connaissance de cause.
Si l’amendement n’est pas retiré, ou dans l’hypothèse où il serait repris, je vous appelle, mesdames, messieurs les sénateurs, à le rejeter.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le ministre délégué, j’avoue ne pas bien comprendre l’argument du coût.
Si les EPCI ne fusionnent pas, il n’y a pas de coût, puisque chacun d’entre eux continue à bénéficier de ses ressources.
Si les EPCI fusionnent, l’État, si je vous suis bien, peut en retirer un bénéfice… (Sourires.) Vous raisonnez là comme doit le faire tout ministre du budget, par rapport à la meilleure référence possible.
Du point de vue des collectivités territoriales concernées, si j’ai bien compris le raisonnement de M. Jarlier, il n’y a pas de coût, puisqu’il ne s’agit que de maintenir l’existant et de neutraliser la fusion.
M. Pierre Jarlier. C’est cela !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je ne sais pas si l’amendement est totalement opérationnel, mais je le suppose, sachant qu’il a été bien préparé. Sans doute une analyse complémentaire pourrait-elle être conduite d’ici à la commission mixte paritaire.
À mon sens, nous pourrions raisonnablement voter cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. Je reprendrai à mon compte les propos du président de la commission des finances.
Monsieur le ministre délégué, il faut tout de même aller en commission mixte paritaire avec quelques « billes ». Sinon, à quoi sert-elle ?
D’ici à lundi, cet amendement pourra être expertisé. Comme l’a rappelé Pierre Jarlier, des opérations de fusion sont aujourd'hui bloquées. Il faut donc envoyer un signal compréhensible. Aussi serait-il bon, monsieur le ministre délégué, de vous en remettre à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le président de la commission des finances, monsieur Arthuis, je comprends très bien votre argument, mais j’espère aussi que vous avez entendu le mien.
Vous souhaitez aller en commission mixte paritaire en ayant voté cet amendement. Les services s’efforceront de préciser le coût de la mesure, étant précisé qu’il s’agit du coût existant par rapport au droit et non par rapport aux deux EPCI préexistants.
Je m’en remets donc à la sagesse du Sénat.
M. Pierre Jarlier. Vous avez entendu nos arguments, monsieur le ministre délégué, et je vous remercie !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 27.
M. Philippe Dallier. Quel succès !
M. le président. L'amendement n° 213, présenté par M. Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le mot : « environnement », la fin de la seconde phrase du premier alinéa du 1 du I de l’article 1517 du code général des impôts est supprimée.
II. - Le I s’applique à compter des impositions établies au titre de l’année 2012.
III. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du présent article sont compensées à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
IV. - La perte de recettes pour l’État résultant de la majoration de la dotation globale de fonctionnement est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.
M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement a déjà été adopté par le Sénat lors de l’examen d’une précédente loi de finances, après avoir été brillamment défendu par François Marc, ce dont je le remercie de nouveau.
Mes chers collègues, cet amendement a pour objet de mettre fin à une injustice. L’absence de réforme, pourtant nécessaire, des valeurs locatives s’est traduit par de très grandes injustices. Je peux citer le cas d’un quartier neuf d’une ville nouvelle dont les habitants sont davantage taxés au titre des impôts locaux, en particulier de la taxe d’habitation, que les habitants de quartiers plus anciens, alors même que la valeur effective de leurs logements est devenue très différente.
Les habitants ont déposé de multiples recours devant le tribunal administratif, lequel a enjoint les services fiscaux de majorer les coefficients d’entretien et de situation qui, vous le savez, contribuent à l’établissement de la valeur locative. Les habitants se sont alors tournés vers les services fiscaux. Or, alors même que la juridiction administrative avait jugé qu’il était nécessaire de procéder à une réparation de 4 %, 5 % ou 6 %, les services fiscaux ont argué de l’article 1517 du code général des impôts pour s’y refuser.
Aux termes de cet article, si vous êtes floué de plus de 10 %, une réparation est possible. S’il est établi que le taux est inférieur à 10 %, on ne peut donner aucune suite à votre demande. Il y a là une profonde injustice à laquelle on ne peut mettre fin qu’en modifiant le texte, ce que prévoit cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Comme l’a rappelé M. Sueur, la commission des finances avait déjà examiné cet amendement et l’avait défendu lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012.
Il s’agit de réaliser la mise à jour des valeurs locatives foncières, y compris lorsque les changements qui la justifient portent sur des modifications inférieures à un dixième de la valeur locative. Toute modification inférieure à 10 %, actuellement exclue des incidences de fait de la révision des valeurs locatives, serait dorénavant prise en considération. Cette mesure permettrait d’ajuster, pour chaque contribuable, l’impôt local dont il s’acquitte en conséquence.
Bien entendu, nous sommes favorables au principe, puisqu’il s’agit, par cet amendement, d’introduire une certaine forme d’égalité dans la révision.
Toutefois, monsieur le ministre délégué, la commission des finances s’est interrogée sur les modalités techniques du dispositif et sur le travail que son adoption représenterait pour les services. En effet, la moindre modification des valeurs locatives – de 1 %, 2 %, 3 %... – nécessiterait que l’administration entreprenne automatiquement les correctifs nécessaires, soit, pour les services, une sollicitation importante.
Mais on ne peut qu’être d’accord avec les objectifs visés : la justice et l’équité de traitement de nos contribuables face aux valeurs locatives.
Si cet amendement recueillait un avis défavorable du Gouvernement, le suivant, l’amendement n° 38, qui s’inscrit dans la perspective d’une révision globale des valeurs locatives, permettrait sans doute d’apporter quelques éléments de réponse, bien que de façon un peu plus éloignée dans le temps.
Pour l’heure, il est souhaitable d’entendre le Gouvernement sur l’amendement n° 213.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le sénateur, pour en avoir parlé il y a quelque temps avec vous, je connais le prix que vous attachez à cet amendement. Vous avez parfaitement exposé le problème.
Fixer un seuil de un dixième de la valeur locative évite une mise à jour de cette dernière à l’occasion de chaque modification – fût-elle notable – inférieure à 10 %.
Cependant, l’adoption de votre amendement conduirait à ce que des modifications inférieures – par exemple, de 1 % ou de 2 % – commandent et à l’administration et aux communes d’en tenir compte, créant, pour les uns et pour les autres, une réelle instabilité.
Je ne crois pas que le travail de l’administration s’en trouvera facilité. En tout cas, celui des élus locaux ne le sera pas, bien au contraire !
Au demeurant, l’administration garde la trace des évolutions antérieures et les reprend dès lors que le seuil de 10 % a été franchi du fait d’une décision de politique publique. Autrement dit, ces modifications ne sont pas perdues.
Il n’y a donc pas de perte pour les communes. En revanche, je conçois qu’il existe une perte de temps, mais elle n’est pas illégitime, sauf à estimer que des modifications tout à fait mineures devraient être prises en considération tous les ans, ce qui, je le crois sincèrement, ne simplifierait certainement pas le travail de l’administration – ce n’est sans doute pas l’objet principal de l’amendement - ni celui des élus, auxquels nous sommes davantage sensibles.
Par conséquent, je ne crois pas que l’adoption de cet amendement soit souhaitable, même si, encore une fois, j’en comprends la motivation. Monsieur le sénateur, l’enfer est pavé des meilleures intentions et je crains que le résultat ne soit pas à la hauteur de vos espérances, voire que la situation empire, y compris dans les bassins de vie que nous connaissons bien.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable, et croyez bien que je le regrette.
M. le président. Monsieur Sueur, l’amendement est-il maintenu ?
M. Jean-Pierre Sueur. Tout d’abord, je remercie la commission de son avis favorable.
Monsieur le ministre, je comprends vos propos ; le même discours m’avait d'ailleurs été tenu par quelques-uns de vos prédécesseurs
Cela fait sept ans que je mène ce combat, au nom de centaines d’habitants à qui la justice a donné raison. C’est bien une décision de justice, et non pas une simple décision administrative, qui a enjoint l’administration fiscale à corriger ce qui est une injustice manifeste.
Il est tout de même difficile de soutenir à de nombreuses personnes auxquelles un tribunal a donné raison en décidant que leurs impôts locaux devaient être rendus plus justes qu’une telle rectification est finalement impossible.
Monsieur le ministre délégué, je comprends vos arguments, mais vous devez aussi comprendre qu’il y a là une véritable injustice.
Donc, je maintiens l’amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Sueur, je comprends votre position : une décision de justice a été rendue ; elle doit s’appliquer.
Si je prends l’engagement que les rôles seront révisés conformément aux décisions de justice dont bénéficient ces habitants, une disposition d’ordre général que je crois potentiellement préjudiciable à beaucoup n’est peut-être plus indispensable, et vous pourriez peut-être accepter, monsieur Sueur, de retirer votre amendement.
Dans cette hypothèse, je peux m’engager, au nom de mon administration, à ce que les rôles soient révisés à mesure des décisions de justice rendues, sans pour autant que la loi soit modifiée. En effet, je le répète, je crains que l’application à tous du dispositif que vous proposez n’entraîne des inconvénients majeurs dans beaucoup de collectivités.
En d’autres termes, si l’on tentait de faire du sur-mesure plutôt que d’adopter une norme générale, vous y trouveriez votre compte sans que quiconque en pâtisse.
Telle est la proposition que je vous fais, monsieur Sueur.
M. le président. Monsieur Sueur, qu’en est-il en définitive de l'amendement n° 213 ?
M. Jean-Pierre Sueur. Je vais le retirer, monsieur le président, eu égard à l’engagement que le Gouvernement a pris publiquement de revoir les rôles en fonction de l’ensemble des décisions de justice existantes.
Au demeurant, les cas où la justice a statué ne sont pas si nombreux.
Monsieur le ministre délégué, votre engagement est important, car il concerne un certain nombre de citoyens. Vous vous en doutez, il y a un exemple auquel je pense tout particulièrement, même si je ne l’ai pas cité.
Néanmoins, ce point de notre législation demeure insatisfaisant et, même si l’amendement de François Marc était adopté dans quelques instants, ce que je souhaite de tout cœur, il serait tout de même juste de le modifier dans le cadre de la révision des valeurs locatives. Que cela soit fait à la faveur de la prochaine loi de finances ou un peu plus tard, on ne peut, monsieur le ministre délégué, pérenniser un système contraire à la justice, qui donne réparation à ceux qui sont floués de 11 %, mais pas à ceux qui ne le sont que de 8 ou de 9 %.
Par conséquent, monsieur le ministre délégué, je vous remercie de l’engagement que vous avez pris mais, si vous en êtes d’accord, j’enregistre aussi qu’une solution doit être trouvée dans le cadre des réformes à venir - peut-être, tout simplement, l’abaissement du seuil - pour mettre fin à cet effet de seuil, qui produit d’évidentes injustices.
Je retire donc l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 213 est retiré.
L'amendement n° 38, présenté par MM. Marc et Jarlier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Après l’article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. L’article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 est ainsi modifié :
1° Au second alinéa du I, la date : « 1er janvier 2012 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2013 » ;
2° À la fin de la dernière phrase du XI, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2016 » ;
3° Le XVI est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, l’année : « 2014 » est remplacée par l’année : « 2015 » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « et aux articles 1499 et 1501 du code général des impôts » sont supprimés ;
c) Au a), la date : « 1er janvier 2011 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2012 » et l’année : « 2012 » est remplacée par l’année : « 2013 » ;
d) Après le mot : « révisées », la fin du b) est ainsi rédigée : « au 1er janvier 2013 de ces propriétés » ;
e) À l’avant-dernier alinéa, les mots : « et pour la cotisation foncière des entreprises » sont remplacés par les mots : « , la cotisation foncière des entreprises, la taxe d’habitation et la taxe d’enlèvement des ordures ménagères » ;
f) Au dernier alinéa, les mots : « ou en application des articles 1499 ou 1501 du code général des impôts » sont supprimés et la date : « 1er janvier 2012 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2013 » ;
4° À la première phrase du XVII, les mots : « en 2012 » sont supprimés ;
5° Au B du XVIII, la date : « 1er janvier 2014 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2015 » et la date : « 1er janvier 2013 » est remplacée par la date : « 1er janvier 2014 » ;
6° Il est complété par un paragraphe XXII ainsi rédigé :
« XXII. – A – Des exonérations partielles d’impôts directs locaux sont accordées au titre des années 2015 à 2018 lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l’année 2015 et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année sans application du XVI du présent article est supérieure à 200 euros et à 10 % du second terme de cette différence.
« Pour chaque impôt, l’exonération est égale à 4/5ème de la différence définie au premier alinéa pour les impositions établies au titre de l’année 2015 puis réduite d’un cinquième de cette différence chaque année.
« L’exonération cesse d’être accordée à compter de l’année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété fait l’objet d’un des changements mentionnés au I de l’article 1406 du code général des impôts.
« B. Les impôts directs locaux établis au titre des années 2015 à 2018 sont majorés lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l’année 2015 sans application du XVI du présent article et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année est supérieure à 200 euros et à 10 % du second terme de cette différence.
« Pour chaque impôt, la majoration est égale à 4/5ème de la différence définie au premier alinéa pour les impositions établies au titre de l’année 2015 puis réduite d’un cinquième de cette différence chaque année.
« Cette majoration est supprimée à compter de l’année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété fait l’objet d’un des changements mentionnés au I de l’article 1406 du code général des impôts.
« C. Pour l’application des A et B :
« 1. Les impôts directs locaux s’entendent de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe d’habitation et de leurs taxes annexes.
« 2. La différence définie au premier alinéa des A et B s’apprécie pour chaque impôt en tenant compte de ses taxes annexes et des prélèvements prévus à l’article 1641 du code général des impôts.
« Elle s’apprécie par propriété ou fraction de propriété bâtie.
« 3. Selon le cas, le coût de l’exonération ou la majoration est réparti entre les collectivités territoriales et, le cas échéant, les établissements publics de coopération intercommunale, les établissements publics fonciers, les chambres de commerce et d’industrie et les chambres de métiers et de l’artisanat au prorata de leur part dans la somme des variations positives de chaque fraction de cotisation leur revenant. »
II. A. La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du lissage des évolutions de cotisations est compensée à due concurrence par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
B. La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
C. La perte de recettes résultant pour les établissements publics fonciers, les chambres de commerce et d’industrie et les chambres de métiers et de l’artisanat du lissage des évolutions de cotisations est compensée à due concurrence par une majoration des taxes qui leur sont affectées.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement est important à nos yeux puisqu’il fait suite, d’une part, à un important travail de la commission des finances et, d’autre part, au rapport que Pierre Jarlier et moi-même lui avons présenté et qu’elle a adopté.
J’en résume très brièvement l’esprit, même si je crois que vous avez tous pris connaissance de ce document et de l’amendement que nous avons déposé.
À partir d’une loi de 2010, l’État s’est engagé dans un processus de révision générale des valeurs locatives foncières pour les locaux professionnels. Ce processus, qui a comporté une phase d’expérimentation dans cinq départements, laquelle a permis de dégager un certain nombre d’enseignements utiles, est aujourd'hui à l’arrêt.
Le rapport sur la révision des valeurs locatives professionnelles, qui devait être remis au Parlement à la fin de l’année 2011, ne l’a été qu’en février 2012. Depuis, tout le monde est en stand-by, puisque des dispositions législatives sont nécessaires pour réenclencher le processus.
C’est à cette fin que, nous appuyant sur les enseignements de l’expérimentation menée dans les cinq départements, nous avons suggéré un certain nombre de modalités de mise en œuvre permettant une réelle application d’un dispositif de revalorisation des valeurs locatives répondant à toutes les exigences à partir du 1er janvier 2015.
Tel est l’objet du dispositif proposé ici.
Premièrement, cet amendement vise à reporter d’une année la révision des valeurs locatives des locaux professionnels. En effet, nous considérons que le délai qui nous sépare du 1er janvier 2015 ne sera pas de trop pour mettre en œuvre un dispositif qui sollicitera fortement les services de la Direction générale des finances publiques ainsi que l’ensemble des partenaires et des collectivités.
Deuxièmement, il tend à exclure les locaux industriels du champ d’application du coefficient de neutralisation.
Troisièmement, il vise à étendre le coefficient de neutralisation à la taxe d’habitation et à la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Quatrièmement enfin, il tend à instituer un dispositif de lissage sur cinq ans.
Permettez-moi de développer en peu plus longuement les deux principes de ce dispositif : la neutralisation et le lissage.
Pour ce qui est de la neutralisation, dans la masse fiscale perçue à l’échelon communal ou intercommunal, il est convenu qu’il n’y aura pas d’effet d’aubaine ou, au contraire, d’effet pervers pour la fiscalité pesant sur les ménages et que chaque composante de l’impôt local professionnel et de l’impôt « ménages » restera à valeur constante, du moins à périmètre constant – bien entendu, si les périmètres changent, des évolutions sont possibles. Autrement dit, on opère une neutralisation provisoire en attendant la mise en œuvre éventuelle, un jour prochain, d’une revalorisation des valeurs locatives d’habitation.
En ce qui concerne maintenant le lissage, nous avons pensé, et je crois que les associations d’élus, en particulier l’Association des maires de France, partagent cet avis, qu’il était souhaitable de procéder à un lissage sur cinq ans, au regard des variations qui seront constatées, lesquelles seront peut-être importantes pour certains contribuables – cela peut aller de 10% d’augmentation pour certains jusqu’à 50% pour d’autres, ou, en sens inverse, cela peut se traduire par une diminution de 20 %. Ainsi, les ajustements pourront se faire progressivement, « en escalier », et c’est seulement au bout de cinq ans que l’on appliquera réellement les nouvelles valeurs telles que révélées par l’enquête et par l’évaluation détaillée.
Tel est l’objet de cet amendement, auquel la commission des finances, qui avait adopté à l’unanimité le rapport que nous lui avions présenté sur le sujet, a donné un avis favorable.
Si le Sénat adoptait cet amendement, ce serait, monsieur le ministre délégué, un signal important, notamment pour l’ensemble des associations d’élus locaux, qui partagent notre volonté de réviser les valeurs locatives. Avec ce dispositif, accepté par la plupart des partenaires, cette révision, qui a toujours échoué en dépit des tentatives menées depuis une trentaine d’années, pourrait aujourd'hui trouver un aboutissement.
À cet égard, j’appelle de mes vœux un avis favorable du Gouvernement.
M. le président. Le sous-amendement n° 236 rectifié, présenté par MM. Arthuis et Dallier, est ainsi libellé :
Amendement n° 38
I. Supprimer le 6° du I.
II. Supprimer le II.
III. En conséquence, supprimer la référence :
I
La parole est à M. Jean Arthuis.
M. Jean Arthuis. Je remercie et je félicite François Marc et Pierre Jarlier, qui ont conduit une étude de fond et ont présenté un amendement pour que cette réforme tant attendue puisse devenir effective.
C’est peu dire que la répartition de la charge sur la base des valeurs locatives anciennes est devenue totalement injuste : nous allons désormais disposer d’une photographie pour la répartir équitablement.
Un certain nombre de contribuables ont donc, pendant des années, payé sensiblement plus que ce qu’ils devaient, alors que d’autres, dans le même temps, payaient sensiblement moins que ce qu’ils auraient dû acquitter.
Certes, il faut rendre hommage aux associations d’élus, mais ce sont en général, nous le savons, des sanctuaires de prudence… Elles proposent donc de lisser sur cinq ans l’ajustement. Or nous avons déjà beaucoup attendu et nous allons, de surcroît, reporter d’un an la mise en œuvre de la réforme. Cela revient à dire à ceux qui payent trop que, certes, ils ont trop payé pendant des années, mais qu’ils vont pouvoir encore « profiter » de ce statut, puisque des paiements supérieurs à ce qu’ils devraient acquitter seront étalés sur cinq ans ! Aux autres, se trouvant en dessous de la jauge, on dira de bien profiter de leur chance, car la mise à niveau interviendra,… tout doucement !
S’il est acquis que nous avons maintenant un dispositif permettant une répartition véritablement équitable, il faudrait éviter d’en reporter l’application, au nom de la justice. Tel est le sens de notre sous-amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ce sous-amendement ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission est défavorable au sous-amendement. Monsieur Arthuis, vous parliez de la prudence des associations d’élus et il est vrai qu’elles nous avaient suggéré de lisser l’application de la réforme sur un à deux mandats… (M. Philippe Dallier s’esclaffe.) En retenant leur proposition, soit deux mandats, donc en étant extrêmement prudents, nous reporterions l’application de la réforme de douze ans ! Nous avons proposé cinq ans et nous estimons qu’il s’agit d’un délai raisonnable.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très raisonnable !
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Dans ces conditions, je préfère en rester au dispositif tel que nous l’avons envisagé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 38 de François Marc. À cette occasion, je tiens à saluer le travail effectué par M. le rapporteur général de la commission des finances et l’ensemble des parlementaires ayant œuvré avec lui.
Le Gouvernement est en revanche défavorable au sous-amendement qu’a présenté M. Arthuis. J’espère qu’il ne m’en voudra pas trop, mais le mécanisme du lissage imaginé par François Marc…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Et par Pierre Jarlier !
M. le président. Monsieur le ministre délégué, acceptez-vous de lever le gage sur l’amendement n° 38 ?
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 38 rectifié.
La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.
