Mme Dominique Voynet. Nous ne sommes pas loin du dialogue de sourd.
Monsieur le secrétaire d’État, vous semblez redouter qu’un phasage du projet ne retarde indéfiniment le démarrage des opérations et n’engendre des surcoûts. Or, nous le savons, les surcoûts sont inhérents à toute opération d’une telle ampleur.
Je considère pour ma part que le phasage est un moyen de sécuriser ce dossier très complexe, de s’assurer que tous les éléments sont pris compte, mais aussi d’engager le dialogue avec les parties prenantes.
Lorsqu’elle doit réaliser une opération importante, une entreprise définit un business plan, une collectivité territoriale élabore un plan pluriannuel d’investissement. Et vous voudriez nous faire croire que le secrétariat d’État chargé du développement de la région capitale peut conduire un projet aussi ambitieux que celui qui nous est proposé en se dispensant d’un travail technique de découpage en phases !
Monsieur le secrétaire d’État, il n’y a pas, d’un côté, ceux qui ont confiance en la technostructure de notre grand pays et, de l’autre côté, ceux qui en douteraient. Il y a une façon de travailler que suivent toutes les collectivités qui engagent un projet de grande ampleur, et vous semblez considérer qu’il ne sied pas en l'occurrence d’adopter une telle méthode de travail. Permettez-moi de trouver cela étrange.
Vos arguments ne nous ont pas convaincus. Il est inutile de prolonger le débat sur ce point, mais je parie que l’on sera amené à phaser l’opération avant même l’adoption définitive du projet de loi.
M. Jean Desessard. Nous sommes tous déphasés ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Caffet, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Caffet. Monsieur le secrétaire d’État, il nous arrive, de temps en temps, de sortir du périphérique, de dépasser les champs de la Seine-et-Marne, de voyager…
Mme Dominique Voynet. Même en Chine !
M. Jean-Pierre Caffet. Il nous arrive de parcourir le monde. Nous savons ce que sont les villes-monde. Nous avons lu Fernand Braudel.
Cessez donc avec ces sempiternelles…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. … ritournelles.
M. Jean-Pierre Caffet. Si j’ai bien compris les explications de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d’État, le nouveau réseau de transport se suffit à lui-même et il suffit à l’avenir de l’Île-de-France. Je ne peux qu’être inquiet lorsque j’entends qu’il ne faut surtout pas de tangentielle ou d’Arc Express. Nous reviendrons sans doute sur cette question pendant les heures et les jours qui viennent.
Par ailleurs, le phasage serait incompatible avec le bouclage du projet ! Cela revient à dire que, si l’on décidait de procéder à un phasage, l’on ne pourrait pas boucler le projet.
Une telle idée me semble absurde. Faut-il comprendre que l’on n’ouvrira pas certains tronçons du réseau à la circulation avant le bouclage définitif du projet, c’est-à-dire avant treize ans, si tant est qu’il soit achevé dans treize ans ? Il y a bien un moment, dans cinq ans, six ans ou sept ans, où l’on ouvrira un tronçon à la circulation.
M. Jean-Pierre Caffet. Faudra-t-il attendre que le réseau soit bouclé, donc définitivement achevé, avant d’en ouvrir une partie à la circulation ?
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez indiqué que vous alliez commencer par le Val-de-Marne.
M. Christian Cambon. C’est une bonne idée !
M. Jean-Pierre Caffet. C’est donc bien, me semble-t-il, que vous envisagez l’idée d’un phasage.
M. Alain Gournac. Il faut bien un point de démarrage !
M. Jean-Pierre Caffet. Certains se réjouissent que l’on commence par le Val-de-Marne et Philippe Dallier souhaitait que l’on pense aussi à la Seine-Saint-Denis.
Monsieur le secrétaire d’État, faudra-t-il attendre treize ans, c’est-à-dire le bouclage définitif du réseau, avant d’ouvrir un tronçon à la circulation ? Vous nous dites que des tunneliers seront à l’œuvre partout en même temps. Peut-être, mais on peut néanmoins se demander par quoi vous allez commencer. Vous avez indiqué que cela dépendrait des études, que celles qui ont été engagées dans le Val-de-Marne sont les plus avancées. Je souhaite que vous nous apportiez des précisions supplémentaires sur ce sujet.
