Mme la présidente. L'amendement n° 23 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme les mots : « de l'article L. 321-1 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 321-1 ou L. 324-1 ».
La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Le but est ici simplement de permettre aux établissements publics fonciers locaux d’intervenir en matière de logements sociaux. II s’agirait d’élargir à ces établissements la délégation du droit de préemption dont dispose le préfet, dès lors qu’a été pris un arrêté constatant la carence d’une commune à atteindre le pourcentage de logements sociaux imposé par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, autrement dit la loi SRU.
Ce droit de préemption peut d’ores et déjà être délégué aux établissements publics fonciers et d’aménagement ainsi qu’aux sociétés d’économie mixte – SEM – ou à certains organismes d’HLM. Tout comme les SEM, ils sont dirigés par des représentants des collectivités, et l’État utilise déjà ces sociétés pour mettre en œuvre une politique de rattrapage en matière de logements sociaux. On ne peut donc dénier à ces établissements le droit d’intervenir pour ce simple motif.
Enfin, ces établissements publics fonciers locaux peuvent également percevoir les pénalités financières prises en application de l’article 55 de la loi SRU, en l’absence de programme local d’habitat. Ils ont donc une réelle légitimité à agir dans ce domaine.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Le Gouvernement, quant à lui, est défavorable à cet amendement. En effet, il prévoit qu’un pouvoir d’État est délégué à un établissement public local, dans lequel l’État n’est pas présent.
Aujourd’hui, lorsqu’un constat de carence est établi, l’État dispose du droit de préemption et peut le déléguer à un établissement public d’aménagement dont il a la gouvernance.
Vous demandez, monsieur Mézard, d’étendre cette possibilité aux établissements publics fonciers locaux, alors que l’État ne participe pas à la gouvernance de telles structures. Le fait de déléguer un pouvoir d’État, prévu par la loi, à un établissement dont l’État n’est pas membre pose tout de même un problème !
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Monsieur le secrétaire d’État, l’amendement présenté par notre collègue Jacques Mézard a toute sa logique. Dans la mesure où les établissements publics fonciers locaux perçoivent les pénalités versées par les communes au titre de l’article 55 de la loi SRU, pourquoi ne pourraient-ils pas utiliser cet argent pour procéder à des préemptions ?
Certes, l’État a le pouvoir de préemption sur les communes en constat de carence ; mais, à ma connaissance – peut-être disposez-vous de données plus précises –, il ne l’a pas utilisé.
Personnellement, que cet argent soit utilisé par les établissements publics fonciers locaux pour promouvoir la construction de logements, je trouve cela plutôt bien.
M. Daniel Raoul. Eh oui !
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l’article 1er.
Je constate par ailleurs que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° 1 rectifié quinquies est présenté par MM. Alduy, Couderc, Cléach, Gélard, Béteille et Mayet, Mme Morin-Desailly, M. Cointat, Mme Sittler, MM. Lefèvre, Milon, Leroy, Demuynck, Dubois, Doublet, Laurent, Hérisson et Leleux, Mme Malovry, MM. Braye, Pierre et Adnot, Mme Létard et MM. B. Fournier et Dulait.
L’amendement n° 19 rectifié est présenté par MM. Raoul, Repentin, Daunis, Caffet, Godard, Courteau, Navarro et Rebsamen, Mme Bricq et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Avant l’article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 210-2 du code de l’urbanisme, il est inséré un article L. 210-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 210-3. - En cas de vente de lots de copropriétés faisant l’objet d’un plan de sauvegarde au sens de l’article L. 615-1 du code de la construction et de l’habitation ou de copropriétés en difficulté au sens des articles 29-1 A à 29-3 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le titulaire du droit de préemption peut faire usage de ce droit pour acquérir des lots de copropriétés en vue de l’amélioration du fonctionnement des copropriétés ».
La parole est à M. Laurent Béteille, pour présenter l’amendement n° 1 rectifié quinquies.
M. Laurent Béteille. Un certain nombre de copropriétés connaissent des problèmes de fonctionnement : parce qu’on ne trouve pas de majorité pour prendre des décisions, voire parce qu’il est impossible de tenir des assemblées générales…
Cet amendement vise à permettre de préempter la vente de lots de copropriétés en plan de sauvegarde ou en difficulté, sans avoir pour autant atteint le stade de l’insalubrité visé à l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme.
