Mme la présidente. Je rappelle que l'article 1er a été supprimé par la commission.
La parole est à M. Paul Raoult.
M. Paul Raoult. Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, je me félicite de la suppression de l’article 1er, qui concernait les factures d’eau disproportionnées liées à des fuites indétectables. Je le dis avec force : j’espère que, au cours de la commission mixte paritaire, les sénateurs, toutes tendances confondues, tiendront bon et ne réintroduiront pas cette disposition, qui est totalement inutile et qui, loin de simplifier le droit, le complexifierait.
Prévoir que le service d’eau potable « informe sans délai l’abonné » de ses surconsommations, obliger ce dernier à réparer la fuite avant un mois et faire « vérifier le bon fonctionnement du compteur », toutes ces mesures me semblent entraîner un surcoût astronomique et conduisent à une judiciarisation accrue des rapports entre les distributeurs, qu’ils soient publics ou privés, et les usagers.
Qui plus est, il faut tenir compte de la mauvaise foi d’un certain nombre d’usagers : il n’est qu’à voir le développement des compteurs bricolés. Il faut également prendre en considération la gestion de plus en plus difficile des impayés, qui rend plus complexe le travail des distributeurs, l’essor des résidences secondaires, dont les compteurs, souvent mal protégés l’hiver, provoquent des désagréments, le développement des piscines, qui conduit à des surconsommations très aléatoires, les équipements publics – écoles, gares, notamment – souvent mal voire non surveillés, les compteurs installés en terrain agricole pour alimenter le bétail ou en terrain industriel, etc.
Tous ces éléments plaidaient en faveur de la suppression des dispositions de l’article 1er. C’est ce que, dans sa grande sagesse, le Sénat a décidé en commission. J’espère qu’il maintiendra sa position lors de la réunion de la commission mixte paritaire.
Je conclurai par une suggestion. Je souhaite que, par le biais d’une proposition de loi, on crée un médiateur public dans le domaine de la distribution de l’eau, comme cela existe pour la distribution de l’énergie, afin qu’il puisse être saisi en cas de conflit entre les distributeurs publics ou privés et les usagers. Aujourd'hui, les initiatives prises visent à instaurer des médiateurs privés.
J’espère que nous résoudrons ainsi de manière sereine les problèmes qui se posent, sans qu’il soit besoin d’introduire des procédures judiciaires difficiles, coûteuses et inutiles.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour permettre les derniers préparatifs de la retransmission par Public Sénat et France 3, à dix-sept heures, des questions cribles thématiques sur le Grand Paris.
L’examen de la proposition de loi de simplification et d’amélioration de la qualité du droit reprendra à dix-huit heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
12
Questions cribles thématiques
grand paris
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur le Grand Paris.
Je rappelle que l’auteur de la question et le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée d’une minute au maximum peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe politique.
Ce débat est retransmis en direct sur la chaîne Public Sénat et sera rediffusé ce soir sur France 3, après l’émission Ce soir (ou jamais !) de Frédéric Taddeï.
Chacun des orateurs aura à cœur de respecter son temps de parole. À cet effet, des afficheurs de chronomètres ont été mis à la vue de tous.
La parole est à Mme Catherine Tasca.
Mme Catherine Tasca. Monsieur le ministre, le protocole signé le 26 janvier 2011 ouvre la voie à un accord pour les transports en Île-de-France. La proposition de loi sur le SDRIF, le schéma directeur de la région Île-de-France, dont nous discuterons demain, constituera le premier acte fondateur de ce protocole, celui qui donnera le ton des relations entre l’État et la région dans les mois à venir.
D’autres engagements devront être concrétisés au plus vite.
S’agissant, d’abord, des tracés, ils devront être définis.
La Société du Grand Paris, ou SGP, devra tirer les leçons des débats publics en proposant un tracé précis. Le protocole entérine l’objectif d’une desserte fine des territoires au profit du plus grand nombre. L’accord favorise une bien meilleure desserte que l’ancien « Grand huit », mais des gares restent optionnelles et les demandes des élus locaux, relayées par la région, n’ont pas toutes été prises en compte pour le moment.
Pour ce qui concerne, ensuite, les financements, plusieurs engagements de l’État restent à graver dans le marbre. Que pouvez-vous nous en dire ?
