M. Jean-Jacques Mirassou. Forcément ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste.)

M. Martial Bourquin. Vous êtes là pour ça, monsieur le ministre !

M. Bruno Le Maire, ministre. Je dis bien : rien ! Et vous le savez aussi bien que moi.

Je tiens également à préciser que, pour ma part, je ne me satisfais pas de la situation actuelle.

Bien sûr, les cours remontent et les perspectives paraissent plutôt positives pour la production laitière en 2010, mais il me semble que c’est justement le moment adéquat pour sécuriser le revenu des producteurs de lait, mettre en place des contrats, renforcer le pouvoir des producteurs de manière générale.

C’est le moment de demander la modification du droit de la concurrence européen pour que l’on ne soit plus obligé de restreindre à 300 ou 400 producteurs la capacité de négociation face à des industriels comme Lactalis ou Danone et pour que les fournisseurs soient tous capables de négocier seuls avec l’industriel concerné. C’est bien le travail que nous engageons.

Ce n’est pas parce que la situation s’améliore qu’il faut renoncer à introduire des changements ; c’est au contraire à ce moment précis qu’il faut engager les réformes, et c’est ce que nous essayons de faire.

S’agissant des quotas laitiers, je développerai deux idées qui vont peut-être vous surprendre, mais qui s’appuient également sur des faits.

C’est en 1999, je le rappelle, que l’Union européenne a pris la décision d’abandonner les quotas. Mon prédécesseur de l’époque, M. Jean Glavany – et je rends ici justice au parti socialiste –, avait défendu l’idée du maintien des quotas. Mais il a été battu !

M. Bruno Le Maire, ministre. Du reste, je dois vous le dire, j’assume totalement le fait que nous abandonnions les quotas laitiers ; et je n’ai pas l’habitude de me cacher derrière mon petit doigt quand j’assume une décision ! En effet, les quotas laitiers, nous les avons connus… et nous avons subi la crise laitière la plus grave en dix ans ! C’est bien la preuve que les quotas ne constituent pas la réponse au problème de la production laitière en Europe.

J’assume également cette décision parce que l’Européen convaincu que je suis ne pense pas que les quotas soient défendables auprès des autres pays de l’Union. Allez donc expliquer aux Suédois qu’ils n’ont pas le droit de produire plus de 1 000 ou 2 000 Saab par an sous prétexte que leur pays est moins peuplé que d’autres ! Or c’est la logique des quotas : vous êtes un petit pays, vous produisez peu de lait ; vous êtes un grand pays, vous produisez beaucoup de lait.

Une telle argumentation est indéfendable aujourd’hui en Europe. Si le ministre de l’agriculture s’était amusé à faire preuve de populisme en disant qu’il allait continuer à défendre les quotas laitiers, il aurait certainement été plus populaire, mais il aurait tout aussi certainement été battu ! Je préfère défendre la régulation du marché du lait, l’application de nouveaux instruments rendant possible des évolutions, que rester attaché à des instruments anciens comme les quotas laitiers.

Monsieur Bel, vous regrettez que le projet de loi ne propose pas d’outils nouveaux. Permettez-moi de vous dire que votre argumentation est un peu contradictoire ! En effet, vous reprochez à la fois à ce projet à la fois d’aller trop loin sur certains sujets, d’être trop audacieux, et de ne pas fournir d’outils nouveaux et concrets !

Je ne dresserai pas ici la liste de tous ceux que le projet contient, mais permettez-moi d’en citer quelques-uns. La réassurance publique, c’est nouveau et c’est concret ! Tous les gouvernements, droite et gauche confondues, ont voulu mettre sur pied la réassurance publique dans l’agriculture ; aucun n’y est parvenu. J’espère sincèrement que vous voterez la disposition qui s’y rapporte, car cette mesure me paraît dépasser de loin les clivages entre droite et gauche.

Par ailleurs, je suis évidemment favorable à la taxation de la spéculation foncière – c’est concret ! – et je souhaite que le produit de cette taxe soit affecté à l’installation des jeunes agriculteurs, sujet dont vous vous souciez raison, monsieur Bel.

