M. le président. La parole est à M. Michel Vergoz.
M. Michel Vergoz. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Monsieur le ministre, depuis maintenant deux semaines, la Réunion brûle, un joyau de la nation se consume. Deux mille neuf cents hectares d’un trésor naturel inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO sont partis en fumée depuis le 25 octobre 2010. Ce sinistre, d’une ampleur plus de trois fois supérieure à celui de l'an passé, est un désastre écologique en même temps qu'une catastrophe économique.
La raison principale pour laquelle cet incendie s’est propagé aussi rapidement nous a indignés : l'absence de moyens aériens décisifs et le refus par les autorités de mobiliser le bombardier d'eau Dash 8 de la sécurité civile dès que la situation de crise a été avérée.
Au cours de la seule nuit du 28 au 29 octobre, près de 900 hectares sont partis en fumée. Les autorités sont restées délibérément sourdes aux appels des élus locaux. Elles sont aussi restées aveugles en refusant, jusqu'au 31 octobre, ce qui figurait pourtant en clair dans le plan de prévention et de lutte contre les feux de forêt, arrêté par l'État et présenté au grand public le 8 juillet 2011, soit trois mois et demi seulement avant la catastrophe.
Les services de l'État et le Gouvernement sont donc restés sourds et aveugles. En revanche, ils ne sont pas restés muets. Que de certitudes décalées, de remarques ironiques ou de moqueries déplacées ont été proférées par les services de l'État et les membres du Gouvernement !
La ministre chargée de l'outre-mer a qualifié de « besoin psychologique » des Réunionnais l’envoi sur place du Dash 8 !
La confiance se construit et se mérite. Le Gouvernement nourrit, hélas ! par ses actions la défiance envers la République. C’est préoccupant.
Lundi 31 octobre, à dix-neuf heures trente, le préfet et la ministre chargée de l'outre-mer ne confirment toujours pas l’envoi du Dash 8 de la sécurité civile. Le même jour, trois heures plus tard seulement, le ministère de l'intérieur publie un communiqué annonçant l'envoi non pas d’un Dash 8, mais de deux.
Que doit-on penser, monsieur le ministre ? Pouvez-vous nous révéler les réelles raisons qui ont conduit à refuser l'envoi du bombardier d'eau dès que l'incendie s'est déclaré et avant qu'il ne se propage ? Pouvez-vous nous éclairer sur l'enquête criminelle en cours, alors que celle de l'année dernière n'a pas abouti ? À quand l’élaboration d’un nouveau plan crédible et efficace de prévention et de protection pour les feux de forêt, en concertation avec l'ensemble des élus locaux et à la hauteur des enjeux ?
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Michel Vergoz. Ne serait-il pas temps d'engager une coopération régionale avec les pays de la zone, en particulier avec l'Afrique du Sud, notamment dans le domaine de la sécurité civile ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV. – Mme Fabienne Keller applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Monsieur le sénateur, la France entière a été touchée par cet incendie de grande ampleur qui a dévasté une vaste partie du parc national de la Réunion. Ce sont en effet près de 2 900 hectares qui sont partis en fumée dans une zone inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, du fait d’incendies d’origine volontaire dont les auteurs, c’est exact, n’ont toujours pas été trouvés.
Néanmoins, je me réjouis comme vous qu'aucune victime ne soit à déplorer.
La ministre chargée de l’outre-mer, qui s'est rendue sur place, a annoncé des mesures de soutien au département de la Réunion : un financement à hauteur de 50 % de l’accroissement du parc de véhicules de lutte contre les feux de forêt ; la mise à disposition par le préfet d'une enveloppe de 3 millions d'euros pour des actions de remise en état dans le périmètre de l'incendie ; la mobilisation du fonds de secours du ministère de l'outre-mer pour les agriculteurs touchés par l'incendie.
J'ajoute une chose très importante : le représentant de l'UNESCO a bien assuré à la France que le classement du parc ne serait pas remis en question.
M. Michel Vergoz. Heureusement !
M. Claude Guéant, ministre. S'agissant maintenant des moyens de secours, vous me permettrez d'abord de dire que la solidarité nationale s'est pleinement exercée puisque 420 sapeurs-pompiers sont venus assister leurs collègues de la Réunion. Au plus fort de l'incendie, entre 1 100 et 1 200 personnes, dont les 400 sapeurs-pompiers de la Réunion, ont uni leurs efforts pour lutter contre ce fléau.