M. Pierre Jarlier. Je m’associe pleinement aux propos de M. le rapporteur général de la commission des finances, puisque nous avons travaillé ensemble sur ce sujet.
Il était devenu urgent que notre fiscalité locale puisse être rénovée, pour qu’elle soit plus juste. Nous avons tous constaté, notamment en raison de l’attractivité grandissante de certains territoires et des difficultés posées à d’autres, je pense ici aux centres-villes et aux périphéries des villes, que certaines situations étaient injustes.
Il était donc logique d’envisager de nouvelles méthodes.
Nous avons choisi la concertation à partir d’un excellent rapport publié par la Direction générale des finances publiques, au mois de février 2012, malheureusement dirais-je, car nous l’attendions plus tôt, ce qui aurait évité de différer la réforme d’un an. Ce report est parfaitement mécanique, car il était impossible de mettre en œuvre un dispositif aussi complexe dans les délais impartis au départ, compte tenu non seulement du décalage provoqué par la remise tardive du rapport mais aussi, il faut savoir le reconnaître, de la « neutralisation » de la période électorale.
D’importantes concertations ont été menées avec les associations d’élus, qui sont tout à fait favorables à cette évolution. Nous proposons aujourd’hui un dispositif qui sera révisé chaque année, ce qui nous permettra de sortir du débat habituel sur la nécessité de faire des révisions, ces dernières devenant systématiques.
Nous avons imaginé, à partir des propositions de la DGFiP, une nouvelle évaluation, laquelle sera mise à jour automatiquement et qui sera fondée à la fois sur une nouvelle grille tarifaire et sur la définition de secteurs d’évaluation. Grâce à ce nouveau dispositif, nous serons beaucoup plus précis, puisque ces évaluations seront supracommunales ou infracommunales. Il pourra donc être tenu compte de l’attractivité de certains territoires, à l’intérieur même d’une commune ou à une échelle plus large.
Ce système est donc beaucoup plus juste.
De surcroît, il permettra une implication plus forte des élus dans la définition de ces valeurs. En effet, les fameuses commissions départementales des valeurs locatives des locaux professionnels créées par la loi de finances rectificative pour 2010 vont être mises en place. Elles auront un véritable pouvoir de décision, à partir des propositions de l’État, à la fois sur la localisation et sur l’évaluation. Elles pourront même intervenir à l’intérieur d’un secteur pour imposer des coefficients de pondération.
Cette intervention accrue des collectivités dans l’évaluation des bases nous permettra de parvenir à une fiscalité rénovée et plus juste.
S’agissant du lissage, nous avons retenu une solution mesurée et raisonnable en ce qui concerne tant le délai de cinq ans que le seuil : il faut savoir que seule la moitié des locaux seront concernés par ce lissage, qui ne s’appliquera que dans le cas où l’écart entre l’ancienne taxation et la nouvelle sera supérieur à 10 %, ou à 200 euros.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Frécon, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Vous comptez vraiment travailler demain matin, chers collègues ?...
M. Jean-Claude Frécon. La question de la révision des valeurs locatives nous occupe depuis maintenant vingt-deux ans, c’est-à-dire depuis la loi de 1990 qui avait initié le processus. Malheureusement, cette réforme n’est jamais arrivée au bout !
Dans les associations d’élus, le sujet est évoqué en permanence, tel un véritable serpent de mer. À cet égard, je tiens à féliciter MM. Marc et Jarlier, qui nous ont fait des propositions intéressantes pour sortir de cette difficulté.
Il faut dire que les contribuables de ce pays s’accommodent assez bien de la situation, puisque tous, nous compris, ont payé et paient encore leurs impôts locaux sur la base de valeurs locatives dont la dernière révision date, pour les bâtiments, de 1970…
M. Jean-Pierre Sueur. Absolument !
M. Jean-Claude Frécon. … et, pour les terrains, de 1961. Ce travail s’imposait et je vous remercie de l’avoir entrepris, chers collègues.
Ma seconde observation porte sur le sous-amendement présenté par Jean Arthuis.
Oui, une réforme touchant les contribuables doit être juste ; mais elle doit aussi être acceptable.
Le dispositif qui nous est proposé dans l’amendement est-il tout à fait juste ? Non, vous avez raison, monsieur Arthuis. Mais si la mise en œuvre de la révision des bases entraîne un écart considérable entre ce qui était payé avant et ce qui sera payé après, la réforme sera-t-elle acceptée par les contribuables ? Sans doute par ceux qui bénéficieront d’une forte réduction de leur imposition, mais ceux qui subiront une hausse de 50 %, de 100 %, voire plus – les simulations ont montré que le cas est possible –, trouveront la réforme inacceptable. C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles la réforme du début des années quatre-vingt-dix a capoté.
Je vous rappelle que la loi de 1990 avait prévu un délai de lissage compris entre huit et dix ans ! La proposition médiane de cinq années est donc parfaitement raisonnable.
Aussi, je ne voterai pas le sous-amendement de M. Arthuis.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote. (Marques d’impatience sur les travées de l'UMP.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Votons, maintenant !
M. Philippe Dallier. Je serai bref,…
Mme Catherine Procaccia. Merci, mon cher collègue !
M. Philippe Dallier. … mais je voudrais expliquer pourquoi j’ai cosigné l’amendement de Jean Arthuis.
Tout le monde s’insurge depuis des années contre ces écarts de bases gigantesques pouvant exister, par exemple, entre deux contribuables ayant la même surface dans le même quartier, parfois dans la même rue, selon que la construction date d’avant ou d’après 1971. Nous sommes tous d’accord sur ce constat d’iniquité et nous sommes aujourd’hui parvenus à trouver une solution, vingt-deux ans après la loi de 1990. Et il faudrait encore étaler dans le temps l’application de la réforme ?...
Mes chers collègues, lorsque l’on dépose un permis de construire pour agrandir son habitation ou ses locaux, la valeur locative est réévaluée deux ans après et l’on supporte l’augmentation « plein pot », si vous me permettez l’expression. Donc, ce que vous acceptez pour un agrandissement de locaux, vous le refusez pour la mise à jour des valeurs locatives. Ce n’est vraiment pas cohérent !
J’accepte que l’on prenne 2015 pour référence, car cela permettra de ne commencer la mise en application de la réforme qu’après les élections municipales, considération que nous, sénateurs, ne pouvons méconnaître, mais un lissage sur cinq ans, après toutes ces années d’injustice, me paraît inacceptable.
C’est bien la France, ai-je envie de dire ! Pendant des années, on se plaint d’une situation, tout le monde s’accordant pour reconnaître qu’elle ne saurait perdurer ; on trouve enfin une solution et, au moment de la mettre en œuvre, on a toutes les bonnes raisons d’en retarder l’application cinq années de plus.
Croyez bien que je le regrette !
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Sans étaler mes cicatrices, je voudrais témoigner de ce qui s’est passé entre 1989 et 1993.
Nous avons réévalué l’ensemble des bases locatives, ce qui représentait 40 millions de locaux. La majorité de l’époque a décidé de ne pas donner suite à cette réforme en raison des transferts, dont elle redoutait les conséquences.
La majorité suivante, Alain Lamassoure étant alors ministre du budget, a débattu de cette mise en œuvre, pour finir pas y renoncer également. Les gouvernements qui ont succédé n’ont même pas essayé !
Si l’on ne procédait pas à un étalement de l’application, je prends le pari que, dès la première année, vous proposeriez vous-même un amendement, monsieur Arthuis, monsieur Dallier, pour bloquer la réforme,…
M. Philippe Dallier. Non !
M. Alain Richard. … car vous constateriez que les transferts sont trop importants et totalement imprévus.
Mes chers collègues, le choix est non pas entre faire la réforme en une seule fois ou l’étaler dans le temps, mais entre l’étaler dans le temps ou ne pas la faire du tout ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Bien vu !
M. le président. La parole est à M. Jean Arthuis, pour explication de vote.
M. Jean Arthuis. Je rappelle que, si la réforme avait été bloquée dans les années quatre-vingt-dix, c’est parce que les socialistes avaient introduit un amendement tendant à alléger de 30 % le poids de la valeur locative des logements sociaux. Dans ces conditions, il pouvait y avoir des transferts extraordinaires, selon que la commune comptait une grande densité de logement sociaux ou pas. En effet, il s’agit d’impôts de répartition.
M. Alain Richard. Personne n’y a retouché depuis !
M. Jean Arthuis. Cela étant, la majorité de l’époque, qui s’était abstenue d’appliquer la réforme, n’a cependant pas échappé à la sanction des urnes.
Je vais me rallier à cette sagesse à laquelle on ne cesse de m’inviter en retirant le sous-amendement, si mon cosignataire le veut bien. Néanmoins, pour exprimer mon sentiment sur cette affaire, je ne résiste pas à la tentation d’utiliser une métaphore vétérinaire : quand vous coupez la queue d’un chien, si vous la coupez par petits morceaux, vous lui faites mal à chaque fois ! (Sourires.)
Cette préoccupation me portait à préconiser la mise en œuvre instantanée de cette réforme, au nom de la justice !
Cela étant, monsieur le président, je retire le sous-amendement n° 236 rectifié.
M. le président. Le sous-amendement n° 236 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 38 rectifié.
(L'amendement est adopté à l’unanimité des présents.)
M. le président. Un article additionnel ainsi rédigé est donc inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 27.
L'amendement n° 229, présenté par M. Patriat, Mme M. André et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 27
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 6331-48 du code du travail est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le taux : « 0,15 % » est remplacé par le taux : « 0,25 % » ;
2° Au deuxième alinéa, le taux : « 0,24 % » est remplacé par le taux : « 0,34 % » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités de mise en œuvre des dispositions prévues aux deux premiers alinéas du présent article. »
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Cet amendement est défendu, monsieur le président. Je peux difficilement être plus concis ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Favorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 27.
Article 27 bis (nouveau)
I. – Après le 1 du III de l’article 1600 du code général des impôts, il est inséré un 1 bis ainsi rédigé :
« 1 bis. La taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises est recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties, sûretés et privilèges que la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette dernière. »
II. – Le I s’applique aux impositions dues à compter du 1er janvier 2011, sous réserve des impositions contestées avant le 11 juillet 2012. – (Adopté.)
II. – AUTRES MESURES
Article 28
I. – À la fin du troisième alinéa du I de l’article 14 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2002-1050 du 6 août 2002), le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 5 % ».
II. – Le III du même article est abrogé.
III. – Le présent article est applicable à compter du 15 mai 2012.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l’article.
M. René-Paul Savary. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, l’article 28 porte sur le traitement du Président de la République et du Premier ministre.
L’ancien président Nicolas Sarkozy avait augmenté son traitement au titre de la transparence, faisant apparaître de manière officielle des avantages financiers auparavant cumulés de manière non transparente. Je rappellerai également qu’il a été le premier Président de la République à ouvrir les comptes de l’Élysée au contrôle de la Cour des comptes.
La mesure proposée à cet article est à la fois démagogique et hypocrite. Les traitements du Président de la République, du Premier ministre et des membres du Gouvernement ont, certes, diminué, mais l’effectif du Gouvernement a tellement augmenté que l’économie, pour le budget de l’État, est véritablement insignifiante.
Vous comprendrez, mes chers collègues, que nous ne votions pas l’article 28 et que nous nous opposions à cette mesure cosmétique. C’est de l’affichage, et de la très mauvaise communication !
M. le président. L’amendement n° 153, présenté par M. Dallier, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un I bis ainsi rédigé :
I bis. – L’article 14 de la loi de finances rectificative pour 2002 (n° 2002-1050 du 6 août 2002) est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Au deuxième alinéa, les mots : « une indemnité de résidence égale à 3 % de son montant et par » sont supprimés ;
b) Au troisième alinéa, les mots : « , l’indemnité de résidence » sont supprimés ;
c) Le quatrième alinéa est ainsi rédigé :
« Le traitement brut mensuel est soumis aux cotisations sociales obligatoires et imposable à l’impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires. » ;
2° Le II est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « , de l’indemnité de résidence » sont supprimés ;
b) À la seconde phrase, les mots : « égale à la somme du traitement brut mensuel et de l’indemnité de résidence » sont remplacés par les mots : « égale au traitement brut mensuel ».
La parole est à M. Philippe Dallier.
M. Philippe Dallier. Puisqu’il faut laver plus blanc que blanc, j’ai considéré qu’à partir du moment où le Président de la République et le Premier ministre étaient logés aux frais de la République, à des adresses bien connues et dans des conditions, somme toute, tout à fait décentes, il n’était pas forcément normal de leur attribuer une indemnité de résidence, quand bien même celle-ci ne représente que 3 % du traitement. Je propose donc de supprimer cette indemnité, au nom de la transparence !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Défavorable ! (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Philippe Dallier. Ce n’est pas possible !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, je n’insisterai pas sur la proposition particulière qui nous est faite, mais je voudrais vous livrer les résultats d’une petite comparaison que j’ai effectuée en ce qui concerne les traitements et indemnités des membres des gouvernements récents.
Il est intéressant de constater que chacun y trouve son compte…
Je commencerai par le gouvernement Fillon I, en 2007.
M. Alain Richard. Il a duré quinze jours !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il a néanmoins existé, comme le gouvernement Ayrault I, ni plus ni moins !
Comparons le gouvernement Fillon I au gouvernement Ayrault I, puis le gouvernement Fillon IX au gouvernement Ayrault II.
M. Alain Richard. Et ceux du milieu ?
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. On pourrait affiner l’analyse, mais cela prendrait plus de temps. Vous le verrez, chacun en a pour son compte.
Commençons par le gouvernement Fillon I : 1 Premier ministre, 15 ministres et 4 secrétaires d’État, pour 282 100 euros de dépenses de rémunération.
M. Alain Richard. Les chiffres étaient dans le journal. Nous perdons du temps !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Gouvernement Ayrault I : 1 Premier ministre, 34 ministres et ministres délégués avec des rémunérations unitaires plus faibles, mais un total de 351 400 euros.
Gouvernement Ayrault II : 1 Premier ministre, 38 ministres et ministres délégués ; 391 000 euros de dépenses de rémunération.
M. Alain Richard. Et toujours un seul Président de la République !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je finirai par le gouvernement Fillon IX, que je me dois de citer : 1 Premier ministre, 24 ministres et ministres délégués, 9 secrétaires d’État ; 483 500 euros.
En ce domaine, mes chers collègues, chacun prône la vertu et donne de leçons, mais à la fin tous font bien de leur mieux et les gouvernements comptent toujours trop de membres !
Mme Éliane Assassi. Tout ça pour ça !
M. Alain Richard. Merci pour ceux qui aspirent à entrer au Gouvernement !
M. le président. Je mets aux voix l’article 28.
(L’article 28 est adopté.)
Article 29
I. – Le code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa de l’article L. 251-1, les mots : « , sous réserve, s’il est majeur, de s’être acquitté, à son propre titre et au titre des personnes majeures à sa charge telles que définies ci-dessus, du droit annuel mentionné à l’article 968 E du code général des impôts » sont supprimés ;
2° Le dernier alinéa de l’article L. 251-2 est supprimé ;
3° L’article L. 253-3-1 est abrogé.
II. – L’article 968 E du code général des impôts est abrogé.
III. – A. – Les 1° et 2° du I et le II s’appliquent à compter du 4 juillet 2012.
B. – Le 3° du I s’applique à compter du 31 décembre 2012. Le solde du fonds mentionné à l’article L. 253-3-1 du code de l’action sociale et des familles constaté à cette date est reversé à la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés au titre du financement de l’aide médicale de l’État mentionnée au premier alinéa de l’article L. 251-1 du même code.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, sur l’article.
M. Richard Yung. Nous abordons maintenant un sujet que nous connaissons bien, sur lequel nous avons ferraillé pendant des soirées entières, ici même, à l’occasion de l’examen de différentes lois sur l’immigration.
L’aide médicale d’urgence, je le rappelle, permet l’accès aux soins des personnes en situation irrégulière présentes sur le territoire depuis plus de trois mois et disposant d’un revenu mensuel inférieur à 648 euros.
La majorité précédente, l’actuelle minorité, a décidé, en 2011, d’astreindre les bénéficiaires de cette aide à un droit de timbre de 30 euros.
Par l’article 29, il est proposé de supprimer ce droit de timbre. C’est une mesure de justice, que nous avons été nombreux à porter, en tout cas de ce côté-ci de l’hémicycle, et qui a été très largement soutenue par l’ensemble des grandes associations actives dans ce domaine.
Contrairement à ce qui est parfois soutenu, il s’agit non pas de créer un appel d’air, mais de prévoir des économies. Dans un rapport commun, l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, et l’Inspection générale des finances, l’IGF, le montrent clairement : si les malades ne sont pas encouragés à se faire soigner, ils y renoncent et sont alors atteints de pathologies plus lourdes et plus graves. Heureusement que, dans ce pays, on ne laisse pas les gens mourir sur le trottoir devant l’hôpital : ces malades sont finalement soignés, mais au final, leur prise en charge tardive aura coûté plus cher.
La mesure coûte 6 millions d’euros, ce qui n’est pas indifférent dans la conjoncture actuelle. Je tiens donc à remercier le Gouvernement de l’avoir proposée.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, sur l’article.
Mme Aline Archimbaud. La réforme de l’aide médicale de l’État, l’AME, engagée dans le cadre de la loi de finances pour 2011, est particulièrement regrettable, et ce pour trois raisons.
Premièrement, la consultation qui a été menée en la matière l’a été « pour la forme ».
La mission conjointe de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales, à laquelle le précédent gouvernement avait explicitement posé la question de l’opportunité de l’instauration d’un droit de timbre de 30 euros, avait clairement répondu que cela compromettrait largement l’accès aux soins des populations concernées par l’AME. Toutes les études montrent qu’il s’agit majoritairement d’hommes seuls, à l’état de santé dégradé, ne recourant aux soins qu’en cas de besoin grave.
Deuxièmement, les mesures mises en place se révèlent contre-productives sur le plan sanitaire. Tous les grands réseaux d’associations travaillant sur le terrain le disent de façon unanime, l’instauration d’un droit de timbre de 30 euros est susceptible de retarder la prise en charge médicale de ces personnes, donc de la rendre plus coûteuse, tout en accroissant le risque sanitaire encouru.
Bref, c’est un non-sens non seulement sanitaire, mais également économique, puisque ce droit de timbre et la procédure d’agrément préalable coûtent plus cher en frais administratifs qu’ils ne rapportent à nos finances publiques, et que la hausse des coûts liés ces dernières années au dispositif de l’AME est plus à imputer au mode de facturation des hôpitaux, notamment, qu’au comportement des bénéficiaires.
Troisièmement, enfin, tout cela contribue à nourrir le climat ambiant détestable, instauré par le précédent gouvernement. Celui-ci avait laissé malheureusement libre cours aux préjugés et aux fantasmes de la droite la plus extrême, qui ont été démontés par les faits. Nous avions alors entendu dans la bouche de certains des arguments pour le moins fallacieux.
La réforme de l’aide médicale de l’État que nous propose l’actuel gouvernement est de bon sens, juste et nécessaire. Mes collègues écologistes et moi-même nous en félicitons. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis. Je tenais dès à présent à intervenir sur ce sujet de société, en répondant à trois questions.
Première question : les bénéficiaires de l’AME ont-ils davantage de droits que les assurés sociaux « ordinaires » ?
Le régime de l’AME est très proche de celui de la couverture maladie universelle complémentaire, ou CMUC. Dans les deux cas, le plafond de ressources est fixé à 648 euros par mois.
Les bénéficiaires de l’AME ont des droits pratiquement identiques à ceux des bénéficiaires de la CMUC, à l’exception de la prise en charge des soins dentaires et des dispositifs médicaux, qui leur est moins favorable.
Ils sont aussi exemptés, c’est vrai, de certaines contributions demandées aux assurés ordinaires en matière de franchises, de contribution forfaitaire ou de ticket modérateur, mais leur situation est rigoureusement identique à celle des bénéficiaires de la CMUC.
Par ailleurs, nul besoin de fantasmer : les cures thermales et l’assistance médicale à la procréation sont expressément exclues du panier de soins de l’AME. L’article 29 n’apporte pas de changement sur ce point.
Enfin, en matière d’affiliation, la restriction apportée par la loi de finances pour 2011 interdisant aux parents de titulaires de l’AME d’avoir la qualité d’ayants droit est maintenue.
Deuxième question : la suppression de l’agrément préalable met-elle les bénéficiaires de l’AME dans une situation plus favorable que celle des assurés ordinaires ?
L’agrément préalable pour les soins coûteux et non urgents est une procédure spécifiquement mise en place pour les bénéficiaires de l’AME. Sa suppression les replace donc dans le droit commun, leur situation en matière de prise en charge étant identique à celle des bénéficiaires de la CMUC.
Le droit commun prévoit un accord préalable de l’assurance maladie pour la prise en charge de certains actes ou prestations. Les bénéficiaires de l’AME seront, de ce point de vue, dans la même situation que tous les assurés.
Troisième question : les bénéficiaires de l’AME ont-ils une consommation de soins supérieure à la moyenne ?
