Mme Chantal Jouanno. Vous nous parlez d’une société telle que vous la voudriez. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.)
Mme Chantal Jouanno. En effet.
M. Roger Karoutchi. La gauche archaïque !
Mme Chantal Jouanno. Fondamentalement, nos visions s’opposent. Vous suspectez systématiquement les entreprises et le secteur économique et vous prônez invariablement la loi. Nous voulons promouvoir la négociation, la convention collective, voire même le référendum des salariés. Je sais bien que cette dernière idée vous fait frémir, chers collègues de gauche, mais pourquoi ne pas faire confiance à ce mode de consultation ?
Vous légiférez une société telle que vous la souhaiteriez ; nous la prenons telle qu’elle est ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
Mme Éliane Assassi. Ce n’est pas bon du tout !
Mme Annie David, rapporteure. Vous mélangez tout !
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui une proposition de loi garantissant le droit au repos dominical.
Cette proposition de loi est un bon texte, et je remercie nos collègues du groupe CRC d’avoir pris cette initiative. En effet, depuis 2009, je n’ai eu de cesse, avec mes collègues socialistes, de m’élever contre le travail du dimanche généralisé.
Nous nous sommes fortement opposés à l’ouverture dominicale des commerces, parce que le travail du dimanche représente une véritable menace pour les sphères familiale, amicale, culturelle, spirituelle et associative. Il conduit à un délitement des liens humains et à une perte des valeurs, au seul bénéfice de la recherche du profit.
Nous nous sommes opposés au travail dominical parce qu’il ne représente en aucune façon une solution pour relancer la consommation. Il ne fait que fragiliser les petits commerces de proximité au profit des grandes surfaces.
Mme Gisèle Printz. C’est vrai !
Mme Patricia Schillinger. Sur le plan économique, il ne crée pas d’emplois puisque, bien souvent, les grandes surfaces ne proposent que des temps partiels, tout en provoquant, par leur concurrence, des pertes d’emplois dans les commerces de proximité.
Mme Annie David, rapporteure. Exactement !
Mme Patricia Schillinger. En ce qui concerne le volontariat, c’est un véritable leurre, comme nous l’avions déjà dit à l’époque.
Aujourd’hui, pour dresser un bilan de la loi Mallié sur le travail dominical, on peut dire que son application est un échec économique, social et moral.
Son impact général sur la croissance est nul, voire même négatif, puisque cette loi a provoqué des distorsions de concurrence et la fermeture de commerces traditionnels.
Le bilan du travail du dimanche, c’est « travailler pour gagner la même chose » ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
M. Pierre Hérisson. Quelle mauvaise foi !
Mme Patricia Schillinger. Cette loi devait sauvegarder l’emploi en période de crise. En réalité, elle a conduit à une forte augmentation des contrats à temps partiel, plus précaires, et n’a pas créé d’emplois supplémentaires. Le travail du dimanche est souvent imposé aux salariés et les majorations prévues sont largement inférieures au doublement du salaire horaire. En résumé : pas d’emplois supplémentaires et plus de précarité !
Les organisations syndicales sont unanimes à dénoncer le volontariat illusoire, l’absence de doublement de la rémunération et la discrimination entre salariés. En effet, selon que l’on se trouve d’un côté ou de l’autre de la rue, le même travail, à tâche et à qualification égales, peut être rémunéré du simple au double, et vous ne le nierez pas, monsieur le ministre.
On a voulu diviser les Français entre ceux qui doivent travailler le dimanche et ceux qui ne travaillent pas le dimanche. On a divisé les salariés, ceux qui travaillent le dimanche avec un doublement de leur salaire et ceux à qui l’on refuse ce doublement de salaire.
M. Didier Guillaume. Eh oui !
Mme Patricia Schillinger. Les salariés des PUCE se sont vite rendu compte que, contrairement aux promesses de la loi, ils ne pouvaient pas « prétendre au repos compensateur ou au doublement de leur rémunération lorsqu’ils travaillent le dimanche ».