Vous évoquez plus spécialement la question des moyens aériens. À cet égard, je veux dire de manière forte que ce n'est pas la polémique qui éteint les incendies. La lutte contre les incendies requiert du savoir-faire et de la technique. C'est un métier.
M. Ronan Kerdraon. La vérité vous gêne !
M. Claude Guéant, ministre. Vous ne l’avez pas dit, mais tous les experts ont observé que le feu se propageait non pas en surface, mais de façon souterraine.
M. Alain Gournac. Exactement !
M. Claude Guéant, ministre. Par conséquent, la bonne réponse consistait à isoler les territoires, à couper le terrain, pour éviter la propagation du feu.
Tous les experts – je dis bien tous les experts – nous disent que l'intervention au début de l'incendie d'un bombardier d'eau n'aurait eu aucun effet ; l’eau, en arrivant au sol, aurait ruisselé et ne serait pas parvenue à stopper la propagation de l'incendie. Dès lors que les bombardiers d'eau ont pu être utiles pour éteindre les reprises de feu, ils ont été envoyés sur place. Vous en aviez demandé un ; j'ai pris la décision d’en envoyer deux. De fait, les bombardiers d'eau sont intervenus au moment où les experts estimaient que c'était utile. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel.
M. Claude Domeizel. Ma question s'adressait à M. le Premier ministre, mais c’est vraisemblablement M. le ministre chargé des relations avec le Parlement qui va me répondre.
Monsieur le ministre, ce qui s’est passé jeudi dernier dans notre hémicycle est gravissime pour nos institutions républicaines.
M. Philippe Dallier. C’est l’application de la Constitution !
M. Claude Domeizel. Sans entrer dans le détail d’une utilisation abusive du règlement du Sénat, je rappelle que M. le ministre de l’éducation nationale a demandé le retrait de l’ordre du jour d’une proposition de loi présentée, au nom du groupe socialiste, par notre collègue Françoise Cartron visant à instaurer l’instruction obligatoire dès l’âge de trois ans.
M. Alain Gournac. Il a bien fait !
M. Philippe Dallier. C’est permis par la Constitution !
M. Claude Domeizel. Un tel stratagème procédural, annoncé seulement quelques minutes avant le début de la séance, démasque votre refus de l’alternance et démontre votre volonté de priver de parole la nouvelle majorité de gauche de notre assemblée. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Alain Gournac. Quel pipeau !
M. Claude Domeizel. Sans doute considérez-vous, en écho à des propos tenus avant-hier à l’Assemblée nationale par le ministre de l’économie, que Jean-Pierre Bel est président « par effraction » d’une nouvelle majorité au Sénat ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Monsieur le ministre, pourquoi ce coup de force ? De quoi avez-vous peur ? Êtes-vous opposé à l’obligation scolaire à trois ans ? Oui, certainement parce qu’elle sanctuarise l’école maternelle dont tout le monde reconnaît les grandes qualités.
Avez-vous peur du débat ? (M. Alain Gournac s’exclame.) Nous devinons votre réponse, monsieur le ministre. Vous allez nous abreuver d’un long et indigeste discours sur l’article 20 de la Constitution. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Plusieurs sénateurs de l’UMP. L’article 40 !
M. Éric Doligé. Ne dites pas n’importe quoi !
M. Michel Magras. Deux fois 20 ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. Claude Domeizel. Non, la question n’est pas là. L’inadmissible, c’est que vous avez rompu avec les traditionnelles relations républicaines qui existaient entre le gouvernement et les assemblées parlementaires. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
Je vous remercie de m’écouter !
M. Philippe Dallier. La question !
M. Claude Domeizel. Jusqu’à ce jour, aucun gouvernement n’avait empêché un débat à l’Assemblée nationale ou au Sénat. Vous avez franchi ce pas dangereux. Mais nous sommes lucides : votre premier objectif consistait à ne pas aborder le projet du candidat Nicolas Sarkozy pour le démantèlement de l’école maternelle, qui prévoit de ne plus admettre à l’école maternelle que les enfants de quatre ans et d’encourager parallèlement la création de jardins d’enfants à la charge des familles et des communes. (Exclamations sur les travées de l’UMP.)