S’agissant, enfin, du partage de la maîtrise d’ouvrage, point particulièrement important pour réaliser dans les meilleurs délais le plan de mobilisation et le réseau Grand Paris, vous avez annoncé que la SGP passerait une convention de coordination, technique et financière, avec le STIF, le Syndicat des transports d’Île-de-France, pour l’associer au projet de rocade. Une convention suffira-t-elle ?
La volonté affichée dans le cadre du protocole de trouver les moyens d’un partage de la maîtrise d’ouvrage soulève deux questions.
La première concerne le métro automatique : le président du conseil régional a fait part de sa volonté que le STIF soit maître d’ouvrage de la ligne 14 et de l’un des tronçons de la future rocade.
La seconde porte sur la nécessité de sécuriser juridiquement le rôle du STIF en tant qu’autorité organisatrice des transports. La loi relative au Grand Paris fait l’impasse sur les enjeux d’exploitation du réseau futur et sur les problématiques d’interconnexions et de correspondances avec le réseau existant.
C’est au STIF que revient la responsabilité d’assurer la cohérence du réseau à venir et la charge d’exploiter le futur métro.
Monsieur le ministre, aux termes du protocole État-région, le cadre juridique de ce partage sera élaboré au cours du premier semestre de 2011. Où en est-on ? La réussite de ce projet de transport est décisive pour les Franciliens et le développement de la région d’Île-de-France. (M. Jacques Mahéas et Mme Françoise Laborde applaudissent.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Maurice Leroy, ministre de la ville. Madame Tasca, je veux réaffirmer solennellement devant la Haute Assemblée que le rôle du Syndicat des transports d’Île-de-France, en tant qu’autorité organisatrice des transports dans la région, n’est pas remis en cause et ne le sera pas. Je l’ai indiqué devant la commission de l'économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire du Sénat à l’occasion de l'examen de la proposition de loi précitée et je le répète très clairement aujourd'hui en réponse à votre interpellation.
Vous le savez, la loi du 3 juin 2010, à laquelle vous avez fait référence, ne remet pas en cause le rôle du STIF, mais il semble nécessaire – et je le fais volontiers – de clarifier ce point à l’aune du projet de métro automatique en rocade, dont l’ampleur inédite dans la région aura un impact indéniable sur la cohérence et l’exploitation futures du système de transports franciliens.
Il s’agit, vous avez eu raison de le rappeler, d’un engagement inscrit dans l’accord du 26 janvier dernier, qui, au-delà d’une vision partagée sur le tracé, réaffirme le souci d’une association pleine et entière du STIF dans la réalisation de la rocade par la Société du Grand Paris.
Je l’ai indiqué en commission, je le confirme cet après-midi : cet accord sera mis en œuvre et je suis par conséquent tout à fait disposé à prendre l'ensemble des mesures nécessaires pour que le prolongement de la ligne 14 entre la gare Saint-Lazare et la mairie de Saint-Ouen soit effectivement confié au Syndicat des transports d’Île-de-France.
Vous le constatez, le Gouvernement respecte complètement l’accord signé entre l’État et le président de la région d’Île-de-France, Jean-Paul Huchon. Il travaille dans cet objectif, en association avec le conseil régional. Bien entendu, je suis prêt à examiner toutes les voies conventionnelles et réglementaires pour concrétiser cette association le plus vite possible, mais sans qu’il soit besoin de modifier la loi du 3 juin 2010.
Une modification du code des transports pourra être étudiée si les moyens conventionnels ne donnent pas les résultats espérés. Voilà, madame le sénateur, l’engagement clair que je donne au nom de l’État et du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour la réplique.
Mme Nicole Bricq. Monsieur le ministre, nous poursuivrons ce dialogue à propos de la maîtrise d’ouvrage demain, à l’occasion de l’examen de la proposition de loi que les membres de mon groupe ont déposée. Je constate tout de même que l’on avance, petit à petit, puisque vous évoquez de nouveau aujourd'hui, après l’avoir fait en commission, le recours à la voie conventionnelle et à la voie réglementaire.
La meilleure voie à nos yeux reste la voie législative. Il est d’ailleurs bien inscrit dans le marbre du protocole que le cadre juridique de ce partage sera élaboré au cours du premier semestre de 2011.