Par cette proposition de bon sens, il s’agit de favoriser la relance de ces copropriétés avec des acquéreurs qui pourront reconstituer des majorités susceptibles de voter les décisions nécessaires aux assemblées générales.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter l’amendement n° 19 rectifié.
M. Daniel Raoul. Nous avons déjà évoqué ces copropriétés qui fonctionnent mal à propos de l’amendement n° 11 et nous adhérons pleinement à la présentation du problème que vient de faire Laurent Béteille.
Cela étant, monsieur le secrétaire d’État, j’aurai une question à vous poser : dans quel délai comptez-vous soumettre à la représentation nationale la fameuse réforme de la loi de 1965 sur le statut des copropriétés et celle des professions immobilières ? Je rappelle que notre collègue M. Braye a mené une mission sur ce thème. Je n’oublie pas non plus que les propositions formulées dans un précédent rapport publié dans le prolongement du Grenelle sont restées lettre morte.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. Comme je l’avais laissé entendre tout à l’heure, la commission émet un avis favorable sur ces deux amendements identiques.
Mme Nicole Bricq. Merci, monsieur le rapporteur !
M. Daniel Raoul. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Bricq. Ce n’est pas possible !
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Je ferai deux observations.
Premièrement, nous ne sommes évidemment pas en désaccord sur le fond : nous partageons totalement la volonté exprimée par la commission et les auteurs des amendements quant à la possibilité d’utiliser le droit de préemption sur les lots de copropriétés.
Mme Nicole Bricq. Alors, pourquoi être défavorable aux amendements ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Simplement, une telle possibilité existe déjà. Donc, pourquoi se répéter ? Je ne vois pas ce que l’adoption de ces amendements ajouterait à ce que prévoit déjà le droit français.
Deuxièmement, le dispositif proposé aboutit en fait à restreindre le champ d’application du droit de préemption sur les copropriétés. En effet, les amendements n’en envisagent la mise en œuvre que dans le cas où il y a un plan de sauvegarde. Raisonnons a contrario : sans plan de sauvegarde, il ne sera plus possible d’utiliser le droit de préemption sur les lots de copropriétés.
Autrement dit, la proposition qui nous est faite, outre qu’elle est redondante, est restrictive par rapport au droit positif actuel.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Hervé Maurey, rapporteur. J’en suis désolé, monsieur le secrétaire d'État, mais je ne suis pas d’accord avec vous.
Les amendements en question visent à répondre aux remarques formulées par le Conseil d’État dans son étude de 2007 sur les problèmes qu’il peut y avoir en matière d’interprétation de la loi actuelle, et notamment à celle-ci : « La lutte contre les logements insalubres constitue un autre exemple révélateur de l’incertitude actuelle. La jurisprudence semble réticente à admettre l’exercice du droit de préemption urbain à cette fin au motif que celle-ci relève plutôt d’une logique de santé publique et que la réalisation de travaux dans le seul but de résorber l’insalubrité d’un bâtiment ou d’un lot de copropriété ne constitue pas par elle-même une opération d’aménagement […] On peut ainsi douter de ce que, en l’état actuel du droit, les opérations prévues par le code de la construction et de l’habitation, telles que les opérations programmées d’amélioration de l’habitat destinées en particulière à résorber l’habitat indigne soient des "opérations d’aménagement au sens de l’article L. 210-1 du code de l’urbanisme". »
Il y a donc bien des incertitudes juridiques qui pèsent sur la situation actuelle ; les auteurs de ces amendements identiques se proposent d’y répondre ; d’où l’avis favorable émis par la commission.
Il faut autoriser très clairement l’exercice du droit de préemption urbain dès lors qu’il s’agit d’améliorer le fonctionnement de copropriétés en difficulté.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Monsieur le rapporteur, j’entends bien votre argument, mais il vient confirmer, me semble-t-il, ce que je viens de dire.
Mme Nicole Bricq. Non !
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Vous nous expliquez très clairement que le champ de ces amendements se limite exclusivement au problème de l’insalubrité.
