M. le président. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 605, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :
I.- Alinéa 3 de l'amendement n° 416
Remplacer les mots :
du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013
par les mots :
du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2014
II.- Alinéa 4 de l'amendement n° 416
Remplacer les mots :
arrêté du ministre en charge de la santé
par les mots :
décret en Conseil d'Etat
et les mots :
de mise en œuvre et d'évaluation
par les mots :
de leur mise en œuvre et de leur évaluation
Quel est l’avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur. Il est favorable.
M. le président. M. Fischer doit se réjouir du retour de Mme Bachelot ! (Sourires.)
M. Guy Fischer. Nous sommes comblés…
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale, après l’article 55.
5
Nomination de membres d'une éventuelle commission mixte paritaire
M. le président. Pour le cas où le Gouvernement déciderait de provoquer la réunion d’une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, il va être procédé à la nomination des membres de cette commission mixte paritaire.
La liste des candidats a été affichée ; je n’ai reçu aucune opposition dans le délai d’une heure prévu par l’article 12 du règlement.
En conséquence, cette liste est ratifiée et je proclame représentants du Sénat à cette éventuelle commission mixte paritaire :
Titulaires : Mme Muguette Dini, M. Alain Vasselle, M. Gérard Dériot, M. André Lardeux, M. Bernard Cazeau, M. René Teulade et M. Guy Fischer ;
Suppléants : M. François Autain, Mme Sylvie Desmarescaux, M. Jean-Jacques Jégou, M. Ronan Kerdraon, M. Dominique Leclerc, Mme Raymonde Texier et M. Alain Milon.
Cette nomination prendra effet si M. le Premier ministre décide de provoquer la réunion de cette commission mixte paritaire et dès que M. le Président du Sénat en aura été informé.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures vingt-cinq, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Jean-Léonce Dupont.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
6
Financement de la sécurité sociale pour 2011
Suite de la discussion et adoption d'un projet de loi
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2011.
Nous poursuivons l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 55.
Articles additionnels après l'article 55
(suite)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 125, présenté par Mmes Campion et Demontès, MM. Cazeau et Daudigny, Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, M. Desessard, Mmes Alquier, Printz et Schillinger, MM. Le Menn, Kerdraon, Godefroy, Jeannerot, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 226-13 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 226-14 ainsi rédigé :
« Art. L. 226-14. - I. - Le Fonds national de financement de la protection de l'enfance est institué au sein de la Caisse nationale des allocations familiales. Son objet est de compenser les charges résultant pour les départements de la mise en œuvre de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, selon des critères nationaux et des modalités fixés par décret, et de favoriser des actions entrant dans le cadre de la réforme de la protection de l'enfance et définies par voie conventionnelle entre le fonds et ses bénéficiaires.
« II. - Les ressources du fonds sont constituées par :
« 1° Un versement de la Caisse nationale des allocations familiales, dont le montant est arrêté chaque année en loi de financement de la sécurité sociale ;
« 2° Un versement annuel de l'État, dont le montant est arrêté chaque année en loi de finances.
« III. - Le fonds est administré par un comité de gestion associant des représentants de la Caisse nationale des allocations familiales, des représentants des départements et de l'État, selon des modalités fixées par décret. Par une délibération annuelle, il se prononce sur l'opportunité de moduler les critères de répartition du fonds définis au I. »
II. - Le IV de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance est abrogé.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. Trois ans après la réforme du 5 mars 2007 relative à la protection de l’enfance, le décret créant le Fonds national de financement de la protection de l’enfance est enfin sorti.
Cette publication in extremis, à la suite d’une injonction du Conseil d’État, a fait l’objet de deux avis défavorables, tant du Comité des finances locales que de la Commission consultative d’évaluation des normes. Deux avis négatifs, car le compte n’y est toujours pas ! Le décret ne répond aucunement à l’esprit de la loi.
Ce fonds n’a pas vocation à compenser les désengagements financiers de l’État en matière d’aide à la parentalité, de soutien aux familles vulnérables ! Son objet, pourtant très explicite dans l’article 27 de la loi réformant à la protection de l’enfance, vise uniquement à compenser les départements des charges de la réforme de la protection de l’enfance, induites par les nouvelles mesures issues de ce texte. Or le décret tel qu’il est rédigé prévoit que le Fonds comprend deux enveloppes distinctes : une première qui compense les charges de la réforme pour les départements, et une seconde destinée aux crédits de soutien, y compris à caractère expérimental, en matière d’aide à la parentalité, de soutien aux familles vulnérables, ou de financement de ses têtes de réseaux nationaux.