Cet amendement ne vise pas à réintroduire « par la bande » le phasage prévisionnel – avec échéance en 2025 – du rapport Carrez. Cet amendement se suffit à lui-même. Il tend à ce que soit mentionné dans le schéma et donc à introduire dans le débat public les éléments de phasage de votre propre projet
M. le président. La parole est à M. Serge Lagauche, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Voilà le Val-de-Marne ! (Sourires.)
M. Serge Lagauche. Monsieur le secrétaire d’État, en défendant l’idée d’un grand projet, vous souhaitez que l’on réalise dans un même temps l’ensemble du chantier afin que les travaux soient bien dirigés.
Mais la France a déjà vécu quelques mauvaises expériences. Que l’on songe aux difficultés que nous avons rencontrées avec les centrales nucléaires !
Monsieur le secrétaire d’État, vous avez pris l’exemple de plusieurs grands pays. Mais nous savons tous qu’en Chine les populations peuvent être déplacées très rapidement : « Vous gênez : dehors ! ». Certains pays ont réalisé des travaux importants dans des délais assez rapides, mais sans toujours tenir compte des populations.
Or en Île-de-France, comme ailleurs dans l’hexagone, la population ne se laissera pas faire, et voudra être informée. Il paraît donc hasardeux de vouloir commencer un chantier sans prévenir les gens ou sans leur fournir le calendrier des travaux. Le simple fait d’ériger un mur antibruit ou d’engager quelques travaux de voirie provoque déjà un tollé.
Il vous faudra également consulter les entreprises. Vous pourrez leur fixer des échéances, mais celles-ci dépendront des conditions techniques et des moyens que les pouvoirs publics seront prêts à investir à ce moment-là.
Vous voulez réaliser la boucle d’un seul coup : pourquoi pas ? On peut essayer de relever le défi. Mais vous vous compliquez la vie en voulant démarrer le chantier simultanément dans tous les secteurs. Vous rencontrerez de grosses difficultés et le phasage s’imposera de lui-même.
Les chantiers peuvent se trouver bloqués pour de nombreuses raisons – je pense par exemple aux difficultés de percement des tunnels de l’A86. Parmi elles, l’opposition de la population figure en bonne place, et la loi ne pourra pas s’opposer à ce que l’on tienne compte de son avis.
Vous devrez donc avancer en fonction du calendrier que vous imposeront la population et les entreprises.
M. le président. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.
M. David Assouline. J’ai écouté avec attention les interventions de M. le secrétaire d’État et de M. Caffet.
Si je peux comprendre votre opposition à la présence du terme « phasage » dans la loi, monsieur le secrétaire d’État, je ne vois pas une seule seconde comment vous pouvez soutenir l’idée qu’il n’y aura pas de phasage.
D’abord, vous avez affirmé que le chantier pourrait débuter dans le Val-de-Marne. Ensuite, vous ne pouvez pas soutenir que les différentes équipes travailleront au même rythme pendant treize ans.
Je me demande s’il ne faut pas expliquer autrement vos réticences. En effet, si vous parlez de phasage dans la loi, vous serez obligé d’annoncer un calendrier. Celui-ci fera inévitablement des déçus, qui ne manqueront pas d’exprimer leur mécontentement.
Votre refus de parler de phasage ne cache-t-il pas tout simplement une certaine volonté d’opacité dans le déroulement des travaux ? Je vous pose la question, monsieur le secrétaire d’État.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Ne compliquez pas ce qui est simple, monsieur Assouline.
Essayons plutôt de nous comprendre : lorsque vous construisez une centrale nucléaire ou un paquebot, vous ne raisonnez pas en termes de phasage, mais de planning. Vous ne pouvez pas construire la moitié de votre bateau, puis vous arrêter en attendant le moment où vous serez prêt à recommencer. Soit vous renoncez à votre bateau, soit, quand vous décidez de le construire, vous devez connaître le point d’aboutissement, le coût et le délai de réalisation.
