Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les enseignements artistiques participent de l’aménagement du territoire. Ils contribuent à la richesse de l’offre d’accès à la culture, aussi bien dans le domaine de la danse que dans ceux de la musique ou des arts graphiques.
Les bases de la réforme ont été jetées par la loi relative aux libertés et responsabilités locales, en 2004, qui confiait la responsabilité de ces enseignements aux collectivités territoriales, sans pour autant en définir précisément les tenants et les aboutissants.
De vives inquiétudes se sont immédiatement fait jour, principalement de la part des collectivités locales et des régions, mais aussi du monde associatif et des professionnels, à propos de la définition du périmètre des compétences et des destinataires des crédits de l’État. J’aurai l’occasion de revenir sur ce point.
Mes chers collègues, la réforme de l’organisation des collectivités territoriales est au cœur de nos préoccupations et, avec elle, la problématique des transferts de compétences de l’État vers ces collectivités.
Les transferts de crédits sont malheureusement rarement proportionnels aux besoins et il en va de même dans le secteur des enseignements artistiques. C’est la raison des réticences de certaines collectivités.
Je souhaite dire quelques mots sur les raisons du blocage de la réforme de 2004.
De l’eau a coulé sous les ponts sans que la situation se clarifie et que les décrets d’application soient publiés. Sur le terrain, seules deux régions ont pu procéder à des expérimentations. Les autres ont réalisé des études d’impact, exprimé haut et fort leur refus de prendre en charge la totalité du financement du CEPI et, surtout, demandé une concertation préalable entre les collectivités locales et l’État. Leur requête est restée lettre morte.
Cette situation tendue a conduit à la publication du rapport d’information de notre collègue Catherine Morin-Desailly en juillet 2008. Dans cette publication, conçue pour tracer des pistes de sortie de crise, les raisons du blocage sont exposées sans périphrases et la nécessité pour l’État de donner un « coup de pouce » financier est réaffirmée.
Qui plus est, l’éducation et les enseignements artistiques y sont présentés dans toute leur noblesse en termes de choix de société et d’aménagement territorial. Ce rapport d’information se veut un bilan d’étape de l’application du volet consacré par la loi de 2004 aux enseignements artistiques.
Ses objectifs sont louables : démocratiser l’accès à la culture et aux disciplines artistiques, qu’elles soient pratiquées à titre amateur ou professionnel, notamment en valorisant l’orientation vers les métiers de la culture, mais aussi grâce à la mise en place d’outils de coordination des actions propices au partenariat entre collectivités publiques et acteurs privés, ou encore par une valorisation statutaire.
Les conditions du succès de la réforme envisagée dans ce rapport sont essentiellement d’ordre financier et méthodologique : expérimentations régionales, clarification des débouchés professionnels des formations artistiques, gouvernance régionale des enseignements ou encore coopération intercommunale.
Permettez-moi d’insister sur la nécessaire coordination des actions artistiques et culturelles au sein de nos territoires. Elle est cruciale à mes yeux. En effet, respecter les équilibres entre privé et public, c’est par exemple renforcer les partenariats entre les conservatoires et le secteur associatif, amplifier largement l’effort de formation et assurer la représentation des acteurs du secteur privé dans la commission régionale des enseignements artistiques. Chacun des acteurs – employeurs, enseignants, artistes – a son mot à dire.
Ces changements garantiraient un meilleur accès pour tous à une offre large de pratiques artistiques, y compris les plus innovantes, celles qui sont liées aux nouvelles technologies ou encore, pour ne citer qu’un exemple de champ disciplinaire, au domaine des musiques actuelles.
Depuis 2008, les questions du pilotage et du transfert des crédits restent pourtant sans réponse : qui, des régions ou des communes, exercera la compétence en matière d’enseignement artistique ? S’agira-t-il des unes, des autres ou bien encore des deux à la fois ?
L’Association des régions de France accepte un pilotage au niveau régional, mais avec un transfert de la mise en œuvre aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale.
C’est d’ailleurs pour trancher cette question une fois pour toutes devant le Parlement que vous avez déposé le 24 juillet dernier, chère Catherine Morin-Desailly, votre proposition de loi n° 588 rectifié. Dans votre texte, de nombreuses dispositions méritent mieux que les réticences du Gouvernement.
Vos recommandations sur l’éducation artistique et l’orientation professionnelle, notamment, sont particulièrement précieuses. La question de l’orientation est fondamentale pour la formation des futurs artistes et enseignants. Jusqu’à présent, seuls les élèves les plus doués ou bénéficiant d’un environnement familial favorable pouvaient envisager de faire de leur passion et de leur talent leur métier. Demain, peut-être, chacun pourra prétendre au droit d’être orienté dans son parcours artistique et, ainsi, choisir en connaissance de cause entre la pratique en amateur et le cadre professionnel.
En termes d’emploi, poser la question de l’orientation, c’est aussi s’intéresser aux débouchés professionnels : dans le CEPI, un module traite justement des métiers culturels dans toute leur diversité, rompant ainsi avec le mythe du jeune virtuose, qui était jusqu’à aujourd’hui la seule issue honorable pour un élève de conservatoire.