Vous avez également évoqué les pistes envisagées au cas où la voie conventionnelle n’aboutirait pas, mais sans préciser la moindre échéance. Ce que l’on sait, c’est que le conseil de surveillance de la SGP déterminera, pour ce qui concerne le métro automatique, le nombre de gares. Or l’État y est majoritaire. Rappelez-vous les débats que nous avons eus l’année passée !
Monsieur le ministre, pour l’instant, votre réponse nous laisse encore sur notre faim. Il y a un principe à respecter : quand on paie, on partage la maîtrise d’ouvrage.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Monsieur le ministre, le débat public sur le Grand Paris a mobilisé de nombreux Franciliens et a révélé leurs fortes attentes en matière de logement, d’aménagement et de transport.
Avant même la publication du rapport de la Commission nationale du débat public, l’État et la région ont signé, le 26 janvier dernier, un protocole d’accord permettant la mise en œuvre du projet de transports nouvellement intitulé « Grand Paris Express ».
Cependant, même révisé, ce projet pour la région capitale conserve son orientation libérale, fondée sur la compétition entre les territoires. L’organisation en pôles de compétitivité et d’excellence aggravera encore davantage les inégalités territoriales.
En outre, la reprise en main par l’État de l’aménagement francilien n’est nullement remise en cause et le financement du schéma de transports reste imprécis et, surtout, incertain. Sur un total de 32,4 milliards d’euros d’ici à 2025, 11,9 milliards d’euros seront consacrés au plan de mobilisation des transports, tandis que le financement de Grand Paris Express s’élèvera à 20,5 milliards d’euros, dont seuls 10,5 milliards d’euros sont actuellement garantis.
Ainsi, tout laisse à penser que les collectivités locales et les usagers seront mis à contribution, notamment par une hausse des tarifs de transports. De plus, la pression foncière accrue va repousser toujours plus loin de la capitale les populations les plus modestes.
Votre projet de Grand Paris est organisé autour de pôles de compétitivité reliés par un métro automatique, alors que l’urgence est au maillage des territoires par le développement de transports de proximité.
Certes, le nombre de gares a sensiblement augmenté, permettant de favoriser le transport de banlieue à banlieue. Toutefois, le nouveau schéma n’améliore pas la desserte de plusieurs pans du territoire francilien, essentiellement en grande couronne et dans les zones plutôt rurales.
Il est donc regrettable que la seule vision que l’on nous propose soit, à long terme, celle d’un réseau de transports uniquement ferré.
En attendant, je le répète, des pans entiers de territoire sont oubliés, au détriment d’un développement cohérent et solidaire de la région d’Île-de-France. L’urgence est au renforcement et au déploiement de transports de proximité : tram-train, tramway, lignes de bus en sites propres.
Monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre afin de favoriser le développement des transports de proximité, de réduire les inégalités de territoires en rééquilibrant l’offre de transports et d’améliorer les déplacements des populations et des salariés ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Maurice Leroy, ministre. Monsieur Vera, je n’entrerai pas avec vous, surtout compte tenu des deux minutes qui me sont imparties pour vous répondre, dans un débat afin de savoir si le projet du Grand Paris est inspiré ou non par une vision libérale. Nous prolongerons, si vous le souhaitez, cette discussion en d’autres occasions ; je me tiens pour cela à votre disposition.
Je vous invite simplement à vous rapprocher de Christian Favier, président du conseil général du Val-de-Marne, ou de Claude Bartolone, président du conseil général de la Seine-Saint-Denis : demandez-leur s’ils pensent vraiment que le travail que nous avons fait, ensemble, en vue de contribuer à l’amélioration quotidienne des conditions de transports des Franciliens est, oui ou non, d’inspiration libérale. Demandez donc aussi au président Huchon si l’accord qu’il a lui-même signé est marqué du sceau du libéralisme.
J’en viens à votre interrogation relative aux financements.
Grâce au budget voté par la majorité sénatoriale, ici même,…
M. Christian Cambon. Il faut le rappeler !
M. Maurice Leroy, ministre. … et à l’excellent travail réalisé par le rapporteur général du budget du Sénat et par celui de l’Assemblée nationale, Gilles Carrez, les moyens financiers sont au rendez-vous. Vous devriez vous en féliciter, monsieur le sénateur !