Ces actions ont jusqu’ici été soutenues par l’État, dans le cadre des réseaux d’écoute, d’appui et d’accompagnement des parents, par exemple.
Les montants prévus pour abonder le Fonds aujourd’hui apparaissent bien dérisoires au regard des charges imposées aux départements, qui croulent sous le financement obligé des allocations individuelles de solidarité, comme l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, la prestation de compensation du handicap, la PCH, ou le revenu de solidarité active, le RSA.
Le 15 juillet 2010, seulement 30 millions d’euros provisionnés par la CNAF ont été répartis, à raison de 10 millions d’euros par an d’ici à 2012, entre les départements et l’État, respectivement à hauteur de 70 % et de 30 %. C’est bien dérisoire compte tenu des investissements déjà engagés par les départements et de l’estimation de 150 millions d’euros sur trois ans contenue dans la loi. De plus, rien n’a été inscrit dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. Qu’en est-il, par ailleurs, de la participation de l’État ?
Devant tant d’incertitudes, notre amendement a donc pour objet de consacrer dans le code de l’action sociale et des familles l’existence de ce fonds et de revenir à l’esprit de la loi en précisant l’alimentation du Fonds et la répartition des sommes allouées entre les départements et l’État.
M. le président. L’amendement n° 472 rectifié, présenté par MM. Collin, Alfonsi et Baylet, Mme Escoffier, M. Fortassin, Mme Laborde et MM. Mézard, Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le chapitre VI du Titre II du livre II du code de l'action sociale et des familles est complété par un article L. 226-14 comprenant les I à III de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance.
II. - À la seconde phrase du I de l'article L. 226-14 du même code, tel qu'il résulte du I du présent article, les mots : « de la présente loi », sont remplacés par les mots : « de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ».
III. - Aux deuxième et troisième alinéas du II de l'article L. 226-14 du même code, tel qu'il résulte du I du présent article, après les mots : « est arrêté », sont insérés les mots : « chaque année ».
IV. - L'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Je souhaite insister sur les difficultés financières des départements, qui pèsent sur leur capacité à assurer leur mission de protection de l’enfance.
Le Fonds national de financement de la protection de l’enfance ne doit pas servir de variable d’ajustement pour combler les désengagements de l’État, comme l’aide à la parentalité, la médiation familiale ou le conseil conjugal.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 172 est présenté par MM. Daudigny et Le Menn, Mmes Jarraud-Vergnolle et Demontès, M. Cazeau, Mme Le Texier, M. Desessard, Mmes Alquier, Campion, Printz et Schillinger, MM. Kerdraon, Godefroy, Jeannerot, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 193 rectifié est présenté par MM. Doligé, Pinton, du Luart, de Montgolfier, Leroy et Huré.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le chapitre VI du Titre II du livre II du code de l'action sociale et des familles est complété par un article L. 226-14 comprenant les I à III de l'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance.
II. - À la seconde phrase du I de l'article L. 226-14 du même code tel qu'il résulte du I du présent article, les mots : « de la présente loi », sont remplacés par les mots : « de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance ».
III. - L'article 27 de la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 précitée est abrogé.
La parole est à M. Jacky Le Menn, pour présenter l’amendement n° 172.
M. Jacky Le Menn. Il est défendu.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour présenter l’amendement n° 193 rectifié.
M. Albéric de Montgolfier. Il s’agit tout simplement de codifier, dans le code de l’action sociale et des familles, la création du Fonds national de financement de la protection de l’enfance, ce qui montrerait la volonté de pérenniser ce fonds. Cette codification trouve évidemment sa place dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Ces amendements visent à consacrer l’existence du Fonds national de financement de la protection de l’enfance, qui avait été créé par la loi du 5 mars 2007 et devait être alimenté par deux contributions, l’une provenant de la CNAF et l’autre de l’État.
De nombreuses difficultés sont apparues pour mettre en place ce fonds, et les premiers financements ont été accordés seulement cette année. Les départements estiment que leur manque à gagner est considérable : on peut discuter de son ampleur de ce manque, mais il est indéniable…
Je souhaite que nous profitions de l’examen de ces amendements pour faire un point sur les intentions de l’État et de la CNAF concernant le Fonds. Permettez-moi donc, madame la ministre, de vous poser quelques questions.