Pourquoi un jeune pianiste ne pourrait-il pas se réaliser professionnellement en tant que programmateur de festival, disquaire ou encore administrateur d’orchestre ? Cela suppose de ménager le temps nécessaire à l’orientation. À l’heure où les professionnels du spectacle connaissent les difficultés que l’on sait, le fait de créer un cycle d’orientation professionnelle serait une initiative salutaire.
Dans cette même logique, l’harmonisation des diplômes pourrait contribuer à rétablir l’égalité des chances dans un secteur qui se complaît trop souvent dans l’élitisme. Actuellement, chaque conservatoire classé par l’État délivre son propre diplôme, dont la valeur est principalement liée à la réputation de l’établissement.
Le CEPI déboucherait sur le diplôme national d’orientation professionnelle, permettant enfin de gommer les inégalités territoriales. En effet, on sait bien qu’il vaut mieux, par exemple, apprendre la musique à Lyon qu’à Toulouse !
À l’heure où l’État s’attache à restructurer l’enseignement artistique supérieur, à quoi cette réforme servira-t-elle si l’on ne crée pas un diplôme ouvrant la voie aux nouveaux cursus et diplômes supérieurs, tout en garantissant une parfaite transparence des critères d’accès et des prérequis ?
L’affirmation de la vocation première des conservatoires, en ce qui concerne la formation des amateurs, est aussi importante. La dénomination de « cycle d’orientation professionnelle », ou COP, permet, plus que celle de CEPI, de mettre en avant le terme « orientation », clairement énoncé.
Par ailleurs, la création d’une commission régionale des enseignements artistiques doit absolument être encadrée par la loi, de telle sorte qu’elle soit pourvue des prérogatives suivantes : négocier et déterminer l’organisation du COP, définir les contributions financières par voie de convention avec les collectivités ou encore avec l’État.
Celui-ci réapparaît ainsi comme acteur. Dans le texte initial, les régions devaient s’arranger seules, alors que l’État est assurément le mieux placé pour prendre les initiatives de certification.
Avant de conclure, je voudrais préciser que je partage certaines inquiétudes des régions. Pour les départements, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale, la proposition de loi de notre collègue ne présente que des avantages. Pour les régions, même si la transformation du CEPI est susceptible de simplifier les choses, il faudra être vigilant quant à l’augmentation des volumes horaires prévus initialement.
L’actuelle évaluation des coûts devra être ajustée pour que les crédits transférés couvrent effectivement les dépenses provoquées par le pilotage et l’organisation du diplôme.
Je tiens à souligner que l’avis réservé des régions est d’autant plus justifié que cette réforme est une fausse décentralisation, l’État n’ayant jamais exercé cette compétence : s’il contrôle les schémas pédagogiques et le classement des conservatoires, ce sont bien les collectivités gestionnaires qui en assurent la bonne marche et en supportent l’essentiel des dépenses : de 75 à 95 %.
Votre texte, ma chère collègue, s’il est mis à l’ordre du jour du Sénat et adopté, permettra de lever les blocages dans la mesure où les régions ne seront plus contraintes à l’action, mais engagées à piloter la concertation et à passer des conventions, si elles le souhaitent, avec les autres collectivités.
Une ombre persistera pourtant au tableau, car seules les régions volontaires avanceront et financeront le COP au-delà des crédits transférés. Les autres pourront se contenter de reverser ces crédits aux conservatoires. De fait, les collectivités gestionnaires continueront d’agir selon leurs possibilités et les disparités territoriales que la loi était censée résoudre subsisteront. Mais restons optimistes : avec le temps, des améliorations pourront être recherchées et trouvées.
La réforme des enseignements artistiques doit être engagée. Le statu quo conduirait à une profonde régression et mettrait les collectivités en grande difficulté face à l’opinion publique. Passer en force pour imposer une réforme à des collectivités récalcitrantes accentuerait le gâchis.
Suivre les préconisations esquissées par notre collègue permettrait une sortie de crise attendue depuis cinq ans. Pour mieux franchir le cap, il me semble que cela peut attendre quelques mois de plus, sachant que le rapport a été rendu il y a déjà quinze mois !
À partir d’avril 2010, la proposition de loi de Mme Morin-Desailly pourrait être considérée pour ce qu’elle est et examinée sereinement par le Parlement, et non pas exploitée à des fins exclusivement politiciennes, voire électoralistes.
Monsieur le ministre pouvez-vous prendre cet engagement devant nous ? (Applaudissements sur les travées du RDSE et de l’Union centriste. – M. Jean-Luc Fichet applaudit également.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Maryvonne Blondin.
Mme Maryvonne Blondin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a posé, dans ses articles 101 et 102, les principes de la répartition des responsabilités sur le volet « enseignements artistiques », domaine si fondamental à l’épanouissement des individus et au développement du « vouloir vivre ensemble ». Mais elle est restée au milieu du gué, ce qui a entraîné les situations de blocage que l’on connaît et qui viennent d’être évoquées. Qu’il me soit donc permis de remercier à mon tour notre collègue Catherine Morin-Desailly d’avoir relancé ce débat.