M. Alain Gournac. N’importe quoi ! Quel pipeau !
M. Claude Domeizel. Mesdames, messieurs les ministres, pendant les quelques mois qu’il vous reste à exercer vos fonctions, avez-vous l’intention de museler de nouveau la nouvelle majorité du Sénat ?
Quoi qu’il en soit, comptez sur nous et sur notre capacité à résister à ces assauts indignes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. Alain Gournac. Très mauvais !
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé des relations avec le Parlement.
M. Patrick Ollier, ministre auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Domeizel, j’aurais compris qu’un sénateur fraîchement élu pose une telle question.
M. Alain Gournac. Et encore !
M. Patrick Ollier, ministre. Mais vous qui siégez au Sénat depuis près de quinze ans, qui êtes un sénateur de qualité, vous ne pouvez pas ignorer la teneur non pas de l’article 20, mais de l’article 40 de la Constitution. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Cet article dispose qu’aucun député ou sénateur ne peut, par voie d’amendement ou dans une proposition de loi, aggraver une charge publique.
M. David Assouline. Vous n’arrêtez pas de le faire !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Et la proposition de loi Ciotti ?
M. Patrick Ollier, ministre. Or, monsieur le sénateur, la proposition de loi de Mme Cartron, qui vise à abaisser l’âge de la scolarité obligatoire de six à trois ans, alourdirait les charges de l’État de 1,3 milliard d’euros par an… rien que ça ! (Exclamations sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. N’importe quoi !
M. Patrick Ollier, ministre. Dans la période de crise que nous connaissons, pensez-vous vraiment qu’il soit raisonnable de présenter une telle proposition ?
M. Michel Berson. Et la caricature, est-ce raisonnable ?
M. Patrick Ollier, ministre. Au-delà même de cette proposition de loi, monsieur le sénateur, je me dois, en qualité de ministre chargé des relations avec le Parlement, de faire respecter la Constitution, laquelle s’applique à tous, que l’on siège à gauche ou à droite de l’hémicycle, que l’on soit majoritaire ou pas.
Je ne conteste pas l’élection de M. le président du Sénat. J’ai pour lui beaucoup de respect, il le sait. Nos relations, qui sont républicaines et qui vont même un peu plus loin, nous permettront, je l’espère, avec les présidents de commission avec lesquels je m’en suis entretenu, de trouver un moyen de nature à permettre au Gouvernement d’indiquer aux parlementaires les propositions de loi qui ne sont pas recevables.
Compte tenu des conditions dans lesquelles la proposition de loi de Mme Cartron a été déposée, j’ai été conduit à demander que soit invoqué l’article 40 de la Constitution. Placé dans des conditions identiques, j’agirais de la même manière, car je suis tenu de respecter la Constitution.
Monsieur Domeizel, je vous enjoins de faire de même, car un sénateur se doit aussi d’être respectueux de la Constitution de la République. (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP. – Hou ! sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.
M. Pierre Bernard-Reymond. Monsieur le président, ma question s’adresse à M. le ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes.
Le récent Conseil européen a envisagé la possibilité d’apporter des modifications limitées au traité. À cet effet, une mission a été confiée aux trois présidents, du Conseil, de la Commission européenne et de l’Eurogroupe, qui devront remettre un rapport avant la fin de l’année. Il semble que les modifications, qualifiées de « limitées », doivent se borner à la traduction juridique de certaines mesures que la crise nous a contraint de prendre ou d’envisager.
Cet objectif est-il suffisamment ambitieux alors qu’à l’évidence des questions plus fondamentales se posent ? Quelle articulation institutionnelle doit-il y avoir entre la zone euro et l’Union à vingt-sept ? Le moment n’est-il pas venu de donner corps à l’idée de l’Europe des cercles concentriques ? Ne doit-on pas réfléchir à une utilisation plus fréquente et plus affirmée des rythmes différenciés ? Comment réduire les délais entre les décisions du Conseil européen et leur application après ratification ? Quel nouveau rôle peut-on conférer au Parlement européen en matière de ratification ?
Le rythme de la construction européenne n’est plus adapté aux défis que lancent les marchés et la mondialisation.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, les marchés !