En réalité, nous nous opposons plus sur la sémantique que sur le fond.
Mme Nicole Bricq. Un métro, ce n’est pas un bateau !
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Il faut concevoir et réaliser cette double boucle d’un seul élan.
Ensuite, si j’ai parlé tout à l’heure du Val-de-Marne, c’est parce que des maires se sont organisés depuis plusieurs années autour d’Orbival pour réfléchir à ce que pourrait être un réseau de métro automatique. Ils ont donc un temps d’avance, et il se pourrait que le chantier commence en priorité dans ce département, ce qui permettrait en outre d’opérer le rééquilibrage en faveur de l’est parisien.
J’ai dit également, ce que vous semblez oublier, que le chantier démarrera avec dix tunneliers répartis en différents points. Ce n’est pas une lubie ! Six tunneliers ont ainsi participé au chantier du métro de Madrid.
Pourquoi vouloir absolument inscrire le phasage dans la loi, alors qu’il ne correspond pas à notre projet, y compris en termes financiers ? Si nous sommes incapables de réaliser en treize ans cet ouvrage, autant ne pas le commencer. Dans le cadre de ses compétences, l’État a décidé d’engager sa responsabilité dans la réalisation de cette infrastructure, qui ne constitue qu’un élément de ce que peut être le Grand Paris.
Bien évidemment, dans les transports comme dans de nombreux autres domaines, il faudra trouver des convergences avec la région. Lors de la discussion générale, j’ai évoqué la nécessité de travailler ensemble, dans le respect des compétences de chacun. Oui, je tends la main à la région, ainsi que l’AFP l’a correctement rapporté aujourd’hui, pour que nous puissions réaliser ensemble, et rapidement, cette ville-monde.
Mme Nicole Bricq. Nous verrons à l’article 3 !
M. David Assouline. Vous tendez la main, ou vous donnez un coup-de-poing ?
M. le président. L'amendement n° 211 rectifié bis, présenté par MM. Cambon, P. Dominati, Romani et C. Gautier, Mmes Dumas et Procaccia et M. Demuynck, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 8
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les infrastructures du réseau du Grand Paris intègrent des dispositifs destinés à permettre le déploiement d'un réseau numérique à très haut débit.
La parole est à M. Christian Cambon.
M. Christian Cambon. Monsieur le secrétaire d’État, votre projet de loi, dont nous partageons la philosophie, vise à faire de l’Île-de-France une métropole dynamique et attractive, qui attirera un maximum d’entreprises et d’emplois. Elle doit donc cumuler tous les atouts.
À cet égard, il nous semble important de profiter, le moment venu, de la construction de cette infrastructure de 130 kilomètres pour déployer un réseau numérique à très haut débit. On sait que la RATP maîtrise cette technique, et qu’elle l’a déjà utilisée.
Si nous voulons que ces futurs tunnels accueillent un réseau de très haut débit, qui nous permettra de nous relier aux grandes infrastructures mondiales ainsi qu’au réseau national de télécommunications pour la technologie, l’enseignement et la recherche, ou RENATER, mieux vaut le prévoir en amont. Les communes qui seront traversées en sous-sol par cette infrastructure, mais qui n’auront pas de gares, devraient également pouvoir se raccorder à ce réseau.
Le présent amendement tend à préciser que la réalisation des infrastructures du réseau de métro automatique du Grand Paris prévoira des dispositifs permettant le déploiement de ce réseau numérique à très haut débit. Ce serait un atout supplémentaire pour l’Île-de-France.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La commission avait déjà prévu la desserte du pôle de Saclay par le très haut débit. La proposition de notre collègue Christian Cambon, qui consiste à intégrer ce dispositif dans le cadre des infrastructures du réseau, est particulièrement bienvenue.
En conséquence, l’avis de la commission est très favorable. (MM. Alain Gournac et Yves Pozzo di Borgo applaudissent.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean Desessard. À quoi ressemblera le très haut débit dans treize ans ?
