Sommaire
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga, M. Jean-Paul Virapoullé.
Suspension et reprise de la séance
3. Entrepreneur individuel à responsabilité limitée. – Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
Discussion générale : MM. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire ; Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation.
MM. Michel Houel, Daniel Marsin, Jean Louis Masson, Mme Josiane Mathon-Poinat, M. Richard Yung,
Clôture de la discussion générale.
Texte de la commission mixte paritaire
MM. François Zocchetto, Claude Bérit-Débat.
Adoption définitive du projet de loi.
4. Conseil économique, social et environnemental. – Adoption d'un projet de loi organique en procédure accélérée (Texte de la commission)
Discussion générale : MM. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement ; Jean-Pierre Vial, rapporteur de la commission des lois.
MM. Jacques Mézard, Jean Louis Masson, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Daniel Dubois, Simon Sutour, Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. Christophe-André Frassa, Richard Yung, Antoine Lefèvre, René Teulade, Mme Christiane Kammermann.
M. le ministre.
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 20 de M. Simon Sutour. – MM. Simon Sutour, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Articles additionnels après l'article 2
Amendement n° 21 rectifié de M. Simon Sutour. – M. Richard Yung.
Amendement n° 49 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat.
MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption de l’amendement no 21 rectifié insérant un article additionnel, l’amendement no 49 devenant sans objet.
Article additionnel après l'article 3
Amendement n° 48 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 22 de M. Simon Sutour. – MM. Simon Sutour, le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement no 43 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat.
Amendement no 45 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat.
Amendement n° 7 rectifié de M. Christian Cointat. – M. Christian Cointat. – Retrait.
Amendement n° 1 rectifié ter de M. Christophe-André Frassa. – M. Christophe-André Frassa.
Amendement n° 4 rectifié bis de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. – Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Amendement n° 14 rectifié de M. Robert del Picchia. – M. Robert del Picchia. – Retrait.
Amendement n° 23 de M. Simon Sutour. – M. Richard Yung.
Amendement n° 44 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat.
Amendement n° 34 rectifié bis de M. Yann Gaillard. – Mme Anne-Marie Payet.
MM. le rapporteur, le ministre, Richard Yung, Robert del Picchia, Simon Sutour, Yann Gaillard. – Retrait de l’amendement no 4 rectifié bis ; rejet des amendements nos 43, 45, 23, 44 et 34 rectifié bis ; adoption de l’amendement no 1 rectifié ter.
Amendement n° 10 rectifié de M. Philippe Leroy. – MM. Bernard Fournier, le rapporteur, le ministre. – Retrait.
Amendement n° 24 de M. Simon Sutour. – MM. Simon Sutour, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 25 de M. Simon Sutour et 36 rectifié bis de Mme Isabelle Debré. – M. Simon Sutour, Mme Françoise Henneron, MM. le rapporteur, le ministre. – Retrait de l’amendement no 36 rectifié bis ; rejet de l’amendement no 25.
Amendement n° 47 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 26 de M. Simon Sutour. – MM. Richard Yung, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendements identiques nos 19 rectifié de M. Dominique Braye et 28 de M. Simon Sutour. – Mme Françoise Henneron, M. Simon Sutour.
Amendement n° 11 rectifié de M. Jean-René Lecerf, repris par la commission. – M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois.
M. le ministre. – Retrait de l’amendement no 19 rectifié ; rejet de l’amendement no 28 ; adoption de l’amendement no 11 rectifié.
Amendement n° 27 rectifié de M. Richard Yung. – M. Richard Yung.
Amendement n° 8 rectifié de M. Christian Cointat. – M. Christian Cointat. – Retrait.
Amendement n° 2 rectifié bis de M. Christophe-André Frassa. – M. Christophe-André Frassa. – Retrait.
Amendement n° 6 rectifié bis de Mme Joëlle Garriaud-Maylam. – M. Christian Cointat. – Retrait.
MM. le rapporteur, le ministre, Christian Cointat. – Rejet de l’amendement no 27 rectifié.
Amendement n° 35 rectifié bis de M. Yann Gaillard. – Mme Anne-Marie Payet, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 46 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat.
Amendement n° 9 rectifié de M. Christian Cointat. – M. Christian Cointat. – Retrait.
Amendement n° 3 rectifié bis de M. Christophe-André Frassa. – M. Christophe-André Frassa. – Retrait.
MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet de l’amendement no 46.
Amendement n° 29 de M. Simon Sutour. – MM. Richard Yung, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 30 de M. Simon Sutour. – M. Simon Sutour.
Amendement n° 42 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat.
Amendement n° 53 de la commission. – M. le rapporteur.
MM. le ministre, le président de la commission, Simon Sutour, Gérard Longuet, François Fortassin, le rapporteur. – Rejet des amendements nos 30, 42 et 53.
Amendement n° 41 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 40 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Articles 7, 8, 8 bis A et 8 bis. – Adoption
Amendements identiques nos 31 de M. Simon Sutour et 50 de Mme Josiane Mathon-Poinat. – M. Richard Yung, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendements identiques nos 32 de M. Simon Sutour et 37 de Mme Catherine Morin-Desailly. – M. Simon Sutour, Mme Anne-Marie Payet, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendement n° 33 de M. Simon Sutour. – M. Richard Yung. – Retrait.
Adoption de l'article.
Articles 15 et 15 bis. – Adoption
Amendement no 54 de la commission. – MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
MM. Simon Sutour, François Fortassin, le ministre,
Adoption, par scrutin public, du projet de loi organique.
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
Secrétaires :
Mme Monique Cerisier-ben Guiga,
M. Jean-Paul Virapoullé.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Dépôt de rapports
M. le président. M. le Premier ministre a transmis au Sénat, en application de l’article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit, le rapport sur la mise en application de la loi n° 2009-1255 du 19 octobre 2009 tendant à favoriser l’accès au crédit des petites et moyennes entreprises et à améliorer le fonctionnement des marchés financiers.
M. Michel Boyon, président du Conseil supérieur de l’audiovisuel, a par ailleurs transmis au Sénat le rapport du Conseil supérieur de l’audiovisuel analysant la représentation de la diversité de la société française à la télévision, établi en application de l’article 1er de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Acte est donné du dépôt de ces rapports.
Le premier a été transmis à la commission des finances, le second à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication. Ils sont disponibles au bureau de la distribution.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à quatorze heures trente-six, est reprise à quatorze heures quarante.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Entrepreneur individuel à responsabilité limitée
Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire
M. le président. L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée (rapport no 420).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen par le Parlement du projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, l’EIRL.
Cet examen fut particulièrement rapide puisque les deux assemblées n’ont disposé que de trois mois pour travailler sur un dispositif qui était présenté, à juste titre d’ailleurs, comme une innovation juridique majeure.
Cette innovation majeure tient au patrimoine professionnel d’affectation sans création d’une personne morale : un entrepreneur pourra désormais affecter à son activité professionnelle une partie de ses biens, qui constitueront la garantie de ses dettes professionnelles, sans pour autant devoir créer une société.
L’entrepreneur à patrimoine affecté ne sera donc plus responsable de ses dettes professionnelles sur l’ensemble de ses biens. Son patrimoine personnel et celui de sa famille devraient être ainsi mieux protégés des aléas de son activité économique.
Le projet de loi prévoit également un régime fiscal et social spécifique pour cette nouvelle catégorie d’entrepreneurs avec, en particulier, la possibilité d’opter pour l’impôt sur les sociétés, dans un souci d’alignement sur le régime fiscal de l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, l’EURL. Nous nous sommes d’ailleurs demandé s’il ne fallait pas supprimer l’EURL. Mais nous reviendrons sur ce sujet.
La commission mixte paritaire, qui s’est réunie la semaine dernière, a permis de trouver les voies d’un compromis positif avec l’Assemblée nationale sur les quelques dispositions restant réellement en discussion.
À l’Assemblée nationale, la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire était saisie au fond de ce texte. Elle a été à l’origine d’excellentes dispositions, notamment en matière de transmission de l’entreprise. Cela prouve, une fois encore, que le bicamérisme a bien un sens : chaque assemblée a gardé son identité mais nos travaux ont été complémentaires.
Les échanges réguliers, confiants et fructueux que j’ai pu nouer avec le rapporteur du projet de loi à l’Assemblée nationale, Mme Laure de la Raudière, durant toute la discussion de ce texte, ont bien sûr facilité la réalisation du compromis auquel est parvenu la commission mixte paritaire, sous la présidence éclairée de M. Patrick Ollier, que je tenais en cet instant à remercier.
Monsieur le secrétaire d’État, un point majeur de divergence demeurait avec l’Assemblée nationale : l’opposabilité de la déclaration d’affectation aux créanciers antérieurs. Cette question a été la plus débattue lors des travaux de la commission mixte paritaire, par les sénateurs comme par les députés, et je suis persuadé qu’aucun de ses membres n’a oublié ces débats.
Sur ce point, je le rappelle, le Sénat en était revenu à la rédaction initiale du projet de loi : la création du patrimoine affecté n’était opposable qu’aux créanciers dont les droits étaient nés postérieurement, que les créances soient professionnelles ou personnelles. Ainsi, les créances antérieures à la création du patrimoine affecté conservaient pour gage l’intégralité du patrimoine de l’entrepreneur.
L’Assemblée nationale avait décidé que la déclaration d’affectation serait opposable de plein droit aux créanciers antérieurs. De la sorte, du jour au lendemain, les créanciers professionnels de l’entrepreneur auraient vu l’assiette de leur droit de gage se réduire aux seuls biens professionnels affectés.
Cette disposition soulevait un véritable problème constitutionnel en remettant en cause l’équilibre de contrats légalement conclus sans motif d’intérêt général. Elle posait également un problème de nature économique dans la mesure où elle aurait été de nature à fragiliser les relations entre les entrepreneurs et leurs créanciers. Ces derniers sont certes des banquiers, et à ce titre ils savent prendre des garanties sur les biens personnels, mais ils sont aussi les fournisseurs d’autres petits entrepreneurs, qui auraient alors été lésés. Or, l’on connaît l’importance du crédit fournisseur dans notre pays. Il s'agit là d’une singularité française, qui est peut-être regrettable et qui est en tout cas sans équivalent chez nos voisins.
Il n’était pas possible d’accepter que les créanciers de l’entrepreneur puissent, du jour au lendemain, se voir opposer une déclaration d’affectation de patrimoine professionnel pour faire obstacle au recouvrement de créances légalement contractées. C’eût été introduire la suspicion et la méfiance dans les relations économiques de l’entrepreneur individuel !
À titre de compromis, le rapporteur de l’Assemblée nationale a proposé une solution intermédiaire, aux termes de laquelle l’entrepreneur a la faculté de rendre opposable la déclaration d’affectation aux créanciers antérieurs, qui disposent alors d’un droit d’opposition. Un tel mécanisme suppose une information réelle – j’insiste sur ce point – des créanciers concernés, afin que ceux-ci puissent faire jouer effectivement leur droit d’opposition.
À cet égard, la commission mixte paritaire a expressément refusé que l’information des créanciers antérieurs soit assurée par une simple publication, dans un journal d’annonces légales par exemple. Nos collègues François Pillet et François Zocchetto, et je les en remercie, ont, avec le talent que nous leur connaissons, défendu cette position qui a été reprise par la commission mixte paritaire.
Le texte renvoie désormais au pouvoir réglementaire le soin de définir les modalités d’information des créanciers antérieurs. Toutefois, monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement doit savoir qu’une simple publication ne sera pas suffisante. Sans doute faudra-t-il prévoir une information directe et individuelle des créanciers. J’attache une grande importance à ces éléments, car ils sont liés à la constitutionnalité de l’opposabilité. Nous avons accepté le principe de l’opposabilité à la condition que les créanciers soient directement informés.
La commission mixte paritaire a confirmé le maintien de la déclaration d’insaisissabilité, dont le texte prévoyait initialement l’extinction. Selon l’étude d’impact qui a été réalisée, les entrepreneurs individuels à responsabilité limitée seraient 100 000 à la fin de 2012 et il resterait encore, à cette date 1,4 million d’entrepreneurs en nom propre, pour lesquels l’insaisissabilité conservera nécessairement un intérêt, du fait de sa simplicité et de son efficacité.
Ce mécanisme, créé en 2003, puis étendu en 2008, permet à un entrepreneur individuel de déclarer insaisissables, devant notaire, sa résidence principale et ses biens immobiliers non professionnels.
Quelques difficultés subsistaient également quant à la possibilité de disposer de plusieurs patrimoines d’affectation. Comme j’ai déjà eu l’occasion de l’indiquer à plusieurs reprises, il n’existe aucun argument juridique s’opposant à ce qu’un même entrepreneur puisse créer plusieurs patrimoines professionnels, d’autant qu’il peut aujourd’hui fonder autant de sociétés unipersonnelles qu’il le souhaite.
Néanmoins, pour répondre aux voix multiples qui s’inquiétaient de la complexité pratique que provoquerait la pluralité des patrimoines affectés, j’ai proposé, et la commission mixte paritaire m’a suivi sur ce point, que la possibilité de constituer plusieurs patrimoines soit reportée au 1er janvier 2013. Cela nous permettra de réaliser une évaluation sérieuse.
Enfin, la commission mixte paritaire a procédé à quelques modifications de moindre importance.
Le Sénat ayant adopté des dispositions concernant la possibilité pour les mineurs de créer et de gérer une entreprise, le rapporteur de l’Assemblée nationale a proposé d’utiles mesures d’encadrement.
Le Sénat ayant veillé à ce que les procédures prévues au livre VI du code de commerce soient toutes applicables aux entrepreneurs individuels à responsabilité limitée, y compris les procédures de prévention des difficultés des entreprises, j’ai proposé à la commission mixte paritaire de prévoir la transmission au greffe du tribunal de commerce des comptes annuels lorsque ceux-ci n’y sont pas déposés, afin que le président du tribunal de commerce puisse correctement exercer ses missions de prévention.
À cet égard, je me félicite que le Sénat ait conditionné l’entrée en vigueur du statut d’entrepreneur individuel à responsabilité limitée à la publication de l’ordonnance destinée à adapter toutes les procédures collectives. Le Gouvernement, je le rappelle, dispose de six mois pour édicter ce texte. En effet, nous n’aurions pu laisser les entrepreneurs dans un tel vide juridique pendant une trop longue période.
Monsieur le secrétaire d’État, permettez-moi de déplorer de nouveau le délai trop bref laissé au Parlement pour examiner ce texte. Si nous avions disposé de plus de temps, nous aurions, j’en suis convaincu, pu adopter les procédures collectives – c’est un domaine dans lequel nous avons une certaine expérience –, évitant ainsi au Gouvernement de devoir légiférer par ordonnance. Sachez que je serai particulièrement vigilant, tout comme l’ensemble de la commission des lois, quant au contenu de cette ordonnance.
Mes chers collègues, je me suis déjà réjoui des excellentes relations que j’ai nouées avec le rapporteur de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale. Je suis heureux que nous ayons travaillé dans le même esprit, monsieur le secrétaire d'État : vous avez su écouter et respecter la voix que le Sénat a tenu à faire entendre.
Il ne me reste donc plus qu’à souhaiter longue vie et plein succès à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée, que nous allons porter ensemble sur les fonts baptismaux législatifs.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme, des services et de la consommation. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, en votant ce texte, vous achèverez non seulement un processus parlementaire, mais vous mettrez aussi un terme à un combat vieux de trente ans en faveur de l’entrepreneur et de l’entrepreneuriat.
Ce texte était attendu par tous les acteurs concernés : les représentants des artisans et des commerçants, les chambres de métiers et, bien entendu, les entrepreneurs eux-mêmes.
Le présent projet de loi, qui vous a été soumis le 8 avril dernier en première lecture, visait à lutter contre ce qui constitue, je l’ai souligné à plusieurs reprises, un véritable scandale français : un scandale qui veut qu’un artisan, un commerçant, un professionnel libéral ou un agriculteur puisse, après un revers professionnel, perdre l’ensemble de ses biens personnels et se retrouver littéralement à la rue, ruiné, sans possibilité de rebondir !
Ce sont, j’en suis convaincu, des milliers de drames humains et familiaux qui seront évités à l’avenir. Dans le sort qui était réservé aux entrepreneurs individuels faisant faillite, il y avait, disons-le, quelque chose de barbare, qui contrastait violemment avec les principes d’une société moderne, protégeant et défendant les droits des individus.
L’entrepreneur du xxie siècle ne mérite pas le sort qui était réservé à celui du xixe siècle, à ces héros balzaciens qui, placés dans l’incapacité de rembourser leurs dettes, se voyaient couverts de déshonneur et rejetés du monde des affaires.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez décidé de rompre avec le dogme biséculaire de l’unicité du patrimoine pour les entrepreneurs individuels, en permettant à ces derniers d’affecter à leur activité un patrimoine professionnel distinct de leurs biens personnels. En cas de défaillance, l’entrepreneur ne sera responsable que sur le patrimoine affecté à son activité.
En votant ce texte, vous adresserez, et je m’en réjouis, un signal fort à tous ceux qui souhaitent entreprendre mais qui hésitent à passer à l’acte.
Alors que nous arrivons au terme du processus parlementaire, permettez-moi de revenir sur la qualité de vos apports, qui ont contribué à enrichir le texte.
Je salue tout particulièrement le travail du président de la commission des lois et rapporteur de ce texte. Vous avez su, monsieur Hyest, préserver la philosophie du projet de loi tout en apportant les sécurités et les clarifications juridiques nécessaires.
Vous avez regretté que le Parlement n’ait pas disposé de plus de temps pour examiner ce texte.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Heureusement, nous sommes doués !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Vous avez néanmoins réussi, dans un temps que vous estimez contraint – j’y vois pour ma part la marque de votre talent –, à donner à ce texte toutes les garanties juridiques qui lui faisaient défaut.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Certes, mais il ne faudra pas recommencer trop souvent ! (Sourires.)
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Mes remerciements vont également à M. Michel Houel, rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire lors de la première lecture de ce texte, et président du groupe d’études « Artisanat et services » du Sénat, qui a notamment travaillé sur la question des garanties et des sûretés personnelles, ainsi que sur les missions d’OSEO.
J’en viens aux contributions qui ont été apportées par la commission mixte paritaire, le 28 avril dernier.
J’évoquerai tout d'abord l’opposabilité de la déclaration d’affectation aux créanciers dont les droits sont nés antérieurement à la déclaration.
Je ne reviendrai pas sur le débat juridique que suscite l’opposabilité immédiate de la déclaration d’affectation aux créanciers dont les droits sont nés antérieurement à cette affectation. Cette question a fort heureusement abouti à un compromis en commission mixte paritaire.
L’un des objectifs du Gouvernement était de sécuriser parfaitement le régime de l’EIRL, afin que ses futurs utilisateurs puissent l’adopter facilement. En effet, la sécurité juridique du texte est la meilleure garantie de son applicabilité et de sa pérennité.
C’est pourquoi je me réjouis que la commission mixte paritaire ait donné à l’entrepreneur la possibilité de rendre le patrimoine affecté opposable à l’ensemble de ses créanciers, tout en étant tenu, s’il souhaite exercer cette option – vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur – d’informer individuellement les créanciers antérieurs. Ces derniers disposent alors d’un droit d’opposition du fait de la réduction de l’assiette de leur gage, sur le modèle du dispositif qui existe déjà en cas de réduction de capital non motivée par des pertes ou de transmission de patrimoine par voie de fusion. Il s'agit là, me semble-t-il, d’une bonne solution, qui concilie souplesse, protection maximale de l’entrepreneur et garantie des droits des tiers.
Les modalités d’information des créanciers pour l’exercice de leur droit d’opposition seront fixées par décret. À cet égard, comme vous me l’avez demandé, monsieur le rapporteur, le Gouvernement s’engage à prévoir une information individuelle des créanciers.
En ce qui concerne l’insaisissabilité, le Gouvernement avait, dans un premier temps, prévu la suppression de ce dispositif au moment de l’entrée en vigueur de la loi relative à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
La commission des lois du Sénat et la commission mixte paritaire, dont je respecte bien entendu la position, ont préféré maintenir les deux dispositifs : l’insaisissabilité d’une part, le patrimoine affecté d’autre part. Comme vous l’avez proposé, monsieur le rapporteur, nous évaluerons donc, lorsque nous disposerons du recul suffisant, l’application du régime de l’EIRL et l’opportunité de maintenir, ou non, le dispositif de l’insaisissabilité.
En ce qui concerne le développement de l’entrepreneuriat des mineurs dans un cadre sécurisé, je tiens à remercier la commission mixte paritaire des améliorations qu’elle a apportées à l’article 1er bis AA. Désormais, un mineur aura la possibilité de créer une entreprise, conformément au souhait émis par le Président de la République.
À un moment où l’esprit d’entreprise se développe dans notre pays – dans son numéro du 3 mai, le journal Le Parisien consacre un article à l’attrait des jeunes pour le statut de l’auto-entrepreneur – il est important que les plus jeunes de nos concitoyens puissent, s’ils le souhaitent, s’inscrire très tôt dans la dynamique de la création d’activité.
Toutefois, il est indispensable que la liberté qui est concédée au mineur soit strictement encadrée. Le Parlement a donc prévu que le mineur ne puisse pas effectuer des actes de disposition, qui peuvent entraîner une modification importante du patrimoine, sans l’accord exprès de son représentant légal.
Dans le même ordre d’idées, la commission mixte paritaire a adopté, par voie d’amendement, des dispositions visant à formaliser l’autorisation donnée au mineur d’accomplir seul les actes d’administration nécessaires aux besoins de la création et de la gestion d’une entreprise individuelle à responsabilité limitée. Ces dispositions vont dans le bon sens. Il s’agit en effet de préserver la sécurité et la protection tant du mineur que des tiers qui contractent avec lui.
En ce qui concerne l’entrée en vigueur du dispositif, qui est prévu pour le 1er janvier 2011, j’ai pris acte, monsieur le rapporteur, de votre souci d’assurer la sécurité du dispositif en conditionnant la mise en œuvre du nouveau statut de l’EIRL à la publication de l’ordonnance destinée à adapter les procédures collectives au patrimoine affecté. Vous avez en contrepartie ramené le délai d’habilitation de neuf mois à six mois.
Le Gouvernement veillera à publier, dans les plus brefs délais, cette ordonnance et l’ensemble des textes d’application nécessaires pour que le nouveau statut entre en vigueur dès le 1er janvier 2011. Je suis personnellement très attaché à cet engagement. Je veux que, à cette date, les premiers entrepreneurs individuels à responsabilité limitée voient le jour.
Pour ce qui est de l’accompagnement des entrepreneurs, j’ai la grande satisfaction de vous annoncer la mise en ligne du site www.infoeirl.fr depuis le 28 avril dernier.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Bravo !
M. Hervé Novelli, secrétaire d'État. Ce site, développé par le ministère de l’économie, de l’industrie et de l’emploi en partenariat avec l’ordre des experts-comptables, permet de renseigner les entrepreneurs sur ce nouveau statut et de les accompagner dans leur choix de constituer une EIRL.
À l’instar de ce qui existe déjà pour l’auto-entrepreneur, l’entrepreneur pourra créer, dès le début de l’année prochaine, son EIRL en ligne, sur le site <www.guichet-entreprises.fr.>.
Comme vous l’avez souvent relevé en première lecture, il est indispensable de promouvoir cette réforme. En effet, elle n’aura de sens et ne pourra fonctionner que si les entrepreneurs en ont connaissance. De ce point de vue, nous avons tous un rôle majeur à jouer : le Parlement, le Gouvernement, les réseaux consulaires ainsi que les organisations professionnelles de l’artisanat, à qui je demande un engagement fort, tant elles ont été impliquées dans cette réforme. Il faut simplifier au maximum les démarches des entrepreneurs qui opteront pour le statut de l’EIRL. Sachez que je veillerai à la mise en œuvre de cette réforme.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie d’avoir contribué, par vos interventions et par vos amendements, à la construction d’un texte qui, j’en suis convaincu, marquera un tournant historique dans notre droit des entreprises. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Michel Houel.
M. Michel Houel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’introduction d’un patrimoine d’affectation dans notre droit est une demande ancienne des entrepreneurs individuels, et je me réjouis qu’elle trouve enfin, avec l’EIRL, une réponse adaptée.
Si la création d’un patrimoine d’affectation a été retardée pendant plus de trente ans, c’est parce que cette réforme n’était pas aisée à concevoir. Il fallait surmonter de multiples difficultés juridiques et apaiser des craintes importantes. De nombreux experts prévoyaient que l’affectation ne pourrait pas trouver naturellement sa place dans notre droit et qu’elle aboutirait à la mise en place d’un dispositif inapplicable, qui s’apparenterait à une usine à gaz, si vous me permettez cette expression.
Aujourd’hui, les difficultés juridiques ont été levées et les pronostics pessimistes déjoués. En peu de temps – quelques semaines à peine –, nous avons réussi à élaborer un dispositif relativement simple à mettre en œuvre et sécurisé sur le plan juridique.
Je veux saluer tous les acteurs qui, dans un esprit constructif, nous ont permis d’atteindre ce résultat. Ce succès, monsieur le secrétaire d'État, nous le devons tout d’abord à la qualité du texte que vous nous avez présenté : votre projet de loi posait des fondations solides. L’Assemblée nationale y a ensuite apporté des précisions essentielles, notamment dans le domaine de la transmission des entreprises.
La commission des lois du Sénat, sous l’impulsion de son excellent président, et rapporteur de ce texte, a poursuivi ce travail de précision et de sécurisation juridiques. La Haute Assemblée, avec la sagesse qui la caractérise, a ainsi pu tempérer de manière opportune quelques dispositions qu’un enthousiasme certes compréhensif, mais sans doute excessif, avait conduit à introduire dans le texte. Je pense à la rétroactivité des déclarations d’affectation, dont il a été déjà question, ou encore à la suppression de la possibilité, pour un entrepreneur, de protéger son patrimoine par une déclaration d’insaisissabilité.
Pour ma part, en qualité de rapporteur pour avis de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, je me suis surtout intéressé à la question de l’accès au crédit, car cet enjeu sera décisif dans la réussite du nouveau dispositif. À cet égard, le Gouvernement avait annoncé l’appui d’OSEO pour accompagner l’EIRL, grâce à une garantie à hauteur de 70 % des crédits. Dans cet esprit, j’ai souhaité aller plus loin en proposant d’anticiper la réforme d’OSEO, qui devait initialement être réalisée dans le projet de loi de régulation bancaire et financière. La réorganisation d’OSEO a ainsi été introduite dans le présent texte, ce qui permettra à cet organisme d’assurer pleinement ses missions.
À l’issue de l’examen de ce texte par le Sénat, les points de désaccord entre les deux assemblées étaient relativement circonscrits. Je me félicite que la commission mixte paritaire se soit déroulée dans un esprit de cordialité et de recherche constructive du consensus. Le texte issu de ses travaux est équilibré et reprend l’essentiel des dispositions adoptées par le Sénat.
Au final, le projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée est un bon texte, qui apporte une réponse satisfaisante à la question de la protection du patrimoine des petits entrepreneurs. Le projet de loi atteint un bon équilibre entre simplicité et sécurité juridique. Il apporte également des éléments de réponse à la question difficile de la conciliation de la protection du patrimoine et de la confiance des créanciers. Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, je ne puis que vous encourager à le voter.
En conclusion, je tiens à rappeler que l’une des améliorations apportées au texte initial visait à étendre le statut de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée aux agriculteurs. Néanmoins, comme je l’ai signalé dans mon rapport pour avis et au cours de mon intervention en séance publique lors de la première lecture de ce texte, l’extension du statut de l’EIRL à l’agriculture ne deviendra pleinement effective qu’à la condition que les agriculteurs puissent, eux aussi, bénéficier de l’accompagnement d’OSEO. Ce n’est pas le encore le cas, car les dispositifs élaborés à l’échelon communautaire ne prévoient pas l’intervention d’OSEO pour les plus petites exploitations.
Monsieur le secrétaire d'État, vous vous êtes engagé à étudier sérieusement la révision de cette notification. Nous serons très attentifs au suivi de ce dossier et nous veillerons à ce qu’il connaisse un aboutissement heureux. Soyez dès à présent assuré de mon plein soutien et de mon entière confiance. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Marsin.
M. Daniel Marsin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il nous appartient aujourd'hui de nous prononcer définitivement sur le projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
Ce projet de loi était très attendu. Il concerne en effet trois millions de femmes et d’hommes – artisans, commerçants et exploitants agricoles – qui créent des emplois et des richesses et font vivre nos territoires, ruraux en particulier.
Ce projet de loi était aussi attendu par nombre de nos concitoyens. Je pense notamment aux chômeurs âgés de quarante-cinq ans ou cinquante ans qui, en cette période de crise, n’ont plus l’espoir de retrouver un travail, sauf à créer leur propre activité.
Je ne reviendrai pas sur la bonne intention qui sous-tend ce projet de loi, à savoir réformer le statut de l’entrepreneur individuel pour le protéger, lui et sa famille, des conséquences désastreuses d’une faillite. La création du statut de l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée est une initiative louable, à laquelle on ne peut qu’adhérer, puisqu’elle vise à mettre fin au principe d’unicité du patrimoine des entrepreneurs en nom propre. Ce principe, énoncé à l’article 2284 du code civil, a en effet pour conséquence de rendre l’entrepreneur responsable sur l’ensemble de ses biens, y compris sur son patrimoine personnel.
Cette réforme, beaucoup d’entrepreneurs individuels l’attendaient depuis plus de trente ans. Pendant toutes ces années, les mesures se sont succédé – je pense à la création de l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée ou à la déclaration d’insaisissabilité de la résidence personnelle de l’entrepreneur –, mais, à l’évidence, aucune n’a donné pleinement satisfaction.
Le texte adopté en commission mixte paritaire prévoit de limiter de manière significative le risque encouru par l’entrepreneur de voir ses biens propres ou sa maison saisis par ses créanciers professionnels. En réalité, rien n’a réellement été mis en place pour empêcher les détournements de l’esprit du texte qui, n’en doutons pas, ne manqueront pas de survenir dès l’entrée en vigueur des dispositions de cette loi.
En quoi l’existence d’un patrimoine affecté empêchera-t-elle les établissements de crédit d’exiger des sûretés réelles, constituées sur un bien du patrimoine personnel, pour garantir un emprunt nécessaire à la poursuite de l’activité et d’en faire la condition de l’obtention du prêt ? Nous n’avons pas non plus la certitude qu’après l’adoption de ce projet de loi les entrepreneurs individuels aient vraiment les moyens d’accéder au financement de leur activité sans mettre en péril les biens nécessaires à leur famille.
Pour l’heure, l’efficacité du projet de loi est soumise à une contrainte majeure. Ses conséquences sur la création d’entreprises pourraient être en pratique atténuées, puisqu’il se limite à aborder la question de la protection du patrimoine personnel en cas de faillite de l’entreprise.
Or, aujourd’hui, la problématique fondamentale des entrepreneurs individuels tient moins au remboursement des crédits en cas de faillite qu’à l’accès même aux prêts bancaires. En ce sens, l’affectation d’une partie du patrimoine à l’entreprise individuelle limite les garanties offertes aux banquiers dans le cadre de l’accès des entrepreneurs au crédit bancaire. Pour un euro prêté, il est fort possible qu’il leur soit toujours demandé un euro de caution, quelle que soit la configuration du patrimoine affecté.
J’attendais, je l’admets, un dispositif plus ambitieux en matière de crédit, car j’ai souvent fait, comme de nombreux élus, le constat terrible du rapport de force qui existe entre l’emprunteur et son banquier. Le texte aurait pu être l’occasion de proposer des mesures fortement correctrices, préventives et incitatives. Ce n’est malheureusement pas le cas.
Certes, la transformation de la structure d’OSEO, introduite dans le texte sur l’initiative de la commission de l'économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire et de son rapporteur pour avis, et adoptée par la commission mixte paritaire, était nécessaire, et nous y sommes favorables. Toutefois, sur le principe, il est regrettable que ce soit une fois de plus l’argent public, détenu et géré par OSEO, qui serve à atténuer les contraintes fortes imposées par les banques dans l’accompagnement des entreprises individuelles. Une telle mesure ne remédiera pas à la situation actuelle.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Mais si !
M. Daniel Marsin. C’est le point le plus délicat de ce projet de loi.
Les dispositions proposées par la commission mixte paritaire sont nécessaires, mais suffiront-elles à apporter des solutions aux trop nombreuses difficultés que rencontrent les entrepreneurs individuels pour accéder au financement bancaire ? Créer son entreprise, hier, c’était faire un pari – souvent gagné – sur la réussite économique ; aujourd’hui, c’est de plus en plus souvent un moyen d’affronter les difficultés sociales du présent, sans avoir la garantie de recevoir un soutien financier reposant sur la confiance.
Je considère pour ma part que ce texte constitue une avancée considérable. Toutefois, faute d’être convaincue de son efficacité, la majorité de mes collègues du groupe du RDSE s’abstiendra lors du vote final. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.
M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, comme l’ont souligné les orateurs qui m’ont précédé à cette tribune, cette réforme était attendue depuis plus de trente ans.
L’introduction de la notion de patrimoine d’affectation constitue une avancée très intéressante qui ne peut que conforter l’esprit d’entreprise dont notre pays a tant besoin.
Globalement, ce projet de loi me semble satisfaisant. Je me réjouis que les spécificités du monde agricole aient été mieux prises en compte. Nombreux sont les agriculteurs de mon département qui m’ont interrogé sur ce sujet. Ils auraient été choqués, et à juste titre, que leur profession reste éloignée du dispositif. J’ai pu constater, non sans une certaine surprise, que les « élus de base », c’est-à-dire les maires, leurs adjoints, les conseillers municipaux, avaient suivi attentivement le fil des débats parlementaires, car je pensais qu’ils se focalisaient plutôt sur le vote final.
En revanche, je suis très réservé sur le principe de l’opposabilité rétroactive, qui constitue d’ailleurs le point principal de divergence entre le Sénat et l’Assemblée nationale. La commission mixte paritaire a adopté une position intermédiaire, ce qui ne me paraît pas sain.
De mon point de vue, les engagements et contrats préexistants au vote de la loi doivent continuer de bénéficier des garanties antérieures et tous ceux qui seront conclus postérieurement à ce vote doivent relever du nouveau régime.
J’étais absolument opposé à la position qu’avait adoptée l’Assemblée nationale et je reste réservé quant aux dispositions retenues par la commission mixte paritaire à cet égard.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le texte élaboré par la commission mixte paritaire ne nous a pas conduits à modifier le regard que nous avons d’emblée porté sur le projet de loi relatif à l’entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
Certes, il est temps de remettre en question le dogme de l’unicité du patrimoine pour assurer aux entrepreneurs et à leur famille une protection en cas de faillite. Mais revenir sur l’une des pierres angulaires du droit civil français en instituant un « patrimoine affecté » ne suffit pas.
Pour porter ses fruits, cette petite révolution de la théorie du droit aurait dû s’accompagner d’une protection du patrimoine personnel des entrepreneurs et organiser leur accès réel au financement. Or, il n’en est rien. Le texte ne prévoit aucun mécanisme destiné à garantir vraiment la protection du patrimoine personnel. La déclaration d’insaisissabilité a même failli disparaître, et il est heureux que la commission mixte paritaire ait adopté un amendement visant à supprimer l’article prévoyant l’extinction de ce mécanisme.
En ce qui concerne l’accès au crédit, le texte n’empêche absolument pas les banques de demander des sûretés réelles assises sur le patrimoine personnel des entrepreneurs.
On essaie de nous convaincre que les dispositions relatives au statut d’OSEO, adoptées sans vrai débat et retenues par la commission mixte paritaire, sont destinées à donner à cet organisme les moyens « de jouer pleinement son rôle dans le soutien aux entreprises et ainsi de permettre le succès de l’EIRL » en leur assurant un accès au crédit.
