M. le président. L'amendement n° 140, présenté par Mmes Jarraud-Vergnolle et Le Texier, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mmes Demontès, Campion, Alquier, Printz, Chevé et Schillinger, MM. Le Menn, Jeannerot, Godefroy, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La Haute Autorité de santé tient à jour, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'État, une liste des médicaments classés selon le niveau d'amélioration du service médical rendu pour chacune de leurs indications. »
La parole est à Mme Annie Jarraud-Vergnolle.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. Cet amendement vise à traduire une des préconisations du rapport de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, sur « la prescription, la consommation et la fiscalité des médicaments », préconisation adoptée par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, le 30 avril 2008.
L’appréciation de l’amélioration du service médical rendu, l’ASMR, détermine le niveau de prix du médicament, mais aussi l’admission au remboursement pour les médicaments qui, sans apporter d’amélioration du service médical rendu, permettent une économie dans le coût du traitement médicamenteux.
Dans un but d’aide à la décision ainsi que de transparence et d’analyse des remboursements de médicaments selon l’amélioration du service médical rendu, il est donc souhaitable d’établir une liste des médicaments classés par niveau d’ASMR.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Madame Jarraud-Vergnolle, votre demande est à mon sens largement satisfaite puisque la Haute Autorité de santé publie tous ses avis sur son site. Certes, les médicaments ne font pas l’objet d’une hiérarchisation. Apporterait-elle un plus en matière d’information ?
M. François Autain. Bien sûr !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. M. Autain en est convaincu.
J’admets que cela oblige le consultant du site à l’établir lui-même. Mais il a tous les éléments pour le faire. En fait, cet amendement vise à faciliter la tâche de celui qui cherche à s’informer.
M. François Autain. Pas seulement !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Je laisse à Mme la ministre le soin d’apprécier l’intérêt d’une telle mesure. Je considère pour ma part, comme la commission des affaires sociales, que cet amendement est très largement satisfait. On peut toujours aller plus loin, mais eu égard à la situation dans laquelle se trouve notre système d’assurance maladie, il y a sans doute des mesures plus importantes à prendre dans l’immédiat.
M. François Autain. Il n’y a pas de petites mesures !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Comme vient de l’indiquer M. le rapporteur général, tous les éléments sont, en toute transparence, mis à la disposition des professionnels de santé qui ont accès, sur le site de la Haute Autorité de santé, à des fiches techniques avec l’évaluation de l’ASMR de chaque produit.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens à vous rendre attentifs à une conséquence perverse de l’effet de liste. Il est bien évident que, si cet amendement était adopté, la prescription sera poussée vers le niveau d’ASMR le plus performant.
M. François Autain. Et alors ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Or, et je suis désolée de vous le dire, pour traiter un malade qui souffre par exemple d’hypertension, il n’est pas nécessaire de prescrire le médicament dont l’ASMR est la plus performante.
M. François Autain. Pourquoi !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il faut apprécier les effets secondaires, le rapport entre le bénéfice et le risque. On peut parfaitement traiter une hypertension avec des médicaments qui ne sont pas les plus performants en termes d’ASMR.
M. Gilbert Barbier. Il faut aussi tenir compte du coût du médicament.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je suis contre cette préconisation obligatoire. Je considère que les médecins ont, après neuf années d’études pour les généralistes et davantage pour les spécialistes, le bagage nécessaire pour se repérer dans les fiches au demeurant extrêmement claires de l’ASMR. Je suis donc, en qualité tant de ministre de la santé que de professionnel de santé, absolument opposée à l’établissement d’une classification des ASMR.
M. Gilbert Barbier. Que l’on consulte les pharmaciens !
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Nous voterons cet amendement, car nous considérons que cette classification est un élément indispensable pour permettre au médecin d’établir une prescription en toute connaissance de cause.
Comme cela a été rappelé tout à l’heure, un médicament de niveau V, qui a une moindre efficacité, n’est pas obligatoirement moins cher que des médicaments de niveau I. Il est parfois beaucoup plus cher que des médicaments plus anciens et plus efficaces. On pourrait en trouver de nombreux exemples.
Il me paraît donc indispensable qu’un tel tableau soit mis à la disposition des médecins. C’est le cas en Allemagne et il ne semble pas que les malades et les médecins s’en plaignent. Peut-être n’est-ce pas pour cette raison, mais force est de constater que les Allemands consomment deux fois moins de médicaments que les Français.