M. le président. L'amendement n° 73, présenté par M. Béteille, est ainsi libellé :
I. - Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
À compter de leur approbation respective, la compatibilité entre le schéma d'ensemble du réseau de transport public du Grand Paris et le plan de déplacements urbains de la région d'Île de France est assurée dans les conditions de l'article 28-4 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation sur les transports intérieurs.
II. - En conséquence, alinéa 9.
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Cet amendement technique vise à articuler le plan de déplacement urbain d’Île-de-France, le PDUIF, avec le schéma d’ensemble du réseau du Grand Paris.
L’alinéa 9 du texte de la commission a déjà vocation à régler ce problème, mais il me semble plus utile d’appliquer les articles 28-3 et 28-4 de la loi d’orientation des transports intérieurs du 30 décembre 1982, qui prévoit d’ores et déjà que le PDUIF ne peut faire obstacle à un projet d'infrastructure d'intérêt national comme le réseau de transport public du Grand Paris.
En pratique, il s’agit d’éviter un certain nombre d’écueils. Ainsi, le schéma d'ensemble du réseau du Grand Paris ne saurait être astreint à respecter des règles de compatibilité avec le PDUIF du 15 décembre 2000, lui-même élaboré en cohérence avec le SDRIF de 1994. De même, le nouveau PDUIF en cours d'élaboration, que l’on attend avec impatience, ne saurait omettre le projet de réseau de transport public du Grand Paris.
Nous souhaitons, à travers cet amendement, assurer la compatibilité des différents documents dans les meilleures conditions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La précision apportée par l’amendement de M. Béteille permet de clarifier la relation entre le schéma d’ensemble du réseau de transport public du Grand Paris et le plan de déplacement urbain. Elle s’inscrit donc parfaitement dans le sens de nos travaux.
Dans la mesure où ce schéma d’ensemble est déclaré d’intérêt national, c’est lui qui prime. Ainsi, c’est sur lui que se fonde le plan de déplacement urbain, et non l’inverse.
En conséquence, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote.
Mme Dominique Voynet. Je m’interroge : à plusieurs reprises depuis le début de l’examen de ce texte, vous nous enjoignez d’éviter toute redondance avec d’autres textes de loi actuellement en vigueur.
Dès lors, était-il vraiment utile, monsieur le rapporteur, de préciser que la compatibilité entre le schéma du réseau de transport public du Grand Paris et le PDUIF sera assurée dans les conditions fixées par la loi ?
M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement n° 73 me pose un problème. J’ai le sentiment qu’il revient sur une avancée importante réalisée en commission par l’adoption d’un amendement de nos collègues socialistes insérant une disposition qui vise à préciser que le schéma d’ensemble du réseau de transport du Grand huit est compatible avec les plans de déplacements urbains de la région d’Île-de-France.
Cet amendement reviendrait à inverser la logique en prévoyant, à la suite de l’approbation du schéma d’ensemble du réseau de transport public du Grand Paris, que le plan de déplacements urbains de la région d’Île-de-France devrait être rendu compatible avec ce nouveau document dans les conditions définies par la loi d’orientation des transports intérieurs, la LOTI. (M. Desessard approuve.)
Cela induirait, me semble-t-il, une modification du plan de déplacements urbains en cas d’incompatibilité avec le schéma d’ensemble, au nom du respect de la hiérarchie des normes, ce qui signifie qu’éventuellement le plan de déplacements urbains devra être modifié pour devenir compatible, et non l’inverse.
M. le président. L'amendement n° 82, présenté par MM. Collin et Barbier, Mme Laborde et MM. Fortassin, Milhau, Tropeano et Vall, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Il concerne les huit départements de la région d'Île-de-France.
La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Le Grand Paris a pour ambition le développement de la région capitale. En cela, il doit se penser à l'échelle de la région et des huit départements.
L'amendement prévoit donc que le schéma d'ensemble des infrastructures qui composent le réseau de transport public du Grand Paris s’appuie sur les huit départements franciliens.
Certains pourraient dire que c’est une évidence, mais c’est mieux en le disant et plus sûr en l’écrivant.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Tout le monde souhaite, bien sûr, que la double boucle passe dans les huit départements de la région d’Île-de-France. Le tracé définitif ne sera connu qu’après le passage devant la Commission nationale du débat public. Par conséquent, il est inopportun, me semble-t-il, d’inscrire aujourd'hui dans la loi que le schéma concerne les huit départements.