Les contrats systématiques, l’assurance forêt, la réduction des marges en période de crise, la suppression des remises, rabais et ristournes : autant de mesures concrètes ! La modification des règles du code des marchés publics pour favoriser les circuits – c’est d’ailleurs une proposition que le groupe socialiste a faite et que je soutiens totalement –, c’est encore une disposition très concrète !

Sur le bio non plus, on ne peut pas dire que nous ne faisons rien ! Chaque jour, en France, grâce aux mesures fiscales mises en place par le Gouvernement, ce sont dix nouvelles installations en bio qu’on enregistre. La filière connaît une ascension fulgurante, même si elle continue de ne représenter qu’une part très marginale de la production.

Tout cela – et je pourrais multiplier les exemples dans le même sens – pour vous dire que ce projet de loi peut se voir opposer tous les reproches possibles, sauf celui de manquer de dispositions concrètes !

Quant à la philosophie générale que nous défendons au travers de ce texte, croyez-le bien, elle n’est en rien celle de la libéralisation et de la dérégulation ; telle n’est d’ailleurs pas ma vision de l’action politique. Ce que nous prônons, c’est la responsabilité : celle de l’État, au travers du mécanisme de la réassurance publique et de la possibilité qui lui est offerte d’être assureur en dernier recours ; celle des agriculteurs, pour qu’ils se dotent des instruments leur permettant de faire face à la crise.

Sur l’alimentation, je rejoins vos propos. Nous avons fixé un cadre général et annoncé une politique publique de l’alimentation. Toutes les propositions de nature à en favoriser la mise en place seront les bienvenues.

J’en viens maintenant aux perspectives de long terme et aux négociations internationales. Bien entendu, celles-ci sortent du cadre du présent projet de loi puisqu’elles se jouent à une autre échelle et en d’autres lieux. Mais je tiens tout de même, là aussi, à rappeler certains faits.

La Commission européenne a déposé au mois de novembre dernier un projet de texte visant à réduire de 40 % le budget de la politique agricole commune. Quel est l’État qui a su réagir, rassembler ses partenaires et lancer, dès le mois de décembre, l’Appel de Paris pour refuser une telle réduction ? C’est la France ! Voilà des faits tangibles, et non des affirmations en l’air !

Le gouvernement français a fait de même sur la régulation européenne des marchés agricoles. Lorsque j’en ai parlé en août, tous mes homologues m’ont regardé comme si j’étais un martien prônant un retour à l’orthodoxie marxiste ! (Sourires.) Or que constatons-nous aujourd'hui ? Le commissaire européen Dacian Cioloş prépare un projet de texte européen intitulé « Régulation européenne du marché du lait ». Voilà donc que ce terme de « régulation », encore tabou il y a six mois à peine, commence à se diffuser au sein des autres États européens… Certes, je le reconnais, la bataille n’est pas encore gagnée, mais il faut continuer de la livrer, même si les résistances sont très fortes.

Au fond, deux modèles totalement différents s’affrontent en Europe, et je peux vous garantir que nous ne sommes pas du côté des tenants la libéralisation à outrance et la dérégulation. À entendre nos partenaires européens du Nord et de Grande-Bretagne, nous sommes au contraire perçus comme ceux qui défendent – sans doute trop à leurs yeux – la régulation et le retour à des règles de marché plus raisonnables.

Je conclurai par quelques faits, là encore, concernant l’action de la France dans les négociations à l’échelle mondiale.

Qui s’est opposé à la reprise des négociations commerciales entre l'Union européenne et le MERCOSUR ? C’est nous !

Qui a proposé, pour la première fois, de réunir les ministres de l’agriculture des pays du G20 pour introduire une certaine régulation sur le cours des matières premières ? C’est encore nous !

Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous demande de rejeter cette motion tendant à opposer la question préalable. Je le répète, il aborde ce débat dans un esprit d’ouverture totale : toutes les propositions qui permettront de compléter ce projet et de l’améliorer seront les bienvenues ! (Vifs applaudissements sur les travées de lUMP et de lUnion centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.