Nous ne sommes pas dupes. En fait, ces dispositions n’ont aucun lien avec le projet de loi et ne visent pas les finalités évoquées par M. le rapporteur. Cela a été rappelé lors des travaux de la commission mixte paritaire, comme l’a souligné M. Richard Yung qui avait, comme nous, déposé un amendement de suppression de ces dispositions.
La version finale du projet de loi ne nous convient donc pas davantage que sa rédaction initiale. Elle nous semble même encore moins satisfaisante. Ainsi, les modifications apportées à l’article 1er, relatif à l’opposabilité de la réduction du gage consécutive à la création d’un patrimoine affecté aux créanciers dont les droits sont nés avant cette affectation, ne nous paraissent pas être de nature à garantir une information suffisante desdits créanciers.
Le nouvel article 1er adopté en commission mixte paritaire prévoit une opposabilité de l’affectation et entend l’encadrer en assurant l’information des créanciers, mais il renvoie à l’adoption d’un décret pour l’organisation des modalités concrètes de cette information. Nous ne pouvons que déplorer cette délégation au pouvoir réglementaire qui a manifestement constitué la seule solution pour que la commission mixte paritaire trouve une issue à ce blocage. Concrètement, cette question reste en suspens.
L’article 1er bis AA donne aux mineurs la faculté de créer une entreprise individuelle et d’être ainsi titulaire d’un patrimoine d’affectation. Cet article modifie donc substantiellement quatre articles du code civil et un article du code de commerce, une nouvelle fois sans qu’un réel débat ait eu lieu et sans que l’on ait pris le temps de mesurer les conséquences de ces révisions.
Le Gouvernement cautionne ces modifications, considérant que, à l’heure actuelle, les jeunes « veulent créer leur entreprise » et que doit cesser la « défiance française envers les entreprises ». Le risque d’instrumentalisation des enfants par des parents qui pourraient être tentés de les utiliser pour créer des patrimoines d’affectation ne paraît avoir retenu l’attention de personne.
Dans la mesure où nous n’avons pas la certitude que le statut de l’EIRL constituera une réelle opportunité pour les 1 400 000 entrepreneurs exerçant en nom propre – auxquels il faut ajouter 320 000 auto-entrepreneurs –, nous voterons contre ce texte.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, comme l’ont souligné certains intervenants, la commission mixte paritaire a apporté des progrès assez significatifs au présent projet de loi.
La question du patrimoine unique, que j’avais soulevée lors de la discussion du texte en première lecture, a fait l’objet d’un compromis, grâce à un amendement du rapporteur, qui s’est… je n’ose dire « rendu », car ce terme a une connotation militaire et désagréable…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ah non ! J’ai gagné !
M. Richard Yung. Disons, monsieur le rapporteur, que vous avez été convaincu par mes arguments sur l’opposabilité.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Absolument !
M. Richard Yung. C’est ainsi qu’une date de revoyure, en quelque sorte, est fixée à 2013. Nous sommes revenus à une conception plus saine de l’insaisissabilité.
Nous avons quelque peu progressé en matière d’opposabilité des créances antérieures, mais le dispositif résultant des travaux de la commission mixte paritaire risque d’être difficile à mettre en œuvre, en particulier quant à l’obligation d’avertir personnellement l’ensemble des créanciers, tant il s’apparente en fait à une usine à gaz.
La protection du patrimoine personnel soulève, nous en sommes tous conscients, une vraie question : celle du risque. Certes, le risque est inhérent à l’activité du créateur d’entreprise. Doit-on pour autant accepter qu’une personne qui se lance dans les affaires, qui représente ce qu’il est convenu d’appeler les forces vives de la nation, se trouve confrontée au risque, qui me paraît excessif, de perdre sa voiture, sa maison, sa femme, de voir sa famille brisée et, finalement, de tomber dans l’opprobre du ruisseau ? Il s’agit là d’un problème bien réel, monsieur le secrétaire d’État, et vous avez raison de vouloir le traiter.
M. Richard Yung. Je considère, pour ma part, que les moyens de remédier à cette situation existent déjà, mais qu’ils ne sont pas utilisés. Je pense, par exemple, à la déclaration d’insaisissabilité qui a, jusqu’à présent, plutôt mal fonctionné.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Elle monte en puissance !
M. Richard Yung. Est-ce lié à un défaut de pédagogie ? Les chambres de commerce n’ont-elles pas été assez actives ? Je l’ignore. En tout état de cause, la déclaration d’insaisissabilité est une réalité.
C’est un défaut bien français que d’empiler les systèmes juridiques. Lorsque nous rencontrons une difficulté, nous légiférons. En l’occurrence, nous créons un nouveau statut. Selon les recherches auxquelles je me suis livré, les sociétés de petite taille ont le choix entre sept ou huit statuts différents, entre autres l’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, ou EURL, la société en nom collectif, ou SNC, la société à responsabilité limitée, ou SARL, l’entreprise personnelle. Je ne sais pas comment les créateurs d’entreprise, qui ne sont évidemment pas des juristes, parviennent à s’y retrouver.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ils sont conseillés !
M. Richard Yung. Sans doute, mais ils ne sont pas très riches…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ils n’ont pas besoin d’être riches ! Il y a des organismes qui sont là pour les conseiller !
M. Richard Yung. Quoi qu’il en soit, nous empilons les dispositifs. Je ne suis pas convaincu que nous nous orientions dans la voie de la simplicité, qui est pourtant l’un des objectifs que vous vous êtes fixés, monsieur le secrétaire d'État.
Je ne suis pas persuadé que le problème français réside vraiment dans la création d’entreprises. Nous sommes déjà des champions dans ce domaine, puisque notre pays est, en Europe, l’un de ceux où se créent le plus d’entreprises. En revanche, nous rencontrons de grandes difficultés pour passer au stade suivant. Nous ne possédons ni la culture ni le système bancaire et financier nécessaires pour permettre aux jeunes entreprises de prospérer. Nous nous heurtons très vite au plafond de verre de la très petite entreprise qui, parvenue à cinq, six ou dix salariés, ne croît plus. C’est là que réside notre vrai problème, mais je n’insisterai pas sur ce sujet, car il ne relève pas du champ du projet de loi.
Je ne suis pas davantage persuadé que les dispositions du présent texte aideront l’entrepreneur individuel dans sa quête de financement. D’une manière ou d’une autre, les banques continueront de demander des garanties. Le soutien d’OSEO sera certes utile, mais le dispositif qui est envisagé ne me semble pas de nature à remédier aux difficultés de financement que rencontrent les entrepreneurs.
J’aborderai à présent les raisons de fond qui motivent nos réserves, voire notre hostilité à ce projet de loi.
En premier lieu, nous créons de nouvelles niches fiscales. Vous me répondrez sans doute que les montants en cause ne sont pas énormes. Je l’admets. On évoque en effet des sommes qui se situent entre 50 et 100 millions d'euros. Il n’en demeure pas moins que nous ne souhaitons pas envoyer un tel message au pays. Dans la période actuelle, marquée par une grande austérité, par de sévères réductions des dépenses, la création de niches fiscales est à bannir, au même titre que les exonérations de cotisations.
En deuxième lieu, et cette raison est peut-être plus importante encore, un système de précarité croissant se développe dans les relations du travail. Nous le savons tous, les employeurs exercent des pressions parfois non négligeables sur certaines catégories de salariés, afin qu’ils optent pour la création d’une EURL, pour le statut de l’auto-entrepreneur – et, demain, de l’EIRL –, et assument ainsi eux-mêmes une part du risque et des cotisations correspondantes.
Si le choix du statut de l’EIRL ou de l’auto-entrepreneur pour mener une activité de complément, à temps partiel ou annexe, peut se comprendre, il n’en est pas de même quand il s’agit d’une activité principale. N’oublions pas que le revenu mensuel moyen de l’auto-entrepreneur oscille entre 750 et 800 euros. (M. le secrétaire d’État s’exclame.)
Nous sommes donc confrontés à un vrai problème de fond dans l’organisation de la société française.
En dernier lieu, j’évoquerai pour mémoire, deux cavaliers qui, je l’admets bien volontiers, ne font pas figure d’Apocalypse ! (Sourires.)
Il s’agit d’abord de la restructuration juridique complète d’OSEO, ce qui n’est pas rien. L’organisation d’un débat préalable, à l’Assemblée nationale et au Sénat, nous aurait permis de connaître les intentions du Gouvernement en la matière.
Il s’agit ensuite de la transcription d’une directive européenne, sur laquelle le Gouvernement a pris beaucoup de retard. C’est pour cela que je suis très inquiet quant au respect du délai de six mois, monsieur le secrétaire d’État.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Pourquoi ?
M. Richard Yung. Nous avons du retard dans la transcription de toutes les directives !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il s’agit d’une ordonnance !
M. Richard Yung. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, vous comprendrez que nous ne votions pas le présent projet de loi dans la rédaction de la commission mixte paritaire.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. C’est bien dommage !
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, aucun amendement n’est recevable, sauf accord du Gouvernement ; en outre, le Sénat étant appelé à se prononcer avant l’Assemblée nationale, il statue par un seul vote sur l’ensemble du texte.
Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire :
Article 1er
Le chapitre VI du titre II du livre V du code de commerce est ainsi modifié :
1° Au début, est insérée une section 1 intitulée : « De la déclaration d'insaisissabilité », comprenant les articles L. 526-1 à L. 526-5 ;
2° Il est ajouté une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« De l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée
« Art. L. 526-6. - Tout entrepreneur individuel peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel, sans création d'une personne morale.
« Ce patrimoine est composé de l'ensemble des biens, droits, obligations ou sûretés dont l'entrepreneur individuel est titulaire, nécessaires à l'exercice de son activité professionnelle. Il peut comprendre également les biens, droits, obligations ou sûretés dont l'entrepreneur individuel est titulaire, utilisés pour l'exercice de son activité professionnelle et qu'il décide d'y affecter. Un même bien, droit, obligation ou sûreté ne peut entrer dans la composition que d'un seul patrimoine affecté.
« Pour l'exercice de l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté, l'entrepreneur individuel utilise une dénomination incorporant son nom, précédé ou suivi immédiatement des mots : “entrepreneur individuel à responsabilité limitée” ou des initiales : “EIRL”.
« Art. L. 526-6-1. - La constitution du patrimoine affecté résulte du dépôt d'une déclaration effectué :
« 1° Soit au registre de publicité légale auquel l'entrepreneur individuel est tenu de s'immatriculer ;
« 1° bis Soit au registre de publicité légale choisi par l'entrepreneur individuel en cas de double immatriculation ; dans ce cas, mention en est portée à l'autre registre ;
« 2° Soit, pour les personnes physiques qui ne sont pas tenues de s'immatriculer à un registre de publicité légale ou pour les exploitants agricoles, à un registre tenu au greffe du tribunal statuant en matière commerciale du lieu de leur établissement principal.
« Art. L. 526-7. - Les organismes chargés de la tenue des registres mentionnés à l'article L. 526-6-1 n'acceptent le dépôt de la déclaration visée au même article qu'après avoir vérifié qu'elle comporte :
« 1° Un état descriptif des biens, droits, obligations ou sûretés affectés à l'activité professionnelle, en nature, qualité, quantité et valeur ;
« 2° La mention de l'objet de l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté. La modification de l'objet donne lieu à mention au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 526-6-1 ;
« 3° Le cas échéant, les documents attestant de l'accomplissement des formalités visées aux articles L. 526-8 à L. 526-10.
« Art. L. 526-8. - L'affectation d'un bien immobilier ou d'une partie d'un tel bien est reçue par acte notarié et publiée au bureau des hypothèques ou, dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, au livre foncier de la situation du bien. L'entrepreneur individuel qui n'affecte qu'une partie d'un ou de plusieurs biens immobiliers désigne celle-ci dans un état descriptif de division.
« L'établissement de l'acte notarié et l'accomplissement des formalités de publicité donnent lieu au versement d'émoluments fixes dans le cadre d'un plafond déterminé par décret.
« Lorsque l'affectation d'un bien immobilier ou d'une partie d'un tel bien est postérieure à la constitution du patrimoine affecté, elle donne lieu au dépôt d'une déclaration complémentaire au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 526-6-1. L'article L. 526-7 est applicable, à l'exception des 1° et 2°.
« Le non-respect des règles prévues au présent article entraîne l'inopposabilité de l'affectation.
« Art. L. 526-9. - Tout élément d'actif du patrimoine affecté, autre que des liquidités, d'une valeur déclarée supérieure à un montant fixé par décret fait l'objet d'une évaluation au vu d'un rapport annexé à la déclaration et établi sous sa responsabilité par un commissaire aux comptes, un expert-comptable, une association de gestion et de comptabilité ou un notaire désigné par l'entrepreneur individuel. L'évaluation par un notaire ne peut concerner qu'un bien immobilier.
« Lorsque l'affectation d'un bien visé au premier alinéa est postérieure à la constitution du patrimoine affecté, elle fait l'objet d'une évaluation dans les mêmes formes et donne lieu au dépôt d'une déclaration complémentaire au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 526-6-1. L'article L. 526-7 est applicable, à l'exception des 1° et 2°.
« Lorsque la valeur déclarée est supérieure à celle proposée par le commissaire aux comptes, l'expert-comptable, l'association de gestion et de comptabilité ou le notaire, l'entrepreneur individuel est responsable, pendant une durée de cinq ans, à l'égard des tiers sur la totalité de son patrimoine, affecté et non affecté, à hauteur de la différence entre la valeur proposée par le commissaire aux comptes, l'expert-comptable, l'association de gestion et de comptabilité ou le notaire et la valeur déclarée.
« En l'absence de recours à un commissaire aux comptes, à un expert-comptable, à une association de gestion et de comptabilité ou à un notaire, l'entrepreneur individuel est responsable, pendant une durée de cinq ans, à l'égard des tiers sur la totalité de son patrimoine, affecté et non affecté, à hauteur de la différence entre la valeur réelle du bien au moment de l'affectation et la valeur déclarée.
« Art. L. 526-10. - Lorsque tout ou partie des biens affectés sont des biens communs ou indivis, l'entrepreneur individuel justifie de l'accord exprès de son conjoint ou de ses coïndivisaires et de leur information préalable sur les droits des créanciers mentionnés au 1° de l'article L. 526-11 sur le patrimoine affecté. Un même bien commun ou indivis ou une même partie d'un bien immobilier commun ou indivis ne peut entrer dans la composition que d'un seul patrimoine affecté.
« Lorsque l'affectation d'un bien commun ou indivis est postérieure à la constitution du patrimoine affecté, elle donne lieu au dépôt d'une déclaration complémentaire au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 526-6-1. L'article L. 526-7 est applicable, à l'exception des 1° et 2°.
« Le non-respect des règles prévues au présent article entraîne l'inopposabilité de l'affectation.
« Art. L. 526-11. - La déclaration d'affectation mentionnée à l'article L. 526-6-1 est opposable de plein droit aux créanciers dont les droits sont nés postérieurement à son dépôt.
« Elle est opposable aux créanciers dont les droits sont nés antérieurement à son dépôt à la condition que l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée le mentionne dans la déclaration d'affectation et en informe les créanciers dans des conditions fixées par voie réglementaire.
« Dans ce cas, les créanciers concernés peuvent former opposition à ce que la déclaration leur soit opposable dans un délai fixé par voie réglementaire. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties, si l'entrepreneur individuel en offre et si elles sont jugées suffisantes.
« À défaut de remboursement des créances ou de constitution des garanties ordonnées, la déclaration est inopposable aux créanciers dont l'opposition a été admise.
« L'opposition formée par un créancier n'a pas pour effet d'interdire la constitution du patrimoine affecté.
« Par dérogation aux articles 2284 et 2285 du code civil :
« 1° Les créanciers auxquels la déclaration d'affectation est opposable et dont les droits sont nés à l'occasion de l'exercice de l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté ont pour seul gage général le patrimoine affecté ;
« 2° Les autres créanciers auxquels la déclaration est opposable ont pour seul gage général le patrimoine non affecté.
« Toutefois, l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée est responsable sur la totalité de ses biens et droits en cas de fraude ou en cas de manquement grave aux règles prévues au deuxième alinéa de l'article L. 526-6 ou aux obligations prévues à l'article L. 526-12.
« En cas d'insuffisance du patrimoine non affecté, le droit de gage général des créanciers mentionnés au 2° du présent article peut s'exercer sur le bénéfice réalisé par l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée lors du dernier exercice clos.
« Art. L. 526-12. - L'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté fait l'objet d'une comptabilité autonome, établie dans les conditions définies aux articles L. 123-12 à L. 123-23 et L. 123-25 à L. 123-27.
« Par dérogation à l'article L. 123-28 et au premier alinéa du présent article, l'activité professionnelle des personnes bénéficiant des régimes définis aux articles 50-0, 64 et 102 ter du code général des impôts fait l'objet d'obligations comptables simplifiées.
« L'entrepreneur individuel à responsabilité limitée est tenu de faire ouvrir dans un établissement de crédit un ou plusieurs comptes bancaires exclusivement dédiés à l'activité à laquelle le patrimoine a été affecté.
« Art. L. 526-13. - Les comptes annuels de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée ou, le cas échéant, le ou les documents résultant des obligations comptables simplifiées prévues au deuxième alinéa de l'article L. 526-12 sont déposés chaque année au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 526-6-1 pour y être annexés. Ils sont transmis, pour y être annexés, au registre prévu au 2° de l'article L. 526-6-1 lorsque le dépôt de la déclaration est effectué au répertoire des métiers dans le cas prévu au 1° du même article, et, s'il y a lieu, au registre du commerce et des sociétés dans le cas prévu au 1° bis du même article. À compter de leur dépôt, ils valent actualisation de la composition et de la valeur du patrimoine affecté.
« En cas de non-respect de l'obligation mentionnée au premier alinéa, le président du tribunal, statuant en référé, peut, à la demande de tout intéressé ou du ministère public, enjoindre sous astreinte à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée de procéder au dépôt de ses comptes annuels ou, le cas échéant, du ou des documents résultant des obligations comptables simplifiées prévues au deuxième alinéa de l'article L. 526-12.
« Art. L. 526-14. - En cas de renonciation de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée à l'affectation ou en cas de décès de celui-ci, la déclaration d'affectation cesse de produire ses effets. Toutefois, en cas de cessation, concomitante à la renonciation, de l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine est affecté ou en cas de décès, les créanciers mentionnés aux 1° et 2° de l'article L. 526-11 conservent pour seul gage général celui qui était le leur au moment de la renonciation ou du décès.
« En cas de renonciation, l'entrepreneur individuel en fait porter la mention au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration prévue à l'article L. 526-6-1. En cas de décès, un héritier, un ayant droit ou toute personne mandatée à cet effet en fait porter la mention au même registre.
« Art. L. 526-14-1 A. - Par dérogation à l'article L. 526-14, l'affectation ne cesse pas dès lors que l'un des héritiers ou ayants droit de l'entrepreneur individuel décédé, sous réserve du respect des dispositions successorales, manifeste son intention de poursuivre l'activité professionnelle à laquelle le patrimoine était affecté. La personne ayant manifesté son intention de poursuivre l'activité professionnelle en fait porter la mention au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration visée à l'article L. 526-6-1 dans un délai de trois mois à compter de la date du décès.
« La reprise du patrimoine affecté, le cas échéant après partage et vente de certains des biens affectés pour les besoins de la succession, est subordonnée au dépôt d'une déclaration de reprise au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration visée à l'article L. 526-6-1.
« Art. L. 526-14-1 B. - I. - L'entrepreneur individuel à responsabilité limitée peut céder à titre onéreux, transmettre à titre gratuit entre vifs ou apporter en société l'intégralité de son patrimoine affecté et en transférer la propriété dans les conditions prévues aux II et III du présent article sans procéder à sa liquidation.
« II. - La cession à titre onéreux ou la transmission à titre gratuit entre vifs du patrimoine affecté à une personne physique entraîne sa reprise avec maintien de l'affectation dans le patrimoine du cessionnaire ou du donataire. Elle donne lieu au dépôt par le cédant ou le donateur d'une déclaration de transfert au registre auquel a été effectué le dépôt de la déclaration visée à l'article L. 526-6-1 et fait l'objet d'une publicité. La reprise n'est opposable aux tiers qu'après l'accomplissement de ces formalités.
« La cession du patrimoine affecté à une personne morale ou son apport en société entraîne transfert de propriété dans le patrimoine du cessionnaire ou de la société, sans maintien de l'affectation. Elle donne lieu à publication d'un avis. Le transfert de propriété n'est opposable aux tiers qu'après l'accomplissement de cette formalité.
« III. - La déclaration ou l'avis mentionnés au II sont accompagnés d'un état descriptif des biens, droits, obligations ou sûretés composant le patrimoine affecté.
« Les articles L. 141-1 à L. 141-22 ne sont pas applicables à la cession ou à l'apport en société d'un fonds de commerce intervenant par suite de la cession ou de l'apport en société d'un patrimoine affecté.
« Le cessionnaire, le donataire ou le bénéficiaire de l'apport est débiteur des créanciers de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée mentionnés au 1° de l'article L. 526-11 en lieu et place de celui-ci, sans que cette substitution emporte novation à leur égard.
« Les créanciers de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée mentionnés au 1° de l'article L. 526-11 dont la créance est antérieure à la date de la publicité mentionnée au II du présent article, ainsi que les créanciers auxquels la déclaration n'est pas opposable et dont les droits sont nés antérieurement au dépôt de la déclaration visée à l'article L. 526-6-1 lorsque le patrimoine affecté fait l'objet d'une donation entre vifs, peuvent former opposition à la transmission du patrimoine affecté dans un délai fixé par voie réglementaire. Une décision de justice rejette l'opposition ou ordonne soit le remboursement des créances, soit la constitution de garanties, si le cessionnaire ou le donataire en offre et si elles sont jugées suffisantes.
« À défaut de remboursement des créances ou de constitution des garanties ordonnées, la transmission du patrimoine affecté est inopposable aux créanciers dont l'opposition a été admise.
« L'opposition formée par un créancier n'a pas pour effet d'interdire la transmission du patrimoine affecté.
« Art. L. 526-14-1. - L'entrepreneur individuel à responsabilité limitée détermine les revenus qu'il verse dans son patrimoine non affecté.
« Art. L. 526-14-2. - Le tarif des formalités de dépôt des déclarations et d'inscription des mentions visées à la présente section ainsi que de dépôt des comptes annuels ou du ou des documents résultant des obligations comptables simplifiées prévues au deuxième alinéa de l'article L. 526-12 est fixé par décret.
« La formalité de dépôt de la déclaration visée à l'article L. 526-6-1 est gratuite lorsque la déclaration est déposée simultanément à la demande d'immatriculation au registre de publicité légale.
« Art. L. 526-14-3. - Le ministère public ainsi que tout intéressé peuvent demander au président du tribunal statuant en référé d'enjoindre sous astreinte à un entrepreneur individuel à responsabilité limitée de porter sur tous ses actes et documents sa dénomination, précédée ou suivie immédiatement et lisiblement des mots : “entrepreneur individuel à responsabilité limitée” ou des initiales : “EIRL”.
« Art. L. 526-15. - Les conditions d'application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d'État. »
Article 1er bis AA
I. - Après l'article 389-7 du code civil, il est inséré un article 389-8 ainsi rédigé :
« Art. 389-8. - Un mineur peut être autorisé, par ses deux parents qui exercent en commun l'autorité parentale ou par son administrateur légal sous contrôle judiciaire avec l'autorisation du juge des tutelles, à accomplir seul les actes d'administration nécessaires pour les besoins de la création et de la gestion d'une entreprise individuelle à responsabilité limitée ou d'une société unipersonnelle. Les actes de disposition ne peuvent être effectués que par ses deux parents ou, à défaut, par son administrateur légal sous contrôle judiciaire avec l'autorisation du juge des tutelles.
« L'autorisation visée au premier alinéa revêt la forme d'un acte sous seing privé ou d'un acte notarié et comporte la liste des actes d'administration pouvant être accomplis par le mineur. »
II. - L'article 401 du même code est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Le conseil de famille autorise le mineur à accomplir seul les actes d'administration nécessaires pour les besoins de la création et de la gestion d'une entreprise individuelle à responsabilité limitée ou d'une société unipersonnelle.
« L'autorisation visée à l'alinéa précédent revêt la forme d'un acte sous seing privé ou d'un acte notarié et comporte la liste des actes d'administration pouvant être accomplis par le mineur. »
III. - L'article 408 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le tuteur, après autorisation du conseil de famille, effectue les actes de disposition nécessaires pour les besoins de la création et de la gestion d'une entreprise individuelle à responsabilité limitée ou d'une société unipersonnelle. »
IV. - L'article 413-8 du même code est ainsi rédigé :
« Art. 413-8. - Le mineur émancipé peut être commerçant sur autorisation du juge des tutelles au moment de la décision d'émancipation et du président du tribunal de grande instance s'il formule cette demande après avoir été émancipé. »
V. - L'article L. 121-2 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. L. 121-2. - Le mineur émancipé peut être commerçant sur autorisation du juge des tutelles au moment de la décision d'émancipation et du président du tribunal de grande instance s'il formule cette demande après avoir été émancipé. »
Article 1er bis A
I. - Après le I de l'article 19 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. - L'assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat centralise, dans un répertoire national des métiers dont elle assure la publicité, le répertoire des métiers tenu par les chambres de métiers et de l'artisanat. Les conditions d'application du présent I bis sont définies par décret en Conseil d'État. »
II. - Au 2° de l'article L. 411-1 du code de la propriété intellectuelle, les mots : «, de registre du commerce et des sociétés et de répertoire des métiers » sont remplacés par les mots : « et de registre du commerce et des sociétés » et les mots : «, le répertoire des métiers » sont supprimés.
Article 1er bis
(Suppression maintenue)
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Article 3 bis
I. - Le deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après le mot : « agricoles », sont insérés les mots : « ainsi que pour les revenus imposables à l'impôt sur les sociétés des entrepreneurs individuels à responsabilité limitée, et des sociétés à responsabilité limitée, des exploitations agricoles à responsabilité limitée et des sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont l'associé unique est une personne physique » ;
2° À la seconde phrase, les mots : « adhérents pour lesquels des manquements délibérés auront été établis » sont remplacés par les mots : « contribuables pour lesquels des pénalités autres que les intérêts de retard auront été appliquées ».
II. - Le deuxième alinéa de l'article L. 176 du même livre est ainsi modifié :
1° À la première phrase, les mots : «, lorsque le contribuable est adhérent d'un centre de gestion agréé ou d'une association agréée, » sont remplacés par les mots : « pour les contribuables dont les revenus bénéficient des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 169 et » ;
2° À la dernière phrase, les mots : « adhérents pour lesquels des manquements délibérés auront été établis » sont remplacés par les mots : « contribuables pour lesquels des pénalités autres que les intérêts de retard auront été appliquées ».
......................................................................................
Article 5
I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, les dispositions relevant du domaine de la loi nécessaires pour adapter au patrimoine affecté de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée les dispositions du livre VI du code de commerce relatives à la prévention et au traitement des difficultés des entreprises et aux responsabilités et sanctions encourues par l'entrepreneur à cette occasion, afin de permettre à l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée d'adhérer à un groupement de prévention agréé et de bénéficier des procédures de prévention des difficultés des entreprises, du mandat ad hoc, de conciliation, de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire, et procéder aux harmonisations nécessaires en matière de droit des sûretés, de droit des procédures civiles d'exécution et de règles applicables au surendettement des particuliers.
Le projet de loi ratifiant cette ordonnance est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance.
II. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi, les dispositions relevant du domaine de la loi permettant, d'une part, de rendre applicables, avec les adaptations nécessaires, les dispositions de la présente loi dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie pour celles qui relèvent de la compétence de l'État et, d'autre part, de procéder aux adaptations nécessaires en ce qui concerne les collectivités de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin, de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon.
Le projet de loi ratifiant cette ordonnance est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance.
Article 6
(Supprimé)
Article 6 bis A
I. - L'ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la création de l'établissement public OSEO et à la transformation de l'établissement public Agence nationale de valorisation de la recherche en société anonyme est ainsi modifiée :
1° Dans l'intitulé, les mots : « et à la transformation de l'établissement public Agence nationale de la valorisation de la recherche en société anonyme » sont remplacés par les mots : « et de la société anonyme OSEO » ;
2° Les articles 1er et 2 sont ainsi rédigés :
« Art. 1er. - L'établissement public OSEO agit directement ou par l'intermédiaire de ses filiales.
« Il a pour objet de :
« 1° Promouvoir et soutenir l'innovation notamment technologique ainsi que de contribuer au transfert de technologies ;
« 2° Favoriser le développement et le financement des petites et moyennes entreprises.
« L'État, par acte unilatéral ou par convention, les collectivités territoriales ainsi que leurs établissements publics, par convention, peuvent confier à l'établissement des missions d'intérêt général compatibles avec son objet. L'établissement public peut exercer ces missions soit directement, soit dans le cadre de conventions passées à cet effet, par l'intermédiaire de ses filiales.
« Art. 2. - Par dérogation aux dispositions des articles 5 et 10 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, l'établissement public OSEO est administré par un conseil d'administration ainsi composé :
« 1° Un président nommé par décret ;
« 2° Cinq représentants de l'État nommés par décret.
« Un décret en Conseil d'État fixe les statuts de l'établissement public OSEO. » ;
3° L'article 3 est abrogé ;
4° La dernière phrase du troisième alinéa de l'article 5 est supprimée ;
5° Le chapitre II est ainsi rédigé :
« CHAPITRE II
« Organisation de la société anonyme OSEO
« Art. 6. - I. - La société anonyme OSEO a notamment pour objet d'exercer les missions d'intérêt général suivantes :
« 1° Promouvoir la croissance par l'innovation et le transfert de technologies, dans les conditions mentionnées à l'article 9 ;
« 2° Contribuer au développement économique en prenant en charge une partie du risque résultant des crédits accordés aux petites et moyennes entreprises ;
« 3° Contribuer aux besoins spécifiques de financement des investissements et des créances d'exploitation des petites et moyennes entreprises.
« La société anonyme OSEO est habilitée à exercer en France et à l'étranger, elle-même ou par l'intermédiaire de ses filiales ou des sociétés dans lesquelles elle détient une participation, toutes activités qui se rattachent directement ou indirectement à son objet tel que défini par la loi, ainsi que toute autre activité prévue par ses statuts.
« L'État, par acte unilatéral ou par convention, et les collectivités territoriales, ainsi que leurs établissements publics, par convention, peuvent confier à la société anonyme OSEO d'autres missions d'intérêt général compatibles avec son objet.
« II. - L'État et l'établissement public OSEO détiennent plus de 50 % du capital de la société anonyme OSEO.
« III. - Les modalités d'exercice par la société anonyme OSEO de ses missions d'intérêt général sont fixées par un contrat d'entreprise pluriannuel conclu, par dérogation à l'article 140 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, entre l'État, l'établissement public OSEO et la société anonyme OSEO.
« Art. 7. - Par dérogation aux articles 6 et 10 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 précitée, le conseil d'administration de la société anonyme OSEO comprend quinze membres :
« 1° Le président du conseil d'administration de l'établissement public OSEO, président ;
« 2° Quatre représentants de l'État nommés par décret ;
« 3° Trois personnalités choisies en raison de leur compétence en matière de développement et de financement des entreprises et d'innovation, nommées par décret ;
« 4° Trois membres désignés par l'assemblée générale des actionnaires ;
« 5° Quatre représentants des salariés élus dans les conditions prévues par le chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 précitée.
« Les délibérations du conseil d'administration de la société anonyme OSEO qui portent directement ou indirectement sur la mise en œuvre des concours financiers de l'État ne peuvent être adoptées sans le vote favorable des représentants de l'État mentionnés au 2°.
« L'article L. 225-38 du code de commerce ne s'applique pas aux conventions conclues entre l'État et la société anonyme OSEO en application des I et III de l'article 6.
« Art. 8. - Un commissaire du Gouvernement est nommé auprès de la société anonyme OSEO. Un décret précise les conditions dans lesquelles le commissaire du Gouvernement peut s'opposer, pour les activités mentionnées au 1° du I de l'article 6, aux décisions des organes délibérants.
« Art. 9. - I. - La société anonyme OSEO est organisée afin que l'activité mentionnée au 1° du I de l'article 6 soit exercée de manière distincte de ses autres activités. À cet effet :
« 1° La dotation de fonctionnement versée par l'État à la société anonyme OSEO au titre de cette activité ne peut être affectée qu'aux coûts que cette activité engendre ;
« 2° Le conseil d'administration de la société anonyme OSEO fixe, dans des conditions fixées par voie réglementaire, le plafond d'intervention au titre de chaque exercice, notamment sous forme de subventions publiques ou d'avances remboursables ;
« 3° Les résultats dégagés grâce à l'utilisation de dotations publiques versées à la société anonyme OSEO au titre de cette activité sont reversés aux financeurs publics ou réaffectés à ladite activité.
« II. - La société anonyme OSEO établit un enregistrement comptable distinct pour les opérations qu'elle réalise au titre des activités mentionnées au 1° du I de l'article 6. La société anonyme OSEO tient une comptabilité analytique distinguant les activités respectivement mentionnées aux 1°, 2° et 3° du I de l'article 6, dont les principes sont déterminés par le conseil d'administration après avis d'un comité spécialisé tel que prévu à l'article L. 823-19 du code de commerce et sont soumis à approbation par le commissaire du Gouvernement.
« Une ou plusieurs conventions entre l'État et la société anonyme OSEO précisent les modalités selon lesquelles cet enregistrement et cette gestion comptable sont effectués ainsi que les conditions dans lesquelles ils sont contrôlés et certifiés par un ou plusieurs commissaires aux comptes.
« III. - À l'exception de l'État, aucun titulaire de créances sur la société anonyme OSEO nées d'activités autres que celles mentionnées au 1° du I de l'article 6 ne peut se prévaloir d'un droit quelconque sur les biens et droits ressortissant à l'enregistrement distinct établi en application du II du présent article.
« Art. 10. - Les statuts de la société anonyme OSEO sont approuvés par décret.
« Les statuts de la société anonyme OSEO peuvent ultérieurement être modifiés dans les conditions prévues pour les sociétés anonymes. » ;
6° Le chapitre III est abrogé.
II. - La société anonyme OSEO résulte de la fusion par absorption au sein de la société anonyme OSEO financement, anciennement dénommée OSEO BDPME, des sociétés anonymes OSEO garantie, anciennement dénommée OSEO SOFARIS, OSEO innovation, anciennement dénommée OSEO ANVAR, et OSEO Bretagne.
Les fusions par absorption au sein de la société OSEO financement des sociétés OSEO Bretagne, OSEO garantie et OSEO innovation ne donnent lieu à la perception d'aucun impôt, droit, taxe, salaire des conservateurs des hypothèques, honoraires, frais, émolument et débours des notaires et des greffiers des tribunaux de commerce.
Les actes des fusions susmentionnées rendent de plein droit opposable aux tiers le transfert à la société absorbante des actifs mobiliers des sociétés absorbées ainsi que leurs sûretés, garanties et accessoires, sans autre formalité que celles requises pour la radiation des sociétés absorbées. Il en est de même en ce qui concerne les actifs immobiliers des sociétés absorbées ainsi que leurs sûretés, garanties et accessoires.
Les formalités de publicité foncière des transferts à la société absorbante des biens immobiliers des sociétés absorbées prévues dans le cadre des fusions précitées sont accomplies au plus tard un an après la publication du décret approuvant les statuts de la société anonyme OSEO.