Si celle-ci a connu une augmentation récente en 2009, en raison de la croissance du coût moyen de l’hospitalisation publique, la consommation de soins est restée constante depuis 2001. Selon le rapport IGAS-IGF de 2010, les bénéficiaires de l’AME consomment un peu plus que les assurés du régime général et nettement moins que les bénéficiaires de la CMUC : en 2008, leurs dépenses moyennes respectives se sont élevées à 1 741 euros pour les bénéficiaires de l’AME, contre 1 580 euros pour les assurés du régime général et 2 606 euros pour les bénéficiaires de la CMUC.
Au total, les titulaires de l’AME bénéficient donc de droits alignés sur ceux des titulaires de la CMUC, mais réduits en matière de remboursements, d’accessibilité des soins et de possibilité d’affiliation. Ils consomment, par ailleurs, en moyenne, moins de soins que les titulaires de la CMUC.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l’article.
M. Dominique Watrin. Le groupe CRC se réjouit que le Gouvernement ait fait le choix de revenir sur les dispositions introduites par l’ancienne majorité et limitant l’accès à l’aide médicale de l’État.
Pourtant, en restreignant l’accès aux soins primaires des populations cumulant les handicaps sociaux, sanitaires, et pouvant hésiter à se déplacer du fait de leur situation administrative, on prenait à l’évidence le risque d’avoir à traiter les maladies tardivement, avec les conséquences néfastes qui ont été rappelées.
Je regrette d’ailleurs que le gouvernement précédent, à commencer par M. Bertrand et Mme Berra, ait préféré dissimuler aux parlementaires un rapport de l’IGAS dont ils avaient pourtant connaissance. Et pour cause, ce rapport contredit en tout point les arguments soutenus par l’UMP, pourtant encore repris hier ou avant-hier par quelques orateurs lors de la discussion générale.
Il nous faut donc y revenir.
Du côté de l’ancienne majorité, on prétendait que les étrangers venaient avec leur famille en France, afin de profiter d’un système que certains présentaient comme trop généreux.
En réalité, il n’en est rien. Le rapport de l’IGAS précise en effet : « Les bénéficiaires de l’AME sont majoritairement des hommes seuls, dans un état de santé dégradé, ne recourant aux soins et à une couverture maladie qu’en cas de besoin. À plus de 80 %, ils n’ouvrent des droits que pour eux-mêmes ».
Du côté de l’ancienne majorité, on prétendait que les étrangers venaient toujours plus nombreux en France pour profiter de ce dispositif. Or, là encore, le rapport de l’IGAS est clair : « L’évolution forte des dépenses d’AME en 2009 et sur le premier semestre 2010 ne s’explique pas par une croissance massive du nombre de bénéficiaires de l’AME, puisqu’il n’y a pas eu d’augmentation notable du nombre de bénéficiaires ».
Au final, l’IGAS précisait en ces termes les dangers des restrictions introduites en 2011 : « Le premier effet pourrait être celui de l’accroissement des dépenses, allant bien au-delà de l’économie escomptée ». Et de rajouter : « Le deuxième effet pourrait être celui de risques sanitaires sérieux du fait des retards induits sur le recours aux soins ambulatoires par la population concernée ».
Le groupe CRC votera donc, naturellement, en faveur de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, sur l’article.
Mme Catherine Procaccia. Cette prise de parole vaudra aussi présentation de l’amendement de suppression n° 116, monsieur le président.
Pourquoi demandons-nous la suppression de cet article 29 ? Tout d’abord, parce que nous aimerions maintenir les dispositions votées l’année dernière. Entre 2011 et 2012, nous n’avons pas changé d’avis !
Certes, 5 millions d’euros de recettes fiscales ne représentent pas un gain considérable par rapport au montant de 1,5 milliard que coûte l’AME. Dans leur rapport d’évaluation de l’aide médicale de l’État, nos collègues députés Claude Goasguen et Christophe Sirugue ont en effet montré que ce dispositif connaissait une croissance exceptionnelle, puisque le nombre de ses bénéficiaires était en augmentation de plus de 185 % ! Les chiffres de cette consommation médicale prouvent bien, soit dit en passant, que le précédent gouvernement n’a pas fait de « chasse » aux immigrés clandestins, comme l’en accusaient ses détracteurs.
Nous ne sommes pas non plus focalisés sur les quelques abus dénoncés par les médias, et que le rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales a démentis. Il est vrai que nous avons récemment exclu de l’AME l’aide médicale à la procréation et les cures thermales. Ces soins en sont désormais clairement exclus, même si c’était déjà officieusement le cas auparavant, et je doute qu’il y en ait eu beaucoup d’exemples.
Nous souhaitons le maintien de la participation de 30 euros correspondant au ticket modérateur, car il ne nous paraît pas déraisonnable de faire participer ceux qui sont entrés et se sont installés illégalement en France au coût de fabrication de la carte d’AME et de création de leur dossier. Soyons sérieux : ne me dites pas que ces personnes ne dépensent pas cette somme dans l’année, pour l’achat de cartes téléphoniques ou de paquets de cigarettes !
Mme Éliane Assassi. Ce que vous dites est scandaleux, madame Procaccia !
Mme Catherine Procaccia. En tant qu’élue du Val-de-Marne, je puis vous dire que la CPAM de ce département et celle de Seine-Saint-Denis remboursent pour 50 % les dépenses de l’AME. Mon collègue Philippe Dallier sait bien de quoi je parle...
Élus de départements dans lesquels ont été détectés plusieurs cas de tuberculose, nous sommes en effet tout à fait convaincus qu’il convient de soigner les personnes dépourvues de ressources. C’est un devoir sanitaire !
Est-il normal, pour autant, qu’un bénéficiaire de la CMUC soit contraint de payer un reste à charge, alors même qu’il ne dispose pas de revenus plus élevés qu’un clandestin ?
Supprimer ce droit d’entrée reviendrait à supprimer un symbole fort, à nier la nécessité de chacun de participer à l’effort collectif, à creuser les inégalités entre ceux qui ont choisi de s’installer en France en respectant les règles de droit et les autres.
Contrôler les dépenses de santé de tous ceux qui bénéficient du système de soins français est une nécessité que reconnaissent, j’en suis certaine, tous les ministres concernés. Exempter certains de cet effort est un mauvais signe adressé à tous nos concitoyens auxquels on va demander sous peu, soit dès le mois de novembre, un effort financier supplémentaire pour pouvoir se soigner !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, sur l’article.
M. René-Paul Savary. Cette mesure m’interpelle, car j’estime, pour ma part, que nous devons responsabiliser nos concitoyens. L’expérience montre qu’ils y sont tout à fait prêts.
Il s’agit d’un véritable problème sanitaire et social, mais aussi d’une question d’égalité, avec bien d’autres difficultés à la clé.
J’ai sous les yeux une circulaire des caisses de sécurité sociale distribuée dans les pharmacies, que j’ai pu récupérer, non pas dans mon département de la Marne, mais à Paris. Ce document porte sur les modalités de remboursement normalement applicables à l’ensemble de nos concitoyens, en particulier celles qui sont relatives aux médicaments génériques.
On le sait, les génériques permettent d’alléger le coût sociétal de la santé, puisqu’ils sont un peu moins chers que les médicaments nominatifs.
Les caisses de sécurité sociale ont la volonté d’encourager les patients à y recourir. On assiste en effet actuellement à une dérive : les Français consomment moins de médicaments génériques que les années précédentes. Il convient donc d’accomplir un effort pédagogique, dont se chargent les caisses de sécurité sociale en distribuant ces documents.
Par ailleurs, elles ont cessé de rembourser systématiquement les médicaments lorsque les patients refusent de se soigner avec des génériques. Dans ce cas, c’est désormais l’ensemble de l’ordonnance qui n’est pas remboursée : les patients ne peuvent plus bénéficier du tiers payant, mais doivent payer la totalité des médicaments prescrits sur l’ordonnance. Ils sont bien sûr remboursés par la suite, mais cette avance d’argent est un moyen très intéressant d’encourager le recours à ces médicaments moins coûteux. Et cela fonctionne, puisqu’un nombre de plus en plus important de personnes sont convaincues de l’intérêt des génériques.
Il existe une exemption : celle dont bénéficient les victimes d’accidents du travail, et l’on peut tout à fait en comprendre la raison ; mais en profitent également les allocataires de l’AME, contrairement aux bénéficiaires de la CMUC.
Vous me paraissez déterminé, monsieur le ministre délégué, à mener une politique de justice et d’égalité. Il vous faudra donc revoir cette exemption-là. Je ne vois pas pourquoi en effet les bénéficiaires de l’AME ne pourraient pas, comme tout un chacun dans ce pays, se soigner avec des médicaments génériques !
J’espère que vous serez attentif, quand l’heure viendra de prendre de nouvelles mesures, aux problèmes que celles-ci peuvent entraîner.
M. le président. L’amendement n° 116, présenté par Mme Procaccia et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
Cet amendement a été précédemment défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il est défavorable, car cet amendement vise à maintenir des mesures restreignant l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il est défavorable également.
La comparaison entre le bénéfice, très faible, attendu de cette mesure et le coût réel de l’AME, que vous avez vous-même souligné, madame la sénatrice, montre en réalité que la mesure proposée ne finance rien.
Quant à la restriction de l’accès aux soins, puisque telle est la finalité de votre amendement, il a été abondamment expliqué, et prouvé, qu’elle était soit inefficace, soit préjudiciable non seulement à ceux qui en étaient l’objet, mais aussi, plus généralement, à la collectivité.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Yves Daudigny, rapporteur pour avis. Madame Procaccia, la réalité n’est pas aussi tranchée que vous le dites. En effet, lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2011, le rapporteur de l’époque, M. Alain Milon, avait déjà présenté un amendement visant à supprimer les restrictions dont nous débattons.
Je vous le confirme, monsieur Savary : s’agissant des allocataires de l’AME, le ticket modérateur ne saurait être récupéré, et ce pour une raison très simple : s’il est souhaitable, en théorie, d’établir une égalité parfaite entre les bénéficiaires de soins, cela s’avère impossible dans la pratique, car ces personnes, par définition, ne sont pas localisables et n’ont pas de domicile. Il n’est donc pas envisageable d’engager des poursuites contre elles pour recouvrer le prix du ticket modérateur.
Mme Catherine Procaccia. Nous parlions des médicaments génériques !
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 21, présenté par M. Masson, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
À l’article 968 E du code général des impôts, le montant : « 30 € » est remplacé par le montant : « 50 € ».
Cet amendement n’est pas soutenu.
L’amendement n° 214 rectifié, présenté par M. Daudigny, Mme M. André et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 3
Insérer un 2° bis ainsi rédigé :
2° bis Le premier alinéa de l’article L. 252-1 est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :
« La demande d’aide médicale de l’État peut être déposée auprès :
« 1° D’un organisme d’assurance maladie ;
« 2° D’un centre communal ou intercommunal d’action sociale du lieu de résidence de l’intéressé ;
« 3° Des services sanitaires et sociaux du département de résidence ;
« 4° Des associations ou organismes à but non lucratif agréés à cet effet par décision du représentant de l’État dans le département.
« L’organisme auprès duquel la demande a été déposée établit un dossier conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé de l’action sociale et le transmet, dans un délai de huit jours, à la caisse d’assurance maladie qui en assure l’instruction par délégation de l’État. » ;
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Cet amendement vise une autre restriction, récente et non négligeable, d’accès à l’AME. Celle-ci fut instaurée par la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, qui a supprimé les dispositions du code de l’action sociale et des familles permettant de présenter la demande d’AME dans différents endroits – centres communaux d’action sociale, centres sanitaires et sociaux du département de résidence, associations à but lucratif agréé –, et qui a imposé la centralisation de leur dépôt par les seules caisses primaires d’assurance maladie.
Cette disposition est totalement étrangère aux préoccupations de santé publique et d’intérêt général qui ont présidé à la création de l’AME voilà douze ans.
Le présent amendement vise donc à rétablir la situation antérieure, dans la mesure où, comme en a convenu l’un des orateurs, la question du lieu de dépôt de la demande d’AME est totalement indifférente par rapport à la problématique de la fraude. En effet, seules les CPAM instruisent en définitive les dossiers, de manière centralisée.
M. le président. L’amendement n° 10 rectifié bis, présenté par Mmes Procaccia, Cayeux, Jouanno, Deroche et Bruguière et MM. Cambon, J. Gautier, Milon, Pinton, Savary et Gilles, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° L’article L. 253-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La facturation à l’État des séjours hospitaliers au titre de l’aide médicale de l’État dans les établissements publics de santé mentionnés aux a, b et c de l’article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale se fait sur la base des tarifs prévus à ce même article, selon les modalités de la tarification à l’activité. » ;
La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Mme Archimbaud et M. Daudigny ont indiqué précédemment que l’un des coûts importants de l’AME tenait à la tarification des hôpitaux. Nous l’avons évoqué à plusieurs reprises, et plusieurs rapports en font état.
Cet amendement, dont l’objet est de réaliser des économies, vise précisément à harmoniser les facturations des séjours hospitaliers. Nous souhaitons que l’hospitalisation d’un allocataire de l’AME coûte le même prix que celle d’un assuré traditionnel ou d’un bénéficiaire de la CMUC.
L’IGAS a démontré que la surfacturation, injustifiée, s’élevait, à ce titre, à plus de 150 millions d’euros par an. L’objectif de cet amendement est donc de rétablir une égalité de traitement et de facturation entre tous les patients hospitalisés, qu’ils bénéficient, ou non, de l’AME.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission est favorable à l’amendement n° 214 rectifié, qui facilitera, s’il est adopté, le dépôt des demandes d’AME, mais défavorable à l’amendement n° 10 rectifié bis, car la mesure proposée aurait pour conséquence de déstabiliser financièrement les établissements publics de santé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je partage l’avis de la commission des finances, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je trouve l’argument du rapporteur général pour le moins bizarre. Nous parlons en effet, depuis tout à l’heure, du coût de l’AME. Pour notre part, nous proposons une mesure simple permettant de résoudre un problème soulevé par l’IGAS. Or vous la refusez !
Si je comprends bien, quand la gauche veut faire des économies, vous l’acceptez, mais quand la droite le propose, vous jugez que c’est impossible !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. J’insiste, ma chère collègue : la mesure que vous proposez serait difficile à mettre en œuvre dans les hôpitaux. Ainsi, au centre hospitalier Delafontaine de Saint-Denis, l’AME représente 7 % du budget de fonctionnement. Appliquer la solution que vous préconisez reviendrait à mettre financièrement en difficulté cet établissement.
Mme Catherine Procaccia. N’importe quoi !
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, pour explication de vote.
M. Jacky Le Menn. Il faudra sans doute revoir la question de la tarification à l’activité, en indiquant un certain nombre de pistes à suivre. C’est ce que nous préconisons dans le rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, présenté en commission des affaires sociales voilà quelques jours et adopté à l’unanimité.
Parallèlement, il est vraisemblable qu’il faudra aussi revoir la tarification actuelle des prestations journalières. La mission s’est bien rendu compte que, d’un établissement à l’autre, les tarifs peuvent varier du simple au triple pour une même pathologie.
En effet, les établissements cherchent à compenser les conséquences de la T2A – elle a été plus ou moins bien appliquée et nous proposons de la réformer –, en ajustant leurs ressources par des comportements budgétaires qui, très localement, sont parfois aberrants.
Ce problème ne peut pas être traité à l’occasion d’un débat sur l’AME. Il faudra une réforme d’ensemble du financement des établissements de santé, notamment publics, en particulier s’agissant des tarifs de prestations journalières. C’est à ce moment-là qu’il faudra réformer la manière de financer l’AME.
Le reste n’est que du bricolage !
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je ne comprends pas la réponse que M. Daudigny a faite à Catherine Procaccia en parlant de l’hôpital Delafontaine de Saint-Denis, que je connais.
Les choses sont claires : pour le même acte, il y a deux facturations différentes, selon que le patient bénéficie ou non de l’AME. Qu’est-ce qui peut justifier cela ? C’est fou !
M. Jacky Le Menn. Le coût n’est pas le même !
Mme Éliane Assassi. Voilà ! C’est une différence de coût !
M. Philippe Dallier. Et pourquoi donc ? Je ne vois pas pour quelle raison le coût serait différent si l’acte médical est identique !
La question est de savoir qui paie, c’est-à-dire quel budget est mis à contribution. Mes chers collègues, vous êtes en train de justifier une sorte de détournement de l’AME en invoquant l’existence de la T2A. Ce qu’il ne faut pas entendre !...
M. Jacky Le Menn. Vous n’avez pas compris ce que je vous ai expliqué.
M. Philippe Dallier. Vous avez dû vous exprimer bien mal car, en effet, nous n’avons pas compris vos explications.
Pour ma part, en tout cas, je ne vois absolument pas ce qui peut justifier de telles pratiques.
M. Jacky Le Menn. Commençons par prendre appui sur notre rapport, qui a été adopté à l’unanimité.
M. le président. Monsieur Le Menn, je vous rappelle que la parole est à M. Dallier, et à lui seul.
M. Philippe Dallier. Nous parlons d’un problème éminemment humain, et l’un d’entre nous a rappelé tout à l’heure à quelles exploitations tout cela pouvait donner lieu.
Pour ma part, je dis simplement ceci : qu’il s’agisse des génériques ou des comparaisons possibles entre la CMU, la CMU complémentaire, les assurés sociaux ordinaires et l’AME, méfions-nous des effets induits et des décisions qui peuvent ne pas être comprises, car leurs conséquences sont au moins aussi ravageuses que le comportement de certains.
M. le président. Je mets aux voix l'article 29, modifié.
(L'article 29 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 29
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 157 rectifié bis, présenté par Mmes Assassi et Borvo Cohen-Seat, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° À la deuxième phrase du premier alinéa du A, avant les mots : « et du 3° de l’article L. 314-11 », sont insérés les mots : « , ainsi que la carte de séjour portant la mention « salarié » ou « salarié en mission » prévue aux 1° et 5° de l’article L. 313-10 » ;
2° À la première phrase du seconde alinéa du A, les mots : « des 10° et 11° » sont supprimés, et après les mots : « de l'article L. 313-13 » sont insérés les mots : « , de l'article L. 313-14, de l'article L. 313-15 » ;
3° À la deuxième phrase du second alinéa du A, le mot : « demande » est remplacé par le mot : « délivrance » ;
4° La dernière phrase de second alinéa du A est supprimée ;
5° Le second alinéa du B est supprimé ;
6° Au premier alinéa du D, les mots : « 340 €, dont 110 €, non remboursables, sont perçus lors de la demande de titre » sont remplacés par les mots : « 220 € ».
II. – À l’article L. 311-14 du même code, les mots : « , selon les cas, à la demande, » sont supprimés.
III. – La perte de recettes résultant pour l’Office français de l’immigration et de l’intégration du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Mes chers collègues, vous savez sans doute que les taxes dues par les personnes étrangères vivant en France pour l’obtention de leur droit au séjour n’ont eu de cesse, au cours des dernières années, d’augmenter dans des proportions de plus en plus importantes.
En plus d’augmenter le montant de ces taxes, la loi de finances pour 2012 a introduit le principe du paiement d’un tiers du droit de visa de régularisation, soit 110 euros.
Perçue au moment de la demande du titre de séjour, cette somme n’est pas remboursable en cas de rejet. Il s’agit donc d’un véritable droit d’entrée dans la procédure, ce qui est inédit.
Je vous rappelle aussi que solliciter un titre de séjour quand on est présent sur le sol français n’est pas une simple possibilité : c’est une obligation. Ceux qui ne s’y soumettent pas risquent de faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français, OQTF.
Aujourd’hui, la délivrance d’un premier titre de séjour peut coûter plus de 700 euros, et jusqu’à 2 000 euros pour une famille. Ce sont des montants exorbitants, surtout pour des personnes en situation de grande précarité et qui ne souhaitent qu’une chose : régulariser leur situation administrative sans avoir à enfreindre la loi.
Il est tout à fait anormal, injuste et contre-productif que les étrangers nouvellement arrivés, c’est-à-dire ceux dont la situation sociale est encore précaire ou fragile, soient ainsi contraints de payer des taxes exorbitantes pour l’obtention de leur titre de séjour.
Mais il est indispensable que le projet de loi de finances rectificative modifie dès à présent le montant des taxes. La circulaire de régularisation des étrangers devrait être publiée à l’automne, ce dont nous nous félicitons. Le Gouvernement entend légitimement enrayer l’octroi discrétionnaire des titres. Cependant, si rien n’est fait tout de suite, des milliers d’étrangers risquent de se trouver bloqués par l’impossibilité dans laquelle ils seront d’acquitter les taxes.
Cette question de l’obstacle financier est urgente : les personnes concernées ne doivent pas être freinées par ces taxes aux montants si élevés eu égard à leur situation.
L’amendement n° 157 rectifié bis prévoit simplement de revenir sur les modifications introduites par l’article 62 de la loi de finances pour 2012.
L’amendement proposé par la commission des finances reprend l’essentiel de nos préoccupations en supprimant les modifications apportées par la loi de finance pour 2012 et en incorporant un taux réduit pour les cartes de séjour « vie privée et familiale ».
Dans l’immédiat, les montants exigés seraient ainsi ramenés à leurs niveaux de 2011, dans l’attente d’un réexamen général des taxes qui pourra avoir lieu dans le cadre de la loi de finances pour 2013.
Il s’agit vraiment d’une modification minimale que nous tenons à faire adopter dès maintenant, avant la discussion du prochain projet de loi de finances.