Mme Évelyne Didier. En présentant la motion tendant à opposer la question préalable, notre collègue Jean-Pierre Bel a largement souligné les insuffisances, les lacunes et les effets pervers potentiels du projet de loi.

En effet, tout le monde l’a souligné, le monde agricole connaît des difficultés structurelles ; de notre point de vue, le présent texte, en l’état actuel, ne permettra pas de les résoudre.

Les agriculteurs, les pêcheurs, les éleveurs le savent, c’est tout un système qu’il est nécessaire de repenser. Fondamentalement, il est plus qu’urgent de soustraire le secteur agricole aux règles de la concurrence libre et non faussée.

Lors des débats au sein de la commission de l'économie, la majorité des sénateurs qui se sont exprimés était d’accord pour défendre aux niveaux européen et international l’utilité des outils de régulation et la nécessité de garantir un revenu agricole.

Pourtant, sous la présidence française de l’Union européenne, le 20 novembre 2008, un accord politique sur le bilan de santé de la politique agricole commune a été conclu par les ministres européens de l’agriculture. Or cet accord va dans un tout autre sens.

La réforme de la PAC soutenue par les députés européens de droite et par les gouvernements s’inscrit dans une logique de dérégulation de la production et des marchés. L’Union européenne s’est engagée, rappelons-le, à ouvrir de plus en plus largement le marché européen.

Lors d’un déplacement au Brésil que j’ai effectué il n’y a pas si longtemps avec plusieurs de mes collègues de la commission, nos interlocuteurs sur place nous l’ont dit très clairement : « Arrêtez et laissez-nous le champ libre ! Pourquoi donc continuez-vous à avoir un secteur agricole ? » (M. le ministre le confirme.)

Le bilan de santé de la politique agricole commune signe l’abandon des outils de régulation du marché. De plus, le démantèlement des OCM, les organisations communes des marchés – et le cas de l’OCM viti-vinicole est significatif – ne laisse rien présager de bon.

Voilà, très brièvement résumée, l’analyse faite par notre groupe.

Par ailleurs, nous nous réjouissons des déclarations de nos collègues sénateurs de la majorité en commission et nous espérons qu’ils soutiendront une position conforme à leurs déclarations.

Nous pensons que le projet de loi ne tire aucun enseignement de la crise et de ses causes. L’agriculture souffre d’une sous-rémunération du travail paysan, car les prix ne couvrent pas les coûts de production. Face à cela, le Gouvernement se propose d’observer et de contractualiser. Or cette possibilité de contractualisation existe déjà dans la loi, y compris avec la fixation d’un prix plancher, mais elle n’a jamais été appliquée par l’interprofession et par le Gouvernement. De surcroît, elle ne suffira pas à infléchir le déséquilibre des relations commerciales. À ce jour, la concentration et la restructuration de l’offre n’ont pas réglé la question des prix agricoles.

L’agriculture souffre aussi des pertes économiques importantes liées aux aléas climatiques, qui nécessiteraient une politique publique de grande ampleur, centrée sur la solidarité. La mise en place d’un marché du risque exclut de fait les agriculteurs qui n’auront pas les moyens de payer, notamment lorsque les primes d’assurance seront trop importantes. Ce n’est pas acceptable !

Pour ce qui est de la forêt, disons pour faire bref que sa marchandisation, telle qu’elle est prévue, induit la mise en danger de la biodiversité et montre à quel point le Gouvernement a en permanence la volonté de soumettre tous les secteurs à la loi du marché.

Mon collègue Gérard Le Cam l’a dit tout à l’heure, ce projet de loi porte bien mal son titre, car il n’induit aucune modernisation. Il n’est pas à la hauteur des enjeux pour construire l’agriculture du xxie siècle.

La France doit promouvoir avec courage, pour l’après-2013, une réforme de la politique agricole commune fondée sur la souveraineté alimentaire et la préférence communautaire, dans le cadre d’un développement économique, agronomique et écologique. Il incombe à l’Europe de fixer des objectifs de rémunération du travail paysan et de développement de l’emploi. L’urgence est là pour les agriculteurs, et notre responsabilité est d’y répondre avec détermination.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voterons la motion tendant à opposer la question préalable. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. le président. La parole est à Mme Odette Herviaux, pour explication de vote.