Je voudrais axer mon propos sur le rôle respectif de l’État et des collectivités territoriales, en les illustrant par des exemples tirés de mon département, le Finistère, et de ma région, la Bretagne.
Cela a été rappelé, l'éducation nationale est le premier acteur concerné. À cet égard, je citerai, moi aussi, le Président de la République, ce qui m’arrive tout de même rarement ! (Exclamations amusées.)
Mme Françoise Laborde. Voilà qui est surprenant !
M. Ivan Renar. Vous pastichez la droite, ma chère collègue !
Mme Maryvonne Blondin. Dans son discours sur la réforme du lycée, il a ainsi déclaré : « Le devoir de l’école est de transmettre à chacun notre patrimoine commun, qui est fondamentalement culturel. […] Dans le lycée de demain, l’art et la culture feront partie de la vie quotidienne des élèves […] » Il a en outre précisé : « La part des enseignements et des activités artistiques ou culturelles au lycée est aujourd'hui, disons-le, scandaleuse. »
Vous-même, monsieur le ministre, avez affirmé ce matin devant notre commission de la culture qu’il s’agissait de l’un des grands enjeux de demain.
Nous avons tous conscience ici du peu de considération accordé à l'enseignement des disciplines artistiques, très souvent relégué en fin de journée et dispensé dans des conditions assez déplorables.
Dans le même discours, Nicolas Sarkozy a également souhaité la désignation, dans chaque lycée, d’un « référent culture », choisi parmi les professeurs, chargé des relations de l’établissement avec le monde culturel environnant.
Monsieur le ministre, si l’on ne peut qu’approuver ces engagements, qu’en est-il de la réalité des moyens qui y sont affectés ? Comment créer de nouvelles responsabilités au sein du lycée si le nombre d’enseignants diminue ? L’éducation nationale annonce, en effet, à chaque rentrée, de nouvelles suppressions de postes et une diminution constante des places offertes au CAPES.
Pour étayer mes craintes, je continuerai de citer le Président de la République, qui a indiqué qu’il demandait à son ministre de l’éducation nationale d’étudier la possibilité de projeter des films dans les lycées professionnels, l’État assumant le financement de ces projections « s’il le faut ».C’est ce « s’il le faut » qui m’inquiète ! On ne peut se contenter d’une telle approximation, d’autant que le projet de loi de finances pour 2010 prévoit une baisse, à hauteur de 50 % dans le premier degré et de 14 % dans le second degré, des moyens de fonctionnement destinés à financer les actions pédagogiques et les partenariats dans les domaines artistique et culturel.
Au final, il est légitime de s’interroger sur la réalité des engagements de l’État pour le développement de l’art et de la culture dans les établissements scolaires. À l’évidence, les paroles sont belles, mais l’air est trop connu et la chanson est bien triste ! Les moyens ne sont pas à la hauteur de l’ambition affichée par le Gouvernement.
Il s’agit pourtant d’une question capitale, car c’est dans le cadre du milieu scolaire que les inégalités sociales en termes d’accès à la culture doivent être corrigées.
La mission commune d’information sénatoriale sur la politique en faveur des jeunes, à laquelle j’ai participé, a fait apparaître, dans son rapport, la nécessité de prendre en compte toutes les compétences de chaque élève « pour mettre un terme aux sorties du système éducatif sans aucun diplôme, certification ou attestation ». Or les aptitudes artistiques font partie de ces compétences susceptibles de révéler des élèves qui ne s’illustrent pas dans les matières traditionnelles. Il faut sortir de la culture linéaire du diplôme et permettre aux élèves les moins « scolaires » d’acquérir d’autres compétences.
« C’est l’éducation culturelle qui apprend à travailler efficacement ensemble dans le respect et la compréhension […] L’éducation artistique donne aux jeunes le courage de franchir les frontières et de développer pleinement leur personnalité, et pas seulement leurs talents intellectuels. L’éducation dans une société démocratique est intrinsèquement liée à ces qualités. » Ce n’est ni un ministre de l'éducation nationale ni un chef d'État qui s’est exprimé ainsi ; c’est une chef d’entreprise autrichienne, Monika Kircher-Kohl.
Dans son rapport du 9 juillet dernier, établi au nom de la commission de la culture, de la science et de l’éducation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Christine Muttonen écrit ceci : « Les établissements d’enseignement doivent mettre sur pied des projets internationaux de coopération dans le domaine de l’éducation culturelle […] Les États membres doivent soutenir les établissements d’enseignement dans ces projets par des actions de sensibilisation [ou] l’octroi de financements[…] »
Elle recommande par ailleurs aux responsables du PISA, le programme international pour le suivi des acquis des élèves, mené par l’OCDE, d’inclure « le sens civique » et « les compétences créatives » dans le champ d’évaluation des élèves.