En effet, dès cette année, ma collègue Nathalie Kosciusko-Morizet va notamment pouvoir mettre en œuvre 500 millions d’euros de crédits issus du plan de mobilisation, en liaison avec la région d’Île-de-France, afin de moderniser d'ores et déjà les lignes C et D du RER. Nous sommes bien là dans le cadre de l’amélioration quotidienne des transports, et non dans celui du discours ou de je ne sais quel cours théorique, fût-il passionnant, sur Schumpeter et le libéralisme. Voilà du concret pour les Franciliens !
Franchement, j’avoue que j’ai été surpris par votre intervention. Le Grand Paris, c’est une vision qu’a eue le Président de la République pour l’avenir de l’Île-de-France et la région capitale.
Nous devrions tous nous en féliciter, et quelles que soient les travées sur lesquelles vous siéger, mesdames, messieurs les sénateurs, sans esprit partisan, car ce projet…
M. Roger Romani. Un beau projet !
M. Maurice Leroy, ministre. … dépasse le temps politique et le temps médiatique. Je suis donc heureux de pouvoir le mettre en œuvre avec la région d’Île-de-France ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Vera, pour la réplique.
M. Bernard Vera. Monsieur le ministre, j’ai bien écouté votre réponse, mais je continue de penser que la mise en œuvre de la loi relative au Grand Paris met en péril la cohérence territoriale à l’échelon régional.
Pour notre part, nous sommes convaincus que le concept de pôles de compétitivité, concentrant toutes les richesses et aspirant l’essentiel des financements publics, va également contribuer à assécher les autres territoires.
M. Bernard Vera. Monsieur le ministre, je m’exprime devant vous en tant que parlementaire essonnien. Je ne suis pas lié aux départements auxquels vous avez fait référence !
M. Bernard Vera. Par ailleurs, le schéma de transports pose un double problème. Outre qu’il est injuste dans son financement pour les collectivités territoriales, il porte gravement atteinte à la démocratie locale. En effet, les communes qui ne signeront pas de contrat de développement territorial perdront toute maîtrise de l’aménagement dans un périmètre de 400 mètres autour de leur gare, alors que, dans le même temps, elles participeront au financement du réseau !
En conclusion, monsieur le ministre, la loi relative au Grand Paris ne fera qu’accentuer les inégalités territoriales, comme le fera d’ailleurs, à l’échelle nationale, la loi de réforme des collectivités territoriales.
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, à partir de 1970, l’éclatement des universités et la délocalisation de pôles universitaires à Marne-la-Vallée, Évry et Palaiseau n’a pas eu d’impact positif en termes d’attractivité parisienne, en partie à cause de leur très mauvaise desserte par les transports.
Comme cela a été rappelé dans le protocole d’accord du 26 janvier dernier, le pôle scientifique de Saclay ne pourra être attractif que s’il est relié à Paris en moins de trente minutes.
Malgré la réticence du conseil régional sur ce point, pourrais-je avoir l’assurance, monsieur le ministre, que le Gouvernement maintiendra fermement sa position de desserte du plateau de Saclay par le métro automatique ?
En outre, il semblerait que le Gouvernement veuille financer les opérations sur ce plateau par la vente des établissements parisiens transférés à Saclay, notamment l’École des mines, la Maison des sciences de l’homme, l’École nationale supérieure des télécommunications et l’Institut national de la recherche agronomique.
Vous le savez bien, monsieur le ministre, aujourd'hui, un certain nombre d’universités parisiennes sont devenues en quelque sorte des marques dont l’attractivité est aussi liée à leur situation géographique au cœur de la cité.
Déshabiller Paris au profit de Saclay, nous ne pouvons l’accepter ! C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit maintenue dans les bâtiments susvisés une activité universitaire et de recherche complémentaire à celle de Saclay. Cette demande est d’ailleurs également formulée par plusieurs universités parisiennes, la Ville de Paris et l’opposition parisienne, dont je fais partie.
Pouvez-vous me garantir que le Gouvernement ne s’opposera pas à de tels projets ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Maurice Leroy, ministre. Monsieur le sénateur, je veux vous répondre de la façon la plus claire possible : dans le protocole conclu entre l’État et la région d’Île-de-France est effectivement prévue la desserte de Massy, Saclay, Saint-Quentin-en-Yvelines et Versailles par un métro automatique qui respectera la zone de protection naturelle agricole et forestière. Comme vous l’avez très bien indiqué, il est indispensable de relier le pôle scientifique au centre de la capitale en trente minutes, ce que permettra cet ouvrage.
