M. Jean-Claude Frécon. Cet amendement revient sur un problème ancien, que nous connaissons tous, et que la suppression de la taxe professionnelle a remis à l’ordre du jour, celui de la révision des valeurs locatives.
Voilà deux ans, à l’occasion du congrès de l’Association des maires de France, notre Président de la République s’était engagé à réunir un Grenelle de la fiscalité locale. Nous avons eu droit à un comité Balladur, puis à la suppression de la taxe professionnelle. Mais, sur la révision des valeurs locatives, rien n’a avancé.
Depuis de nombreuses années, les rapports se multiplient : tous reconnaissent l’obsolescence des valeurs locatives et l’injustice qu’elle entraîne pour le contribuable local. La dernière révision des valeurs locatives sur le foncier bâti date de 1970, soit de trente-neuf ans, et que la dernière révision des valeurs locatives sur le foncier non bâti date, elle, de 1961, soit de quarante-huit ans.
Encore récemment, le rapport de la Cour des comptes a dénoncé l’absence de révision des valeurs locatives industrielles, ce qui a poussé le Gouvernement et le Parlement à prévoir un abattement de 30 % au titre de ces valeurs locatives pour le calcul de la nouvelle cotisation foncière des entreprises.
Conscient, un temps, de l’incohérence de ce travail législatif, le Gouvernement avait émis l’idée d’effectuer cette révision dans le collectif budgétaire pour 2009. Mais cette initiative a été abandonnée, et nous le regrettons vivement.
C’est la raison pour laquelle nous proposons, avant d’engager toute réforme de la fiscalité locale, de procéder à une révision générale des valeurs locatives des immeubles bâtis – au moins ceux-là – sur la base de celle qui a été entreprise à compter de 1990 et dont les résultats n’ont jamais produit d’effets faute d’incorporation dans les rôles.
Après l’échec de la tentative de 1990-1992, des modifications avaient été proposées, en 1996, par le Comité des finances locales, alors présidé par M. Fourcade. Ces propositions auraient pu contribuer à débloquer la situation.
Aujourd’hui, nous souhaitons qu’il soit procédé à une nouvelle révision des valeurs locatives afin que le Parlement dispose, avant le 30 septembre 2010, d’une vision exacte de ses conséquences.
Toutefois, nous le savons d’expérience, une telle démarche est compliquée. Nous en renvoyons donc les étapes ultérieures à de futures discussions. Nous ne prévoyons ni l’incorporation immédiate des résultats dans les rôles ni les conditions dans lesquelles les effets d’une telle incorporation pourraient être aménagés dans le temps.
L’objectif de cette révision est seulement de permettre que la prochaine réforme des impôts directs locaux s’opère sur une base sincère et rénovée. Par la suite, et en concertation avec les élus locaux, les modalités d’application pourront être discutées, puis tranchées.
Mes chers collègues, pour que 2010 soit enfin l’année de la réforme fiscale dans son ensemble, il est indispensable de procéder à cette évaluation préalable, dont l’unique objet est de discuter de la réforme sur des bases claires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. L’amendement no 44 peut être considéré comme un amendement d’appel.
À l’Assemblée nationale, un amendement identique a été déposé par le groupe socialiste et par la commission des finances.
Permettez-moi de vous livrer les termes de la réponse que M. le ministre avait alors apportée : « Nous faisons plus que réfléchir puisque nous allons lancer, dans les jours qui viennent, une révision des valeurs locatives, en commençant par les locaux commerciaux. Nous allons engager une concertation approfondie avec les associations d’élus et le Parlement et mettre en place un groupe de travail pour travailler sur les modalités – nous y avons déjà travaillé en interne.
« Nous passerons ensuite au deuxième sujet, plus vaste et encore plus compliqué : les valeurs locatives hors locaux commerciaux. Nous travaillerons de la même manière, avec une concertation extrêmement approfondie.