Le doublement de la rémunération des salariés n’est pas systématique. Dans le cadre des PUCE, bien souvent, les salariés voient leurs rémunérations majorées, mais pas doublées. Les majorations prévues sont largement inférieures au doublement du salaire horaire.
Pour le patronat, les bénéfices économiques du travail dominical ne concernent qu’une très faible minorité, les représentants de la grande distribution.
Je souhaiterais également souligner ici que, en avril dernier, l’Organisation internationale du travail a attribué un carton rouge à la France. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) En effet, dans le rapport de la 100e session de l’OIT, la législation française a été particulièrement visée et a reçu un avis plus que défavorable.
La commission de l’OIT « demande au Gouvernement français de poursuivre l’examen avec les partenaires sociaux » de la nouvelle législation sur le travail dominical « sur le plan pratique, en tenant compte des considérations tant sociales qu’économiques ». Les experts de l’OIT s’inquiètent en effet de l’élargissement progressif des dérogations autorisées.
Dernièrement, on a observé de nombreuses plaintes contre les ouvertures dominicales. Trente supérettes, suspectées d’ouvrir abusivement le dimanche, vont être traduites en justice par le Comité de liaison intersyndical du commerce de Paris, neuf mois après une première vague de condamnations.
Le 17 novembre, cinq magasins Franprix et Carrefour City comparaîtront, puis, le 22 novembre, douze supérettes Franprix seront convoquées devant la 1ère chambre civile.
En ce qui concerne le volontariat, je citerai un exemple : le 21 septembre dernier, Ed a été condamné par le Conseil de prud’hommes de Créteil à verser 40 000 euros de dommages et intérêts à trois salariés, licenciés pour avoir refusé de travailler le dimanche. Il s’agissait en l’occurrence d’un abus de pouvoir de la part de l’entreprise.
Ainsi, le texte que nous examinons aujourd’hui est essentiel si l’on veut éviter les excès ou les abus. Il permet en effet de restreindre fortement les possibilités de dérogations, d’encadrer la notion de volontariat pour éviter « le chantage à la mutation » dénoncé par les syndicats et de renforcer les compensations pour les salariés, en termes tant de repos que de salaire.
Les intérêts économiques des employeurs ne doivent pas l’emporter sur les besoins humains !
Je conclus mon intervention en précisant que, en Alsace, le repos dominical est respecté, grâce au droit local. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – M. Robert Tropeano applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le vice-président de la commission.
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. Monsieur le ministre, vous avez fait fort !
Il ne fait guère de doute que vous êtes déjà en campagne…
M. Pierre Hérisson. Vous non ?
M. Philippe Dallier. Qu’est ce que vous faites, vous ?
M. Jackie Pierre. La gauche molle !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. … pour le Président de la République et, dans la compétition qui vous oppose à vos collègues, vous avez sans aucun doute marqué des points ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Dans cette affaire, et sans vilain jeu de mots, vous avez asséné non pas un petit coup de maillet, mais un grand coup de massue ! (Sourires.)
Après avoir supprimé quelque 800 000 emplois voilà quelques jours, nous en ferions disparaître 250 000 de plus à travers ce texte. À vous entendre, nous aurons bientôt supprimé plus d’emplois qu’il n’en existe, alors que nous ne sommes pas au pouvoir.
M. Roger Karoutchi. Vous en êtes capables !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. Vous nous dites d’aller voir ce qui se passe sur le terrain. Mais nous en sommes issus, comme vous-même, monsieur le ministre. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe socialiste-EELV.) Nous connaissons le monde du travail !
M. Pierre Hérisson. Nous aussi !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. Je ne dis pas le contraire, mon cher collègue ! Contrairement à vous, je n’exclus personne.
Vous nous dites que dans certains secteurs, les salariés sont obligés de travailler le dimanche. En effet ! Vous avez cité le cas des hospitaliers, et vous avez raison.
Mais il faut avoir entendu ces salariés – des femmes pour la plupart – décrire la façon dont ils perçoivent ce travail dominical, comment ils le vivent dans leur chair. Savez-vous quelles sont les conséquences pour leur vie de famille, pour leurs enfants ? Des fratries entières sont ainsi pénalisées ! (Mme Patricia Schillinger ainsi que MM. Claude Dilain et Robert Tropeano applaudissent.) Ces femmes travaillent le dimanche par devoir, et non par choix !
