M. Christian Blanc, secrétaire d'État. Une telle position est difficilement soutenable, puisque, comme je le disais, le tracé d’Arc Express est intégré à 80 % dans la double boucle. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG.)
Mesdames, messieurs les sénateurs, nous pouvons être en désaccord sur un certain nombre de sujets, mais au moins discutons de manière objective et raisonnable et posons les problèmes clairement. Nous aurons toujours le temps pour les effets de manche…
M. Collin a beaucoup insisté sur le désenclavement des territoires en désespérance. C’est tout à fait dans cette optique que le réseau de la double boucle a été conçu. Je me suis suffisamment battu sur ce tracé pour pouvoir affirmer devant vous qu’il est aujourd'hui arrêté. Il a même été arbitré directement par le Président de la République. Quel curieux pays que le nôtre, où une telle décision doive remonter aussi haut ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. Jacques Mahéas. Et la décentralisation ?
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. C’est la vérité, qu’elle vous plaise ou non. Je n’ai pas pour habitude de dire autre chose !
Monsieur Badré, nous aurons l’occasion de revenir sur les propos forts pertinents que vous avez tenus, notamment sur l’articulation logement-emploi-transport et la constitution de polarités de vie qui ne soient pas seulement des polarités de techniciens ou d’ingénieurs. Mme Tasca a également beaucoup insisté sur ce point. Nous sommes d’accord. Rien dans le projet de loi qui vous est soumis ne va à l’encontre d’une telle ambition, bien au contraire.
Mme Hermange a évoqué l’écologie humaine. Je suis prêt à approfondir avec la Haute Assemblée cette notion, qui est essentielle. Mme Laborde a insisté sur la question du logement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’attends de ce débat au sein de la Haute Assemblée qu’il nous permette de parvenir à un accord le plus large possible, car j’ai constaté que, sur les travées de la majorité présidentielle comme sur celles de l’opposition, des convergences très fortes se dégageaient.
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Nous avons déposé des amendements !
M. Christian Blanc, secrétaire d'État. J’espère que nous parviendrons, avec l’aide du Gouvernement, à un accord sur un texte qui nous convienne.
Enfin, Mme Tasca a évoqué Saclay et je partage sinon toutes du moins certaines de ses positions. De nombreux articles du projet de loi y sont consacrés et leur examen nous donnera l’occasion d’y revenir de manière approfondie.
Mesdames, messieurs les sénateurs, j’espère avoir répondu pour l’heure à l’ensemble des questions qui m’ont été posées par les différents intervenants. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
6
Dépôt d'un rapport du Gouvernement
M. le président. M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre le rapport analysant les avantages et les inconvénients du maintien des dispositions prévues par l’instruction codificatrice n° 05-029-A8 de la direction générale de la comptabilité publique, prévu par l’article 197 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009.
Ce rapport a été transmis à la commission des finances. Il est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné du dépôt de ce rapport.
7
Renvoi pour avis
M. le président. J’informe le Sénat que la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, tendant à renforcer les moyens du Parlement en matière de contrôle de l’action du Gouvernement et d’évaluation des politiques publiques (n° 235, 2009-2010), dont la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale est saisie au fond et qui a été renvoyée pour avis à la commission des finances, est également renvoyée pour avis, à sa demande, à la commission des affaires sociales.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de Mme Monique Papon.)
PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
8
Grand Paris
Suite de la discussion d'un projet de loi en procédure accélérée
(Texte de la commission)
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au Grand Paris.
Je rappelle que la discussion générale a été close.
Exception d’irrecevabilité
Mme la présidente. Je suis saisie, par M. Voguet, Mmes Assassi et Gonthier-Maurin, M. Vera et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, d'une motion n°5.
Cette motion est ainsi rédigée :
En application de l'article 44, alinéa 2, du règlement, le Sénat déclare irrecevable le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au Grand Paris (n° 367, 2009-2010).
Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour quinze minutes, un orateur d’opinion contraire, pour quinze minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.
En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas cinq minutes, à un représentant de chaque groupe.
La parole est à M. Jean-François Voguet, auteur de la motion.
M. Jean-François Voguet. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il est des moments rares dans notre République, par exemple quand le peuple devient législateur et est appelé à donner son avis sur un projet de loi.
Nous venons de vivre un tel moment avec les élections régionales en Île-de-France. En effet, chaque liste en présence a placé au cœur de sa campagne son opinion, son jugement sur le projet de loi qui vient en discussion devant nous aujourd’hui.