M. Pierre Bernard-Reymond. Il est urgent de construire avec les États qui le veulent une Europe plus fédérale. Il faut lever l’hypocrisie qui s’attache au mot souveraineté. Quelle est la souveraineté de la Grèce à qui l’on demande à juste titre de renoncer à un référendum ? Quelle est la souveraineté de l’Italie à laquelle on impose, à juste raison, une surveillance par le Fonds monétaire international ? Arrêtons de nous payer de mots. Dans le monde tel qu’il est, nous serons d’autant plus souverains que nous serons européens.
Monsieur le ministre, dans quel état d’esprit le Gouvernement aborde-t-il cette nouvelle réforme du traité ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. David Assouline. On en reparlera après l’élection !
M. le président. La parole est à M. le ministre chargé de la coopération.
M. Henri de Raincourt, ministre auprès du ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes, chargé de la coopération. Monsieur le sénateur, votre question est d’une telle densité et son champ est si vaste qu’il m’aurait fallu beaucoup plus de deux minutes trente pour vous apporter une réponse appropriée. Je vous prie donc, par avance, de bien vouloir excuser la synthèse à laquelle je suis obligé de me livrer.
Lors du sommet européen du 27 octobre dernier, les chefs d’État et de gouvernement ont approuvé dix nouvelles mesures destinées à renforcer la gouvernance économique et financière. Leur mise en œuvre s’inscrira dans le cadre des traités actuels.
Parmi les mesures les plus notables, je cite la réunion régulière de sommets de la zone euro, placés sous une présidence stable assumée par le président du Conseil européen. Dès juin 2012, les réunions de l’Eurogroupe auront ainsi un président à temps plein.
Un mandat a été confié au président du Conseil pour définir des mesures en vue de renforcer la convergence économique au sein de la zone euro, d’améliorer la discipline budgétaire, d’approfondir l’union économique en envisageant la possibilité d’apporter des modifications limitées au traité. Dans cette perspective, M. Van Rompuy présentera, lors de la réunion du Conseil du mois de décembre, un certain nombre d’orientations et de mesures concrètes.
Le mandat qui lui a été confié, vous le savez, fait suite à une demande de nos amis allemands d’examiner les éventuelles modifications des traités que la poursuite des travaux sur l’amélioration de la gouvernance de la zone euro pourrait rendre nécessaires. D’importantes avancées ont déjà été obtenues à traité constant. C’est d’abord dans ce cadre, pour viser l’efficacité, que nous devons continuer à nous inscrire. Si une révision devait être décidée, elle devrait être encadrée, mais il s’agit, nous le savons, d’une procédure lourde.
Pour le Gouvernement, la réforme des traités n’est pas un préalable à la réponse globale devant être apportée à la crise qui frappe actuellement les pays de la zone euro.
Monsieur le sénateur, demain, nous serons le 11 novembre, et nous aurons tous chevillé au cœur le souvenir qu’il aura fallu une guerre, une de plus, celle de 1939-1945, pour découvrir que les peuples européens devaient s’unir afin d’assurer la paix, la sécurité, la prospérité.
C’est cet esprit, cet idéal magnifique qui a animé les fondateurs de l’Europe, qui, aujourd’hui, habite le Gouvernement. Certes, l’environnement a considérablement changé et, nous le savons, le temps démocratique ne correspond pas au temps nécessaire pour apporter des réponses immédiates aux défis auxquels nous sommes confrontés. Mais ce qui compte, c’est de rester fidèle à l’idéal des fondateurs de l’Europe. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Nous en avons fini avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures dix, est reprise à seize heures vingt-cinq, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.)
PRÉSIDENCE DE M. Thierry Foucaud
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Modification de l'ordre du jour
M. le président. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, avant de reprendre la suite de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, je tiens à vous informer que, préalablement à notre séance de questions d’actualité au Gouvernement, M. le président du Sénat a tenu à réunir les représentants de la commission des affaires sociales et des groupes politiques, afin d’envisager la suite et la fin de la discussion de ce texte, sur lequel il reste 162 amendements à examiner.
Nous lèverons la séance aujourd’hui entre dix-huit heures et dix-neuf heures, de sorte que chacune et chacun d’entre nous puisse rejoindre son département en vue des cérémonies du 11 novembre.
Dans l’espoir de finir l’examen de ce texte à une heure raisonnable, dans la nuit du lundi 14 au mardi 15 novembre, le Sénat se réunira lundi 14 novembre à dix heures ou à dix heures trente, à quatorze heures trente, le soir et la nuit.