La mission d’éducation culturelle et artistique relevant de la responsabilité de l’État, le rôle de celui-ci en la matière est plus que jamais à l’ordre du jour. L’efficacité de son action sera d’autant mieux garantie qu’il pourra compter sur le relais des collectivités territoriales, dont la proximité est un atout pour démocratiser l’accès à la culture.
Cela a été dit à plusieurs reprises, les collectivités territoriales ont une implication très forte dans le domaine de l’enseignement artistique. Il est, dès lors, incompréhensible que la loi de 2004 se soit contentée d’affirmer le rôle respectif des régions, des départements et des communes, sans préciser la clé de répartition des financements entre ces collectivités.
Le Finistère a choisi de s’investir avec force sur cette question, bien que, je le rappelle, il ne s’agisse pas d’une compétence obligatoire du département. Mais c’est ce dernier qui, par sa connaissance du territoire et sa proximité, est le seul à même d’assurer la cohérence d’une pratique culturelle adaptée et de garantir l’accès de tous à la culture. Telle est bien l’ambition du schéma de développement des enseignements artistiques mis en place dans le Finistère.
Ainsi, un état des lieux des enseignements artistiques a été réalisé en 2007. En concertation avec les acteurs locaux, une définition des différents niveaux d’écoles a été établie, entraînant, bien entendu, des modalités d’attribution financières spécifiques et des primes données au regroupement intercommunal. Les établissements sont ainsi répartis en trois niveaux d’intervention, selon qu’ils ont un rayonnement local, intercommunal ou départemental ; la loi de 2004 impose au département d’introduire un volet « art dramatique et arts du cirque » dans son schéma de développement des enseignements artistiques.
Le Finistère a adopté le sien en janvier dernier, le décret afférent étant enfin paru. Bénéficiant d’une bonne audience, le document commence à remplir ses objectifs : garantir l’accessibilité des enseignements artistiques au plus grand nombre, en améliorant la complémentarité des offres d’enseignements, en dynamisant le secteur et en fédérant l’ensemble des acteurs locaux.
Dans le cadre de ce schéma, le département affiche également son ambition de promouvoir le rôle des pratiques artistiques amateurs dans le développement culturel local, en réaffirmant le caractère prioritaire de cette mission. L’enjeu est important, car il s’agit de toucher le public le plus large possible et de favoriser les passerelles entre les pratiques amateurs et l’enseignement académique.
En décembre 2008, alors que de nombreuses associations s’inquiétaient d’un projet de réglementation des pratiques amateurs dans le cadre du code du travail, j’avais interpellé votre prédécesseur, monsieur le ministre, sur les risques que présenterait une telle mesure. Je rappelle à cet égard l’importance de la culture et de l’identité bretonne, dont les pratiques amateurs sont le terreau. Pour le seul secteur de la musique, du chant et de la danse en Bretagne, ce sont 40 000 à 50 000 personnes, professionnels ou amateurs bénévoles, qui se mobilisent régulièrement.
En réponse à ma question sur le projet de réglementation, Mme Albanel avait précisé : « À cet égard, la voie législative n’apparaît pas adaptée à la diversité des situations et ce sont donc des pistes alternatives, de nature contractuelle, qui seront explorées avec les collectivités territoriales, les professionnels et les artistes amateurs. » J’attends toujours cette exploration concertée !
Pour donner la mesure de l’enjeu, je citerai l’action des deux grandes fédérations de la culture bretonne. Par le biais d’une convention conclue avec le conseil général, elles mènent des actions de sensibilisation et de découverte auprès des scolaires et d’un public plus large, ou encore un accompagnement dans la démarche de création, de diffusion des productions, sans oublier la transmission des savoirs par la formation dispensée aux jeunes dans tout le département.
L’une d’elles, « Musiques et danses en Finistère », propose, en outre, un plan de formation continue non diplômante à destination des enseignants, artistes amateurs et animateurs culturels. Il s’agit d’un outil indispensable à la structuration pédagogique de l’enseignement sur notre territoire. Voilà bien un exemple de collaboration réussie !
Monsieur le ministre, mes chers collègues, j’évoquerai maintenant le niveau régional, au travers d’une expérimentation qui est en cours.
En Bretagne, il existe quatre écoles d’arts plastiques à rayonnement régional, dont deux dans le Finistère. Celles-ci ont décidé, à titre expérimental, de se réunir en un seul établissement public de coopération culturelle. Lassées d’attendre la publication du décret d’application, elles ont pris les devants, et la structure est pratiquement opérationnelle. Ce décret – il aurait été signé la semaine dernière, mais le conditionnel ici s’impose – doit préciser les conditions dans lesquelles les établissements d’enseignement supérieur d’arts plastiques sont autorisés à délivrer les diplômes nationaux.
Le projet est soutenu par la direction régionale des affaires culturelles, mais aussi par le conseil régional, qui avait déjà affiché sa volonté de considérer les écoles supérieures d’arts de Bretagne comme l’une des priorités de la politique culturelle régionale. Cet EPCC prendra en charge, avec l’appui des ministères de la culture et de l’enseignement supérieur, les cycles d’enseignement supérieur LMD.