III. - Les références à OSEO innovation, OSEO financement, OSEO garantie, OSEO Bretagne, OSEO ANVAR, OSEO SOFARIS et OSEO BDPME sont remplacées par une référence à la société anonyme OSEO dans toutes les dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
IV. - La participation de la région Bretagne au capital d'OSEO Bretagne devient une participation au capital de la société anonyme OSEO.
V. - Les I à IV entrent en vigueur le lendemain de la publication du décret approuvant les statuts de la société anonyme OSEO qui intervient au plus tard le dernier jour du sixième mois suivant celui de la publication de la présente loi.
Article 6 bis
L'article L. 313-21 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « entreprise », le mot : « et » est remplacé par les mots : « ou de solliciter une garantie auprès d'un autre établissement de crédit, d'une entreprise d'assurance habilitée à pratiquer les opérations de caution ou d'une société de caution mutuelle mentionnée aux articles L. 515-4 à L. 515-12. L'établissement de crédit ».
2° (Suppression maintenue)
Article 7
I. - Au deuxième alinéa de l'article L. 223-9 du code de commerce, le montant : « 7 500 € » est remplacé par les mots : « un montant fixé par décret ».
II. - Au dernier alinéa de l'article L. 324-4 du code rural, le montant : « 7 500 € » est remplacé par les mots : « un montant fixé par décret ».
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Article 8 bis
Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance les dispositions législatives nécessaires à la transposition de la directive 2007/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 juillet 2007, concernant l'exercice de certains droits des actionnaires de sociétés cotées.
L'ordonnance est prise dans un délai de six mois suivant la publication de la présente loi.
Le projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant la publication de l'ordonnance.
Article 9
(Suppression maintenue)
Article 10
I. - À l'exception des articles 1er bis AA, 1er bis A, 3 bis, 6 bis A, 6 bis, 7, 8 et 8 bis, la présente loi entre en vigueur à compter de la publication de l'ordonnance prévue au I de l'article 5.
II (nouveau). - Un même entrepreneur individuel peut constituer plusieurs patrimoines affectés à compter du 1er janvier 2013.
M. le président. Sur ces articles, je ne suis saisi d’aucun amendement.
Quelqu’un demande-t-il la parole sur l’un de ces articles ?...
Le vote est réservé.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, je donne la parole à M. François Zocchetto, pour explication de vote.
M. François Zocchetto. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je dois reconnaître que, au début de la discussion de ce texte, nous étions assez dubitatifs quant à l’intérêt de créer un nouveau statut de l’entrepreneur, venant s’ajouter à l’entreprise individuelle, qui est bien connue, et à l’EURL, qui donne largement satisfaction. Nous étions d’autant plus dubitatifs que le législateur avait déjà prévu le principe de l’insaisissabilité du patrimoine personnel et qu’il avait par ailleurs adopté un statut d’entrepreneur individuel. Il nous semblait donc qu’une personne souhaitant se lancer dans les affaires pouvait trouver une procédure adaptée à ses besoins.
Après avoir procédé à un examen plus approfondi, nous nous sommes rangés à l’idée du Gouvernement. Après tout, si ce nouveau dispositif était de nature à encourager la création d’entreprises ou à promouvoir le développement d’entreprises existantes, alors, il convenait d’y souscrire !
Encore fallait-il que ce dispositif ne conduise pas à des comportements critiquables. Je pense à l’organisation de l’insolvabilité de certains entrepreneurs individuels qu’aurait pu engendrer l’opposabilité de la création de l’EIRL aux créances nées antérieurement à cette création. La commission mixte paritaire s’est bien entendu préoccupée de cette question. Je me réjouis que la position du Sénat, ardemment défendue par M. le rapporteur, ait finalement prévalu sur celle de l’Assemblée nationale qui, je n’hésite pas à le dire, nous paraissait tout à la fois incompréhensible et dangereuse pour l’avenir.
Il a fallu organiser l’information des créanciers dont les créances sont nées antérieurement à la création de l’entreprise individuelle. La commission mixte paritaire a trouvé un compromis en renvoyant le soin d’organiser l’information au pouvoir réglementaire. Toutefois, nous ne saurions accepter que l’information se fasse par une simple publication dans un journal d’annonces légales. En effet, tous les professionnels vous le diront – mais vous le savez déjà, monsieur le secrétaire d’État –, la publication dans un journal d’annonces légales ne garantit pas que l’information réelle soit reçue par les créanciers. Il est toujours possible de trouver, dans un coin du département voisin, un petit journal d’annonces légales agréé pour publier les annonces du département concerné.
Nous souhaitons donc avoir l’assurance que tous les créanciers seront bien informés. Peut-être serait-il intéressant de s’inspirer du mode d’information utilisé par les mandataires liquidateurs. Ainsi rassurés, nous voterons ce texte.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat.
M. Claude Bérit-Débat. Au terme de la discussion de ce projet de loi, je tiens à rappeler tout l’intérêt que les sénateurs du groupe socialiste et moi-même avons porté à ce texte.
Comme certains d’entre vous, j’ai eu trop souvent l’occasion de constater, au cours de mon activité professionnelle ou pendant l’exercice de mes mandats, les difficultés, voire les drames, que le principe d’unicité du patrimoine faisait encourir aux petits artisans et commerçants et, plus généralement, aux dirigeants de petites entreprises. J’attendais donc beaucoup de ce projet de loi, et je suis en cet instant très partagé.
Tout d’abord, je constate, pour m’en réjouir, que, sur certains points, le texte a été amélioré par le Sénat et par la commission mixte paritaire. L’avancée principale tient à la réintroduction du principe d’insaisissabilité. Dans la mesure où les entrepreneurs ont besoin de sécurité juridique, il me semblait cohérent – et je l’avais indiqué en première lecture –de s’aligner sur le mieux-disant.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Il n’y a pas unanimité dans le groupe socialiste, alors ?
M. Claude Bérit-Débat. Dès lors, la création de l’EIRL ne devait pas se faire au détriment du principe de l’insaisissabilité.
En ce qui concerne la possibilité de constituer plusieurs patrimoines affectés, je suis plus mitigé. Les difficultés liées à cette procédure ont été largement soulignées tout au long de la discussion et je m’en suis moi-même fait l’écho, monsieur le rapporteur. Le report à 2013 de cette disposition est bienvenu, car il nous laisse le temps de la réflexion.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Tout à fait !
M. Claude Bérit-Débat. Je ne suis toutefois pas convaincu que l’on mesure pleinement toutes les difficultés auxquelles l’on risque d’exposer les entrepreneurs en leur permettant de créer plusieurs patrimoines affectés.
D’abord, la question de l’information des créanciers devra être suivie avec beaucoup d’attention. Il faudra se montrer d’une extrême précision afin d’éviter les contentieux avec des créanciers antérieurs.
Ensuite, nous devrons nous en remettre à la rédaction d’un décret qui, je l’espère, respectera la volonté des parlementaires telle qu’elle s’est exprimée en commission mixte paritaire.
Enfin, et c’est le point essentiel, je ne suis toujours pas persuadé que la pluralité du patrimoine affecté constitue une avancée réelle pour les entrepreneurs : d’un côté, on cumule les désavantages et on prend des risques juridiques – il semble que ce soit la mode ! –, de l’autre, on ne répond pas aux besoins exprimés par les entrepreneurs.
N’oublions pas, et cela a été souligné à plusieurs reprises, que les EIRL seront créées le plus souvent par des auto-entrepreneurs. Or ces derniers sont plus soucieux de pérenniser leur activité que de se lancer dans une hypothétique diversification.
Cette disposition me semble relever d’une confusion récurrente qu’il faudrait éclaircir. Lorsque l’on parle d’entrepreneurs, on raisonne souvent comme si l’on s’adressait à des patrons de petites et moyennes entreprises. Or, le plus souvent – et vous l’avez rappelé à juste titre, monsieur le secrétaire d’État –, on s’adresse à des petits artisans, commerçants ou prestataires de services – et le terme « petit » n’est pas péjoratif – qui travaillent seuls ou emploient un ou deux salariés. Il faut bien distinguer ces deux formes d’entrepreneuriat.
Sur le fond, le texte qui nous est présenté présente les mêmes travers que celui que nous avons examiné en première lecture. En pratique, le problème des garanties demandées par les banques reste entier. La question des liens de sujétion entre l’entrepreneur individuel et le donneur d’ordre reste posée, notamment lorsque ce donneur d’ordre est l’ancien patron du salarié devenu entrepreneur. Nous avions déjà évoqué ce cas de figure en première lecture.
La fiscalité demeure une source d’interrogations, sans parler de la réorganisation à la hussarde d’OSEO que l’on nous nous a infligée. M. Richard Yung a fait état de cette réorganisation, qui constitue l’un des deux cavaliers de ce texte.
Comme je l’ai indiqué en première lecture, les préoccupations qui ont inspiré ce projet de loi sont tout à fait louables, et je les partage, mais les dispositions proposées ne sont pas à la hauteur des objectifs affichés.
Pour cette raison, les sénateurs du groupe socialiste voteront contre ce texte.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire.
(Le projet de loi est adopté.)
4
Conseil économique, social et environnemental
Adoption d'un projet de loi organique en procédure accélérée
(Texte de la commission)
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi organique, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au Conseil économique, social et environnemental (projet n° 395, texte de la commission n° 417, rapport n° 416).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, portée par le Président de la République, a engagé une profonde réforme du Conseil économique et social en le transformant en Conseil économique, social et environnemental. La compétence consultative de l’institution est ainsi étendue aux questions environnementales.
Cette nouvelle vocation s’inscrit parfaitement dans le cadre du Grenelle de l’environnement – sujet d’actualité puisque l’Assemblée nationale examine ce jour le projet de loi portant engagement national pour l’environnement – et elle traduit la volonté du Gouvernement de placer l’écologie et le développement durable au cœur de nos débats.
La revalorisation souhaitée par le constituant a également exigé d’ouvrir davantage l’accès au Conseil économique et social. C’est la raison pour laquelle la Constitution donne désormais la possibilité au Parlement de consulter le Conseil économique et social. Cette prérogative était, depuis 1958, réservée au Gouvernement.
Les citoyens pourront, eux aussi, saisir le Conseil économique, social et environnemental, le CESE, par voie de pétition. Le Conseil fera des propositions au Gouvernement et au Parlement sur les suites à donner à chaque saisine citoyenne.
À la suite des travaux du Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par M. Édouard Balladur, le constituant a souligné la nécessité de modifier la composition et le fonctionnement du Conseil économique et social afin d’en renforcer la légitimité. C’est en effet à cette condition que le Conseil pourra continuer à remplir sa mission de dialogue et d’expression des attentes des différentes composantes de la société civile.
La mise en œuvre de cette réforme appelle d’importantes modifications de l’ordonnance du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social. C’est l’objet du texte qui est aujourd’hui soumis à votre examen.
En premier lieu, le projet de loi organique précise la procédure de saisine parlementaire, confiée au président de chaque assemblée, et les conséquences sur le fonctionnement du CESE du rapprochement réalisé avec les assemblées parlementaires.
Les modalités d’exercice du droit de pétition sont également définies. Soucieux de ne pas soumettre la saisine du Conseil économique social et environnemental à des conditions trop strictes, le Gouvernement propose d’établir à 500 000 le nombre minimum de pétitionnaires. Ce droit est reconnu non seulement aux nationaux, mais également à toutes les personnes majeures résidant régulièrement sur le territoire national. L’intervention d’un mandataire unique pour chaque pétition facilitera la collecte et le contrôle des signatures.
Ces nouvelles voies de saisine sont ainsi largement ouvertes et elles prémunissent contre des excès qui seraient préjudiciables à la mission du CESE.
En deuxième lieu, le fonctionnement du Conseil économique social et environnemental permet de tirer toutes les conséquences de la révision constitutionnelle. L’ordonnance organique est ainsi largement actualisée.
À ce titre, je tiens d’ores et déjà à rendre un hommage très appuyé au travail approfondi et constructif réalisé, comme à son habitude, par la commission des lois du Sénat, en particulier par son rapporteur, M. Jean-Pierre Vial. La création d’une procédure de consultation en urgence ou la fixation d’un délai maximum pour rendre un avis sur une pétition ont ainsi vocation à renforcer la dynamique de la réforme qui est engagée. Ces innovations s’ajoutent à celles qui ont été apportées par l’Assemblée nationale pour assurer un fonctionnement plus transparent et plus rationnel du CESE.
En dernier lieu, le projet de loi organique vient préciser la nouvelle composition du Conseil économique social et environnemental. C’est la tâche qui était incontestablement la plus difficile à réaliser. En effet, la composition du Conseil n’a donné lieu, depuis 1958, qu’à de très légers ajustements alors que, dans le même temps, la société française s’est profondément transformée.
Afin d’éviter de nouvelles remises en cause de la légitimité et de la représentativité du Conseil économique et social, il importe que les principales composantes de la société civile contemporaine y trouvent leur place.
Parallèlement, la composition du CESE doit être élargie pour prendre en compte de façon adéquate la nouvelle compétence environnementale de l’institution.
Il convient de rappeler que cette double modification de la composition du Conseil se réalise à effectifs constants,…
M. Antoine Lefèvre. Eh oui !
M. Henri de Raincourt, ministre. … le constituant ayant plafonné le nombre de membres du CESE, conformément au principe qui a été retenu pour l’Assemblée nationale et pour le Sénat.
Une telle refonte de la composition du CESE a appelé des efforts de la part des groupes actuellement présents en son sein. Les Français établis hors de France, qui doivent par ailleurs bénéficier d’une représentation importante à l’Assemblée nationale, verront leurs intérêts pris en compte par l’ensemble des groupes du CESE. Je ne doute pas nous reviendrons sur ce sujet lors de la discussion des articles.
Les entreprises publiques, dont la place dans l’économie a diminué depuis 1984, n’ont plus de représentation propre au CESE dans le projet du Gouvernement. Mais leur voix pourra, bien évidemment, se faire entendre dans le corps des personnalités qualifiées.
Je veux à cet égard relever devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs, l’effort important consenti par les représentants du monde agricole. En effet, à effectifs constants, les nouveaux arrivants ne doivent leur place qu’au consentement – parfois donné à contrecœur, ce qui peut se comprendre – de certains groupes de voir le nombre de leurs représentants sensiblement réduit.
La nouvelle architecture du Conseil économique social et environnemental reposera sur trois grands pôles.
D’abord, le pôle économique, composé d’acteurs de la vie économique et du dialogue social, maintiendra le rôle central des représentants des salariés et des entreprises.
Ensuite, le pôle social, rassemblant les acteurs de la vie associative et de la cohésion sociale et territoriale, sera riche en innovations. Ainsi, les secteurs de l’économie solidaire, du handicap, du sport, les mondes de la science et de la culture seront expressément représentés au sein du CESE. Les jeunes et les étudiants auront un contingent spécifique de représentants. Les associations verront également leur présence renforcée.
Enfin, dans la logique de la révision constitutionnelle et du Grenelle de l’environnement, le pôle environnemental sera constitué de dix-huit représentants des associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de la nature et de l’environnement, ainsi que de quinze personnalités qualifiées dans les questions de l’environnement et du développement durable.
La question de la représentativité des associations qui interviennent dans le domaine de l’environnement est évidemment posée. Le Gouvernement s’appuiera, en la matière, sur les préconisations du rapport remis au Premier ministre par M. Bertrand Pancher, député de la Meuse, au titre du comité opérationnel « Institution et représentativité des acteurs » du Grenelle de l’environnement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, soyez assurés de l’ambition formelle du Gouvernement de préserver, dans ce projet, les équilibres de représentation existant actuellement au sein du Conseil économique et social. Ainsi, la pratique de la concertation et la recherche du consensus pourront demeurer un atout essentiel du CESE.
Éclairé par le rapport de M. Dominique-Jean Chertier, le Gouvernement a pris le temps de l’analyse et de la concertation pour soumettre au Parlement un projet de composition recueillant l’adhésion du plus grand nombre, à défaut de l’unanimité, sans doute difficilement accessible. M. Dermagne a bien indiqué que le Conseil économique social et environnemental souscrit aux choix réalisés par le Gouvernement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, le compromis qui vous est proposé peut, je le conçois, paraître imparfait aux yeux de certains d’entre vous. Mais je tiens à souligner que l’équilibre global ainsi établi est extrêmement fragile.
Votre commission a apporté plusieurs modifications importantes à la composition du CESE. Ainsi, les personnalités qualifiées feront place aux entreprises publiques dans le pôle économique, aux retraités dans le pôle de la cohésion sociale et aux entreprises « vertes » dans le pôle environnemental.
Il faut avoir bien conscience du fait que le CESE ne peut offrir une représentation individualisée à chaque activité économique ou sociale, à chaque catégorie ou groupe de personnes existant dans notre pays.
Je comprends tout à la fois les demandes légitimes qui se sont exprimées et les propositions qui, sans nul doute, émailleront la discussion des articles. Je me dois néanmoins de lancer un appel solennel, à la prudence et à la responsabilité, à tous ceux qui, pour des motifs parfaitement admissibles, veulent s’engager dans une recomposition, fût-elle limitée, du Conseil. L’architecture proposée s’assimile à un château de cartes : retirez une carte et c’est l’ensemble de l’édifice qui peut s’écrouler.
M. Nicolas About. « Peut » !
M. Henri de Raincourt, ministre. C’est la raison pour laquelle, je vous l’indique d’emblée, je serai amené à ne pas faire droit à certains amendements, pourtant tout à fait légitimes sur le fond. J’escompte bien entendu votre compréhension active, et j’espère que vous suivrez les recommandations du Gouvernement. (Sourires.)
Les changements auxquels nous avons procédé dans la composition du Conseil sont d’ores et déjà très profonds. Ils assurent incontestablement une représentation plus fidèle de la société civile.
Introduite dans le texte sur l’initiative de M. le rapporteur, la clause de révision périodique de la composition du CESE permettra, à échéance régulière, de rouvrir le débat et d’apporter les adaptations nécessaires. C’est une nouvelle incitation à la prudence.
La féminisation du Conseil économique social et environnemental participe de l’évolution majeure de l’institution et de sa composition. Le projet de loi organique établit, en effet, des règles de désignation permettant de tendre efficacement vers une parité de représentation presque parfaite entre les hommes et les femmes. Je dis « presque », car le CESE comprendra 233 sièges. La parité ne peut donc pas être parfaite. Il y a forcément un siège d’écart. (Sourires.)
Le rajeunissement du CESE pourra également être réalisé grâce à la limitation à deux du nombre de mandats consécutifs et à l’abaissement de vingt-cinq à dix-huit ans de l’âge minimum pour devenir membre.
L’ensemble de ces changements permettra la revitalisation du Conseil économique social et environnemental, voulue par le Président de la République.
Au mois de septembre prochain, après le vote du Parlement, c’est donc un Conseil économique social et environnemental plus représentatif de notre société civile et de la diversité de ses engagements et de ses préoccupations, un Conseil modernisé et plus ouvert sur l’extérieur, qui se mettra au travail.
Je souhaite, au nom du Gouvernement, rendre hommage au Conseil économique et social pour le travail sérieux et fiable qu’il a accompli depuis sa création, au service de notre pays et de notre démocratie sociale. Avec cette réforme, le Conseil pourra continuer à être une force d’analyse et de proposition déterminante pour faire face aux nombreux défis de notre temps.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite donc à adopter ce projet de loi organique. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi organique dont nous sommes saisis constitue la deuxième étape de la transformation du Conseil économique et social, après l’adoption de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a fait de cette institution le Conseil économique, social et environnemental.
Au-delà de ce qui pourrait être considéré par certains comme une simple mais nécessaire adaptation sémantique pour répondre à l’évolution de notre société, ce projet de loi organique mettant en œuvre la réforme constitutionnelle de 2008 procède à une véritable refondation du Conseil économique et social, refondation dont nos assemblées parlementaires auront à prendre toute la mesure et dans laquelle elles sont appelées à prendre toute leur part – j’allais dire « toute leur responsabilité » – pour en permettre la réussite.
Victime soit d’une certaine méconnaissance, soit d’appréciations parfois sévères, le Conseil économique et social devait faire l’objet d’un repositionnement clair dans nos institutions.
Les conclusions du rapport de M. Dominique-Jean Chertier, remis à M. le Président de la République, et les propositions de M. Édouard Balladur sur la réforme de nos institutions sont venues fort opportunément nourrir le chantier dont le présent projet de loi organique est l’aboutissement.
Originale dans notre histoire, l’institution aura vécu bien des transformations depuis sa création, en 1925, et la confortation de son existence par l’acquisition, en 1946, d’un statut constitutionnel, finalement confirmé en 1958, dans un contexte qui a donné lieu aux débats que l’on sait.
Alors que le Conseil économique et social est aux termes mêmes de la Constitution une troisième chambre, ses relations avec le Parlement, qui ne sont jamais devenues vraiment réalité, se sont profondément distendues. Que son autosaisine soit à l’origine des trois quarts de son activité illustre bien cette situation !
C’est dire que la réforme engagée constitue une réelle et nécessaire évolution de cette institution représentative de la société civile, de surcroît à un moment où bien d’autres pays souhaitent se doter ou se dotent d’un conseil économique et social.
La réforme constitutionnelle portait sur trois grands enjeux : le champ de compétence et les missions du Conseil ; son organisation et son fonctionnement ; sa composition.
En ce qui concerne d’abord le champ de compétence du Conseil économique, social et environnemental, l’article 1er du projet de loi organique pose clairement l’objet et les missions de celui-ci : assurer la participation des principales activités du pays à la politique économique, sociale et environnementale de la nation ; examiner les évolutions en matière économique, sociale et environnementale ; suggérer les adaptations qui lui paraissent nécessaires.
Nous souscrivons entièrement à l’esprit qui a conduit l’Assemblée nationale à demander le rétablissement, parmi les missions imparties au Conseil, de celle qui vise à favoriser la collaboration des principales activités du pays afin d’assurer leur plus forte participation aux politiques mises en œuvre.
C’est dans cet esprit que nous vous proposons, mes chers collègues, de soutenir la promotion des échanges du Conseil économique, social et environnemental avec les conseils économiques et sociaux régionaux et avec le Comité économique et social européen, ainsi qu’avec les assemblées consultatives existant à l’étranger, dans le prolongement d’une action déjà largement mise en œuvre par le Conseil économique et social, sur l’initiative de son président, M. Jacques Dermagne.
Le rôle du Conseil économique, social et environnemental se trouve renforcé par l’article 3 en ce qui concerne ses relations avec les deux assemblées puisqu’il peut désormais appeler l’attention non plus seulement du Gouvernement, mais aussi du Parlement, « sur les réformes qui lui paraissent nécessaires », rédaction d’ailleurs plus satisfaisante que celle du texte initial.
Nous nous trouvons là au cœur de la question de l’équilibre entre les missions qui relèvent du Conseil économique, social et environnemental et les pouvoirs dévolus aux assemblées parlementaires.
La révision de 2008 permet au Parlement de consulter le Conseil économique, social et environnemental.
À cet égard, je citerai Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois, qui, dans son rapport sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République, écrit à propos de la consultation du Conseil économique, social et environnemental par le Parlement qu’« il semble en effet légitime que les deux assemblées puissent recueillir l’avis des représentants des organisations professionnelles et des associations dans le cadre de leurs activités de prospective et d’évaluation de la législation et des politiques publiques ».
Enfin, la saisine du Conseil par voie de pétition va nécessairement renforcer les liens entre le Conseil économique, social et environnemental et la société civile.
Si cette procédure ouvre au Conseil économique, social et environnemental un nouveau champ d’action conforme à sa vocation originelle de garant de la démocratie consultative, d’intermédiaire entre les citoyens et les pouvoirs publics, encore convient-il que ce nouveau champ d’action ne soit pas source d’une complexité et d’une lourdeur de fonctionnement qui compromettrait la rénovation attendue de cette institution.
C’est pourquoi, tout en approuvant globalement le dispositif proposé, la commission des lois souhaite fortement que soit retenue l’analyse de notre collègue Jean-Claude Frécon, qui s’est prononcé en faveur d’un contrôle des signatures effectué par « échantillonnage ».
En ce qui concerne ensuite le fonctionnement du Conseil économique, social et environnemental, si l’extension du champ de ses compétences est de nature à renforcer son rôle, celui-ci dépendra aussi beaucoup des conditions dans lesquelles il pourra exercer ses missions.
Les deux possibilités de saisine, par les assemblées parlementaires d’une part, par les citoyens d’autre part, constituent un élément important de la réforme.
Sa consultation, à la demande du président de l’Assemblée nationale ou du président du Sénat, est un aspect majeur du rôle que peut et doit jouer le Conseil économique, social et environnemental aux côtés des assemblées parlementaires.
Dans un souci de bonne gestion des pétitions déclarées recevables, l’avis devra être rendu dans un délai maximum d’un an, étant précisé que les avis consécutifs à une pétition doivent être rendus par l’assemblée plénière.
De la même façon, pour faciliter la saisine pour avis du Conseil par les assemblées parlementaires, il est nécessaire qu’une procédure d’urgence puisse être prévue lorsque les conditions l’imposent.
L’article 2 de l’ordonnance du 29 décembre 1958 prévoit une procédure d’urgence, à la demande du Gouvernement, qui impose au Conseil de donner son avis dans un délai d’un mois.
La commission des lois a souhaité compléter ce dispositif en prévoyant que, lorsque le Conseil économique, social et environnemental est saisi d’urgence par le Gouvernement ou par une assemblée, un projet d’avis peut être émis par la section compétente. Cette procédure s’inspire de la pratique de notre assemblée en matière de résolutions européennes.
Ce projet d’avis ne deviendrait l’avis du Conseil qu’après un délai de trois jours suivant sa publication, permettant ainsi au président du Conseil ou à dix de ses membres d’éventuellement demander son examen en assemblée plénière.
Derrière des aspects techniques, il s’agit en réalité d’assurer au Conseil économique, social et environnemental un fonctionnement qui soit en harmonie avec celui des assemblées parlementaires afin de parvenir à la complémentarité des institutions voulue par le constituant.
J’en viens enfin à la composition et la représentativité du Conseil économique, social et environnemental.
Il n’est nullement besoin de souligner que les critiques le plus fréquemment formulées à l’égard de l’institution concernent sa composition, qui n’a été que très faiblement adaptée depuis 1958, et donc sa représentativité.
Le projet de loi organique tend à améliorer cette représentativité en élargissant la place des femmes et en ouvrant le Conseil aux associations environnementales.
La nouvelle composition sera structurée autour de trois pôles : le pôle relatif à la vie économique et au dialogue social, avec 140 membres, soit 60,1 % de l’effectif total ; le pôle relatif à la cohésion sociale et territoriale et à la vie associative, avec 60 membres, soit 25,75 % de l’effectif total ; le pôle relatif à la protection de la nature et de l’environnement, avec 33 membres, soit 14,15 % de l’effectif total.
La composition du Conseil s’ouvre en réalité à deux nouvelles catégories de membres : d’une part, les jeunes et les étudiants, représentés par quatre membres ; d’autre part, les associations et fondations agissant dans le domaine de protection de la nature et de l’environnement.
Cette nouvelle composition est difficile à mettre en œuvre, car la Constitution limite désormais l’effectif du Conseil économique, social et environnemental à 233 membres.
Le projet de loi organique complète cette règle en instaurant la parité, en abaissant de vingt-cinq à dix-huit ans l’âge requis pour siéger au Conseil et en limitant à deux le nombre de mandats.
Si l’on peut considérer que cette recomposition du Conseil répond à l’impératif de représenter au mieux l’ensemble des composantes de la société civile, encore conviendra-t-il de satisfaire aux conditions de représentativité, lesquelles, il faut bien le reconnaître, monsieur le ministre, constituent le point faible de ce projet de loi organique.
À la décharge du Gouvernement, je reconnais volontiers que nous nous trouvons dans une situation de transition et que c’est bien cette contrainte de circonstance et de non-compatibilité des calendriers qui ne permet pas de prévoir, dès ce projet de loi organique, une représentation aussi satisfaisante que souhaitable.
C’est pour ne pas reproduire les errements du passé qu’il est proposé que soient reconsidérées tous les dix ans les conditions de représentativité des différentes composantes du Conseil, le premier examen devant intervenir quatre ans après le renouvellement du Conseil en 2010. Ainsi pourra être prise en compte l’entrée en vigueur la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, qui pose les nouvelles règles de la représentativité syndicale.
C’est avec la même exigence que devront être reconsidérés les critères de représentativité de la vie économique ainsi que de la cohésion sociale et territoriale.
Concernant les conditions de représentativité de la nouvelle composante environnementale, nous prenons acte du fait que le Gouvernement entend s’inspirer des recommandations du Grenelle de l’environnement et des conclusions du rapport de notre collègue député Bertrand Pancher, qui retient trois catégories d’acteurs environnementaux.
Cette première révision sera l’occasion d’assurer plus précisément la représentativité des différentes composantes de la société civile dans sa diversité économique, sociale et environnementale.
La proposition de fléchage de personnalités issues des entreprises publiques et de personnalités dirigeant des entreprises conduisant une action environnementale procède de cette exigence.
C’est parce que la représentativité constitue l’un des piliers forts du Conseil économique, social et environnemental qu’il est proposé que l’examen de ces révisions fasse l’objet d’un rapport du Gouvernement au Parlement, après avis du Conseil économique, social et environnemental.
Enfin, il convient de souligner la situation particulière des personnalités qualifiées.
L’encadrement apporté par le projet de loi organique en ce qui concerne la nature et la durée des missions pour les personnalités associées constitue une vraie garantie, de nature à répondre aux critiques qui avaient été formulées.
Pour ce qui a trait aux personnalités qualifiées, nous avons bien compris votre message, monsieur le ministre, mais il est tout aussi important que les conditions de désignation puissent offrir les mêmes garanties. C’est pour satisfaire à cette exigence de transparence et d’expertise que la commission souhaite leur désignation après avis des présidents des deux assemblées parlementaires.
Monsieur le ministre, c’est dans ce souci d’équilibre qu’il est demandé avec insistance au Gouvernement que le choix des personnalités qualifiées, au-delà de leur qualité et de leur expertise, respecte la nécessité d’assurer la représentation la plus équilibrée possible dans la période intermédiaire de quatre ans après le renouvellement.
Ensuite, lorsque les critères de la représentativité auront été affinés, nous pourrons parachever le travail relatif à la composition de cette institution.
Mes chers collègues, ce projet de loi organique ne constitue donc pas un simple toilettage du Conseil économique et social ; il pose le cadre et les règles d’une refondation de cette institution, mais encore conviendra-t-il que les uns et les autres s’engagent à la faire vivre dans le respect de l’esprit de notre Constitution. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous poursuivons aujourd’hui le marathon de l’examen des différents projets de loi organique résultant de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Constatons, monsieur le ministre, que la surcharge de l’ordre du jour parlementaire résulte pour beaucoup de l’empressement fréquent du Gouvernement à légiférer en fonction de l’actualité médiatique, surcharge qui explique le retard dans l’examen de beaucoup de ces projets de loi organique.
Le Conseil économique, social et environnemental est une institution méconnue, d’abord par nos concitoyens, mais aussi – oserai-je le dire ? – par nombre de responsables politiques.
Sa charge de travail a considérablement varié au fil des décennies, les gouvernements successifs ne voyant pas toujours un grand intérêt à consulter une institution pourtant utile à notre démocratie.
Depuis 1958, le recours immodéré à des nominations à titre discrétionnaire des membres de section par les gouvernements de toutes sensibilités n’a sans doute pas contribué à doter le Conseil de la crédibilité qui aurait assis sa légitimité.
Le Conseil économique, social et environnemental ne peut ni ne doit pas être l’expression des corporatismes, qui sont si nocifs à l’intérêt général. Il doit être l’expression de la technicité et de l’excellence, au sens noble du terme, dans les domaines essentiels de la vie en société.
Le Conseil ne peut ni ne doit non plus se confondre avec une récompense pour services rendus, se résumer à l’accumulation de lots de consolation ou de files d’attente pour des lendemains meilleurs. Sa crédibilité et, plus largement, celle des institutions de notre République en dépendent. Considérer que le Conseil serait l’expression de la société civile – terme contestable et inadéquat, qui me choque, car nous ne sommes pas tous des militaires ; sans doute faudra-t-il faire un effort dialectique sur ce sujet – et la représentation démocratique ne pourrait qu'aboutir à des échecs et à une absence d’efficacité.
Les assemblées ont un besoin croissant d’expertise. Nous avons tous en mémoire la qualité des conclusions du rapport de M. Philippe Valletoux : Évaluation et suivi des relations financières entre l’État et les collectivités locales. Nous avons eu la démonstration qu’un rapport, lorsqu’il est rédigé par les meilleurs experts, permet au Parlement d’approfondir sa réflexion. Est-il vraiment utopique de souhaiter qu’il en aille toujours ainsi ?
Le Conseil économique, social et environnemental trouve sa source dans l’idée selon laquelle la démocratie ne se résume pas à des relations exclusivement verticales entre gouvernants et gouvernés. La Révolution de 1789 avait accrédité et enraciné l’immanence de la souveraineté, que proclame l’article III de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. »
Inspirée d’un projet émanant de la Confédération générale du travail, la CGT, la création, en 1925, du Conseil national économique procède d’un schéma selon lequel la légitimité démocratique du Parlement est compatible avec l’association des corps intermédiaires à la prise de décision politique. L’institutionnalisation de leur représentation ne faisait finalement que prolonger le vaste mouvement de reconnaissance de nouveaux droits économiques et sociaux pour les travailleurs, initié dès la fin du xixe siècle, notamment par les radicaux.
L’avènement de la IVe République et d’un Conseil économique et social constitutionnalisé n’ont pas remis en cause cette idée. En fait, le débat s’est concentré sur la place et sur les pouvoirs qu’il convenait d’attribuer à une telle assemblée. L’idée de la participation, avancée par le général de Gaulle, impliquait d’ériger la seconde chambre du Parlement en assemblée représentative des acteurs économiques et sociaux. Cette orientation se dessinait déjà dans le discours de Bayeux, en 1946.
Le référendum de 1969 portait notamment sur le projet de fusion du Sénat et du Conseil économique et social, afin de constituer un nouveau Sénat qui aurait exercé une fonction consultative et n’aurait disposé d’aucun pouvoir de blocage. Le Sénat, derrière le président Monnerville, avait clairement exprimé et fait triompher son opposition à ce projet.
Force est de constater que le Conseil économique et social, et demain environnemental, n’a pas encore pleinement trouvé sa place parmi nos institutions. Parfois ignoré par l’exécutif, parfois simple caution politique, le Conseil peine à trouver un nouveau souffle.
Permettez-moi de vous livrer une anecdote. Récemment, j’ai demandé au Conseil économique et social régional la liste de ses membres présents aux dix-sept réunions qui ont eu lieu depuis 2007. Pour obtenir une réponse, j’ai dû saisir la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, ce qui est révélateur de l’exceptionnel manque de transparence de l’institution.
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a doté le Conseil de nouveaux moyens afin d’accroître l’influence de ses expertises. L’article 69 de la Constitution a créé un droit de saisine par voie de pétition au profit des citoyens. L’article 70 a étendu sa compétence aux questions environnementales et élargi sa saisine par le Parlement à toute question à caractère économique, social ou environnemental. Ces dispositions doivent être précisées par les législateurs organiques que nous sommes aujourd’hui.
Notre groupe considère que l’économie globale de ce projet de loi organique a des aspects positifs, mais cela ne nous empêche pas de formuler quelques réserves et observations.
La composition même du Conseil reste l’objet de débats, notamment sur la question du maintien des 72 membres de section désignés par le Premier ministre pour deux ans et qui sont censés tenir un rôle d’expert auprès de la section qui les accueille.
Le rapport de Dominique-Jean Chertier, Pour une modernisation du dialogue social, paru en 2006, suggérait leur suppression, évoquant, d’un doux euphémisme, des « conseillers de second rang dont la présence fragilise la représentativité de l’institution ». Nous partageons pleinement cette analyse. Le caractère largement discrétionnaire de ces nominations apparaît aujourd’hui anachronique.