M. Daniel Raoul. Non !
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Je répète donc que, actuellement, le droit de préemption urbain ouvert dans le cadre des copropriétés est bien plus large, notamment pour ce qui concerne la réalisation d’un PLH, qui n’est pas envisagée dans le texte proposé.
Autrement dit, ce qui est possible aujourd’hui ne le sera plus demain. Je serai même plus précis : aujourd’hui, l’exercice du droit de préemption urbain relatif aux copropriétés est possible dès lors qu’il s’agit du droit de préemption renforcé : à partir du moment où celui-ci est correctement motivé, il n’y a pas de problème d’interprétation par rapport à l’argumentaire du Conseil d’État.
M. Daniel Raoul. Mais si !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Je confirme donc l’avis défavorable du Gouvernement sur ces amendements identiques, car il n’est pas concevable de restreindre le champ d’application du droit de préemption.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Béteille, pour explication de vote.
M. Laurent Béteille. Honnêtement, on ne peut pas être d’accord avec votre argumentation, monsieur le secrétaire d’État. L’article que les amendements identiques visent à insérer dans le code de l’urbanisme étant situé après l’article L. 210-2 relatif aux règles du droit de préemption, ces dernières ne seraient pas touchées.
Nous souhaitons simplement ouvrir la possibilité de préempter des lots de copropriétés pour une nouvelle raison, qui n’est pas prévue dans l’article L. 210-2, à savoir améliorer le fonctionnement des copropriétés. Notre proposition s’ajoute aux dispositions existantes et ne vient en aucun cas les restreindre, bien au contraire.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Repentin, pour explication de vote.
M. Thierry Repentin. Je fais miens les arguments développés par notre collègue Laurent Béteille.
Lorsque des organismes HLM font part de leur souhait de se porter acquéreurs, d’ailleurs à la demande des collectivités locales, de lots de copropriétés dans la situation précise visée par ces amendements identiques, on nous oppose la carence de la loi en la matière et la nécessité de clarifier les dispositions existantes. Nous voterons donc ces amendements.
J’ai le sentiment qu’une telle clarification sera également utile pour certains de nos collègues qui ne sont pas forcément présents dans l’hémicycle aujourd’hui et qui sont confrontés sur leur territoire à des copropriétés en difficulté : construites dans des zones de montagne voilà quelques années sous le régime de la défiscalisation, elles ne sont plus louées aujourd’hui ; c’est le problème des « lits froids ». Ces logements n’étant pas frappés d’insalubrité, l’utilisation du droit de préemption tel qu’il est aujourd’hui défini n’est pas possible.
L’adoption de ces deux amendements permettrait donc d’apporter un début de réponse dans ce cas de figure certes un peu particulier, mais qui se rencontre dans certains territoires de notre pays.
M. Daniel Raoul. Très bien !
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1 rectifié quinquies et 19 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l’article 1er.
Je constate par ailleurs que ces amendements identiques ont été adoptés à l’unanimité des présents.
L’amendement n° 12 rectifié, présenté par MM. Repentin, Raoul, Daunis, Caffet, Godard, Courteau, Navarro et Rebsamen, Mme Bricq et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Le chapitre II du titre Ier du livre II est ainsi modifié :
a) Son intitulé est ainsi rédigé :
« Zones d’aménagement différé, périmètres provisoires et zones d’opérations futures » ;
b) Il est créé une section 1 intitulée : « Zones d’aménagement différé et périmètres provisoires » comprenant les articles L. 212-1 à L. 212-5 ;
c) Il est ajouté une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Zones d’opérations futures
« Art. L. 212-6. – Des zones d’opérations futures peuvent être créées, par délibération motivée, par un établissement public de coopération intercommunale visé aux articles L. 5215-1, L. 5216-1 et L. 5217-1 du code général des collectivités territoriales en vue de la réalisation d’opérations d’intérêt communautaire ou par une commune non membre d’un tel établissement.
« En cas d’avis défavorable d’une commune incluse dans le périmètre de la zone, celle-ci ne peut être créée que par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 212-7. – Dans les zones visées à l’article L. 212-6, un droit de préemption, qui peut être exercé pendant une période de six ans renouvelable à compter de la publication de l’acte qui a créé la zone, est ouvert aux communes. Au cas où la commune n’exerce pas le droit de préemption, l’établissement public qui a créé la zone peut se substituer à elle.