Aussi, les citoyens de cette région, en élisant leurs représentants, ont été appelés à donner leur avis sur ce texte de loi.
Dans ces conditions, les premiers articles de la Constitution prennent toute leur dimension et toute leur valeur.
En stipulant, en son article 2, que le principe de la République est : « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » et, dans son article 3, que la souveraineté nationale « appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum », la Constitution affirme un principe fondateur qui fait du peuple le souverain en toute chose et de son vote l’outil de cette souveraineté.
Au lendemain des élections régionales, l’expression de notre peuple a été claire. Elle doit être respectée. Le projet de loi sur le Grand Paris ayant été au cœur du débat régional, ce serait faire offense à notre peuple que d’en poursuivre l’examen.
En votant majoritairement pour des représentants régionaux s’étant exprimés clairement et publiquement contre ce projet de loi, les citoyens d’Île-de-France ont rejeté dans l’opposition la liste concurrente qui soutenait ce projet. Le peuple de la région d’Île-de-France a exercé sa souveraineté, il a tranché en élisant ses représentants ; il doit donc être entendu.
Est-ce interprétation de notre part que de penser que les termes du choix étaient clairement posés ? Permettez-moi quelques rappels.
C’est le Gouvernement qui a décidé de soumettre ce projet de loi au Parlement, contre l’avis de l’immense majorité des élus municipaux, départementaux et régionaux. C’est encore lui qui a décidé d’en faire l’axe central des candidats de la majorité en Île-de-France. Le Président de la République est même allé jusqu’à convoquer à l’Élysée les têtes de listes UMP d’Île-de-France pour leur rappeler qu’elles devaient mettre au premier plan de leur campagne électorale le projet du Grand Paris. On peut même dire, monsieur le secrétaire d’État, que vous avez voulu transformer les élections régionales en Île-de-France en un référendum pour ou contre le Grand Paris.
C’est d’ailleurs le Gouvernement qui a organisé le débat parlementaire pour que la discussion de ce texte et les élections régionales soient concomitantes. Il était alors persuadé que ce serait un « plus » pour les candidats de la majorité, qui y trouveraient un soutien fort et décisif.
Finalement, le peuple souverain a rejeté une telle réforme en élisant ses représentants. Dans ces conditions, ne pas tenir compte du vote des Franciliens et poursuivre l’examen de ce projet de loi serait contraire à l’article 3 du texte constitutionnel. C’est le premier élément justifiant pour nous cette motion d’irrecevabilité.
« À scrutin régional, conséquences régionales », affirmait le Président de la République. Ce projet de loi ne concernant que la région Île-de-France, nous vous demandons aujourd’hui d’appliquer ce principe en cessant l’examen de ce projet de loi. Pour nous, c’est essentiel.
Cependant, il est d’autres arguments qui justifient cette motion. En effet, ce projet de loi est, à notre sens, contraire à de nombreux autres articles de la Constitution.
Ainsi, ce texte a d’abord été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale, en méconnaissance de l’article 39 de la Constitution, qui prévoit, en son deuxième alinéa, que « les projets de loi ayant pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales sont soumis en premier lieu au Sénat ».
Devant ce manquement flagrant aux règles constitutionnelles, nous avons alerté les autorités parlementaires et gouvernementales, mais sans succès.
L’exposé des motifs est pourtant clair. On y lit en effet que « la conception et la mise en œuvre concrète du projet nécessiteront son partage avec tous les acteurs et la mise en place des outils juridiques et structures de pilotage appropriés », ce qui signifie, si vous me permettez cette traduction, que les collectivités locales seront contraintes d’y participer dans un cadre juridique spécifique qui modifiera leurs règles de fonctionnement.
L’exposé des motifs se termine par une phrase qui éclaire les enjeux du texte : « Les projets de développement territorial seront définis dans leur contenu et dans leur périmètre en partenariat entre l’État et les collectivités locales et actés dans un contrat ». Nous soutenons par conséquent que le Gouvernement a méconnu l’article 39 de la Constitution, en ne présentant pas ce projet de loi en premier lieu au Sénat. C’est la deuxième raison qui motive le dépôt de notre motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi de vous interroger à ce stade de ma démonstration. L’article 34 de la Constitution dresse la liste de l’ensemble des matières dont la loi peut fixer les règles ou déterminer les principes fondamentaux. Je vous ferai grâce de la liste, chacun pourra s’y référer.