Dans ces conditions, ma chère collègue, je vous demande de retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Laborde, l'amendement n° 82 est-il maintenu ?
Mme Françoise Laborde. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 82 est retiré.
M. Jean Desessard. Je croyais que le Grand huit, c’était les huit départements ! (Rires.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 252, présenté par Mme Voynet, M. Desessard, Mmes Blandin et Boumediene-Thiery et M. Muller, est ainsi libellé :
Alinéas 11 à 13
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet. Nous avons voté tout à l’heure l’amendement proposé par les sénateurs de la Haute-Normandie et de la Basse-Normandie prévoyant que seraient précisées les possibilités de connexion au réseau ferroviaire à grande vitesse incluant la ligne qui relie Paris aux régions de Haute-Normandie et de Basse-Normandie.
Dans ces alinéas 11 à 13, la situation est un peu différente. M. le rapporteur nous a relu solennellement tout à l’heure le jugement sévère formulé par le Conseil d’État sur l’utilité de lois proclamatoires, déclamatoires, sans valeur juridique et sans engagement réel.
Monsieur le rapporteur, il est vrai que cette façon de légiférer s’apparente à certains égards à une sorte d’arnaque : on fait rêver, on promet beaucoup, même si on n’est pas en situation de concrétiser les engagements pris de façon fébrile.
Nous sommes confrontés ici à une situation de ce type. On imagine bien l’angoisse et la fébrilité des conseillers du ministre découvrant qu’aucun dispositif sérieux ne répond, dans le projet de loi, aux fortes paroles du sacro-saint discours du Président de la République du 29 avril 2009.
Que fait-on quand on est coincé ? On promet un rapport. Vous en avez déjà promis un à M. Dominati tout à l’heure et vous vous apprêtez à récidiver. Vous vous engagez, avec une surenchère de termes de haut niveau et de grande ambition : « La mise en place d’un réseau à haut niveau de performance prioritairement affecté au fret entre les grands ports maritimes du Havre et de Rouen, qui constituent la façade maritime du Grand Paris, et le port autonome de Paris, est un objectif d’intérêt national. »
En réalité, on promet un rapport douze mois après la promulgation de la loi, mais pas des équipements et des infrastructures financés selon un calendrier précis.
Les alinéas en cause concernent en priorité le fret ferroviaire. Franchement, on connaît tous les infinies difficultés du secteur fret de la SNCF, malgré tous les efforts qui ont été tentés dans le passé : des corridors ferroviaires dédiés au fret ont été mis en place, l’intermodalité a été organisée entre les secteurs maritime, fluvial et ferroviaire…
Est-il sérieux, dans le cadre d’un projet de loi relatif au Grand Paris, d’introduire par ces trois alinéas une sorte de cavalier, faisant mine de traiter un problème difficile qui justifierait à lui seul un projet de loi à part entière ?
M. le président. L'amendement n° 228, présenté par Mme Morin-Desailly et MM. J.L. Dupont, Maurey et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Après les mots :
du Havre
insérer les mots :
, de Cherbourg
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. La façade maritime du Grand Paris doit viser non pas les seuls ports du Havre et de Rouen, mais comprendre aussi la façade maritime située en Basse-Normandie, dont le port de Cherbourg constitue un potentiel non négligeable dans le domaine du fret de colis encombrants, par exemple les éléments d'éoliennes.
Ainsi, il semble indispensable d'associer le port maritime bas-normand, afin non seulement de favoriser la complémentarité des différents ports maritimes, mais aussi parce que le port de Cherbourg constitue un levier de développement de la région Basse-Normandie, que le projet du Grand Paris peut favoriser.