« Les dispositions des articles L 213-1 à L. 213-18 sont applicables. Toutefois, par exception au troisième alinéa de l’article L. 213-2, le silence des titulaires des droits de préemption et de substitution pendant trois mois à compter de la réception de la déclaration mentionnée au premier alinéa de l’article L. 213-2 vaut renonciation à l’exercice de ces droits.
« Art. L. 212-8. – Tout propriétaire, à la date de publication de l’acte instituant la zone visée à l’article L. 212-6, d’un bien soumis au droit de préemption, ou ses ayants cause universels ou à titre universel, peut proposer à la personne qui a créé la zone de l’acquérir. Les dispositions de l’article L. 212-3 sont alors applicables ».
2° Après le huitième alinéa de l’article L. 213-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - pour les biens compris dans les zones visées à l’article L. 212-6, la date de publication ou du dernier renouvellement de l’acte créant la zone ; ».
La parole est à M. Thierry Repentin.
M. Thierry Repentin. Nous avons longuement réfléchi sur la meilleure manière de rendre au droit de préemption sa fonction d’outil d’aménagement. Nous souhaitons notamment en faire un instrument qui permette aux collectivités locales d’anticiper au mieux leurs opérations futures. Pour ce faire, nous avions jusque-là à notre disposition – mes collègues également élus locaux le savent bien – les zones d’aménagement différé, les fameuses ZAD.
Depuis plusieurs années maintenant, sous la pression d’un certain nombre de parlementaires et d’une supposée jurisprudence européenne, les avantages rattachés aux ZAD ont été peu à peu rognés. Ainsi, leur durée de vie est passée de dix à six ans. Mais il y a plus gênant encore : pour créer une ZAD, les communes doivent systématiquement s’en remettre à l’État.
Pour définir le périmètre d’application du droit de préemption urbain, les communes sont libres, au point que la plupart de celles qui ont créé un tel périmètre l’ont calé, d’une façon générale, sur l’ensemble des zones U et AU de leur territoire.
Dès lors que les communes envisagent de créer des zones prioritaires d’aménagement, avec la certitude d’aménager des services publics, de la voirie ou d’autres équipements, et d’y ouvrir un droit de délaissement aux propriétaires, tout en y maîtrisant les prix, elles doivent s’en remettre, je le redis, à l’État.
Notre proposition vise, en quelque sorte, à améliorer la donne.
Il s’agit de doter les communes et, le cas échéant, les intercommunalités, quand elles font valoir un intérêt communautaire consensuel, d’une ZAD locale, qui s’appellerait « zone d’opérations futures », ou ZOF : à nouvelle zone, nouvel acronyme ! Elles en maîtriseraient le périmètre et pourraient préserver leur capacité d’achat du foncier ou de l’immobilier pendant une durée minimale de six ans, à l’instar de ce qui se fait dans les ZAD. En échange, les propriétaires se verraient offrir un nouveau droit, le droit de délaissement, c’est-à-dire le pouvoir de contraindre la commune ou l’intercommunalité à racheter leurs biens au prix du marché.
La ZOF apparaît donc comme l’outil qui confère une utilité foncière au droit de préemption et qui redonne des marges de manœuvres aux maires sur leur territoire.
Imaginez, dans les grandes villes, le nombre d’opérations qui sont rendues difficiles par la flambée des prix, alors même que les projets sont sur la table et qu’ils tardent à sortir de terre pour des raisons d’agenda. Les villes moyennes et les communes rurales connaissent le même problème ; or le moindre retard, tenant souvent à des causes étrangères à la commune, rend difficile la mise en œuvre de telles opérations en raison du prix du foncier.
Pour tous ces projets, la création d’une ZOF permettrait d’apaiser les appétits d’opérateurs extérieurs à la commune.
Monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, cette idée est une avancée très nette pour les territoires. J’espère que vous aurez à cœur de la soutenir avec nous.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Hervé Maurey, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement, d’autant qu’il s’agit d’un sujet sur lequel nous avons travaillé ensemble.
