M. le président. Nous allons maintenant procéder au débat interactif et spontané ; la durée en a été fixée à deux heures par la conférence des présidents.
Chaque sénateur peut intervenir pour deux minutes maximum.
S’ils sont sollicités, les membres de la mission commune d’information et le Gouvernement pourront répondre.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Je veux d’abord présenter à mes collègues des excuses pour ne pas avoir participé à la totalité d’un débat sans doute riche et passionnant, mais j’étais retenu par le déplacement du Président de la République s’exprimant sur les collectivités locales à Saint-Dizier.
Je ne suis pas le plus compétent du groupe UMP sur ces questions qui concernent la France ultramarine, mais le groupe a estimé qu’il n’était pas inutile que son président interroge la secrétaire d'État ou le rapporteur sur un sujet extrêmement technique – pardonnez-moi, je suis également membre de la commission des finances ! –, je veux parler du revenu supplémentaire temporaire d’activité.
À bien des égards, le RSTA, qui préfigurait le RSA, a contribué à régler la crise récente. Il apparaît cependant qu’il pourrait avoir des effets négatifs sur le revenu compte tenu de la fiscalisation dont il peut être l’objet et de son impact éventuel sur la PPE, la prime sur l’emploi. Je souhaiterais que Mme la secrétaire d'État puisse nous rassurer, car il s’agit d’un élément important du débat.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, vous avez raison de poser cette question. Je sais en effet quelles inquiétudes suscitent la mise en application du RSTA.
Le RSTA a été institué au moment de la crise. Dès le départ, il n’y a eu aucune ambiguïté de la part du Gouvernement sur le fait que le RSTA était un RSA adapté destiné à assurer un complément de revenus, mais qu’il s’agissait d’une prestation sociale.
À ce titre, le régime fiscal et social du RSTA a été aligné sur celui du RSA. Cela étant, se pose aujourd'hui la question de la PPE, question qui inquiète bon nombre de nos compatriotes.
Tous les efforts du Gouvernement sont actuellement concentrés sur la mise en application du RSTA. Je me suis moi-même rendue en Guadeloupe et suis intervenue auprès de la caisse générale de sécurité sociale pour m’assurer que, dès le mois de novembre, pour ce département comme pour l’ensemble de l’outre-mer, nous atteindrions bien la cible prévue, à savoir le versement de 200 000 prestations.
Compte tenu du taux d’imposition en outre-mer, où, on le sait, s’appliquent des abattements supplémentaires de 20 % et 10 %, il est très difficile de connaître l’impact de la PPE sur le RSTA. Le Gouvernement propose donc de faire un bilan de la situation dont il rendra compte à la représentation parlementaire dans six mois.
Pour l’instant, les bénéficiaires vont percevoir les 100 euros qui correspondent au RSTA et nous verrons ultérieurement les implications de la PPE.
M. Gérard Longuet. Je vous remercie, madame la secrétaire d'État.
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Serge Larcher et Éric Doligé viennent d’être couverts de fleurs. Je ne peux m’empêcher de songer, à dix jours de la Toussaint, qu’il y a aussi beaucoup de fleurs dans les cimetières.
M. Gérard Longuet. Il ne faut pas confondre la Toussaint et le Jour des morts !
M. Bernard Frimat. J’espère, mes chers collègues, que votre rapport connaîtra un meilleur sort…
Madame la secrétaire d'État, nous allons être saisis d’un projet de modification institutionnelle concernant les collectivités territoriales ; mon propos n’est pas d’en parler ici. Dans le même temps, la Guyane et la Martinique vont se prononcer par référendum sur le passage au statut de l’article 74 de la Constitution, puis, éventuellement, sur le passage à une collectivité unique, relevant de l’article 73. Ces départements vont donc voter alors que nous serons encore dans la plus totale incertitude quant à la création ou non du conseiller territorial.
On nous dit que l’adaptation législative sera faite pour la Guadeloupe, la Martinique et la Guyane par voie d’ordonnances.
Pouvez-vous me le confirmer, madame la secrétaire d’État, et me dire s’il s’agit d’une manière pour vous de traduire immédiatement dans les faits les félicitations que vous avez adressées pour la qualité de leur travail de parlementaires à MM. Serge Larcher et Éric Doligé, puisque le Parlement n’aurait plus alors à s’occuper de quoi que ce soit ?
Madame la secrétaire d’État, une modification institutionnelle doit passer par le Parlement ; il n’est pas légitime de procéder par ordonnances.
J’ai un autre sujet d’interrogation, et je me tourne vers mes collègues de la Réunion pour leur en faire part. J’envisage le cas où, d’aventure, un conseiller territorial serait institué, à la Réunion comme en Guadeloupe…
M. Gérard Longuet. Par bonheur, voulez-vous dire !
M. Bernard Frimat. Vous avez parfaitement compris le sens de ma pensée, mon cher collègue : le pire n’est jamais exclu !
Je prends l’exemple de la Réunion et de la Guadeloupe, car elles ne seront pas concernées par le référendum du 17 janvier.
Nous aurons donc, dans cette hypothèse, un territoire unique et une assemblée qui, fait unique, sera constituée à la fois de conseillers généraux et de conseillers régionaux.
M. Jean-Jacques Hyest. Comme à Paris !
M. Bernard Frimat. Laissez-moi finir, mon cher collègue ! Je crains que vous ne puissiez saisir toute la finesse de mon propos si je suis perturbé...
Il y aura donc, de fait, une assemblée unique. Ne conviendrait-il pas, dans ce cas, de consulter les populations en vertu de l’article 72-4 de la Constitution ? (Exclamations sur certaines travées de l’UMP.)
En effet, l’article 72-4 de la Constitution dispose que les populations doivent être consultées sur toute modification institutionnelle. Or c’en est une, et de taille !
J’aimerais connaître votre avis, madame la secrétaire d’État, à la fois sur les ordonnances et sur ce point particulier.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d’État. Je vous répondrai, monsieur le sénateur, en évoquant la situation spécifique de chacun de ces territoires, qui n’ont pas la même évolution institutionnelle.
La Réunion, comme l’a rappelé M. Virapoullé, est attachée au droit commun ; la réforme territoriale s’y appliquera.
M. Bernard Frimat. Même en l’absence de délibération ?
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d’État. Il n’y a pas eu de délibération contraire du congrès, qui réunit le conseil général et le conseil régional, à la date d’aujourd’hui. En l’absence de délibération, le droit commun s’applique.
La Guyane et la Martinique ont fait valoir une évolution institutionnelle, et nous l’organisons.
La Guadeloupe a demandé un délai supplémentaire de dix-huit mois.
Nous ne pouvons pas préjuger du résultat de la consultation. S’il va dans le sens d’une évolution institutionnelle pour la Martinique, la Guadeloupe et la Guyane, soit sur la base de l’article 74 de la Constitution, soit sur celle de l’article 73 avec la création d’une collectivité unique, le problème sera réglé.
En revanche, pour le cas où les populations consultées répondraient non à ces deux questions, il nous faut tout de même préserver les intérêts de ces territoires.
Pour gagner du temps, nous avons donc adopté le principe de plusieurs ordonnances qui permettront d’inscrire de nouveau ces collectivités dans le droit commun : bien qu’ayant refusé l’évolution institutionnelle, elles souhaiteront tout de même rester dans l’identité législative.
J’ajoute qu’il ne faut pas faire la confusion entre collectivité unique et collectivité identique. (M. Jean-Paul Virapoullé opine). Il s’agirait en effet d’un regroupement des compétences des deux collectivités, département et région, et, en l’espèce, il serait inutile d’organiser une nouvelle consultation sur le fondement de l’article 72-4. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Pignard.
M. Jean-Jacques Pignard. Madame la secrétaire d’État, vous avez évoqué le logement social, une question qui préoccupe mes collègues de l’Union centriste.
La loi pour le développement économique des outre-mer, la LODEOM, avait pour objectif d’apporter un certain nombre de réponses dans ce domaine, notamment en concentrant les efforts financiers sur le logement social par un nouveau mécanisme de défiscalisation. Les textes d’application sont sur le point d’être adoptés. Pouvez-vous, madame la secrétaire d’État, nous donner des précisions concrètes ?
Surtout, alors que les professionnels sont particulièrement inquiets quant à cette période de transition, quelles mesures comptez-vous prendre pour permettre une mise en œuvre effective et rapide des nouvelles dispositions de la LODEOM dans le secteur du logement ?
Je signale, mais nous aurons l’occasion d’en reparler lors du débat budgétaire, que le projet de loi de finances pour 2010 prévoit une baisse de 0,25 % des autorisations d’engagement sur la ligne budgétaire unique, la LBU. Certes, la diminution est faible, mais je ne crois pas qu’il s’agisse d’un signal positif, d’autant qu’il a été acté solennellement dans la loi que « la ligne budgétaire unique reste le socle du financement du logement social dans les départements d’outre-mer ».
Par ailleurs, la mission commune d’information a énuméré des points qui restent à approfondir afin de répondre à la crise du logement, par exemple sur les paramètres de la LBU ou sur les normes et règles techniques qui pèsent lourdement, et souvent inutilement, sur les finances des bailleurs et des promoteurs.
Mais je souhaiterais évoquer principalement la question du foncier. Notre mission commune d’information propose une solution innovante : un droit au foncier opposable, c’est-à-dire une sorte de « droit de tirage » des collectivités locales sur certains terrains de l’État en vue de réaliser des opérations. Naturellement, les modalités restent à fixer, mais que pensez-vous de cette mesure, qui pourrait répondre localement à certains besoins et qui pourrait surtout avoir un effet incitatif sur les services de l’État, parfois peu mobilisés en la matière ?
Enfin, la mission commune d’information faisait également le constat d’une extrême urgence en ce qui concerne l’habitat insalubre ; le récent rapport de notre collègue député Serge Letchimy conforte notre analyse. Quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour combattre enfin fortement cet habitat indigne ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, sans dévoiler les mesures qui seront prises lors du prochain comité interministériel de l’outre-mer, je peux d’ores et déjà vous apporter quelques précisions.
S’agissant de la défiscalisation, nous avons la volonté de déconcentrer la gestion des dossiers au niveau local, afin de permettre une plus grande réactivité. Les décrets d’application seront publiés dès le mois prochain. Nous pourrons alors utiliser toutes les possibilités offertes par la LODEOM, c’est-à-dire soit la LBU seule, soit la LBU accompagnée de la défiscalisation, soit la défiscalisation seule.
S’agissant des normes techniques, en particulier environnementales, je n’ignore pas qu’un certain nombre d’interrogations ont été soulevées dans le rapport. Je note par ailleurs que les collectivités ont la possibilité de demander l’habilitation, ce qui permettrait de revoir les normes techniques, et donc d’abaisser les coûts de construction des logements sociaux outre-mer. C’est une voie que nous pouvons explorer.
La Guadeloupe a déjà usé de ce droit et, lors de mon déplacement, je n’ai pas manqué d’évoquer cette piste de travail avec les bailleurs sociaux.
J’en viens à la question du foncier.
Il est proposé dans le rapport de mettre en place un droit au foncier opposable. Je ne suis pas certaine qu’il s’agisse de la bonne solution.
L’essentiel, selon nous, est de maîtriser le foncier et de faire en sorte qu’il ne soit pas un frein au lancement des opérations. Plusieurs possibilités ont déjà été expérimentées, notamment avec le fonds régional d’aménagement foncier et urbain, le FRAFU, dans le cadre du plan de relance. Nous avons mis en place des conventions d’actions foncières dans certains départements, notamment à la Réunion et, depuis peu, à la Guadeloupe. Ces conventions sont un succès, car elles permettent de diminuer considérablement la part des collectivités.
Des pistes existent donc et nous allons les explorer, car nous savons qu’il faut agir à la fois sur les paramètres de la LBU et sur la question du foncier. Tous ces points seront examinés dans le cadre du comité interministériel.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la mission commune d’information.
M. Éric Doligé, rapporteur de la mission commune d’information. En tant que rapporteur de cette mission mais aussi membre de la commission des finances, je citerai quelques chiffres.
S’agissant de la LBU, nous ne devons pas nous faire de souci pour l’année à venir. Certains craignaient, lors du débat sur la LODEOM, que celle-ci n’entraîne une baisse de la LBU et que la défiscalisation n’empiète sur la LBU. Or, si l’on regarde les chiffres du prochain projet de budget, on s’aperçoit que la LBU ne bouge pas.
Les autorisations d’engagement passent en effet de 255,1 millions d’euros à 254,5 millions d’euros, ce qui représente une très faible diminution.
En revanche, les crédits de paiement augmentent, passant de 206 millions d’euros à 210 millions d’euros, soit une hausse de 2 %. Et, ce qui compte, ce sont les crédits de paiement !
M. le président. La parole est à M. le président de la mission commune d’information.
M. Serge Larcher, président de la mission commune d’information. Je souhaite apporter quelques informations complémentaires sur la question du logement social.
Il y a deux sortes de problèmes.
Les premiers sont liés aux indivisions dans les départements d’outre-mer, en particulier à la Martinique, un problème que la LODEOM devrait permettre de régler. Or aucun décret d’application n’est encore pris.
Les seconds sont liés non pas tant au foncier indisponible qu’à la viabilisation du foncier.
Les communes sont exsangues : il est donc d’autant plus difficile pour elles de dégager du foncier constructible.
Il nous faut d’abord faire porter notre effort sur le foncier. Le FRAFU, que vous avez évoqué, madame la secrétaire d’État, est loin de faire l’affaire. Il faudrait une action vigoureuse pour libérer sinon le foncier, du moins ces terrains viabilisés afin qu’ils puissent être construits.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d’État. Nous ne devons pas oublier la question de l’implantation, dans nos territoires, d’établissements publics fonciers !
M. Serge Larcher, président de la mission commune d’information. En effet !
M. le président. La parole est à Mme Gélita Hoarau.
Mme Gélita Hoarau. La mission commune d’information a été créée au début de l’année, à la suite d’événements qui ont matérialisé une crise économique dont chacun sait qu’elle n’est pas récente.
J’ai cru comprendre, madame la secrétaire d’État, qu’un semblant de suivi allait être organisé. Ne pourrait-on imaginer un calendrier prévoyant des points d’étape et une mise en débat ? Le Gouvernement et le Sénat pourraient ainsi faire le point, au fur et à mesure, de l’avancement des préconisations et des propositions de la mission commune d’information.
Le 6 novembre, à l’issue du comité interministériel, le Président de la République annoncera sans doute des mesures. Ne peut-on aller au-delà ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d’État. La question du suivi des décisions qui seront prises est très importante. Comme je l’ai indiqué, nous souhaitons donner des réponses concrètes et nous assurer que les décisions seront suivies d’effet. C’est pourquoi, dans chaque territoire, les ateliers mis en place lors des états généraux seront transformés en comités de suivi. Il est en effet de notre devoir, vis-à-vis de tous ceux qui se sont mobilisés dans le cadre de cette consultation, et vis-à-vis de la population elle-même, qui y a également participé, d’organiser ce suivi ; les modalités sont actuellement en discussion.
J’ai noté que M. le président du Sénat avait décidé de mettre en place un comité de suivi. Si vous le souhaitez, nous pouvons débattre et travailler de façon parallèle sur les avancées que vous aurez constatées et sur les mesures que nous mettons en place.
(Mme Monique Papon remplace M. Gérard Larcher au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE Mme Monique Papon
vice-présidente
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Leclerc.
M. Dominique Leclerc. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’aimerais que ce débat soit l’occasion de faire un premier point sur la question des « surpensions » des fonctionnaires de l’État en poste outre-mer.
Cet avantage, sobrement baptisé « indemnité temporaire de résidence », ou ITR, consiste en une majoration des pensions de retraite de 35 % à 75 %, dispositif que la Cour des comptes avait dénoncé non seulement pour son caractère inéquitable, mais aussi pour les abus et les fraudes auxquels il donne lieu.
Au terme d’un marathon législatif de cinq années, l’ITR a fait l’objet, l’an dernier, d’une réforme à la fois très complexe et très progressive…
Madame la secrétaire d’État, toutes les dispositions réglementaires d’application ont-elles été prises ?
Où en sont les mesures de contrôle que le législateur avait précisément souhaité renforcer pour les rendre enfin effectives ?
Quel est et quel sera le bilan financier à court, moyen et long terme de cette réforme ? Dégagera-t-elle quelques moyens pour favoriser les priorités du développement de l’outre-mer ?
La consultation du site internet de votre secrétariat d’État me laisse très dubitatif. On y lit en effet que « 82 % des bénéficiaires actuels de l’ITR ne verront pas leur indemnité modifiée par la réforme, qui ne les concernera pas ». Dès lors, que penser de l’effectivité d’une telle réforme ?
Je redoute ensuite que cette réforme, conçue avant la grave crise financière que nous traversons, ne soit, hélas, qu’un coup d’épée dans l’eau. Rétrospectivement, elle apparaît au minimum d’une faible portée, pour ne pas dire plus.
Je rappelle tout de même que la mise en œuvre de cette réforme est d’une lenteur désespérante, puisque le calendrier s’étend jusqu’en 2028 ! Un tel délai nous semble beaucoup trop long, et c’est un euphémisme.
Une majorité de nos concitoyens perçoivent l’ITR comme un avantage d’un autre temps, un avantage illégitime qui doit disparaître le plus vite possible.
Enfin, est-il utile de préciser que l’accroissement des déficits sociaux consécutif à la présente crise rend désormais impossible toute perspective d’extension des surpensions aux territoires ultramarins qui n’en bénéficient pas ?
Sur ce point, d’ailleurs, la réforme que nous avons votée paraît très ambiguë. Elle prévoit, en effet, un rapport du Gouvernement à ce sujet. Qu’en est-il donc de ce rapport, madame la secrétaire d’État, dont le contenu sera, je l’espère, publié et fera l’objet d’un débat public ?
Mes chers collègues, ne nous y trompons pas : si la réforme de l’ITR, que nous avons votée, ne devait pas en être une, le sujet serait sur la table lors du rendez-vous de 2010 sur les retraites.
M. Bernard Frimat. Deux minutes !
M. Dominique Leclerc. Comment pourrions-nous demander à 25 millions d’actifs et à 13 millions de retraités de consentir de nouveaux sacrifices pour sauver notre pacte social si les surpensions perdurent ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, l’outre-mer a fortement participé à la révision générale des politiques publiques ; l’ITR en est un exemple. Cette réforme était d’autant plus difficile qu’elle concerne un nombre important d’ultramarins. Mon prédécesseur a eu le courage de la porter jusqu’au bout.
Aujourd’hui, toutes les dispositions ont été prises. Le parti a été pris de faire porter la réforme sur le flux, et non sur le stock. Il n’était donc pas question de remettre en cause les retraites constatées. Parce qu’il s’agit de stock, on peut comprendre que les effets de cette réforme ne seront pas ressentis immédiatement et qu’il faudra attendre plus d’une vingtaine d’années pour qu’elle soit achevée.
Tel est l’objectif, et il sera atteint. Le Gouvernement a eu le courage d’aller jusqu’au bout de cette réforme, qui n’était pas simple à mener.
S’agissant de l’accompagnement des retraites évoqué à l’époque, Éric Woerth, ministre du budget, rendra prochainement un rapport à la représentation parlementaire sur ce point, document qui donnera lieu à des échanges.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur de la mission commune d’information.
M. Éric Doligé, rapporteur de la mission commune d’information. La réforme de l’ITR a été jalonnée de difficultés. De très nombreux amendements déposés au Sénat ont été refusés. Finalement, c’est le rapporteur général qui a glissé dans un collectif budgétaire un amendement permettant de commencer à faire évoluer le système de façon courageuse, comme vous l’avez souligné, madame le secrétaire d’État.
Mes chers collègues, vous pourrez étudier avec beaucoup de plaisir un tableau chiffré sur ce sujet – votre moral remontera – dans le rapport qui sera publié lors de la discussion budgétaire. L’étude des courbes montre que les chiffres ne sont pas extraordinaires. Les conditions d’attribution de l’ITR ayant simplement été plafonnées, les sommes versées chaque année continueront encore à augmenter pendant un certain temps. Alors qu’elles atteignaient 270 millions d’euros en 2006, elles s’élèveront à 350 millions d’euros en 2010. Ce n’est qu’à partir de 2028 qu’elles commenceront probablement à diminuer. À terme, les courbes s’inverseront.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la mission commune d’information.