Malgré des imperfections que nous avions dénoncées en leur temps, le dispositif du nouvel alinéa 5 de l’article 13 de la Constitution associe, par souci de transparence, le Parlement aux nominations à certains emplois ou postes de la fonction publique parmi les plus éminents. Notre propos vise non pas à transposer une telle procédure, mais à souligner qu’il n’est plus justifiable, dans une démocratie moderne, de laisser l’exécutif procéder à de tels trains de nominations, parfois inutiles ou partisanes. L’Histoire doit prendre une autre direction.
Le Gouvernement souhaitait initialement substituer des hautes personnalités aux conseillers de section. Ces hautes personnalités auraient toujours été nommées de manière discrétionnaire par le Gouvernement, qui aurait de surcroît fixé, de façon unilatérale, leur indemnisation, laquelle est aujourd’hui encadrée par le règlement intérieur du Conseil.
En dépit des améliorations apportées par l’Assemblée nationale, ces dispositions restent insatisfaisantes, car elles se limitent à aménager à la marge le principe même des nominations discrétionnaires. Telle sera toujours la problématique d’une assemblée désignée, dont l’essence est de conseiller des assemblées et un gouvernement élus au suffrage universel.
La question de la représentativité des 233 autres conseillers, notamment des 63 conseillers désignés par les organisations socioprofessionnelles, constitue également une antienne puisqu’elle fut soulevée dès 1963. Une première réforme, toujours effective, fut adoptée en 1984.
En ce qui concerne la représentation spécifique des syndicats de salariés, le choix des organismes au sein de chaque groupe relève du domaine réglementaire, c’est-à-dire exclusivement du Gouvernement, qui intervient sous le contrôle du Conseil d’État. Aujourd’hui, cette représentation obéit à une règle quasi forfaitaire pour les principales organisations, mais moins claire pour d’autres. Il est ainsi difficile de définir des critères objectifs justifiant les choix qui sont effectués. Or, le présent projet de loi doit s’articuler avec la loi de 2008 portant réforme de la démocratie sociale et réforme du temps de travail qui a profondément modifié les règles en retenant le principe d’une représentativité des syndicats issue du vote des salariés. La composition du Conseil doit tenir compte de ce nouveau principe qu’elle semble pourtant éluder, ce qui est regrettable.
Toujours en matière de représentation, nous souhaitons la réintroduction des représentants des entreprises publiques. Le poids économique de ce secteur, combiné à son importance sociale, justifie amplement qu’il soit spécifiquement représenté parmi les dix personnalités qualifiées du domaine économique.
Nous apporterons également notre soutien à l’initiative du rapporteur qui permet d’assurer une révision décennale de la composition du Conseil à partir de 2014, afin de traduire le plus fidèlement possible l’importance économique et sociale des principales activités de notre pays.
Enfin, la révision constitutionnelle de 2008 a ouvert au Parlement le droit de saisir le Conseil sur toute question relevant de sa compétence. Cette innovation, intéressante parce qu’elle ouvre l’expertise du Conseil aux parlementaires, est vite tempérée par le présent texte qui limite cette saisine aux seuls présidents des deux assemblées. Il s’agit donc d’un droit potentiel soumis au filtrage des présidents, ce qui revient, dans les faits, à conférer un droit de véto à la majorité. Ce choix est d’autant plus dommageable que la révision constitutionnelle de 2008 a accordé toute leur place aux groupes parlementaires. Il nous semblerait donc logique d’étendre ce droit de saisine, dans l’intérêt tant du Conseil que de la représentation nationale.
Mes chers collègues, si nous partageons certains des objectifs de ce texte, nous considérons que la revalorisation du Conseil économique, social et environnemental ne sera pas complète si ses avis et rapports, souvent pertinents, restent lettre morte. Le pouvoir exécutif et le Parlement ont tout à gagner à une expertise accrue. Évitons que le diagnostic de Maxime Blocq-Mascart ne se pérennise. En 1958, il écrivait ceci : « les travaux du Conseil économique ont toujours été remarquables depuis une trentaine d’années… mais vains… Ses activités se déploient dans le vide. Nos improvisations constitutionnelles ne remédient pas à un état de fait aussi fâcheux que prolongé ». Il serait souhaitable de ne pas devoir poser le même diagnostic dans quelques années.
Sous les réserves que je viens de présenter, et en fonction du sort qui sera réservé à certains amendements, le groupe RDSE décidera s’il doit voter ce texte ou s’abstenir.
M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.
M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les deux projets de loi organique que nous avons adoptés la semaine dernière, le premier étant relatif à l’application de l’article 65 de la Constitution et le second prorogeant le mandat des membres du Conseil supérieur de la magistrature, nous voilà saisis d’un nouveau projet de loi organique résultant de la réforme constitutionnelle de 2008. Je souhaite que le Gouvernement présente le plus rapidement possible tous les textes visant à assurer la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle.
Si je ne peux que reconnaître la grande qualité du travail du Conseil économique et social, je suis beaucoup plus réservé quant à son utilité. En dépit de l’intérêt de ses rapports, et quelle que soit la valeur de leurs auteurs, on ne peut que s’interroger sur leur devenir, sur l’usage qu’en font les gouvernements successifs. Plus de neuf fois sur dix, ils passent à la trappe et sont de fait inutiles.
Cela m’a conduit à m’interroger sur l’avenir de l’institution. Je ne conteste certes pas l’intérêt du Conseil économique et social, mais je considère qu’il faut veiller à ne pas en surestimer l’utilité. D’aucuns prétendent que le pays s’effondrerait si nous devions être privés de cette concertation, ou pseudo-concentration.
Les avis du Conseil sont souvent pertinents, je le répète. Malheureusement, la plupart du temps, on fait semblant de les écouter, mais personne ne les suit et ils passent à la trappe.
Nous devons donc nous poser la question suivante : comment faire en sorte que le Conseil économique et social, lorsqu’il émet des avis pertinents, soit plus utile ? Autrement dit, comment aider les différents gouvernements à valoriser les suggestions et les avis qu’il formule ?
Je tenais à souligner, ensuite, le caractère affligeant des nombreuses nominations intervenues au cours des vingt ou trente dernières années.
Ma vie de parlementaire s’étendant sur plusieurs décennies, j’ai ainsi vu se succéder au sein du Conseil économique et social des députés battus, des ministres remerciés que l’on recasait ainsi. Ces nominations nuisent à la crédibilité de l’institution.
Il faut nommer les membres du Conseil en fonction de leurs compétences, de ce qu’ils peuvent apporter, et non se servir de cette structure pour recaser des personnes qui y sont fort peu assidues et qui ne font qu’attendre un autre point de chute. Récemment encore, on a vu d’éminents hommes politiques agir de la sorte ; c’est fort regrettable !
Il est positif que la Constitution fixe désormais de manière définitive le nombre des membres du Conseil économique et social, comme c’est le cas pour l’Assemblée nationale et le Sénat. Je rappelle que le nombre des députés est passé de 493 à 577, et que le nombre de sénateurs a un peu augmenté. Fixer un nombre maximum de membres du CESE évitera que l’on ne cède à la facilité de créer quelques sièges supplémentaires pour complaire à certains qui se plaignent d’être oubliés.
Nous devons éviter l’inflation des sièges que ce soit au Conseil économique et social, à l’Assemblée nationale ou au Sénat, car elle n’apporte strictement rien. Je peux vous assurer, pour avoir connu les deux périodes, que l’Assemblée nationale n’est pas plus efficace avec 577 députés qu’elle ne l’était avec 493. Loin d’améliorer le fonctionnement de nos institutions, cette augmentation n’a fait qu’entraîner des dépenses supplémentaires. De même, je ne pense pas que le Sénat soit plus performant depuis la création de dix ou quinze sièges de sénateurs supplémentaires.
Nous devons également éviter de conserver des organismes qui ne font pas la preuve de leur pertinence.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Jean Louis Masson. Permettez-moi d’ajouter une dernière remarque, monsieur le président.
Autant le Conseil économique et social national a une certaine utilité, autant les conseils économiques et sociaux régionaux me laissent perplexe quant à l’intérêt de leurs avis. Comme ils ne publient guère de rapports pertinents, à l’heure où le Gouvernement envisage de réduire le nombre de conseillers régionaux et généraux, ne serait-il pas opportun de réduire drastiquement les effectifs de ces assemblées, voire de supprimer celles-ci purement et simplement ?
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, héritier du Conseil national économique créé en 1925 par la IIIe République, supprimé par le régime de Vichy, rétabli en 1946 sous le nom de Conseil économique, et devenu Conseil économique et social en 1958, le CES est la troisième assemblée mise en place par la Constitution du 4 octobre 1958, avec l’Assemblée nationale et le Sénat.
Là s’arrête, toutefois, l’analogie avec les deux assemblées qui composent le Parlement. Si l’Assemblée nationale et le Sénat ont la possibilité – certes, de plus en plus réduite ! – d’impulser de nouvelles lois ou de modifier les projets du Gouvernement, voire de les infirmer, le Conseil économique et social a une compétence uniquement consultative, la plupart du temps optionnelle.
Malgré tout, cette assemblée présente l’avantage de permettre la représentation, au niveau national, des différents milieux professionnels et de leurs organisations respectives. C’est d’autant plus important que les deux autres assemblées de notre République sont fort peu représentatives de la société française, en termes tant d’origine sociale, de genre que d’opinions.
Au vu des spécificités de la composition de cette assemblée et de la vitesse à laquelle notre société a évolué sur les questions sociétales ou sur l’organisation du travail et de la production, il apparaissait nécessaire de réformer la composition du Conseil, ne serait-ce que pour mieux « coller » à la réalité sociale. De ce point de vue, les nouvelles compétences qui lui sont dévolues en matière d’environnement nous semblent bienvenues.
Toutefois, bon nombre d’orientations définies dans ce texte suscitent nos critiques.
Tout d’abord, s’agissant de la répartition des sièges, nous regrettons que la procédure de nomination des personnalités qualifiées, dont on ne sait de quelles qualifications elles disposent, ait été maintenue.
Pour ce qui est de la protection de l’environnement, par exemple, le texte ouvre 18 places au monde associatif et 15 places, soit presque autant, à des « personnalités qualifiées ». Cela pose, à l’évidence, deux problèmes : l’un quant aux modalités de nomination puisque ces personnalités ne seront choisies que par le pouvoir exécutif, sans aucun contrôle démocratique, l’autre quant aux modalités de recrutement, le texte ne précisant en rien quelle doit être la nature des qualifications requises, mais indiquant seulement que trois de ces personnalités devront diriger des « entreprises exerçant une action significative dans ces matières ». Ce flou total laisse augurer une conception des personnes qualifiées en matière de défense de l’environnement bien différente de la nôtre...
À l’heure du green washing et de la communication à outrance sur le « vert », gageons que ces places seront distribuées à des scientifiques, des chercheurs, des intellectuels ou des professionnels qui travaillent avec rigueur sur les questions environnementales, et non à divers représentants de lobbies ou à des personnalités à qui il faut bien trouver une quelconque place honorifique.
Ensuite, la nouvelle distribution des sièges nous laisse pour le moins sceptiques. Il semble que le Gouvernement veuille un Conseil économique et social reflétant sa propre vision de la société, et non la société telle qu’elle est. La suppression de dix sièges de représentants des entreprises publiques est pour le moins emblématique, à ce titre, de la volonté de ce gouvernement de réduire les services publics à leur plus simple expression.
De même, le représentant des organismes du logement social disparaît de la composition du nouveau Conseil économique social et environnemental, alors même que la question du logement demeure un enjeu majeur pour une grande partie de nos concitoyens. Ne serait-il pas préférable de prévoir une réelle représentation d’organismes ciblés, tels que ceux du logement social, oubliés dans le texte, plutôt que d’ajouter un nouveau représentant des professions libérales, qui sont déjà bien représentées au sein de cette arène ?
On constate également une très nette diminution de la représentation du monde agricole, avec la perte de onze postes pour ces catégories. Certes, la France rurale n’est plus ce qu’elle était en 1958, mais il s’agit encore d’une frange économique importante, qui occupe une place prépondérante dans une filière majeure, concernée au premier chef par les questions environnementales et par les difficultés économiques.
Enfin, si ce texte étend les compétences du Conseil en créant de nouveaux liens avec le Parlement et les citoyens, via le droit de pétition, cela correspond plus, selon nous, à une déclaration de principe qu’à un accroissement réel et concret des compétences. Les avis du Conseil économique, social et environnemental ne doivent pas se perdre dans les arcanes de l’administration politique, mais ils doivent bénéficier d’une véritable publicité et être vraiment écoutés par les commanditaires.
Les amendements déposés par notre groupe vont dans le sens des remarques que je viens de formuler, mais je crains que nous ne soyons pas entendus. N’avez-vous pas dit, monsieur le ministre, qu’une modification du texte risquait de faire s’écrouler le dispositif tout entier ? Par conséquent, nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois.
M. Daniel Dubois. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le présent projet de loi organique met en œuvre la révision constitutionnelle de 2008 sur un point d’importance : il modernise la troisième assemblée constitutionnelle du pays, le Conseil économique et social.
Le changement est d’abord sémantique : le Conseil économique et social devient le Conseil économique, social et environnemental. Mais, par-delà le nom, c’est une véritable réforme de l’institution qui est proposée. Elle s’articule autour de trois axes : élargissement de la compétence du Conseilaux questions environnementales ; création d’une saisine parlementaire ; instauration d’une saisine par voie de pétition.
Compte tenu de l’évolution de notre société, je me réjouis de la disposition centrale de ce texte, qui tend à modifier la composition du Conseil économique, social et environnemental. Une telle modification constitue un exercice toujours difficile et souvent polémique. En effet, chaque secteur d’activité s’estime généralement sous-représenté et, au sein de chaque activité, chaque organisation s’estime plus légitime que les autres pour désigner des membres.
Comme l’ont rappelé les précédents orateurs, le compromis auquel nous sommes parvenus aujourd’hui est le fruit d’un long processus ; je pense qu’il faut protéger cet équilibre, car il est fragile.
Ainsi, la composition du Conseil sera bien plus en adéquation avec les réalités de notre pays. Cette évolution permet donc l’apparition de deux nouvelles catégories de membres : les jeunes et les étudiants, d’une part ; les associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de l’environnement, d’autre part.
Les évolutions constitutionnelles décidées en 2008 imposaient une contrainte supplémentaire : le plafonnement à 233 du nombre total des membres du Conseil. Cette limitation implique mécaniquement que d’autres catégories soient moins représentées. La recomposition devant s’effectuer à effectifs constants, le Gouvernement s’est donc engagé dans un difficile travail d’arbitrage.
Certains ont vu leur représentation supprimée : c’est le cas des entreprises publiques, en premier lieu, ou encore des Français établis hors de France. Je tenais à revenir sur cette première suppression, qui me paraît peu légitime.
La suppression pure et simple du groupe des entreprises publiques est difficile à justifier, car celles-ci continuent à jour un rôle clé dans certains secteurs de notre économie, comme les transports ou l’énergie, et emploient près de 850 000 personnes. C’est pourquoi il est souhaitable d’assurer le maintien de la représentation des entreprises publiques au sein du Conseil.
Je tiens donc à saluer les avancées proposées par le rapporteur sur cette question. Le « fléchage » de trois des dix personnalités qualifiées dans le domaine économique permettra de maintenir la représentation des entreprises publiques au sein du Conseil, ce qui me semblait indispensable.
D’autres catégories ont vu leur représentation nettement amoindrie : c’est le cas du monde agricole, dont la représentation est réduite de cinq sièges au titre des exploitants agricoles, et de six sièges au titre de la mutualité et des coopératives agricoles. Il faut le dire ici publiquement : le monde agricole, qui connaît actuellement de grandes difficultés, comme nous le savons tous, a consenti un effort important pour permettre l’entrée de nouveaux membres, puisqu’il perd globalement onze représentants à l’issue de la réforme. Nous pouvons le remercier de cet effort, d’autant que l’environnement, qui « entre » désormais au Conseil, est lié en quelque sorte à l’agriculture.
Dans ce contexte, peu de catégories parmi celles qui sont déjà représentées au CESE ont vu leur représentation augmenter. C’est toutefois le cas des professions libérales, dont le nombre de sièges passe de trois à quatre, et des associations autres que les associations familiales et environnementales, dont le même nombre est porté de cinq à huit. Ce point doit être relevé et l’orateur précédent aurait pu le préciser.
Cette nouvelle composition, conjuguée avec l’instauration d’une règle de parité et avec la limitation du nombre de mandats consécutifs à deux, se traduira par un renouvellement du Conseil très important pour la prochaine mandature et significatif pour les renouvellements suivants.
J’en viens à la deuxième innovation majeure de la réforme constitutionnelle : la possibilité donnée à l’ensemble des citoyens de saisir, par le biais d’une pétition, le CESE d’une question particulière, que cette dernière touche à des enjeux économiques, sociaux ou environnementaux. Cette nouvelle saisine offrira aux acteurs de la société civile une voie d’intervention plus structurée dans le débat public.
Pour ce qui concerne le rapprochement du CESE et du Parlement, je me félicite d’abord que les deux assemblées puissent dorénavant consulter le Conseil sur tout problème à caractère économique, social ou environnemental. Depuis 1958, cette possibilité était réservée au seul Gouvernement. Une telle mesure sera l’opportunité pour les parlementaires d’élargir leur champ d’expertise. Ensuite, le fait que le CESE ait compétence pour appeler l’attention du Parlement, et non plus seulement du Gouvernement, est une avancée intéressante. Enfin, la transmission systématique de tous les avis du Conseil aux présidents des deux assemblées parlementaires conforte la coopération de ces dernières. Il faut saluer ces progrès.
Ce renforcement des liens unissant le CESE au Parlement permettra aux sénateurs que nous sommes, mes chers collègues, souvent en déficit d’expertise par rapport au Gouvernement lorsque nous examinons un projet de loi, de mobiliser de nouveaux moyens à l’appui de nos analyses et de nos propositions.
Toujours à propos des liens entre le Parlement et le Conseil, un amendement a retenu mon attention et celle des membres de mon groupe. Déposé par M. le rapporteur en commission des lois puis malheureusement retiré, il prévoyait que les présidents des deux assemblées désignent chacun un tiers des personnalités qualifiées, le dernier tiers étant toujours désigné par le pouvoir exécutif, comme c’est le cas aujourd’hui.
Certes, monsieur le ministre, vous vous êtes engagé en commission à ce que le Gouvernement consulte, entre autres, les présidents des deux assemblées sur ces projets de nominations. Mais force est de constater que cet engagement ne vaut que pour l’actuel gouvernement.
Aussi nous soutiendrons majoritairement la position défendue aujourd’hui par notre collègue M. Vial qui consiste à inscrire dans le texte que le président du Sénat ainsi que celui de l’Assemblée nationale seront toujours consultés avant la nomination de ces personnalités qualifiées, qui représentent, il faut le rappeler, un sixième des membres du Conseil économique, social et environnemental.
Le CESE, troisième assemblée constitutionnelle de notre pays, a incontestablement un rôle de premier plan à jouer dans la modernisation de nos institutions. Mais pour cela, il doit rester au contact de la société réelle, en perpétuelle mutation.
Pour qu’il puisse garder ce contact, sa composition doit pouvoir évoluer régulièrement, afin de toujours refléter fidèlement l’importance économique et sociale des principales activités du pays.
Aussi l’insertion, sur l’initiative de M. le rapporteur, d’un nouvel article visant à favoriser la révision régulière de la composition du CESE permettra à cette instance d’être toujours en adéquation avec la réalité économique et sociale du pays.
Pour conclure, je tiens à saluer l’excellent travail de M. le rapporteur, Jean-Pierre Vial, qui a su apporter des améliorations pertinentes à un texte dont l’équilibre fragile laissait peu de marge de manœuvre. Ces améliorations permettent à la commission des lois de présenter un texte que la majorité des membres de mon groupe souhaite voir adopter. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, découlant de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 relative à la modernisation des institutions de la Ve République, la réforme du Conseil économique, social et environnemental se poursuit aujourd’hui par l’examen du présent projet de loi organique relatif à ses règles de fonctionnement, conformément à l’article 71 de la Constitution.
Je regrette que ce projet de loi nous soit soumis si tard et que, de ce fait, il ait été nécessaire d’encombrer le Parlement – il n’en a pourtant pas besoin – de textes de rattrapage comme la loi du 3 août 2009, qui a prorogé le mandat des membres du Conseil au maximum, c’est-à-dire jusqu’au 30 septembre de cette année.
Une fois de plus, le Gouvernement est conduit à engager la procédure accélérée. Ce qui devrait être une exception dans le processus législatif devient aujourd’hui la norme et va à l’encontre des grands principes fixés lors de cette même réforme de la Constitution, à savoir la revalorisation du rôle du Parlement.
Concernant le Conseil économique, social et, désormais, environnemental par l’extension de ses compétences à ces questions à la faveur de la réforme constitutionnelle, un consensus se dégage sur la nécessité de le réformer.
Comme l’a souligné notre collègue Jean-Claude Frécon dans son rapport d’information intitulé « La réforme du Conseil économique, social et environnemental (CESE) : une chance à saisir », il est impératif de mettre en œuvre cette réforme à moyens constants, et l’organisation du Conseil en trois pôles – vie économique, cohésion sociale et protection de l’environnement – ne devrait pas avoir d’implication budgétaire notable en raison, notamment, du plafonnement du nombre de conseillers.
Aujourd'hui, l’heure n’est plus à la mise en cause de cette assemblée, qui, depuis sa création, a subi de nombreuses attaques sur son utilité et sur sa représentativité de la part de l’ensemble de la classe politique. Au contraire, l’heure est venue de renforcer sa légitimité grâce à une amélioration de sa représentativité, à une diversification des moyens de sa saisine et au suivi de ses avis.
Représentativité, modalités de saisine et suivi des avis sont les trois points clés pour renforcer la légitimité du Conseil économique, social et environnemental ; ce sont aussi les trois points clés du projet de loi que nous examinons aujourd’hui.
Pour ce qui concerne la représentativité, monsieur le ministre, nous sommes satisfaits que la réforme se fasse à effectif constant : le nombre total de 233 membres a été maintenu, alors qu’il a été nécessaire de prévoir l’intégration des représentants du monde de l’environnement. Par conséquent, ce nombre ne connaîtra pas d’inflation, à l’instar de celui des parlementaires.
Concernant la composition du Conseil, le texte adopté par l’Assemblée nationale puis modifié par la commission des lois du Sénat est en nette amélioration par rapport au projet de loi initial présenté par le Gouvernement. Je tiens, en cet instant, à souligner le travail positif accompli par M. le rapporteur, Jean-Pierre Vial. Il n’en demeure pas moins que ce texte ne nous donne pas encore une entière satisfaction.
Parmi les dispositions positives, je pense, tout d’abord, à la représentation du mouvement coopératif agricole, dont la commission des lois a rejeté la remise en cause en maintenant inchangée la rédaction de l’article 6, alinéa 12, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale unanime, et en rejetant l’amendement tendant à le modifier. Je crois que c’est un signal positif envoyé au monde agricole en cette période de crise qu’il connaît actuellement.
Je pense ensuite à l’adoption de l’amendement n° 15, présenté par M. le rapporteur, qui a permis de rétablir la représentation des entreprises publiques ; ainsi, parmi les dix personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique, trois devaient être issues des entreprises publiques. Le texte initial visait la suppression de ces représentants, alors que les entreprises publiques comptent encore 850 000 salariés. Malheureusement, lors de sa réunion de ce matin, la commission a réduit le nombre susvisé et l’a porté à deux. Je souhaite qu’un effort soit fait afin d’en revenir à la disposition première, équilibrée, qu’elle avait adoptée. Notre débat le permettra sans doute.
J’en viens maintenant aux points relatifs à la désignation des membres titulaires du CESE qui nous donnent moins satisfaction et qui, d’ailleurs, font l’objet d’amendements. Il s’agit de la représentation des Français de l’étranger, de la représentation des associations de protection des consommateurs et de la représentation des organismes gérant le logement social.
De plus, pour l’ensemble des désignations, il est nécessaire d’assurer la parité entre les hommes et les femmes et de permettre au président du Sénat et à celui de l’Assemblée nationale de désigner chacun, au même titre que le Gouvernement, un tiers des personnalités qualifiées.
Les amendements déposés sur ces sujets visent à renforcer la légitimité du CESE en assurant une meilleure représentativité des différentes composantes de la société française. Si le nombre de conseillers doit effectivement rester stable, il convient néanmoins de nommer des conseillers représentatifs de la France d’aujourd’hui. Cette représentativité ne doit pas être figée, comme en témoigne l’adoption, en commission, de l’amendement présenté par M. le rapporteur relatif à la révision régulière de la composition du CESE.
Pour ce qui concerne les Français de l’étranger, il est pour le moins surprenant de vouloir supprimer leur représentation au sein du CESE, alors même qu’une telle représentation a été instaurée à l’Assemblée nationale. Notre collègue Richard Yung reviendra sur cette question.
Il est nécessaire de prévoir des représentants des associations de protection des consommateurs, tant la multiplication des contentieux, notamment de ceux qui sont liés aux nouvelles technologies, démontre que les consommateurs doivent être, eux aussi, représentés.
Je veux rappeler qu’il est anormal que le secteur du logement social ne soit pas représenté, alors qu’il comporte 4,5 millions de logements et que 90 000 nouveaux logements sont construits chaque année. J’ajoute qu’il n’est pas illogique de relier ce secteur à l’environnement, puisque la maîtrise de l’énergie concerne en premier lieu l’habitat. Nous présenterons donc un amendement tendant à assurer cette représentation, sans modifier le nombre total de conseillers.
Par ailleurs, le projet de loi retient le principe de la parité entre les hommes et les femmes, ce dont nous nous félicitons. Cependant, nous avons déposé un amendement visant à apporter une amélioration, afin de garantir une parité stricte en corrigeant les effets du nombre impair qui prévaut dans certains groupes. Un autre amendement, présenté par Michèle André, vise à conférer à la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes un fondement organique et un véritable statut juridique au sein du CESE.
La question de la désignation des personnalités qualifiées ne doit pas être éludée.
Outre nos propositions tendant, d’une part, à réduire leur nombre pour permettre, notamment, la nomination de représentants du logement social et, d’autre part, à favoriser des ajustements entre les personnalités qualifiées des trois pôles du CESE afin d’assurer une stricte parité, nous sommes favorables, comme l’était initialement M. le rapporteur, à une désignation des personnalités qualifiées du CESE par tiers, par le Président de la République, le président du Sénat et le président de l’Assemblée nationale.
Nous regrettons, monsieur le rapporteur, que vous ayez retiré l’amendement que vous aviez déposé. C’est pourquoi nous présenterons un amendement allant dans le même sens. La Haute Assemblée pourra ainsi se prononcer. En effet, nous ne saurions nous satisfaire de la désignation des personnalités qualifiées après un simple avis non-conforme – c'est-à-dire qui ne lie pas – des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, selon la modalité qui a été adoptée, ce matin, par la commission des lois.
Pour ce qui concerne les membres non titulaires, c’est-à-dire les anciens conseillers de section rebaptisés « personnalités associées » visés à l’article 9, nous avons déposé un amendement de suppression.
Si nous souhaitons tous aujourd’hui renforcer la légitimité et la crédibilité du CESE, nous pensons que le temps est venu de supprimer ces membres discrétionnairement nommés par le Gouvernement. Il n’est nullement question de stigmatiser un gouvernement plus qu’un autre, les exemples ne sont favorables ni aux uns, ni aux autres ! Il faut simplement supprimer cet anachronisme, comme le soulignait M. Dominique-Jean Chertier dans son rapport intitulé « Pour une réforme du Conseil économique, social et environnemental », remis au Président de la République, et aller vers une démocratie moderne.
Mes chers collègues, telles sont les remarques que je voulais formuler sur la composition du CESE.
Je souhaite maintenant en venir rapidement au second volet du projet de loi, relatif aux modalités de saisine, et aux avis du CESE.
La réforme constitutionnelle a élargi le champ de compétences du Conseil économique, social et environnemental, mais aussi et surtout a apporté une innovation majeure en élargissant sa saisine au Parlement, par l’intermédiaire des présidents des deux chambres, cette saisine n’étant plus réservée au Gouvernement.
Toutefois, en limitant, dans l’article 2 du projet de loi, cette saisine aux seuls présidents et, par conséquent, à la seule majorité, elle prive l’opposition de ce droit nouveau. De ce fait, la majorité parlementaire a le droit exclusif de la saisine.
Comme le CESE représente l’ensemble des composantes de la société française, il nous paraît légitime qu’il puisse être consulté par l’ensemble des groupes politiques formant le Parlement. Un amendement a été déposé en ce sens par le groupe socialiste.
Toujours dans le champ de la saisine, nous souhaiterions des éclaircissements quant aux modalités de la mise en œuvre de la saisine par pétition.
La commission, par l’adoption de l’amendement n° 11, a déjà précisé que l’assemblée plénière du CESE examinera les pétitions déclarées recevables par le bureau dans un délai d’un an. C’est positif, mais il convient d’aller plus loin.
Nous souhaitons également que le travail du CESE et la qualité de ses avis puissent avoir davantage de portée. Il s’agit d’aller au bout de la réforme.
La prise en compte passe, notamment pour le Gouvernement, par une motivation explicite des raisons pour lesquelles un projet de loi soumis pour avis ne prend pas en compte les observations du CESE. Il convient également de placer ce dernier à équidistance de l’exécutif et du Parlement en faisant en sorte que les études du CESE soient transmises au président du Sénat et au président de l’Assemblée nationale, quelle que soit l’origine de la saisie.
Telles sont, mes chers collègues, nos observations sur cette réforme majeure. Nous souhaitons qu’à l’issue de ce débat le Conseil économique, social et environnemental sorte renforcé. Monsieur le ministre, nos propositions sont mesurées, elles vont dans le sens du projet de loi. Au demeurant, nous souhaitons accompagner cette réforme par des ajustements qui nous paraissent légitimes : leur prise en compte déterminera le vote du groupe socialiste sur l’ensemble. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes appelés aujourd’hui à examiner le projet de loi organique portant réforme du Conseil économique, social et environnemental.
La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, voulue par le Président de la République, a entamé la revalorisation et la modernisation de cette institution non gouvernementale.
Souvent dénommé « troisième assemblée », le Conseil économique, social et environnemental est la consécration de la démocratie consultative. En effet, lors de l’élaboration des politiques publiques, cette institution permet un dialogue entre les différents représentants de la société civile française et les pouvoirs publics. Dès lors, nul ne saurait remettre en cause la pertinence d’une telle institution et son utilité pour la démocratie.
S’il s’avère incontournable dans le champ institutionnel français, le Conseil économique, social et environnemental recèle encore, comme l’a parfaitement souligné notre excellent rapporteur, M. Jean-Pierre Vial, des insuffisances pour « asseoir sa légitimité et garantir la visibilité de ses travaux ». Ainsi, le Conseil reste contesté pour deux raisons principales.
Premièrement, cet organe est très peu sollicité par les autorités de saisine. C’est la conséquence directe de la concurrence accrue des autres organismes consultatifs qui entrent dans son champ de compétences et dont l’expertise est plus souvent sollicitée par le Gouvernement. Dès lors, nous sommes confrontés à un paradoxe quant au fonctionnement actuel du Conseil : pourtant voulu comme une institution consultative au service de l’exécutif, il en arrive à s’autosaisir pour pallier le défaut de consultation. L’élargissement des compétences au domaine environnemental et des saisines possibles tendent à répondre à ce paradoxe.
Deuxièmement, cette institution n’a pas fait l’objet de révisions permettant de s’adapter à l’évolution de la société. En effet, relativement inchangée depuis sa création, la composition du Conseil manque de représentativité et n’est plus en adéquation avec notre société.
Je prendrai pour simple exemple un sujet d’actualité qui me tient à cœur : la faible représentation des femmes actives au sein du Conseil, qui ne s’élève qu’à 21,5 %, alors même que les femmes sont de plus en plus nombreuses dans la population active.
Globalement, certaines catégories socioprofessionnelles sont sous-représentées au sein du Conseil, alors que d’autres continuent de bénéficier d’un nombre de sièges sans équivalence avec leur poids réel dans l’économie.
Pourtant, le respect de l’hétérogénéité de la société française doit être le principal objectif poursuivi lors de la composition d’une institution démocratique ayant vocation à donner son avis sur les politiques publiques. C’est la raison pour laquelle le présent projet de loi organique réformant la composition du Conseil économique, social et environnemental et les modalités de nomination est essentiel.
Premièrement, le texte suit la logique de la révision constitutionnelle de 2008, qui a transformé le Conseil économique et social en Conseil économique, social et environnemental. L’inscription constitutionnelle des problématiques environnementales dans les compétences du Conseil prend en compte le fait qu’il s’exprimait déjà dans ce domaine.
Ainsi, le Conseil sera désormais automatiquement saisi, et ce à l’initiative de notre commission des lois, sur « tout plan ou tout projet de loi de programmation à caractère économique, social ou environnemental ». Le groupe UMP et moi-même nous réjouissons de la consécration de ce troisième pilier environnemental dans la compétence du Conseil.
En outre, le Conseil économique, social et environnemental est dorénavant composé de 233 conseillers dont trente-trois représentants du pôle environnemental pour la protection de la nature et de l’environnement.
Deuxièmement, les possibilités de saisine sont élargies pour permettre une meilleure contribution de l’assemblée consultative sur les politiques relevant de ses domaines de compétence. Le texte permet la saisine du Conseil par notre Haute Assemblée et par l’Assemblée nationale ainsi que par le biais d’une pétition citoyenne.
Ce faisant, le projet de loi organique instaure des liens plus étroits entre le Parlement et l’institution et la rend désormais accessible à nos concitoyens. Nous nous en félicitons.
Troisièmement, s’agissant de la composition du Conseil, nous apprécions, monsieur le ministre, l’inscription dans ce texte du principe de parité lors de la désignation des membres du CESE par les organisations.
Quatrièmement, comme je l’expliquais précédemment, cette assemblée représentative de la population active française ne peut être appréhendée comme légitime que si elle s’adapte à l’évolution de notre société.
À ce titre, plusieurs dispositions modifiant les nominations des représentants composant le Conseil nous apparaissent fondamentales.
D’une part, afin de parvenir à un rééquilibre entre les différentes catégories représentées, il fallait accepter de diminuer la représentation de catégories existantes ou encore d’en supprimer certaines autres. Il y va d’une meilleure représentation des principales activités économiques et sociales françaises. En effet, permettre la représentation des jeunes au sein du Conseil et renforcer celle des professions libérales ne répond qu’au souci d’obtenir une institution en phase avec les réalités sociologiques du pays.
D’autre part, le principe de fléchage dans le domaine économique, adopté par la commission des lois, sur l’initiative de notre rapporteur, vise à compenser la suppression de la représentation des entreprises publiques, afin de ne pas mettre au banc cette catégorie qui, rappelons-le, n’emploie pas moins de 850 000 personnes.
Par ailleurs, une attention toute particulière a été portée au renouvellement régulier du Conseil économique, social et environnemental. C’était très important. Le projet de loi organique tend, en effet, à remédier au manque de représentativité qui a pu être reproché au Conseil. Pour éviter la répétition de cette situation, il nous fallait prévoir pour l’avenir une procédure de renouvellement des membres de l’organisme. La commission a instauré un dispositif d’actualisation régulière de la composition du Conseil. Ainsi, à partir de 2014, un rapport sur la représentativité sera remis tous les dix ans par le Gouvernement. Il fera l’objet d’un débat parlementaire pouvant déboucher sur des modifications dans la composition du Conseil.