« Plusieurs systèmes sont possibles, vous le savez. Nous sommes en train de prévoir des scénarios, nous entrerons ensuite dans le vif du sujet et nous verrons si c’est faisable politiquement, juridiquement et financièrement. C’est un chantier pour 2010. »
Mes chers collègues, vous avez donc déjà la réponse. Que voulez-vous de plus ?
Mme Nicole Bricq. Des dates !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. À moins que M. le ministre, quelques semaines après avoir apporté cette réponse, puisse vous donner des précisions quant à l’évolution de ce travail.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Les propos que j’ai tenus voilà quelques semaines, à savoir que nous faisions plus que réfléchir, me paraissent très bien. (Sourires.) Si je vous avais dit que nous faisions moins que réfléchir, vous auriez probablement trouvé cela curieux. (Nouveaux sourires.)
Si nous n’avons pas encore engagé la concertation, c’est parce que mes services sont occupés par le projet de loi de finances rectificative, par les opérations de lutte contre la fraude, par les négociations avec les organisations syndicales sur les conditions de travail… La fin de l’année est très dense. Mais je puis vous dire que nous allons le faire.
J’ai l’intention d’aller assez vite. Nous allons surtout vérifier la faisabilité du projet. Nous commencerons par les locaux commerciaux. Puis, en relation avec les élus, nous verrons s’il est possible d’aller plus loin.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication.
M. Jean-Pierre Fourcade. Monsieur le ministre, la réponse que vous avez faite à l’Assemblée nationale est parfaite. Encore faudra-t-il la mettre en pratique.
Je souhaite toutefois que sorte de votre esprit, si jamais elle s’y était insinuée, la théorie pernicieuse selon laquelle il faut procéder à la réévaluation des valeurs locatives à chaque mutation, qu’il s’agisse d’une vente ou d’une succession. Un tel système est absurde ! Il créerait dans chaque collectivité une inégalité formelle, fondamentale, entre les nouveaux et les anciens propriétaires et il en résulterait des difficultés insurmontables.
Or cette idée se propage, notamment dans certains cénacles. Je tenais donc à vous mettre en garde sur ce point.
Il est en effet souhaitable de commencer par les locaux commerciaux. Il faudra continuer par les locaux industriels afin d’asseoir sur des bases sérieuses la prochaine cotisation foncière sur les entreprises. À terme, tous les bâtiments devront être concernés.
L’erreur du recensement de la révision de 1990 tenait au sort particulier que l’on avait réservé aux HLM. Il en était résulté des surcoûts d’imposition, notamment dans les communes qui comptent de nombreux logements sociaux, car l’impact sur les ménages occupant un logement hors secteur social eut été considérable. Cela a freiné l’ardeur réformatrice des gouvernements qui se sont succédé depuis 1992.
Monsieur le ministre, tout le monde s’accorde à reconnaître qu’il faut procéder par étape : d’abord les locaux commerciaux, puis les locaux industriels, enfin l’ensemble du foncier bâti.
Cette opération est nécessaire, car l’on ne pourra améliorer la fiscalité locale qu’en s’appuyant sur des bases qui correspondent à la réalité actuelle.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. L’amendement défendu par Jean-Claude Frécon me rajeunit de vingt-deux ans – ce qui est plutôt agréable –, puisqu’il nous fait revivre le même scénario qu’en 1987.
Lors de la discussion du projet de loi de finances pour 1987, un amendement, adopté à l’unanimité par les deux assemblées dans la loi de finances, visait à prescrire la révision. Dans la foulée, nous avons voté la loi du 30 juillet 1990 prévoyant et organisant la révision.
La révision a duré deux ans. Le 2 octobre 1992, à la date prévue par la loi, le résultat de la révision a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale pour intégration dans les rôles.
Outre la perturbation apportée par la création d’une catégorie HLM, qu’évoquait Jean-Pierre Fourcade voilà un instant, et que l’on pouvait éliminer sans problème, la révision a révélé, et c’est fondamental, qu’un tiers des contribuables ne payait pas assez, alors que les deux tiers payaient trop. Il fallait donc diminuer l’impôt des deux tiers qui payaient le plus et augmenter celui du troisième tiers qui était excessivement favorisé par des contributions plus que légères.
Pour diminuer l’impôt des deux tiers qui payaient le plus, tout le monde était d’accord. En revanche, personne, ni à gauche ni à droite, ne voulait augmenter l’impôt du troisième tiers. Nous sommes tous pour la justice fiscale, mais lorsque l’on peut éviter d’en augmenter certains, c’est toujours plus agréable. Il y a loin des discours aux actes !
À partir de ce moment-là, il ne s’est plus rien passé. Pierre Bérégovoy, qui était le Premier ministre du gouvernement auquel j’appartenais – et que j’ai quitté le 2 octobre en déposant les résultats de la révision ; mais je ne suis pas parti pour cela : je suis revenu au Sénat –, a dit qu’il ne pouvait pas engager cette réforme tout de suite à cause de la proximité des élections législatives.
Je lui ai répondu que l’argument était sans fondement, parce que les élections avaient lieu en mars et que les feuilles d’impôt arrivaient en septembre. Par conséquent, si l’on perdait les élections, ce seraient nos successeurs qui auraient à supporter les conséquences de la réforme. Dans ces conditions, pourquoi se gêner ?
Ensuite, Pierre Bérégovoy est parti et Édouard Balladur l’a remplacé. Il a tenu le même raisonnement. Le problème, mes chers collègues, c’est qu’il y a toujours des élections !
Jean-Claude Frécon se rappelle certainement que le Comité des finances locales auquel il appartient, sur un rapport de Jean-Claude Frécon, a décidé de demander au Gouvernement de ne rien faire et de dire qu’il était urgent de ne rien faire.
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’était sage !
M. Michel Charasse. En l’état actuel des choses, je comprends la réponse de M. le ministre et je l’approuve. Mais j’ai vécu des événements similaires et je souhaite, si vous le permettez, rappeler mon expérience personnelle.
Pendant deux ans, nous avons mobilisé tous les services fiscaux de France et de Navarre, tous les élus locaux des commissions départementales et municipales.
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. Michel Charasse. Nous avons même voté un supplément d’imposition de frais d’assiette et de recouvrement, à hauteur de 2 ou 4 milliards de francs, pour rémunérer ceux qui ont effectué ce travail. Il s’agissait d’un travail austère et difficile, qui a été très bien fait. Tout cela pour que celui-ci reste dans les placards !
Lorsque l’on réalise une révision, on constate inévitablement que certains n’ont pas une bonne valeur locative, soit parce qu’ils ne payent pas assez, soit parce qu’ils paient trop. Alors, si c’est pour recommencer à mobiliser l’administration fiscale et les élus locaux, comme ce fut le cas à l’époque, pour finalement n’aboutir à rien, et si c’est pour dire « on ne va rien toucher, il est urgent d’attendre », permettez-moi, monsieur le ministre, de recommander simplement au Gouvernement de se dispenser d’ameuter le ban et l’arrière-ban à travers la France profonde, de nous laisser en paix et d’en rester à ce que nous avons, l’injustice convenant finalement parfaitement à tout le monde, aux moralisateurs comme aux autres !
M. le président. La parole est à M. Joël Bourdin.
M. Joël Bourdin. Monsieur le ministre, je souscris à votre projet, mais à la condition que vous changiez de méthode. Nous travaillons aujourd’hui avec les outils qui ont été mis en place par les physiocrates de 1790. À l’époque, il n’y avait pas de marché immobilier. On avait recherché un système de valeurs intrinsèques des immeubles et du foncier.
A l’heure actuelle, nous disposons de moyens nouveaux qui doivent nous permettre de réaliser des évaluations correspondant mieux à la réalité. Je ne prétends certes pas que le prix du marché est le juste prix, mais c’est un élément de référence. Je considère qu’en ce début de XXIe siècle les commissions municipales devraient intégrer des spécialistes de l’immobilier. Cessons de nous référer à une valeur pour un robinet, pour une douche, pour une baignoire, pour l’environnement. Ce n’est plus de notre époque. De grâce, monsieur le ministre, changez la méthode !
M. le président. Monsieur Frécon, l’amendement no 44 est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Frécon. Je partage les souvenirs de certains collègues, même si, monsieur Charasse, j’ai une autre vision de la conclusion du rapport que j’ai présenté au Comité des finances locales en 1996.
Ce rapport montrait que l’on ne pouvait pas mettre en application la réforme des années 1990-1992 parce que l’on était dans une impasse politique. Pour s’en sortir, la première chose à faire était de réviser les valeurs locatives des logements sociaux.
Depuis, les Gouvernements, de droite comme de gauche, qui se sont succédé ont toujours différé cette réforme au motif de la proximité d’échéances électorales.
Nous pouvons, certes, comprendre cette position. Pourtant, si nous ne faisons rien, les dernières évaluations remonteront bientôt à un demi-siècle. Or, comme l’a souligné Joël Bourdin, le marché de l’immobilier a complètement changé. Faudra-t-il attendre un siècle complet ?
Monsieur le ministre, il s’agit d’un amendement d’appel. Je souhaite que le Gouvernement fasse preuve d’un plus grand courage que ses prédécesseurs et qu’il élabore un échéancier.
Nous ne voulons pas traiter tous les problèmes à la fois. Commençons, comme vous le proposez, par le foncier bâti industriel et commercial. Mais il faut fixer une échéance pour le reste du foncier bâti. Dire qu’on le fera après, c’est trop vague ! Cela peut être dans un an ou dans cinq ans. Un échéancier permettrait à chaque famille politique de se préparer.
Je suis donc prêt à retirer mon amendement, mais je souhaite au préalable entendre la réponse de M. le ministre.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Que voulez-vous que je vous dise de plus ? Je ne vais pas rentrer dans le débat historique.
Nous avons bien examiné le sujet et connaissons tous les scénarios possibles : au fil de l’eau, pas au fil de l’eau, au fil de l’eau partiel… Pour chacun d’entre eux, il existe des avantages et des inconvénients. Nous étudierons tout cela dans le consensus le plus absolu, et nous verrons ce que cela peut donner.
De toute façon, des travaux dorment dans les bureaux de l’administration depuis bien longtemps ; ils ont été inexploités, car il n’a pas été jugé opportun de procéder à cette révision sur le plan politique.
Pour ma part, je commencerai par engager une concertation sur les locaux commerciaux, puis nous cheminerons ensemble. Je ne peux pas vous en dire plus aujourd’hui !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. C’est déjà très bien !
M. Jean-Claude Frécon. Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 44 est retiré.
L'amendement n° 45, présenté par M. Pastor, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa du 1. du II de l'article 1639 A bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par exception aux dispositions du premier alinéa, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui bénéficient du transfert de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 peuvent instituer la taxe d'enlèvement des ordures ménagères jusqu'au 15 janvier de l'année qui suit celle du transfert de la compétence pour application l'année même. »
La parole est à M. Jean-Claude Frécon.
M. Jean-Claude Frécon. Cet amendement concerne le report de la date de délibération pour l’adoption de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, la TEOM.
Mais un amendement vient d’être déposé par le Gouvernement, qui, me semble-t-il, nous donnerait satisfaction.
Si je lis bien votre proposition, monsieur le ministre, vous accepteriez que cette délibération puisse être prise jusqu’au 15 janvier de l’année qui suit celle du transfert, lorsque celui-ci a lieu dans les derniers mois de l’année, c’est-à-dire après le 15 octobre. Si tel est votre souhait, nous pourrons avancer très rapidement sur cette affaire.
Le problème se pose dans un certain nombre de communautés de communes ou de communautés d’agglomération, dans lesquelles la compétence « ordures ménagères » est acquise par la communauté après le 15 octobre.
Or, pour que la communauté de communes qui vient d’obtenir cette compétence puisse instaurer la taxe d’enlèvement des ordures ménagères pour l’année suivante, il faut qu’elle prenne la décision avant le 15 octobre.
Si la communauté n’a reçu cette compétence qu’après le 15 octobre, elle ne peut plus réagir en temps voulu, et elle ne pourra pas appliquer la taxe l’année suivante, bien qu’elle en ait la compétence. Par conséquent, nous demandons que, dans ce cas, et dans ce cas seulement, la date du 15 octobre soit reportée au 15 janvier.
En agissant ainsi, nous appliquons une mesure qui existe déjà, puisque ce report à la date du 15 janvier concerne déjà les EPCI nouvellement créés, ceux qui sont issus d’une fusion d’EPCI ou ceux dont le territoire a été étendu.
Nous proposons simplement, dans ce cas précis, une nouvelle dérogation jusqu’au 15 janvier, au lieu du 15 octobre.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 239, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L- Après le deuxième alinéa du 1 du II de l'article 1639 A bis du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé
« Par exception aux dispositions du premier alinéa, les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui bénéficient du transfert de la compétence prévu à l'article L. 2224-13 du code général des collectivités territoriales par un arrêté préfectoral pris postérieurement au 15 octobre d'une année peuvent prendre, jusqu'au 15 janvier de l'année qui suit celle du transfert, la délibération afférente à l'institution de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères à l'exclusion des délibérations prévues aux articles 1521 et 1522 et au 2 du III de l'article 1636 B sexies. À défaut, les délibérations prises en matière de taxe d'enlèvement des ordures ménagères par les communes restent applicables l'année qui suit celle du transfert. "
II- Les dispositions du I s'appliquent à compter des impositions établies au titre de 2010.
La parole est à M. le ministre, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 45.
M. Éric Woerth, ministre. En fait, cet amendement intègre le dispositif proposé par M. Frécon.
Nous souhaitons permettre aux collectivités de prendre deux mois de plus pour réfléchir, car, souvent, les budgets ne sont pas prêts au 15 octobre. Si les délibérations sont possibles jusqu’au 15 janvier, la TEOM pourra être mise en place et envoyée pour recouvrement au contribuable en même temps que les impôts locaux, c’est-à-dire grosso modo à l’automne.
Simplement, pour des raisons techniques, il n’est pas possible de prendre en compte l’année en cours, c’est-à-dire l’année qui est couverte par la première taxe d’enlèvement des ordures ménagères.
Si la date est fixée au 15 janvier 2009, on considérera que la taxe d’enlèvement des ordures ménagères est levée pendant l’année 2009, mais on ne prendra pas en compte les délibérations qui modifieraient les bases fiscales de la taxe ou qui instaureraient des zones avec des taux différenciés, car on n’aurait pas le temps de les intégrer. Cette intégration aura lieu l’année d’après.
Tel est le sens de l’amendement du Gouvernement, qui vise à faciliter la vie des collectivités. Elles auront deux mois de plus pour prendre leur décision.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il est proposé, au travers de l’amendement n° 45, que la date limite du 15 octobre soit repoussée au 15 janvier, mais, si je ne me trompe, pour appliquer la taxe aux bases de l’année, et non pas à celles de l’année précédente.
On me disait jusqu’ici que l’écart entre le 15 octobre et le 1er janvier était nécessaire aux services fiscaux pour prévoir la mise en œuvre de la taxe aux conditions économiques de l’année, qui s’ouvre le 1er janvier. C’est ce que j’avais cru comprendre.
M. Michel Charasse. C’est ça !
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Mais M. le ministre nous dit dans son amendement, sauf erreur de compréhension de ma part, que, si la date limite du 15 janvier peut être acceptée, ce sera pour appliquer une TEOM aux conditions et selon les bases de l’année précédente.
En réalité, il y aurait donc une année de décalage entre les bases que vous envisagez dans l’amendement n° 45 et celles qui sont évoquées dans l’amendement du Gouvernement.
Cela étant, je ne suis pas sûr d’avoir percé les mystères de cette affaire…
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Éric Woerth, ministre. Il n’y a aucune contradiction. Nous sommes bien sur les bases de la fiscalité locale, puisque la TEOM est assise sur le foncier, et que l’on sait l’intégrer. Nous pouvons le faire dans les cas les plus répandus.
Toutefois, ce que l’on ne sait pas prendre en compte – je vous transmets les informations de mes services –, ce sont les délibérations spécifiques d’exonération de telle ou telle base. Mais nous sommes bien sur la base normale des impôts locaux de l’année.
M. le président. Monsieur Frécon, acceptez-vous de retirer votre amendement au profit de l’amendement du Gouvernement ?
M. Jean-Claude Frécon. Les amendements ont effectivement le même objet.
Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, le report de la date au 15 janvier existe dans trois cas : pour les EPCI nouvellement créés, pour ceux qui sont issus d’une fusion d’EPCI ou pour ceux dont le territoire est étendu.
Il s’agit simplement de prévoir un quatrième cas à côté de ce qui existe déjà sur les bases de l’année précédente, puisqu’il est trop tard pour que les services fiscaux recalculent celles-ci sur cette année. Pour nous, il n’y a pas d’ambiguïté sur ce point.
Cela étant, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 45 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 239.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi de finances rectificative, après l'article 27.
L'amendement n° 46, présenté par M. Reiner, Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini, Repentin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 27, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au huitième alinéa (d) de l'article L. 2334-6 du code général des collectivités territoriales, après les mots : « taxe d'enlèvement des ordures ménagères », il est inséré les mots : « majorée de la redevance spéciale prévue à l'article L. 2333-78 lorsqu'elle ne s'applique pas à une activité artisanale ou commerciale, ».
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Claude Frécon.
M. Jean-Claude Frécon. Par cet amendement, notre collègue Daniel Reiner propose que puisse être prise en compte pour le calcul de l’effort fiscal des communes la redevance spéciale d’enlèvement des ordures ménagères.
Il s’agit en effet de corriger l’iniquité de traitement entre les communes qui adhèrent à des EPCI appliquant la redevance d’enlèvement des ordures ménagères, la REOM, et celles qui adhèrent à des EPCI appliquant la TEOM.
Lorsqu’un EPCI institue une redevance, celle-ci est levée auprès de tous les usagers du service, quelle que soit leur catégorie. La seule obligation relève de la notion de service rendu.
En revanche, lorsqu’un EPCI décide d’instituer la TEOM, celle-ci s’applique uniquement aux ménages, puisque son assiette est assise sur les bases de la taxe foncière.
Si l’EPCI souhaite faire participer les entreprises de son territoire, il peut, depuis 1993, instituer ce que l’on appelle une redevance spéciale. À noter que cette redevance s’applique non seulement aux activités commerciales ou artisanales, mais aussi aux maisons de retraite, collèges, etc.
Lors de l’adhésion d’une commune à un EPCI doté de la compétence « ordures ménagères », le régime fiscal applicable peut être modifié, passant par exemple d’une redevance à une taxe couplée d’une redevance spéciale.
Or cette modification subie par la commune peut se révéler fortement défavorable pour le bénéfice de certaines dotations, particulièrement la dotation nationale de péréquation.
Tel est le cas de la commune de Faulx, qui, à la suite de son adhésion à un EPCI doté de la compétence « ordures ménagères » financée par la taxe, a perdu le bénéfice de la dotation nationale de péréquation.
Préalablement dotée d’une redevance, cette commune était donc éligible à la dotation nationale de péréquation. C’est en réalité la taxation de la maison de retraite située sur le territoire de cette commune à la redevance spéciale, et non plus à la REOM, qui, diminuant ainsi son effort fiscal, fait perdre à la commune le bénéfice de cette dotation de péréquation.
Par ce seul changement de régime d’imposition, alors qu’il n’y a pas de modification dans le service rendu, la commune a dû faire face à une perte de plus de 20 000 euros par an, somme considérable pour une commune de 1 200 habitants.
Aussi, dans un souci d’équité des communes entre elles, il conviendrait d’intégrer la redevance spéciale au calcul de l’effort fiscal communal. Néanmoins, afin de respecter la définition de l’effort fiscal, le présent amendement prévoit d’exclure les activités artisanales et commerciales du produit de la redevance spéciale pris en compte.