J’ajoute, pour le cas où le Gouvernement ou le rapporteur général, voire les deux, serait défavorable à cet amendement, que l’Office français de l’immigration et de l’intégration pourrait ne pas subir de pertes, car des économies peuvent être réalisées dans son budget.
Plus précisément, 6 à 8 millions d’euros pourraient être économisés sur les programmes de retour volontaire des ressortissants roumains et bulgares. En outre, 4 à 6 millions d’euros pourraient être économisés sur le budget des visites médicales du poste « santé publique », dont le contenu et les modalités ont, en partie au moins, une pertinence incertaine.
M. le président. L'amendement n° 154 rectifié bis, présenté par Mmes Lipietz et Benbassa, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - À la deuxième phrase du premier alinéa du A de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les références : « du 9° » et « du 3° » sont supprimées.
II. - La perte de recettes résultant pour l’Office français de l’immigration et de l’intégration du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 124 rectifié bis, présenté par Mmes Lipietz et Benbassa, M. Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du second alinéa du A est supprimée ;
2° Il est ajouté un G ainsi rédigé :
« G. - L'annulation d'une décision de refus par les juridictions administratives n'entraîne pas la perception d'une nouvelle taxe. »
II. - La perte de recettes résultant pour l’Office français de l’immigration et de l’intégration du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour présenter ces deux amendements.
Mme Hélène Lipietz. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, je suis peut-être encore innocente, mais un mot me bouleverse toujours lorsque je le lis au fronton de nos monuments publics, y compris au Sénat, le mot : « fraternité ».
Ce mot n’orne pas seulement les édifices. Il fait partie intégrante de notre Constitution. En effet, la devise de la France ne se résume pas aux seules « liberté et égalité » ; il y a aussi la fraternité.
Or la fraternité a été mise à mal pendant quelques années. (Marques de lassitude sur les travées de l’UMP.) J’espère que, aujourd’hui, nous allons pouvoir revivre la fraternité telle que les révolutionnaires l’ont voulue.
Plusieurs articles du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoient que les titres de séjour sont délivrés « de plein droit ».
Autrement dit, les étrangers qui vont bénéficier de ces titres ne viennent pas demander l’aumône, ni exiger plus que ce qui leur est dû : ils viennent simplement rappeler à la France qu’elle a signé des engagements, notamment la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, mais aussi la convention internationale des droits de l’enfant.
Les trois amendements que je présente visent précisément à prendre en compte cette double exigence de fraternité et de respect des engagements internationaux pris par notre pays.
L’amendement n° 154 rectifié bis vise à supprimer, à la deuxième phrase du premier alinéa du A de l’article L. 311-13 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les restrictions portant sur l’attribution de plein droit du titre de séjour ou d’un titre de résident. Si l’on peut bénéficier de plein droit d’un titre de séjour ou de résident, il n’y a pas de raison de faire des différences !
L’amendement n° 124 rectifié bis tend, dans sa première partie, à supprimer le non-remboursement en cas de rejet de la demande de visa.
Nous disons aux étrangers : « Vous voulez venir en France ? Payez d’abord ! Nous examinerons votre demande ensuite. » C’est totalement irréel, parce que les étrangers qui essaient de venir en France, et ce de façon légale, en sollicitant un visa, n’ont pas à avancer une somme à fonds perdus – sans compter que ce mécanisme peut comporter des dérives, par exemple lorsqu’il s’agit de renflouer les caisses de l’État…
La seconde partie de l’amendement n° 124 rectifié bis ; de portée plus générale, prévoit qu’en cas d’annulation d’une décision de refus de titre de séjour par les juridictions administratives, l’étranger ne sera plus obligé, comme c’est le cas aujourd’hui, d’acquitter une seconde fois la taxe.
Enfin et surtout, si vous le permettez, monsieur le président, je souhaiterais présenter le troisième amendement que j’ai déposé, l’amendement n° 155 rectifié bis, qui prévoit la suppression de l’obligation faite aux mineurs, donc aussi aux enfants, d’acquitter une taxe pour obtenir un document de circulation.
M. le président. Pour la clarté des débats, j’appelle donc en discussion l'amendement n° 155 rectifié bis, également présenté par Mmes Lipietz et Benbassa, M. Placé ainsi que les membres du groupe écologiste, et qui est ainsi libellé :
Après l’article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le C de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est abrogé.
II. - La perte de recettes résultant pour l’Office français de l’immigration et de l’intégration du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Veuillez poursuivre, madame Lipietz.
Mme Hélène Lipietz. Le C de l'article L. 311-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que les enfants doivent acquitter une taxe pour obtenir un document de circulation.
Vous le savez peut-être, la Cour de justice de l’Union européenne a condamné les Pays-Bas pour avoir exigé des étrangers ayant vocation à obtenir un titre de long séjour le paiement de taxes disproportionnées par rapport à ce qui était demandé aux ressortissants néerlandais.
Les mineurs dont il est question sont nés sur le territoire français ou ont été emmenés en France par leurs parents : ils n’ont pas fait le choix de naître ou de venir en France. Pourtant, on leur demande de payer 45 euros pour obtenir un titre de circulation.
Or le titre de circulation est parfois le seul document d’identité dont ces mineurs pourront disposer. Prenez le cas d’un mineur chinois né sur le territoire français : il n’aura jamais de passeport parce qu’il n’est pas reconnu par la Chine.
Lorsqu’il atteindra l’âge de dix ans ou de douze ans et que, hélas pour lui, commenceront les contrôles d’identité – car ce ne sont pas les gamins que l’on contrôle, mais toujours les préadolescents et les adolescents –, quel document comportant une photo pourra-t- il produire ? Aucun, sinon la carte de circulation !
Demander à ces mineurs qui sont nés sur le territoire français ou qui y sont venus très tôt, de payer une taxe, c’est tout à fait préjudiciable à leur insertion dans la société française ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. En discussion commune avec les amendements nos 157 rectifié bis, 154 rectifié bis et 124 rectifié bis, l'amendement n° 215 rectifié, présenté par M. Leconte, Mme Lepage, M. Yung, Mme Espagnac, MM. Filleul et Todeschini, Mme M. André, MM. Berson, Botrel, Caffet, Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Miquel, Patient, Patriat, Rebsamen et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l'article 29
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 211-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est abrogé.
II. – L’article L. 311-13 du même code est ainsi modifié :
1° Le A est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase du premier alinéa, le montant : « 385 euros » est remplacé par le montant : « 340 euros » ;
b) À la deuxième phrase du premier alinéa, la référence : « du 9° » est supprimée ;
c) Au second alinéa, à la deuxième phrase, le mot : « demande » est remplacé par le mot : « délivrance » et la dernière phrase est supprimée ;
2° Le B est ainsi modifié :
a) À la fin de la première phrase du premier alinéa, le montant : « 220 euros » est remplacé par le montant : « 110 euros » ;
b) Après le mot : « prévue », la fin du second alinéa est ainsi rédigé : « au premier alinéa du présent B » ;
3° Après les mots : « montant égal à », la fin du D est ainsi rédigé : « 220 euros ».
III. – À l’article L. 311-14 du même code, les mots : « , selon les cas, à la demande, » sont supprimés.
IV. – L’article L. 311-15 du même code est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, le taux : « 50 % » est remplacé par le taux : « 30 % » ;
2° Au troisième alinéa, les montants : « 50 euros et 300 euros » sont remplacés par les montants : « 25 et 150 euros » ;
3° À la première phrase du quatrième alinéa, le montant : « 50 euros » est remplacé par le montant : « 25 euros » ;
4° Au cinquième alinéa, les montants : « 50 et 300 € » sont remplacés par les montants : « 25 et 150 € ».
V. – La perte de recettes résultant pour l’Office français de l’immigration et de l’intégration du présent article est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Dans le même ordre de préoccupations, cet amendement vise à modérer le montant des taxes acquittées par les étrangers qui sollicitent la délivrance ou le renouvellement des titres de séjour.
Nous sommes animés ici non pas seulement de raisons de principe, mais parce que nous constatons que, ces dernières années, une dérive s’est produite, le Gouvernement augmentant massivement le niveau des taxes, certes pour financer l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, mais aussi, car les montants prélevés excèdent les besoins de cet organisme, pour abonder le budget général de l’État, ce qui ne me paraît pas de bonne politique.
La diminution des taxes, d'ailleurs relative, que nous proposons est réclamée par l’ensemble des associations actives dans ce domaine, comme le Secours catholique, France Terre d’asile et la CIMADE.
Nous proposons de réduire le montant des taxes acquittées pour la demande d’un premier titre de séjour « vie privée et familiale ». En effet, les personnes visées sont celles qui seront concernées par l’application de la future circulaire relative aux critères de régularisation. Aujourd'hui, elles doivent payer 349 euros, soit un niveau de taxe élevé qui peut être réduit, la taxe étant alors ramenée à un montant compris entre 50 et 100 euros.
Nous proposons également de diminuer la charge fiscale qui pèse sur les étudiants étrangers devenant salariés ; ceux-ci doivent aujourd'hui acquitter 220 euros, ce qui représente un niveau de taxe également élevé. Il s'agirait, au fond, du prolongement logique de l’abrogation de la circulaire Guéant.
Enfin, nous proposons la suppression de la taxe perçue pour l’OFII lors de la demande de validation de l’attestation d’accueil. Pénaliser les personnes qui résident en France et offrent d’héberger un étranger pendant une semaine ou un mois nous semble une démarche assez curieuse. Les obliger, d'une part, à se rendre à la mairie pour remplir de la paperasse, et, d'autre part, à payer une taxe a quelque chose de vexatoire.
Telles sont les propositions que nous formulons à l’intention du Gouvernement. Je pense que tous ceux qui ont travaillé dans ce domaine y souscrivent et j'espère que nous serons entendus. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du CRC.)
Mme Éliane Assassi. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les quatre amendements en discussion commune ainsi que sur l’amendement n° 155 rectifié bis ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La situation est quelque peu complexe. Ces amendements émanant de différents groupes de la majorité visent à modifier les taxes affectées à l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII.
Diverses dans leur montant et leurs modalités, ces taxes sont acquittées par les étrangers à l'occasion de diverses procédures administratives, telles que la délivrance de cartes de séjour. Lors des trois dernières lois de finances, le Gouvernement a augmenté ces taxes affectées tout en diminuant le transfert du budget général vers l’OFII. De fait, les étrangers ont donc de plus en plus contribué au financement de l’OFII, une politique que nous avons critiquée en son temps au Sénat pour les raisons rappelées à l’instant par nos collègues.
Les amendements qui nous sont proposés sont d’inspiration très proche, mais ils ne sont pas identiques et ne sont pas toujours cohérents entre eux. C’est dans cet esprit que je m’étais engagé auprès de leurs auteurs à proposer un amendement de synthèse, si possible en concertation avec toutes les parties.
Le texte que j’ai élaboré tend à revenir sur les dernières modifications apportées lors de la loi de finances pour 2012. Par ailleurs, il prévoit l’application du taux réduit pour l’ensemble des cartes de séjour portant la mention « vie privée et familiale ». Lors de la réunion de la commission, je ne disposais pas des éléments de chiffrage afférents aux modifications envisagées. J’appelle par conséquent l’attention du Sénat – je suis tenu de le faire – sur le coût du dispositif proposé par cette synthèse, qui serait de l’ordre d’une vingtaine de millions d’euros. Dans le contexte budgétaire que nous connaissons, la question de l’opportunité d’un tel amendement se pose.
Je crois donc qu’il est utile d’entendre les éclairages du Gouvernement pour trancher la question de savoir s’il faut, ou non, légiférer dès l’examen de ce projet de loi de finances rectificative. Si la réponse à cette question était positive, je tiens à la disposition des groupes la rédaction de synthèse que j’ai évoquée à l’instant et qui a été discutée avec les rédacteurs des différents amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Mon rôle n’est pas facile, car je vais demander aux parlementaires qui viennent d’exposer des arguments auxquels j’adhère de bien vouloir attendre la fin de l’année pour que cette question soit réglée.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je veux tout d'abord vous livrer un élément objectif : perturber en cours d’année son équilibre financier poserait à l’OFII, dont vous avez vous-mêmes souligné le rôle, un problème extrêmement délicat. Je ne crois pas que ce soit souhaitable, même si je regrette naturellement les conditions de ce financement.
Comme vous à l’époque, et parmi d’autres, je me suis opposé aux dispositions qui régissent aujourd'hui cet équilibre. Je ne renie naturellement rien de ce que j’ai pu dire alors et confirme les votes que j’ai pu émettre.
Mon rôle n’est donc pas facile : comme l’a souligné M. le rapporteur général, dans le meilleur des cas, le coût de la diminution des taxes est d’une vingtaine de millions d'euros. J’ignore d'ailleurs comment ce manque à gagner serait financé en cours d’année.
Je ne suis pas certain qu’une telle mesure rendrait service au public auquel nous pensons tous de la façon la plus sincère. En revanche, je suis convaincu que, à la fin de l’année, le Gouvernement proposera un dispositif, dont l’élaboration associera d'ailleurs l’ensemble des forces politiques intéressées, en tout cas toutes celles qui le souhaiteront.
Sous le bénéfice de cet engagement, que je prends en étant mandaté pour le faire, je vous demande de retirer ces amendements, mesdames, messieurs les sénateurs, ce qui serait très sincèrement pour moi un soulagement.
Je le répète, cette affaire sera réglée cette année. Une intervention immédiate poserait peut-être plus de problèmes qu’elle n’en résoudrait.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j'espère être entendu. D’une certaine manière, les propos de M. le rapporteur général préfiguraient les miens. Je vous demande donc de bien vouloir retirer ces amendements, faute de quoi, je serais dans l’obligation de demander au Sénat de les rejeter. Je le ferais sans joie aucune, mais je le ferais, car, pour désagréable qu’elle soit, cette tâche m’incombe et je ne me soustrairai pas aux devoirs de ma charge.
M. Robert del Picchia. C’est le sort d’un ministre !
M. le président. Madame Assassi, l'amendement n° 157 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Éliane Assassi. Monsieur le ministre délégué, je comprends tout à fait votre position. Je conçois que la réponse que vous nous avez adressée ne vous soit pas agréable.
Cela dit, j’ai longuement exposé les raisons qui motivent cet amendement. J’ai aussi expliqué qu’une telle mesure pouvait ne pas être coûteuse pour l’OFII. En la matière, il y a urgence, me semble-t-il. Je ne reviendrai pas sur les textes votés précédemment : nous devons envoyer des signaux clairs, et tel est bien l’objectif visé ici.
Je maintiens donc cet amendement, monsieur le président.
M. le président. Madame Lipietz, les amendements nos 154 rectifié bis et 124 rectifié bis ainsi que l’amendement n° 155 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Mme Hélène Lipietz. Au bénéfice du doute, et en attendant avec la plus grande vigilance les propositions qui seront formulées dans le projet de loi de finances pour 2013, j’accepte de retirer les amendements nos 154 rectifié bis et 124 rectifié bis, monsieur le président.
En revanche, je maintiens l’amendement n° 155 rectifié bis, qui concerne les mineurs.
Monsieur le ministre délégué, allez dire à ces gamins qu’ils doivent attendre pour ne plus être contrôlés n’importe comment ou pour obtenir le titre de circulation qui leur manque pour partir à l’étranger avec leurs copains de classe ou en colonie de vacances !
Une telle mesure ne doit pas coûter très cher. Si, pour l’ensemble des titres de séjour, la réduction des taxes représente 20 millions d’euros, pour les seuls titres de circulation, la somme en cause ne doit pas être telle qu’elle mette l’OFII en péril…
Je retire donc les deux premiers amendements, mais je maintiens le meilleur ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.)
M. le président. Les amendements nos 154 rectifié bis et 124 rectifié bis sont retirés.
Monsieur Yung, l'amendement n° 215 rectifié est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Monsieur le ministre, je partage très largement votre sentiment de gêne. Nous nous sommes tous beaucoup impliqués dans ces débats et dans ces combats, nous engageant à la fois vis-à-vis des personnes candidates à l’immigration, qu’elles aient déjà déposé leur demande ou qu’elles soient en passe de le faire – nous les rencontrons en particulier lors de nos voyages à l’étranger – et vis-à-vis du mouvement associatif en France.
Cela étant, je comprends les raisons qui ont été évoquées. Si une réforme d’ensemble nous est proposée dans le budget pour 2013, nous en discuterons en novembre ou en décembre. Je vous demande simplement, monsieur le ministre délégué, de nous fournir des éléments sur la structure du budget de l’OFII, notamment de ses recettes, afin de pouvoir mieux apprécier la situation de cet établissement public ainsi que l’importance des taxes qui lui sont affectées, sur lesquelles je me pose un certain nombre de questions. (Mme Hélène Lipietz applaudit.)
Je retire donc cet amendement, monsieur le président.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Tout à l'heure, j’ai envisagé un amendement de synthèse. Je crains qu’une telle démarche ne soit désormais difficile, certains amendements étant maintenus et d’autres non.
Je m’en remets donc, pour la suite, à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Yung, pour répondre à votre question, quelque 80 % du financement de l’Office proviennent de ces taxes. On voit bien le déséquilibre qui résulterait de leur diminution.
Je me permets d’insister : même si je comprends parfaitement les raisons qui ont été invoquées à l’appui du maintien de certains amendements, et je respecte profondément cette décision, je ne souhaite pas que le Sénat adopte ces propositions.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 157 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme Catherine Procaccia. Merci à l’UMP !
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 155 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Mme Éliane Assassi. Grâce à la droite !
Mme Catherine Procaccia. Eh oui ! Encore merci à l’UMP !
(Mme Bariza Khiari remplace M. Charles Guené au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Bariza Khiari
vice-présidente
Article 30
I. – L’article 133 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et l’article 141 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 sont abrogés.
II (nouveau). – Le Gouvernement présente un rapport, avant le dépôt du projet de loi de finances pour 2014, présentant les conséquences de la suppression de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d’enseignement français à l’étranger et sur les ajustements à apporter aux bourses sur critères sociaux.
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, sur l'article.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, nous ne nous sommes pas aujourd'hui rassemblés dans cet hémicycle pour faire le procès de la prise en charge par l’État des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement français à l’étranger, la PEC, mesure destinée à instaurer un peu d’équité et à apporter un certain soutien aux jeunes Français de l’étranger.
Pour ma part, j’ai quelque peu été choquée de voir nos collègues du parti socialiste se complaire dans ce combat d’arrière-garde à l'Assemblée nationale…
François Hollande avait promis la suppression de ce dispositif. Soit !
Il ne s’agit pourtant pas de la suppression en catimini d’une quelconque niche fiscale, non, il s’agit bien de la scolarisation des milliers de jeunes Français à l’étranger et du lien qu’ils entretiennent avec la France. Un sujet aussi essentiel aurait mérité mieux que la précipitation actuelle.
Faire table rase du passé est toujours beaucoup plus aisé que définir une stratégie d’avenir. La campagne électorale finie, nous attendions des propositions constructives quant au système appelé à remplacer la PEC. Or, dans sa rédaction actuelle, l’article 30 du présent projet de loi de finances rectificative se contente de détruire le dispositif en vigueur, sans apporter la moindre indication sur les solutions proposées aux familles concernées.
Le Gouvernement se contente de se décharger de sa responsabilité sur l’AEFE, l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, et sur les établissements appelés à réexaminer les demandes de bourses et à mettre en place un échéancier de paiement pour les familles n’en obtenant pas. Une telle approche au cas par cas ne peut tenir lieu de politique, monsieur le ministre délégué.
Malgré tous nos efforts, nous, parlementaires représentant les Français de l’étranger, n’avons pour l’instant pas réussi à obtenir du Gouvernement un engagement formel quant au report intégral sur les bourses scolaires des 32 millions d’euros économisés. Une telle mesure permettrait cependant une augmentation d’un tiers de l’enveloppe des bourses.
À l’Assemblée nationale, vous avez promis une fongibilité de ces crédits au sein de la même mission, du même programme, c’est-à-dire à l’intérieur du programme 151. Mais le périmètre de ce programme est vaste : il couvre, par exemple, les dépenses relatives au fonctionnement de nos services d’octroi de visas aux étrangers. Je souhaiterais donc que vous précisiez que la réallocation des fonds se fera non seulement au sein du même programme, mais aussi à l’intérieur de la même action, l’action 2, intitulée « Accès des élèves français au réseau AEFE ».
Même une fois le montant de l’enveloppe globale des bourses clairement défini, beaucoup de questions demeurent. Le Gouvernement va-t-il revoir les barèmes des bourses pour permettre à davantage de familles d’en bénéficier ? Va-t-il favoriser la multiplication des bourses de faible montant ou privilégier un nombre plus restreint de bourses à 100 % ? Va-t-il financer une baisse des frais d’inscription ?
La définition d’un dispositif alternatif pour remplacer la PEC n’a rien d’automatique : un simple retour à la situation antérieure à 2007 est impossible, car le contexte a évolué. Le nombre de familles françaises à l’étranger a augmenté, de même que les frais de scolarité de beaucoup d’écoles.
La suppression de la PEC ne serait acceptable que si un système de bourses scolaires adapté était immédiatement en mesure de prendre le relais. Or il nous est aujourd’hui proposé de voter une suppression de la PEC d’application immédiate, tout en remettant à 2014 la réforme des bourses !