Enfin, je tiens à souligner l’excellent travail de notre rapporteur, à l’initiative duquel la commission a inscrit dans ce texte le principe d’échanges du Conseil économique, social et environnemental avec les organismes homologues, a prévu la procédure de consultation en urgence du Conseil et précisé le délai d’un an pour rendre un avis en réponse à une saisine « populaire ».
Au vu de l’ensemble de ces remarques, le groupe UMP adoptera le projet de loi, tel que modifié par la commission. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Christophe-André Frassa. « L’image de la France à l’étranger représente un enjeu considérable. Des pistes doivent être étudiées pour l’améliorer ».
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, même si je partage pleinement cette analyse très juste, je n’en suis pas l’auteur. Il s’agit en effet du constat que dresse le Conseil économique, social et environnemental, dans une étude présentée le 15 avril par sa section du cadre de vie, sur l’importance de l’image de la France dans le monde.
Cruelle ironie d’une actualité brûlante : la réforme du Conseil économique, social et environnemental, dont nous sommes amenés à débattre aujourd’hui, prévoit la suppression pure et simple des représentants des Français de l’étranger en son sein !
Dans son étude, le Conseil économique, social et environnemental suggère des pistes intéressantes pour pallier les carences de l’image de la France à l’étranger.
La première d’entre elles est de mettre en évidence l’intérêt de cette image en tant qu’outil au service d’objectifs non seulement culturels, patrimoniaux et d’art de vivre, mais également politiques, économiques et scientifiques.
Pour le Conseil économique, social et environnemental, l’action doit porter sur l’image du pays en lui-même, l’image des entreprises françaises, l’image des produits français à l’étranger et le degré d’attractivité.
Mais alors, qui mieux que les Français de l’étranger eux-mêmes peuvent être les acteurs de cette volonté politique ?
L’exposé des motifs du projet de loi organique initial, présenté par le Gouvernement, indiquait : « Il s’agit de faire du Conseil une institution qui soit plus en phase avec les réalités sociologiques du pays comme avec les débats qui le traversent, qui se montre plus réactive et qui sera mieux écoutée parce que davantage représentative. »
Dans ce contexte, l’argument selon lequel la suppression de la représentation des Français de l’étranger au sein du Conseil économique, social et environnemental se justifierait par le fait que les Français établis hors de France ont leur propre assemblée, que douze sénateurs les représentent, et qu’ils disposeront, à compter de 2012, de onze députés, témoigne d’une méconnaissance coupable du rôle de l’Assemblée des Français de l’étranger, des sénateurs et du futur rôle des députés.
Pour conserver cette « logique », le Gouvernement aurait été bien inspiré de prévoir la suppression des députés de métropole et d’outre-mer…
La présence française dans le monde est devenue une problématique centrale à l’heure de la mondialisation.
Le Conseil économique, social et environnemental assure la participation et la collaboration des différents acteurs de la vie économique, sociale et environnementale du pays à la politique du Gouvernement. C’est à ce titre que les Français établis hors de France y sont représentés depuis 1984.
Les Français d’outre-mer sont estimés à 2 400 000 et représentés au Conseil par onze membres. La population française résidant à l’étranger est, quant à elle, estimée à plus de 2 300 000 personnes. Il y a aujourd’hui presque trois fois plus de Français établis hors de France qu’en 1984, date à laquelle une représentation leur a été accordée au Conseil économique et social.
La représentation de nos compatriotes de l’étranger a, au cours des décennies, trouvé sa traduction à travers les douze sénateurs représentant les Français établis hors de France, les 155 conseillers de l’Assemblée des Français de l’étranger et la présence de deux représentants des expatriés au sein du Conseil économique et social.
La réforme constitutionnelle de 2008 a permis de compléter ce dispositif en instaurant, à compter de 2012, onze députés représentant les Français établis hors de France.
La communauté des Français de l’étranger est donc parvenue à constituer une collectivité représentée dans les plus importantes institutions de la République, et ce au même titre que les Français de métropole et d’outre-mer.
Au regard de cette avancée, je ne peux admettre – comme la très grande majorité des élus des Français de l’étranger – que la réforme du Conseil économique, social et environnemental se fasse par la suppression des deux représentants des Français de l’étranger.
Les Français établis hors de France sont en nombre croissant depuis 1958. Cette augmentation de la présence de nos communautés à l’étranger constitue un atout indiscutable pour notre pays et pour son influence dans le monde.
La suppression des représentants des expatriés au sein du Conseil économique, social et environnemental serait considérée comme un recul démocratique considérable.
Nos compatriotes résidant hors de France ne doivent pas être sacrifiés sur l’autel « de la jeunesse, du dialogue social et de l’environnement », d’une part, tout simplement parce que les expatriés sont plus jeunes que la moyenne nationale et, d’autre part, parce que se trouvent parmi eux des acteurs majeurs du dialogue social et de la lutte pour la protection de l’environnement.
J’en viens maintenant au cœur de la problématique soulevée par l’article 6 du projet de loi organique.
Le texte proposé pour l’article 7 de l’ordonnance du 29 décembre 1958 prévoit la nomination de personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique, dans le domaine social, culturel, sportif ou scientifique, dans le domaine environnemental et du développement durable ou en raison de leur action en faveur des personnes handicapées.
En premier lieu, l’avenir économique de notre pays se joue aujourd’hui sur la scène internationale, que les Français de l’étranger connaissent mieux que d’autres en contribuant largement au rayonnement international et européen de la France à l’étranger.
Supprimer purement et simplement, à l’heure de la mondialisation, la place des Français expatriés dans l’assemblée représentant les forces vives de la nation, plus qu’une erreur, ce serait une faute : cela reviendrait à nier que le commerce extérieur fait vivre aujourd’hui un Français sur quatre.
Dans la mesure où le texte prévoit que, parmi les dix personnalités qualifiées siégeant au titre du pôle de la vie économique et du dialogue social, doivent figurer trois personnalités issues des entreprises publiques, il nous a paru opportun d’inscrire dans la loi organique cette représentation spécifique des Français de l’étranger en indiquant expressément que parmi ces personnalités qualifiées ne figurent que deux personnalités issues des entreprises publiques mais également une personnalité représentant les activités économiques françaises à l’étranger.
Deuxièmement, les questions sociales, aujourd’hui, se situent de plus en plus souvent au niveau international : plus que quiconque, les Français de l’étranger sont en première ligne pour la défense et le développement de notre modèle social.
Dans une mondialisation déshumanisée, où la question des relations sociales internationales devient de plus en plus sensible, ce serait une faute que de priver le Conseil économique, social et environnemental de l’apport des Français de l’étranger, qui vivent au contact des réalités sociales d’un monde qui change. De plus, deux grandes associations reconnues d’utilité publique, l’Union des Français de l’étranger, créée en 1927, et l’Association démocratique des Français de l’étranger, créée en 1981, concourent à maintenir le lien social entre la France et ses expatriés.
C’est l’une des raisons pour lesquelles il nous a paru opportun d’inscrire dans la loi organique cette représentation spécifique en indiquant expressément que, parmi les quinze personnalités qualifiées siégeant au titre du pôle de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative, figure une personnalité résidant hors de France.
Troisièmement, la défense de l’environnement est devenue aujourd’hui un aspect majeur de la mondialisation. En la matière, l’expertise et l’action des Français de l’étranger – qui vivent quotidiennement avec les citoyens d’autres pays – ne font aucun doute. Nos concitoyens expatriés sont les mieux placés pour expliquer et faire partager les expériences positives de sauvegarde de l’environnement conduites à travers le monde par des organismes qui, quelquefois, ont été créés par des Français de l’étranger.
Les questions environnementales deviennent de plus en plus sensibles. Se priver de l’apport des Français qui vivent au contact des réalités du monde qui nous entoure serait une faute pour notre pays.
Dans la mesure où le texte prévoit que, parmi les quinze personnalités qualifiées siégeant au titre du pôle de la protection de la nature et de l’environnement, doivent figurer au moins trois dirigeants des entreprises exerçant une action significative dans ces matières, il nous a paru opportun d’inscrire dans la loi organique cette représentation spécifique des Français de l’étranger en indiquant expressément que parmi ces personnalités qualifiées figure également une personnalité résidant hors de France. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans la discussion des articles.
Monsieur le ministre, je vous demande de donner un avis favorable sur ces trois amendements, qui proposent que soit expressément prévue une personnalité qualifiée résidant à l’étranger au titre de chacun de ces pôles.
Je reste persuadé, monsieur le ministre, que vous comprendrez cette position de bon sens et que vous vous rallierez à mes arguments, afin que les Français de l’étranger ne soient pas exclus du futur Conseil économique, social et environnemental. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi organique que nous examinons aujourd’hui constitue la troisième étape de la réforme du Conseil économique, social et environnemental.
La loi constitutionnelle de juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République a élargi le champ de compétence du Conseil et créé de nouvelles possibilités de saisine. Il nous faut maintenant en tirer les conséquences pratiques.
Cependant, je m’interroge. Monsieur le ministre, comment allez-vous faire pour procéder, d’ici à la fin du mois de septembre, à la nomination des 233 nouveaux conseillers, sachant que le projet de loi portant engagement national pour l’environnement, dit « Grenelle II », n’a toujours pas été adopté par l’Assemblée nationale et que son article 98 prévoit que les critères de représentativité des acteurs environnementaux seront définis par décret en Conseil d’État ? Le calendrier apparaît pour le moins serré, et je crains que vous n’ayez du mal à le respecter ! Mais peut-être nous demanderez-vous une nouvelle prolongation du mandat des membres du Conseil ?…
M. Richard Yung. Le renforcement du Conseil économique, social et environnemental est indispensable, car cette assemblée est malheureusement peu connue du grand public alors qu’elle constitue le seul espace institutionnel de dialogue entre organisations patronales et syndicales. Dans un pays comme le nôtre, marqué par une tradition, disons, d’échanges difficiles entre employeurs et employés, le Conseil économique et social est l’un des rares lieux où ce dialogue existe vraiment et se déroule, à en croire ce qui se dit, de façon satisfaisante. (M. le ministre approuve.)
La méconnaissance dont souffre le Conseil économique et social s’explique par le fait qu’il est noyé dans un océan d’organismes consultatifs concurrents et ne bénéficie pas de la même notoriété que, par exemple, la Cour des comptes, dont le rapport annuel est toujours très attendu. Pour lui donner à l’avenir plus de poids et de lisibilité, sans doute serait-il opportun de mettre enfin en pratique – au lieu de le supprimer, comme le propose l’article 15 bis du présent projet de loi – l’article 27 de l’ordonnance de décembre 1958, qui prévoyait la suppression des « organismes consultatifs dont les attributions feraient double emploi avec celles du Conseil économique et social ». Quel sens y a-t-il, en effet, à maintenir des comités tels que le Conseil d’analyse de la société ou le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale – dont on ne voit d’ailleurs pas en quoi il diffère du Conseil d’orientation pour l’emploi ? Nous avons une « foultitude » de comités et conseils de ce genre !
Le Conseil économique, social et environnemental souffre également d’être peu considéré par les pouvoirs publics. En 2008, un quart seulement de ses travaux résultait d’une saisine gouvernementale – contre la moitié dans les années 1970 –, les trois autres quarts correspondant à des autosaisines. On constate donc une baisse significative du nombre des avis demandés au Conseil par le Gouvernement. En outre, M. Chertier affirme dans son excellent rapport que de nombreux avis et études « demeurent insuffisamment exploités ». Tel fut notamment le cas de l’avis sur le travail dominical, « qui n’a trouvé aucun écho dans le débat conduit sur ce sujet sensible ».
Par ailleurs, le Premier ministre ne respecte que rarement l’obligation qui lui incombe de faire connaître « les suites données aux avis du CES ». Il conviendrait donc de renforcer ce droit de suite en rendant obligatoire la publication par le Gouvernement d’un rapport annuel sur les suites données aux avis du CES. Nous déposerons un amendement en ce sens.
Le renforcement du rôle du Conseil ne passe donc pas seulement par l’élargissement de ses compétences et de ses saisines : il faut également qu’il soit davantage écouté par le Gouvernement.
La composition du Conseil et le mode de désignation de ses membres constituent évidemment le principal enjeu du présent projet de loi. Le défi est d’autant plus difficile à relever que la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a gelé à 233 le nombre de conseillers.
Je constate d’abord avec soulagement qu’il n’est pas prévu d’introduire une représentation des cultes. Pour mémoire, je rappelle que le Président de la République, en décembre 2007, avait exprimé son souhait d’élargir la représentation du Conseil aux « grands courants spirituels ».
Nous approuvons également les dispositions de l’article 6 visant à introduire la parité – nous ferons des propositions pour en améliorer les modalités –, celles de l’article 8 tendant à limiter à deux le nombre de mandats successifs, ainsi que l’annonce de l’abaissement à dix-huit ans de l’âge minimal pour exercer un mandat. La représentation des jeunes et des étudiants, qui est également prévue à l’article 6, devrait aussi permettre un rajeunissement des membres du Conseil. Cependant, notre collègue Jean-Claude Frécon, rapporteur spécial de la commission des finances, m’a chargé d’attirer votre attention sur le fait que cette réforme aura nécessairement des conséquences sur l’équilibre, déjà préoccupant, de la caisse de retraite du CESE.
Enfin, le paragraphe II de l’article 6 propose que les membres représentant les salariés soient désignés par les organisations professionnelles les plus représentatives. Je souhaiterais savoir, monsieur le ministre, sur quelles bases ces conseillers seront nommés, dans la mesure où, d’après notre rapporteur, les critères fixés par la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail « seront appliqués à l’issue de la première mesure de l’audience des syndicats et permettront de connaître au plus tard en 2013 la liste des organisations représentatives au niveau national et interprofessionnel ».
Le présent projet de loi organique est censé mieux asseoir la représentativité du CESE, lui permettre de mieux « coller », si j’ose dire, à la société française. Pourtant, il laisse de côté certains pans de cette société. On comprendra donc que, étant sénateur des Français établis hors de France, je m’émeuve, avec mes collègues et nos deux millions et demi de concitoyens vivant à l’étranger, de la suppression des deux conseillers qui les représentaient. Ces deux sièges, créés en 1984, sont pourvus par décret pris sur le rapport du ministre des affaires étrangères après consultation de l’Assemblée des Français de l’étranger.
Dans son scénario no 1 – qui est pourtant celui que vous avez suivi pour la plus grande partie, monsieur le ministre –, M. Chertier proposait de maintenir à deux le nombre de conseillers représentant les Français établis hors de France. Or, dans le schéma proposé par le Gouvernement, pour que les Français de l’étranger continuent d’être représentés, il faudrait qu’au moins un conseiller soit désigné parmi les dix personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique ou les quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine social. Cela laisse donc peu d’espoir pour le maintien de la représentation des Français de l’étranger, car nous savons que la concurrence est dure dans ces collèges restreints !
Autre solution : que soit nommée au moins une personnalité associée représentant les Français établis hors de France. Cette alternative n’est pas plus satisfaisante. Nous ne sommes pas favorables à un tel système, qui, de surcroît, ne garantirait pas la pérennité de la représentation des Français de l’étranger au sein du Conseil. Après avoir instauré leur représentation à l’Assemblée nationale, grand progrès que nous avons salué, il est pour le moins paradoxal de vouloir supprimer celle dont ils bénéficient au sein de la troisième assemblée constitutionnelle de la République !
Pour le justifier, on souligne que les Français établis hors de France disposent de leur propre assemblée, qu’ils sont représentés au Sénat et le seront prochainement à l’Assemblée nationale. Ce ne sont pas là des arguments qui nous convainquent. Dans le présent projet de loi, par exemple, les départements et régions d’outre-mer, les collectivités d’outre-mer et la Nouvelle-Calédonie continuent d’être représentés par onze conseillers alors qu’ils bénéficient également d’une représentation au Parlement et qu’ils ont leurs propres conseils économiques et sociaux. Dans ces conditions, pourquoi vouloir supprimer la représentation des Français de l’étranger ? La spécificité de leur apport au Conseil économique et social est pourtant indéniable, en particulier grâce au prisme particulier à travers lequel ils abordent les questions de l’économie, de la société.
Quid également de la représentation des consommateurs, du secteur de l’économie sociale ou de celui du logement ? On mesure ici certaines lacunes ! Pour les combler, il faudrait, de mon point de vue, réduire le nombre de personnalités qualifiées en le ramenant à son niveau de 1958 – je sais, ce sera douloureux ! –, soit quinze au lieu de quarante.
Je m’interroge aussi sur les modalités de nomination des personnalités qualifiées. La question ayant déjà été abordée à plusieurs reprises, je n’y reviens pas ; mais je continue de penser que, pour la plupart d’entre elles, ces nominations restent un lot de consolation.
Enfin, le présent projet de loi instaure un fléchage dans la désignation de ces personnalités. Cette disposition permettra peut-être d’empêcher certaines nominations surprenantes. Il est pourtant nécessaire d’aller plus loin, et je proposerai de reprendre l’idée, avancée par la commission Vallon de 1963 – je continue de remonter le temps ! –, de recourir à des « comités de sages », composés de personnalités dont les compétences et l’autorité sont unanimement reconnues dans chaque domaine, qui seraient chargés de soumettre des listes de candidats aux autorités.
Enfin, je souhaiterais savoir si les scientifiques qui remettent en cause la thèse du réchauffement climatique (Sourires.), ceux que l’on appelle les « climatosceptiques », auront droit de cité au sein du nouveau collège.
M. Richard Yung. Par ailleurs, nous proposons de supprimer la possibilité de désigner des personnalités associées et d'améliorer en contrepartie la coopération entre le Conseil et ses partenaires, notamment au travers des organes d'expertise. En effet, nous pouvons craindre que la procédure de nomination de ces personnalités associées ne donne lieu à des dérives analogues à celles évoquées précédemment. À nos yeux, il serait donc tout à fait justifié de l’écarter.
Enfin, nous nous réjouissons de l'élargissement du système des saisines, qui va dans le sens d'un rapprochement du Conseil et des citoyens.
Telles sont mes principales observations sur ce texte. Nous défendrons un certain nombre d’amendements, dont nous avons déjà discuté en commission des lois, sans grand succès. Sait-on jamais, les avis auront peut-être changé entre-temps. Notre vote dépendra bien sûr du sort qui sera réservé à ces amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous allons débattre a pour objectif de renforcer la légitimité du Conseil économique, social et environnemental, en assurant notamment une meilleure adéquation de sa composition, inchangée depuis 1958, aux évolutions de la société civile. À la différence de l'Assemblée nationale et du Sénat, le Conseil économique, social et environnemental est chargé d'une fonction essentiellement consultative. Il permet ainsi aux différents acteurs du monde économique et social de s’exprimer sur les problèmes et enjeux liés à la vie de notre pays.
Plusieurs orateurs avant moi ont souligné la nécessité de rendre le Conseil plus représentatif des citoyens, tant dans sa composition que dans la possibilité désormais offerte d'agir par voie de pétition. Si je me réjouis de l'apparition de deux nouvelles catégories de membres, les jeunes et les étudiants, d'une part, les associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de l'environnement, d’autre part, il m'est apparu nécessaire, dans un souci de parité intergénérationnel, de proposer que soient représentées les associations de retraités, comme le Président de la République s'y était d’ailleurs engagé.
En effet, aujourd'hui, un Français sur cinq a plus de soixante ans. Le rapport sera de un sur trois en 2040. Très impliqués dans le tissu associatif, ces retraités ont notamment exprimé leur souhait de participer davantage à la vie économique, sociale et politique de notre pays, et de tenir ainsi leur place comme citoyen à part entière. Ils désiraient également siéger aux côtés des partenaires sociaux dans les lieux qui examinent les sujets et décident des problèmes qui les touchent directement, comme l'avenir des régimes de retraite, les problèmes de santé liés au vieillissement, la dépendance, etc. Ils sont également concernés par les conséquences de la nécessaire évolution de notre société. C’est pourquoi j'ai déposé un amendement en ce sens en commission. Accepté, il a été intégré dans le texte soumis aujourd’hui à notre examen.
S’il n’était pas souhaitable de toucher à un équilibre global susceptible d’être mis en péril par toute modification – le fameux château de cartes évoqué par M. le ministre - un fléchage a cependant été instauré, afin d'assurer la prise en compte de problématiques qui ne sont pas portées au sein du CESE par une catégorie spécifique de membres. Ainsi, outre les personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique ou en matière d'environnement et de développement durable, quinze personnalités qualifiées seront désignées en raison de leur expérience dans le domaine social, culturel, sportif, scientifique, ou de leur action en faveur des personnes handicapées.
L'objet de mon amendement visait à spécifier la présence d'un représentant des associations de retraités au sein de ces personnalités qualifiées. C'est chose faite et j'en remercie la commission, et en premier lieu M. le rapporteur.
Ce texte constitue une avancée très significative en ce qu’il apporte de nouveau au Conseil économique, social et environnemental dans sa composition et sa capacité de gouvernance. Bien évidemment, je le voterai. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. René Teulade.
M. René Teulade. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'institution qui nous occupe aujourd'hui est souvent méconnue des Français. Mais son rôle aux côtés des pouvoirs publics est bien réel !
Le Conseil économique, social et environnemental est une assemblée qui a toujours souhaité rester pleinement associée, dans le respect des principes humanistes et du souci de réalisme et de confrontation aux réalités du terrain, à la contribution au mieux-être des Français, à la solidarité entre les générations et au maintien de la cohésion sociale dans notre pays. Il est regrettable que certains de ses travaux, d’une brûlante actualité aujourd’hui, n’aient pas eu plus d’échos. Il en est ainsi de la réforme des retraites, de celle de l’enseignement supérieur ou de celle de la sécurité sociale.
J'ai eu la chance, et le plaisir, de siéger prés de vingt ans au sein de cette noble institution. D’abord en tant que représentant de la mutualité française, puis comme personnalité qualifiée.
La réforme que vous nous présentez, monsieur le ministre, ne révolutionnera pas le Conseil économique, social et environnemental, même si, je le reconnais, quelques dispositions témoignent d’un effort louable de s’adapter aux évolutions de notre société. Nous en prenons acte.
La réforme constitutionnelle de 2008 a introduit des modifications dans quatre axes : l’extension du champ de compétence au domaine environnemental ; l’élargissement des possibilités de saisine ; la limitation du nombre de membres du CESE à 233 conseillers ; enfin la possibilité de saisine par voie de pétition.
Deux ans plus tard, la loi organique aujourd’hui soumise à notre examen est la mise en musique de ces quatre axes. Cependant, cette mise en musique est a minima.
Depuis près de quarante ans, nous avons assisté à une sorte de paralysie institutionnelle du CESE. Autrefois, c’est vrai, beaucoup se sont méfiés de sa concurrence avec la représentation parlementaire. Mais, aujourd'hui, toutes les institutions de la Cinquième République ont leur place et nul ne tente d’accaparer le domaine de compétence de qui que ce soit.
Le général de Gaulle voulait faire de la deuxième chambre du Parlement un conseil composé « des représentants des organisations économiques, familiales, intellectuelles, pour que se fasse entendre, au-dedans même de l'État, la voix des grandes activités du pays ». L’histoire en a décidé autrement et ce n'est pas la deuxième chambre qui remplit ce rôle, mais bien le Conseil économique, social et environnemental.
Depuis 2008, l'adjonction de l'environnement au domaine d'intervention du Conseil entraîne la modification de sa composition. Malheureusement, cette modification ne reflète pas notre société. Même si de nouveaux équilibres apparaissent timidement, l'omniprésence de certaines catégories professionnelles demeure, sans toujours correspondre à leur activité économique et sociale.
La représentation des entreprises publiques est également revue à la baisse, et disparaît même dans le texte transmis par l'Assemblée nationale. La commission des lois a rétabli une représentation. Le texte prévoit ainsi que trois personnalités issues d’entreprises publiques sont choisies parmi les personnalités qualifiées. Nous pouvons nous réjouir de cette avancée, dans la mesure où ce secteur emploie aujourd'hui 800 000 personnes.
Espérons que le Gouvernement ne soit pas tenté de revenir sur cette version, adoptée en commission !
Je voudrais m'attarder, assez rapidement toutefois, sur le statut des personnalités qualifiées. Le Gouvernement refuse de modifier leur mode de nomination. Actuellement, celle-ci a lieu sur proposition du Premier ministre.
Notre rapporteur, que je félicite des travaux réalisés, avant de battre en retraite, avait proposé à la commission des lois de permettre la nomination par tiers de quarante personnalités qualifiées. Rassuré par le ministre, il a retiré son amendement. Remplacer le pouvoir de nomination des présidents des assemblées par un avis n’a, reconnaissons-le, ni le même effet, ni les mêmes conséquences.
Votre refus de changer le mode de désignation est bien le signe de votre volonté d’empêcher le Conseil de remettre en cause les orientations ou les décisions du Gouvernement en place. Si les présidents des assemblées et le Gouvernement sont monocolores, la consultation ne posera pas trop de difficultés. Mais s'il y a divergence de majorité, rien n'obligera le Gouvernement à consulter le président de l'assemblée récalcitrante, et surtout de tenir compte de son avis ! Pour justifier votre refus, vous avancez la difficulté de respecter la parité. Vous auriez également pu nous répondre que quarante n'est pas divisible par trois. Passons !
J’en viens justement à la parité. D’après l'article 6, l'écart entre les hommes et les femmes désignés par les organisations ne doit pas être supérieur à un. Cette règle est aussi applicable aux personnalités qualifiées. Certes, il s’agit d’une avancée à même de faire tendre le Conseil économique, social et environnemental vers la parité. Mais la parité totale n'est pas encore à l'ordre du jour !
Aussi, monsieur le ministre, nous espérons que vous approuverez nos propositions pour que cette loi organique permette une vraie réforme du Conseil économique, social et environnemental afin de renforcer son efficacité et d’accompagner les travaux des deux autres chambres.
Bien entendu, notre vote dépendra des réponses qui seront apportées à nos amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Christiane Kammermann.
Mme Christiane Kammermann. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, troisième assemblée constitutionnelle de la République, le Conseil économique, social et environnemental est composé des représentants de la société civile. C'est une instance consultative auprès du Gouvernement, à l'origine de rapports et d'avis qui participent à la préparation des lois les plus déterminantes pour chacun d’entre nous.
II est doté d'une triple mission : conseiller le Gouvernement et participer à l'élaboration de la politique économique et sociale ; contribuer à l'information du Parlement ; favoriser le dialogue entre les catégories socioprofessionnelles représentées en son sein.
Son président, M. Jacques Dermagne a contribué à lui redonner tout son poids. II aime d'ailleurs à répéter : « L'Assemblée nationale décide, le Sénat améliore, mais avant, le Conseil ouvre le débat et oriente ». Le CESE est donc là pour exprimer ce que pense la société civile et faire en sorte que les lois ne soient pas en trop profond décalage avec les sentiments et les attentes des Français.
De plus, le CESE a su progressivement élargir ses travaux aux dimensions européennes et internationales. Ces dernières années, il s'est imposé comme une référence sur le plan mondial. Plus de soixante-cinq pays, il est utile de le souligner, se sont dotés d'organismes analogues.
Nous avons eu l’occasion de le souligner, le Conseil économique, social et environnemental a périodiquement été remis en cause et contesté depuis sa création. Sa suppression a même été plusieurs fois proposée, sans jamais être décidée. Le CESE a donc connu de nombreuses transformations au cours de son histoire, la plus importante d’entre elles étant, bien entendu, celle qui a été engagée par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, dont nous sommes amenés à débattre aujourd’hui, et qui constitue un premier pas vers sa réforme.
L’article 6 de ce projet de loi organique vise précisément à réformer la composition du Conseil économique, social et environnemental, afin d’y intégrer des membres spécifiquement compétents en matière d’environnement, ainsi que des représentants des jeunes et des étudiants, et de l’adapter aux évolutions intervenues dans la société française.
Cet article constitue donc une disposition centrale et complexe de ce projet de loi organique, puisque la révision de la composition du CESE doit être réalisée dans le respect de l’effectif maximum de 233 membres, inscrit à l’article 71 de la Constitution depuis la dernière révision.
Or mes collègues et moi-même avons constaté avec stupeur que ce projet de loi organique prévoit la disparition pure et simple des représentants des Français établis hors de France, au motif que les Français expatriés vont bénéficier prochainement de onze sièges de députés.
Permettez-moi de pointer cette erreur d’interprétation manifeste, car les départements et collectivités d’outre-mer ont non seulement des députés et des sénateurs, mais aussi des conseils économiques, sociaux et culturels locaux ! Cela ne les empêche pas – ce qui est naturel – de conserver leur représentation individuelle au sein du CESE.
La représentation des Français établis hors de France n’a malheureusement pas été rétablie en première lecture par l’Assemblée nationale. C’est pourquoi nous comptons beaucoup sur la vigilance de nos collègues sénateurs pour revenir sur une situation que je qualifierai d’« injuste ».
Le Gouvernement a organisé la composition du CESE selon trois pôles.
Le premier pôle, qui est relatif à la vie économique et au dialogue social, compterait 140 membres, dont 10 personnalités qualifiées dans le domaine économique.
Le deuxième pôle, qui est relatif à la cohésion sociale et territoriale et à la vie associative, rassemblerait 60 membres, dont 15 personnalités qualifiées dans le domaine social, culturel, sportif ou scientifique, ou agissant en faveur des personnes handicapées.
Enfin, le troisième pôle, qui est relatif à la protection de la nature et de l’environnement, compterait 33 membres répartis en deux groupes : 18 représentants des associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de l’environnement et 15 personnalités qualifiées en matière d’environnement et de développement durable.
Le plafonnement fixé par la Constitution pour la nouvelle répartition des sièges impose donc des choix délicats.
Actuellement, les Français de l’étranger disposent de deux sièges. C’est déjà insuffisant, car ils représentent une population estimée à environ 2,3 millions de personnes.
Supprimer toute représentation des Français de l’étranger consisterait à priver cette assemblée de l’expertise inégalable des Français expatriés en matière économique, sociale, culturelle et environnementale sur la scène internationale. À l’heure de la mondialisation, cette décision serait vraiment dommageable. Nos élus comme nos compatriotes expatriés ne comprendraient pas un tel abandon.
Mes collègues Christian Cointat et Christophe-André Frassa et moi-même avons déposé des amendements visant à prévoir, pour chacun des pôles, un représentant des Français établis hors de France. Tous nos efforts tendent à faire en sorte que nos concitoyens de l’étranger ne soient pas oubliés et restent associés aux prises de décision en matière économique, sociale et culturelle.
Dans cette optique, il n’est pas envisageable que le CESE perde tous ces représentants établis hors de France. Leur expertise est nécessaire dans chacun des trois pôles économique, social et environnemental.
À cet égard, il n’est pas inutile de rappeler tout l’intérêt des rapports rédigés par les représentants des Français de l’étranger au CESE.
En 2003, le rapport intitulé « Quel avenir pour l’enseignement français à l’étranger » a débouché sur le premier plan d’orientation de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.
En 2009, le rapport sur les attentes et les besoins des Français de l’étranger a permis d’émettre des propositions visant à mieux répondre aux besoins des Français établis hors de France.
En ce moment même, le CESE remet une étude sur l’amélioration de l’image de la France à l’international.
C’est dire si, par leur présence active au sein du CESE, nos représentants contribuent beaucoup à améliorer la participation de nos concitoyens de l’étranger à la vie civique et à la réalisation de leurs projets économiques, éducatifs, culturels et sociaux.
Le monde ne fera face aux grands défis de la mondialisation que grâce au dialogue et à la mise en œuvre de solutions partagées. La pratique de l’échange des idées et des convictions, dans le respect de l’autre, est une nécessité.
L’existence du CESE est un début de réponse. Il représente une chance pour nos concitoyens d’être plus directement associés aux décisions qui conditionnent leur avenir. C’est pourquoi les représentants des Français de l’étranger ne doivent pas être écartés. Il est primordial d’entendre leur voix pour que l’ensemble de nos compatriotes puissent bénéficier de leur expertise de grande valeur.
M. le président. Je vous demande de conclure, ma chère collègue !
Mme Christiane Kammermann. Les Français de l’étranger sont fiers de servir la République au travers d’une institution prestigieuse, qui a su trouver sa place parmi les autres institutions françaises, afin de gagner en stabilité et en légitimité.
Je vous en prie, mes chers collègues, ne les décevons pas ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à remercier les différents orateurs qui se sont exprimés pour la modération dont ils ont fait preuve dans leurs propos, animés d’un souci d’objectivité. Chacun a pu défendre des points de vue différents, ce qui est, en soi, parfaitement normal, mais je constate que nous nous rejoignons sur l’essentiel.
Je me limiterai pour l’instant à des réponses d’ordre général, me réservant d’apporter des réponses plus précises lors de l’examen des amendements.
Il ressort de nos débats que nous partageons tous le sentiment que le Conseil économique, social et environnemental doit être représentatif de la diversité de notre société, dans ses composantes, et doit prendre en compte l’évolution de celle-ci.
Dans une démocratie vivante et dynamique, il y a tout à fait la place, à côté de ce qui fait l’essence même de la démocratie, c'est-à-dire les deux chambres composant le Parlement, pour une assemblée qui, de par ses différences, au travers notamment du mode de nomination de ses membres, peut apporter des éclairages indispensables à l’examen des grands sujets de société et proposer des solutions. À mes yeux, il s’agit vraiment du point le plus important de la discussion qui s’est engagée entre nous.
Par ailleurs, chacun s’accorde à reconnaître que les procédures de saisine et le droit de pétition constituent autant d’ouvertures et d’avancées qui accroîtront le rôle du Conseil économique, social et environnemental. Tels sont les points de convergence entre nous.
En revanche, le processus de nomination des personnalités qualifiées a reçu un écho différent, même si je n’ai rien entendu d’extravagant dans toutes vos déclarations, mesdames, messieurs les sénateurs. Mais je savais à quoi m’attendre avant même de venir ici, puisque la même divergence s’est fait jour à l’Assemblée nationale.
Ce processus de nomination pose deux séries de problèmes : d’un côté, en ce qui concerne les autorités qui nomment, de l’autre, le nombre de sièges.
Il est clair, pour nous, qu’il n’est pas possible d’ouvrir la porte à tout le monde. Compte tenu du nombre de sièges disponibles, il va falloir que, dans le processus de nomination, après les consultations nécessaires, soit prise en compte une certaine cohérence de façon que soit assurée la représentativité de tous les secteurs d’activité. En tout cas, pour le Gouvernement, il ne s’agit pas de représenter des catégories en tant que telles.
Permettez-moi maintenant de répondre brièvement aux orateurs qui se sont exprimés.
Tout d’abord, je tiens à vous remercier, monsieur le rapporteur, de vos propos. Comme vous, le Gouvernement considère que le contrôle par échantillonnage est un outil tout à fait pertinent, qui est d’ailleurs assez souvent pratiqué à l’étranger dans des organisations similaires. Le contrôle des pétitions repose également sur l’obligation de désigner un mandataire unique, qui aura la responsabilité de présenter les signatures et de s’assurer du respect des conditions qui seront posées par ce projet de loi organique.
M. Mézard est revenu, comme d’autres de ses collègues, sur l’opportunité de continuer à voir siéger dans cette enceinte les membres de section. Nous voulons revaloriser le rôle et la mission de ces personnalités, car nous estimons qu’elles peuvent apporter, pour une durée donnée, une expertise particulière, qui peut être utile et intéressante. Le Gouvernement souhaite donc maintenir cette disposition dans le texte.
Madame Mathon-Poinat, le contingent des personnalités qualifiées choisies pour rejoindre le pôle relatif à la protection de la nature et de l’environnement fera naturellement place aux scientifiques et aux professionnels de ces secteurs, comme vous l’avez demandé. On le sait très bien, les questions environnementales sont très complexes et appellent, de ce fait, une pluralité d’approches et d’expertises techniques. Les avis rendus par le Conseil économique, social et environnemental n’en seront que plus fiables.