Cette classification est un élément qui permettrait sans doute, parmi d’autres, de réduire la consommation de médicaments des Français. C’est la raison pour laquelle nous soutiendrons cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur Autain, permettez-moi d’apporter un exemple à l’appui de ma démonstration. L’ASMR du Plavix est supérieure à celle de l’aspirine. Or, dans la majorité des indications, l’aspirine est suffisante.
Monsieur Autain, je m’étonne qu’un médecin tel que vous fasse de semblables préconisations. J’ai l’impression que vous êtes inspiré plus par une vision dogmatique que par une vision pratique.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 239 est présenté par M. Le Menn, Mmes Le Texier et Jarraud-Vergnolle, MM. Cazeau, Daudigny et Desessard, Mmes Demontès, Campion, Alquier, Printz, Chevé et Schillinger, MM. Jeannerot, Godefroy, S. Larcher et Gillot, Mmes San Vicente-Baudrin et Ghali, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 343 est présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Pasquet, Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au II de l'article L. 162-17-3 du code de la sécurité sociale, après les mots : « un suivi périodique des dépenses de médicaments » sont insérés les mots : « et des dispositifs médicaux ».
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 239.
Mme Patricia Schillinger. Selon un avis du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie sur les dispositifs médicaux en date du 29 mai 2008, la variété et l’hétérogénéité des dispositifs médicaux présents sur le marché français réduisent la volonté de déployer des systèmes de surveillance économique de ce marché.
Pourtant, ce marché affiche certaines particularités : il représente 12 % de la consommation de soins et de biens médicaux – 19 milliards d’euros –, et connaît des taux de progression importants en volume, dans un contexte de vieillissement de la population nécessitant d’optimiser la prise en charge des besoins de santé.
Alors qu’il incombe aux fabricants et distributeurs de dispositifs médicaux de déclarer obligatoirement, auprès de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’ensemble des produits et prestations commercialisés ou inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables, il n’existe pas de mécanisme de suivi des dépenses de dispositifs médicaux. Cette absence participe à l’opacité de ce marché, ce qui nuit à une optimisation de la régulation des dépenses de santé.
La présente proposition a pour objet de mettre en place, sous l’égide du Comité économique des produits de santé, un suivi périodique des dépenses des dispositifs médicaux inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables dont l’optique et les audioprothèses, à l’instar de ce qui existe pour les médicaments.
Ce suivi des dépenses, aussi bien en valeur qu’en volume, portera sur le champ de l’ambulatoire, de l’hospitalisation complète et de l’équipement. Il intégrera également le prix de vente de chaque dispositif médical inscrit sur la liste des produits et prestations remboursables, la LPPR.
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 343.
Mme Annie David. Cet amendement vise à compléter les missions du Comité économique des produits de santé en lui confiant le soin d’organiser un suivi périodique des dépenses des dispositifs médicaux inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables, à l’instar de ce qui existe pour les médicaments.
Le marché de ces dispositifs représente 12 % de la consommation de soins et de biens médicaux, ce qui correspond à 19 milliards d’euros, et connaît par ailleurs, notamment en raison du vieillissement de la population, un taux de progression important en volume. Il s’agit donc d’optimiser la prise en charge des besoins de santé.
Malheureusement, alors qu’il incombe aux fabricants et distributeurs de dispositifs médicaux de déclarer obligatoirement, auprès de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’ensemble des produits et prestations commercialisés ou inscrits sur la liste des produits et prestations remboursables, il n’existe pas de mécanisme de suivi des dépenses de dispositifs médicaux.
Cela est regrettable et participe à l’opacité de ce marché, ce qui nuit à une optimisation de la régulation des dépenses de santé.
Cette analyse est par ailleurs confirmée par le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie qui, dans un avis rendu le 29 mai 2008, considère que « la variété et l’hétérogénéité des dispositifs médicaux présents sur le marché français réduisent la volonté de déployer des systèmes de surveillance économique de ce marché ».
Partant de ce double constat, nous proposons de mettre en place, sous l’égide du Comité économique des produits de santé, un suivi périodique des dépenses des dispositifs médicaux inscrits sur cette liste, à l’instar de ce qui existe pour les médicaments.
Ce suivi des dépenses, aussi bien en valeur qu’en volume, portera sur le champ de l’ambulatoire, de l’hospitalisation complète et de l’équipement. Nous proposons également que ce suivi intègre le prix de vente de chaque dispositif médical inscrit sur cette liste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous aurions pu gagner un quart d’heure dans le temps de l’examen de ce texte. Je constate qu’il y a encore de marges de progression dans l’évolution de notre règlement intérieur.
Ces deux amendements sont satisfaits par l’article L. 165-4 du code de la sécurité sociale.