S’il n’est pas actualisé, le système des bourses exclura une majorité des anciens bénéficiaires de la PEC, non pas parce que ceux-ci seraient richissimes, mais parce que, de l’aveu même de la ministre déléguée chargée des Français de l’étranger dans une note, « l’échelle des revenus minima en vigueur est aujourd’hui très éloignée de la réalité ».
Sans révision des critères d’attribution des bourses, ce sont encore une fois les classes moyennes qui seront pénalisées. Car ce sont non pas les expatriés les plus aisés, ceux qui sont détachés par les grandes entreprises, qui seront le plus touchés, mais bien les Français de l’étranger travaillant en contrat local ou à leur propre compte ; ceux qui ne sont pas jugés assez pauvres pour obtenir une bourse selon les critères actuels, mais dont le budget familial serait complètement déséquilibré par des frais de scolarité de plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d’euros qu’ils devraient acquitter pour chaque enfant. Ils n’auront alors plus qu’à inscrire leurs enfants dans une école locale ou à se tourner vers une école internationale anglophone, si, toutefois, les inscriptions ne sont pas déjà closes, car la rentrée de septembre, c’est demain !
Quelle belle façon de soutenir les agents de notre influence à l’international !
De plus, la grille de critères d’attribution des bourses qui remplacerait dès cette rentrée la PEC désavantage les mères célibataires par rapport aux couples mariés ; elle pénalise les locataires d’un petit appartement par rapport aux propriétaires d’une grande maison sous prêt hypothécaire. N’y a-t-il pas là un paradoxe pour une majorité présidentielle prétendant défendre la justice sociale ?
Un tel gâchis pourrait être évité si le Gouvernement prenait simplement le temps de consulter les principaux protagonistes, notamment les élus à l’Assemblée des Français de l’étranger, et s’il acceptait que la suppression de la PEC n’intervienne qu’une fois le système des bourses remis à plat. Il s’agirait non seulement d’une mesure de bon sens, mais aussi d’une marque de respect élémentaire envers les instances représentatives des Français de l’étranger, à l’AEFE comme au Parlement.
Enfin, je m’interroge sur le respect du principe de non-rétroactivité de la loi si la mesure proposée à l’article 30 s’applique dès la rentrée de septembre.
Mme la présidente. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Depuis plusieurs mois, les familles ont déposé leur demande de prise en charge et versé les frais de scolarité restant à leur charge. En acceptant leur dossier, l’AEFE, prestataire de l’État pour assurer la mission de service public d’enseignement à l’étranger, a contracté un engagement vis-à-vis d’elles.
Mme la présidente. Je vous prie maintenant de conclure, madame Garriaud-Maylam !
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je termine, madame la présidente.
Malgré le changement de majorité gouvernementale, une continuité minimale des engagements de l’État doit être assurée. François Hollande nous avait dit vouloir faire de la jeunesse et de l’éducation deux priorités de son mandat. Pousser nombre d’élèves hors de nos écoles à l’étranger constituerait un reniement très grave !
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, sur l'article.
M. Richard Yung. Madame la présidente, je renonce à mon temps de parole, de façon à permettre au débat d’avancer un peu plus rapidement… (Applaudissements sur certaines travées du groupe socialiste.)
M. Robert del Picchia. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à Mme Claudine Lepage, sur l'article.
Mme Claudine Lepage. Madame la présidente, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, la question de la prise en charge des frais de scolarité dans les lycées français à l’étranger revient, pour un ultime tour, sur le devant de la scène.
Depuis sa mise en place par Nicolas Sarkozy, au mois de septembre 2007, la PEC a fait parler d’elle, tant sa complète iniquité, associée à un coût exorbitant, semblait incongrue en ces périodes de disette budgétaire et de détresse de nombre de nos concitoyens.
Rappelons de quoi il s’agit : une prise en charge pour tous les lycéens français inscrits dans un établissement français à l’étranger, quels que soient le revenu des familles et le type d’établissement, du pensionnat de luxe à la simple école française. En pratique, cela signifie que, pour une prise en charge de 10 % des élèves, plus du quart de la ligne budgétaire concernée est pourtant consommée...
De surcroît, et parce qu’il a bien fallu trouver l’argent pour la financer, la PEC a profondément désorganisé l’ensemble du réseau de l’enseignement français à l’étranger. Elle a d’abord entraîné un durcissement des critères d’attribution des bourses pour toutes les autres familles non éligibles à cette prise en charge, induit une limitation de la participation de l’État au fonctionnement des établissements, à leur politique immobilière et à la rémunération de leurs enseignants et, en définitive, participé à la hausse continue des frais d’écolage.
Il s’agit donc bien d’une mesure parfaitement injuste et exagérément coûteuse.
Le redressement de la France dans la justice et l’égalité était au cœur de la campagne de François Hollande. Naturellement, il s’était engagé à remplacer la PEC par une aide à la scolarité attribuée sur critères sociaux au bénéfice de tous les élèves français.
Logiquement, l’article 30 du présent projet de loi de finances rectificative prévoit donc la suppression de la PEC, mais pas l’annulation du crédit correspondant, maintenu sur la ligne budgétaire commune aux bourses et à la PEC. Et il est clairement établi que la totalité des crédits économisés sera dédiée aux bourses. M. le ministre délégué l’a encore rappelé devant les députés. M. Hollande l’avait, pour sa part, clairement signifié devant les communautés françaises de Washington, d’abord, puis de Rome, et, voilà quelques jours encore, de Londres.
Pour autant, tout est-il pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Certes non ! Nous comprenons parfaitement le désarroi de nombreuses familles qui ne s’attendaient pas à une application de la mesure dans des délais aussi rapides. Fort légitimement, elles n’ont pas prévu la dépense supplémentaire à laquelle elles doivent faire face et qui se chiffre à plusieurs milliers d’euros par enfant.
En tant que pendant impératif de la suppression de la PEC, aucune famille ne doit être mise en difficulté financière. Croyez-le bien, nous nous assurerons que toutes les familles éligibles auront effectivement accès aux bourses sur critères sociaux et que les mesures exceptionnelles d’accompagnement prévues pour permettre aux postes consulaires de traiter chaque situation particulière seront réellement mises en place.
Par ailleurs, au-delà des bourses et des mesures exceptionnelles, il conviendrait d’utiliser le reliquat des 12,5 millions d’euros maintenus dans la ligne budgétaire pour satisfaire la volonté présidentielle d’ouvrir dans la justice et l’équité l’accès au réseau dès la rentrée 2012. Une option pourrait consister à réviser le revenu minimal du barème actuel des bourses, gelé depuis deux ans, ce qui permettrait d’augmenter le nombre de boursiers.
Et, pour parfaire cet engagement présidentiel, il faudra veiller, monsieur le ministre délégué, à ce que, de façon pérenne, l’élargissement de l’accès aux bourses soit assuré. À cet égard, nous serons attentifs au futur rapport fort opportunément demandé par les nouveaux députés des Français de l’étranger au Gouvernement.
Parce qu’il faut aussi agir à la source pour permettre une modération des frais d’écolage et sortir de la spirale infernale, le projet de loi de finances pour 2013 devra aussi prévoir une dotation budgétaire de l’AEFE suffisante.
Même si je ne doute pas que Gouvernement et Parlement continueront à œuvrer dans cet esprit, je vous remercie d’avance, monsieur le ministre délégué, de bien vouloir me le confirmer. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Louis Duvernois, sur l'article.
M. Louis Duvernois. « Les esprits chagrins déplorent que la France ne soit plus une vraie puissance. Ils ignorent que, grâce à sa langue et à sa culture, elle continue d’occuper dans le monde une place prééminente, et les lycées français à l’étranger jouent un rôle essentiel dans le maintien de ce rayonnement de l’esprit. » Ces propos d’Hélène Carrère d’Encausse, secrétaire perpétuel de l’Académie française, nous les partageons tous.
C’est dire combien la proposition gouvernementale de supprimer la prise en charge des frais de scolarité à l’étranger contenue dans le projet de loi de finances rectificative pour 2012 interpelle et met au pied du mur des milliers de familles françaises bénéficiaires de cette mesure depuis 2007.
En effet, si 1 270 élèves bénéficiaient de la PEC à la rentrée scolaire 2007-2008, ils étaient de 7 493 en 2011-2012. À l’origine, le budget consacré à cette prise en charge s’élevait à 4,4 millions d’euros ; il a atteint 28,8 millions d’euros après plafonnement, en 2011.
Dans le présent débat, il nous faut raison garder. Nous n’allons pas recommencer ces interminables discussions byzantines pour avoir de nouveau à choisir entre le camp des « pour » et celui des « contre » la suppression.
Reprenons objectivement les différents aspects de cette question.
La France dispose d’un réseau éducatif exceptionnel à l’étranger, avec près de 500 établissements scolaires. Ce réseau a toujours permis aux familles établies hors du territoire national de scolariser leurs enfants dans de bonnes conditions pédagogiques, souvent meilleures qu’en France.
Pour répondre aux diverses controverses suscitées par l’attribution de la PEC, notamment du fait de son coût et de son attribution sans conditions de ressources, un premier rapport parlementaire préconisait la suppression de la prise en charge au regard du contexte budgétaire très contraint auquel était confronté notre pays. Un second rapport proposait d’instaurer un plafond de la PEC indépendant du niveau de ressources des foyers et d’instaurer un moratoire avant d’envisager l’extension aux classes de second cycle.
S’il est vrai que des familles aisées ont pu profiter d’un effet d’aubaine sans conditions de ressources, il faut néanmoins souligner que de très nombreuses familles modestes, exclues du système des bourses sous conditions de ressources, ont pu bénéficier de la PEC.
En effet, le nombre de boursiers a augmenté sous le régime de la PEC : il est aujourd’hui de 25 000, contre 19 000 en 2007, première année d’application de la prise en charge.
Par ailleurs, le désengagement des entreprises françaises, qui prennent généralement en charge la scolarité des enfants de leurs expatriés, doit être nuancé. Dans les faits, il est minime et la PEC a le plus souvent aidé les PME-PMI à déployer leur personnel à l’étranger.
Nous ne pouvons que nous réjouir de ces aspects positifs.
Venons-en maintenant à ces gros orages qui grondent au-dessus de l’offre éducative des Français à l’étranger depuis l’annonce de la suppression radicale et sans concertation de la PEC.
Pour justifier cette suppression qui va toucher les familles de lycéens français à l’étranger, y compris les moins aisées, le Gouvernement argue qu’elles peuvent bénéficier de bourses scolaires attribuées sur critères sociaux. Or, il est de notoriété publique que l’actuel système des bourses est déjà très défavorable aux classes dites moyennes. Un fossé se creuse donc entre familles aisées et familles moins favorisées.
Avec la suppression totale de la PEC, chaque famille perdra, en moyenne, 4 000 euros par élève. De plus, cette décision arbitraire va inévitablement nuire aux établissements, outils de notre action culturelle et économique extérieure, et dégrader l’influence et le rayonnement français dans le monde.
Si l’article 30 est adopté, la suppression de la prise en charge s’appliquera dès la rentrée 2012. Cette décision unilatérale et brutale du Gouvernement est inique. Prise de surcroît en pleine période estivale, elle va placer les familles françaises dans le plus grand embarras, et même dans le désarroi, car certaines d’entre elles, qui ne pourront pas payer, seront obligées de chercher des solutions dans l’urgence et la confusion, voire de retirer leurs enfants de nos établissements à un moment décisif de leur scolarité : la préparation du baccalauréat.
La suppression de la PEC provoquera, en outre, des problèmes de nature administrative pour les établissements scolaires qui avaient comptabilisé par anticipation le montant des frais.
Une période de transition confuse et tumultueuse va très certainement s’ouvrir. Attendez-vous, monsieur le ministre, à de nombreux et coûteux recours contentieux. On ne gère pas dans l’improvisation, encore moins dans la précipitation !
Rappelons qu’aujourd’hui une demande d’aide, bourses scolaires et PEC confondues, est présentée pour 67 % des lycéens français scolarisés à l’étranger.
Par ailleurs, l’urgence étant mauvaise conseillère, plusieurs amendements cosignés par mes collègues représentant les Français établis hors de France ont pour objet de vous demander le report de cette suppression à la rentrée scolaire 2013 et un redéploiement vers les bourses des sommes ainsi dégagées.
Nous aurons le temps, lors de l’examen cet automne du projet de loi de finances pour 2013, d’examiner en détail un nouveau dispositif d’aide à la scolarité plus efficace et plus juste.
M. Richard Yung. Le temps de parole est dépassé !
M. Louis Duvernois. Cet avis est partagé par le ministre des affaires étrangères et président de l’Assemblée des Français de l’étranger, Laurent Fabius, qui, hier, au Quai d’Orsay, devant les parlementaires représentant les Français de l’étranger, a demandé « le temps de la réflexion »,…
Mme la présidente. Mon cher collègue, il vous faut conclure !
M. Louis Duvernois. … affirmant que l’État ne ferait pas d’économies sur cette réforme.
Êtes-vous, monsieur le ministre, un ministre « normal », pour reprendre une expression à la mode, au sein d’un gouvernement qui prône l’ouverture et privilégie le débat et la concertation ? (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Monsieur Duvernois, s’il vous plaît, veuillez conclure !
M. Jean-Claude Frécon. Trop long !
M. Louis Duvernois. En tout état de cause,…
M. Louis Duvernois. … en l’absence de volonté de concertation de votre part et de report de la mesure, le groupe UMP du Sénat votera contre la suppression de la prise en charge des frais de scolarité dans les classes de lycée des établissements scolaires homologués et conventionnés à l’étranger.
M. Jean-Claude Frécon. C’était interminable !
M. Richard Yung. Monsieur Duvernois, vous avez parlé six minutes, alors que moi je n’ai pas épuisé mon temps de parole !
M. Christian Cointat. On en a donc repris une partie ! (Sourires sur les travées de l'UMP.)
M. Jean-Claude Frécon. Que c’est drôle…
Mme la présidente. La parole est à M. Robert del Picchia, sur l'article.
Je compte sur vous, mon cher collègue, pour respecter votre temps de parole.
M. Robert del Picchia. Il semble qu’il y ait une certaine saturation : le ministre ne va même plus vouloir entendre ce que nous avons à dire…
Je ne suis d’accord qu’avec la dernière partie de l’intervention de Mme Lepage, ancienne munichoise ; avec le reste, je ne le suis pas du tout.
Au milieu des grandes vacances d’été, on annonce à nos compatriotes établis à l’étranger qu’ils vont devoir payer davantage pour la scolarité de leurs enfants : peut-être écourteront-ils leurs vacances pour pouvoir le faire…
Monsieur le ministre, la pétition a été signée par environ 1 730 familles qui font ainsi connaître leur mécontentement. Si la suppression de la PEC est votée cette semaine, ce qui ne fait plus de doute, que vont faire les milliers de familles concernées et que peut-on leur dire ?
Vous me répondrez qu’il y a des bourses. Fort bien, mais cela ne résout pas le problème, car les bourses sont réservées aux familles les plus démunies, et les critères d’attribution n’ont pas été révisés.
Les familles aisées, qu’elles soient françaises ou étrangères, d’ailleurs, auront toujours la capacité financière de scolariser leurs enfants où elles le souhaitent, mais, à l’étranger comme en France, l’immense majorité des familles françaises ne disposent que de revenus moyens.
La suppression de la PEC, appliquée de manière aussi brutale, car trop rapide, risque d’avoir des conséquences non seulement pour les familles, mais aussi pour les lycées. En effet, certains parents ne pourront pas régler le trimestre de rentrée. Les lycées vont donc rencontrer des problèmes de trésorerie.
Il convient de trouver des solutions. Par le biais des amendements qui vont suivre, nous proposerons notamment de reporter la suppression de la PEC soit d’un an, soit au moins d’un trimestre. En effet, les crédits alloués au financement de la PEC sont déjà inscrits dans le budget de 2012 et vous n’entendez pas les supprimer, monsieur le ministre, ce dont je vous félicite.
À ce propos, j’avais déposé un amendement, à ce même article 30, visant à affecter en priorité ces crédits aux bourses scolaires destinées aux élèves français des trois classes de lycée. Plutôt que de les saupoudrer, on pourrait peut-être commencer par là, pour cette année scolaire ou tout au moins pour le trimestre de la rentrée. L’argent est disponible !
Cet amendement n’a pas été jugé recevable, au motif que la ventilation des crédits d’un programme ne constitue pas un élément amendable. Dont acte.
Je souhaiterais néanmoins, monsieur le ministre, que vous nous indiquiez précisément comment seront employés les 12,5 millions d’euros de crédits qui devaient servir à financer la PEC pour le dernier trimestre.
Vous avez dit, à l’Assemblée nationale, que ces fonds resteraient dans le programme 151 « Français à l’étranger et affaires consulaires ». Soit, mais ce programme comporte trois actions : « offre d’un service public de qualité aux Français à l’étranger », « accès des élèves français au réseau de l’AEFE » –action dont relèvent la PEC et les bourses –, « instruction des demandes de visa ».
Comme l’ont déjà rappelé mes collègues, le Président de la République a déclaré, le 10 juillet à Londres, que les sommes « qui seront économisées par l’abandon de la règle de la gratuité seront entièrement investies pour le mécanisme des bourses ».
Monsieur Cahuzac, en tant que ministre chargé du budget, je suppose que vous savez parfaitement aujourd’hui à quelle action vont être affectés ces crédits. Je vous demande juste de nous le préciser, dans un esprit de transparence. (M. Christian Cointat applaudit.)
Mme la présidente. Je vous remercie, monsieur del Picchia, d’avoir respecté votre temps de parole.
La parole est à M. Christophe-André Frassa, sur l'article.
M. Christophe-André Frassa. Dans le dossier de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français à l’étranger, le débat technique a largement pris le pas sur tout le reste et a masqué l’essentiel.
Alors que le Gouvernement a décidé de brusquer les choses et, de façon pour le moins précipitée, de supprimer dès la rentrée 2012 la PEC, pourtant déjà allouée, il me semble que le temps est venu de reprendre le débat sur le fond, car non seulement il faut maintenir la prise en charge, mais il faut même l’étendre à l’ensemble de la scolarité. C’est un point de vue que partagent mes collègues membres du groupe Union des républicains à l’Assemblée des Français de l’étranger.
Bien sûr, le débat technique et financier a son importance, et nous y reviendrons, car le « comment » a sa nécessité et ses contingences, mais, comme le disait le général de Gaulle, « l’intendance suivra ». L’important, c’est le « pourquoi ».
Je sais bien que Danton disait que l’on n’emporte pas sa patrie à la semelle de ses souliers, mais il me semble que, dans cette période où la mondialisation est autant une chance qu’une menace et où les Français de l’étranger démontrent quotidiennement l’importance du rôle qu’ils jouent dans le rayonnement de la France, il serait temps de les reconnaître comme des citoyens à part entière.
Il n’y a nulle raison pour qu’ils deviennent des « sous-Français » et leurs enfants des sacrifiés. Qu’a donc la République de Jules Ferry contre ces enfants-là ? Ils ne résident pas sur le territoire national ? Et alors ? Depuis quand la France est-elle un pays uniquement de droit du sol et la nationalité française est-elle liée à la résidence sur le seul territoire national ? Leurs parents ne payent pas d’impôt sur le revenu en France ? Et alors ? Depuis quand la présentation de la déclaration d’imposition est-elle exigée à l’inscription d’un enfant dans une école située sur le territoire national ? Il est d’ailleurs heureux qu’elle ne le soit pas, car sinon plus de la moitié des enfants se verraient exclus de l’enseignement public, leurs parents n’étant pas imposables.
Alors, quel autre argument peut-on opposer, sur le plan des principes, à ce qui, dans un quinquennat dont la priorité est, semble-t-il, la jeunesse et l’éducation, paraît être une simple mesure de justice et de bon sens ? Aucun ! Seul le sectarisme peut motiver un tel choix, car, pour un certain nombre d’idéologues, tous les Français de l’étranger sont des évadés fiscaux, des patrons d’entreprises du CAC 40,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il y en a !
M. Christophe-André Frassa. … des joueurs de football, des sportifs-artistes, des parasites ou des inutiles, voire tout cela ensemble.
D’après eux, la mesure ne profiterait qu’à des électeurs réputés – à tort au vu des dernières élections – ne pas faire partie de la clientèle habituelle de l’actuelle majorité. Elle serait donc une prébende inutile. Belle illustration du sens de l’intérêt général ! Bel exemple de justice !
Parlons d’argent maintenant, et revenons à ce débat technique où les sectaires déjà cités ont rivalisé de mauvaise foi ; parlons de ce coût qui est, en fait, le seul argument non affabulatoire des opposants à cette prise en charge.
Commençons par rétablir quelques vérités et rappeler quelques chiffres indiscutables, puisque provenant des publications de l’éducation nationale.
Il y a en France 12 017 495 élèves inscrits dans les établissements scolaires. Nos 110 000 enfants expatriés représentent donc 0,92 % de cet effectif : ce taux permet de relativiser grandement les choses…
Dans le budget de l’AEFE, je ne mentionnerai que la somme de 100 millions d’euros provenant de subventions de l’État qui y est affectée aux bourses scolaires, car elle a son importance dans le calcul du montant nécessaire à la mise en œuvre de la PEC.