Par ailleurs, je tiens à remercier M. Dubois du soutien de son groupe à ce projet de loi organique. Je profite d’ailleurs de cette occasion pour saluer les groupes politiques qui ont consenti des efforts.
Il est vrai qu’il peut paraître paradoxal de demander un sacrifice au secteur agricole, qui traverse actuellement une période particulièrement difficile. Mais la décision prise résulte de discussions, de consultations et d’un accord : le secteur agricole a compris qu’il fallait laisser un peu de place aux autres acteurs.
M. Sutour s’est interrogé sur l’organisation des travaux du Sénat, déplorant l’examen tardif de ce texte et l’engagement de la procédure accélérée. En matière d’ordre du jour, le Gouvernement fait ce qu’il peut ! (Sourires.)
Nous sommes deux acteurs : le Gouvernement, d’une part, le Parlement, d’autre part ! Des débats très importants ont nécessité des durées d’examen qui ne l’étaient pas moins...
Il me vient à l’esprit deux exemples assez récents : l’examen du projet de loi portant engagement national pour l’environnement, le Grenelle II, qui a duré trois semaines, l’examen du projet de loi de réforme des collectivités territoriales, qui a nécessité le même temps. Il en fut de même, d’ailleurs, de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.
Nous n’allons pas nous en plaindre, puisque c’est nous qui avons soutenu la réforme constitutionnelle, mais je vous rappelle que l’organisation de l’ordre du jour est partagée à part quasi égale entre le Gouvernement et le Parlement. Par conséquent, dans cette période de rodage, il faut trouver de nouvelles méthodes pour que ne s’écoule pas trop de temps avant l’adoption des différents textes.
Nous faisons des efforts, en cette fin de session, pour permettre l’adoption d’un certain nombre de textes qui résultent de la révision constitutionnelle du 21 juillet 2008 : celui que nous examinons, les textes relatifs à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, au Conseil supérieur de la magistrature sur lequel vous avez travaillé voilà quelques jours, et le projet de loi organique relatif au Défenseur des droits que vous examinerez fin mai. Ainsi l’essentiel aura été fait.
Quant à la procédure accélérée, permettez-moi de couper les ailes à ce canard. (Sourires.) Regardez les chiffres et, pour que l’appréciation soit fiable, comparez ceux qui concernent l’utilisation de la procédure d’urgence entre le 1er mars 2008 et le 1er mars 2009, donc avant la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle, avec ceux qui concernent la procédure accélérée entre le 1er mars 2009 et le 1er mars 2010. Vous constaterez que 80 % des textes faisaient l’objet de la procédure d’urgence avant la réforme constitutionnelle et que, depuis, malgré le partage de l’ordre du jour, la procédure accélérée ne concerne que 41 % des textes ! Certes, je ne prétends pas que c’est parfait pour les parlementaires, mais il faut reconnaître que des progrès ont été accomplis.
J’ajouterai, en guise de petit clin d’œil, puisque nous nous connaissons bien les uns et les autres, que les textes faisant l’objet d’une procédure accélérée seront d’autant moins nombreux que les débats seront rapides, alertes et dynamiques !
M. Jean-Claude Peyronnet. Nous ne le ressentons pas comme cela !
M. Henri de Raincourt, ministre. Vous ne le ressentez peut-être pas comme cela, mon cher ami, mais c’est pourtant la réalité !
Je veux remercier Mme Des Esgaulx de ce qu’elle a dit, en particulier sur la parité et la féminisation.
J’ai bien écouté M. Antoine Lefèvre, qui trouvera des réponses aux sujets qu’il a évoqués dans la discussion des amendements.
Il en est de même pour les sénateurs représentant les Français établis hors de France. Je vous assure, mesdames, messieurs les sénateurs, que le message est passé… Vous êtes parfaitement organisés (Sourires.), très tenaces et très convaincants !
M. Robert del Picchia. Et très présents !
M. Henri de Raincourt, ministre. En cette période cruciale sur les plans tant européen que mondial, vous avez bien raison d’insister sur la place et le rôle de la France, et d’affirmer l’importance de l’enjeu que représente la présence française hors de nos frontières.
Le Gouvernement a pensé légitimement aller au-delà de vos désirs en permettant l’élection à effectif constant à l’Assemblée nationale, même si je sais que l’argument ne vous plaît pas trop, de onze députés pour compléter la représentation parlementaire des Français établis hors de France, en plus des douze sénateurs qui remplissent cette mission ici et nous sommes conscients de ce qu’ils apportent.
Sans doute n’avons-nous pas été suffisamment convaincants, c’est possible, et n’avons-nous pas assez pris en compte les préoccupations légitimes que vous avez manifestées. Mais, tout à l’heure, nous trouverons, je crois, un accord pour vous permettre d’obtenir satisfaction.
Puis-je dire à M. Richard Yung qu’en termes de calendrier – toujours le calendrier ! – le Gouvernement mettra tout en œuvre pour assurer une application simultanée du texte que nous discutons en ce moment et du projet de loi portant engagement national pour l’environnement, le Grenelle II, qui fait l’objet à l’Assemblée nationale d’un temps législatif programmé de trente heures. Même si ce temps est un peu dépassé, nous devrions globalement parvenir à régler cette question.
En matière de représentativité – je l’ai dit tout à l’heure dans mon propos –, nous allons nous appuyer sur les propositions du député de la Meuse, M. Bertrand Pancher. Nous avons de quoi faire notre travail sans avoir besoin de demander au Parlement de proroger le mandat des membres du Conseil, ce qui ne serait pas sérieux.
S’agissant des institutions consultatives, plusieurs dizaines de suppressions ont eu lieu, en particulier dans le cadre de la revue générale des politiques publiques, et je peux d’ores et déjà indiquer au Sénat qu’un nouveau train de suppressions est en cours de préparation.
Quant à la représentativité des organisations syndicales, nous savons tous que la loi de 2008 sera applicable en 2013. Elle sera donc complètement prise en compte dans le décret de composition du Conseil économique, social et environnemental de 2015. Celle de 2010 s’effectuera sous le contrôle du Conseil d’État.
Je ferai une réponse rapide sur ceux que vous avez appelé les « climatosceptiques » qui alimentent effectivement le débat ! On voit d’ailleurs émerger quelques personnalités que vous connaissez sans doute assez bien. J’ai lu, moi aussi, le livre de l’une d’elle...
Je l’ai dit tout à l’heure à Mme Mathon-Poinat, il y a de la place pour tout le monde de façon que chacun ait la possibilité de voir défendu son point de vue dans l’enceinte du Conseil. En revanche, il faut éviter de sombrer dans la pensée unique. C’est exactement l’inverse qui doit prévaloir !
Je terminerai mon propos en remerciant M. Teulade de son intervention. Sur cette question, il est un de ceux que l’on doit écouter avec le plus d’attention en raison même de l’expérience qui est la sienne. Il a en effet siégé au Conseil économique pendant un certain nombre d’années et y a joué un rôle tout à fait important dans les domaines spécifiques que nous lui connaissons et reconnaissons.
Je le remercie donc bien vivement de nous faire profiter de l’expérience qu’il tire de ces années. Personne parmi nous n’a oublié certains des rapports commis à l’époque où il siégeait au Conseil, notamment son rapport intitulé : « L’avenir des systèmes de retraite » !
Telles sont, mesdames et messieurs les sénateurs, les réponses que je voulais vous faire. Nous sommes dans les meilleures dispositions pour aborder l’examen des amendements et je suis convaincu que nous trouverons les équilibres nécessaires. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées de l’Union centriste.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion des articles.
Article 1er
Les deuxième et troisième alinéas de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Représentant les principales activités du pays, le Conseil favorise leur collaboration et assure leur participation à la politique économique, sociale et environnementale de la Nation.
« Il examine les évolutions en matière économique, sociale ou environnementale et suggère les adaptations qui lui paraissent nécessaires.
« Il promeut une politique de dialogue et de coopération avec les assemblées consultatives créées auprès des collectivités territoriales et auprès de ses homologues européens et étrangers ».
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L'article 1er est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
L’article 2 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 2. – Le Conseil économique, social et environnemental est obligatoirement saisi pour avis, par le Premier ministre, des projets de loi de plan et des projets de loi de programmation à caractère économique, social ou environnemental. Il peut être au préalable associé à leur élaboration.
« Il peut être saisi pour avis, par le Premier ministre, des projets de loi de programmation définissant les orientations pluriannuelles des finances publiques, des projets de loi, d’ordonnance ou de décret ainsi que des propositions de loi entrant dans le domaine de sa compétence.
« Il peut également être consulté, par le Premier ministre, le Président de l’Assemblée nationale ou le Président du Sénat, sur tout problème de caractère économique, social ou environnemental.
« Il peut être saisi de demandes d’avis ou d’études par le Premier ministre, par le Président de l’Assemblée nationale ou par le Président du Sénat.
« Dans les cas prévus aux deux premiers alinéas, le Conseil économique, social et environnemental donne son avis dans le délai d’un mois si le Premier ministre déclare l’urgence. »
M. le président. L'amendement n° 20, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que par le président d'un groupe parlementaire de l'une ou l'autre assemblée
La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. L'article 70 de la Constitution prévoit que le Conseil économique, social et environnemental peut être consulté par le Gouvernement et le Parlement.
Certes, contrairement à l'article 61 de la Constitution, l'article 70 ne prévoit pas une saisine par l'opposition. Toutefois, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 institutionnalise les groupes parlementaires et impose de ne pas retenir une acception étroite du Parlement.
Les présidents des groupes parlementaires doivent donc pouvoir saisir le Conseil économique, social et environnemental.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement ne paraît pas conforme à l’article 70 de la Constitution, qui prévoit une consultation par le Parlement.
De plus, l’article 51-1 de la Constitution renvoie au règlement de chaque assemblée la définition des droits des groupes parlementaires.
Au-delà des dispositions de la Constitution, il faut s’inscrire dans le débat que nous avons eu. Aujourd’hui, de toute évidence, la saisine des présidences des assemblées et l’organisation des rapports entre le Conseil économique, social et environnemental, et les assemblées nous amènent à une modification qui sera substantielle.
De plus, il y a la saisine par voie de pétition.
Pour cette double raison, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Effectivement, conformément à la Constitution, les chambres du Parlement sont représentées par leur président.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Eh oui !
M. Henri de Raincourt, ministre. Dans l’état actuel de nos institutions, il n’y a donc pas de partage possible. C’est si vrai que la saisine du Conseil d’État sur une proposition de loi, par exemple, ou de la Cour des comptes, passe par le président de l’assemblée considérée !
J’en profite pour répondre, sur ce point précis, à M. Simon Sutour, qui a déploré que l’opposition ne puisse pas être à l’origine d’une saisine. Monsieur le sénateur, le président d’une assemblée est celui de toute l’assemblée et non d’un camp opposé à un autre ! Par conséquent, j’imagine mal un président d’une assemblée, conscient de ses responsabilités et exerçant honnêtement la fonction tout à fait éminente qui est la sienne, refuser aux membres d’un groupe qui n’appartient pas à sa famille politique d’engager cette procédure de saisine !
Par conséquent, il faut avoir confiance dans la qualité et la responsabilité des hommes, en particulier des présidents des assemblées. Aussi le Gouvernement est-il défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'article 2.
(L'article 2 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 2
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 21 rectifié, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'avant-dernier alinéa de l'article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« - s'il y a lieu, la prise en compte par le projet de loi de l'avis du Conseil économique, social et environnemental ; ».
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Ce matin, après la discussion en commission, nous avons rectifié cet amendement. Nous avons simplifié la version initiale et nous visons désormais la prise en compte de l’avis du Conseil économique, social et environnemental, et ce pour tirer les conséquences de la réforme.
Il faut que l'étude d'impact jointe au projet de loi précise la manière dont l'avis du CESE est pris en compte ou les motifs pour lesquels il ne l'est pas.
M. le président. L'amendement n° 49, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 2, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'avant-dernier alinéa de l'article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Et s'il y a lieu, la manière dont le projet de loi a pris en compte l'avis du Conseil économique, social et environnemental. Dans le cas où l'avis du Conseil économique, social et environnemental n'a pas été suivi, l'étude d'impact détaille les motifs, notamment financiers, juridiques ou pratiques, qui le justifient. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement rejoint celui qui vient d’être présenté par le groupe socialiste.
Il est difficile, c’est vrai, d’étendre les pouvoirs du CESE : lui donner trop d’importance, c’est adopter une démarche totalement anti-démocratique ; à l’inverse, ne pas lui en donner conduit à se poser la question de son utilité.
Selon moi, cet amendement, qui permet à cette institution de renforcer son rôle, pourrait recevoir un avis favorable de M. le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. L’amendement de M. Yung ayant été rectifié à la suite du débat qui a eu lieu en commission, celle-ci émet un avis favorable.
L’obligation de prendre en compte l’avis du CESE figure d’ailleurs en partie dans la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution. Toutefois, la commission s’associe à la préoccupation exprimée par les auteurs de l’amendement : le Gouvernement se doit de faire un effort de précision et d’exhaustivité dans les études d’impact qu’il remet au Parlement, contribuant ainsi, à cette occasion, à revaloriser le travail du CESE.
Si cet amendement n° 21 rectifié était adopté, l’amendement n° 49 deviendrait sans objet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. J’ai le regret de le dire, le Gouvernement considère qu’une telle disposition n’est pas nécessaire, puisque la loi organique du 15 avril 2009 précitée prévoit déjà que l’étude d’impact expose avec précision les consultations données. Celles-ci doivent bien entendu faire ressortir les raisons des choix retenus par rapport aux différentes consultations prévues.
Il ne paraît pas au Gouvernement de bonne pratique de modifier, à l’occasion de l’examen de ce texte, une autre loi organique, ce qui aurait également pour inconvénient de remettre en cause la cohérence des dispositions en question.
C’est la raison pour laquelle d’ailleurs l’Assemblée nationale a repoussé un amendement comparable. Je ne peux donc qu’émettre un avis défavorable.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 2, et l’amendement n° 49 n'a plus d'objet.
Article 3
(Non modifié)
L’article 3 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « du Gouvernement », sont insérés les mots : « et du Parlement » et les mots : « de nature à favoriser la réalisation des objectifs définis à l’article 1er de la présente ordonnance » sont remplacés par le mot : « nécessaires » ;
2° Le second alinéa est ainsi rédigé :
« Il contribue à l’évaluation des politiques publiques à caractère économique, social ou environnemental. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 3
M. le président. L'amendement n° 48, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 3, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 4 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 4. - Chaque semestre, le Premier ministre rend public un rapport relatif aux suites données aux avis du Conseil économique, social et environnemental. Il explicite le contenu de ce rapport devant le Conseil économique, social et environnemental réuni en assemblée. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Nous voulions, par cet amendement, renforcer la publicité de l'action du CESE. Sans doute le rythme semestriel que nous avons prévu est-il quelque peu excessif. Cependant, il semble tout à fait nécessaire que soient analysés et rendu publics les rapports relatifs aux travaux du CESE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Comme Mme Mathon-Poinat le laisse prévoir, l’avis de la commission est défavorable.
Il serait en effet déraisonnable d’imposer au Premier ministre l’élaboration, chaque semestre, d’un tel rapport.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Madame Mathon-Poinat, cet amendement est satisfait par l’article 4 de l’ordonnance du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social. Par conséquent, il ne paraît pas indispensable d’introduire dans le présent texte les dispositions qu’il prévoit.
Par ailleurs, je veux rappeler que le Premier ministre fait connaître chaque année la suite donnée aux avis du Conseil économique, social et environnemental. Lorsqu’il s’est rendu le 9 février dernier devant le CESE, il a rappelé l’attention qu’il accorde à tout le travail produit par cette assemblée.
Enfin, Mme Mathon-Poinat l’a admis elle-même, un rythme semestriel serait trop intense.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 48.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 4
Après l’article 4 de la même ordonnance, il est inséré un article 4-1 ainsi rédigé :
« Art. 4-1. – Le Conseil économique, social et environnemental peut être saisi par voie de pétition de toute question à caractère économique, social ou environnemental.
« La pétition est rédigée en français et établie par écrit. Elle est présentée dans les mêmes termes par au moins 500 000 personnes majeures, de nationalité française ou résidant régulièrement en France. Elle indique le nom, le prénom et l’adresse de chaque pétitionnaire et est signée par lui.
« La pétition est adressée par un mandataire unique au Président du Conseil économique, social et environnemental. Le bureau statue sur sa recevabilité au regard des conditions fixées au présent article et informe le mandataire de sa décision. Dans un délai d’un an, le Conseil se prononce par un avis en assemblée plénière sur les questions soulevées par les pétitions recevables et sur les suites qu’il propose d’y donner.
« L’avis est adressé au Premier ministre, au Président de l’Assemblée nationale, au Président du Sénat et au mandataire de la pétition. Il est publié au Journal officiel. » – (Adopté.)
Article 5
L’article 6 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° A La première phrase du premier alinéa est complétée par les mots : «, les commissions temporaires et les délégations » ;
1° La seconde phrase du premier alinéa est ainsi rédigée :
« Les sections, les commissions temporaires et les délégations sont saisies par le bureau du Conseil de sa propre initiative ou, si le Conseil est consulté par le Gouvernement, à la demande du Premier ministre ou, si le Conseil est consulté par une assemblée parlementaire, à celle du président de l’assemblée concernée. » ;
1° bis (nouveau) Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, lorsque le Conseil est consulté en urgence par le Gouvernement ou par une assemblée parlementaire, la section compétente peut émettre un projet d’avis dans un délai de trois semaines. Ce projet devient l’avis du Conseil économique, social et environnemental au terme d’un délai de trois jours suivant sa publication, sauf si le président du Conseil économique, social et environnemental ou au moins dix de ses membres demandent, dans ce délai, qu’il soit examiné par l’assemblée plénière. » ;
2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les études sont transmises par le bureau du Conseil, selon le cas, au Gouvernement ou au président de l’assemblée concernée. »
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
Les études sont transmises par le bureau du Conseil au Gouvernement, au président de l'Assemblée nationale et au président du Sénat.
La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Il s'agit d'aller jusqu'au bout de la réforme du Conseil économique, social et environnemental, en plaçant cette institution à équidistance de l’exécutif et du Parlement.
En conséquence, les études réalisées par le CESE doivent systématiquement être transmises aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat, quelle que soit l'origine de la saisine et quelle que soit la formation, et ce même en cas d'urgence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que les études du CESE sont transmises au Gouvernement et aux présidents des assemblées, quelle que soit l’origine de la demande initiale.
La publication des études du CESE est actuellement soumise à l’autorisation préalable de son bureau. Dès lors, il paraît souhaitable que les trois autorités susceptibles de saisir le CESE soient systématiquement destinataires de ses études, quelle que soit l’autorité à l’origine de la saisine.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Le Gouvernement considère que cet amendement se situe dans le droit-fil de la révision constitutionnelle.
Monsieur Sutour, je vous annonce la bonne nouvelle : le Gouvernement est favorable à cet amendement ! (Sourires.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 6
L’article 7 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 7. – I. – Le Conseil économique, social et environnemental comprend :
« 1° Cent quarante membres au titre de la vie économique et du dialogue social, répartis ainsi qu’il suit :
« – soixante-neuf représentants des salariés ;
« – vingt-sept représentants des entreprises privées industrielles, commerciales et de services ;
« – vingt représentants des exploitants et des activités agricoles ;
« – dix représentants des artisans ;
« – quatre représentants des professions libérales ;
« – dix personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique, dont trois personnalités issues des entreprises publiques ;
« 2° Soixante membres au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative, répartis ainsi qu’il suit :
« – huit représentants de l’économie mutualiste, coopérative et solidaire non agricole ;
« – quatre représentants de la mutualité et des coopératives agricoles de production et de transformation ;
« – dix représentants des associations familiales ;
« – huit représentants de la vie associative et des fondations ;
« – onze représentants des activités économiques et sociales des départements et régions d’outre-mer, des collectivités d’outre-mer et de la Nouvelle-Calédonie ;
« – quatre représentants des jeunes et des étudiants ;
« – quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine social, culturel, sportif ou scientifique ou de leur action en faveur des personnes handicapées ou des retraités ;
« 3° Trente-trois membres au titre de la protection de la nature et de l’environnement, répartis ainsi qu’il suit :
« – dix-huit représentants des associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de la nature et de l’environnement ;
« – quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence en matière d’environnement et de développement durable, dont au moins trois dirigeants des entreprises exerçant une action significative dans ces matières.
« II. – Les membres représentant les salariés, les entreprises, les artisans, les professions libérales et les exploitants agricoles sont désignés, pour chaque catégorie, par les organisations professionnelles les plus représentatives.
« Dans tous les cas où une organisation est appelée à désigner plus d’un membre du Conseil économique, social et environnemental, elle procède à ces désignations de telle sorte que l’écart entre le nombre des hommes désignés, d’une part, et des femmes désignées, d’autre part, ne soit pas supérieur à un. La même règle s’applique à la désignation des personnalités qualifiées.
« Un décret en Conseil d’État précise la répartition et les conditions de désignation des membres du Conseil économique, social et environnemental. »
M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 16, présenté par M. J. Boyer, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 5
Remplacer le mot :
Vingt-sept
par le mot :
Trente-sept
II. - Alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 43, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 6
Remplacer le mot :
vingt
par le mot :
vingt-cinq
II. - En conséquence, alinéa 8
Remplacer le mot :
quatre
par le mot :
trois
III. - En conséquence, alinéa 9
Supprimer cet alinéa.
IV. - En conséquence, alinéa 12
Remplacer le mot :
quatre
par le mot :
dix
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Alors que le Sénat examinera dans deux semaines le projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, que le Président de la République ne cesse de faire des déclarations soulignant à juste titre l’importance économique et sociale de ce secteur, la réforme de la composition du Conseil économique, social et environnemental envoie au contraire un signal négatif en direction du monde agricole.
En effet, la représentation des exploitants agricoles perd cinq membres. En outre, il ne reste plus que quatre représentants de la mutualité et des coopératives agricoles de production et de transformation, contre dix auparavant. Ce sont au total onze sièges en moins pour le monde agricole, dont on connaît pourtant les difficultés extrêmes qu’il rencontre depuis quelques années.
Cette adaptation pourrait se comprendre au regard des évolutions économiques si l’activité agricole ne constituait pas l’un des pôles, certes en crise, mais essentiel de l’économie française.
Par ailleurs, son rôle en matière environnementale n’est pas négligeable. Je pense notamment à la montée des productions bio, au développement des circuits courts et à l’attachement de nos concitoyens aux productions locales.
Le projet de loi organique risque de sanctionner les petits syndicats comme le MODEF, le mouvement de défense des exploitants familiaux, défenseur d’une agriculture à taille humaine. Nous le savons, l’implication et la sensibilité de son représentant actuel ont enrichi les travaux du Conseil. Nous espérons donc que la composition qui est proposée sera modifiée.
M. le président. L'amendement n° 45, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Rédiger ainsi cet alinéa :
« - dix représentants des entreprises publiques ;
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Nous nous opposons à la suppression, au sein du CESE, des représentants des entreprises publiques, alors même que ce secteur, aujourd’hui en crise, joue un rôle primordial dans notre économie.
Nous ne pouvons nous satisfaire de la faible représentation d’un secteur attaqué de toutes parts. Supprimer les représentants des entreprises publiques au sein du CESE est une mesure pour le moins dogmatique, le Gouvernement voulant faire disparaître des débats les questions relatives au service public.
Nous demandons que le groupe des dix représentants des entreprises publiques soit rétabli, en lieu et place des dix personnalités choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique, dont la légitimité et l’utilité dans des débats n’est pas aussi manifeste.
M. le président. L'amendement n° 7 rectifié, présenté par MM. Cointat, Frassa et Guerry et Mme Kammermann, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - un représentant des Français établis hors de France ;
II. - Alinéa 9
Remplacer le nombre :
dix
par le nombre :
neuf
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Je souhaite faire plusieurs constats.
Tout d’abord, tout grand pays souhaitant assurer sa place sur notre planète a besoin de ressortissants expatriés pour démultiplier son rayonnement, qu’il soit économique, social, culturel et même politique. Cet aspect est absolument essentiel.
Ainsi, les efforts que fait la France en faveur de ses expatriés ne sont pas gratuits. Ils renforcent la France elle-même, laquelle a besoin de s’appuyer sur les Français vivant au-delà des frontières.
Vous le savez tous, mes chers collègues, la France, depuis sa création, tout au long de son histoire, a été une terre d’immigration, et jamais d’émigration. Autrement dit, si notre pays ne prenait pas de mesures pour permettre l’expatriation de certains de ses ressortissants, ceux-ci resteraient sur place.
Par ailleurs – ce sera mon deuxième constat –, le Conseil économique et social s’est aperçu qu’il avait besoin de s’ouvrir sur le monde. C’est la raison pour laquelle, en 1984, le gouvernement de l’époque a décidé d’introduire dans sa composition deux Français établis hors de France. En effet, qui connaît mieux le monde que les Français qui y vivent, les Français établis hors de France ? Ces derniers ont donc apporté la lumière de l’extérieur au sein du Conseil économique et social.
J’en viens à mon troisième constat. Supprimer cette représentation au sein du Conseil économique, social et environnemental, revient à fermer notre fenêtre sur le monde. Une telle décision possède une haute valeur symbolique.
Certes, je le sais bien, les équilibres sont difficiles, chacun voulant défendre son pré carré. Toutefois, pour ce qui concerne la représentation des Français établis hors de France, la décision relève du symbole. La France veut-elle cesser de regarder son nombril, pour s’intéresser à ce qui se passe ailleurs, surtout dans un lieu qui rassemble les forces vives de la nation ? C’est essentiel ! C’est une question d’efficacité !
Malheureusement, trop souvent, nous avons tendance à penser que ce que l’on voit à Paris, c’est ce qui se passe dans le reste du monde. C’est faux, je peux vous parler d’expérience. On voit les choses d’une manière bien différente quand on vit au-delà des frontières, à tel point que vous pouvez difficilement l’imaginer. Mais essayez de faire un effort pour comprendre que ce que je viens de dire est essentiel. Un tel discernement fait parfois cruellement défaut à notre pays, qui commet des erreurs parce qu’il croit que tout le monde pense comme lui !
Il serait donc contraire à l’intérêt de la France de fermer cette fenêtre sur le monde, sur l’ensemble de nos partenaires, surtout en matière économique.
Je partais du principe, monsieur le ministre, que la réforme du Conseil économique, social et environnemental visait à lui donner une plus grande efficacité. Ce ne pourra être le cas que si la dimension internationale est vraiment prise en compte.
Telles sont les raisons pour lesquelles cet amendement a été déposé. Toutefois, préférant me rallier à l’amendement n° 1 rectifié ter de Christophe-André Frassa, qui me paraît mieux répondre à la notion d’ouverture sur le monde que je viens de développer, je vais retirer le nôtre.
Pour conclure, je voudrais tout de même rappeler ce que disait hier mon président de groupe, au cours d’une réunion très importante qui se situait en d’autres lieux : « Il nous faut comprendre le monde et en tirer les leçons pour que la France y trouve son intérêt. »
Mes chers collègues, c’est précisément ce à quoi je vous invite.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié est retiré.
L'amendement n° 1 rectifié ter, présenté par M. Frassa, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cointat, Duvernois et Fleming, Mmes G. Gautier et Giudicelli, MM. Grignon, Guerry, Houel et Houpert, Mme Kammermann, MM. Laufoaulu, Le Grand et Milon, Mme Panis, MM. Pierre et Revet, Mmes Rozier et Bout, M. Doublet, Mme Henneron et M. Laurent, est ainsi libellé :
Alinéa 9
I. - Remplacer le mot :
trois
par le mot :
deux
II. - Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi qu'une personnalité représentant les activités économiques françaises à l'étranger
La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Christophe-André Frassa. Sans revenir sur les propos que j’ai tenus lors de la discussion générale, je soulignerai simplement que la présence française dans le monde est devenue une question centrale à l'heure de la mondialisation. L'avenir économique de notre pays se joue aujourd'hui sur la scène internationale, et les Français de l'étranger, pour y vivre quotidiennement, la connaissent mieux que quiconque. Ils contribuent en cela largement au rayonnement international de la France.
Dès lors, supprimer la représentation des Français de l’étranger au sein du futur CESE serait une faute ; cela reviendrait ni plus ni moins à ignorer le fait qu’un Français sur quatre vit aujourd’hui du commerce extérieur.
Dans la rédaction telle qu’elle nous est soumise, le texte prévoit que le CESE comprend notamment trois personnalités issues des entreprises publiques, lesquelles représentent 800 000 salariés. Pour notre part, nous considérons qu’il serait judicieux de substituer à l’une de ces trois personnalités un représentant des activités économiques françaises à l’étranger, lesquelles, je le répète, font vivre un Français sur quatre. (M. Christian Cointat et Mme Christiane Kammermann applaudissent.)
M. le président. L'amendement n° 4 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam et MM. Cointat, Cantegrit et Ferrand, est ainsi libellé :
Alinéa 9
I. - Remplacer le mot :
trois
par le mot :
deux
II. - Compléter cet alinéa par les mots :
et une personnalité issue des milieux économiques français à l'étranger
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Monsieur le ministre, vous avez raison de dire que les Français établis hors de France sont pugnaces et opiniâtres, et nous savons bien que notre souhait de voir maintenue leur représentation au sein du Conseil économique, social et environnemental a pu parfois un peu vous agacer.
M. Christian Cointat. Mais non ! (Sourires.)
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. En vérité, il s’agit pour nous d’une question extrêmement importante.
Si j’ai décidé de ne pas intervenir dans la discussion générale et de laisser d’autres de nos collègues s’exprimer, c’était pour ne pas avoir à répéter ce que j’ai dit et écrit à maintes reprises ces derniers mois.
La commission des lois, par la voix de son président et de son rapporteur, que je remercie, nous a suggéré, hier, la solution consistant à substituer à l’un des trois sièges réservés aux personnalités issues des entreprises publiques un siège qui serait réservé à un représentant des intérêts économiques français à l’étranger. Mes collègues Christophe-André Frassa, Robert del Picchia et moi-même nous sommes ralliés à cette proposition et avons d’ailleurs modifié nos amendements respectifs en ce sens ; ces amendements ainsi rectifiés, dont les termes sont quasi identiques, ont été déposés hier.
J’ai appris que le mien n’avait pu, pour des raisons qui m’échappent, et que je regrette, être examiné ce matin en commission. Peut-être lui est-il parvenu un peu tardivement.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. En effet.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. La formulation que je propose me semble respecter davantage ce que sont réellement les enjeux de la présence de Français hors de France, sans pour autant véritablement modifier le fond du texte.
Robert del Picchia, qui a été le premier à déposer un amendement dans le sens voulu par la commission, demande d’inclure, parmi les membres du futur CESE, « une personnalité choisie pour représenter les activités économiques de la France à l’étranger ».
Christophe-André Frassa a, lui, proposé « une personnalité représentant les activités économiques de la France à l’étranger », puis a modifié, à la demande de la commission, la dernière partie de la phrase, faisant désormais référence aux « activités économiques françaises à l’étranger ».
Quant à moi, mes chers collègues, je vous propose l’expression « une personnalité issue des milieux économiques français à l’étranger ». Cette formulation me semble en effet susceptible de mieux assurer la représentation des acteurs économiques français effectivement présents à l’étranger, tandis que les formules proposées par Robert del Picchia et Christophe-André Frassa pourraient aussi bien viser un dirigeant d’une entreprise exportatrice française qui n’aurait jamais vécu à l’étranger, qui n’aurait jamais pu prendre la mesure concrète l’importance des réalités économiques hors de nos frontières.
Comme l’a souligné notre collègue Christian Cointat, ces expériences-là, ce regard-là sont, aujourd’hui, extrêmement importants dans l’environnement mondialisé que nous connaissons.
M. le président. L'amendement n° 14 rectifié, présenté par M. del Picchia, est ainsi libellé :
Alinéa 9
I. - Remplacer le mot :
trois
par le mot :
deux
II. - Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi qu'une personnalité choisie pour représenter les activités économiques de la France à l'étranger ;
La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Je serai bref, car nos collègues sont désormais abreuvés d’informations sur le sujet et connaissent tous les arguments qui justifient la présence au sein du CESE d’un représentant des activités économiques françaises à l’étranger. Je dirai simplement que je fais miens les propos de Christian Cointat, de Christophe-André Frassa et de Joëlle Garriaud-Maylam.
Mon amendement étant pratiquement identique à l’amendement n° 1 rectifié ter, sur lequel j’ai cru comprendre que la commission avait émis un avis favorable, je le retire et appelle nos collègues à voter unanimement celui de Christophe-André Frassa.
M. le président. L'amendement n° 14 rectifié est retiré.
L'amendement n° 23, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Remplacer le mot :
dix
par le mot :
neuf
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement vise à réduire de dix à neuf le nombre de personnalités qualifiées dans le domaine économique, afin de permettre, ainsi que nous le proposerons dans l’amendement n° 30, que le Président de la République, le président du Sénat et le président de l’Assemblée nationale désignent chacun un tiers de celles-ci.
Dans le cadre des relations de confiance qui lient le Parlement et le CESE, une telle participation des présidents des deux chambres serait de nature à renforcer ces liens entre les trois institutions.
De plus, la possibilité pour le président du Sénat et pour celui de l’Assemblée nationale de nommer chacun un tiers de ces personnalités contribuerait à accroître la légitimité et la crédibilité du CESE. D’ailleurs, une loi de 1936 qui n’a pas connu une grande postérité le prévoyait déjà.
Enfin, on peut imaginer qu’une telle architecture permettrait sans doute de mieux garantir l’expression de la pluralité et de la diversité.
M. le président. L'amendement n° 44, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 9
Remplacer le mot :
dix
par le mot :
neuf
II. - En conséquence, après l'alinéa 13
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - un représentant du logement ;
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Les équilibres nouveaux créés au sein du CESE par ce projet de loi organique nous semblent quelque peu étranges. La suppression pure et simple de tout représentant du secteur du logement a suscité bien des remous à l’Assemblée nationale. Certes, l’environnement est un sujet majeur, mais on ne peut accepter que d’autres thèmes également importants s’y dissolvent complètement.
C’est pourquoi, afin de prendre pleinement en considération la question du logement, nous proposons de rétablir un poste de représentant de ce secteur.
M. le président. L'amendement n° 51, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Après les mots :
dans le domaine économique, dont
insérer les mots :
sept personnalités issues des entreprises privées et
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 34 rectifié bis, présenté par M. Gaillard et Mmes Dini, Morin-Desailly et Payet, est ainsi libellé :
Alinéa 9
Compléter cet alinéa par les mots :
et au moins une personnalité représentant les particuliers employeurs
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Le recours aux emplois familiaux concerne aujourd’hui plus de 13 % des ménages français et connaît une croissance ininterrompue depuis une quinzaine d’années.
En 2009, malgré le contexte économique difficile, ce sont 31 000 emplois qui ont été créés par les particuliers employeurs, soit 91 % des nouveaux emplois du champ des services à la personne.
Ce secteur est donc aujourd’hui l’un des premiers pourvoyeurs d’emplois en France. En outre, ces citoyens, employeurs et responsables, participent au maintien d’un lien de solidarité et de proximité.
Il apparaît donc essentiel de valoriser ce modèle d’emploi et d’employeur singulier qui, au-delà du gisement de richesses et d’emplois considérables qu’il recèle, ne s’inscrit pas dans une relation de profit, mais apporte une réponse aux besoins fondamentaux des citoyens qui recherchent de nouveaux équilibres de vie.