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Lorsque des amendements sont déjà satisfaits par des textes en vigueur, est-il vraiment utile de les examiner en séance pour aboutir au constat qu’ils n’apportent rien ?
Je demande donc le retrait de ces deux amendements, non pour faire offense à leurs auteurs, mais parce qu’ils sont satisfaits.
Nous avons introduit la notion de l’irrecevabilité de certains amendements, notamment avec l’article 40 de la Constitution.
M. Jean-Pierre Godefroy. N’oubliez pas l’article 45 de la Constitution !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Lorsque des amendements sont satisfaits, de grâce, essayons de gagner du temps !
M. Guy Fischer. Il y a déjà les articles 40 et 45 de la Constitution, et vous voudriez en ajouter !
M. le président. Monsieur le rapporteur, c’est le rôle de la commission de déterminer si les amendements sont déjà satisfaits. En outre, aucun règlement n’interdit la présentation d’un amendement inutile.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cette demande est excellente, mais elle n’apporte rien, puisqu’elle est déjà satisfaite par les textes existants.
Je sollicite donc le retrait de ces amendements identiques, tout en excusant leurs auteurs de ne pas avoir eu une analyse plus fine, compte tenu de la complexité des textes. (Sourires.)
M. le président. Mesdames Schillinger et David, acceptez-vous de retirer vos amendements ?
Mme Patricia Schillinger. Oui, monsieur le président.
Mme Annie David. Oui, monsieur le président.
M. le président. Les amendements identiques n° 239 et 343 sont retirés.
L'amendement n° 284, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 28, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l'article L. 5122-6 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Toutefois, seules les campagnes publicitaires concernant les médicaments mentionnés à l'article L. 5121-2 peuvent s'adresser au public. »
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Monsieur le président, je voudrais attirer votre attention sur le fait que je n’ai pas retiré mon amendement ! Je n’ai pas pu m’exprimer.
Monsieur le rapporteur, si je peux souscrire à votre suggestion de prévoir une procédure de retrait quand il est patent qu’un amendement est déjà satisfait, en fait, j’y suis très réticent, car vous faites une telle utilisation de l’irrecevabilité sociale…
M. Nicolas About. Mais non !
M. Jean-Pierre Godefroy. C’est nouveau !
M. François Autain. … pour retirer tous les amendements qui vous gênent que, si l’on vous donnait cette possibilité, vous iriez bien au-delà des amendements qui sont satisfaits.
C’est pourquoi, dans ce domaine, il faut rester très prudent. Il y a finalement assez peu d’amendements qui sont déjà satisfaits.
J’en viens à la présentation de l’amendement n° 284.
M. le président. Je demande à chacun, y compris à M. le rapporteur, de faire un effort de concision.
M. Guy Fischer. Nous avons été provoqués, monsieur le président. Parlons de l’article 45 !
M. le président. Vous n’avez pas la parole, monsieur Fischer !
Veuillez poursuivre, monsieur Autain !
M. François Autain. Mon amendement concerne le sujet très important des infections génitales par papillomavirus, qui peuvent être à l’origine de cancers du col de l’utérus.
Vous savez qu’il existe un dépistage permettant d’éradiquer totalement ce risque. Dans les pays scandinaves où ce dépistage est utilisé, le cancer provoqué par ces papillomavirus n’existe plus.
On peut regretter que la France n’ait pas mis en œuvre un tel dispositif de dépistage comme elle l’a fait pour le cancer du sein et le cancer colorectal, parce que nous n’aurions sans doute pas eu besoin du secours du vaccin Gardasil et bientôt peut-être d’un autre vaccin.
Le vaccin Gardasil n’est malheureusement pas efficace à 100 % ; c’est là tout le problème. D’après les dernières analyses qui ont été effectuées aux États-Unis, cette efficacité serait bien inférieure à 70 %, ce qui veut dire que l’on prescrit un vaccin à ces femmes, qui sont souvent très jeunes, en leur conseillant en même temps de se faire surveiller par leur gynécologue, par mesure de précaution.
Mais on oublie de leur dire que, si l’on s’abstenait de les vacciner et que l’on se contentait d’assurer un dépistage, le résultat serait bien supérieur à celui que l’on obtient en ayant seulement recours au vaccin.
Le message est clair : un résultat à 90 % avec la surveillance gynécologique, et seulement à 70 % si l’on se contente de la vaccination,…
M. Nicolas About. On ne se contente pas de la vaccination !
M. François Autain. … d’autant que l’on ne sait pas du tout combien de temps la vaccination agit.
Donc, il y a là un véritable problème, qui n’a pas été suffisamment mis en lumière par les autorités sanitaires, ce que je regrette.
