M. Jacques Muller. Cet amendement a pour objet de rétablir l’avis conforme.
L’enjeu est important à la fois sur le fond, car nous avons bien vu qu’il en allait de la qualité de nos territoires en ZPPAUP à long terme, et sur la forme, car je suis sensible à la manière dont nous travaillons. Le Grenelle est une démarche participative. Or je constate que tous les milieux du patrimoine ont réclamé le maintien de l’avis conforme.
Toutefois, cet amendement introduit deux autres principes.
Premier principe, le besoin de régulation. Je vous rappelle que, lors de l’examen de l’article 4, j’avais mis en évidence des contradictions manifestes dans la manière dont les architectes interprétaient les choses selon les territoires. Nous proposons d’introduire un référent supplémentaire, le préfet, car nous estimons qu’il y a un véritable besoin de régulation.
Second principe, déjà évoqué par mon collègue Pierre Jarlier, la consultation. La commission départementale des sites, perspectives et paysages doit pouvoir être consultée.
Nous voulons donc plus de régulation, mais également une consultation élargie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je viens de m’entretenir, de manière discrète mais constructive, avec les deux rapporteurs pour avis, afin d’essayer de trouver une solution.
Monsieur Dauge, lorsque nous quitterons le Sénat ce soir, il faudra que nous soyons parvenus à adopter une position unie et forte, afin d’être en mesure d’imposer nos vues à l’Assemblée nationale. De toute manière, la décision que nous prendrons ce soir, quelle qu’elle soit, ne sera pas définitive, puisque nous devons encore attendre les conclusions de la commission mise en place par le ministre de la culture.
En attendant, puisqu’on m’a demandé de rectifier mon amendement et que certaines de nos positions divergent, je vous propose de maintenir l’avis conforme, de fixer le délai de recours à deux mois (Marques d’assentiment sur les travées du groupe socialiste), de renverser la charge de la preuve, c'est-à-dire de considérer un recours comme adopté si le préfet n’a pas donné sa réponse dans un délai de deux mois (Mêmes mouvements) et d’adresser les recours non pas au préfet du département, comme je le proposais dans un premier temps, mais au préfet de région.
Monsieur Dauge, je suggère que nous en restions là pour l’instant, afin de ne pas trop charger la barque. Il ne me paraît pas opportun d’exiger l’avis de la CRPS pour le moment ; nous verrons cela un peu plus tard, en fonction des résultats.
En adoptant une disposition reprenant les quatre points que je viens d’énumérer, nous permettrions au Sénat d’afficher une position forte et unie. D’ailleurs, j’aimerais que nous votions une telle mesure à l’unanimité. Si les membres des trois commissions permanentes concernées et M. Yves Dauge, qui fait partie de la commission mise en place par le ministre de la culture, votaient cette disposition comme un seul homme, nous pourrions tenir notre position devant l’Assemblée nationale ou en commission mixte paritaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Ce débat a eu lieu à plusieurs reprises entre l’Assemblée nationale et le Sénat ; j’y ai moi-même pris part lorsque j’étais député.
Comme vous le savez, M. le ministre de la culture va présider une commission sur le sujet, commission dont le rapporteur sera le conseiller d’État Thierry Tuot. Des parlementaires des deux chambres seront évidemment associés à ce travail.
Nous espérons qu’à l’issue des travaux du Sénat et de l’Assemblée nationale, voire en commission mixte paritaire, l’ensemble des partenaires parviendront à trouver un accord sur une version stable et définitive. Cela permettrait d’éviter les allers-retours incessants qui s’opèrent entre l’Assemblée nationale et le Sénat lorsque les points de vue des deux chambres divergent. D’ailleurs, j’observe que les positions des deux assemblées se rapprochent au fur et à mesure ; cela va, me semble-t-il, dans le bon sens.
L’amendement n° 364, qui a été présenté par M. le rapporteur Dominique Braye, fait l’objet de deux sous-amendements visant, pour l’un, à préciser que les recours sont adressés au préfet de région et, pour l’autre, à fixer un délai de réponse de deux mois.
Le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement ainsi sous-amendé. En effet, comme le texte sera encore amené à évoluer, notamment avec les conclusions de la commission animée par M. Tuot, il me semble raisonnable d’émettre un avis de sagesse, et non un avis favorable.
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, afin de permettre à la commission de rectifier l’amendement n° 364 dans le sens qu’a indiqué M. le rapporteur, je vous propose de suspendre la séance.
La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Je comprends très bien l’intérêt qu’il y a à présenter un texte parfaitement rédigé, mais ne pourrions-nous pas réserver l’article 14 jusqu’à la fin de la discussion et poursuivre l’examen du texte ? (Approbations sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette demande de réserve ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je consulte le Sénat sur cette demande de réserve formulée par M. Raoul.