Certes, l’ouverture et le dialogue entre ces écoles existaient bien avant ce rapprochement puisqu’elles avaient l’ambition de développer les partenariats culturels, économiques, universitaires, pour créer une dynamique dans les territoires.
La coopération entre les collectivités territoriales, avec l’appui de l’État, a constitué la seule solution envisageable pour la survie des filières culturelles et artistiques supérieures dans les territoires où elles sont implantées.
La région apparaît donc comme un échelon de coordination pertinent, car c’est sur le mode du dialogue et dans le respect du libre arbitre de chaque collectivité que s’articule le projet. Dans ces conditions et dans cet esprit, le fait de désigner la région comme chef de file me paraît tout à fait concevable.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, le débat que nous avons aujourd’hui se heurte, comme tant d’autres, au problème de la réforme des collectivités territoriales et des finances locales. Aujourd’hui, nous parlons des enseignements artistiques, mais qui, demain, assumera cette compétence ? Et tout ce réseau de coopération, de développement, de formation et de transmission risque de s’écrouler si les différentes collectivités ne sont plus en mesure d’assurer le financement de ce volet. Leur capacité en la matière est en effet appelée à être dramatiquement réduite par les décisions qui s’annoncent, auquel cas elles se recentreront sur les compétences qui leur sont exclusivement dévolues.
Monsieur le ministre, nous espérons vivement que les collectivités territoriales bénéficieront des transferts financiers attendus pour avoir, enfin, les moyens d’agir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Frédéric Mitterrand, ministre de la culture et de la communication. « Tu me dis, j’oublie. Tu m’enseignes, je me souviens. Tu m’impliques, j’apprends. » Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, madame Morin-Desailly, cette maxime de Benjamin Franklin que j’affectionne particulièrement me semble emblématique de la question qui nous occupe aujourd’hui, celle des enseignements artistiques dispensés dans nos conservatoires, sur tous nos territoires.
Tout art, chacun en est convaincu ici, nécessite une initiation, non seulement pour être saisi dans ses beautés, dans ses nuances, dans sa profondeur, mais aussi pour être pratiqué selon ce que l’on appelle, précisément, « les règles de l’art ».
C’est sur cette évidence qui, comme toutes les évidences, a besoin d’être répétée, ou en tout cas rajeunie, que je fonde ma volonté de faire de la transmission l’une des priorités de mon action à la tête du ministère de la culture et de la communication. L’idéal de la transmission doit devenir une réalité non seulement pour ce qui concerne l’accès aux œuvres et la mise en perspective historique, mais aussi pour tout ce qui touche à l’initiation aux pratiques artistiques.
Ces trois exigences, de l’accès, de la culture générale et de la pratique, sont, bien sûr, étroitement liées. Car la pratique d’un art est, bien souvent, la meilleure porte d’entrée pour en comprendre les tenants et aboutissants, pour en découvrir les arcanes.
La pratique est, sans doute, pour reprendre le mot de Benjamin Franklin, ce qui véritablement « implique » le mieux un élève. Et quand bien même elle n’aboutirait pas nécessairement à faire advenir un nouveau Mozart ou un nouveau Gérard Philipe, l’essai de création a souvent été, dans l’histoire, le premier pas des connaisseurs.
La pratique est un peu, toutes choses égales par ailleurs, à l’image des approches « comportementales » prônées par certains psychologues, une manière d’entrer pleinement dans un sujet, de déclencher un changement d’horizon et une ouverture véritable. Vous connaissez tous le mot de Pascal : « Mettez-vous à genoux et vous croirez ». J’ai envie de dire : pratiquez un art et vous deviendrez, a minima, des connaisseurs et des amateurs respectueux des vrais talents.
L’initiation à la pratique d’un instrument de musique, du jeu scénique ou de la danse n’est pas seulement la garantie d’un épanouissement personnel. Elle est aussi une manière d’élever le niveau d’attention aux arts de toute la société. Et cette disponibilité aux arts est, à mes yeux, indissociable de la santé d’une démocratie, parce que les arts aident chacun à se ménager son espace de recul et de réflexion, qui est évidemment aussi un espace de liberté.
Loin d’une « société du spectacle » fondée sur un consumérisme qui se nourrit de la passivité, les arts et leur pratique nous aident et nous ont toujours aidés à bâtir une démocratie ouverte et civilisée, une République dont l’un des piliers, moins visible que d’autres, mais néanmoins omniprésent, est la « culture » : le fait de développer ses talents, de les « cultiver », c’est-à-dire littéralement de ne pas les laisser en friche.