C’est la raison pour laquelle je déplore que l’on autorise la publicité pour ces vaccins. Même s’il est conseillé aux jeunes femmes de continuer à se faire examiner, cette partie du message n’est souvent pas reçue, et elles se font vacciner en pensant qu’elles sont protégées, alors qu’il existe un danger important.
À l’époque où ce vaccin a été mis sur le marché, la Commission de la transparence a dit qu’il avait une action modérée. Je trouve dommage que l’on ait dérogé à la disposition qui était prévue initialement, et je regrette que, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, un amendement de M. Vasselle ait étendu la possibilité de publicité pour ces vaccins.
M. le président. Mon cher collègue, veuillez conclure !
M. François Autain. D’ailleurs, le Haut conseil de la santé publique, qui s’est prononcé à cet égard, a émis un avis défavorable sur le fait que ces vaccins fassent l’objet d’une publicité.
C’est pourquoi, avec cet amendement, je demande simplement que cette possibilité soit supprimée.
M. le président. Mes chers collègues, veuillez respecter votre temps de parole !
Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous avions effectivement introduit, à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, une mesure tendant à encadrer les publicités sur les vaccins.
M. François Autain. Une mesure « permettant » ces publicités. C’est différent !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Vous considérez qu’elles ne sont pas encadrées, parce que vous dénoncez des dérives. Mais nous avions adopté des mesures dont nous pensions qu’elles auraient l’efficacité recherchée. Or nous nous interrogeons effectivement sur les conséquences qui pourraient résulter de certaines publicités.
M. François Autain. Nous nous interrogeons aussi !
M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. De ce point de vue, nous sommes interpellés par l’amendement de M. Autain
C’est l’une des raisons pour lesquelles la commission a émis un avis de sagesse sur cet amendement, en attendant les explications du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je répondrai tout d’abord que le droit communautaire ne permet pas d’interdire la publicité pour les campagnes de vaccination…
M. François Autain. Micro !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Excusez-moi. Le fait de ne pas m’entendre vous est insupportable, monsieur Autain. J’en suis ravie ! (Sourires.)
M. François Autain. L’inverse n’est pas forcément vrai !
M. le président. Ne jetez pas le trouble !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ne tombez pas dans la déréliction, vous en seriez malheureux !
Je disais que le droit communautaire ne permet pas d’interdire la publicité pour les campagnes de vaccination faites par l’industrie et approuvées par les autorités compétentes des États membres. Si votre amendement était adopté, nous ferions immédiatement l’objet d’une procédure, qui aboutirait à une condamnation en manquement par la Cour de justice des Communautés européennes et au paiement de fortes astreintes.
En revanche, je suis absolument d’accord sur le fait qu’il faut encadrer ces publicités et les surveiller. D’ailleurs, les campagnes faites par le laboratoire, dans le cadre de la spécialité pharmaceutique que vous avez nommée, ont considérablement changé de ton, à notre instigation et grâce à l’encadrement qui a été fait.
L’article du code de la santé publique que vous visez a été déjà modifié par la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, afin d’encadrer encore plus et de manière spécifique la publicité des vaccins, en obligeant les firmes à inclure les mentions qui ont été déterminées par la Haute autorité de santé en vue de garantir au mieux le respect des recommandations vaccinales.
Par ailleurs, des contrôles a priori sont effectués par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS, afin d’éviter toute dérive de la communication réalisée par les laboratoires.
Comme tous ceux qui s’intéressent à la santé publique, je suis une militante de la vaccination, qui est une démarche de santé publique particulièrement utile à une époque où un certain nombre de ligues – je n’ose pas dire de sectes – anti-vaccinales se manifestent, comme j’ai eu l’occasion de l’évoquer au cours de ce débat. Monsieur Autain, nous sommes au moins d’accord sur le fait que différents acteurs de la société civile doivent pouvoir s’exprimer de façon encadrée sur ces campagnes.
Il ne faut évidemment pas que le vaccin entraîne l’absence du dépistage du cancer du col de l’utérus. C’est la raison pour laquelle son dépistage organisé va être expérimenté dans le cadre du Plan cancer II, qui a été annoncé par le Président de la République.
M. François Autain. Voilà !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. À côté des grandes annonces, un certain nombre d’actions spécifiques ont été mises en place, et le dépistage organisé du cancer du col de l’utérus fait partie intégrante du Plan cancer II, rejoignant une préoccupation que vous avez souvent exprimée.