Alors que le coût moyen d’un lycéen est de 10 710 euros par an en France, il n’est que de 4 084 euros dans les établissements de l’AEFE, soit deux fois et demie moins !
Ces quelques chiffres rappelés, venons-en au fait : combien coûterait la PEC si on l’étendait à nos 110 000 écoliers ? Le calcul est simple : à 4 000 euros par élève, le total s’élève à 440 millions d’euros.
Ce chiffre pourra toujours être contesté dans le détail, car le coût n’est pas exactement le même pour chaque niveau, mais pas dans sa masse, d’autant que c’est le coût moyen d’un lycéen, réputé le plus élevé, qui a été retenu comme étalon.
Ce chiffre doit maintenant être corrigé à la baisse pour plusieurs raisons.
Sur ces 110 000 élèves, 20 % sont des enfants de fonctionnaires ou assimilés, dont le coût de la scolarité est déjà pris en charge par l’État au travers de prestations familiales spécifiques.
En outre, il sera demandé aux entreprises françaises de plus de cinquante salariés de pourvoir aux frais de scolarité des enfants de leurs employés – cela se pratique déjà actuellement dans 95 % des cas –, ce qui permet d’exclure du calcul, là encore, 20 % des élèves.
Reste donc 66 000 élèves ; à 4 000 euros par élève, le coût total se trouve ramené à 264 millions d’euros, dont je retranche encore les 100 millions d’euros destinés aux bourses déjà prévus. Il nous reste donc à financer 164 millions d’euros.
Bien entendu, des mesures techniques d’encadrement et d’indexation devront nous garantir que ce montant ne subira pas une inflation galopante.
Bien entendu, la prise en charge individuelle ne pourra jamais être supérieure au coût de la scolarité en France.
Bien entendu, seuls les enfants français scolarisés dans des établissements liés à l’Agence pourront bénéficier de cette prise en charge.
Il n’en reste pas moins que 164 millions d’euros, c’est beaucoup d’argent, mais, là encore, il faut relativiser.
Le coût de l’éducation en France est de 143 milliards d’euros. En comparaison, 164 millions d’euros, c’est 0,11 % de cette somme, alors que les élèves expatriés représentent 0,92 % des effectifs : voilà un rapport qualité-prix imbattable, n’est-ce pas ?
Relativisons encore : le coût de l’allocation de rentrée scolaire est de 1,5 milliard d’euros par an ; la simple augmentation promise pour la rentrée de 2012 représente 380 millions d’euros de plus.
Mme la présidente. Monsieur Frassa, il vous faut conclure.
M. Christophe-André Frassa. J’en termine, madame la présidente.
Relativisons toujours : l’aide médicale d’État pour les sans-papiers indigents coûte plus de 500 millions d’euros par an.
Relativisons enfin : si des parents, ne pouvant assumer personnellement ces frais de scolarité, décident de laisser leurs enfants en pension chez la tante ou le cousin à Villeneuve-sur-Lot ou à La Roche-Maurice, immédiatement, tout rentre dans l’ordre…
Mme la présidente. Concluez s’il vous plaît !
M. Christophe-André Frassa. … et la République, bonne fille, reprend sa mission éducative gratuitement.
Alors, un peu d’audace, un peu de conviction ! Existe-t-il domaine plus consensuel que celui de l’éducation des enfants ? Monsieur le ministre, la gestion sans vision n’est qu’une injure au futur. L’école gratuite est une des valeurs constitutives de la République française, une de ses fiertés : qu’elle soit gratuite pour tous ses enfants ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme la présidente. L'amendement n° 18 rectifié, présenté par MM. Frassa, Cantegrit, Cointat, del Picchia, Duvernois et Ferrand, Mmes Garriaud-Maylam, Kammermann et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Jean-Pierre Caffet. Les amendements ont déjà été présentés !
M. Christian Cointat. Nous vous avons écoutés stoïquement, même quand vos propos ne nous intéressaient pas ! Alors, soyez aimables, écoutez-nous !
M. Christophe-André Frassa. Je serai bref.
Un sénateur du groupe socialiste. Espérons-le !
M. Christophe-André Frassa. J’ai attendu patiemment tout l’après-midi ; soyez patients à votre tour !
Le présent amendement a pour objet de faire respecter le principe de sécurité juridique, qui constitue un principe général du droit.
Le Conseil d’État, dans son rapport public de 2006, précise que « le principe de sécurité juridique implique que les citoyens soient, sans que cela appelle de leur part des efforts insurmontables, en mesure de déterminer ce qui est permis et ce qui est défendu par le droit applicable. Pour parvenir à ce résultat, les normes édictées doivent être claires et intelligibles et ne pas être soumises dans le temps à des variations trop fréquentes ni surtout imprévisibles. »
Ce rapport indique également que « le principe de sécurité juridique suppose que le droit soit prévisible et que les situations juridiques restent relativement stables ».
Il s’agit, d’une part, de la non-rétroactivité de la loi, d’autre part, de la protection des droits acquis et de la stabilité des situations juridiques.
Le présent amendement vise également à faire respecter le principe de l’égalité républicaine devant le savoir.
Or l’article 30, qui tend à supprimer la prise en charge dès la rentrée 2012, rompt le principe d’égalité entre les lycéens français, dont la situation sera différente selon qu’ils résident ou non en France.
En effet, le principe de gratuité de l’enseignement public a été érigé en principe constitutionnel par le Préambule de la Constitution de 1946. Il s’agit d’un principe absolu, confirmé par la jurisprudence, et qui concerne toute la durée de la scolarité, depuis l’entrée en maternelle jusqu’aux classes de lycée post-baccalauréat. Je vous renvoie sur ce point au code de l'éducation.
De plus, en encaissant les frais d’inscription pour l’année 2012-2013, les établissements français à l’étranger ont passé un contrat moral avec les parents. Demander a posteriori à ceux-ci de s’acquitter de frais de scolarité équivaut à une dénonciation unilatérale de ce contrat.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis défavorable.
M. Christophe-André Frassa. C'est étonnant !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Kalliopi Ango Ela, pour explication de vote.
Mme Kalliopi Ango Ela. Je suis très surprise de ce renversement des rôles !
À l'Assemblée des Français de l'étranger, nos collègues sénateurs de l'ancienne majorité ont longtemps défendu avec beaucoup de conviction la prise en charge des frais de scolarité des élèves français accueillis dans un établissement français à l’étranger. Aujourd'hui, je constate qu'ils sont presque d'accord pour une réforme, mais qu’ils souhaitent le report de la suppression de la PEC. Cette attitude ne manque pas de m'étonner : il me semble au contraire nécessaire que cette suppression intervienne rapidement, précisément pour que l'on puisse préparer la réforme.
L’annonce de la décision a été brutale, c’est vrai, mais des mesures d'accompagnement précises sont prévues. L’expertise des réseaux consulaires et l’appui des conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger permettront de ménager la transition avant que ne soit élaboré, dans la concertation, un dispositif qui sera plus simple, plus lisible pour les familles, les élèves et les établissements. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Je n'ai pas du tout l'intention d'engager une polémique, le sujet est beaucoup trop important. Le Président de la République a pris une position claire : il a fait de l'enseignement l'une de ses toutes premières priorités. Cela est très bien ; personne ne le lui reprochera, au contraire.
Cependant, cette priorité doit concerner aussi les Français établis à l'étranger. Nous ne demandons rien d'autre.
Je vous ferai un aveu : si j'ai été favorable à la prise en charge, c'est uniquement parce que cela nous permettait d'obtenir des crédits supplémentaires que Bercy nous refusait. Par ce biais, on a pu augmenter les moyens du réseau. Qu’on les utilise d'une façon ou d'une autre, là n'est pas le plus important : ce qui importe, c'est que les intéressés, ceux qui connaissent bien ces questions, puissent se prononcer.
Monsieur le ministre, je vous demande d'avoir plus d'audace que vos prédécesseurs et de ne pas hésiter à consulter les élus représentant les Français établis hors de France, ceux qui sont sur le terrain, c'est-à-dire les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, afin que l’on puisse trouver de véritables solutions.
Tout au long de ce débat, vous aurez pu remarquer que les points de désaccord entre les sénateurs représentant les Français établis hors de France étaient en réalité peu nombreux – la PEC en était un –, parce que nous recherchons toujours le consensus, non pour le plaisir de parvenir à se mettre d'accord, mais en raison d’un sens très fort de l'intérêt général.
Si le Gouvernement a véritablement la volonté de progresser sur ce dossier, monsieur le ministre, je vous garantis que, en vous appuyant sur cette force que représentent les élus des Français établis à l’étranger, vous parviendrez à une solution sinon entièrement consensuelle, du moins très largement approuvée.
Ce qui importe, c’est de réussir et de donner leur chance à nos enfants scolarisés à l'étranger. N’oublions pas non plus que, à l'étranger, des ressortissants d'autres pays souhaitent faire profiter leurs enfants de notre enseignement, qui seront alors les meilleurs défenseurs de la francophonie.
L’enjeu est donc de taille ! Je vous invite à relever ce défi, monsieur le ministre : il y va de l'intérêt de la France ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. Robert del Picchia. Très bien !
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 105, présenté par MM. Ferrand, Cantegrit, Cointat, del Picchia, Duvernois et Frassa, Mmes Garriaud-Maylam, Kammermann et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
à compter de la rentrée scolaire 2013.
La parole est à M. André Ferrand.
M. André Ferrand. Je souhaite confirmer les propos de mon collègue Christian Cointat : grâce à la PEC, qui a été diversement reçue et même contestée, les crédits du programme 151 ont été abondés de 30 millions d'euros supplémentaires. C’est un effet incontestablement positif de cette mesure.
Cet amendement a pour objet de repousser à la rentrée 2013 l'application de la suppression de la prise en charge. Cette suppression, quelles qu'en soient les motivations et quelle que soit l’appréciation que l’on peut porter sur elle, est beaucoup trop brutale.
Des mesures d'adaptation sont prévues, nous dit-on, mais je puis affirmer qu’elles seront interprétées différemment selon les consulats, les commissions des bourses. Il est vraisemblable que, dans de nombreux endroits, de véritables difficultés surgiront.
Plutôt que de prendre ce risque, pourquoi ne pas décider tout simplement de reporter d'un an la mise en œuvre de cette mesure, afin de donner aux familles, aux établissements et au réseau consulaire le temps de s'organiser ?
Mme la présidente. L'amendement n° 79, présenté par M. del Picchia, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
à l’issue de l’année scolaire 2012-2013 pour les pays du rythme Nord et 2013 pour les pays du rythme Sud
II. - Alinéa 2
Remplacer l'année :
2014
par l'année :
2015
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Cet amendement vise à reporter d'un an l'application de la suppression de la PEC, afin de donner du temps à la réflexion.
Mme la présidente. L'amendement n° 205, présenté par M. del Picchia, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Compléter cet alinéa par les mots :
à l’issue du 1er trimestre de l'année scolaire 2012-2013 pour les pays du rythme Nord et à l’issue de l'année scolaire 2012 pour les pays du rythme Sud.
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Il s’agit d’un amendement de repli par rapport au précédent, tendant à prévoir un report de trois mois de la mise en œuvre de la mesure.
Je rappelle à ceux de mes collègues qui ont mentionné ces 30 millions d'euros supplémentaires alloués par Bercy au financement de la PEC que, parallèlement, les crédits destinés aux bourses ont doublé, passant de 47 millions d'euros à 94 millions d'euros.
Je rappelle également que la prise en charge des frais de scolarité a été repoussée par deux fois dans cet hémicycle et à l'Assemblée nationale. C'est uniquement parce que le ministre du budget de l'époque a, à deux reprises, demandé une seconde délibération que cette mesure a pu être adoptée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Sans surprise, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur ces amendements.
J'avoue comprendre assez mal la passion qui semble s'être emparée de la Haute Assemblée à l'occasion de l'examen de ces dispositions. Il ne s'agit pas de réaliser une économie : les crédits sont maintenus au même niveau, dans la même mission, au sein du même programme. Ils seront simplement utilisés différemment, en faveur d’enfants qui en ont peut-être plus besoin que certains bénéficiaires actuels.
Par ailleurs, je n'ai pas à confirmer les propos du Président de la République ; c'est plutôt lui qui doit quelquefois confirmer les miens ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.) Ce que le Président de la République a annoncé se fera.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 42, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer le mot :
présente
par les mots :
remet au Parlement
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il s'agit d'un amendement rédactionnel.
Mme la présidente. L'amendement n° 216, présenté par M. Leconte, Mme Lepage, M. Yung, Mme M. André, MM. Berson, Botrel et Caffet, Mme Espagnac, MM. Frécon, Germain, Haut, Hervé, Krattinger, Massion, Patient, Patriat, Rebsamen, Todeschini et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
rapport
insérer les mots :
au Parlement qui sera préalablement présenté devant l’Assemblée des Français de l’étranger et fera l’objet d’un débat
La parole est à M. Jean-Yves Leconte.
M. Jean-Yves Leconte. Cet amendement tend à prévoir que le rapport soit au préalable présenté devant l’Assemblée des Français de l’étranger, dont les délibérations pourront ainsi éclairer le Parlement sur l'utilisation la plus efficace et la plus rationnelle de l’argent public, au bénéfice de nos concitoyens établis hors de France.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur l'amendement n° 216 ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission n’est pas favorable à cet amendement, car, s'il était adopté, l'amendement n° 42 n'aurait plus d'objet.
Néanmoins, monsieur le ministre, je souhaiterais que le Gouvernement s’engage à ce que l'Assemblée des Français de l'étranger soit consultée avant l’examen du projet de loi de finances pour 2014. Cela permettrait sans doute de donner satisfaction à notre collègue.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur les deux amendements ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 42.
En ce qui concerne l'amendement n° 216, la mesure proposée ne me paraît pas indispensable. En effet, les conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger seront amenés à se prononcer à l'occasion de l'examen du décret relatif à la PEC. Surtout, les parlementaires membres de l’AFE auront communication de ce rapport et pourront donc le présenter aux autres membres de cette instance.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote sur l'amendement n° 216.
M. Jean-Yves Leconte. L'Assemblée des Français de l'étranger a vocation, de par la loi, à être consultée par le Gouvernement. Il s’agit bien d’une assemblée élue, et non d’une association ! Je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous preniez l’engagement que le Gouvernement consultera l'Assemblée des Français de l'étranger sur ce sujet avant l'examen du projet de loi de finances pour 2014. Dans ce cas, je serai disposé à retirer cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il va de soi que cette assemblée élue sera consultée : il n’y a aucun problème à cet égard. Il me semble néanmoins légitime que l'Assemblée nationale et le Sénat le soient préalablement. Le Parlement doit à mon sens bénéficier d’une forme de priorité institutionnelle.
Sous le bénéfice de ces explications, monsieur le sénateur, je vous prie de bien vouloir retirer cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Leconte, retirez-vous l’amendement n° 216 ?
M. Jean-Yves Leconte. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 216 est retiré.
L’amendement n° 202 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Frassa, Duvernois, Ferrand, del Picchia et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après l’année :
2014
insérer les mots :
et après avis des conseillers à l’Assemblée des Français de l’étranger
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Nous souhaitons que l’avis de l’Assemblée des Français de l’étranger soit recueilli avant que le rapport prévu à l’article 31 soit présenté au Parlement. Cela me paraît indispensable : en effet, qui connaît mieux la situation de l’enseignement français à l’étranger que les Français de l’étranger eux-mêmes et leurs représentants élus ?
Monsieur le ministre, l’annonce de la suppression de la PEC a été brutale. Sur le plan de la méthode, on peut précisément s’étonner que le Gouvernement n’ait pas consulté les principaux protagonistes : associations de parents d’élèves, établissements scolaires, responsables de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger, représentants élus des Français de l’étranger à l’AFE et au Parlement. On ne peut que déplorer que le Gouvernement n’ait pas procédé ainsi ; au moins conviendrait-il qu’il ne persévère pas dans l’erreur : monsieur le ministre, associez ces acteurs, notamment les élus de l’AFE, à la poursuite de la réflexion sur cette réforme du service public d’enseignement à l’étranger.
Les conseillers à l’AFE, je le répète une nouvelle fois, sont les représentants de proximité des Français de l’étranger. Personne n’est mieux informé qu’eux de la situation sur le terrain, et il est donc normal qu’ils soient consultés pour avis, conformément aux statuts de cette assemblée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Je suis tenté de solliciter le retrait de cet amendement.
En effet, s’il est naturel que l’Assemblée des Français de l’étranger s’exprime sur une telle question, il semble excessif de prévoir sa saisine dans la loi : un engagement du Gouvernement de consulter les conseillers à l’AFE pourrait suffire. M. le ministre a indiqué à l’instant que cette consultation interviendrait naturellement, qu’elle était dans l’ordre des choses.
Dans ces conditions, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement, ma chère collègue. Dans la négative, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.
Au regard des principes institutionnels, aucun parlementaire ne peut, en conscience, voter une telle disposition, qui s’apparente tout à fait à une injonction au Gouvernement. Je pense que nous pouvons tous être d’accord sur ce point.
Pour le reste, il me semble que la consultation a été générale : elle n’a pas concerné que les seuls Français de l’étranger, mais tous les Français. En effet, cette mesure était clairement indiquée dans le programme de campagne du Président de la République : prétendre qu’il n’y a pas eu de consultation formelle sur ce sujet, c’est méconnaître que le suffrage universel est intervenu.
Je ne partage donc pas votre analyse, madame la sénatrice. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’appellerai à voter contre.
Mme la présidente. Madame Garriaud-Maylam, l’amendement n° 202 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je refuse de retirer mon amendement, parce que je suis en désaccord avec les propos de M. le ministre. L’Assemblée nationale a adopté un excellent amendement, aux termes duquel le Gouvernement doit déposer au Parlement un rapport sur l’enseignement français à l’étranger. Il ne s’agit absolument pas ici d’adresser une injonction au Gouvernement, mais simplement de prévoir la consultation d’une assemblée élue au suffrage universel direct. Cela me paraît tout à fait normal !
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Pour ma part, je me satisfais des assurances données par M. le ministre quant à la consultation de l’Assemblée des Français de l’étranger. J’ai indiqué, tout à l’heure, que la solution devrait recueillir sinon un complet consensus, du moins un très large accord. Il me semble que M. le ministre a répondu, indirectement, à cet appel.
Je préférerais que cet amendement puisse être adopté, d’autant que d’autres dispositions législatives prévoient déjà la consultation de l’Assemblée des Français de l’étranger : il y a des précédents. En tout état de cause, je ne voudrais pas qu’un tel amendement soit rejeté, car ce serait très mauvais politiquement.
Dans ces conditions, puisqu’il existe manifestement un consensus sur la nécessité de la consultation de l’AFE sous réserve qu’elle ne figure pas dans la loi, je demande à ma collègue de bien vouloir rejoindre ce consensus ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Le problème est que, trop souvent, de telles assurances sont restées sans suite…
Cela étant, puisqu’il est évident que, de toute façon, cet amendement sera rejeté, comme toute proposition émanant de ce côté de l’hémicycle, je suivrai le conseil de mon collègue et ami Christian Cointat.
Je retire donc mon amendement, en espérant que M. le ministre tiendra son engagement. (Marques d’approbation.)
M. Yann Gaillard. Voilà un peu de sagesse !
Mme la présidente. L’amendement n° 202 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 203 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam, MM. Frassa, Duvernois, Ferrand, del Picchia et les membres du groupe Union pour un mouvement populaire, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
présentant les conséquences de la suppression de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d’enseignement français à l’étranger et sur les ajustements à apporter aux bourses sur critères sociaux.
par les mots :
établissant un état des lieux sur la scolarisation des enfants français à l’étranger. Celui-ci inclura les conséquences de la suppression de la prise en charge des frais de scolarité des enfants français scolarisés dans un établissement d’enseignement français à l’étranger et les ajustements à apporter aux bourses sur critères sociaux, ainsi que le soutien apporté aux élèves français ne bénéficiant pas d’une scolarité dans un établissement français pour qu’ils accèdent à un enseignement francophone.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. D’ores et déjà, à peine plus d’un quart des jeunes Français vivant hors de France sont scolarisés dans les établissements français à l’étranger. Avec la suppression de la PEC, des milliers de familles supplémentaires risquent de devoir scolariser leurs enfants dans des écoles étrangères, qu’il s’agisse d’établissements publics du pays de résidence ou d’écoles privées internationales.
Il est donc plus important que jamais de renforcer le soutien aux programmes alternatifs visant à permettre aux élèves français non scolarisés dans les écoles françaises à l’étranger d’accéder à une éducation en français et à la française : je pense aux petites écoles dites FLAM, au programme Jules-Verne concernant la mobilité des professeurs, au label « France éducation », au Centre national d’enseignement à distance.
L’analyse des conséquences de la suppression de la PEC et la redéfinition du service public d’enseignement français à l’étranger ne peuvent faire l’impasse sur ces volets de notre politique éducative, me semble-t-il. Il me paraît donc essentiel que le rapport au Parlement ne se limite pas à une réflexion sur la réforme du système des bourses dans les établissements français à l’étranger, mais comporte aussi un état des lieux et des propositions pour soutenir ces initiatives.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. L’objet de cet amendement va bien au-delà des questions financières dont traite ce projet de loi de finances rectificative. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis défavorable. Cet amendement est un cavalier, il ne saurait être adopté dans le cadre de l’examen d’un projet de loi de finances rectificative.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 203 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 30, modifié.