Pour le cas où nous serions obligés de siéger tard dans la nuit, la prudence nous a imposé de reporter la séance de questions orales du mardi matin 15 novembre à une date ultérieure, qui sera fixée par la conférence des présidents lors de sa réunion du mercredi 16 novembre 2011.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
5
Financement de la sécurité sociale pour 2012
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2012.
QUATRIÈME PARTIE (suite)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES POUR 2012
Section 1(suite)
Dispositions relatives aux dépenses d’assurance maladie
M. le président. Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 34 ter.
Article 34 ter (nouveau)
Le IV de l’article 83 de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est supprimé ;
2° Le dernier alinéa est remplacé par huit alinéas ainsi rédigés :
« Par exception aux dispositions du sixième alinéa du I de l’article 60 de la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 précitée et aux dispositions du huitième alinéa du I de l’article 69 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, les médecins et les chirurgiens-dentistes titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un État non membre de l’Union européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de la profession dans le pays d’obtention de ce diplôme, certificat ou titre, recrutés avant le 3 août 2010 et ayant exercé des fonctions rémunérées dans des conditions fixées par décret dans un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d’intérêt collectif, peuvent continuer à exercer ces fonctions jusqu’au 31 décembre 2014.
« Ces praticiens se présentent aux épreuves de vérification des connaissances organisées chaque année jusqu’en 2014, dès lors qu’ils justifient :
« 1° Avoir exercé des fonctions rémunérées pendant au moins deux mois continus entre le 3 août 2010 et le 31 décembre 2011 ;
« 2° Avoir exercé trois ans en équivalent temps plein à concurrence d’au moins cinq demi-journées par semaine dans des statuts prévus par décret, à la date de clôture des inscriptions aux épreuves organisées l’année considérée.
« Les pharmaciens titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un État non membre de l’Union européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de la profession dans le pays d’obtention de ce diplôme, recrutés avant le 3 août 2010 et ayant exercé des fonctions rémunérées dans des conditions fixées par décret, se présentent aux épreuves de vérification des connaissances mentionnées au troisième alinéa du présent IV sous les conditions prévues aux 1° et 2°.
« Les sages-femmes titulaires d’un diplôme, certificat ou autre titre obtenu dans un État non membre de l’Union européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de la profession dans le pays d’obtention de ce diplôme, recrutées avant la publication de la présente loi et ayant exercé des fonctions rémunérées dans des conditions fixées par décret, se présentent aux épreuves de vérification des connaissances mentionnées au troisième alinéa du présent IV sous les conditions prévues au 2°.
« Les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens ayant satisfait à ces épreuves effectuent une année probatoire de fonctions rémunérées, dans des conditions fixées par décret, dans un établissement public de santé ou un établissement de santé privé d’intérêt collectif. À l’issue de cette année probatoire, l’autorisation d’exercice de leur profession peut leur être délivrée par le ministre chargé de la santé, qui se prononce après avis des commissions d’autorisation d’exercice mentionnées au I de l’article L. 4111-2 et à l’article L. 4221-12 du code de la santé publique.
« Les modalités d’organisation de l’épreuve de vérification des connaissances sont prévues par décret. »
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, sur l'article.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cet article est extrêmement important, parce qu’il permet aux médecins étrangers exerçant en France de ne plus être confrontés à la date butoir du 31 décembre 2011 en prorogeant la possibilité, pour ceux-ci, d’effectuer leur activité en France jusqu’en 2014.
Nous avons parlé ce matin de la démographie médicale. Le département de l’Orne, qui est probablement la lanterne rouge de la démographie médicale, compte 15 médecins hospitaliers étrangers à Alençon, 5 à Flers, 33 à Argentan. Or la perspective de voir ces médecins quitter le territoire, puisque ce sont majoritairement des spécialistes, a ému la population.
Le président de la région Basse-Normandie, Laurent Beauvais, s’est beaucoup impliqué, et le Gouvernement a fort judicieusement reconduit les mesures concernant ces médecins étrangers. Tel est l’objet de cet article.
Hier, en commission des affaires étrangères, Claude Guéant nous a expliqué que, en matière de visa, de résidence et de possibilité d’exercice, ses services étaient parfaitement en adéquation avec ceux du ministère du travail, de l’emploi et de la santé qui s’occupaient du dossier.