J’ai donc cherché dans cet article à quel domaine de la loi pouvait se rattacher ce projet de loi. J’avoue que je n’y ai rien trouvé qui concerne la création d’une infrastructure de transport public ou la création d’un établissement public à caractère industriel et commercial. Il semblerait donc que l’objet de ce projet de loi ne soit pas vraiment conforme à l’objet constitutionnel d’une loi, à moins que le Gouvernement ne rattache ce texte au domaine de la libre administration des collectivités locales. Dans ce cas, cependant, monsieur le secrétaire d’État, vous confirmeriez le bien-fondé de la critique relative à la non-application de l’article 39 que je viens de développer.
J’attends donc de votre part une réponse précise à cette simple question : en quoi ce projet de loi répond-il aux exigences de l’article 34 de la Constitution ? Pourriez-vous nous préciser à quel domaine de la loi vous le rattachez ?
La question est d’autant moins anodine que si, comme nous le pensons, vous rattachez bien ce texte à l’organisation des collectivités locales, ce projet de loi, outre la non-application de l’article 39, met à mal l’article 72 en supprimant la libre administration des collectivités locales franciliennes, notamment dans la gestion de leur sol, et tout particulièrement la libre administration de la région d’Île-de-France dans sa compétence « transports ».
Nous avons déjà eu ce débat à propos du texte sur la réforme de nos collectivités locales, mais il prend ici un relief particulier.
En effet, les pouvoirs conférés dans le texte à la Société du Grand Paris sont considérables sur le plan territorial. Compte tenu de l’ampleur du réseau de transports dont elle gérera la construction, la Société exercera des pouvoirs d’aménagement sur un périmètre équivalent à quatre fois la superficie de Paris ; c’est considérable ! Elle détiendra donc à elle seule plus de pouvoirs que n’importe quelle collectivité territoriale régionale.
Un tel déséquilibre est d’autant plus grave que, contre les dispositions de l’alinéa 5 de l’article 72 de la Constitution, qui précise qu’aucune collectivité territoriale ne peut exercer une tutelle sur une autre, la Société du Grand Paris aura, elle, tout pouvoir pour imposer ses vues.
Compte tenu de l’ampleur des pouvoirs de la Société du Grand Paris et de son champ d’intervention territorial, il s’agit non pas d’un simple encadrement de la libre administration des collectivités locales franciliennes, mais bien d’une remise en cause totale de ce principe constitutionnel.
Avec un tel projet de loi, les communes qui accueilleront des gares vont perdre la gestion de leur sol, qui est pourtant une compétence essentielle, une compétence que l’on pourrait même définir comme fondatrice de leur existence. Le périmètre un temps envisagé à 1 500 mètres autour des gares représente à certains endroits plus de la moitié, voire la totalité du territoire de ces communes. C’est dire l’ampleur de la remise en cause des pouvoirs constitutionnellement garantis aux communes !
Que dire alors de la remise en cause totale de la compétence régionale en matière de transports ? L’État n’a rien fait pendant plus de trente ans alors qu’il exerçait la compétence « transports » dans la région Île-de-France. Après avoir renié ses engagements financiers lors du transfert de cette compétence à la région, il refuse toujours de transmettre au Conseil d’État le schéma directeur de la région d’Île-de-France, le SDRIF, et décide finalement aujourd’hui de reprendre la main, seul et sans concertation véritable, malgré l’avis contraire de l’immense majorité des élus locaux franciliens.
Alors que la Constitution, dans son article 1er, définit l’organisation de notre République comme étant « décentralisée », le Président de la République n’a pas hésité à nommer un ministre pour s’occuper d’une région et à passer par la loi pour imposer un modèle de développement contraire aux orientations définies par les élus qui en ont la charge.
Cela constitue en fait une sorte de coup de force institutionnel. Le Sénat, qui représente les collectivités locales, ne peut accepter une telle remise en cause. C’est la troisième raison qui motive notre motion.
Chacun en convient, le texte s’apparente à une loi d’exception qui permet sur un territoire défini, mais dont les contours sont encore vagues, de remettre en cause les règles communes qui s’imposent à tous sur l’ensemble du territoire national. De ce fait, le projet de loi sur le Grand Paris méconnaît l’article 1er de la Constitution, qui affirme l’égalité des citoyens devant la loi.
Avec ce projet de loi et les règles d’exception qu’il instaure, les élus franciliens municipaux, départementaux et régionaux ne disposeront plus des mêmes pouvoirs que les autres élus de notre pays et, partant, les citoyens qu’ils représentent ne disposeront plus des mêmes droits que les citoyens des autres régions. Une telle situation constitue à nos yeux une nouvelle violation de la Constitution.