Quel est le coût annuel, pour les départements, de cette loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance ? Quelles sont les intentions de l’État et de la CNAF pour abonder ce fonds ? Je sais bien que ce n’est pas l’objet des amendements nos°172 et n° 193 rectifié, qui ne changent rien à l’état du droit existant. Simplement, la codification consolide en principe ce droit.
En attendant la réponse de Mme la ministre, la commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur ces quatre amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des solidarités et de la cohésion sociale. M. le rapporteur a rappelé, à juste titre, que la loi du 5 mars 2007 avait institué ce fonds, destiné à financer des actions menées par les départements en application de cette loi et à développer des démarches innovantes pour accompagner la parentalité.
Ces amendements sont à l’évidence des cavaliers. Ils ont un coût, mais ils ne prévoient pas le montant du versement annuel au Fonds. Si cet article 27 n’a pas été codifié en 2007, c’est bien parce qu’il s’agissait d’une mesure d’accompagnement de la loi.
Aujourd’hui, sa mise en œuvre est en fait assurée depuis la parution – récente, je l’avoue ! – du décret du 17 mai 2010. Le Fonds a donc été doté de 30 millions d’euros versés par la CNAF. Le versement des crédits est prévu sur trois ans, soit trois fois dix millions d’euros. Il permettra d’aider les départements à finaliser la mise en place de ces nouveaux dispositifs, en l’occurrence une cellule et un observatoire, et donc à développer des actions innovantes.
Le comité de gestion du Fonds, qui a été installé cet été – là encore, c’est récent, je le reconnais ! –, a procédé à une répartition des crédits pour trois ans. Le financement est donc assuré jusqu’en 2012, et il n’est pas utile de fixer des axes d’intervention pour 2013.
C’est la raison pour laquelle je sollicite le retrait de ces amendements ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Madame Campion, l’amendement n° 125 est-il maintenu ?
Mme Claire-Lise Campion. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Laborde, l’amendement n° 472 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Le Menn, l’amendement n° 172 est-il maintenu ?
M. Jacky Le Menn. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur de Montgolfier, l’amendement n° 193 rectifié est-il maintenu ?
M. Albéric de Montgolfier. Non, monsieur le président, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 193 rectifié est retiré.
La parole est à M. André Lardeux, rapporteur.
M. André Lardeux, rapporteur. J’ai bien noté la réponse de Mme le ministre : si j’ai bien compris, contrairement aux termes de la loi de 2007, l’État ne participe plus au financement du Fonds ; seule la CNAF y contribue.
M. André Lardeux, rapporteur. Je connais les contraintes budgétaires de l’État. J’espère toutefois ce n’est pas une position de principe selon laquelle l’État ne soutiendrait plus jamais le Fonds.
M. Guy Fischer. Vous y croyez ?
M. André Lardeux, rapporteur. Cela étant dit, je me rallie à l’avis du Gouvernement.
M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote sur l’amendement n° 125.
Mme Claire-Lise Campion. La question se pose de la participation de l’État, évoquée par le rapporteur, et du montant des crédits qui doivent abonder le Fonds. Mme la ministre vient de rappeler que 30 millions d’euros seraient versés sur trois ans, c’est-à-dire 10 millions par an. Nous sommes loin du compte et de l’évaluation faite, ici même, lors de l’examen de la loi du 5 mars 2007 !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 126, présenté par Mmes Campion et Demontès, MM. Cazeau et Daudigny, Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, M. Desessard, Mmes Alquier, Printz et Schillinger, MM. Le Menn, Kerdraon, Godefroy, Jeannerot, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement avant le 31 mars 2011 un rapport établissant le nombre de places manquantes à l'accueil de la petite enfance sur le territoire national et présentant les modalités de la mise en place d'un service public national de la petite enfance.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Mme Claire-Lise Campion. L’insuffisance de places destinées à la petite enfance constitue un frein au travail des parents, et le plus souvent de la mère. D’après les estimations qui ont été faites soit par nos collègues, soit par la Cour des comptes ou le Haut conseil à la famille, sur les 800 000 naissances chaque année en France, le taux de couverture d’accueil des jeunes enfants est de 47 places pour 100 enfants.