Mme Odette Herviaux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en présentant la motion tendant à opposer la question préalable, le président de notre groupe a dressé l’inventaire de nos préoccupations quant aux problèmes que rencontre aujourd’hui le monde agricole.

Monsieur le ministre, après vous avoir écouté cet après-midi et ce soir, nous ne sommes pas loin, c’est vrai, de faire nôtres plusieurs de vos affirmations et même de partager, dans une certaine mesure, votre vision de l’agriculture. (Marques de satisfaction sur plusieurs travées de lUMP – M. Jacques Blanc applaudit.)

Mme Odette Herviaux. Cependant, à y regarder de plus près, on note une distorsion entre vos propos et le contenu du texte lui-même. C’est d’ailleurs ce qui a motivé le dépôt de cette motion.

Il y a certes les grandes idées et les principes que nous pouvons partager. Mais il y a aussi la dure réalité d’un texte qui, pour nous, ne va pas assez loin dans un grand nombre de domaines.

Disant cela, je ne remets bien entendu pas en cause le travail de la commission et des rapporteurs, lesquels ont mené de nombreuses auditions. De notre côté, nous avons aussi rencontré beaucoup de monde, mais nous n’avons pas forcément entendu les mêmes analyses.

L’un de mes collègues a tout à l’heure parlé de précipitation. C’est vrai : la procédure accélérée a été engagée sur ce projet de loi alors même qu’on en entendait parler depuis un certain temps déjà… L’urgence est telle que nous allons devoir en débattre en nous « faufilant » dans les interstices de notre ordre du jour de cette semaine et de la semaine prochaine, bref, travailler en pointillé. Or, il avait été question, au départ, d’examiner ce texte au mois de juillet, ce qui nous aurait donné un peu de temps pour approfondir la réflexion

Cela étant, monsieur le ministre, notre principale interrogation est ailleurs. Vous nous dites que vous allez vous battre pour défendre, à Bruxelles, les orientations – contractualisation, système assurantiel – fixées dans ce texte et qu’elles feront vraisemblablement partie de la future PAC.

Était-il alors opportun d’inscrire de telles notions dans une loi nationale avant que Bruxelles n’ait indiqué comment elle les entendait ? Ne serons-nous pas obligés de revenir sur ce texte ou d’en examiner un autre en vue de procéder aux adaptations nécessaires en fonction de ce qui ressortira du débat sur la future PAC ?

Vous avez par ailleurs évoqué les quotas laitiers et l’action qu’avait menée à cet égard, lorsqu’il occupait les fonctions qui sont aujourd'hui les vôtres, notre ami Jean Glavany. C’est vrai, bien qu’il se soit beaucoup battu au sein des instances communautaires, il n’a pas réussi à rassembler une majorité autour de lui. Mais j’aurais aimé que d’autres avant vous se battent de la même manière !

Je dirai enfin un mot sur les contrats. Les premiers à avoir vu le jour, ce sont bien sûr ceux qui ont fondé la coopération. Mais il y a eu aussi ces contrats passés entre les agriculteurs et la société qu’étaient les fameux CTE, et qui ont été mis en place par la gauche.

Tels sont, monsieur le ministre, les éléments de réponse que je souhaitais apporter à votre intervention.

J’invite en tout cas mes collègues à voter avec nous cette motion tendant à opposer la question préalable. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Blanc, pour explication de vote.

M. Jacques Blanc. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, quel débat surréaliste !

M. Didier Guillaume. Hyperréaliste, plutôt !

M. Jacques Blanc. Tout le monde l’a dit, nos agriculteurs vivent dans l’angoisse et attendent des réponses. Et Dieu sait si chacun d’entre nous, quelle que soit notre sensibilité politique, est conscient de la réalité du problème ! Or qu’est-ce qui nous est ici proposé par nos collègues du groupe socialiste ? Rien d’autre que de renvoyer le débat !

Excusez-moi de le souligner, monsieur le président Bel, mais, j’ai eu beau écouter attentivement, je n’ai pas entendu de la part du groupe socialiste une seule proposition concrète de substitution ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Vous n’avez pas bien écouté !