C’est un aspect important, mais mon intervention a surtout pour objet d’attirer l’attention du Gouvernement sur les difficultés de ces médecins étrangers en France, dont la tête est « sauvée » jusqu’en 2014. Cette mesure ayant déjà été prorogée, il faut trouver une solution pérenne pour ces gens qui font vivre nos hôpitaux, non seulement dans les territoires ruraux, mais aussi dans les zones urbaines. Cette disposition est absolument indispensable.
Dans le même temps, Claude Guéant nous disait hier avoir rencontré le Premier ministre du Mali qui expliquait que son pays n’avait plus de médecins, tous les médecins maliens exerçant maintenant en France.
Par conséquent, le problème des médecins étrangers rejoint terriblement celui de la démographie médicale que nous avons examiné ce matin : nous formons beaucoup de médecins, mais ils sont mal répartis sur le territoire.
J’espère que l’examen de cet article nous donnera l’occasion de réétudier la situation de ceux qui font vivre les hôpitaux dans les territoires ruraux et de trouver une solution pérenne.
M. le président. L'amendement n° 274, présenté par Mmes Lepage et Conway Mouret, MM. Leconte, Yung et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Remplacer le mot :
huit
par le mot :
neuf
II. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les conditions d’exercice prévues au 1° et au 2° ne sont pas requises pour les médecins, de nationalité française, titulaires d’un diplôme obtenu dans un État non membre de l’Union européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen et permettant l’exercice de la profession dans le pays d’obtention de ce diplôme.
La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. L’amendement que j’ai défendu ce matin et sur lequel je n’ai pas été suivie – et c’est bien dommage ! – visait à permettre aux médecins français ayant obtenu un diplôme dans un pays extérieur à l’Union européenne de parfaire leur formation en France, notamment de postuler à un poste de « faisant fonction d’interne ».
Je le répète ici, la grande majorité de ces médecins a le désir de rentrer dans le pays où ils ont grandi et étudié pour y pratiquer leur profession, après avoir complété leur formation en France. C’est la raison pour laquelle, contrairement à ce qu’a dit Mme la secrétaire d’État ce matin, ils n’ont aucun intérêt à bénéficier d’une procédure d’autorisation d’exercice en France.
Ils sont dans une situation strictement identique à celle de leurs condisciples étrangers, et n’aspirent à rien de plus que de bénéficier des mêmes droits qu’eux. Ce n’est pas le cas, et ces Français vivent dans un no man’s land juridique qui méconnaît leurs droits.
Cela étant, comme en témoignent les multiples courriers qui me sont parvenus ces dernières semaines, de nombreux compatriotes, ceux qui aspirent à demeurer en France – il y en a, je le reconnais volontiers, mais ce ne sont pas les mêmes que ceux que j’évoquais à l’instant –, se sont de nouveau estimés bafoués dans leurs droits, à tout le moins complètement ignorés par le Gouvernement de leur pays.
En effet, l’amendement proposé par le Gouvernement et adopté par nos collègues députés vise à proroger le dispositif transitoire d’autorisation d’exercice jusqu’au 31 décembre 2014 et à introduire de nouvelles épreuves de vérification des connaissances pour les médecins étrangers diplômés hors de l’Union européenne. Mais qu’est-il prévu pour les médecins français titulaires d’un diplôme étranger ?
Parce qu’ils cumulent ces deux « handicaps » – passez-moi l’expression, mes chers collègues – d’avoir un diplôme étranger et d’être Français, ils sont purement et simplement exclus de cette procédure d’autorisation d’exercice à laquelle leurs condisciples étrangers peuvent se présenter, au motif qu’ils n’auront pu satisfaire à l’obligation d’exercice de trois années rémunérées en établissement de santé.
Madame la secrétaire d’État, cette discrimination à l’égard des médecins français à diplôme étranger est d’autant plus choquante que vous avez motivé l’amendement du Gouvernement, déposé à l’Assemblée nationale, par le souci de garantir la continuité de fonctionnement des établissements de santé.
Parmi ces médecins à diplôme étranger, les Français seraient donc moins aptes à combler la cruelle pénurie de praticiens, notamment dans certaines régions peut-être moins attractives ? Combien de temps devront-ils porter le poids de cette « faute originelle », celle d’être nés au sein de cette communauté française qui fait vivre la France à l’étranger ?