Parce que certains salariés doivent travailler le dimanche, faut-il que tout le monde en fasse autant ? (M. Jean-Jacques Mirassou s’exclame.)
Mme Gisèle Printz. Voilà !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. Il est dangereux de vouloir ériger en modèle le travail dominical.
Quels sont finalement les objectifs de cette proposition de loi, qui vise à aménager la loi du 10 août 2009 ?
Elle tend tout d’abord à augmenter la protection et la rémunération des gens qui vont accepter de travailler le dimanche. Mais on n’achète pas tout, monsieur le ministre ! Il ne faut pas seulement prendre en compte les rémunérations, et vous le savez bien.
Quand le travail du dimanche est accepté, c’est bien souvent parce qu’il y a une dysharmonie forte dans le rapport employeur-employé. Si je lui réponds « non » quand il me demande de travailler le dimanche, comment mon patron se comportera-t-il plus tard quand j’aurai, moi, à lui demander quelque chose ? La sécurité de mon emploi est-elle garantie ? Une autre personne ne sera-t-elle pas choisie pour occuper mon poste ? Et en fin de compte, je gagnerai, il est vrai, un peu plus ; compte tenu du niveau des salaires actuels, cela mettra peut-être un peu de beurre dans les épinards. Alors, j’accepte !
Monsieur le ministre, nous essayons d’améliorer la loi du 10 août 2009, mais vous caricaturez les propositions du groupe communiste et, au-delà, de tous ceux qui continuent de dire que nous sommes à l’avant-garde de la défense des travailleurs dans ce pays. (Exclamations ironiques sur les travées de l’UMP.)
Vous prétendez, vous et vos collègues, pouvoir nous reprocher le manque de consultation ? Qu’à cela ne tienne : nous allons en avoir une dans quelques mois, une consultation, et d’ampleur nationale. Vous aurez tous d’ici là l’occasion de développer les propositions que vous avez à formuler pour nos concitoyens, pour les travailleurs de ce pays,…
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Les travailleurs ? Ce ne sont pas vraiment eux qui vous ont élus…
Mme Annie David, rapporteure. Parmi les élus, il y a des travailleurs !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. … comme lors de la récente campagne des sénatoriales, qui nous a permis d’être majoritaires au sein de cette assemblée et pendant laquelle les uns et les autres ont eu l’occasion d’expliquer comment on traitait les collectivités locales… (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Les Français l’ont très bien compris. C’est la raison pour laquelle nous avons obtenu la majorité ici et c’est pourquoi nous l’obtiendrons également au mois de mai prochain ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.- Vives exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Roger Karoutchi. C’est le dernier meeting, c’est bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. Xavier Bertrand, ministre. Je reprendrai un certain nombre des propos qui ont été tenus dans cet hémicycle lors de la discussion générale, car certains méritent, à mon avis, d’être relevés.
Monsieur Kerdraon, vous avez parlé du lien social, mais le plus important en la matière, c’est d’avoir un travail, un revenu lié à ce travail…
M. Roger Karoutchi. Oui !
M. Xavier Bertrand, ministre. Or votre proposition de loi casse le lien social ! (Non ! sur les travées du groupe socialiste-EELV.) Votre proposition de loi diminue le pouvoir d’achat des salariés concernés. (Oui ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, en ce moment, les Français, comme tous les Européens, sont particulièrement lucides.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les Allemands ne travaillent pas le dimanche !
M. Xavier Bertrand, ministre. Ils savent que le pouvoir d’achat ou même l’emploi peuvent être menacés en raison de la crise économique. C’est très préoccupant, c’est vrai. Mais voir son emploi et son pouvoir d’achat menacés à cause d’une proposition de loi communiste, voilà qui est intolérable et insupportable ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.- Exclamations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est scandaleux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la présidente, vous avez raison de réagir, ce n’est pas seulement une proposition de loi communiste, c’est une proposition de loi soutenue par toute la majorité de gauche de cet hémicycle.