Ces règles sont par ailleurs d’autant plus contestables qu’elles sont inutiles, néfastes et dangereuses.
Elles sont inutiles, car le Gouvernement dispose de tous les outils juridiques nécessaires à la réalisation de ce projet d’infrastructure de transport par l’intermédiaire des contrats de plan État-région, des schémas directeurs d’aménagement ou des opérations d’intérêt national, les OIN.
Elles sont néfastes, car elles empilent de nouvelles structures d’aménagement dans une région qui n’en manque pas. Pour ne prendre que l’exemple du plateau de Saclay, sur un même territoire il y a déjà des communes, un département et une région qui interviennent en termes d’aménagement, mais aussi un plan Campus, une OIN et des pôles de compétitivité. Nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire, dans ces conditions, de rajouter deux nouvelles structures pour intervenir sur l’aménagement du même site.
Le texte du projet de loi est néfaste parce qu’il démantèle le STIF, le Syndicat des transports d’Île-de-France, et remet en cause ses prérogatives. Alors que partout en France on tente de mettre en place des organismes de gestion et de coordination des transports régionaux, le projet de loi envisagé pour la région d’Île-de-France fractionne, divise, casse l’outil que chacun rêve d’établir ailleurs.
Ce texte est néfaste parce que le projet de grande boucle envisagé, le Grand huit, est un métro rapide qui méconnaît les besoins du maillage nécessaire au développement des transports franciliens et ne se préoccupe que des problématiques de trajets « travail-travail », alors que les enjeux franciliens, comme partout ailleurs, se concentrent sur les trajets « domicile-travail ».
Ce projet de loi porte aussi un plan d’aménagement dangereux pour l’avenir de la région et la vie de ses habitants parce qu’il organise un développement économique et urbain centré sur des pôles au détriment du reste du territoire. Ce développement ségrégatif risque de renforcer la compétition entre les territoires, alors que c’est la solidarité qui devrait être soutenue.
Ce type de développement est dangereux car il va relancer la spéculation foncière, pourtant déjà active dans la région. La spéculation permettra sans doute de relancer les investissements, mais aggravera les difficultés pour le plus grand nombre de Franciliens qui souhaitent accéder à un logement et pour les collectivités locales qui ont l’ambition réaliser les équipements publics nécessaires à la vie de leurs concitoyens.
En fait, votre objectif est clair, monsieur le secrétaire d’État : en dessaisissant les élus locaux de leurs prérogatives en matière d’aménagement, vous réduisez leurs possibilités d’intervention pour répondre aux besoins et aux attentes de leurs concitoyens et vous ouvrez la porte aux milieux d’affaires et aux affairistes de tous poils. Voici revenu le temps des bétonneurs et des spéculateurs, qui ont pourtant laissé tant de cicatrices dans le paysage urbain de l’Île-de-France en particulier.
Finalement, vous n’avez rien appris de l’histoire. Vous allez commettre les mêmes erreurs, et ce projet de loi vous permet d’imposer vos vues alors que vous avez été battu par le suffrage universel.
Mes chers collègues, pour toutes les raisons que je viens de développer, je vous demande de voter cette motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.
Un vote majoritaire de notre assemblée permettrait de remettre l’ouvrage sur le métier ; il en a bien besoin. Nous pourrions alors lancer une vaste réflexion associant réellement l’ensemble des partenaires institutionnels, économiques et sociaux, les architectes et les populations.
Notre objectif est simple : placer au cœur du Grand Paris les Franciliens eux-mêmes et répondre ainsi à leurs besoins en termes d’emplois, de logements, de transports, de santé, de formation, de culture, de sports et de loisirs.
Pour y parvenir, il faut doter cette région de services publics de qualité, modernisés et performants, des services qui sont nécessaires pour répondre de manière solidaire à de tels besoins.
La motion de procédure que nous vous invitons à voter est un appel à construire un nouvel espoir. Nous voulons un Grand Paris qui soit beau, où il fasse bon vivre, qui soit respectueux de l’environnement et qui place au cœur de son projet non pas la mise en concurrence des territoires et des habitants au profit de la finance, mais l’ensemble des familles franciliennes. Voilà, selon nous, ce qui est moderne aujourd’hui pour la région parisienne. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur de la commission spéciale sur le Grand Paris. Monsieur Voguet, je vous ai écouté avec beaucoup d’intérêt et j’ai noté que vous adressiez au fond quatre reproches au texte proposé par la commission spéciale.