Si le particulier employeur a été reconnu comme un « acteur économique et social à part entière » par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, il s’agit aujourd’hui de donner plus de visibilité à 5 millions de citoyens employeurs et salariés en attente de reconnaissance pour accompagner les enjeux sociétaux qu’affronte la France.
Le présent amendement a donc pour objet de permettre une légitime représentation des particuliers employeurs et des services à la personne dans la nouvelle organisation du Conseil économique, social et environnemental, au regard du poids économique et social de ce secteur. La représentation se traduirait ainsi par un poste en tant que personnalité qualifiée au titre de la vie économique et du dialogue social au sein du Conseil.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. L’amendement n° 43 vise à revenir sur la réduction du nombre de représentants des exploitants agricoles, réduction qui résulte de l’évolution de la structure des activités économiques du pays. Il paraît donc indispensable d’actualiser la composition du CESE dans les conditions prévues par le projet de loi organique. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 45, je rappelle que la commission a traité la question de la représentation des entreprises publiques en prévoyant le fléchage de trois personnalités qualifiées du domaine économique. Là encore, l’avis est donc défavorable.
La rédaction de l’amendement n° 1 rectifié ter, qui fait partie d’une série d’amendements tendant à rétablir une représentation des Français établis hors de France au sein du CESE, résulte d’une suggestion de la commission et a fait l’objet d’un consensus ; la commission y est évidemment favorable.
L’adoption de cet amendement rendrait sans objet l’amendement n° 4 rectifié bis de Mme Garriaud-Maylam, qui, comme les amendements nos 7 rectifié et 14 rectifié, que leurs auteurs ont d’ores et déjà retirés, intégrait les arguments avancés ce matin en commission.
La commission est défavorable à l’amendement n° 23, car elle a retenu un amendement prévoyant la désignation des personnalités qualifiées après avis du président de chacune des assemblées.
Elle est également défavorable à l’amendement n° 44, car la question de la représentation du logement social sera traitée ultérieurement, lors de l’examen de l’amendement n° 11, de Jean-René Lecerf.
La précision proposée dans l’amendement n° 34 rectifié bis est excessive et conduirait in fine le législateur organique à faire la liste de tous les types d’employeur devant être représentés au sein du CESE. En outre, il sera loisible au Gouvernement de désigner un ou plusieurs représentants des particuliers employeurs. Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 43, pour des raisons de fond que j’ai explicitées à plusieurs reprises.
Même si le nombre des représentants des exploitants agricoles a été réduit, il reste cependant fixé à un niveau qui témoigne de l’importance économique et sociale du secteur agricole puisque celui-ci conservera 22 % des sièges dévolus aux représentants des entreprises, ce qui est tout de même significatif.
Par cohérence avec la position qu’il a défendue en commission, le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’amendement n° 45 et se range au texte issu de la commission.
Concernant l’amendement n° 1 rectifié ter, défendu par M. Frassa, je dois dire que la solution envisagée pour permettre la désignation d’une personnalité qualifiée représentant les activités économiques françaises à l’étranger serait à l’évidence de nature à répondre à la préoccupation exprimée avec beaucoup de talent tant par lui-même que par plusieurs de ses collègues représentant les Français de l’étranger, sans pour autant remettre en cause l’équilibre global voulu par le Gouvernement.
Tout à l’heure, à la tribune, j’indiquais qu’il suffisait de retirer une seule pièce pour fragiliser à l’excès l’ensemble de l’édifice. C’est dans un souci de cohérence avec ce raisonnement que je m’en remets, sur l’amendement de M. Frassa à la sagesse du Sénat.
En ce qui concerne l’amendement n° 4 rectifié bis, je n’ai pas bien compris si Mme Garriaud-Maylam le maintenait ou le retirait, mais, en tout état de cause, je pense qu’il serait satisfait par l’amendement n° 1 rectifié ter.
Mme Joëlle Garriaud-Maylam. Je le retire !
M. le président. L’amendement n° 4 rectifié bis est retiré.
Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre. Sur l’amendement n° 23, présenté par M. Yung, je ne peux en cet instant qu’émettre un avis défavorable, à l’instar de la commission. Mais nous aurons peut-être l’occasion de débattre de nouveau des questions qu’il soulève.
S’agissant de l’amendement n° 44, je veux rassurer Mme Mathon-Poinat : fort heureusement, le logement ne disparaît pas dans la nouvelle composition du Conseil économique, social et environnemental. Tout d’abord, ce dernier conservera un représentant des sociétés HLM dans le contingent des coopératives non agricoles. J’ajoute que, comme la commission, le Gouvernement émettra un avis favorable sur l’amendement n° 11. En conséquence, madame Mathon-Poinat, peut-être accepterez-vous de retirer votre amendement.
Madame Payet, le Gouvernement souhaite que le contingent des personnalités qualifiées dans le domaine économique ne soit pas totalement figé, afin de conserver une certaine souplesse. Les intérêts des particuliers employeurs sont actuellement défendus par le groupe des entreprises privées, ce qui n’a, semble-t-il, pas posé de problèmes spécifiques jusqu’à présent. Je me permets donc de vous inviter à retirer l’amendement n° 34 rectifié bis. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour explication de vote sur l'amendement n° 1 rectifié ter.
M. Richard Yung. D’une certaine manière, cet amendement marque déjà un repli puisque le Conseil économique et social comprenait jusqu’à présent deux représentants des Français de l’étranger.
Je constate néanmoins qu’il est soutenu avec enthousiasme par le Gouvernement, ce qui n’est pas négligeable. Je défendrai certes ultérieurement un amendement plus ambitieux, mais je tiens à m’associer à cet excellent amendement de M. Frassa, tout en regrettant que le siège vienne amputer le nombre de ceux qui sont dévolus aux entreprises publiques, dont la représentation paraît avoir le destin d’une peau de chagrin.
J’ai cru toutefois comprendre que cet amendement avait de grandes chances d’être adopté ; ce serait une bonne chose pour nous tous.
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, pour explication de vote.
M. Robert del Picchia. Votre avis de sagesse est logique, monsieur le ministre.
Je m’attendais également à une intervention de la teneur de celle de M. Yung. Cet amendement constitue sans doute un minimum, mais il a le mérite d’exister : à défaut, il n’y aurait rien pour garantir la représentation de nos activités économiques à l’étranger. En outre, si sa rédaction laisse le soin au Premier ministre de désigner la personnalité de son choix, rien n’empêchera l’Assemblée des Français de l’étranger de lui suggérer le nom d’une personnalité.
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour, pour explication de vote.
M. Simon Sutour. J’aurais pu souligner l’aspect positif de cet amendement, qui vise à faire siéger au CESE une personnalité représentant les activités économiques de la France à l’étranger, mais j’exprimerai plutôt un regret.
Nous avions obtenu, par un vote unanime de la commission des lois, que, sur les dix personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine économique, trois soient issues des entreprises publiques.
Comme l’a indiqué notre collègue Richard Yung, nous trouvons très positive la démarche de M. Frassa, qui est un peu la vedette de ce débat. (Sourires.) Néanmoins, ne pourrions-nous pas, si M. Frassa et M. le rapporteur en étaient d’accord – et je ne doute pas que, dans ce cas, le Gouvernement y serait également favorable –, supprimer le I de l’amendement, et ne conserver que le II ? Ainsi, vous auriez satisfaction, monsieur Frassa, et les entreprises publiques conserveraient trois représentants, conformément au souhait unanimement exprimé en commission.
M. le président. La parole est à M. Yann Gaillard, pour explication de vote sur l’amendement n° 34 rectifié bis.
M. Yann Gaillard. Chacun le sait, l’aide à la personne est un secteur clef pour l’emploi. Je comprends néanmoins qu’il soit difficile de dégager un poste compte tenu des équilibres subtils qui président à la composition du CESE. Je conçois donc cet amendement comme une étape sur le chemin d’une évolution inéluctable, et je remercie Mme Payet de l’avoir cosigné avec moi.
Je tenais également à souligner que ce secteur commence à s’organiser ; il existe maintenant un syndicat des particuliers employeurs très efficace, dont j’ai d’ailleurs l’honneur d’être membre.
M. le président. L’amendement est-il maintenu ?
M. Yann Gaillard. Mme Payet l’ayant présenté, je lui laisse le soin d’en décider, monsieur le président.
Mme Anne-Marie Payet. Je le maintiens !
M. le président. L'amendement n° 10 rectifié, présenté par MM. Leroy, Poncelet, Bailly, César, B. Fournier, Gaillard, Huré et Pierre, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
et des activités agricoles
insérer les mots :
, dont un pour la forêt
La parole est à M. Bernard Fournier.
M. Bernard Fournier. Parmi les représentants du secteur agricole, le texte ne prévoit aucun représentant de la forêt. La nouvelle compétence environnementale du Conseil rend pourtant nécessaire cette représentation, l’article L. 1 du code forestier assignant à la forêt une triple fonction, économique, environnementale et sociale, en vue d'un développement durable, de sorte qu’elle a sa place dans tous les domaines d’études du CESE.
Cela se justifie par la place considérable de la forêt en France. Elle couvre 28 % du territoire métropolitain, sans compter les 8 millions d’hectares de forêt de Guyane. De surcroît, 11 000 communes et 3,6 millions de Français sont propriétaires forestiers. On peut ajouter que la forêt est un élément majeur d’une politique de protection de l’environnement et du développement durable.
Dans ces conditions, il paraît indispensable qu’un représentant de la forêt puisse participer aux débats et travaux du CESE sur tous ces sujets.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir qu’au moins un des vingt représentants des exploitants et des activités agricoles est désigné au titre de la forêt.
La forêt est, certes, un élément essentiel de notre économie et de notre environnement. Cependant, les représentants du secteur agricole n’ont pas vocation à être désignés au titre de domaines d’exploitation spécifiques, mais pour représenter l’ensemble de l’activité agricole. À cette fin, ils sont désignés par les organisations représentatives de ce secteur. Dès lors, on ne voit pas laquelle de ces organisations serait tenue de désigner un représentant du secteur forestier.
Enfin, il semble que la création du pôle environnemental permettra également au CESE de prendre pleinement en compte le rôle de la forêt dans le développement durable.
En conséquence, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Monsieur Fournier, quand on veut représenter l’activité agricole, on ne commence pas par la morceler.
Heureusement que la forêt française, qu’elle soit privée, publique ou communale, existe ! Mais, pour une place spécifique accordée à la forêt, combien de secteurs d’activité seraient laissés de côté ? Cette logique catégorielle est sans fin !
En conséquence, le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. Monsieur Fournier, l'amendement n° 10 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Fournier. Au vu des arguments développés par M. le rapporteur et M. le ministre, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 10 rectifié est retiré.
L'amendement n° 24, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Remplacer les mots :
et de la vie associative
par les mots :
, de la vie associative et de l'économie sociale et solidaire
La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Dans la mesure où l’alinéa 10 de l’article 6 prévoit la présence de soixante membres siégeant au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative, il semble logique que l’économie sociale et solidaire soit mentionnée à cet endroit.
Aujourd’hui, le secteur de l’économie sociale regroupe 800 000 entreprises employant plus de 2 millions de personnes, soit près de 8 % de la population active, ce qui n’est pas négligeable. Le secteur est pourvoyeur de milliers d’emplois et est appelé à se développer dans les prochaines années. Dans ces conditions, il est légitime qu’il soit spécifiquement représenté au CESE.
Par ailleurs, je me permets d’apporter ici une précision de vocabulaire. L’économie mutualiste et coopérative non agricole participe de l’économie sociale et solidaire. Les représentants de la mutualité et des coopératives agricoles de production et de transformation, mentionnés à l’alinéa 12, y participent également. L’alinéa 10 constitue donc bien un « intitulé chapeau » qui est ensuite décliné.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement tend à mentionner l’économie sociale et solidaire dans l’intitulé du pôle relatif à la cohésion sociale et territoriale. Ces éléments sont en fait constitutifs de la cohésion sociale, et il n’y a pas lieu de surcharger le texte. En conséquence, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Monsieur Sutour, les organisations de l’économie sociale sont représentées au sein du deuxième pôle, l’alinéa 11 de l’article 6 prévoyant notamment huit représentants de l’économie mutualiste, coopérative et solidaire non agricole. Le titre du pôle ne fait référence qu’aux objectifs généraux, la cohésion sociale et territoriale, et non aux moyens pour les atteindre, dont fait incontestablement partie l’économie sociale et solidaire.
En conséquence, l’avis est défavorable, à moins que M. Sutour ne consente à retirer cet amendement…
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 25 est présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 36 rectifié bis est présenté par Mmes Debré, Henneron et Sittler, MM. Richert et Grignon, Mmes Keller et Bout, M. Milon et Mmes Rozier, Desmarescaux et Hermange.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 11
Remplacer les mots :
, coopérative et solidaire
par les mots :
et coopérative
La parole est à M. Simon Sutour, pour présenter l’amendement n° 25.
M. Simon Sutour. Cet amendement vise à apporter une précision de vocabulaire importante.
Les expressions « économie sociale et solidaire » et « secteur mutualiste et coopératif non agricole » ne sont pas interchangeables.
Le terme « solidaire » est inadapté à cet endroit puisqu’il désigne un mode d’entreprendre inclus dans l’appellation « économie sociale et solidaire », qui concilie un modèle économique durable et un projet social privilégiant la personne par rapport au capital.
Une mutuelle est une société de personnes à but non lucratif organisant la solidarité entre ses membres et dont les fonds proviennent des cotisations des membres. Elle est régie par le code de la mutualité et son capital est détenu par les salariés de la société, ses clients ou ses consommateurs.
Le mode de fonctionnement d’une coopérative est proche de celui d’une mutuelle. C’est une société de personnes fondée sur le principe de la coopération. Elle a pour objet de servir au mieux les intérêts économiques de ses participants.
Les coopératives sont présentes dans la quasi-totalité des secteurs de l’économie française – agriculture, artisanat, crédit, distribution, habitation, pêche et transport. Elles disposent d’un cadre législatif de référence, la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.
Même si les coopératives et les mutuelles participent de l’économie sociale et solidaire, il ne faut pas confondre les deux termes. En effet, cela conduirait à réduire le nombre de membres représentant le secteur mutualiste et coopératif, ce qui serait regrettable.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Henneron, pour présenter l’amendement n° 36 rectifié bis.
Mme Françoise Henneron. Compte tenu de leur poids important dans la vie économique et sociale de notre pays, toutes les composantes de la mutualité et de la coopération non agricole, les sociétés coopératives ouvrières de production, ou SCOP, les coopératives d’HLM, les coopératives de consommateurs et les mutuelles, doivent pouvoir être représentées au sein du CESE et bénéficier à cet effet des huit sièges qui leur sont réservés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Ces deux amendements tendent à retirer la référence à l’économie solidaire. Pourtant, cette mention permet à la composition du CESE de prendre en compte les activités ayant un objectif de solidarité, comme les entreprises d’insertion, par exemple.
En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Le projet du Gouvernement a pour but de consacrer en droit la présence, déjà acquise, de l’économie solidaire. Elle concerne en effet des secteurs économiques – nouveaux, pour certains – appelés à se développer, tels que le commerce équitable ou l’insertion par l’activité économique.
Sachez, madame Henneron, que le Gouvernement veillera, dans l’élaboration du décret, à ce que les différentes composantes actuellement présentes dans ce groupe – les SCOP, les coopératives d’HLM, les coopératives de consommateurs et les mutuelles – conservent une représentation au sein du Conseil économique, social et environnemental. Cette nouvelle dénomination ne leur sera donc en aucun cas préjudiciable. C’est pourquoi je vous demande, madame la sénatrice, de bien vouloir retirer votre amendement, sur lequel je serais triste de devoir émettre un avis défavorable. (Sourires.)
M. le président. Madame Henneron, l'amendement n° 36 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Françoise Henneron. Non, devant l’engagement du Gouvernement, je le retire, monsieur le président. Je vous fais confiance, monsieur le ministre !
M. le président. L'amendement n° 36 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 25.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 13 rectifié bis, présenté par M. Vasselle, Mme Procaccia, MM. Détraigne, César, Badré, Pointereau, Pierre, Deneux et du Luart, Mme Troendle et M. Cazalet, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer les mots :
de production et de transformation
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 47, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par le mot :
laïques
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Il s’agit de réaffirmer le caractère laïque des associations familiales représentées au CESE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Le principe de laïcité étant déjà garanti par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, cette précision paraît inutile et excessive. La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Je vous rassure, madame Mathon-Poinat : le principe de laïcité est et sera évidemment respecté au sein du Conseil économique, social et environnemental.
En conséquence, nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, nous émettrons un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 26, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après les mots :
associations familiales
insérer les mots :
et de protection des consommateurs
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Nous proposons d’ajouter aux associations familiales celles qui se consacrent à la protection des consommateurs. L’importance de cette activité n’échappe à personne. Il nous semble important qu’il soit représenté en tant que tel au CESE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Les associations de consommateurs pourraient, le cas échéant, trouver des représentants au sein de la catégorie des représentants de la vie associative et des fondations. En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. La protection des consommateurs est aujourd’hui une activité à part entière. Elle ne peut pas être considérée comme une simple composante de l’action des associations familiales, même si certaines d’entre elles mènent aussi des actions en la matière.
La protection des consommateurs appelle une expertise spécifique, qui devrait trouver son expression parmi les personnalités qualifiées. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par M. Dallier.
L'amendement n° 19 rectifié est présenté par M. Braye et Mmes Henneron et Debré.
L'amendement n° 28 est présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - un représentant des organismes visés à l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation ;
II. - En conséquence, alinéa 17
Remplacer le mot :
quinze
par le mot :
quatorze
L’amendement n° 12 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Françoise Henneron, pour présenter l'amendement n° 19 rectifié.
Mme Françoise Henneron. Pour répondre à l'ambition du projet de loi de permettre au CESE d'assurer la participation des principales activités du pays à la politique économique, sociale et environnementale de la nation, il paraît nécessaire d'ouvrir la composition du Conseil à la catégorie des représentants du logement social, qui constitue un des moteurs de la cohésion sociale et territoriale, mais aussi un acteur important de la protection de l'environnement et de la lutte contre le changement climatique.
À cet effet, notre amendement tend à prévoir expressément la participation d'un représentant des organismes HLM parmi les soixante membres choisis au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative et, corrélativement, de réduire de quinze à quatorze le nombre de personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine social, culturel, sportif ou scientifique ou de leur action en faveur des personnes handicapées.
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour, pour présenter l'amendement n° 28.
M. Simon Sutour. À l’Assemblée nationale, la demande d’insertion d’un représentant du logement social a été exprimée sur l’ensemble des bancs de l’hémicycle. Quoi de plus naturel ? Ce secteur représente 4,5 millions de logements et 90 000 nouveaux logements construits chaque année.
À l’évidence, le logement social est un support essentiel de la cohésion sociale et territoriale.
Aujourd’hui, non seulement le texte ne prévoit aucun siège pour les représentants du mouvement HLM, mais il ne fait plus, non plus, référence à la question du logement. Pourtant, le Conseil national de l’habitat, le CNH, a recommandé la présence de représentants du logement. En effet, le logement, qui représente 23 % du PIB, est un enjeu économique de premier plan.
Faute de l’insertion d’une telle disposition, non seulement le logement social ne sera pas représenté au CESE, mais il ne le sera pas non plus – et cela est particulièrement préoccupant – dans les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, dont la composition est calquée sur celle de l’institution nationale.
Ajoutons que le secteur HLM a un rôle à jouer dans le domaine de la maîtrise de l’énergie et du développement des énergies renouvelables.
Malgré la contrainte que constitue le maintien d’un nombre constant de sièges, l’anomalie de l’absence de représentant du logement social peut être facilement corrigée par la suppression d’un siège au titre des personnalités qualifiées.
M. le président. L'amendement n° 11, présenté par M. Lecerf, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Remplacer les mots :
ou des retraités
par les mots :
, des retraités ou du logement social
Cet amendement n’est pas soutenu.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. La commission le reprend, monsieur le président, ou du moins en présente un libellé dans les mêmes termes.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 11 rectifié, présenté par M. Jean-Jacques Hyest, au nom de la commission des lois, dont le libellé est identique à celui de l’amendement n° 11.
La parole est à M. le président de la commission, pour le défendre.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Cet amendement assure la représentation du secteur du logement social parmi les personnalités qualifiées au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative, mais sans remettre en cause les grands équilibres de la composition du CESE.
La commission a jugé la solution imaginée par M. Lecerf préférable à celle qui est préconisée par les auteurs des amendements identiques nos 19 rectifié et 28, sur lesquels elle a émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. D’une part, monsieur Sutour, je le rappelle une nouvelle fois – cela ne semble pas encore présent dans tous les esprits –, dans la situation actuelle, le logement social ne disparaît pas du CESE : il conserve un représentant au titre des coopératives non agricoles.
D’autre part, comme je l’ai déjà dit, le Gouvernement est très sensible à la volonté, exprimée par un certain nombre de parlementaires – j’ai en effet entendu des arguments similaires à l’Assemblée nationale –, de prendre davantage en compte le logement dans la future et nouvelle composition du Conseil économique, social et environnemental.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement initialement déposé par M. Lecerf et repris par la commission, selon lequel cette représentation supplémentaire se fait au titre des personnalités qualifiées du pôle « cohésion sociale et territoriale et vie associative ».
Par voie de conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements nos 19 rectifié – à moins que Mme Henneron n’accepte de le retirer, ce dont je me réjouirais ! – et 28.
M. le président. Madame Henneron, l'amendement n° 19 rectifié est-il maintenu ?
Mme Françoise Henneron. Compte tenu des arguments présentés par M. le ministre, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 19 rectifié est retiré.
La parole est à M. Simon Sutour, pour explication de vote sur l'amendement n° 28.
M. Simon Sutour. Cet amendement garantit la présence d’un représentant du logement social, alors que l’amendement n° 11 rectifié n’apporte aucune certitude à cet égard.
Je me permets de rappeler les termes de l’alinéa 17 : « quinze personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine social, culturel, sportif ou scientifique ou de leur action en faveur des personnes handicapées ou des retraités ». Si l’amendement n° 11 rectifié est adopté, la fin de cet alinéa se lira ainsi : « …ou de leur action en faveur des handicapés, des retraités ou du logement social ».
Monsieur le ministre, pardonnez-moi, mais c’est traiter le logement social de façon un peu cavalière !
Nous insistons donc auprès de nos collègues pour qu’ils adoptent notre amendement n° 28.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Yung et Mmes Cerisier-ben Guiga et Lepage, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - trois représentants des Français établis hors de France ;
II. – Alinéa 17
Remplacer le mot :
quinze
par le mot :
douze
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Avec cet amendement, nous revenons au débat que nous avons entamé tout à l'heure. Toutefois, les dispositions que nous proposons ici vont plus loin encore. Obtiendrons-nous le soutien du Gouvernement ? Je l’ignore, mais nous tenons à défendre cette représentation des Français de l’étranger au sein du CESE.
Auparavant, les Français établis hors de France comptaient deux représentants au Conseil. L’expérience m’a montré que, quand les Français de l’étranger avaient un représentant dans un organisme, celui-ci n’était pratiquement jamais de notre bord et que, quand il y en avait deux, le pluralisme n’était guère mieux respecté. Ce constat m’a donc tout naturellement amené au chiffre trois, chiffre magique puisqu’il offre de meilleures garanties quant au pluralisme de la représentation !
Vous le savez, deux grandes associations défendent les intérêts des Français de l’étranger ; en accordant à ces derniers trois représentants, nous assurerons la représentation de la minorité.
Tel est l’objet de l’amendement n° 27 rectifié.
M. le président. L'amendement n° 8 rectifié, présenté par MM. Cointat, Frassa et Guerry et Mme Kammermann, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - un représentant des Français établis hors de France ;
II. - Alinéa 17
Remplacer le nombre :
quinze
par le nombre :
quatorze
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Nous avons bien compris que, les équilibres étant fixés, la proposition que mes collègues et moi-même formulons ici n’avait plus sa place dans ce projet de loi.
Je retire donc cet amendement, mais en faisant tout de même remarquer qu’il est dommage de nous priver de l’expérience ou de la connaissance remarquables que les Français de l’étranger ont des systèmes sociaux du monde entier.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Ils peuvent être désignés comme personnalités qualifiées !
M. le président. L'amendement n° 8 rectifié est retiré.
L'amendement n° 2 rectifié bis, présenté par M. Frassa, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cointat, Duvernois et Fleming, Mmes G. Gautier et Giudicelli, MM. Grignon, Guerry, Houel et Houpert, Mme Kammermann, MM. Laufoaulu, Le Grand et Milon, Mme Panis, MM. Pierre et Revet, Mme Bout, M. Doublet, Mme Henneron, M. Laurent et Mme Rozier, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
, dont une personnalité résidant hors de France
La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Christophe-André Frassa. Je serai aussi bref que notre collègue Christian Cointat : un tiens valant mieux que deux tu l’auras, je retire cet amendement, en espérant que le représentant des activités économiques françaises à l’étranger sera également un spécialiste des systèmes sociaux. (M. le ministre acquiesce.)
M. Robert del Picchia. Très bien !
M. le président. L'amendement n° 6 rectifié bis, présenté par Mme Garriaud-Maylam et MM. Cointat, Cantegrit et Ferrand, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
, dont une personnalité choisie en fonction de son implication dans ces domaines à l'étranger
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 6 rectifié bis est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 27 rectifié ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Très sincèrement, je pensais que, après le débat que nous avons eu tout à l’heure sur la représentation des Français de l’étranger, ces quatre amendements seraient retirés. Mon attente a été aux trois quarts comblée, mais aux trois quarts seulement…
En ce qui concerne l’amendement n° 27 rectifié, j’émettrai bien entendu un avis défavorable, sauf à me trouver en contradiction avec les arguments que j’ai développés il y a quelques instants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Même avis, monsieur le président.
Je souhaite ajouter, à l’intention de M. Cointat et de M. Frassa, que ce n’est pas parce que les Français de l’étranger sont représentés au sein du pôle économique que le pôle social ne peut comprendre, au titre des personnalités qualifiées, quelqu’un qui, justement, possède une expérience ou une connaissance des systèmes sociaux étrangers et peut en faire bénéficier notre pays.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je ne peux que vous inviter à vous montrer ardents pour valoriser les compétences que certains de nos compatriotes établis hors de France ont acquises dans ces domaines, et dont ils sont même parfois des spécialistes !
M. Christian Cointat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Christian Cointat, pour explication de vote.
M. Christian Cointat. Monsieur Yung, bien entendu, dans l’absolu, votre amendement est excellent. Toutefois, dans la situation présente, mieux vaudrait, je crois, le retirer. En effet, s’il est mis aux voix, je serai obligé de me prononcer contre, ce que je n’ai pas du tout envie de faire ! (Sourires.)
M. Richard Yung. Vous pouvez toujours vous abstenir !
M. Christian Cointat. En effet, des équilibres ont été trouvés, et d'ailleurs avec difficulté. J’aurais certes préféré qu’il y ait trois représentants des Français de l’étranger plutôt qu’un seul, mais, pour des raisons sur lesquelles je ne reviens pas, il en a été décidé autrement. Voilà pourquoi je souhaiterais que vous retiriez votre amendement.
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 27 rectifié est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 35 rectifié bis, présenté par M. Gaillard et Mmes Dini, Morin-Desailly et Payet, est ainsi libellé :
Alinéa 17
Compléter cet alinéa par les mots :
dont au moins une personnalité représentant les particuliers employeurs
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Pour les motifs d’ordre économique et social que j’ai exposés tout à l'heure, je propose que le secteur des particuliers employeurs et des services à la personne soit également représenté, à travers un poste de personnalité qualifiée au titre de la cohésion sociale et territoriale et de la vie associative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Chacun l’aura compris, cette proposition reprend quasiment à l’identique l’amendement n° 34 rectifié bis, qui a été rejeté tout à l'heure. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 46, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :
Alinéas 18, 19 et 20
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« 3° Trente-trois personnes représentants des associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de la nature et de l'environnement, et la recherche scientifique sur les questions environnementales.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. L’une des innovations majeures de ce texte est l’entrée de trente-trois nouveaux membres dans le CESE au titre de la protection de la nature et de l’environnement.
Certes, cette décision crée de nouvelles compétences et de nouvelles missions pour le Conseil, qui, désormais, aura une certaine légitimité à se prononcer sur les questions environnementales. Toutefois, le choix de rassembler ces membres au sein d’un seul et même groupe est fort discutable. L’environnement étant un sujet intrinsèquement lié à l’économie et aux processus de production, ces nouveaux membres auraient pu être associés aux groupes existants. A contrario, créer un groupe autonome risque d’avoir comme effet de déconnecter les questions environnementales des problèmes économiques et sociaux.
Quoi qu’il en soit, l’attribution de nouvelles compétences au Conseil sur ces questions est toujours bonne à prendre. Toutefois, les critères de sélection des nouveaux membres laissent augurer le pire.
En effet, le texte prévoit que dix-huit personnes seront sélectionnées au sein du milieu associatif et que quinze autres seront des « personnalités qualifiées en raison de leur compétence en matière d’environnement et de développement durable ».
Certes, l’appartenance au monde associatif n’est gage ni d’indépendance ni de compétence, mais de telles incertitudes sont toujours inévitables. En revanche, on peut être certain que le groupe des « personnalités qualifiées en raison de leur compétence en matière d’environnement et de développement durable » permettra l’entrée au Conseil de professionnels du « marketing vert », de représentants d’entreprises désirant se donner à bon compte une image écologiste, voire de lobbyistes en tout genre !
Le choix de recourir à des « personnalités qualifiées », notion vague, plutôt qu’à des représentants du monde de la recherche, par exemple, s’inscrit tout à fait dans cette perspective.
C’est pourquoi, à travers cet amendement, nous demandons que ces nouveaux membres soient remplacés par trente-trois personnes représentant des associations et fondations agissant dans le domaine de la protection de la nature et de l’environnement, ainsi que de la recherche scientifique sur les questions environnementales.
M. le président. L'amendement n° 9 rectifié, présenté par MM. Cointat, Frassa et Guerry et Mme Kammermann, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 19
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« - un représentant des Français établis hors de France ;
II. – Alinéa 20
Remplacer le nombre :
quinze
par le nombre :
quatorze
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Tout à l'heure, monsieur le ministre, vous avez reconnu que des Français de l’étranger pouvaient être choisis pour leurs compétences dans le domaine social.
Nous nous trouvons ici dans un cas de figure similaire. L’expérience en matière d’environnement peut s’acquérir à l’étranger, et un certain nombre de nos compatriotes établis hors de France se préoccupent de ces questions. J’espère, monsieur le ministre, que vous saurez vous en souvenir le moment venu.
Je retire donc cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 9 rectifié est retiré.
L'amendement n° 3 rectifié bis, présenté par M. Frassa, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cointat, Duvernois et Fleming, Mmes G. Gautier et Giudicelli, MM. Grignon, Guerry, Houel et Houpert, Mme Kammermann, MM. Laufoaulu, Le Grand et Milon, Mme Panis, MM. Pierre et Revet, Mme Bout, M. Doublet, Mme Henneron, M. Laurent et Mme Rozier, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi qu'une personnalité résidant hors de France
La parole est à M. Christophe-André Frassa.
M. Christophe-André Frassa. Un tiens valant mieux que trois tu l’auras, je retire cet amendement, monsieur le président ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 3 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 17, présenté par M. J. Boyer, est ainsi libellé :
Alinéa 20
Après le mot :
dont
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
sept représentants d'entreprises ayant l'expérience de la conduite d'entreprises dans le domaine de l'environnement et du développement durable
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 46 ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Aux termes de cet amendement, tous les représentants désignés au CESE au titre de la protection de la nature et de l’environnement devraient être issus d’associations et de fondations ou disposer d’une expertise scientifique sur les questions environnementales.
Cette disposition est contraire à la position de la commission, qui a considéré que les entreprises devaient être représentées au sein du pôle environnemental. J’émets donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Madame Mathon-Poinat, tous les scientifiques ne travaillent pas forcément au sein d’associations ou de fondations !
M. Patrice Gélard. C’est clair !
M. Henri de Raincourt, ministre. Ils peuvent parfaitement se trouver aussi dans les universités, et Dieu sait qu’ils y sont nombreux ! Il y en a même au Sénat, et de tout à fait éminents ; j’en aperçois d’ailleurs certains dans l’hémicycle en cet instant, ce dont je me réjouis.
Nous ne pouvons pas à la fois vouloir accueillir des personnes qui, dans leur domaine, possèdent une compétence particulière et leur fermer la porte en supprimant les personnalités qualifiées !
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 22
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Toutefois, afin que le Conseil économique, social et environnemental compte autant d'hommes que de femmes, la proportion de personnalités qualifiées au sein de l'un ou l'autre sexe vient corriger, le cas échéant, la disproportion, au sein de l'un ou l'autre sexe, des membres des autres catégories définies aux alinéas précédents.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Cet amendement vise à améliorer la parité au sein du CESE.
Le texte pose, bien sûr, le principe de la parité au sein de chacun des groupes ; toutefois, nous le savons, certains de ces derniers auront un nombre de membres impair et il ne sera alors pas possible d’obtenir une véritable parité.
Nous proposons, pour résoudre cette difficulté, de demander au Gouvernement de désigner des personnalités qualifiées de manière que la parité au sein du CESE soit a posteriori assurée.
À l’Assemblée nationale, le rapporteur a affirmé que, le Conseil comptant un nombre de membres impair – 233 –, l’un des sexes serait nécessairement plus représenté que l’autre. Toutefois, cet argument ne nous paraît pas décisif. Le Parlement n’est pas une chambre d’enregistrement ! Ce n’est pas parce que le nombre des membres du Conseil économique, social et environnemental est plafonné que nous ne pouvons pas, ici, améliorer le texte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement tend à prévoir que la désignation des personnalités qualifiées corrigera, le cas échéant, le déséquilibre entre les femmes et les hommes qui est apparu du fait des autres désignations.
Or il ne paraît pas souhaitable que le déséquilibre qui apparaîtrait dans les désignations relevant des organisations représentatives et des associations ait des conséquences sur les nominations incombant au pouvoir exécutif. Il s’agirait là, vous en conviendrez, monsieur Yung, d’une alchimie quelque peu complexe !
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Aujourd'hui, le Conseil économique, social et environnemental compte 22 % de femmes. Quand le projet du Gouvernement sera appliqué, cette proportion atteindra, au minimum, 48 %.
M. Richard Yung. C’est bien !
M. Henri de Raincourt, ministre. Le résultat sera presque parfait, et je crois que nous y parviendrons de façon simple.
Votre proposition, monsieur Yung, n’est certes pas dénuée d’intérêt, mais elle complique tout de même le dispositif.
Si la plupart des assemblées comptaient 48 % de personnes de sexe féminin, nous aurions déjà accompli un grand progrès…
J’en suis désolé, mais j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun un tiers des personnalités qualifiées mentionnées au I.
La parole est à M. Simon Sutour.
M. Simon Sutour. Lors des débats en commission, le rapporteur a formulé une proposition extrêmement intéressante : il a suggéré que les nominations des personnalités qualifiées soient réparties en trois tiers et désignées respectivement par le Gouvernement, par le président de l’Assemblée nationale et par le président du Sénat.
Malheureusement, pour des raisons que l’on peut imaginer, cet amendement a été retiré... Pourtant, il présentait le grand intérêt d’être à la hauteur des ambitions de la réforme constitutionnelle.
Il faut le rappeler, la réforme vise trois objectifs fondamentaux : étendre les attributions du Conseil en matière environnementale ; rapprocher le Conseil des citoyens grâce à une composition renouvelée et à la mise en place d’une saisine par voie de pétition ; renforcer, et c’est ce point qui nous intéresse particulièrement ici, les liens du Conseil avec le Parlement.