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous avez raison de me permettre d’apporter cette précision, elle est justifiée !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ce sont vos propos qui sont scandaleux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Voilà pourquoi nous ne pouvons pas vous laisser faire !
Vous parlez du volontariat, alors que c’est nous qui l’avons fait inscrire dans la loi…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Parlez-nous de PSA et de la sidérurgie !
M. Xavier Bertrand, ministre. … et, à l’époque, vous avez refusé de le voter. Il apporte une garantie, mais parce que c’était nous, vous avez dit « non », par principe.
M. Roger Karoutchi. Évidemment !
M. Xavier Bertrand, ministre. Parce que c’est nous qui les avons fait voter, vous revenez par principe sur ces dispositions. Vous ne regardez même pas si votre position de principe pénalisera les salariés. C’est une forme d’opposition systématique à la majorité présidentielle, pratiquée matin, midi et soir, une sorte d’anti-sarkozysme, aussi, pratiquée matin, midi et soir. Seulement, être contre tout, cela ne fait pas un projet pour les Français.
Voilà la réalité ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.- M. Hervé Maurey applaudit également.)
Vous qualifiez le texte d’« utile » pour les salariés. Ah non ! Il faut expliquer aux salariés que ce texte n’a rien d’utile pour eux, qu’il est au contraire dangereux. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’esclaffe.)
La loi Mallié, elle, est utile, pour les salariés,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La protection des salariés est dangereuse, on le répétera !
M. Xavier Bertrand, ministre. … pour les entrepreneurs, pour la prospérité économique. Allez expliquer à ceux qui ne pourront plus travailler le dimanche à cause de votre texte qu’il est utile pour eux : je vous souhaite bon courage !
Mme Claire-Lise Campion. On l’a déjà fait !
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame Escoffier, vous avez évoqué le texte, mais avec une erreur de fond.
Vous avez signalé que les magasins de bricolage étaient concernés. Non ! Le bricolage n’a pas accès aux dérogations de plein droit au repos dominical. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) L’ameublement y a droit, grâce à nous, mais pas le bricolage.
Mme Annie David, rapporteure. Avec la loi Mallié, bien sûr, le bricolage y a droit !
M. Xavier Bertrand, ministre. Quand on veut légiférer, on doit faire attention à la portée du texte que l’on propose. Cela étant, entre le texte initial et vos différents reculs, il est vrai qu’il est difficile d’y voir clair ! Voilà aussi pourquoi ce texte présente un caractère particulièrement dangereux. En effet, si vous n’êtes pas précis dans le texte lui-même, on sait ce que cela donnera sur le terrain pour les salariés et les entreprises concernés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Annie David, rapporteure. Le bricolage est concerné, c’est vous qui ne savez pas de quoi vous parlez !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je vois bien votre embarras sur toutes les dispositions de cette proposition de loi. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.) On l’a vu, madame la rapporteure, vous avez formulé des propositions au début, vous vous êtes aperçue que vous aviez fait trop d’erreurs, mais vous n’avez pas voulu retirer ce texte parce que vous étiez prisonnière de la logique qui était la vôtre dès le départ.
Mme Annie David, rapporteure. C’est faux, laissez-moi vous répondre !
M. Xavier Bertrand, ministre. Contrairement aux accords signés avec les salariés sur les repos compensateurs, votre texte, lui, constitue sur ce point un véritable recul, un de plus.
Je dirai à Isabelle Debré…
Mme Annie David, rapporteure. Qu’elle a très bien parlé, évidemment !
Mme Annie David, rapporteure. C’est exactement ce que vous faites ici, un écran de fumée !
M. Xavier Bertrand, ministre. Le terme a été repris tout à l’heure, c’est bien un écran de fumée qui a été monté par la gauche lors de l’examen au Parlement de la loi Mallié sur la notion de communes touristiques.
La gauche a essayé à l’époque de créer une confusion entre les communes touristiques au sens du code du tourisme et les communes touristiques au sens du code du travail. Mais la gauche s’est prise à son propre piège puisque le texte initial présenté par Mme David contenait la même confusion que celle qu’elle nous reprochait à l’époque.