Premièrement, il porterait gravement atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales. Or, dans la rédaction de l’article 72 de la Constitution, que nous avons modifiée il y a quelques années, ces collectivités s’administrent librement, certes, mais « dans les conditions prévues par la loi ». Les limites sont posées, et c’est d’ailleurs pareil pour le droit de grève, mais, curieusement, dans ces deux domaines, on les oublie souvent !
Le législateur peut donc parfaitement prévoir l’intervention de l’État dans le cadre de projets d’intérêt national. En outre, je rappellerai un point auquel je tiens beaucoup : le texte issu de nos travaux ne remet nullement en cause les projets de court terme engagés par la région ; il prépare simplement l’avenir de la région-capitale.
Deuxièmement, le projet de loi aurait d’abord, selon vous, dû être déposé, en vertu de l’article 39 de la Constitution, sur le bureau du Sénat. S’il a été soumis en premier lieu à l’Assemblée nationale, c’est parce que, contrairement à celui que nous avons examiné aux mois de janvier et février derniers, il ne s’agit pas d’un texte organisant les collectivités territoriales. (Mme Nicole Borvo Cohen-Seat lève les bras au ciel.)
Mme Nicole Bricq. À peine !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Soyons précis : il ne prévoit pas de nouvelle organisation.
Mme Nicole Bricq. Non, il désorganise !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. M. Dallier a d’ailleurs regretté tout à l’heure qu’il ne contienne aucune disposition en ce sens pour le Grand Paris.
Je l’ai dit au début de l’après-midi, le projet de loi a trois objets principaux : la construction d’une nouvelle ligne de métro automatique de grande capacité, la création d’un outil juridique partenarial inédit et facultatif, dénommé « contrat de développement territorial » ; la valorisation du pôle scientifique et technologique établi sur le plateau de Saclay.
Le projet de loi n’a donc pas pour principal objet l’organisation des collectivités territoriales. Après avoir été débattu à l’Assemblée nationale, le voici soumis au Sénat : la procédure suivie nous paraît parfaitement normale.
Troisièmement, vous avez évoqué les risques de spéculation. C’est la raison pour laquelle j’ai cru devoir ajouter au texte, car cela n’avait été prévu ni par le Gouvernement ni par l’Assemblée nationale, une taxation des plus-values immobilières. Pour ce faire, j’ai repris le texte élaboré par le Sénat dans le cadre du projet de loi Grenelle II en l’adaptant à la région d’Île-de-France. Le Gouvernement déposera, s’il ne l’a déjà fait, un amendement visant à attribuer à celle-ci une partie du produit ainsi récupéré, pour lui permettre de faire face à l’ensemble des opérations à engager.
Mme Nicole Bricq. Cela reste à voir !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Madame Bricq, rappelez-vous : lors de son audition devant la commission spéciale, M. Carrez, que vous citez si souvent, a précisé qu’une telle taxation pouvait rapporter un ou deux milliards d’euros.
Mme Nicole Bricq. Rien n’est moins sûr !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Dans la période actuelle, je ne refuse pas une telle somme, que je considère comme une ressource tangible ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
Quatrièmement, enfin, vous nous avez reproché, monsieur Voguet, de ne pas respecter l’expression du peuple. Comme si nous, parlementaires nationaux, étions engagés par un vote régional !
Voilà quelque temps, j’ai siégé au conseil régional d’Île-de-France, aux côtés, notamment, de Mme Bricq, de MM. Lagauche, Bodin…
M. Christian Cambon. Et de nous aussi !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. … et de M. Cambon. (Sourires.) Je me suis notamment occupé des transports, dans le cadre de la commission chargée de ce domaine, avec le bienveillant appui de mon excellent collègue Robert Hue, qui est mon témoin de moralité dans cette affaire.
Non, je ne peux pas laisser dire que nous ne respectons pas l’expression du peuple. Il y aura un débat public sur le projet, qui sera confié à la CNDP, la Commission nationale du débat public.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Quand ?
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur. Nous avons en outre complété la rédaction de l'article 18, pour préciser, de manière claire, que tous les contrats de développement des territoires situés autour des futures gares de la nouvelle ligne de métro feront l’objet d’une enquête publique. Par conséquent, si vous estimez que le projet de loi ne prévoit aucune consultation de la population, c’est que vous l’avez mal lu !
Sous le bénéfice de ces observations, mes chers collègues, la commission spéciale vous invite à rejeter la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Blanc, secrétaire d'État chargé du développement de la région capitale. Je me range à l’avis émis par M. le rapporteur. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour explication de vote.