La Constitution de 1958 avait supprimé la possibilité pour le Parlement de saisir cette instance. Le présent texte la rétablit.
Certes, la pratique conduit déjà à l’audition des membres du Conseil par les commissions parlementaires, mais il faut aller plus loin. Si nous voulons véritablement rapprocher le CESE du Parlement, la meilleure façon de procéder est encore de prévoir que certains de ses membres seront désignés par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat.
Par ailleurs, dans la mesure où les personnalités qualifiées désignées par le Gouvernement sont en nombre très élevé – quarante –, le partage des nominations semble la solution la plus adéquate pour conforter la légitimité du CESE, d’autant qu’il ne s’agit pas d’une assemblée élue.
L'article 3 du projet de loi organique prévoit que le CESE pourra attirer l’attention du Parlement sur les réformes qui lui paraissent nécessaires. Les articles 5 et 10 autorisent le Parlement à demander des études et à obtenir la tenue de séances spéciales. Les articles 11 et 13 précisent que les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat sont destinataires non seulement des procès-verbaux des séances qui auront eu lieu pour répondre à une saisine du Parlement, mais aussi des avis qu’il émettra.
La nomination d’une partie des membres du Conseil économique, social et environnemental par le Parlement est donc l’aboutissement logique du resserrement des liens entre le pouvoir législatif et cette instance.
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« III. - Le président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun un tiers des personnalités qualifiées mentionnées au I.
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement est quasi identique à l'amendement n° 30. Je dirai simplement que nous souhaitons, nous aussi, que le président de chacune des chambres du Parlement puisse désigner un tiers des personnalités qualifiées.
M. le président. L'amendement n° 53, présenté par M. Vial, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 22
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les personnalités qualifiées mentionnées au I sont désignées après avis du président de l'Assemblée nationale et du président du Sénat.
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 30 et 42.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Les personnalités qualifiées sont aujourd'hui toutes désignées par le pouvoir exécutif. En effet, l'article 14 du décret n° 84-558 du 4 juillet 1984 fixant les conditions de désignation des membres du Conseil économique et social précise que « les quarante personnalités qualifiées dans le domaine économique, social, scientifique ou culturel sont désignées par décret en conseil des ministres, pris sur le rapport du Premier ministre ».
La modification proposée à travers l’amendement n° 53 vise à rééquilibrer ce mode de désignation de plus d'un sixième des membres du Conseil économique, social et environnemental. Elle s’inscrit en outre dans l'esprit de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui renforce les relations entre le Parlement et le CESE.
Ayant retenu un dispositif prévoyant l’avis des présidents des assemblées sur la nomination des personnalités qualifiées par le Gouvernement, la commission émet, par cohérence, un avis défavorable sur les amendements nos 30 et 42.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, vous ne serez pas surpris, au regard de la position que j’ai défendue au nom du Gouvernement lors des travaux préparatoires de la commission, que j’émette en séance publique un avis défavorable sur les amendements nos 30 et 42.
Je tiens à présenter une argumentation plus détaillée sur l'amendement n° 53, afin de justifier le point de vue du Gouvernement.
La possibilité nouvelle pour le Parlement de consulter le Conseil économique, social et environnemental n’implique pas, selon nous, que les présidents des assemblées soient parties prenantes de la nomination des personnalités qualifiées. Il s’agit là, à nos yeux, de deux questions distinctes.
Pour le Gouvernement – et c’est d’ailleurs à cette conclusion qu’a conduit la discussion que nous avons eue cet après-midi –, le choix des personnalités qualifiées doit avoir lieu de manière globale et cohérente si nous ne voulons pas que « ça parte dans tous les sens » et si nous souhaitons parvenir in fine à conserver un équilibre au sein de la nécessaire diversité des membres composant cette instance.
Ces désignations permettent d’offrir une représentation à tous les groupes ou sensibilités de notre société. Il s’agit, pour le Gouvernement, de désigner des personnalités qui apporteront une expertise complémentaire de celle des autres membres du CESE. Or cette cohérence ne pourra être atteinte s’il y a pluralité des autorités de nomination ou des volontés de nomination.
En outre, je l’ai souligné en commission, la gestion unitaire de la nomination des personnalités qualifiées est rendue encore plus nécessaire par l’obligation de parité qui figure dans le projet de loi organique. Si trois autorités partagent ce pouvoir ou si certaines d’entre elles peuvent émettre des avis, il sera, sinon impossible, en tout cas beaucoup plus difficile de satisfaire d’emblée à cette obligation.
Le Gouvernement considère donc que c’est bien l’État qui doit désigner les personnalités qualifiées. Ce pouvoir ne peut donc être partagé. Si c’est l’État qui nomme les personnalités qui doivent être désignées, c’est le chef de l’État qui doit être celui qui décide. Il y va de la cohésion de l’État et de son autorité.
En effet, si les avis émis par les présidents des deux assemblées sont suivis, il s’agit en réalité d’un partage des nominations, ce qui n’est pas possible. Si, au contraire, ils ne sont pas suivis, cette disposition perd de sa substance et peut être source de confusion entre le rôle de l’exécutif et celui du Parlement.
Je confirme de la manière la plus solennelle et la plus claire en séance publique ce que j’ai déclaré en commission : il est évident que, avant de procéder aux nominations, toutes les concertations nécessaires devront avoir préalablement eu lieu. C’est indispensable ! Pour m’être renseigné afin d’être en mesure de répondre à cette question tout à fait légitime, je sais que c’est ainsi que cela se passe le plus généralement, même si l’on peut toujours trouver des exceptions.
Puisque le système fonctionne bien, on prendrait un risque en le modifiant d’une manière substantielle comme cela est proposé. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande le retrait de l’amendement n° 53.
M. Nicolas About. C’est la sagesse même !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Monsieur le ministre, cela va de soi, nous attendions que vous répétiez en séance publique les précisions que vous aviez apportées en commission.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Vous aviez d’ailleurs pris l’engagement que le Gouvernement procéderait à des « consultations préalables avec les présidents des deux assemblées avant les nominations ».
Bien entendu, nous ne pouvons retirer cet amendement puisqu’il a été adopté par la commission. Du reste, il a aussi pour but de vous permettre de rappeler en séance publique que les présidents des assemblées seront consultés. Certes, il aurait été préférable que cet amendement contienne le mot « consultation » et non le mot « avis », mais peu importe : nous retenons l’idée qu’une consultation aura lieu.
M. Henri de Raincourt, ministre. J’ai parlé de concertation, mais il s’agit plus exactement de consultation, vous avez raison.
M. Jean-Jacques Hyest, président de la commission des lois. Monsieur le ministre, en conclusion, je me permettrai de vous rappeler que l’État, ce n’est pas seulement l’exécutif. N’employez pas le terme « État » quand vous faites référence au pouvoir exécutif et aux décisions qu’il prend, ce en quoi il est tout à fait dans son rôle. Le législatif fait aussi partie de l’État !
M. Christian Cointat. Absolument !
M. le président. La parole est à M. Simon Sutour, pour explication de vote sur l'amendement n° 53.
M. Simon Sutour. Nous venons d’assister à une scène savoureuse, mais je me demande si cela valait vraiment la peine. Le seul amendement intéressant, c’est celui que le rapporteur avait déposé initialement en commission et qui prévoyait une désignation des personnalités qualifiées partagée entre le Président de la République, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat.
M. Nicolas About. Ce sera pour la prochaine révision constitutionnelle !
M. Simon Sutour. Monsieur About, j’espère que vous la verrez… et moi aussi ! (Sourires.)
Monsieur le ministre, vous avez indiqué qu’il ne fallait pas que la nomination des personnalités qualifiées émane de trois autorités différentes parce que « ça partirait dans tous les sens ». Ah bon ? En d’autres termes, selon vous, lorsque le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat interviennent dans le processus de désignation, ça part dans tous les sens ? Ce serait en quelque sorte structurel ? En revanche, quand cela viendrait de bien plus haut, cela irait toujours dans le bon sens ? Je n’insiste pas…
Vous avez également évoqué la parité. Mais les présidents des assemblées sont tout autant capables que le Gouvernement de la respecter !
Je l’ai dit au cours de la discussion générale, je regrette que le rapporteur, qui avait fait preuve d’initiative et d’un certain courage en déposant en commission un amendement qui allait plus loin, l’ait retiré. L’amendement n° 53, qui le remplace, ne prévoit qu’un avis simple du président de l'Assemblée nationale et du président du Sénat. Dans la mesure où il ne s’agit pas d’un avis conforme, cet avis ne lie pas l’exécutif. Je comprends toutefois que même cet avis simple soit gênant, car il suppose qu’une liste de noms soit divulguée.
Pour l’instant, les deux assemblées sont de la même couleur politique que le pouvoir exécutif, mais il peut en être autrement à l’avenir, ce qui ne manquera pas de poser problème. (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Cette remarque est valable pour nous tous, car toutes les configurations sont possibles !
Pour toutes ces raisons, nous nous contenterons de nous abstenir sur l’amendement n° 53, qui ne nous semble pas particulièrement glorieux.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai quelque scrupule à intervenir à cet instant dans ce débat admirablement conduit par M. le ministre et, surtout, par M. le rapporteur et M. le président de la commission des lois.
Certes, il s’agit d’un amendement de la commission des lois, soutenu par des membres de mon groupe. Pour autant, je demande à mes collègues de la majorité de voter contre. Pourquoi ?
Le Conseil économique et social appartient à la culture politique française. Il enrichit le débat public sur des sujets de société et permet l’expression de forces économiques, sociales, culturelles, associatives et, désormais, grâce à la révision constitutionnelle, du monde passionné de l’environnement.
Le principe des personnalités qualifiées, qui a toujours été accepté sous la IVe et la Ve République, suppose cependant une vision fédératrice et une certaine harmonie.
Si nous retenions soit leur désignation par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, soit même la prise en compte de l’avis de ces derniers pour les nominations, nous risquerions de compliquer la constitution équilibrée du CESE, qui doit avoir un regard d’ensemble.
Dans ce grand pays qu’est la France, dans cette République, il est impensable que les talents ne soient pas connus et défendus par les uns et les autres. Pour autant, l’unité, la cohérence, la représentativité même du CESE impliquent qu’il y ait un responsable et un seul.
À cet instant, je suivrai donc le point de vue du Gouvernement. Il est plus rassurant pour le CESE d’être constitué, s’agissant des personnalités qualifiées, à partir d’un regard d’ensemble, qui ne dépende pas des autres assemblées ; à défaut, il y aurait un risque d’affaiblissement.
C’est la raison pour laquelle, tout en respectant le travail accompli par la commission des lois et en comprenant les motivations de l’auteur de l’amendement, je demande à mes collègues de l’UMP de bien vouloir soutenir le Gouvernement dans le refus de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. Ce que je viens d’entendre est édifiant ! Sous d’autres cieux et d’autres régimes, cela s’appelle la pensée unique. Je ne pensais pas qu’elle finirait par s’imposer dans notre pays. Au moins peut-on souhaiter que cette unicité soit aléatoire…
M. Simon Sutour. Temporaire !
M. François Fortassin. Exactement !
Mais ce qui me gêne le plus, en l’occurrence, c’est que, dans l’allégresse générale, on est en train de bafouer les droits du Parlement !
M. Nicolas About. Allons bon !
M. François Fortassin. La commission des lois, dans sa sagesse, avait considéré,…
M. Simon Sutour. Très timidement !
M. François Fortassin. … peut-être timidement, en tout cas après une longue réflexion, d’après ce qu’on m’a dit – je ne suis pas membre de la commission des lois –, qu’il convenait incontestablement de faire une place aux présidents des assemblées dans le choix des personnalités qualifiées.
C’est aussi, à nos yeux, monsieur le président du groupe UMP, l’application d’une règle républicaine, celle de l’équilibre des pouvoirs. Mais, apparemment, cette règle-là n’a plus beaucoup de poids aujourd'hui.
Puisqu’on est dans la pensée unique, allons-y gaiement ! Mais ne comptez tout de même pas que nous nous associions à votre enthousiasme !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement est le fruit de tout un cheminement de la réflexion de la commission.
Sa logique s’inscrit dans les principes et l’esprit de notre Constitution, qui établit l’équilibre entre nos institutions et dont la récente révision a redéfini le rôle que devait jouer le Conseil économique, social et environnemental, troisième chambre dans la nouvelle organisation.
S’agissant de la désignation des personnalités qualifiées, une première proposition tendait à une répartition par tiers. La commission l’a retirée pour deux raisons.
D’une part, le Gouvernement s’est engagé devant la commission des lois à procéder à une consultation préalable.
D’autre part, cela a été évoqué à plusieurs reprises, si la composition du CESE a été largement revue, en revanche, sa représentativité reste aujourd'hui un des points faibles de cette assemblée. En effet, le dispositif ne sera pas révisé avant 2013 ou 2014, quand prendra effet la loi d’août 2008 : c’est à ce moment-là que les nominations pourront être remises à plat. Afin de tenir compte de ces éléments, nous avions demandé qu’une révision ait lieu tous les dix ans, la première intervenant au bout de quatre ans.
C’est ce cheminement qui nous a conduits à revenir aujourd'hui à un avis des présidents des assemblées, que nous avons matérialisé par l’amendement n° 53, de façon à instaurer cette situation jusqu’au terme de la première révision, qui permettrait cette fois d’avoir un CESE dont la représentativité – ce n’est pas rien ! – pourrait être effectivement refondée.
Je comprends les explications que vous nous donnez, monsieur le ministre, et je prends acte de l’engagement que vous venez de prendre devant le Sénat, aux termes duquel les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat seront consultés.
M. le président. L'amendement n° 41, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 23
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le Conseil d'Etat veille à ce que la composition du Conseil respecte les principes de laïcité et de parité. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. M. le ministre trouvera sans doute que je m’entête sur les principes, mais à force d’entêtement, peut-être serai-je entendue !
Cela dit, cet amendement se justifie par son texte même.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Madame Mathon-Poinat, cet amendement est déjà satisfait puisque le Conseil d’État est d’ores et déjà compétent pour contrôler la légalité du décret de nomination et veiller au respect de l’ensemble des principes inscrits à la fois dans la Constitution et dans la loi organique. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. L'amendement n° 40, présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Toute modification ou suppression des sections existantes ne peut intervenir sans l'accord de la majorité des membres qui composent le Conseil. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Ce que nous proposons ici apparaît comme une évidence, mais nous souhaiterions que ce soit tout de même inscrit dans la loi organique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement tend à soumettre toute modification de la composition du CESE à l’accord de la majorité des membres du Conseil. Il appartient au législateur organique de fixer la composition du CESE. Le rapport décennal sur la composition du Conseil prévu par la commission sera soumis à l’avis du Conseil. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. Pardonnez-moi, madame Mathon-Poinat, mais cet amendement est critiquable sur le plan juridique. En effet, la création ou la modification des sections relevant du pouvoir réglementaire, cet amendement reviendrait à donner un droit de veto au CESE sur le décret. J’émets donc un avis défavorable et je précise que l’Assemblée nationale avait déjà rejeté un amendement identique à celui-ci.
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 7
(Non modifié)
À la première phrase de l’article 7-1 de la même ordonnance, la référence : « de l’article L.O. 139 » est remplacée par les références : « des articles L.O. 139 et L.O. 297 » et après le mot : « député », sont insérés les mots : « et celui de sénateur ». – (Adopté.)
Article 8
I. – L’article 9 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils ne peuvent accomplir plus de deux mandats consécutifs. » ;
1° bis Au second alinéa, les mots : « au cours de cette période » sont remplacés par les mots : « en cours de mandat » ;
2° Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Les membres du Conseil dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit sont remplacés pour la durée du mandat restant à courir. Si cette durée est inférieure à trois ans, il n’est pas tenu compte de ce remplacement pour l’application du deuxième alinéa.
« Les contestations auxquelles peut donner lieu la désignation des membres du Conseil économique, social et environnemental sont jugées par le Conseil d’État. »
II (non modifié). – Par dérogation au deuxième alinéa de l’article 9 de la même ordonnance dans sa rédaction résultant du I du présent article, les membres du Conseil économique, social et environnemental en fonctions à la date de promulgation de la présente loi organique peuvent être désignés pour un nouveau mandat.
M. le président. L'amendement n° 52, présenté par M. P. Dominati, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - L'article 9 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 9. - Les membres du Conseil économique et social sont désignés pour cinq ans. Ils ne peuvent accomplir plus de deux mandats consécutifs.
« Si, en cours de mandat, un membre du Conseil vient à perdre la qualité au titre de laquelle il a été désigné, qualité entendue par l'appartenance ou l'adhésion effective à l'organisation qui l'a désigné, il est déclaré démissionnaire d'office et remplacé dans des conditions fixées par décret.
« En cas de décès, de démission volontaire ou d'office ou de vacance résultant d'une tout autre cause, il est pourvu au remplacement du membre du Conseil pour la durée du mandat restant à courir. Si cette durée est inférieure à trois ans, il n'est pas tenu compte de ce remplacement pour l'application du deuxième alinéa.
« Les contestations auxquelles peut donner lieu la désignation des membres du Conseil économique, social et environnemental sont jugées par le Conseil d'État. »
II. - Par dérogation au deuxième alinéa de l'article 9 de la même ordonnance dans sa rédaction résultant du I du présent article, les membres du Conseil économique, social et environnemental en fonctions à la date de promulgation de la présente loi organique peuvent être désignés pour un nouveau mandat.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Article 8 bis A (nouveau)
L’article 10 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 10. – Au cours de la quatrième année suivant le renouvellement du Conseil économique, social et environnemental en 2010, puis tous les dix ans, le Gouvernement remet au Parlement, après avis de ce Conseil, un rapport analysant la part, dans la vie économique et sociale du pays, des activités représentées au Conseil économique, social et environnemental, ainsi que les modifications intervenues dans la définition des critères de représentativité des organisations appelées à désigner des membres du Conseil.
« Ce rapport peut formuler des propositions d’adaptation de la composition du Conseil économique, social et environnemental, afin d’y assurer une représentation juste et équilibrée des principales activités du pays.
« Il fait l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale et au Sénat, dans les conditions définies par l’article 48 de la Constitution. » – (Adopté.)
Article 8 bis
(Non modifié)
I. – Après le mot : « problèmes », la fin du premier alinéa de l’article 11 de la même ordonnance est ainsi rédigée : « de caractère économique, social ou environnemental. »
II. – Le second alinéa du même article 11 est complété par les mots : «, dont le nombre est limité à neuf ». – (Adopté.)
Article 9
(Non modifié)
Le deuxième alinéa de l’article 12 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Des personnalités associées désignées par le Gouvernement à raison de leur qualité, de leur compétence ou de leur expérience peuvent, en outre, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, être appelées à y apporter leur expertise pour une mission et une durée déterminées. Le nombre de ces personnalités associées ne peut excéder huit par section. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 31 est présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 50 est présenté par Mmes Mathon-Poinat, Borvo Cohen-Seat, Assassi et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 31.
M. Richard Yung. Il s’agit de supprimer la catégorie des « personnalités associées ».
Certes, cette disposition a été légèrement améliorée au cours des débats. Le texte prévoit maintenant que ces membres « hors catégorie » seront désignés par le Gouvernement pour une mission et une durée déterminées, ce qui limite quelque peu ses effets négatifs. En outre, ces personnalités seront désignées non plus au cas par cas, mais selon des modalités générales fixées par un décret en Conseil d’État.
Cependant, nous pensons que soixante-douze personnalités associées restent à la discrétion du Gouvernement, ce qui n’est pas une bonne chose.
Je rappelle que le rapport de M. Chertier était très clair à ce sujet. Il proposait la suppression de cette catégorie de conseillers. On y lisait notamment, à propos de la nomination à ce titre qu’elle était « sinon conçue, du moins vécue, tantôt comme un lot de consolation pour ceux qui n’ont pu obtenir un siège de conseiller ou comme marchepied pour ceux qui aspireraient à le devenir ».
Chacun en conviendra, il n’est pas très raisonnable de créer autant de personnalités associées. J’ajoute qu’une telle disposition affaiblit la crédibilité et la légitimité du CESE.
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 50.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Avec cet article, on voit apparaître des personnalités associées, dotées de qualités et de compétences encore plus floues que les personnalités qualifiées, et qui relèvent aussi, me semble-t-il, du fait du prince.
Nous demandons donc leur suppression, de manière que l’équilibre soit favorable aux organisations représentatives.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Ces deux amendements visent à supprimer les personnalités associées qui succéderont aux membres de section. Or cette suppression ne paraît pas opportune.
Certes, le système de nomination actuel n’est pas totalement satisfaisant. Pour autant, tous les membres du Conseil qui ont été auditionnés, parmi lesquels le président Jacques Dermagne, ont confirmé que les membres de section apportaient une réelle plus-value au CESE en termes d’expertise et d’expérience.
De plus, je le rappelle, le présent projet de loi permet, grâce aux apports de l’Assemblée nationale, de rendre la nomination des personnalités associées plus transparente et plus légitime. Non seulement leur nombre est plafonné à huit par section, mais surtout les conditions de leur désignation sont durcies : recours à un décret en Conseil d’État, nomination pour une mission et une durée déterminées.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31 et 50.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 9.
(L'article 9 est adopté.)
Article 9 bis
(Non modifié)
L’article 13 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Art. 13. – Des délégations permanentes et des commissions temporaires peuvent être créées au sein du Conseil pour l’étude de problèmes particuliers ou de questions dépassant le champ de compétence d’une section. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 32 est présenté par MM. Sutour, Yung et Teulade, Mmes M. André, Cartron et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 37 est présenté par Mmes Morin-Desailly, Payet et Dini.
L'amendement n° 38 est présenté par Mme Panis.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d'État fixe la liste, les compétences et la composition des délégations permanentes. »
La parole est à M. Sutour, pour présenter l’amendement n° 32.
M. Simon Sutour. Les travaux parlementaires ont déjà permis d’améliorer la prise en compte de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. C’est sur l’importance du rôle de cette dernière que je souhaiterais insister, et je me fais sur ce point le porte-parole de nos collègues Michèle André et Françoise Cartron, qui ne peuvent être parmi nous ce soir.
La délégation a connu, tout au long de 2009, une activité soutenue, qui s’est traduite par l’adoption de trois communications et une légitimité reconnue de façon incontestée au-delà du Conseil économique, social et environnemental. On peut, à titre d’illustration, citer la communication exhaustive publiée le 27 janvier 2009 et intitulée « 1968-2008, Évolution et prospective de la situation des femmes dans la société française ».
Plus encore, la collaboration entre les délégations du Sénat, de l’Assemblée nationale et du Conseil économique, social et environnemental est particulièrement remarquable. Leurs présidentes ont, par exemple, affiché des positions communes sur plusieurs sujets : la préservation des retraites des mères de famille ; les menaces que fait peser sur la parité le mode de scrutin actuellement proposé dans le projet de loi relatif à l’élection des conseillers territoriaux. Dans ces deux cas, les positions exprimées ont trouvé un large écho dans les médias, car les présidentes ont su faire valoir conjointement leur point de vue en montrant que la défense des droits des femmes pouvait transcender les clivages politiques.
L’article 9 bis du présent texte donne donc très opportunément un fondement organique aux délégations permanentes.
Le présent amendement complète ce dispositif et répare un oubli.
De façon générale, les principes d’organisation du Conseil économique, social et environnemental relevant du domaine organique renvoient pour leur application à un décret en Conseil d’État. En voici quelques exemples : selon l’article 7 de l’ordonnance du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social, un décret en Conseil d’État précise la répartition et les conditions de désignation des membres du Conseil économique et social ; l’article 11 de l’ordonnance organique du 29 décembre 1958, qui crée des sections, prévoit au titre des modalités d’application qu’un décret en Conseil d’État en fixe la liste, les compétences et la composition.
Il convient donc d’étendre aux délégations permanentes le cadre juridique prévu pour les sections par l’article 11 de l’ordonnance de 1958.
M. le président. La parole est à Mme Payet, pour défendre l’amendement n° 37.
Mme Anne-Marie Payet. En février 2000, le Conseil économique et social a décidé de créer une délégation au droit des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Il s’agissait alors d’une première dans l’histoire de cette institution, et une telle création n’était pas explicitement prévue par l’ordonnance du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social.
On a eu alors recours à un expédient juridique en lui attribuant le statut temporaire prévu par l’article 13 de cette ordonnance. Un an plus tard, le même procédé a été employé en vue de créer une délégation pour l’Union européenne.
Ces deux délégations ont travaillé de manière soutenue et ont désormais une place importante au sein du Conseil économique, social et environnemental.
Prenant acte de la pérennisation de ces deux délégations, l’article 9 bis du présent texte donne très logiquement, et je m’en félicite, un fondement organique aux délégations permanentes.
En tant que membre de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes du Sénat, il me semble nécessaire que la loi garantisse à ces délégations toute leur légitimité et assure ainsi une meilleure représentation des femmes au sein du CESE.
Nous devrions également réfléchir aux moyens d’appliquer ce dispositif au sein des conseils économiques et sociaux régionaux. En Haute-Normandie, par exemple, le CESER comprend seulement quatorze femmes pour soixante-quatorze conseillers. Il apparaît indispensable d’assurer une meilleure parité.
Cet amendement complète donc le dispositif du CESE et permet d’organiser sur une base solide la logistique de ces délégations.
Je remarque que, d’une façon générale, dans le droit en vigueur, les principes relatifs à l’organisation du Conseil relèvent de la loi organique. Cependant, pour leur application, le droit renvoie au décret en Conseil d’État. Le présent amendement prévoit donc qu’un décret en Conseil d’État fixe la liste, les compétences et la composition des délégations permanentes, comme cela est prévu pour les sections par l’article 11 de l’ordonnance du 29 décembre 1958.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Ces amendements identiques prévoient que la liste, les compétences et la composition des délégations permanentes seront fixées par un décret en Conseil d’État plutôt que par le CESE lui-même.
Bien qu’ils soient en cohérence avec les dispositions du présent texte, puisqu’ils contribuent à institutionnaliser les délégations permanentes, ces amendements vont à l’encontre de la logique de souplesse qui fonde la création de ces délégations. Celles-ci sont en effet créées, aux termes de l’article 9 bis, « pour l’étude de problèmes particuliers ou de questions dépassant le champ de compétence d’une section », c’est-à-dire pour passer outre la rigidité des sections.
L’avis de la commission est, par conséquent, défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Henri de Raincourt, ministre. D’abord, le Gouvernement reconnaît parfaitement l’excellent travail qui est accompli par ces délégations.
Ensuite, je fais remarquer qu’elles sont consacrées dans le projet de loi organique ; leur existence est donc assurée.
Enfin, la création et la composition de ces délégations relèvent du fonctionnement interne du Conseil économique, social et environnemental, et il nous semble qu’elles doivent être laissées à la libre appréciation de ce dernier.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 32 et 37.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis.
(L'article 9 bis est adopté.)
Article 10
(Non modifié)
La seconde phrase de l’article 16 de la même ordonnance est complétée par les mots : «, du Président de l’Assemblée nationale ou du Président du Sénat ». – (Adopté.)
Article 11
(Non modifié)
Le second alinéa de l’article 18 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« Les procès-verbaux de ces séances sont transmis dans un délai de cinq jours au Premier ministre si le Conseil a été saisi à son initiative, ou au Président de l’Assemblée nationale ou au Président du Sénat si le Conseil a été saisi à l’initiative de l’une ou l’autre assemblée. » – (Adopté.)
Article 12
(Non modifié)
À la première phrase de l’article 19 de la même ordonnance, après le mot : « eux », sont insérés les mots : « ainsi que les membres du Parlement » et sont ajoutés les mots : « pour les affaires qui les concernent respectivement ». – (Adopté.)
Article 13
(Non modifié)
L’article 21 de la même ordonnance est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Ils sont également adressés au Président de l’Assemblée nationale et au Président du Sénat. » – (Adopté.)
Article 14
(Non modifié)
L’article 22 de la même ordonnance est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant des indemnités des personnalités désignées en application du deuxième alinéa de l’article 12 est fixé par décret. »
M. le président. L'amendement n° 33, présenté par MM. Sutour, Yung, Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Il s’agissait d’un amendement de coordination avec une suppression qui n’a pas eu lieu. En conséquence, nous retirons cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 33 est retiré.
Je mets aux voix l'article 14.
(L'article 14 est adopté.)
Article 15
(Non modifié)
L’article 23 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est supprimé ;
2° Au début du deuxième alinéa, les mots : « Ces crédits sont gérés par le Conseil économique et social » sont remplacés par les mots : « Les crédits nécessaires au fonctionnement du Conseil économique, social et environnemental sont gérés par le Conseil ». – (Adopté.)
Article 15 bis
(Non modifié)
L’article 27 de la même ordonnance est abrogé. – (Adopté.)
Article 16
(Non modifié)
Dans toutes les dispositions organiques ou législatives, lorsqu’ils désignent l’institution mentionnée au titre XI de la Constitution, les mots : « Conseil économique et social » sont remplacés par les mots : « Conseil économique, social et environnemental ».
M. le président. L'amendement n° 54, présenté par M. Vial, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer les mots :
organiques ou
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer une mention superfétatoire : les dispositions législatives englobent les dispositions législatives organiques comme les dispositions législatives ordinaires ; la présente loi organique peut donc prescrire la substitution de dénomination dans l'ensemble des dispositions législatives.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Vote sur l'ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi organique, je donne la parole à M. Simon Sutour, pour explication de vote.
M. Simon Sutour. Le texte sur lequel nous allons être maintenant appelés à nous prononcer est largement amélioré par rapport au texte qui avait été initialement présenté par le Gouvernement. Il a été enrichi par l’Assemblée nationale, puis par le Sénat.
Je tiens à souligner que le rapporteur de la commission des lois du Sénat a, en particulier, émis des propositions extrêmement intéressantes concernant le droit de pétition.
Nous avons également apprécié le maintien des apports de l’Assemblée nationale concernant le mouvement coopératif agricole. Nous nous félicitons que les dispositions concernées n’aient pas été remises en cause, ce soir, par notre assemblée.
S’agissant des Français de l’étranger, les propositions de mon collègue Richard Yung auraient permis d’aller plus loin ; il n’a pas été suivi, mais nous avons néanmoins enregistré une petite avancée.
Toutes ces améliorations sont cependant ternies par le fait que nous n’ayons pas pu voter l’amendement qui prévoyait la nomination, par tiers, des personnalités qualifiées par le Gouvernement, le président de l’Assemblée nationale et le président du Sénat. Même l’amendement très timide qui avait été adopté en commission et qui prévoyait un simple avis des deux présidents a été rejeté par la majorité de la Haute Assemblée.
Dans ces conditions, le groupe socialiste s’abstiendra.
M. le président. La parole est à M. François Fortassin.
M. François Fortassin. La majorité des membres du groupe du RDSE s’abstiendra également, et pour les mêmes raisons que celles qu’a invoquées M. Sutour.
Les membres du groupe RDSE qui appartiennent à la commission des lois ont particulièrement apprécié le travail qui a été fourni, mais je déplore très vivement qu’on fasse en quelque sorte l’impasse sur l’avis que pourraient donner le président du Sénat et le président de l’Assemblée nationale sur la désignation des personnalités qualifiées. C’est incontestablement un mauvais coup qui est porté à notre assemblée et aux principes républicains.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Henri de Raincourt, ministre. Je me permets d’intervenir en cet instant, mais je ne voudrais pas être soupçonné de chercher à influencer le vote, qui semble au demeurant se dessiner de manière favorable.
Je souhaite avant tout remercier l’ensemble du Sénat du débat qui a eu lieu cet après-midi sur le projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental, et je me félicite du climat dans lequel le travail a été accompli.
Je remercie en particulier du fond du cœur l’ensemble des membres de la commission des lois, et au premier chef son président et son rapporteur, avec qui nous avons eu un dialogue fructueux.
Cela étant, ce n’est pas parce qu’il y a dialogue que l’on doit être d’accord sur tout. D’ailleurs, ce qui fait la richesse du débat parlementaire, c’est que l’on peut appartenir à la même famille politique et s’exprimer d’une façon différente sur des points particuliers, sans que soit pour autant remise en question une vision politique globale commune.
Dès que ce texte aura été, comme je l’espère, voté par le Sénat, la commission mixte paritaire sera appelée à se réunir, de manière qu’il soit définitivement adopté et entre en vigueur le plus rapidement possible.
Je souhaiterais dire à M. Fortassin que, quand il parle de pensée unique, je n’imagine pas une seule seconde qu’il songe à l’actuel Président de la République. Il me semble en effet que les nominations de personnalités à un certain nombre de fonctions tout à fait éminentes de la République auxquelles procède ce dernier ne sauraient correspondre à la définition de ce que l’on appelle la « pensée unique ».
De même, monsieur Fortassin, vous ne pouvez pas dire que le Gouvernement bafoue les droits du Parlement. Les faits prouvent à chaque instant que c’est totalement inexact. Aucun gouvernement, depuis 1958, n’a fait autant que celui-ci, sous l’impulsion du Président de la République, pour donner une respiration nouvelle et un peu de modernité au Parlement.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. C’est vrai !
M. Henri de Raincourt, ministre. On peut avoir voté contre la réforme de la Constitution et admettre la réalité : même si, sur certains points, nous sommes encore un peu en rodage, depuis la réforme de 2008, le Parlement ne fonctionne plus comme il fonctionnait précédemment. En particulier, les espaces réservés aux groupes d’opposition et aux groupes minoritaires permettent d’offrir aux uns et aux autres toute latitude pour s’exprimer et défendre leur point de vue.
Appartenant à ce gouvernement, je le dis avec fierté : nous avons servi une démocratie moderne, une démocratie respectueuse et, par là même, la République. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi organique
En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 195 :
Nombre de votants | 339 |
Nombre de suffrages exprimés | 185 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 83 |
Pour l’adoption | 185 |
Le Sénat a adopté.
5
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au jeudi 6 mai 2010 :
À neuf heures trente :
1. Projet de loi tendant à l’élimination des armes à sous-munitions (n° 113, 2009-2010).
Rapport de Mme Joëlle Garriaud-Maylam, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 382, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 383, 2009-2010).
2. Projet de loi relatif à la lutte contre la piraterie et à l’exercice des pouvoirs de police de l’État en mer (n° 607 rectifié, 2008-2009).
Rapport de M. André Dulait, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 369, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 370, 2009-2010).
3. Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Roumanie relatif à une coopération en vue de la protection des mineurs roumains isolés sur le territoire de la République française et à leur retour dans leur pays d’origine ainsi qu’à la lutte contre les réseaux d’exploitation concernant les mineurs (n° 500, 2007 2008).
Rapport de Mme Joëlle Garriaud-Maylam, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 315, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 316, 2009-2010).
4. Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tchèque sur l’échange de données et la coopération en matière de cotisations et de lutte contre la fraude aux prestations de sécurité sociale (n° 605, 2008-2009).
Rapport de M. Michel Boutant, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 310, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 311, 2009-2010).
5. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume de Belgique pour le développement de la coopération et de l’entraide administrative en matière de sécurité sociale (n° 273, 2009-2010).
Rapport de M. Michel Boutant, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 310, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 312, 2009-2010).
6. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République populaire de Chine sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements (n° 274, 2009-2010).
Rapport de M. Bernard Piras, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 310, 2009-2010).
Texte de la commission (n° 314, 2009-2010).
À quinze heures, le soir et, éventuellement, la nuit
7. Questions d’actualité au Gouvernement.
Délai limite d’inscription des auteurs de questions : jeudi 6 mai 2010, à onze heures.
8. Éventuellement, suite de l’ordre du jour du matin.
9. Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de finances rectificative pour 2010 (n° 424, 2009-2010).
Rapport de M. Philippe Marini, fait au nom de la commission des finances (n° 428, 2009-2010).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures vingt.)
Le Directeur adjoint
du service du compte rendu intégral,
FRANÇOISE WIART