M. Serge Larcher, président de la mission commune d’information. Je veux simplement apporter une précision pour la clarté du débat.
Les DOM d’Amérique, la Martinique, la Guadeloupe, la Guyane, n’ont jamais bénéficié de l’ITR. Par conséquent ils ne demandent absolument rien sur ce sujet. Peut-être est-ce parce que la durée de vie est moins longue dans ces territoires et que les habitants n’ont pas besoin de retraite…
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Lise.
M. Claude Lise. Madame la secrétaire d’État, je souhaite revenir sur le problème du foncier.
On dit souvent aux élus de Martinique que, si on ne leur accorde pas plus au titre de la LBU, c’est parce que de toute manière les crédits ne pourraient pas être consommés en raison de l’absence de foncier. En réalité, ce qui manque, c’est le foncier viabilisé.
Dans le cadre du fonds régional d’aménagement foncier et urbain, le FRAFU, l’État participe au financement de la viabilisation du foncier, mais se pose le problème de la conditionnalité qui régit le partage entre l’État et les collectivités territoriales. Ces dernières doivent supporter au moins 20 % de la différence entre la charge foncière réelle et une charge foncière de référence. Compte tenu de la situation de nos collectivités territoriales, évoquée largement aujourd’hui, si l’on veut faire avancer le dossier, l’État doit consentir un effort supplémentaire.
La Martinique est la seule collectivité qui a atteint les 20 % requis, et de haute lutte ! À un moment donné, le conseil général a d’ailleurs été plus loin puisqu’il a décidé de contribuer à hauteur de 30 %. Il a consacré plus de 7,7 millions d’euros entre 2000 et 2006 à cette action et il vient de débloquer 1,7 million d’euros pour aider à financer des opérations. Mais la Martinique est pratiquement à la limite de ses possibilités.
On a beaucoup parlé d’adaptation. Mais point n’est besoin ici du traité de Lisbonne, d’une habilitation, de la publication des décrets de la LODEOM. Nous demandons en effet purement et simplement la suppression de la règle de la conditionnalité de manière à pouvoir procéder à des ajustements selon les situations. Le préfet de Martinique a fait remonter la demande que nous avons formulée à de multiples reprises.
Pour ma part, afin d’être le plus conciliant possible, je sollicite la suppression de cette règle pour une durée limitée, le temps de traverser la crise et de permettre à toutes les mesures qui ont été annoncées aujourd’hui de prendre leur plein effet.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Marie-Luce Penchard, secrétaire d'État. Selon la règle de la conditionnalité, les collectivités participent à hauteur de 20 % aux opérations. Des efforts ont déjà été faits, notamment par le biais du FRAFU, comme vous l’avez indiqué. La convention d’actions foncières permet aussi de réduire la participation des collectivités de 20 % à 10 %.
Certes, ce système constitue un frein pour les opérations. Je l’ai indiqué à plusieurs reprises : ce point sera largement pris en compte. Je ne peux pas aller plus loin aujourd’hui, car le débat se situe en amont du comité interministériel de l’outre-mer. Tout n’est pas complètement bouclé, et nous sommes conscients du problème.
Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Giudicelli.
Mme Colette Giudicelli. La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, promulguée le 21 juillet dernier, doit permettre à l’offre de santé, dans les territoires ultramarins comme en métropole, d’être mieux coordonnée, plus efficiente, d’une qualité accrue, malgré de réelles contraintes financières.
Cependant, des spécificités propres aux régions ultramarines justifient un accompagnement particulier en matière de santé. Je pense, par exemple, aux conséquences de certains risques naturels – cyclones, tremblements de terre –, à l’insularité, à l’éloignement de la métropole ou à certaines pathologies propres aux zones tropicales, comme la drépanocytose, ou encore d’une prévalence très élevée, comme le diabète ou certains cancers de la prostate.
Madame la secrétaire d’État, pouvez-vous nous rassurer ? Dans quelle mesure le plan « Hôpital 2012 », présenté par Xavier Bertrand, à l’époque ministre de la santé et des solidarités, et le plan « Santé outre-mer » prendront-ils en compte ces particularités sanitaires des départements d’outre-mer ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.