M. le président. L'amendement n° 227, présenté par Mme Morin-Desailly et MM. J.L. Dupont, Maurey et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Alinéa 11
Supprimer les mots :
, qui constituent la façade maritime du Grand Paris,
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Il s’agit d’un amendement de repli.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. La commission est évidemment opposée à la suppression des alinéas 11 à 13. Bien sûr, nous ne pouvons pas aujourd'hui dans ce texte régler le problème des plateformes multimodales et du transfert du fret à l’intérieur de l’agglomération jusqu’à son cœur, comme on a dit tout à l’heure, mais il nous paraît important d’appeler l’attention du Gouvernement sur ce point, de réclamer un rapport et surtout de favoriser l’utilisation de la voie maritime pour essayer d’améliorer l’acheminement des marchandises. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 252.
J’en viens à l’amendement n° 228. Mon cher collègue, nous avons déjà inscrit Rouen et le Havre. Ajouter Cherbourg, cela ferait tout de même beaucoup. Par conséquent, la commission émet un avis défavorable.
Enfin, il est nécessaire de garder la notion de « façade maritime ». La commission émet donc également un avis défavorable sur l’amendement n° 227.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. L’avis du Gouvernement sera pour une fois sensiblement différent.
Sur l’amendement n° 252, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
S’agissant de l’amendement n° 228, il émet un avis défavorable.
Enfin, sur l’amendement n° 227, il émet un avis favorable.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Voynet, pour explication de vote sur l'amendement n° 252.
Mme Dominique Voynet. Je ne suis pas hostile à l’idée d’un rapport sur ces questions importantes, mais je considère que le Gouvernement n’a pas besoin d’une loi pour commander un rapport à un parlementaire, à ses services ou à des bureaux d’études spécialisés, pour que l’on ait une vision globale de la politique de fret ferroviaire, notamment le long de la Seine.
Par ailleurs, j’ai oublié de vous faire remarquer tout à l’heure que le texte de la commission faisait référence au « port autonome de Paris », alors que la dénomination est tout simplement, depuis deux mois, « port de Paris ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Mme Voynet a raison : je suis par conséquent d’accord pour supprimer le mot « autonome ».
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 305, présenté par M. Fourcade, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Alinéa 11
Après les mots :
et le port
supprimer le mot :
autonome
Je mets aux voix l'amendement n° 252.
(L'amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Monsieur Pozzo di Borgo, l'amendement n° 228 est-il maintenu ?
M. Yves Pozzo di Borgo. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 228 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 227.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° 225, présenté par MM. Pozzo di Borgo, About et les membres du groupe Union centriste, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... Le projet Charles-de-Gaulle express, tel qu’il résulte du V de l’article 22 de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 relative à la sécurité et au développement des transports et du décret n° 2007-453 du 27 mars 2007 définissant les modalités d'établissement par l'État d'une liaison ferroviaire expresse directe, dédiée au transport de voyageurs, entre l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle et Paris, ne peut faire l’objet d’aucun financement direct ou indirect de l’État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics, hormis les seuls frais déjà ordonnancés et ceux relatifs à la rupture des relations contractuelles afférentes audit projet, dans le respect des règles de droit commun.
Toute clause contraire est réputée non écrite.
La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo.
M. Yves Pozzo di Borgo. Cet amendement vise à garantir que le projet Charles-de-Gaulle express, déjà lancé, ne fera l’objet d’aucun financement public.
En effet, ce projet lancé en 2000 est financé a priori par le privé. Mais je souhaite inscrire dans la loi qu’il ne pourra faire l’objet d’aucun soutien financier public direct ou indirect car la puissance publique, que ce soit le STIF ou l’État, répond déjà à la problématique nécessaire de liaison directe entre l’aéroport Charles-de-Gaulle et Paris par deux projets complémentaires. Le projet Charles-de-Gaulle express pose donc un problème pour les futures dépenses publiques.
Actuellement, lorsqu’on arrive à Roissy-Charles-de-Gaulle, on peut prendre le RER, mais il faut le chercher et le trouver.
Mme Éliane Assassi. C’est vrai !
M. Yves Pozzo di Borgo. Dans n’importe quel aéroport européen, à Munich, par exemple, on vous indique le train qui vous emmène directement dans la ville. Chez nous, c’est un peu comme la chasse au trésor, il faut trouver !
M. Laurent Béteille. On y arrive !