Ces principes généraux forts répondent à la volonté du Président de la République de remodeler profondément notre système d’enseignement, notamment dans le cadre de la réforme du lycée dont il a dessiné certaines grandes orientations le 13 octobre dernier, et qui se traduira et se traduit déjà par une place nouvelle accordée à la culture. Je pense en particulier à l’institution, ambitieuse et tellement attendue, d’une histoire des arts à l’école, à laquelle je travaille assidûment avec mon collègue Luc Chatel. Je vous rappelle que j’ai fait de la transmission, aussi bien dans les établissements scolaires que dans les conservatoires, une priorité de mon action au sein du Gouvernement.
C’est précisément cet apprentissage des pratiques artistiques dans les conservatoires qui nous réunit et nous intéresse aujourd’hui. Nos débats répondent aux incitations intellectuelles judicieuses fournies par les travaux conduits depuis plusieurs années, avec la qualité d’engagement que l’on sait, par Mme Morin-Desailly et qui ont abouti à la question orale qu’elle pose aujourd’hui au Gouvernement.
En la matière, à côté de notre travail avec l’éducation nationale, la politique du ministère de la culture doit reposer, bien évidemment, sur un partenariat solide et clarifié avec les collectivités territoriales.
Il est inutile, je pense, de vous faire un état des lieux de la question des enseignements artistiques dans notre pays. Ce thème a déjà été largement abordé.
Vous connaissez l’importance acquise en quarante ans par ce réseau, depuis l’impulsion donnée par Marcel Landowski en 1967, à tous les niveaux des collectivités. Quelques chiffres suffisent à l’illustrer : environ 150 000 élèves, répartis en un ensemble de 500 établissements, dont 283 conservatoires à rayonnement communal ou intercommunal, 106 conservatoires à rayonnement départemental, 42 conservatoires à rayonnement régional.
Il témoigne de l’ambition de l’État et des collectivités territoriales de favoriser l’accès du plus grand nombre à une pratique artistique, notamment musicale.
Vous savez comment, plus de vingt ans après le vote de la loi de 1983, qui transférait globalement aux collectivités les compétences dans les domaines de l’enseignement de la danse, de la musique et de l’art dramatique, de nouveaux besoins se sont, peu à peu, imposés. C’est, d’abord, celui d’une clarification d’un système devenu trop complexe à force d’interventions mal harmonisées jusqu’à la confusion. C’est, ensuite, la volonté d’une meilleure répartition d’un service qui, de facto, s’était surtout développé dans les communes, c’est-à-dire dans les réalités municipales très diverses et très contrastées de notre pays. C’est, enfin, la nécessité d’assurer la transition entre la pratique amateur et la formation professionnelle et de distinguer les cursus selon les finalités.
Il s’agit, tout en maintenant la possibilité de bénéficier d’un enseignement pour amateurs tout au long de la vie, de dessiner une voie, sinon royale, du moins simplement praticable pour les musiciens, comédiens et danseurs qui sont susceptibles et désireux de devenir un jour des professionnels dans leur activité artistique de prédilection.
La loi du 13 août 2004 sur la décentralisation a cherché à répondre à ces besoins en créant un schéma en quelque sorte idéal d’organisation et de répartition des compétences entre les différents niveaux de collectivités publiques.
Elle a posé, vous le savez, la configuration suivante : aux communes le « gros œuvre », pour ainsi dire, de l’initiation et des pratiques amateurs, un travail forcément très variable selon les villes engagées, mais qui devait être remis en cohérence au niveau des départements, dans les « schémas départementaux de développement des enseignements artistiques », adoptés par les conseils généraux ; à l’État l’enseignement supérieur – des établissements comme le Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris et celui de Lyon, par exemple – et, de manière plus générale, le contrôle pédagogique de l’ensemble des établissements.
En outre, la loi de 2004, tirant les conséquences des compétences de la région dans le domaine de la formation professionnelle, a chargé ces collectivités de prendre en charge précisément cet échelon intermédiaire de la formation artistique, ce « chaînon manquant » dont nous parlions, entre la simple initiation et la carrière professionnelle. Cette passerelle, vous le savez, c’est ce qu’on appelle le cycle d’enseignement professionnel initial, le CEPI. Il constitue bien, comme son nom l’indique, pour les élèves concernés, le stade initial de la professionnalisation et, en tout état de cause, un cycle de deux ans au cours duquel la motivation et les qualités artistiques des élèves sont mises à l’épreuve avant le « grand saut » dans la carrière.
C’était là le schéma idéal dessiné par la loi. Or vous savez ce qu’il advient souvent des plus belles constructions de l’esprit, de la République idéale de Platon ou de la Cité idéale de Fénelon dans le roman d’éducation qu’est Télémaque. Elles ne trouvent pas toujours, n’est-ce pas, une parfaite application dans la réalité…
En l’occurrence, il faut le reconnaître, les régions ont parfois hésité à se saisir pleinement de cette nouvelle compétence et, pour mille raisons qu’il serait trop long de détailler ici et maintenant, la situation a connu une forme indéniable de blocage.
J’ai envie de dire : « Enfin Mme Catherine Morin-Desailly vint ». (Mme Catherine Morin-Desailly sourit.) Car c’est grâce à vous, madame la sénatrice, et grâce à la commission de la culture du Sénat que le dialogue peut enfin être renoué.