Le développement du plateau de Saclay est une condition essentielle du renforcement de l’attractivité de la région capitale, aspect auquel je vous sais particulièrement sensible en votre qualité d’élu parisien.
Les investissements du plan Campus et du grand emprunt portés par Valérie Pécresse et René Ricol sont les éléments déclencheurs d’un projet d’aménagement et de développement.
Pour ce qui concerne l’immobilier universitaire parisien, les mouvements actuels et les nouvelles opérations réalisés sur le campus Paris-Rive Gauche sur le bâtiment Condorcet ou, plus largement, dans le cadre du schéma directeur, fruit du travail de Bernard Larrouturou, donnent l’occasion de dynamiser, de fortifier les implantations universitaires et d’enseignement supérieur du cœur de la métropole.
Ainsi est bien visé un projet de développement conjoint du plateau de Saclay et de l’enseignement supérieur du cœur de la capitale. Les premiers résultats des opérations d’investissement d’avenir en attestent.
M. Yves Pozzo di Borgo. Vous ne répondez pas à ma question, monsieur le ministre !
M. Maurice Leroy, ministre. Je tiens à vous rassurer, monsieur le sénateur : il s’agit non pas de déshabiller les universités parisiennes au profit du plateau de Saclay, mais, grâce à un pôle d’enseignement, de recherche et développement fort sur celui-ci, de conforter l’attractivité de la région capitale.
Il est vraiment temps de mener à bien ce projet, qui est loin d’être nouveau – on en parle depuis le général de Gaulle ! – mais qui n’a jamais vu le jour.
M. Yves Pozzo di Borgo. Vous n’avez pas répondu à ma question !
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour la réplique.
Mme Catherine Morin-Desailly. L’ambition du Grand Paris est aussi de relier la capitale à sa façade maritime et de faire du Havre le grand port de Paris. Mais n’oublions pas Rouen, dont les résultats du port sont parmi les meilleurs.
Comme je l’ai déjà dit à vos prédécesseurs, monsieur le ministre, la réussite de ce projet du Grand Paris ne peut se concevoir qu’en concomitance avec une autre ambition incontournable, celle qui concerne le territoire normand.
Le Grand Paris ne saurait se résumer à un corridor qui acheminerait les marchandises et les savoirs vers la mer, autour de l’axe Seine. Comme le comité Duport l’a démontré à travers les scenarii envisagés pour la nouvelle ligne Paris-Normandie voulue par le Président de la République, c’est, bien entendu, à l’échelon transrégional que nous devrons travailler, c'est-à-dire avec l’Île-de-France et les deux Normandie.
C’est aussi à ce niveau que devra être conçue la politique d’aménagement du territoire nécessaire à la réalisation du Grand Paris. Elle prendra en compte le potentiel de la région dont je suis l’élue, lequel se décline en termes de développement industriel, logistique, universitaire et économique, dans le respect des grands équilibres environnementaux et démographiques.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde. (M. Yvon Collin applaudit.)
Mme Françoise Laborde. Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur les raisons qui m’ont poussée, tout comme la majorité des membres du groupe RDSE, à voter contre la loi relative au Grand Paris. La principale d’entre elles était l’instrumentalisation du débat à des fins politiciennes par le Président de la République.
Que de temps perdu depuis le schéma directeur de la région Île-de-France de 2008 ! Trois ministres, une loi et une Commission nationale du débat public plus tard, force est de constater que la principale avancée du Gouvernement pour le Grand Paris est d’avoir considérablement retardé les travaux programmés par la région d’Île-de-France !
Selon moi, l’objectif fondamental du Grand Paris est d’améliorer les conditions de vie des habitants et le lien social entre les populations. C’est pourquoi, si j’en avais le temps, monsieur le ministre, je vous demanderais comment vous comptez éviter de reproduire, sous une autre forme, les erreurs commises dans les années soixante-dix en matière d’urbanisme au seul bénéfice des promoteurs immobiliers.
Je vous demanderais aussi de réintroduire des services publics de proximité, afin de désenclaver les quartiers sensibles et de les rendre attractifs.