(L’article 30 est adopté.)
Article additionnel après l’article 30
Mme la présidente. L’amendement n° 230, présenté par M. Patient et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 30
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au c) du 1 du VI de l’article 199 terdecies-O A du code général des impôts, après les mots : « huit mois à compter de la date de constitution du fonds, » sont insérés les mots : « sauf pour les fonds mentionnés au VI ter A du présent article pour lesquels la période de souscription est allongée de 8 à 12 mois, ».
II. - La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Pierre Caffet.
M. Jean-Pierre Caffet. Cet amendement est défendu, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission s’en remet à l’avis du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement me pose quelques difficultés, car j’ignore totalement quelles pourraient être les conséquences, pour les finances publiques, d’une telle prolongation de quatre mois. Le ministère des outre-mer n’a pas été consulté en temps voulu, ce qui me gêne également.
Je m’en remettrai à la sagesse de la Haute Assemblée, tout en soulignant qu’il n’est pas exclu que cette disposition soit supprimée lors de la réunion de la commission mixte paritaire, au regard des éléments d’information qui auront pu être fournis d’ici là par le ministère compétent.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l’article 30.
Article 31 (nouveau)
Après le mot : « tard », la fin de l’article 49 de la loi n° 2007-1199 du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités est ainsi rédigée : « le 1er janvier 2013. » – (Adopté.)
Article 32 (nouveau)
Après le mot : « pour », la fin du onzième alinéa de l’article 12-2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale est ainsi rédigée : « l’exercice 2012. »
Mme la présidente. L’amendement n° 140 rectifié, présenté par MM. Arthuis, Zocchetto, Dubois, J. Boyer, Maurey et Delahaye, Mme N. Goulet, MM. Marseille, Deneux, Amoudry et Capo-Canellas, Mme Morin-Desailly, MM. Roche et Détraigne, Mme Férat et les membres du groupe de l’Union centriste et républicaine, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Aymeri de Montesquiou.
M. Aymeri de Montesquiou. Lors de la discussion de la loi de finances rectificative du 29 juillet 2011, nos collègues Jean Arthuis et Philippe Marini avaient déjà ouvert un débat dans cet hémicycle sur les ressources du Centre national de la fonction publique territoriale, le CNFPT. Ce débat a abouti à la réduction de ces ressources à hauteur de 10 %. Nos collègues avaient en effet mis en évidence l’existence d’un risque d’inefficience de l’emploi des deniers publics dès lors que les besoins réels d’un organisme sont découplés des ressources qui lui sont attribuées.
Le rapport annuel de la Cour des comptes pour 2011 relevait justement que le CNFPT s’était lancé dans une politique immobilière quelque peu surprenante ces dernières années. Il pointait notamment la valeur de son siège parisien, était estimée à plusieurs dizaines de millions d’euros, et l’acquisition peu justifiée de centres régionaux.
L’article 32 de ce projet de loi de finances rectificative relance donc un débat récurrent. Nous ne comprenons pas que l’on veuille augmenter la contribution au CNFPT près d’un an, jour pour jour, après le vote de sa réduction. C’est pourquoi le groupe de l’Union centriste et républicaine propose que l’on s’en tienne purement et simplement à la décision initiale du Sénat sur ce point, dès lors qu’aucune circonstance nouvelle ne justifie un relèvement des ressources du CNFPT.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je voterai naturellement cet amendement.
Je rappelle que notre vote de l’an dernier était notamment motivé par l’abondance de la trésorerie du CNFPT. Il m’aurait semblé utile que nous puissions faire le point sur cette question avant de décider éventuellement de revenir au statu quo ante.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Nous avons été quelque peu harcelés sur cette question par un certain nombre de maires, le CNFPT leur ayant fait accroire que nous entendions supprimer ses moyens de fonctionnement, ce qui n’est pas du tout le cas.
Les communes et les intercommunalités paient des cotisations au CNFPT. Jean Arthuis et Philippe Marini ayant constaté l’existence d’une trésorerie surabondante, ils avaient simplement proposé de réduire ces cotisations, dans l’intérêt des finances des communes.
Je voterai bien sûr cet amendement, que j’ai d’ailleurs cosigné.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.
M. Pierre Jarlier. Je ne pense pas qu’il soit opportun d’augmenter les charges des collectivités territoriales, compte tenu des difficultés financières qui sont les leurs aujourd’hui.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 32.
(L’article 32 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 32
Mme la présidente. L’amendement n° 143 rectifié bis, présenté par MM. Arthuis, J. Boyer, Dubois, Amoudry, Détraigne et Roche et Mme Férat, est ainsi libellé :
Après l’article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa de l’article 79 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Concoure également la part de l’indemnité représentative de frais de mandat qui n’a pas été utilisée conformément aux dispositions de l’article 81. » ;
2° L’article 81 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du 1°, après les mots : « à leur objet », sont insérés les mots : « après établissement d’une comptabilité fidèle et sincère » ;
b) Le second alinéa du 1° est complété par les mots : « sauf pour l’indemnité représentative de frais de mandat ».
II. - Le premier alinéa de l’article L. 136-2 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« La contribution est également assise sur l’indemnité représentative de frais de mandat à l’exclusion des frais de remboursements réels dument justifiés par établissement d’une comptabilité fidèle et sincère fraction mentionnée au second alinéa du I de l’article 81 du code général des impôts couverts par cette même indemnité. »
III. - Le dernier alinéa de l’article 15 de l’ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale est complété par les mots :
« et l’indemnité représentative de frais de mandat à l’exclusion des frais de remboursements réels dument justifiés par établissement d’une comptabilité fidèle et sincère de la fraction mentionnée au second alinéa de l’article 81 du code général des impôts couverts par cette même indemnité. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. M. Arthuis a dû partir, mais il m’a demandé de signaler qu’il aurait retiré cet amendement s’il avait pu être présent en séance à cet instant, car il se fie au travail engagé conjointement par le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat pour rechercher des solutions concernant les frais et les indemnités des parlementaires.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 146 rectifié est présenté par M. Détraigne, Mme Férat, MM. Dubois et J. Boyer, Mme N. Goulet, MM. Marseille, Deneux, Tandonnet et Amoudry et Mme Morin-Desailly.
L'amendement n° 175 rectifié est présenté par MM. Savary et Beaumont, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cardoux et César, Mmes Deroche et Des Esgaulx, M. P. Dominati, Mmes Farreyrol et Lamure, MM. Legendre, Milon, de Montgolfier, del Picchia et Pierre, Mmes Primas et Procaccia, MM. Reichardt et Revet et Mmes Sittler et Troendle.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 1° du III de l'article 151 nonies du code général des impôts, les mots : « le ou les bénéficiaires de la transmission exercent » sont remplacés par les mots : « l'un au moins des bénéficiaires de la transmission exerce ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l’amendement n° 146 rectifié.
Mme Nathalie Goulet. Cet amendement a été déposé notamment par M. Détraigne et Mme Férat. Il a pour objet d'élargir les plus-values en report à l'ensemble des bénéficiaires d'une transmission de société d'exploitation dès lors que les parts ont été conservées au moins cinq ans et que l'un des bénéficiaires au moins exerce au sein de cette même société.
En effet, le régime actuel des plus-values de ces sociétés ne facilite pas la transmission et la survie des entreprises dès lors que les héritiers non exploitants sont fiscalement désavantagés.
Cet amendement concerne manifestement les agriculteurs. M. Savary, qui a déposé un amendement identique, le défendra de façon beaucoup plus experte que moi…
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour présenter l’amendement n° 175 rectifié.
M. René-Paul Savary. Des problèmes se posent en cas de donation-partage, puisque les transmissions de biens ne sont pas soumises au même régime que les entreprises en matière de déductions fiscales. Cet amendement vise donc à revenir aux dispositions antérieures, plus avantageuses à cet égard.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Le contexte budgétaire actuel ne se prête pas à l’élargissement des possibilités de reporter des plus-values. Cet amendement va à l’encontre de la nécessité de réduire les niches fiscales, concernant notamment les revenus patrimoniaux.
La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est également défavorable à ces amendements, pour les raisons indiquées par M. le rapporteur général. Une telle extension des possibilités de report de plus-values serait tout à fait contraire à l’esprit qui a présidé à l’adoption de la disposition que cet amendement vise à modifier.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 146 rectifié et 175 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 57 rectifié est présenté par Mme Des Esgaulx.
L'amendement n° 190 rectifié bis est présenté par MM. P. Dominati, Cambon, J. Gautier, Beaumont et Dassault et Mlle Joissains.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au deuxième alinéa du I de l’article 199 ter B du code général des impôts, après la référence : « L. 313-35 » est insérée la référence : « et L. 214-43 ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Ces amendements ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 162 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Art. L. 232-19. - Les sommes servies au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie ne font pas l'objet d'un recouvrement sur la succession du bénéficiaire, sur le légataire ou sur le donataire lorsque la valeur de l'actif net successoral est inférieure à 100 000 euros. Ce montant est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi au millier d'euros le plus proche.
« Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire s'exerce sur la partie de l'actif net successoral qui excède le montant mentionné au premier alinéa. »
II. - Le I s'applique aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2013.
III. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I et du II ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° 163 rectifié bis, présenté par MM. Mézard, Collin, C. Bourquin, Fortassin, Alfonsi, Barbier, Baylet, Bertrand et Collombat, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 232-19 du code de l'action sociale et des familles est ainsi rédigé :
« Art. L. 232-19. - Les sommes servies au titre de l'allocation personnalisée d'autonomie ne font pas l'objet d'un recouvrement sur la succession du bénéficiaire, sur le légataire ou sur le donataire lorsque la valeur de l'actif net successoral est inférieure à 150 000 euros. Ce montant est actualisé chaque année dans la même proportion que la limite supérieure de la première tranche du barème de l'impôt sur le revenu et arrondi au millier d'euros le plus proche.
« Le recouvrement sur la succession du bénéficiaire s'exerce sur la partie de l'actif net successoral qui excède le montant mentionné au premier alinéa. »
II. - Le I s'applique aux successions ouvertes à compter du 1er janvier 2013.
III. - Les pertes de recettes résultant pour l'État du I et du II ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour présenter les deux amendements.
M. Nicolas Alfonsi. L’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, instituée par la loi du 20 juillet 2001, est la principale prestation en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie. Estimé à 1,15 million en 2010, le nombre des bénéficiaires devrait atteindre 2,3 millions en 2060, pour un coût de 10,6 milliards d’euros.
Au moment de sa création, l’APA devait être financée pour moitié par les départements et pour moitié par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA. Dans les faits, son coût est principalement supporté par les départements, puisque 72 % de la dépense – qui s’élève actuellement à 5,4 milliards d’euros – repose aujourd’hui sur les conseils généraux, et 28 % seulement sur l’État. En quatre ans, le budget consacré par les départements à l’allocation personnalisée d’autonomie a bondi de 22 %.
Cette situation met en péril l’équilibre budgétaire de nombreux départements, d’autant que la pression financière supportée à ce titre n’est pas homogène d’un département à l’autre. Elle dépend du nombre de personnes âgées dépendantes domiciliées dans le département et du potentiel fiscal de ce dernier. Si certains conseils généraux parviennent à assumer cette dépense, avec plus ou moins de difficulté, elle engendre une véritable asphyxie pour nombre d’entre eux.
Or, contrairement à ce qui se pratiquait avec la prestation spécifique dépendance, la PSD, qui existait antérieurement à l’APA, toute récupération sur succession des sommes versées est actuellement impossible.
Afin de remédier aux difficultés rencontrées par les conseils généraux et de faire contribuer ceux qui le peuvent au financement de la prise en charge de la dépendance, qui est un axe essentiel de notre démocratie sociale, cet amendement vise à rétablir le recours sur succession pour les sommes versées au titre de l’APA. La récupération sur succession ne s’exercerait que sur la partie de l’actif net successoral excédant 100 000 euros.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission a considéré que ce sujet est essentiel et qu’il est judicieux de réfléchir à la récupération sur succession des sommes versées au titre de l’APA. Néanmoins, elle a estimé qu’une évolution d’une telle importance devait être examinée dans le cadre de la réforme globale de la prise en charge de la dépendance que nous appelons de nos vœux.
Dans cette attente, nous suggérons à notre collègue de retirer ces deux amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.
Je sais, monsieur le sénateur, de quelle inspiration procèdent ces amendements. J’ai beaucoup parlé de cette question avec M. Mézard, dont le bon sens et la solide expérience de la gestion locale m’ont impressionné.
Convenons cependant que ces mesures trouveront certainement mieux leur place dans la prochaine réforme de la prise en charge de la dépendance. Je considère qu’il s’agit d’amendements d’appel. La prise en charge de la dépendance fait l’objet, vous le savez, d’un engagement du Président de la République. C’est dans ce cadre qu’il faudra examiner vos propositions. Dans cette perspective, je vous engage à retirer ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Le débat que nous aurons sur la prise en charge de la dépendance présentera une grande importance.
Je profite de l’occasion pour souligner les difficultés des départements en matière de financement des prestations de solidarité, l’absence de compensation des charges devenant malheureusement insupportable.
À titre d’exemple, alors que le budget du conseil général de la Marne est de 484 millions d’euros, 50 millions d’euros de dépenses au titre des prestations de solidarité – l’APA, la prestation de compensation du handicap, la PCH, ou le revenu de solidarité active, le RSA – ne sont pas compensées. Il faut donc véritablement revoir le dispositif si l’on veut que les départements puissent continuer à assumer cette mission essentielle de solidarité, qu’il s’agisse de l’insertion sociale, de la prise en charge des personnes handicapées ou âgées ou de la politique de l’enfance.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre compréhension. Nous espérons tous que le débat annoncé permettra de faire émerger des solutions satisfaisantes.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Je voudrais saluer l’initiative du groupe du RDSE, qui rejoint d’ailleurs des propositions souvent présentées au Sénat dans le passé, en particulier par notre ancien collègue Michel Charasse.
J’ajoute que la proposition défendue par M. Alfonsi est proche de l’une de celles qu’avait formulées la mission commune d’information sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque. Nous étions alors bien conscients des effets pervers et du caractère peu opérationnel aujourd’hui de la récupération sur succession pure et simple telle qu’elle s’appliquait autrefois selon le code de l’action sociale et des familles. Nous avions nous aussi imaginé, pour la partie de l’actif net successoral au-delà de 100 000 euros, un système de gage sur succession.
Le jour où l’on voudra construire un financement du risque de dépendance et de perte d’autonomie des personnes âgées, cette question devra nécessairement être traitée. Je pense qu’elle l’est de manière tout à fait réaliste dans ces amendements.
Mme la présidente. Monsieur Alfonsi, les amendements nos 162 rectifié bis et 163 rectifié bis sont-ils maintenus ?
M. Nicolas Alfonsi. Je prends acte des propos – sinon des engagements ! – de M. le ministre. Je sais combien il est difficile, en matière de dépendance, de conjuguer la solidarité nationale et la solidarité familiale ; c’est un peu appliquer la double peine aux familles concernées, d’autant que nous avons voté la réduction de 160 000 euros à 100 000 euros de l’abattement applicable aux droits de succession.
Bref, la question est très difficile, je le reconnais. Pour l’heure, je retire les amendements nos 162 rectifié bis et 163 rectifié bis.
Mme la présidente. Les amendements nos 162 rectifié bis et 163 rectifié bis sont retirés.
L'amendement n° 171 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Barbier, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collombat et Fortassin, Mme Laborde et MM. Mazars, Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au 2° du II de l’article L. 2336-5 du code général des collectivités territoriales, les mots : « à l’unanimité » sont remplacés par les mots : « à la majorité des deux tiers ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 172 rectifié, présenté par MM. Fortassin, Mézard, Collin, Baylet, Bertrand, C. Bourquin et Collombat, Mme Laborde et MM. Plancade, Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 32
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article L. 521-23 du code de l’énergie est ainsi rédigé :
« Art. L. 521-23. - Pour toute nouvelle concession hydroélectrique, y compris lors d'un renouvellement, il est institué, à la charge du concessionnaire, au profit de l'État, une redevance proportionnelle aux recettes résultant des ventes d'électricité issues de l'exploitation des ouvrages hydroélectriques concédés desquelles est déduit, le cas échéant, le montant des achats d'électricité pour les pompages. Pour le calcul du montant de la redevance, les recettes et les achats d'électricité sont calculés comme la valorisation de la production ou de la consommation d'électricité aux prix constatés sur le marché. Le taux de chaque redevance ne peut excéder un taux plafond, déterminé par l'autorité concédante dans le cadre de la procédure de mise en concurrence.
« Un tiers de la redevance est affecté aux départements sur le territoire desquels coulent les cours d'eau utilisés, l'éventuelle répartition entre plusieurs départements étant proportionnelle à la puissance moyenne hydraulique devenue indisponible dans les limites de chaque département du fait de l'usine.
« Un sixième de la redevance est affecté aux communes sur le territoire desquelles coulent les cours d'eau utilisés ou à leurs groupements sous réserve de l'accord explicite de chacune d'entre elles, la répartition entre les communes étant proportionnelle à la puissance moyenne hydraulique devenue indisponible dans les limites de chaque commune du fait de l'exploitation de l'ouvrage hydroélectrique. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l'État, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n'est pas soutenu.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. J’en reprends le texte.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 257, présenté par M. Marc, au nom de la commission des finances, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 172 rectifié.
Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur général.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Cet amendement concerne un sujet assez sensible, à savoir la redevance versée au titre des concessions hydroélectriques.
Lors d’un renouvellement de concession, il est institué au profit de l’État une redevance proportionnelle aux recettes résultant des ventes d’électricité issues de l’exploitation des ouvrages hydroélectriques concédés. Pour le calcul du montant, les recettes et les achats d’électricité sont pris en compte selon la valorisation de la production et de la consommation d’électricité aux prix constatés sur le marché.
Un tiers du produit de cette redevance est affecté aux départements, un sixième aux communes. Il existe plusieurs cas de figure dans lesquels la répartition pose question. La commission des finances souhaiterait obtenir l’éclairage du Gouvernement sur ce sujet.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je voudrais apporter deux éléments d’appréciation au Sénat.
D’une part, le comité des finances locales a réuni un groupe de travail sur ce sujet, qui doit rendre ses conclusions d’ici à deux ou trois mois.
D’autre part, le Parlement, sur l’initiative du Sénat, me semble-t-il, a demandé au Gouvernement de lui remettre un rapport sur la même question avant le 1er octobre prochain.
Ces travaux ayant été engagés, il me paraît préférable d’attendre la remise des conclusions du groupe de travail du comité des finances locales et du rapport du Gouvernement pour se prononcer sur ce sujet.
En dépit des objurgations du président de la commission des finances, qui souhaite absolument que la discussion se termine sur un vote qui lui soit agréable (Sourires.), je vous invite donc, monsieur le rapporteur général, à retirer cet amendement, sans doute un peu prématuré.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Jarlier, pour explication de vote.
M. Pierre Jarlier. Il s’agit d’un sujet important, dont nous avons déjà eu l’occasion de débattre lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2012. Le Sénat avait alors adopté une répartition du produit de la redevance tout à fait différente de celle qui a été retenue par l’Assemblée nationale et entérinée par la commission mixte paritaire.
Les communes se trouvent exclues du bénéfice de cette redevance, alors même qu’un débat très important, lors du Grenelle de l’environnement, avait permis de dégager un consensus sur l’attribution d’un sixième de son montant à ces dernières.
Il serait d’ailleurs logique que les communes comptent parmi les bénéficiaires, car elles connaissent un certain nombre de contraintes liées à l’existence de ces barrages hydroélectriques. Par exemple, le marnage peut poser de gros problèmes au regard de l’activité touristique.
De plus, alors qu’il avait été dit que la réforme de la taxe professionnelle serait plutôt à l’avantage des communes, ce n’est pas forcément vrai en ce qui concerne l’IFER, l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux.
Il semble donc normal que les communes concernées puissent recevoir une partie du produit de la redevance. Il s’agit ici d’une disposition à laquelle les élus de montagne sont très attachés : en tant qu’ancien président de leur association nationale, je me devais donc de la défendre !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je comprends vos arguments, monsieur Jarlier.
Devant l’attachement du président de la commission des finances et du rapporteur général à cette disposition, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Merci, monsieur le ministre !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l’article 32.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec l’examen des articles.
Coordination
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. En application de l’article 47 bis, alinéa 3, du règlement du Sénat, le Gouvernement demande qu’il soit procédé à une coordination sur l’article 19 du projet de loi de finances rectificative, relatif à l’équilibre des ressources et des charges.
Cette coordination vise à tirer les conséquences de l’adoption de l’amendement n° 145 de Mme Goulet, qui a convaincu le Sénat qu’il fallait faire un sort à vingt et un ambassadeurs itinérants, alors que le Gouvernement n’était pas favorable à cette mesure particulièrement rigoureuse. (Rires.)
Il est nécessaire que la commission mixte paritaire puisse écarter le risque de déséquilibre de l’article d’équilibre ! Le Gouvernement présente donc un ultime amendement, à l’article 19, en vertu de son pouvoir de coordination. Il demande au Sénat de bien vouloir l’adopter, ne serait-ce que par cohérence avec le vote de la disposition que j’évoquais à l’instant.