Un tiers des femmes qui se sont arrêtées de travailler à la naissance de leur enfant évoquent des raisons liées aux modes de garde. On peut donc estimer que, pour 17 % des enfants, un problème d’accueil existe réellement, soit que l’offre est insuffisante, soit qu’elle n’est pas adaptée.
Au plan national, l’estimation des besoins non couverts est délicate – le Haut conseil de la famille l’a d’ailleurs signalé lors de ses travaux sur le sujet ! – et conduit à des chiffres assez éloignés les uns des autres selon les conventions retenues. Une majorité de documents écrits convergent actuellement vers un chiffre : les besoins non couverts seraient d’environ 350 000 places.
Ce chiffre peut être considéré comme sous-évalué, ou au contraire surévalué, en fonction des conventions de calcul retenues. Ces estimations intègrent un « besoin latent », celui des familles qui optent pour le complément libre choix d’activité, faute d’un mode de garde qui corresponde à leurs souhaits.
Il est donc nécessaire d’acquérir une meilleure connaissance, à l’échelle globale et par territoires, des besoins et de l’offre. Elle permettrait en 2012, lors de l’établissement de la nouvelle convention d’objectifs et de gestion, la COG, de déterminer avec plus de pertinence une référence centrale de progression de l’offre de garde à l’horizon 2015.
Ces interrogations appellent des réponses d’autant plus précises que le Gouvernement va, cette année encore, procéder à de nouvelles suppressions de postes dans le budget de l’enseignement scolaire, que la scolarité dès l’âge de deux ans est de plus en plus menacée, que les charges incombant aux collectivités territoriales augmentent sans cesse davantage, et qu’un nombre croissant de familles se trouve dans une situation financière extrêmement précaire.
Dans son rapport de 2008 sur l’application de la loi de financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes dénonçait déjà une « évolution peu cohérente au regard de la bonne utilisation de l’argent public » des deniers consacrés à la garde des jeunes enfants.
Elle opposait ainsi le coût par enfant de 13 368 euros pour la prestation d’accueil du jeune enfant à celui de 4 570 euros pour l’accueil en école maternelle.
En ce qui concerne la scolarisation des enfants de deux ans, la Cour adressait ce rappel au Gouvernement : « Quelles que soient les motivations, pédagogiques ou financières, ayant conduit le ministère de l’éducation nationale à se désengager de la scolarisation des enfants de deux ans, il conviendrait que les objectifs de l’État soient clairement explicités et que les différents acteurs concernés par la garde des jeunes enfants – éducation nationale, Caisse nationale d’allocations familiales, collectivités territoriales – déterminent conjointement, sous la coordination de l’État, les besoins pour l’avenir et des réponses à apporter. » Il est donc nécessaire de connaître avec précision le besoin en offre de places d’accueil, lesquelles sont essentielles pour permettre aux parents de concilier au mieux vie professionnelle et vie familiale.
Favoriser le retour à l’emploi pour les parents qui le souhaitent et qui ont interrompu leur carrière professionnelle pour élever leurs enfants doit être une priorité, car ce retour à l’emploi contribuera à réduire les inégalités pointées, tant sur le montant des retraites que sur l’âge de la liquidation des droits à la retraite.
M. le président. L’amendement n° 265, présenté par Mme Pasquet, M. Fischer, Mme David, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 55, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement présente au Parlement, avant le 31 décembre 2011, un rapport établissant le bilan des places manquantes à l'accueil de la petite enfance sur le territoire français et présentant l'opportunité de la mise en place d'un grand service public national de la petite enfance.
La parole est à M. Guy Fischer.
M. Guy Fischer. Notre pays, madame la ministre, connaît actuellement une véritable pénurie en matière de structures publiques d’accueil de la petite enfance. En effet, alors que l’on compte près de 800 000 naissances chaque année en France, seulement 13 % des enfants âgés de moins de trois ans sont accueillis en structures d’accueil : crèches collectives ou familiales, multi-accueil, etc. Michèle Tabarot, auteur d’un rapport remis en juillet 2008 au Premier ministre, tout comme le pédopsychiatre Patrick Ben Soussan, auteur du Livre noir de l’accueil de la petite enfance, estiment qu’il manque ainsi 320 000 places.
Cette insuffisance de places destinées à l’accueil de la petite enfance constitue un frein au travail des parents, principalement à celui des femmes qui, faute de trouver des solutions supportables sur le plan économique, sont souvent contraintes de cesser leur activité pour garder leurs enfants.