Enfin, je pourrais vous demander que soit équitablement réparti l’effort de financement, afin d’éviter que les tarifs ou la fiscalité locale des ménages franciliens ne subissent une hausse exponentielle.
Ce que j’attends de vous aujourd’hui, c’est que vous preniez des engagements pour qu’un effort supplémentaire soit consacré au volet intermodalité, en ce qui concerne d’une part, les réseaux de transport franciliens et, d’autre part, leur interconnexion avec les grandes lignes nationales de train pour que vive la province.
Le réseau de transports est, d’abord, un ciment social. Il ne se réduit pas à une simple passerelle entre les bassins d’emploi. C’est à ce prix, et à ce prix seulement, que le projet du Grand Paris apportera une valeur ajoutée à la région et sera un instrument de lutte contre les inégalités sociales
Monsieur le ministre, la Commission nationale du débat public rend son rapport jeudi. J’ose espérer que les questions que nous soulevons aujourd’hui auront leur place dans le schéma directeur. Les bonnes intentions ne suffisent pas. Les Franciliens attendent des actes ! (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Maurice Leroy, ministre. Je me réjouis qu’une sénatrice de Haute-Garonne prenne part au débat sur le Grand Paris.
M. Jean-Pierre Plancade. C’est facile !
M. Jean-Pierre Sueur. C’est normal ! Nous sommes des représentants de la nation, monsieur le ministre !
M. Maurice Leroy, ministre. Ne vous fâchez pas, monsieur Sueur ! J’allais dire que je me félicite également de cette participation. Moi-même élu d’un département qui n’est pas francilien, comment ferais-je un tel procès ?
M. Jean-Pierre Plancade. Très bien !
M. Maurice Leroy, ministre. Ne me prenez pas à contre-courant, alors que je me réjouis de voir la dimension de ce débat ! Vous devriez plutôt m’applaudir !
En effet, le Grand Paris n’est pas l’affaire exclusive des Parisiens et des Franciliens !
Mme Françoise Laborde. C’est vrai !
M. Maurice Leroy, ministre. Cela étant, vous n’en serez pas surprise, madame Laborde, je ne partage pas l’ensemble de votre propos.
Oui, les urbanistes ont commis des erreurs ! D’ailleurs, même sans être spécialiste des questions de politique de la ville, en général, lorsque, lors de la visite d’une cité qui, à l’origine, devait être de transit, on demande au maire – quelle que soit sa sensibilité politique – qui l’a conçue, on ne se trompe jamais en supposant que c’est un grand prix de Rome ! Il en va malheureusement ainsi. Et je vous ferai grâce de l’idéologie qui a inspiré ces grandes barres qui devaient rendre la vie meilleure… On sait ce qu’il en a été !
Madame la sénatrice, si nous avons prévu dans la loi relative au Grand Paris les contrats de développement territorial, c’est précisément pour éviter de reproduire ces erreurs. Ces contrats sont élaborés en parfaite harmonie et concertation entre les services de l’État et les collectivités territoriales concernés. Il s’agit donc d’un véritable partenariat. Quelles que soient nos sensibilités, réjouissons-nous que nous nous dotions de tels outils d’urbanisme.
Quant au schéma directeur de la région Île-de-France, je me réjouis que nous nous retrouvions demain dans cette enceinte, dans le cadre de l’ordre du jour réservé au groupe socialiste, pour débattre de la proposition de loi visant à faciliter la mise en chantier des projets des collectivités locales d’Île-de-France. À partir de l’excellent travail réalisé notamment par Dominique Braye, rapporteur de ce texte, nous essaierons, tous ensemble, majorité sénatoriale et opposition, de régler les problèmes rencontrés actuellement par les projets bloqués dans le SDRIF. J’avais pris cet engagement devant le président Huchon. Nous allons le tenir ensemble, mesdames, messieurs les sénateurs. Réjouissons-nous ! Tirons les leçons de toutes les expériences !
Quant au financement, il est parfaitement équilibré : 10 milliards d’euros seront à la charge de l’État – je réponds ainsi à Bernard Vera – et 11 milliards d’euros à celle des collectivités territoriales. Le contribuable ne devrait pas être excessivement sollicité. Vous devriez plutôt être rassurée par cette réponse, madame la sénatrice.