M. Jacques Blanc. Puisqu’il a été question du rôle de Bruxelles, je rappellerai ce que tout le monde sait : à partir du moment où l’on a voulu une Europe des États, le jeu fait que l’on ne peut pas tout imposer d’un coup.

Monsieur le ministre, je suis très admiratif de ce que vous avez d'ores et déjà accompli à Bruxelles. Pour connaître un peu le fonctionnement des institutions communautaires, je prétends qu’il était tout sauf évident d’obtenir l’accord de vingt-deux pays pour demander une régulation !

Il m’a été reproché tout à l’heure d’avoir fait référence au ministre socialiste de l’époque, à savoir Jean Glavany. Mais je n’ai jamais dit c’était sa faute si l’on avait renoncé aux quotas ! J’ai simplement souligné le fait que c’était sous un gouvernement de gauche que le principe de la suppression des quotas avait été adopté par l’Union !

M. Didier Guillaume. Par les gouvernements libéraux européens, et contre l’avis du gouvernement français !

M. Jacques Blanc. Cela s’est décidé à la majorité ! Pour avoir présidé le Comité des régions de l’Union européenne, je peux vous dire que les réactions des différents gouvernements à Bruxelles sont souvent surprenantes. Sur des problèmes tels que la régulation ou l’ouverture à la concurrence du marché de l’énergie, croyez bien que les gouvernements socialistes défendent des positions plus libérales que les nôtres !

Mes chers collègues, ne faisons donc pas de procès d’intention. D’ailleurs, les agriculteurs méritent mieux que de faux débats entre nous !

Plusieurs sénateurs du groupe socialiste. Ça, c’est sûr !

M. Jacques Blanc. C’est donc pour eux que nous devons nous mettre immédiatement au travail.

Le texte a été préparé par le Gouvernement, puis amélioré en commission. À nous, lors du débat en séance publique, de l’enrichir encore davantage !

Alors, de grâce, ne rejouons pas le film Courage fuyons ! Il s’agit non de fuir, mais d’appréhender objectivement les instruments que nous proposent à la fois le Gouvernement et la commission pour répondre au drame que vivent nos agriculteurs.

Tous ensemble, trouvons et dégageons des solutions ! Du reste, je pense que, si nous montrons ici que nous voulons travailler dans cet esprit, l’action du ministre à Bruxelles s’en trouvera facilitée.

J’ai cru, madame Herviaux, vous entendre suggérer d’attendre la réforme de la politique agricole commune. Mais cela va prendre du temps, vous le savez très bien, quelle que soit la qualité de l’action du gouvernement français ! Il me paraît beaucoup plus intelligent et efficace de commencer par voter le texte, puis d’épauler l’action du Gouvernement devant le Parlement européen, puisque ce dernier aura son mot à dire via le Comité des régions, dont les avis pourront faire progresser dans l’Union la conception de l’agriculture que défend la France, et sur laquelle nous pouvons nous rassembler : une agriculture reposant notamment sur des exploitations familiales et des spécificités liées aux territoires.

Vraiment, mes chers collègues, travaillons sérieusement et ne renvoyons pas à demain ce qu’on peut faire le jour même ! (Applaudissements sur les travées de lUMP, ainsi que sur plusieurs travées de lUnion centriste.)

M. le président. Je mets aux voix la motion n° 86, tendant à opposer la question préalable, et dont l'adoption entraînerait le rejet du projet de loi.

J’ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Je rappelle que la commission et le Gouvernement demandent le rejet de cette motion.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 200 :

Nombre de votants 339
Nombre de suffrages exprimés 338
Majorité absolue des suffrages exprimés 170
Pour l’adoption 153
Contre 185

Le Sénat n'a pas adopté. (Applaudissements sur les travées de lUMP.)

Nous passons donc à la discussion des articles.