L’immense travail que vous avez accompli et conduit sur le terrain, sans œillères ni préjugés, a abouti à un rapport remis le 24 juillet 2008, un texte d’une grande sagacité et d’une grande solidité qui a permis de poser les bases d’une nouvelle réflexion entre tous les acteurs.
De son côté, l’État, dès le 10 juillet 2008, pour répondre à la demande des collectivités, a réactivé le Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel et a mis en place, en son sein, un groupe de travail spécialement consacré aux enseignements artistiques spécialisés.
Le rapport sans concession que vous avez établi a exploré les causes du blocage et aidé chacun des acteurs à une prise de conscience lucide des problèmes. Il met en évidence ce qui manquait sans doute à la loi de 2004 : un consensus préalable autour du caractère prioritaire des enseignements artistiques en France, ainsi qu’une implication des élus dans un processus de réforme qui était fortement porté par les professionnels.
Les travaux du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel et notre débat d’aujourd’hui montrent que le message a été entendu. Il nous appartient toutefois de faire en sorte que cette prise de conscience se traduise, à moyen terme, par une prise de décision à partir des propositions qui sont désormais sur la table.
Madame Morin-Desailly, vous avez réaffirmé avec justesse les enjeux de ce chantier pour l’avenir : il s’agit de briser la glace de l’intimidation sociale – un thème qui m’est particulièrement cher –, qui éloigne encore trop souvent nos concitoyens des arts et de la culture.
Vous avez raison de souligner clairement le rôle primordial des conservatoires dans le développement de la pratique en amateur. Celle-ci doit être clairement leur première mission. Le débat sur les cycles d’enseignement professionnel initial a en effet confirmé, s’il en était besoin, que la tendance naturelle des établissements est de se focaliser sur le repérage de futurs professionnels, quand ceux-ci ne représentent qu’une petite minorité des élèves qu’ils accueillent.
L’objectif premier des conservatoires doit bien être de toucher un maximum d’élèves, notamment ceux qui sont le plus éloignés de l’offre culturelle, afin d’aider à l’avènement de cette « culture pour chacun » à laquelle je travaille. Ils doivent proposer des possibilités d’épanouissement aux amateurs, y compris adultes, et les encourager à développer les pratiques collectives. Sortir de ce mal bien français de la voie royale, dont l’étroitesse forcée étouffe trop de vocations et d’épanouissements artistiques et culturels : tel est bien l’enjeu.
Vous avez, madame la sénatrice, prôné à fort juste titre que l’on passe d’un système pyramidal, fondé sur l’idée d’une destination professionnelle obligée, à une logique d’aiguillage : substituer, à la « pensée unique » de la professionnalisation, la liberté et la souplesse de l’orientation.
Cette exigence d’orientation est d’ailleurs inscrite dans les exigences générales du Gouvernement en matière d’enseignement, et elle répond aussi pleinement aux compétences professionnelles qui sont celles des régions.
Réjouissons-nous donc que les CEPI puissent être changés en COP, sans qu’il s’agisse de convoquer de manière intempestive l’argot américain : un COP est simplement un cycle d’orientation professionnelle.
Il s’agit là, pour moi, d’une préoccupation essentielle et d’une responsabilité collective, celle de mieux maîtriser le flux des jeunes qui se dirigent vers les métiers du spectacle, celle aussi de mieux former ceux qui font le choix de ces parcours d’exception.
Mme Morin-Desailly a mis en lumière les principaux facteurs qui ont conduit au blocage.
S’agissant de l’estimation erronée des coûts de la réforme, des expérimentations menées dans le Nord-Pas-de-Calais et en Poitou-Charentes depuis 2004 ont permis de rectifier les erreurs et, par là, de dépassionner le débat.
Beaucoup de points ont fait l’objet d’un accord, notamment au niveau du conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, mais, si nous sommes réunis aujourd’hui, c’est notamment pour aborder une question cruciale qui reste en suspens, celle des crédits de fonctionnement, qui représentent actuellement près de 30 millions d’euros, soit, en moyenne, 9 % du budget global des enseignements artistiques spécialisés que l’État verse aux communes depuis 1983 pour contribuer au fonctionnement des conservatoires.
Ce versement ne correspond pas à une compétence identifiée. Alors que l’État n’est plus compétent dans le domaine des enseignements artistiques spécialisés depuis plus de vingt-cinq ans, il détient encore les crédits au lieu que ceux-ci soient directement à la disposition des collectivités territoriales qui exercent cette compétence.
La loi de 2004 prévoyait un transfert de ces crédits aux régions et aux départements, selon des clés de répartition fixées par les DRAC. Le rapport de Mme Morin-Desailly et les débats du conseil territorial des collectivités pour le développement culturel ont montré qu’il était indispensable de trouver une solution plus simple et plus lisible. Pourtant, aucun consensus n’a pu se dégager au cours des travaux des derniers mois, malgré la volonté très forte, je crois, des uns et des autres d’aboutir.
Nous avons devant nous trois solutions.
La première consiste à modifier la loi pour élargir aux communes la liste des collectivités attributaires des crédits de l’État qui transitent par les DRAC. Il s’agit donc de mettre fin à une situation où la loi n’est pas appliquée, car trop restrictive, en méconnaissance de la réalité des faits. Chaque DRAC pourra donc, en fonction des réalités locales, attribuer les crédits de l’État aux différentes collectivités en fonction de leur implication réelle.
La deuxième solution, c’est de transférer directement aux communes l’ensemble de ces crédits, c’est-à-dire de prendre acte de manière plus forte encore du fait que ce sont les communes qui créent et financent les conservatoires.
La troisième solution est de transférer les crédits aux régions, c’est-à-dire d’appliquer l’esprit de loi de 2004, et d’accompagner ainsi la mise en place des COP.
Dans ces deux derniers cas, les départements recevraient une contribution unique et forfaitaire correspondant à l’élaboration des schémas départementaux.
La première solution – jouer sur les trois acteurs territoriaux – présente l’avantage d’une grande souplesse et de l’adaptation aux réalités du terrain, mais elle a un inconvénient évident : elle risque de créer des inégalités entre nos territoires.
Le transfert aux communes présente l’intérêt d’épouser l’existant, de le dynamiser et de le mobiliser encore davantage, et donc de renforcer les opérateurs, même s’il sera sans doute moins efficace pour maîtriser le développement de nouveaux COP.
Je rappelle que l’Association des régions de France s’est prononcée officiellement pour cette solution, par une lettre adressée au ministre de la culture et de la communication le 30 juin 2009.
Le transfert aux régions, plus ambitieux, est défendu par la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture et par l’Association des maires de grandes villes de France. C’est, vous le savez, la solution que développe et défend Mme Morin-Desailly dans sa proposition de loi.
Cette solution présente un avantage évident : une répartition de l’offre plus homogène et plus égale, mais aussi plus maîtrisée et plus coordonnée. En outre, elle correspond aux compétences des régions en matière de formation professionnelle et d’emploi.
Il a certainement été utile que nous ayons pris le temps nécessaire à la réflexion, car, quelle que soit l’issue de cette réforme, nous serons passés d’une vision pyramidale de l’enseignement spécialisé, de l’amateur au grand interprète, qui était celle des années soixante, à la mise en place de parcours diversifiés : d’une part, ceux des amateurs, pour qui la pratique d’un art est un vecteur d’épanouissement magnifique ; d’autre part, ceux des artistes, dont il s’agit d’accompagner l’entrée dans une carrière difficile et exigeante.
Nous avons aujourd’hui, grâce à ce travail de décryptage, une vision claire des trois solutions possibles. Chacune implique une modification législative et certaines d’entre elles, une modification de la répartition des compétences dans les différentes collectivités territoriales par rapport à la loi de 2004.
Il est donc certain que cette réforme ne peut être isolée du chantier d’ensemble de réforme des collectivités territoriales qui attend le Gouvernement et les élus.
Un premier projet de loi a été présenté au conseil des ministres le 21 octobre. Un second projet de loi sera présenté par mon collègue Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.
Le débat législatif n’est pas encore engagé. Il me semble donc de bonne administration d’être attentif à la mutation prochaine de notre carte des territoires avant de se lancer dans la réforme et d’opter pour l’une ou l’autre des solutions envisagées.
Ce temps de l’harmonisation nécessaire ne sera pas une attente supplémentaire ; c’est seulement un préalable imposé par la réalité, et ce temps supplémentaire peut être encore employé au débat sur une alternative complexe afin de tirer le meilleur parti du travail remarquable que vous avez réalisé, madame Morin-Desailly. Ce n’est donc en aucune manière un délai dilatoire, mais le temps nécessaire et obligé de l’ajustement.
Une certitude s’impose : je peux vous assurer de ma volonté de régler ces questions, en lien étroit avec mon collègue chargé de l’intérieur, dans le cadre de cette réflexion d’ensemble qui s’ouvre sur les compétences des collectivités territoriales.
Sachez que je suis particulièrement attaché à ce que nous aboutissions rapidement dans notre recherche de la solution la plus adaptée et, bien évidemment, à ce que nous ne perdions pas l’acquis des travaux et des échanges qui se sont tenus tout au long des derniers mois.
Je précise que, dans cette attente, l’État continuera évidemment en 2010 à verser ces crédits aux établissements, comme il a continué à le faire depuis 2004.
J’ai bon espoir que nous réussirons à brève échéance à mettre en place un système d’enseignement spécialisé qui satisfasse également les exigences légitimes des deux pôles en dialogue que sont les amateurs et les professionnels, ainsi que les prérogatives et les ambitions des collectivités territoriales.
Pour cela, nous aurons besoin de la sagesse pragmatique de Franklin, c’est-à-dire de savoir « impliquer » et nous impliquer. (Applaudissements sur les travées de l’UMP, de l’Union centriste et du RDSE, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste. – M. Ivan Renar applaudit également.)