M. Thierry Repentin. C’est vrai !
M. Hervé Maurey, rapporteur. Certains, parleraient de « coproduction législative »… Je n’irai peut-être pas jusque-là ! En tout cas, les échanges que nous avons eus au cours de différentes réunions de commission ont permis d’arriver à une rédaction qui nous paraît tout à fait satisfaisante.
Ainsi, la proposition initiale de M. Repentin portait sur des « zones d’opérations d'intérêt communautaire ». Il est désormais question de « zones d’opérations futures », puisque le dispositif peut bénéficier à des communes et non pas seulement à des intercommunalités.
Il nous a en outre paru opportun de préciser que le juge prendrait en compte l’usage du bien au moment de la création de la zone, comme c’est le cas pour les ZAD. C’est là une disposition particulièrement bienvenue.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d’État. Il est défavorable, madame la présidente. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)
Si je me réfère aux votes intervenus sur les précédents amendements, je suppose que l’avis du Gouvernement, là encore, ne sera pas suivi. Mais il n’en assume pas moins ses positions.
Nous sommes tous, me semble-t-il, résolus à poursuivre le processus de simplification du droit de l’urbanisme. Pourtant, à chaque nouveau texte, nous en « rajoutons une couche » !
Depuis que nous avons lancé la réforme de l’urbanisme, je dis régulièrement que nous devons éviter de faire ce que nous faisons depuis dix ans, à savoir élaborer un projet de loi de simplification qui devient finalement une loi compliquant davantage le droit. Or un tel amendement revient précisément à complexifier plus encore les choses.
Actuellement, le droit de préemption urbain de base appartient à celui qui a la compétence de l’urbanisme : il s’agit du classique droit de préemption de la commune ou de l’intercommunalité, auquel s’ajoute le droit de préemption de la zone d’aménagement différé. Or vous voulez créer une troisième couche, avec un zonage spécifique ! En gros, cela signifie que l’on va voir une ZAD créée dans une zone spécifique par une intercommunalité dotée d’un droit de préemption. En termes de simplification du droit, vous faites fort !
Nous sommes bien loin, en l’occurrence, de la simplification souhaitée du droit de préemption urbain, qui est au cœur de ce texte. Il s’agit clairement d’une modification substantielle du droit de préemption. Je pense que l’on pourrait retravailler cette idée dans le cadre plus large de la réforme globale du droit de l’urbanisme.
Je ne suis pas sûr que la volonté de la Haute Assemblée soit d’aller dans le sens d’une complexification du droit de l’urbanisme. Or c’est ce qu’elle ferait en votant cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Hérisson, pour explication de vote.
M. Pierre Hérisson. Ceux qui ont participé aux débats ayant précédé le vote de la loi SRU et qui ont suivi l’évolution du droit de l’urbanisme depuis une quinzaine d’années savent bien que, chaque fois que l’on prétend simplifier, on ouvre en fait un champ très large aux juridictions administratives, dont les interprétations viennent compliquer, quelques années plus tard, l’application du code de l’urbanisme. (M. Charles Revet approuve.)
Lorsque les plans d’occupation des sols étaient en vigueur, d’une année sur l’autre, un certain pourcentage de documents d’urbanisme était annulé par les tribunaux administratifs. On est ensuite passé au plan local d’urbanisme : le nombre de PLU annulés depuis leur création représente le double de celui des POS annulés en leur temps !
M. Alain Gournac. Ce sont les tribunaux administratifs qui font la loi !
M. Pierre Hérisson. Quand il s’agit de simplifier, il faut tout de même être attentif aux propositions de bon sens. Le rôle du Sénat est aussi de faire des propositions tendant à apporter des précisions et à combler un certain nombre de lacunes.
Il me semble que le droit de l’urbanisme relève d’abord de la responsabilité du législateur, les collectivités ayant ensuite à l’appliquer sur le territoire. Or, à force de légiférer de façon imprécise dans un certain nombre de domaines, nous avons malheureusement laissé le juge administratif se substituer à celui qui a l’autorité pour délivrer les droits d’occupation du sol.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Hervé Maurey, rapporteur. Je précise que cet amendement vise à créer un outil supplémentaire à la disposition des collectivités. Aujourd’hui, les collectivités ne peuvent pas, si elles le souhaitent, mettre en place des zones d’aménagement différé : ce pouvoir n’appartient qu’à l’État.