Cela montre bien que, quand on n’a pas les idées claires, on a des idées derrière la tête, et que vous cherchez encore une fois à faire le contraire de ce que vous annoncez dans votre exposé des motifs. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Quelle confusion, et quel entêtement à vouloir revenir sur un texte dont le défaut majeur, à vos yeux, est d’avoir été adopté par une majorité UMP et centriste !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. Une majorité de droite, il faut le dire !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Adopté à une très faible majorité !
M. Xavier Bertrand, ministre. Voilà ce qui vous pose problème. Sans doute ce texte est-il à vos yeux marqué de ce péché originel, mais tout de même ! (Protestations sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste -EELV.)
Monsieur Maurey, vous avez souhaité disposer d’un bilan et j’ai bien entendu le sens de votre intervention.
Dans le bilan 2009 de la négociation collective, nous avons fait un point sur la négociation de branche. Je vous le communiquerai, bien évidemment.
Le rapport parlementaire qui a été transmis le 9 novembre dernier, élaboré à la fois par des députés et par des sénateurs – certains sont présents dans cet hémicycle – apporte des éléments particulièrement intéressants.
Je vous donnerai quelques exemples.
Decathlon ? Accord de décembre 2009, majoration de salaire et volontariat. Boulanger ? Accord d’octobre 2009, doublement de salaire et volontariat. Kiabi ? Accord de janvier 2010, doublement de salaire et volontariat.
Voilà ce qu’il en est aujourd’hui. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat s’exclame.) Le volontariat était inscrit dans la loi Mallié, il a bien évidemment été au rendez-vous dans les entreprises. (Protestations sur les travées du groupe CRC.)
Voilà la réalité !
Madame Cohen, nous n’avons visiblement pas la même conception de la justice sociale.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous, c’est l’injustice sociale !
M. Xavier Bertrand, ministre. La justice sociale, c’est non seulement permettre l’accès à l’emploi, mais c’est aussi ne pas diminuer le salaire, le revenu et le pouvoir d’achat des salariés. En effet, il y a des mots que vous utilisez très facilement les uns et les autres de ce côté (M. le ministre désigne la gauche de l’hémicycle.), mais, pour les mettre en pratique, c’est une autre histoire ! Ce qui prouve que ce n’est pas parce que l’on invoque toute la journée, très haut et très fort, la justice sociale que l’on est pour autant en mesure de la garantir concrètement !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous êtes le garant de l’injustice sociale !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Monsieur le ministre, savez-vous combien gagne une vendeuse en grande surface ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous voulez parler des salariés ? J’ai quelques compléments à apporter à ce que vous en avez dit.
Mesdames, messieurs les sénateurs, si le juge a pu obliger l’entreprise ED à ne s’adresser qu’à des volontaires, c’est sur la base des textes que nous avons fait voter.
Voilà la réalité !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Tout cela est faux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Oui, la loi offre les garanties nécessaires. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’UCR.) Je précise la jurisprudence, je n’invente rien, je ne cherche pas à faire plaisir à qui que ce soit,…
Un sénateur du groupe socialiste-EELV. Si, au patronat !
M. Xavier Bertrand, ministre. … je rappelle juste l’application qui a été faite par le juge des textes qui ont été votés par notre majorité.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est faux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Le travail du dimanche, c’est aussi une réponse pour des services socialement utiles, et je ne vois pas au nom de quoi, au nom de quelle règle, sinon une règle arbitraire que vous auriez posée, nous remettrions en cause la possibilité, qui existe depuis de nombreuses années, d’aller à la boulangerie le dimanche chercher son pain. Allez-vous remettre en cause cette faculté ?
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Les boulangeries ne sont pas des grandes surfaces !
Mme Annie David, rapporteure. Ces magasins-là ne sont pas concernés !