M. Gilbert Barbier. Écoutez le Président de la République !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement, compte tenu des conséquences globales qu’il risquerait d’entraîner. Je reste convaincue de la nécessité d’un encadrement, mais l’adoption de ces dispositions aboutirait à interdire la publicité pour toute campagne de vaccination.
M. François Autain. Pas toutes !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si cet amendement n’est pas retiré, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. Madame la ministre, j’ai constaté que nous avions un certain nombre de points de convergence, et je suis très satisfait d’apprendre que vous allez, dans le cadre de ce Plan cancer II, vous lancer dans une campagne de dépistage des cancers du col de l’utérus, provoqués notamment par les papillomavirus.
C’est une excellente nouvelle, mais elle rend caduque cette vaccination, puisqu’il est démontré qu’un dépistage bien conduit et généralisé – nous avons l’expérience des pays scandinaves – aboutit à l’éradication totale de ce cancer.
Le vaccin devient donc inutile. Or, puisque nous parlons des finances, je vous rappelle qu’entre 2007 et 2008 le coût pour la sécurité sociale s’est élevé à 537 millions d’euros, ce qui n’est pas négligeable.
Évidemment, ce n’est pas perdu pour tout le monde, puisque le laboratoire a vu son chiffre d’affaires pour ce vaccin augmenter, entre 2007 et 2008, de 295 %, ce qui s’est rarement vu dans le passé ! Cette augmentation a d’ailleurs un lien avec la publicité. Depuis que celle-ci a disparu, les ventes ont brutalement chuté, comme si les besoins avaient tout à coup diminué. C’est bizarre !
M. François Autain. Donc, la publicité, chacun le sait, est un facteur favorable à l’augmentation des ventes. D’ailleurs, les laboratoires le savent bien et y ont recours.
Je voudrais maintenant vous répondre, madame la ministre, sur le droit communautaire.
Je n’ai pas eu le sentiment que, lorsque M. le rapporteur général a déposé son amendement, c’était sous la pression des autorités communautaires. Peut-être a-t-il agi de son propre arbitre – le connaissant, c’est ce que je pense – et estimé qu’il fallait élargir cette publicité aux laboratoires.
C’est pourquoi cet argument n’est pas recevable en la matière, et nous pourrions revenir à la législation antérieure sans encourir pour autant ces sanctions dont vous avez parlé.
Je suis heureux de constater que nous sommes d’accord sur les objectifs, et je déplore que nous ne nous entendions pas sur les moyens pour y parvenir.
C’est la raison pour laquelle je maintiendrai malgré tout mon amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Troendle, pour explication de vote.
Mme Catherine Troendle. En réponse à M. Autain, je ferai une remarque. J’ai été choquée par le message négatif qu’il a adressé à toutes ces jeunes filles qui se sont fait vacciner contre le cancer du col de l’utérus.
Ces jeunes filles – j’en connais beaucoup dans ce cas – ne se sont pas fait vacciner, me semble-t-il, parce qu’il y a eu beaucoup de publicité. Elles sont allées consulter leur gynécologue ou leur médecin de famille, il y a eu un échange et cela s’est fait dans une atmosphère de compréhension et dans un souci de responsabilisation.
Je ne peux pas vous laisser dire aujourd’hui que ce vaccin est inopérant et inefficace.
M. François Autain. Je n’ai pas dit cela !
Mme Catherine Troendle. Si, c’est ce que vous avez dit tout à l’heure, monsieur Autain !
Nous n’avons pas aujourd’hui suffisamment de recul et j’estime qu’une jeune fille vaccinée est certainement mieux protégée qu’une jeune fille qui fait un dépistage une fois tous les deux ans ou même une fois pas an…
M. François Autain. Non, c’est faux !
Mme Catherine Troendle. … car le cancer peut évoluer très rapidement. Si elle se fait dépister au mois de décembre alors que le cancer est avéré au mois de janvier, la situation peut être dramatique.
M. François Autain. Ce vaccin ne protège pas à 100 % !
Mme Catherine Troendle. Monsieur Autain, votre démarche n’est pas très loyale à l’égard de toutes ces jeunes filles qui ont pris leurs responsabilités. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
M. le président. La parole est à M. Paul Blanc, pour explication de vote.
M. Paul Blanc. Je partage tout à fait l’avis de ma collègue Catherine Troendle.
Monsieur Autain, ce n’est pas parce que l’on a fait un dépistage qui s’avère positif qu’il n’y a pas ensuite une thérapeutique…
M. François Autain. Bien sûr !
M. Paul Blanc. … et souvent une thérapeutique fort mutilante.
Si le vaccin peut protéger dans certains cas et si cette protection n’est pas absolue, ce n’est pas une raison pour le rejeter.