Question préalable
Dossier législatif : projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche
Article 1er (début)

Article additionnel avant le titre Ier

M. le président. L'amendement n° 87, présenté par MM. S. Larcher, Gillot, Patient, Antoinette, Lise et Tuheiava, Mme Herviaux, MM. Guillaume et Botrel, Mme Nicoux, MM. Andreoni et Bérit-Débat, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Bourquin, Chastan, Courteau, Daunis, Fauconnier, Madec, Marc, Mazuir, Mirassou, Muller, Navarro, Pastor, Patriat, Rainaud, Raoul, Raoult, Repentin et Ries, Mme Schillinger, MM. Sueur et Teston, Mme Bourzai et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Avant le titre Ier, insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Un projet de loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche spécifique à l’outre-mer est déposé devant le Parlement dans un délai d'un an à compter de la publication de la présente loi.

La parole est à M. Jacques Gillot.

M. Jacques Gillot. Cet amendement est la reprise d’une proposition qui faisait consensus. En octobre 2005, M. Dominique Bussereau, répondant devant l’Assemblée nationale à mon collègue Victorin Lurel au cours du débat sur la loi d’orientation agricole, se disait prêt à évoquer un projet de loi spécifique sur l’agriculture et la pêche avec son collègue de l’outre-mer et le Premier ministre. Ce consensus semblait d’autant plus affirmé sur ce point que le texte de 2005 ne contenait aucun levier de développement et que les quelques mesures proposées étaient largement insuffisantes pour traiter les difficultés de l’agriculture ultramarine.

Dans le texte qui nous est présenté aujourd’hui, la plupart des dispositifs ne s’appliquent pas en l’état aux outre-mer. C’est ce qui ressort de l’étude d’impact adossée à ce projet de loi, qui indique par ailleurs pour l’outre-mer, et à chaque chapitre, les mesures spécifiques à prendre.

J’aurais préféré, monsieur le ministre, retrouver dans ce projet de loi les dispositions préconisées tant par l’étude d’impact que par le rapport de la mission sénatoriale ou encore par le conseil interministériel de l’outre-mer qui s’est tenu le 6 novembre 2009. Mais, une nouvelle fois, le Gouvernement a choisi de procéder, pour nos régions, par voie d’ordonnance.

Je ne peux donc que m’associer au rapporteur du texte quand il regrette que, « une fois encore, le Gouvernement utilise la procédure des ordonnances pour traiter les questions relatives à l’outre-mer, procédure qui, dans les faits, dessaisit le Parlement de ses pouvoirs ».

Je demande donc que, à défaut d’intégrer l’outre-mer dans ce projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche en France, le Gouvernement dépose un projet de loi spécifique à l’outre-mer en matière d’agriculture et de pêche. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard César, rapporteur. Non, monsieur Gillot, l’outre-mer n’est pas oublié dans le présent projet de loi. En effet, certaines dispositions, comme celles qui sont relatives aux contrats, aux organisations de producteurs, à l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, s’appliquent de plein droit à l’outre-mer.

Par ailleurs, la politique de l’alimentation est une politique nationale qui concerne tous les territoires de la République, y compris donc les territoires ultramarins.

En outre, l’article 24 prévoit d’adapter par ordonnance certaines dispositions de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, en particulier celles qui sont relatives au foncier agricole.

Enfin, sur la forme, le Parlement ne peut, conformément à une jurisprudence constante du Conseil constitutionnel, enjoindre au Gouvernement de déposer un projet de loi.

C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bruno Le Maire, ministre. Monsieur Gillot, le développement de l’agriculture outre-mer est effectivement une question majeure, je l’ai rappelé tout à l’heure dans ma présentation.

Pour autant, le Gouvernement estime que cet amendement n’a pas d’objet à partir du moment où un titre spécifique à l’outre-mer figure dans le projet de loi et où les mesures définies le 6 novembre dernier y seront intégrées. Il nous faut toutefois, pour cela, consulter préalablement les collectivités concernées.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous procédons par ordonnance. Il n’en demeure pas moins que le développement de l’agriculture outre-mer est un enjeu majeur et qu’il sera traité en tant que tel.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 87.

(L'amendement n'est pas adopté.)

TITRE Ier

DÉFINIR ET METTRE EN ŒUVRE UNE POLITIQUE PUBLIQUE DE L’ALIMENTATION