M. Xavier Bertrand, ministre. Mais vous ne ferez sans doute pas plus la différence pour les services de sécurité et les services de santé, évidemment…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous nous prenez pour des imbéciles ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je veux bien rouvrir le débat sur l’accès aux loisirs et à la culture, mais je ne suis pas sûr de ne pas voir alors réapparaître une ligne de fracture dans cet hémicycle…
Mme Annie David, rapporteure. Monsieur le ministre, puis-je vous interrompre ?...
M. Xavier Bertrand, ministre. … entre ceux qui sont profondément conservateurs – et vous êtes dans le camp des conservateurs – et ceux qui sont réellement progressistes ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’UCR.)
Voilà la réalité !
De la même façon, monsieur Dantec, vous vous êtes fait l’avocat des 35 heures, à la façon de Mme Aubry. C’est particulièrement audacieux !
Mme Annie David, rapporteure. Je ne peux pas vous laisser dire autant de contrevérités à la tribune, monsieur le ministre !
M. Xavier Bertrand, ministre. En 2008, j’ai proposé une réforme des 35 heures et le Parlement l’a votée. Les 35 heures dans ce pays ne sont plus un plafond intangible, elles sont devenues un plancher. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Annie David, rapporteure. Monsieur le ministre, me permettez-vous de vous interrompre ?...
M. Xavier Bertrand, ministre. Voilà la réalité !
Mais vous avez voulu imposer à toutes les entreprises et, par voie de conséquence, à tous les salariés – ils en ont fait les frais -, l’obligation de ne pas dépasser ces 35 heures. Quelles ont été les principales victimes ? Les ouvriers et les employés, qui ont vu leurs salaires bloqués pendant des années à cause des 35 heures ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Voilà la réalité !
Mme Annie David, rapporteure. Mensonges !
M. Xavier Bertrand, ministre. Avec les 35 heures, vous avez foulé au pied la valeur travail et minoré le pouvoir d’achat des ouvriers et des employés. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. Xavier Bertrand, ministre. Cette vérité ne vous fait pas plaisir, mais c’est celle que les ouvriers ont lue sur leur fiche de paie pendant des années. (Vives protestations sur les travées du groupe CRC.)
Voilà la réalité !
Et aujourd’hui, vous récidivez. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Ce n’est pas vrai !
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous n’avez pas entendu le message de 2002, vous n’avez pas entendu le message de 2007, et même si vous parlez souvent des ouvriers et des employés, vous n’avez jamais rien fait pour les défendre. Vous avez amputé leur pouvoir d’achat et vous voulez recommencer aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées de l’UMP ainsi que sur certaines travées de l’UCR. - Vives exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Annie David, rapporteure. Nous ne sommes pas en meeting ! Nous examinons une proposition de loi sur le travail dominical !
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous, nous sommes pour la valeur travail et c’est certainement l’une des questions qui nous séparent.
Mais, si vous êtes si sûrs de vous, reprenez la proposition de Chantal Jouanno, qui a parlé d’un référendum pour les salariés !
M. Jacky Le Menn, vice-président de la commission des affaires sociales. On va l’avoir !
M. Xavier Bertrand, ministre. Chiche ! Faites un référendum dans les fameux PUCE ! Demandez leur avis aux salariés et vous aurez clairement la réponse ! (Protestations continues sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Allez voir les caissières à Paris !
M. Xavier Bertrand, ministre. Vous ne pouvez pas, ici, sur ces travées, refuser cet exercice démocratique,…
Mme Annie David, rapporteure. Ce n’est pas possible ! Nous ne sommes plus dans le débat parlementaire !
M. Xavier Bertrand, ministre. … alors même que nombre de vos collègues socialistes et communistes ont réclamé et obtenu la mise en place de PUCE. Si vous n’avez pas peur de la démocratie, demandez leur avis aux salariés, voire aux élus de votre sensibilité ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.- Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Annie David, rapporteure. Monsieur le ministre, puis-je vous interrompre ?...
Mme la présidente. Monsieur le ministre, Mme la rapporteure souhaiterait vous interrompre. (Vives protestations sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. Roger Karoutchi. Non !
Mme Annie David, rapporteure. Savez-vous au moins ce que je veux dire ?