Mme la présidente. Je rappelle les termes de l’article 47 bis, alinéa 3, du règlement du Sénat :
« Avant le vote sur l'ensemble du projet de loi de finances, les dispositions des alinéas 4 à 6 de l'article 43 ne peuvent pas être appliquées aux articles de la première partie du projet. Toutefois, sur demande du Gouvernement ou de la commission des finances, il peut être procédé à une coordination. »
Quel est l’avis de la commission sur la demande de coordination ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. La commission des finances ne s’est pas réunie, mais je me permets d’émettre en son nom un avis favorable : tous nos collègues savent de quoi il s’agit.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Très bien !
M. Christian Cointat. Je demande la parole.
Mme la présidente. La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Je suis bien entendu d’accord pour qu’il soit procédé à une coordination, mais je souhaiterais tout de même pouvoir prendre connaissance du texte de l’amendement avant de voter !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Ce n’est qu’une addition. Aucun élément nouveau n’est à signaler.
Mme la présidente. Monsieur le sénateur, il faut d’abord approuver le principe de la coordination. Le texte de l’amendement va être mis en distribution.
M. Christian Cointat. Si c’est l’usage, je m’incline !
Mme la présidente. Je consulte le Sénat sur la demande de renvoi à la commission pour coordination, acceptée par la commission.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Le renvoi à la commission pour coordination est ordonné.
La commission souhaite-t-elle une suspension de séance ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Non, madame la présidente.
Mme la présidente. Nous allons donc procéder immédiatement à la coordination.
Je rappelle au Sénat que, aux termes de l’article 43, alinéa 3, du règlement du Sénat, la discussion ne peut porter que sur la nouvelle rédaction proposée.
Article 19 (coordination)
I. – Pour 2012, l’ajustement des ressources tel qu’il résulte des évaluations révisées figurant à l’état A annexé à la présente loi et la variation des charges du budget de l’État sont fixés aux montants suivants :
(En millions d’euros) |
|||
Ressources |
Charges |
Soldes |
|
Budget général |
|||
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
-394 |
-217 |
|
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
483 |
483 |
|
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
-877 |
-700 |
|
Recettes non fiscales |
-496 |
||
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
-1 373 |
-700 |
|
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
|||
Montants nets pour le budget général |
-1 373 |
-700 |
-673 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
|||
Montants nets pour le budget général, y comprisfonds de concours |
-1 373 |
-700 |
|
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
0 |
0 |
|
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes |
0 |
0 |
|
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
0 |
0 |
|
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
-3 776 |
-3 801 |
25 |
Comptes de concours financiers |
-3 378 |
-7 716 |
4 338 |
Comptes de commerce (solde) |
|||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
|||
Solde pour les comptes spéciaux |
4 363 |
||
Solde général |
3 690 |
II et III. – (Non modifiés)
Mme la présidente. L’amendement n° B-1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
(En millions d’euros) |
|||
Ressources |
Charges |
Soldes |
|
Budget général |
|||
Recettes fiscales brutes / dépenses brutes |
-394 |
-230 |
|
À déduire : Remboursements et dégrèvements |
483 |
483 |
|
Recettes fiscales nettes / dépenses nettes |
-877 |
-713 |
|
Recettes non fiscales |
-496 |
||
Recettes totales nettes / dépenses nettes |
-1 373 |
-713 |
|
À déduire : Prélèvements sur recettes au profit des collectivités territoriales et de l’Union européenne |
|||
Montants nets pour le budget général |
-1 373 |
-713 |
-660 |
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants |
|||
Montants nets pour le budget général, y compris fonds de concours |
-1 373 |
-713 |
|
Budgets annexes |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
0 |
0 |
|
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes |
0 |
0 |
|
Évaluation des fonds de concours et crédits correspondants : |
|||
Contrôle et exploitation aériens |
|||
Publications officielles et information administrative |
|||
Totaux pour les budgets annexes, y compris fonds de concours |
0 |
0 |
|
Comptes spéciaux |
|||
Comptes d’affectation spéciale |
-3 776 |
-3 801 |
25 |
Comptes de concours financiers |
-3 378 |
-7 716 |
4 338 |
Comptes de commerce (solde) |
|||
Comptes d’opérations monétaires (solde) |
|||
Solde pour les comptes spéciaux |
4 363 |
||
Solde général |
3 703 |
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Favorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 19, modifié.
(L’article 19 est adopté.)
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2012, je donne la parole à M. le président de la commission des finances.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais adresser mes remerciements à tous les acteurs de cette pièce que nous avons interprétée avec beaucoup de sincérité.
Je tiens à remercier M. le ministre de sa dextérité, de son esprit de répartie et de la manière dont il nous a permis de conduire les débats.
Je remercie la présidence, qui, comme à l’ordinaire, s’est efforcée de permettre une expression équitable de tous les points de vue.
Je remercie également nos collaborateurs, dont le travail est indispensable et toujours très apprécié.
Je remercie les orateurs des groupes, qui ont parfois exprimé leurs convictions avec une certaine passion, mais qui ont su développer de vrais débats de fond, faisant honneur à notre institution.
Enfin et surtout, je tiens à remercier notre nouveau rapporteur général, qui a accompli sa lourde tâche dans la bonne tradition de la commission des finances. (Applaudissements.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’adresse à mon tour mes sincères remerciements à la présidence, qui a veillé à la bonne tenue des discussions, ainsi que l’ensemble des sénateurs ayant pris part à ce débat, dont j’ai eu le temps d’apprécier à la fois la finesse et la rugosité…
Je n’aurai garde d’oublier, dans mes remerciements, les services de la séance. À l’Assemblée nationale comme au Sénat, les travaux parlementaires ne pourraient se dérouler de façon convenable sans leur contribution.
Je remercie également, bien entendu, la commission des finances, son président et son rapporteur général. Leurs travaux ont éclairé les choix du Sénat.
J’adresse enfin des remerciements particuliers, on le comprendra, à la majorité sénatoriale pour son soutien à ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’UCR.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, au terme de la discussion générale, le groupe UMP a défendu une motion tendant à opposer la question préalable, car il ne lui semblait pas absolument nécessaire que ce projet de loi de finances rectificative soit débattu maintenant : nous aurions pu attendre septembre.
En effet, ce débat a démontré que le Gouvernement n’était pas prêt à exposer au Parlement les grandes réformes fiscales qu’il avait annoncées, puisque nous n’en avons pas vu la trace. En de nombreuses occasions, monsieur le ministre, vous avez répondu, y compris aux membres de la majorité, qu’il faudrait attendre l’automne.
Nous avions donc raison. La réserve de précaution vous aurait permis d’attendre septembre, mais vous avez préféré que le Parlement consacre une semaine de juillet à l’examen de ce texte. Votre démarche ne nous a pas convaincus, c’est pourquoi le groupe UMP votera contre.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Dans cet hémicycle, je fais plutôt figure d’électron libre…
Je n’ai pas voté la motion tendant à opposer la question préalable, mais je voterai le présent projet de loi de finances rectificative, et ce pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, cela me semble assez logique dans la mesure où j’avais appelé à voter pour François Hollande lors de l’élection présidentielle. (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. C’est un vrai coming out !
Mme Nathalie Goulet. Jusqu’à présent, rien ne m’a encore montré que cette confiance aurait pu être mal placée…
Ensuite, je me félicite de l’adoption par le Sénat de mon amendement portant sur les ambassadeurs thématiques. Cela étant, si je leur ai ainsi « fait un sort », comme vous l’avez dit, monsieur le ministre, je suis bien certaine qu’il ne sera que momentané et que la commission mixte paritaire se chargera de les rétablir.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Elle va peut-être couper la poire en deux…
Mme Nathalie Goulet. Absolument !
Ce sujet est peut-être anecdotique, mais il me tient à cœur et en période de crise toutes les économies sont bonnes à prendre. Il y a là une véritable gabegie, et le Quai d’Orsay a besoin que cet argent soit mieux utilisé.
Je tiens à vous dire, monsieur le ministre, que, par principe et par formation, je suis absolument, fondamentalement hostile à l’introduction de mesures rétroactives, même si, juridiquement, vous avez toute possibilité d’y recourir, la loi fiscale étant toujours dérogatoire. Je n’en ai voté aucune : qu’elles soient fiscales ou d’un autre ordre, elles me semblent tout à fait inappropriées, dans un climat général où les entreprises comme les particuliers ont besoin de sécurité juridique.
Quoi qu’il en soit, je voterai ce projet de loi de finances rectificative. Je crois être seule dans ce cas au sein du groupe UCR. (M. Jean-Yves Leconte applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote.
M. Richard Yung. Nous avons consacré une semaine, une bonne quarantaine d’heures, à la discussion du présent projet de loi de finances rectificative. Peut-être n’est-il pas aussi inutile et vide que vous le dites, monsieur Dallier, puisqu’il a donné lieu à des débats de fond sur des questions importantes : la compétitivité, la fiscalité, l’emploi.
Ce projet de loi de finances rectificative porte, c’est bien normal, la marque du nouveau gouvernement et de la nouvelle majorité. Il constitue la première traduction, dans une loi de finances, de nos choix. Pour autant, il n’avait pas vocation à répondre à l’ensemble des problèmes, monsieur Dallier. L’action que nous allons mener s’étendra sur plusieurs années, d’autres textes financiers sont à venir.
Ce collectif manifeste à la fois la cohérence de la politique du Gouvernement et le souci de la justice.
En matière de cohérence, l’objectif clairement indiqué étant la réduction des déficits jusqu’au terme de la mandature, il convenait de combler une partie du déficit de cette année, en particulier de trouver 7 milliards d’euros de recettes nouvelles, d’où les débats que nous avons eus sur la TVA sociale et sur la suppression des exonérations de charges attachées aux heures supplémentaires.
J’évoquerai également, à ce titre, une mesure relativement secondaire, mais à mes yeux importante : celle qui a trait à la taxe de risque systémique due par les banques. Nous devons agir dans ce secteur, où il se passe des choses préoccupantes.
En ce qui concerne la justice, la charge est partagée de façon sensiblement égale entre les entreprises et les ménages. S’agissant de ces derniers, ce sont les mieux nantis qui sont surtout mis à contribution. Je rappellerai, à cet instant, nos débats sur l’aide médicale d’État, la PEC ou la TVA sur le livre. Ce dernier sujet est sans doute plutôt modeste, mais il me paraît néanmoins important de ramener à 5,5 % le taux de la TVA sur le livre. (Marques d’impatience sur les travées de l’UMP.)
Nous n’avons pas obtenu satisfaction sur tout. Le Gouvernement s’est parfois montré un peu rude à notre égard, mais nous avons couvert un certain nombre de champs, comme ceux du logement social et, pour partie, de l’énergie. Mme Nathalie Goulet vient de nous rappeler qu’elle avait en outre obtenu la suppression de vingt et un postes d’ambassadeur ! (Sourires.)
Pour les raisons que je viens d’indiquer, mon groupe votera le présent projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce collectif budgétaire constituait le premier acte financier du gouvernement de Jean-Marc Ayrault et – espérons-le en tout cas – le premier signe de l’émergence d’une nouvelle politique fiscale.
La plupart des dispositions du texte n’appelaient pas de contestation sur le fond de notre part. La démarche consistant à solliciter un peu plus les ménages au patrimoine élevé, à supprimer la pseudo « TVA sociale » et à revenir sur l’inefficace et coûteuse défiscalisation des heures supplémentaire était bienvenue. De même, renforcer le rendement des droits d’enregistrement par une mise à contribution accrue des donations pour les patrimoines importants participe de l’objectif affiché de justice fiscale.
L’essentiel du projet de loi de finances rectificative vise à réduire le déficit pour 2012, qui s’annonçait plus élevé que prévu du fait du ralentissement de l’activité économique, par une augmentation du rendement des impôts.
Notre groupe approuve, dans ses grandes lignes, le texte issu des travaux du Sénat. Je précise que nos amendements avaient pour objet d’accroître les ressources publiques, afin de consacrer une partie du surcroît de recettes à la réduction d’inégalités fiscales et sociales évidentes.
Le Gouvernement a renvoyé l’examen de la plupart de nos propositions à la discussion du prochain projet de loi de finances. Ce n’était pas toujours très justifié, mais nous en prenons acte.
Nous souhaitons que notre fiscalité évolue selon le triptyque suivant : prélever mieux et au plus juste ; réduire les inégalités fiscales en réservant les mesures de correction à ceux qui en ont besoin ; ouvrir le champ d’une dépense publique plus utile en transformant les allégements d’impôts en crédits nouveaux.
Si nous nous contentons d’augmenter les impôts en limitant au minimum la croissance des dépenses publiques pour répondre au strict objectif de résorption des déficits, l’enclenchement d’une dynamique de récession ne pouvant qu’éloigner plus encore la perspective d’un redressement budgétaire à terme est à craindre.
Les pertes de recettes fiscales et sociales liées aux mesures d’allégement d’impôts et de cotisations qui ont été mises en œuvre depuis à peu près trente ans sont la matrice du déficit structurel de l’État.
Cela fait des années que la baisse du « coût du travail » – c’est-à-dire, en clair, la baisse des salaires et du pouvoir d'achat ! – est à l’œuvre.
Le résultat auquel nous sommes parvenus, aux plans social, économique et industriel, montre assez que ce moins-disant fiscal et social conduit les comptes publics à l’impasse et le pays au déclin.
Redresser la barre demandera sans doute du temps. Il convient de commencer dès maintenant. Monsieur le ministre, je vous remercie de m’avoir écoutée… (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Voilà une remarque à double tranchant !
Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Alfonsi, pour explication de vote.
M. Nicolas Alfonsi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la discussion de ce projet de loi de finances rectificative intervient dans un contexte budgétaire très dégradé. Ce texte fait suite à l’alternance politique et permet de concrétiser une nouvelle orientation de notre politique fiscale.
Au travers de ce collectif budgétaire, il s’agit d’abord de colmater des brèches, ou même de limiter les dégâts causés par la crise. La Cour des comptes nous en a d’ailleurs rappelé la nécessité dans son dernier rapport : entre 6 milliards et 10 milliards d’euros de recettes pourraient manquer pour respecter notre objectif de réduction du déficit en 2012. Il était donc urgent d’agir pour trouver des recettes supplémentaires. Le texte sur lequel nous nous apprêtons à voter répond bien à cet objectif.
La situation en France et en Europe reste néanmoins très préoccupante. La crise des dettes souveraines n’a pas fini de nous inquiéter. Il nous faudra donc rester très vigilants et poursuivre les efforts de redressement de nos finances publiques, sans perdre de vue le principe essentiel qui doit guider nos réformes : la justice fiscale, seul principe qui puisse être compris et accepté par les Français en période de crise grave.
Les déclarations du Gouvernement lors du débat d’orientation sur les finances publiques et durant la discussion de ce collectif budgétaire constituent, nous semble-t-il, un début encourageant. Sachez, monsieur le ministre, que les membres du RDSE, toujours très attachés à une répartition équitable des efforts, vous soutiendront dans cette voie.
Je me réjouis que certains des amendements présentés par mon groupe, comme celui visant à augmenter le taux de la taxe sur les logements vacants, aient connu un sort favorable. J’espère que leurs dispositions seront maintenues par la commission mixte paritaire, la semaine prochaine.
En outre, nous resterons vigilants quant au respect des engagements pris par le Gouvernement à propos de plusieurs sujets sur lesquels le groupe du RDSE travaille depuis longtemps. Je pense par exemple à la taxe sur les transactions financières, sujet cher à notre collègue Yvon Collin, ou encore à la politique du logement, qui intéresse au premier chef Jacques Mézard
Je regrette vivement que nous n’ayons pu défendre et faire adopter plusieurs de nos amendements, en particulier celui qui avait été déposé par M. Vall.
Je conclurai en saluant la qualité du travail accompli au sein de notre assemblée depuis mardi. Je félicite notre nouveau rapporteur général, François Marc, pour la manière dont il a mené nos travaux. Je salue également la ténacité de nos collègues de la nouvelle opposition, qui ont indéniablement contribué à enrichir le débat et fait honneur au Sénat.
Mme Catherine Procaccia. Merci, mon cher collègue !
M. Nicolas Alfonsi. Le groupe du RDSE, qui est très soucieux du respect des convictions de chacun et de toutes les sensibilités, ne peut que s’en réjouir.
Monsieur le ministre, au nom de ses membres, je tiens à vous remercier de la qualité et de la clarté de vos réponses, toujours détaillées et argumentées.
Mes chers collègues, notre groupe, à la quasi-unanimité, apporte son soutien à ce texte d’urgence, qui en appelle d’autres pour donner à nos concitoyens des raisons de ne pas désespérer de l’avenir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Vincent Placé, pour explication de vote.
M. Jean-Vincent Placé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le jeune parlementaire que je suis ne peut que se réjouir de la qualité de nos débats. Des doutes sur l’utilité du bicamérisme s’expriment parfois, mais ces quatre jours de discussion suffisent à mettre en évidence tout l’intérêt des travaux du Sénat, la force des convictions des uns et des autres, l’expertise des membres de notre assemblée, notamment de M. le président de la commission des finances et de M. le rapporteur général. De tels travaux manifestent l’importance du rôle du Sénat, où je suis fier de siéger !
Je le dis sans esprit polémique, les mesures que nous avons prises étaient nécessaires. Il fallait trouver 7 milliards d’euros de recettes nouvelles, et il paraissait tout de même logique de solliciter les possédants plutôt que les plus démunis, les grandes entreprises plutôt que les petites, les secteurs où l’on réalise peut-être plus de profits qu’ailleurs, comme ceux des banques ou des industries pétrolières.
Il était extrêmement important de prendre ces mesures d’urgence. Nous pourrons approfondir le débat lors de l’examen du prochain projet de loi de finances initiale.
Monsieur le ministre, nous nous fions aux engagements que vous avez pris en réponse aux préoccupations que nous avons exprimées. C’est d’ailleurs pourquoi les sénateurs de la majorité ont accepté de retirer la plupart de leurs amendements, qui auront permis d’ouvrir le débat sur des sujets importants.
Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous voudrez conserver cette confiance. Lors de la discussion du prochain projet de loi de finances initiale, les membres du groupe écologiste reviendront notamment sur la question des dépenses fiscales anti-écologiques attachées, par exemple, à l’utilisation du diesel ou du kérosène, ainsi que sur d’autres sujets tels que les pesticides ou les agrocarburants. Sur ces thèmes, il ne s’agit pas de tomber dans des oppositions caricaturales entre écologistes et productivistes : là n’est pas le débat.
Je dirai, pour paraphraser notre collègue Raffarin, que lorsque la pente est rude, il est nécessaire de trouver un équilibre entre une nécessaire augmentation de la fiscalité et la réduction de certaines dépenses, en particulier militaires, devenues moins utiles à notre époque. Il faut, au travers d’une juste répartition de l’effort, concilier court terme, moyen terme et long terme, le long terme étant la préservation de la planète.
Tels sont les enjeux que nous écologistes avons voulu porter dans le débat, dans un esprit de soutien fidèle et loyal à la politique du Gouvernement et du Président de la République. Le cœur et la raison me conduisent à vous renouveler, monsieur le ministre, l’expression de notre confiance : nous voterons ce projet de loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi de finances rectificative pour 2012.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin n° 128 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 172 |
Pour l’adoption | 177 |
Contre | 166 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
5
Décisions du Conseil constitutionnel sur des questions prioritaires de constitutionnalité
Mme la présidente. M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courriers en date du vendredi 27 juillet 2012, trois décisions du Conseil sur des questions prioritaires de constitutionnalité (n° 2012 268 QPC, n° 2012-269 QPC et n° 2012-270 QPC).
Acte est donné de ces communications.
6
Dépôt de rapports du Gouvernement
Mme la présidente. M. le Premier ministre a transmis au Sénat :
- le rapport sur les conditions de mise en œuvre des procédures de rescrit fiscal, de promotion du dispositif et de publication des avis de rescrit pour l’année 2011.
- en application de l’article L. 119-8 du code de la voirie routière, le rapport annuel sur l’évolution des péages pour chaque exploitant autoroutier ;
Acte est donné du dépôt de ces documents.
Le premier a été transmis à la commission des finances, le second à la commission du développement durable, des infrastructures, de l’équipement et de l’aménagement du territoire, compétente en matière d’impact environnemental de la politique énergétique.
Ils sont disponibles au bureau de la distribution.
7
Organisme extraparlementaire
Mme la présidente. M. le Premier ministre a demandé au Sénat de bien vouloir procéder à la désignation du sénateur appelé à siéger au sein du conseil d’administration de l’établissement public de santé national de Fresnes, en remplacement de Mme Anne-Marie Escoffier, nommée membre du Gouvernement.
Conformément à l’article 9 du règlement, j’invite la commission des affaires sociales à présenter une candidature.
La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l’article 9 du règlement.
8
Ordre du jour
Mme la présidente. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 31 juillet 2012 :
À quatorze heures trente :
1. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi relatif au harcèlement sexuel ;
Rapport de M. Alain Anziani, rapporteur pour le Sénat (n° 711, 2011-2012) ;
Texte de la commission (n° 712, 2011-2012).
À partir de dix-huit heures :
2. Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2012.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART