M. Paul Blanc. Très bien !
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. J’espère que nous pourrons progresser dans cette voie, et peut-être nous apporterez-vous, madame la ministre, des informations de nature à nous apaiser.
M. Paul Blanc. Très bien !
M. Alain Milon, rapporteur pour avis. Cela étant, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur les crédits de la mission « Santé » sous réserve, bien sûr, de l’adoption de l’amendement qu’elle a déposé pour compléter le financement des missions de l’AFSSAPS, ainsi que de l’amendement de suppression de l’article 59 ter, incompatible avec les dispositions que nous venons d’adopter dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. Je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
En outre, en application des décisions de la conférence des présidents, aucune intervention des orateurs des groupes ne doit dépasser dix minutes.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de quinze minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. René Teulade.
M. René Teulade. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la France consacre près de 9 % de sa richesse nationale aux dépenses publiques de santé, soit 210 milliards d’euros tous domaines confondus : sécurité sociale, interventions de l’État et des collectivités territoriales.
Selon plusieurs études récentes, les particuliers dépenseraient pour se soigner entre 40 % et 50 % de plus qu’en 2001. Les cotisations aux organismes complémentaires additionnées « du reste à charge » représenteraient une moyenne de 5,4 % du revenu disponible et de 11 % du budget des personnes âgées.
Madame la ministre, vous nous demandez aujourd’hui de voter les crédits de la mission « Santé », qui s’élèvent à 1,2 milliard d’euros. Voilà presque une semaine, nous avons adopté le budget de la sécurité sociale, dans lequel les prévisions de dépenses de l’assurance maladie pour 2010 sont fixées à 162 milliards d’euros.
La mission « Santé » regroupe des crédits essentiels pour mener à bien la politique de santé publique, qui comprend la prévention, la sécurité sanitaire, la protection maladie et l’offre de soins. Des crédits permettent également de financer les opérateurs essentiels que sont l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, l’INPES, l’Institut de veille sanitaire, l’InVS, les agences régionales de l’hospitalisation, les futures agences régionales de la santé, les ARS, et les agences françaises de sécurité sanitaire.
Dans le contexte actuel de pandémie grippale, tous ces organismes prouvent leur utilité et rappellent que la santé publique est bel et bien une mission régalienne de l’État.
Le budget de la santé pour 2010 s’inscrit dans une certaine continuité, alors même qu’il doit faire face à une conjoncture particulière.
D’abord, il se situe dans un contexte financier difficile. Outre l’ampleur du déficit budgétaire, l’État a pris, en matière de santé publique, l’habitude de se décharger sur l’assurance maladie, soit purement et simplement par des transferts, soit de façon plus pernicieuse par des reconductions de dette, soit encore par des partages de financement.
Ensuite, il s’agit d’un budget de transition avant l’application totale de la réforme de l’hôpital public et notamment la création des agences régionale de santé ou la fusion de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments et de l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail.
De plus, nous nous situons dans une période de pandémie grippale.
Mais tous ces éléments ne se traduisent pas dans la mission budgétaire que nous devons examiner.
Le 2 novembre dernier, le Président de la République a annoncé, promotion médiatique à l’appui – nous y sommes habitués ! –, un nouveau plan cancer 2009-2013, qui comprend trente mesures.
La Cour des comptes, le Haut Conseil de la santé publique puis l’Inspection générale des affaires sociales ont évalué le premier plan cancer. Selon le Haut Conseil de la santé publique, un tiers des soixante-dix mesures inscrites dans le plan de 2003-2007 ont été mises en place. Par conséquent, nous pouvons nous interroger sur l’utilité d’un nouveau plan, quand nous savons que le précédent n’a pas été appliqué dans son intégralité ! Même s’il est cofinancé inégalement par la mission « Santé » et l’assurance maladie, il mérite que nous nous y attardions.
Reprenant les préconisations du professeur Jean-Pierre Grünfeld et du Haut Conseil de la santé publique, ce plan doit permettre de lutter contre les inégalités d’accès à la prévention et aux soins, et de favoriser la recherche sur les déterminants du cancer, notamment environnementaux et comportementaux.
Seuls les crédits concernant le dépistage et la prévention sont inscrits dans la mission budgétaire. Nous pouvons constater que ces deux postes se trouvent, encore une fois, sous-financés. Mais nous aurons, je l’espère, l’occasion d’aborder de nouveau le sujet lors des prochains mois.
La naissance des agences régionales de santé va profondément modifier les contours et les modalités de la mise en œuvre des politiques de santé publique.
Vous avez ouvert 271 millions d’euros de crédits dans la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Mais nous pouvons constater, une fois encore, que le Gouvernement trompe la représentation nationale. En effet, ces 271 millions sont non pas une création de nouveaux crédits, mais le redéploiement de crédits depuis des services déconcentrés au titre des emplois, des crédits de masse salariale et des crédits de fonctionnement du ministère. Visiblement, le projet de loi de finances rectificative pour 2009 comblera ce manque de financement pour les ARS.
J’en viens au financement de la lutte contre la pandémie grippale.
La propagation du virus A/H1N1 a fortement perturbé le financement de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS. Alors que la programmation initiale des dépenses était de 290 millions d’euros, cet établissement a dû engager plus de 1 milliard d’euros au cours de l’année 2009, notamment pour l’acquisition des vaccins. Au total, les dépenses approcheront 1,5 milliard d’euros.
Mais aucun signe de ces dépenses n’est visible dans le budget de 2010. Nous serons obligés de procéder à des ajustements dans les prochains textes budgétaires, car nous devons respecter l’obligation inscrite dans les textes fondateurs de l’EPRUS, à savoir la parité de financement entre l’État et l’assurance maladie.
Toujours sur la pandémie grippale, dans le programme 204 « Prévention et sécurité sanitaire », les actions 11 « Pilotage de la politique de santé publique » et 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » enregistrent une baisse des autorisations d’engagement et des crédits de paiement.
L’Institut de veille sanitaire consacre en ce moment une part importante de ses moyens et de ses effectifs à la surveillance du virus A/H1N1. Mais nous constatons une timide augmentation de ses crédits. Cela paraît étonnant vu les besoins constatés en 2009.
Nous pouvons en déduire que l’Institut de veille sanitaire a dû procéder à des réallocations et différer certaines actions. Si vous l’aviez doté convenablement lors des précédents budgets, cet Institut aurait pu surveiller la survenue de cas de grippe A, tout en poursuivant d’autres actions.
De plus, vous n’avez prévu que cinq emplois équivalents temps plein supplémentaires, alors que trente-cinq seraient nécessaires pour consolider les cellules interrégionales d’épidémiologie existantes et créer les nouvelles antennes nécessaires pour assurer une action de veille et d’alerte dans les régions.
Avant de conclure, je voudrais attirer l’attention de la Haute Assemblée sur un problème qui va croissant, celui de la part du budget des ménages consacrée à la santé. Certes, la crise a augmenté les difficultés que rencontrent ces derniers pour faire face aux dépenses de santé, mais le Gouvernement et la majorité sont responsables de ce problème de santé publique.
Lors du débat sur la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, en refusant de vous attaquer avec toutes les armes possibles à la désertification médicale et aux dépassements d’honoraires – pour ne citer que ces points-là –, vous avez choisi de faire supporter le coût de l’accès aux soins à nos concitoyens, notamment aux plus défavorisés.
L’amendement qui a été adopté lors du débat à l’Assemblée nationale et qui vise à doubler l’aide à l’acquisition d’une assurance complémentaire, passant ainsi de 100 euros à 200 euros pour les jeunes âgés de seize à vingt-cinq ans, est une mesure certes positive, mais insuffisante. Il n’empêche que les études réalisées montrent que la sécurité sociale a moins remboursé en 2008 et que le transfert de charges s’effectue vers les organisations complémentaires, d’une part, et vers les ménages, d’autre part. Or vous refusez de vous attaquer à ce problème, mettant la santé de nombre de nos concitoyens en danger.
Encore cette année, les faibles augmentations de certains crédits masquent la baisse importante d’autres. Mais les conséquences sur la santé des Français se ressentent malheureusement tous les jours.
Face à un système devenu illisible, le sentiment qui domine est celui d’une solidarité en recul. Ce système de santé tourne peu à peu le dos à l’idéal d’un égal accès de tous à des soins de qualité tel qu’il avait été défini lors de la création de la sécurité sociale dans le contrat élaboré en 1945, à la Libération, l’objectif étant alors d’éradiquer l’une des inégalités les plus intolérables de toutes : l’inégalité devant la souffrance et la maladie.
Cette évolution n’est pas le fruit du hasard et ne résulte pas uniquement des difficultés économiques. Elle est bien la conséquence d’un choix politique qui ne dit pas son nom, un système de santé privatisé dans lequel on est remboursé en fonction de la qualité de sa convention de santé privée. Se refusant à toute augmentation des cotisations sociales, le Gouvernement opère ainsi progressivement le transfert de la gestion et du remboursement des soins courants vers les mutuelles et les assurances privées.
Telles sont toutes les raisons pour lesquelles, madame la ministre, le groupe socialiste ne votera pas les crédits de la mission « Santé ». (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » s’élèvent, pour 2010, à 1,2 milliard d’euros. Cette quasi-stabilité par rapport à la loi de finances pour 2009 peut paraître étonnante eu égard aux grands changements qui affecteront la gestion de la mission l’an prochain.
Qu’il s’agisse de la réorganisation territoriale de la politique de santé, avec l’installation des agences régionales de santé, ou bien des moyens exceptionnels débloqués pour lutter contre la pandémie de grippe A ou encore du lancement du nouveau plan Cancer, qui doit mobiliser 730 millions d’euros pendant la période 2009-2013, toutes ces mesures auront évidemment une incidence.
Or, comme l’a souligné M. le rapporteur spécial, ces dispositions ne se traduisent pas de façon évidente dans la programmation budgétaire pour 2010. Certes, une grande part des dépenses correspondantes est financée par d’autres missions ou par l’assurance maladie, mais un effort de clarification de la part du Gouvernement serait à mon avis nécessaire.
Quoi qu’il en soit, plusieurs orientations de ce budget méritent d’être saluées, comme l’a signalé, entre autres, le rapporteur pour avis, M. Alain Milon.
C’est tout d’abord le cas des crédits consacrés à la formation initiale des internes au sein du programme 171 « Offre de soins et qualité du système de soins ». En hausse pour la deuxième année consécutive, ils devraient permettre de revaloriser la filière de médecine générale et d’ouvrir de nouveaux stages de formation des médecins, disposition parfaitement cohérente avec celle de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, qui fait du médecin généraliste le pivot de notre système de santé. (M. Bernard Cazeau proteste.)
Par ailleurs, ce programme prévoit aussi une subvention de 770 000 euros au groupement d’intérêt public « Carte de professionnel de santé ». Madame le ministre, qu’en est-il de la fusion de cette structure avec le groupement d’intérêt public en charge du dossier médical personnel et avec une partie du Groupement pour la modernisation du système d’information hospitalier, le GMSIH, au sein de l’Agence pour les systèmes d’information de santé partagés, l’ASIP ?
Selon l’excellent rapport de M. Rémi Delatte, cette fusion « ferait de notre pays un leader de la télémédecine et du développement des systèmes d’information médicale partagée. ». Il est donc important de la mener à bien rapidement.
En outre, le renforcement substantiel de l’aide médicale d’État au sein du programme 183 « Protection maladie » traduit aussi, à l’évidence, l’effort de solidarité souhaité par le Gouvernement.
S’agissant du programme 204 « Prévention et sécurité sanitaire », j’approuve pleinement le choix du Gouvernement de continuer à faire de la lutte contre le cancer une priorité nationale.
Comme l’a souligné, entre autres, le rapporteur, l’enjeu est d’importance, le cancer étant devenu la première cause de mortalité en France, devant les maladies cardiovasculaires. C’est le premier risque d’affection de longue durée, avec 1,5 million de patients et environ 320 000 nouveaux cas par an. On le sait, de fortes inégalités demeurent face au cancer, notamment en termes de qualité des soins prodigués. Ce point est extrêmement important.
Le précédent plan Cancer, lancé en 2002, avait de grandes ambitions. Des progrès importants ont été réalisés en matière de prévention, de dépistages organisés, de prise en charge, notamment avec la création d’un dispositif d’agrément en cancérologie des établissements hospitaliers.
Mais la Cour des comptes a relevé de nombreuses anomalies : défauts de pilotage comme de contrôles interne et externe à tous niveaux, faiblesse persistante des données épidémiologiques concernant la maladie, retards en matière de formation des personnels, carences en matière de cancers professionnels.
Espérons que, dans le nouveau plan, seront tirés les enseignements du premier ! D’une manière générale, on ne voit pas toujours les résultats concrets des plans annoncés à grand renfort de communication. Je pense notamment au plan Alzheimer. Madame le ministre, pouvez-vous nous dire ce qui a été fait depuis son lancement ?
Au-delà de ces maladies, je voudrais insister sur le sida, que l’on a un peu tendance à oublier. La Journée mondiale de lutte contre le sida a été l’occasion, pour un certain nombre d’associations, de rappeler l’engagement des pays riches à financer l’accès universel aux traitements.
Pour ma part, je souhaite mettre l’accent sur la politique de dépistage dans notre pays. Le Conseil national du sida, dont je suis le membre nommé par le président du Sénat et qui fait depuis plusieurs années le constat de son inadaptation, a défini une série d’orientations pour sa réforme.
Conçu et mis en place à une époque où les risques de stigmatisation et de discrimination à l’encontre des personnes vivant avec le VIH étaient particulièrement importants et où les bénéfices individuels du dépistage étaient limités en l’absence de traitement efficace, le dispositif n’a jamais été significativement modifié.
L’évolution de l’épidémie et le développement de nouveaux moyens thérapeutiques et prophylactiques ont radicalement changé les enjeux, tant individuels que collectifs, du dépistage.
On estime aujourd’hui le nombre de personnes ignorant leur séropositivité à quelque 40 000, et plus de la moitié des personnes nouvellement diagnostiquées le sont trop tardivement. (Mme la ministre acquiesce.) Ce retard au dépistage est non seulement une perte de chances thérapeutiques pour ces personnes, mais également une opportunité manquée de limiter la transmission du virus.
Le rapport de la Haute Autorité de santé rendu public en octobre dernier préconise, au-delà du maintien et du renforcement d’un dépistage ciblé et régulier pour les populations à risque, de proposer systématiquement un test de dépistage à l’ensemble de la population âgée de quinze ans à soixante-dix ans.
Loin de remettre en cause le principe du consentement libre et éclairé, cette évolution, qui devra faire l’objet d’une évaluation au bout de cinq ans, peut contribuer à la banalisation du dépistage, qui doit devenir un acte courant du suivi de santé.
Madame la ministre, quelles suites entendez-vous donner à ces recommandations, d’ailleurs convergentes avec celles qui ont été formulées par le Conseil national du sida en 2006 ?
Enfin, permettez-moi un dernier mot sur la grippe A/H1NI. Avec 22 morts et 730 000 consultations recensés la semaine dernière, l’épidémie s’est brutalement accélérée. Les centres de vaccination ne désemplissent plus. Certains attendent des heures pour finalement repartir sans être vaccinés. Quelques « réglages », notamment des horaires élargis les jours d’affluence ou des équipes plus étoffées, ne suffiront pas à désengorger les centres. Il est temps d’autoriser les généralistes et les pédiatres à réaliser les vaccinations dans leurs cabinets.
M. Alain Vasselle. Très bien !
M. Gilbert Barbier. Ces derniers forment un maillage dense sur notre territoire et disposent de la confiance des patients, deux gages de réussite de la vaccination à grande échelle que vous souhaitez !
Sous réserve de ces observations, je voterai bien entendu ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées de l’Union centriste et de l’UMP.)
Mme la présidente. La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le budget que nous examinons aujourd’hui est en demi-teinte : sa hausse, estimée entre 1 % et 2 % par rapport au budget de l’année précédente, dissimule mal ses carences.
Tout d’abord, en ce qui concerne l’aide médicale d’État, nous regrettons que le Gouvernement n’ait pas pris, comme en octobre 2007, les mesures permettant l’apurement de la dette de l’État envers l’assurance maladie. Ce dispositif souffrant d’une sous-dotation chronique, le remboursement effectué en 2007 est naturellement sans effet sur les difficultés rencontrées pour l’exercice en cours : cette année encore, la totalité des besoins qui se sont exprimés n’est pas couverte financièrement.
Nous avons cru comprendre que le Gouvernement s’était engagé à apurer une nouvelle fois cette dette à l’occasion de la prochaine loi de finances rectificative pour 2009. Une sous-estimation récurrente des besoins n’est pas satisfaisante. Nous souhaiterions que le Gouvernement en tire toutes les conséquences, en majorant le montant de la dotation relative à l’aide médicale d’État.
Par ailleurs, nous ne pouvons nous satisfaire de la faible hausse dont bénéficie l’action 15 « Préventions des risques liés à l’environnement, au travail et à l’alimentation ». Vous le savez, l’AFSSET et l’AFSSA doivent prochainement fusionner. Certains acteurs, très impliqués dans le domaine de la santé au travail, nous ont fait part de leurs craintes : ils redoutent en effet que cette fusion n’entraîne la dissolution de la spécificité de l’AFSSET en matière de santé au travail.
S’il est vrai que le financement du ministère de la santé ne représente que 20 % du budget de l’AFFSET, les récents drames et accidents survenus au travail doivent inciter le Gouvernement à éviter que, à la faveur de cette fusion, le champ de la mission de l’AFSSET en matière de santé au travail ne soit réduit. Nous considérons donc que des financements complémentaires doivent lui être apportés, notamment pour lui permettre de renforcer les personnels de la future agence, spécialement ceux qui se consacrent aux problèmes de santé au travail, et ce d’autant plus que la mise en œuvre du plan santé au travail rend indispensable la création d’au moins cinq équivalents temps plein.
De même, nous nous étonnons d’une diminution d’environ 1,9 % par rapport à 2009 des crédits affectés à l’action 14 « Prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades », et ce alors même qu’une grande majorité de cette dotation sera affectée aux agences régionales de santé.
Si nous saluons le deuxième plan cancer, nous nous interrogeons sur les conséquences que pourrait avoir la diminution des crédits alloués au dépistage, qui passent de 19,2 millions d’euros en 2009 à 18,5 millions en 2010. Cette diminution s’explique d’autant moins que le dépistage organisé du cancer du sein est progressivement monté en puissance. D’après les projections dont nous disposons, le taux de participation au dépistage devrait s’établir à 55 % en 2009 et atteindre plus de 62 % en 2011. La diminution programmée des dotations issues de l’État fait donc peser un véritable risque sur le dépistage primaire, dont on connaît pourtant l’importance dans le traitement des affections qui en font l’objet. À cet égard, nous partageons le constat formulé dans le rapport spécial du député Gérard Bapt, selon lequel « l’ensemble des travaux d’évaluation du plan cancer 2003-2007 ont mis en évidence la nécessité de poursuivre les programmes de dépistage organisé, et en particulier de renforcer le taux de participation de la population cible, qui demeure insuffisant ».
Enfin, nous regrettons que la lutte contre le saturnisme n’apparaisse pas clairement comme une priorité du Gouvernement. Selon une étude de l’INSERM, qui remonte à 2006 mais semble d’actualité, il y aurait en France, au bas mot, 84 000 enfants victimes de saturnisme. Cette maladie – il est important de le préciser – est liée à la pauvreté. Elle exige des pouvoirs publics qu’ils coordonnent leurs moyens pour lutter contre l’insalubrité, tant il est vrai que cette affection est trop souvent la conséquence de l’exposition à certains matériaux ou peintures essentiellement présents dans les habitats anciens et insalubres. On le sait, la contamination par le plomb peut avoir des conséquences très graves, particulièrement pour les femmes enceintes et les enfants.
Contrairement aux apparences, cette maladie, dont chacun constate la recrudescence, n’est pas une fatalité, puisque nous avons les moyens de la circonscrire par un traitement social d’urgence. Aucun traitement curatif n’existant à l’heure actuelle, nous sommes convaincus que la véritable solution passe par la suppression des logements insalubres.
Dans le même temps, un volet santé, reposant principalement sur le dépistage, doit être mis en œuvre, en organisant notamment l’information des populations concernées. Il exige une démarche volontariste, d’autant que, selon le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de 2004, « l’activité de dépistage sur le territoire apparaît notoirement insuffisante », sauf à m’indiquer que la situation a radicalement changé depuis cette date. Dans ce domaine, madame la ministre, il y a donc beaucoup à faire !
L’activité de dépistage n’est soumise à aucune obligation, ce qui provoque des disparités importantes d’un département à l’autre. Ainsi peut-on établir que 84 % des dépistages sont concentrés sur Paris et le département de Seine-Saint-Denis.
Nous considérons par ailleurs qu’il faut aider au développement de la recherche médicale dans ce domaine.
Enfin, en matière d’accès aux soins, nous ne pouvons que constater le caractère inopérant du système mis en place par la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, autorisant les patients et leurs associations à saisir les ordres professionnels lorsqu’ils s’estiment victimes d’un refus de soins en raison de leur assujettissement à la couverture maladie universelle. Si ce mécanisme n’a été que peu utilisé à ce jour, c’est sans doute en raison de l’absence d’information des patients quant à leurs droits et obligations, en raison de leur vulnérabilité.
C’est pourquoi, compte tenu des difficultés grandissantes d’accès aux soins pour les personnes les plus défavorisées bénéficiant de la CMU, il aurait été souhaitable de renforcer les obligations pesant sur les professionnels de santé, notamment en autorisant le testing ou l’inversion de la charge de la preuve, d’autant que la loi HPST apporte la précision suivante : un praticien peut toujours opposer un refus de soins « fondé sur une exigence personnelle ou professionnelle essentielle et déterminante de la qualité, de la sécurité ou de l’efficacité des soins ». Cette nouvelle disposition, introduite par notre assemblée, risque de limiter la portée du principe de l’obligation de soins.
Nous regrettons d’autant plus cette situation que rien n’a été fait, ni dans la loi HPST ni à l’occasion du PLFSS pour 2010 dont nous venons de débattre, pour garantir l’accès de tous à des soins de qualité et à des tarifs opposables. Il est désormais reconnu que la part du budget des ménages consacrée à la santé a augmenté de 50 % depuis 2001. Cette situation résulte naturellement des mesures de déremboursement, mais aussi et surtout de l’explosion des dépassements d’honoraires qui pèsent sur l’ensemble des patients, et plus particulièrement sur les plus défavorisés d’entre eux.
Au regard des besoins et des populations, ce budget apparaît donc insuffisant. C’est la raison pour laquelle les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Procaccia.
Mme Catherine Procaccia. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous sommes à la veille de plusieurs échéances cruciales pour notre politique de santé. En 2010, nous élaborerons une nouvelle loi de santé publique, nous réviserons les lois de bioéthique et veillerons à la mise en place des agences régionales de santé. Ces projets ambitieux auront une incidence majeure, nous l’espérons tous, sur notre système de soins.
La mission « Santé » regroupe – les différents orateurs l’ont rappelé – trois programmes budgétaires : « Offre de soins et qualité du système de soins », dont les crédits atteignent 491 millions d’euros ; « Protection maladie », doté de 585 millions d’euros ; et « Prévention et sécurité sanitaire », qui bénéficie de 124 millions d’euros. Ainsi, l’ensemble des crédits alloués à cette mission représente 1,2 milliard d’euros, montant quelque peu dérisoire par rapport aux 179 milliards d’euros octroyés à la branche maladie de la sécurité sociale. Mais, ne nous y trompons pas, ces crédits jouent un rôle essentiel eu égard au caractère sensible des secteurs qu’ils financent : prévention, sécurité sanitaire, formation professionnelle et solidarité.
Ces crédits sont tout d’abord destinés à la politique de prévention ; ils sont ainsi affectés aux programmes destinés à faire évoluer les comportements, notamment dans le cadre de la lutte contre les pratiques addictives et à risque, en particulier chez les jeunes. L’importance de ces programmes n’est plus à démontrer lorsque l’on songe à l’augmentation de l’alcoolisation expresse des jeunes, appelée binge drinking. Cet usage destructeur, apparu voilà quelques années, aurait progressé de plus de 10 % en France entre 2005 et 2008, selon les chiffres de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies. En 2008, près de 20 % des jeunes de dix-sept ans interrogés s’y seraient livrés.
Cette évolution de la consommation alcoolique est forcément inquiétante : la dépendance précoce à l’alcool et ce type d’alcoolisation massive peuvent entraîner des actes de violence et des accidents graves pour ces mineurs.
Il est nécessaire d’orienter davantage la prévention contre l’alcoolisme en direction des jeunes de moins de seize ans, pour éviter la dépendance des jeunes âgés de dix-sept à dix-neuf ans.
Dans cette optique, madame la ministre, nous aimerions savoir quelles mesures spécifiques vous avez prévues en direction de ce public, et, plus généralement, comment vous comptez mettre en œuvre les dispositions de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires tendant à lutter contre ces comportements à risque.
Par ailleurs, des crédits de la mission « Santé » sont consacrés à la veille et à la sécurité sanitaires. Mes collègues ont parlé du rapprochement entre l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’AFSSA, et l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, l’AFSSET, dont le principe a été inscrit dans la loi HPST. Cette unification de la prévention des risques liés à l’environnement, au travail et à l’alimentation était particulièrement nécessaire.
Je citerai un exemple que je connais bien, et que j’ai déjà évoqué à plusieurs reprises à cette tribune, celui du chlordécone aux Antilles. Il démontre bien la pertinence de ce rapprochement, car seule une approche globale permettra de lutter à la fois contre l’exposition de nos concitoyens aux polluants persistants et contre les contaminations des populations par voie alimentaire, comme c’est le cas aux Antilles.
En outre, la formation des professionnels constitue l’une des priorités du programme « Offre de soins et qualité du système de soins ». La médecine générale doit être au cœur de cette formation. Les crédits correspondants du programme assureront essentiellement le financement des stages extra-hospitaliers destinés aux futurs médecins, les généralistes devant constituer le pivot de l’offre de soins, comme le prévoit la loi HPST.
Ces stages permettront d’offrir à ces futurs médecins une formation clinique diversifiée qui, j’en suis sûre, concourra au développement de l’offre de soins de premier recours, à laquelle nous sommes attachés, et qui s’avère indispensable.
La mission « Santé » a aussi un rôle essentiel à jouer en matière de solidarité nationale, puisqu’elle finance l’indemnisation des personnes victimes de l’amiante et l’accès aux soins des personnes défavorisées. L’augmentation de 45 millions d’euros des crédits correspondants, qui permet de rapprocher les crédits alloués du montant effectivement dépensé, traduit la continuité de l’effort du Gouvernement pour améliorer la sincérité budgétaire quant aux sommes destinées à financer l’aide médicale d’État.
La mission « Santé » est marquée par les réformes structurelles, toujours issues de la loi HPST, sur laquelle nous avons travaillé de nombreuses semaines au printemps et au début de l’été 2009. Je pense naturellement, comme mes collègues, à la création des agences régionales de santé, lesquelles doivent permettre de renforcer l’efficacité du système de soins en regroupant, dans chaque région, l’ensemble des compétences nécessaires à la coordination de la politique nationale de santé et à son adaptation au plus près des besoins de nos concitoyens. Madame la ministre, pouvez-vous nous assurer que les agences régionales de santé seront bien opérationnelles au premier semestre 2010 ? Leur mise en place à cette échéance nous paraît essentielle.
Je souhaite conclure en rendant hommage au Président de la République et au Gouvernement pour les dernières mesures qu’ils ont prises dans le domaine de la santé.
Je pense tout d’abord au plan cancer II, présenté le mois dernier, qui couvrira la période 2009-2013. Inspiré par le rapport du professeur Jean-Pierre Grünfeld, ce plan fondamental à nos yeux va consolider les acquis du plan 2003-2007 dans le domaine du dépistage et de la qualité des soins. Notre collègue François Autain a d’ailleurs souligné que ce premier plan portait enfin ses fruits en matière de prévention du cancer du sein.
Le plan cancer II se fixe également pour objectif plus ambitieux de réduire les inégalités face au cancer et de faire de la vie après le cancer, aspect qui n’avait pas été véritablement abordé jusqu’à présent, un axe à part entière de la lutte contre cette maladie.
Au-delà de la recherche, de l’observation, de la prévention et du dépistage, ce plan comprend également un volet relatif aux soins apportés aux malades, et à la vie pendant et après le cancer.
Pouvez-vous nous préciser, madame la ministre, quel sera le montant des crédits alloués à ce plan cancer II ?
Tous les jeunes, et tous les parents que nous sommes, se réjouissent également de la mesure qui vise à doubler l’aide à l’acquisition d’une assurance complémentaire de santé pour les moins de vingt-cinq ans, en la faisant passer de 100 euros à 200 euros. Cette décision est conforme à l’engagement pris par le Président de la République le 29 septembre dernier, lors de la présentation du « Plan Jeunes ». Mais cette mesure, pour être efficace, doit être identifiée, c’est-à-dire que les jeunes doivent être au courant de ces aides. J’aimerais donc, madame la ministre, connaître les moyens d’information que vous comptez mettre en œuvre pour porter cette mesure à la connaissance des intéressés.
Étant donné l’importance et la pertinence des actions prévues par la mission « Santé », le groupe UMP votera les crédits qui lui sont destinés. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)