Notre collègue Pierre Hérisson vient d’évoquer, à juste titre, la vocation du Sénat. Il me semble que celle-ci est de représenter les collectivités. La sacro-sainte simplification constamment invoquée ne justifie pas que l’on refuse de doter les collectivités d’un nouvel outil.
Nous avons travaillé avec les auteurs de l’amendement pour parvenir à un équilibre entre le rôle de l’intercommunalité et celui des communes, car nous voulions éviter que celles-ci soient dépossédées de leur droit de préemption urbain.
Je considère, pour ma part, que cet amendement est tout à fait équilibré.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, avant l’article 1er.
Je constate par ailleurs que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L’amendement n° 24 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Baylet, Alfonsi et Chevènement, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Marsin, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l'urbanisme est ainsi modifié :
1° Les articles L. 211-1 à L. 211-4 sont ainsi rédigés :
« Art. L. 211-1. - Les communes disposent d'un droit de préemption urbain à l'intérieur des zones urbaines et des zones à urbaniser délimitées par les plans d'urbanisme ou documents en tenant lieu existant sur leurs territoires. Elles peuvent déléguer ce droit à l'État, à une collectivité locale, à un établissement public y ayant vocation ou au concessionnaire d'une opération d'aménagement. Cette délégation peut porter sur une ou plusieurs parties des zones concernées ou être accordée à l'occasion de l'aliénation d'un bien. Les biens ainsi acquis entrent dans le patrimoine du délégataire.
« Art. L. 211-2. -Les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme, ou ayant reçu en application de l'article L. 211-1 délégation de son droit de préemption par une commune qui en est membre, et les communes non membres d'un tel établissement peuvent instituer un droit de préemption urbain à l'intérieur de tout ou partie des zones urbaines et des zones à urbaniser délimitées par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu.
« Art. L. 211-3. - Les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme, ou ayant reçu en application de l'article L. 211-1 délégation de son droit de préemption par une commune qui en est membre, et les communes non membres d'un tel établissement peuvent, par décision motivée, délimiter des périmètres de projet d'aménagement ou de construction dans lesquels ils peuvent exercer, pendant une durée de six ans renouvelable, un droit de préemption dans les conditions définies au chapitre III du présent titre.
« Art. L. 211-4. - Les établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme, ou ayant reçu en application de l'article L. 211-1 délégation de son droit de préemption par une commune qui en est membre, et les communes non membres d'un tel établissement peuvent, par décision motivée, délimiter des périmètres de protection dans lesquels ils peuvent exercer, pendant une durée de six ans renouvelable, le droit de préemption prévu à l'article L. 211-2 dans tout ou partie :
« 1° Des périmètres de protection rapprochée de prélèvement d'eau destinée à l'alimentation des collectivités humaines définis en application de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique ;
« 2° Des périmètres définis par un plan de prévention des risques technologiques en application du I de l'article L. 515-16 du code de l'environnement ;
« 3° Des zones soumises aux servitudes prévues au II de l'article L. 211-12 du même code. » ;
2° Après l'article L. 211-4, il est inséré un article L. 211-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 211-4-1. - Pendant la durée d'application d'un arrêté préfectoral pris sur le fondement de l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation, le droit de préemption institué en application de la présente section est exercé par le représentant de l'État dans le département lorsque l'aliénation porte sur un terrain, bâti ou non bâti, affecté au logement ou destiné à être affecté à une opération ayant fait l'objet de la convention prévue à l'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation.
« Le représentant de l'État peut déléguer ce droit à un établissement public foncier créé en application des articles L. 321-1 ou L. 324-1 du présent code, à une société d'économie mixte ou à un des organismes d'habitations à loyer modéré prévus par l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation.
« Les biens acquis par l'exercice du droit de préemption en application du présent article doivent être utilisés en vue de la réalisation d'opérations d'aménagement ou de construction permettant la réalisation des objectifs fixés dans le programme local de l'habitat ou déterminés en application du premier alinéa de l'article L. 302-8 du code de la construction et de l'habitation. »
La parole est à M. Jacques Mézard.