Cela oblige les femmes qui, pour des raisons culturelles, s’occupent encore majoritairement des enfants, à réduire leur activité ou à se retirer de la vie professionnelle, ce qui entraîne d’importantes répercussions sur leurs droits à retraite et leurs niveaux de pensions.
En lieu et place de la création de places de crèches répondant aux attentes de toutes les familles, notamment les plus modestes, qui bénéficient de l’application de tarifs sociaux, vous avez fait le choix de la réduction des dépenses, de la dérégulation et de la dégradation des dispositifs existants pour l’accueil des jeunes enfants. Disant cela, je vise, par exemple, le décret n° 2010-613 du 7 juin 2010 relatif aux établissements et services d’accueil des enfants de moins de six ans, qui a revu à la hausse les normes d’encadrement dans les établissements d’accueil collectif tout en diminuant la part des personnels qualifiés.
Mais je vise aussi la loi n° 2010-625 du 9 juin 2010 autorisant la création de maisons d’assistants maternels dans lesquelles des professionnels peu qualifiés pourront accueillir jusqu’à seize enfants, sans qu’aucune règle de fonctionnement n’ait été prévue. À cela, il convient d’ajouter la dérégulation précédente, qui avait déjà porté de trois à quatre le nombre d’enfants pouvant être accueillis par un assistant maternel.
À l’inverse de votre politique, qui marque le désengagement progressif de l’État et le transfert des compétences vers des collectivités territoriales exsangues sur le plan financier, nous proposons, pour notre part, la mise en place d’un grand service public national de la petite enfance.
En quinze ans, ce dispositif ambitieux, mais réaliste, permettrait la création d’un million de places d’accueil pour la petite enfance, avec une gratuité pour les familles à bas revenus et l’application de tarifs sociaux ou adaptés aux revenus des familles. Nous estimons le coût de cette mesure à 12 milliards d’euros par an, qui seraient répartis entre l’État, les collectivités locales, la CAF, les entreprises et les familles payantes.
Cette politique induirait naturellement la création d’établissements et aurait pour conséquence positive de participer au soutien de la construction immobilière, ainsi qu’à la revitalisation de certains territoires. Elle permettrait aussi de créer 150 000 emplois, tout en améliorant significativement les conditions de vie et de travail des femmes qui sont actuellement contraintes à des temps partiels en raison de l’impossibilité de trouver un mode de garde pour leurs enfants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. André Lardeux, rapporteur. J’ai déjà eu l’occasion de dire ce que je pensais des rapports, mais, après les travaux conduits par l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, en 2009 et par la députée Michèle Tabarot en 2008, laquelle estimait qu’il manquait entre 300 000 et 400 000 places au 1er janvier 2007, celui que proposent les auteurs de ces amendements me semble encore moins nécessaire que d’autres.
Étant donné que 100 000 places environ ont été créées depuis cette date, on peut donc estimer les besoins entre 200 000 et 300 000 places.
Je constate que M. Fischer a largement cité ces écrits. Je ne pense donc pas qu’un rapport supplémentaire soit utile, d’autant que la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES, publie également des données qui détaillent les besoins par département.
Je ferai également deux autres remarques.
Tout d’abord, M. Fischer parle de créer un service public national de la petite enfance. Personnellement, j’éprouve toujours quelques réticences face à ce genre d’initiative, qui s’apparente finalement à une étatisation du système.
Ensuite, je n’ai pas très bien compris pourquoi M. Fischer voulait créer un million de places de garde. Étant donné qu’il n’en manque que 300 000, selon les hypothèses les plus pessimistes, que va-t-on faire des 700 000 restantes ?
M. Guy Fischer. Tous les besoins n’ont sans doute pas été recensés ! (Sourires.)
M. André Lardeux, rapporteur. Pour l’ensemble de ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les places que propose de créer M. Fischer serviraient peut-être à accueillir les personnes âgées qui retombent en enfance, car nous avons un gros problème de dépendance dans ce pays ! (Nouveaux sourires.)
Je partage évidemment l’avis de M. le rapporteur. Il est d’ailleurs paradoxal que, pour justifier sa demande de rapport, l’orateur se soit appuyé sur les nombreux rapports qui étayaient son argumentation, détruisant par là même la validité de l’amendement qu’il avait déposé…
Le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.