Il n’y a pas d’opposition ?...
La réserve est ordonnée.
Articles additionnels après l'article 14 (réservé)
M. le président. Monsieur le rapporteur, les amendements nos 113 et 114, qui sont liés à l'article 14, ainsi que l’article 15 doivent également être réservés.
M. Dominique Braye, rapporteur. En effet, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, l’article 14, les amendements portant articles additionnels après l’article 14 et l’article 15 sont réservés jusqu’à la fin du texte.
Articles additionnels avant l'article 15
M. le président. L'amendement n° 273 rectifié, présenté par MM. Vall et Baylet, est ainsi libellé :
Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans la première phrase du quatrième alinéa de l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme, les mots : « le terrain » sont remplacés par les mots : « la zone, sur laquelle porte l'action et dans laquelle est situé le terrain, ».
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 199, présenté par Mme Didier, MM. Danglot et Le Cam, Mmes Schurch, Terrade et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Avant l'article 15, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article L. 143-3 du code de l'urbanisme est ainsi rédigé :
« Art. L. 143-3. - À l’intérieur du périmètre délimité en application de l'article L. 143-1, les terrains peuvent être acquis en vue de la protection et de la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, dans les conditions suivantes :
« 1º À l'amiable, par le département ou, avec l'accord de celui-ci, par une autre collectivité territoriale ou un établissement public de coopération intercommunale ou par un établissement public mentionné au troisième ou au quatrième alinéa de l'article L. 321-1 du présent code ou un établissement public foncier local mentionné à l'article L. 324-1 ou par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural, ou en région Île-de-France, par l'Agence des espaces verts prévue à l'article L. 4413-2 du code général des collectivités territoriales ;
« 2° Par exercice du droit de préemption institué au titre de la protection et mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, au profit des Départements, en cas d'aliénation à titre onéreux des immeubles bâtis ou non bâtis ou ensembles de droits sociaux donnant vocation à l'attribution en propriété ou en jouissance sous quelque forme que ce soit.
« Lorsque la mise en œuvre du programme d'action prévue à l'article L. 143-2 le justifie, ce droit de préemption peut s'exercer pour acquérir une fraction d'une unité foncière comprise à l'intérieur du périmètre d'intervention. Dans ce cas, le propriétaire peut exiger que le titulaire du droit de préemption se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière. Le prix d'acquisition fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation tient compte de l'éventuelle dépréciation subie, du fait de la préemption partielle, par la fraction restante de l'unité foncière.
« En cas d'adjudication, lorsque cette procédure est rendue obligatoire par une disposition législative ou réglementaire, l'acquisition par le titulaire du droit de préemption a lieu au prix de la dernière enchère, par substitution à l'adjudicataire. Cette disposition n'est toutefois pas applicable à la vente mettant fin à une indivision créée volontairement, à moins que celle-ci ne résulte d'une donation-partage.
« Le Département peut exercer ce droit de préemption, dans un délai de deux mois à compter de la réception de la déclaration d'intention d'aliéner » au département.
« Le département peut déléguer son droit à une autre collectivité territoriale ou à un établissement public de coopération intercommunale ou à un établissement public mentionné au troisième ou au quatrième alinéa de l'article L. 321-1 du présent code ou à un établissement public foncier local mentionné à l'article L. 324-1 ou en région Île-de-France, à l'Agence des espaces verts.
Le département peut également demander à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural d'exercer elle-même ce droit de préemption prévu au 9° de l'article L. 143-2 du code rural. Lorsque le département décide de ne pas faire usage du droit de préemption, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural peut néanmoins exercer le droit de préemption déjà prévu par les 1° à 8° de cet article.
« 3° Dans le cas où tout ou partie du périmètre est compris dans une zone de préemption des espaces naturels sensibles, le département peut choisir d'exercer son droit de préemption au titre des espaces naturels sensibles, pour tout ou partie des terrains objet de la déclaration d'intention d'aliéner, pour lesquels l'objectif poursuivi et l'affectation prévue répondent aux conditions des articles L. 142-1 et L. 142-10 du code de l'urbanisme.
« L'acquisition de ces terrains peut se faire au moyen de la taxe départementale des espaces naturels sensibles définie à l'art. L. 142-2 et la procédure de préemption se fait aux conditions définies aux articles L. 142-1 et suivants.
« Les droits de substitution et de délégation demeurent dans les conditions prévues à l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme, le département pouvant également déléguer son droit à un établissement public de coopération intercommunale ou à un établissement public mentionné au troisième ou au quatrième alinéa de l'article L. 321-1 du présent code ou un établissement public foncier local mentionné à l'article L. 324-1.
« 4º Par expropriation, au profit du département ou, avec l'accord de celui-ci, d'une autre collectivité territoriale ou d'un établissement public de coopération intercommunale ou d'un établissement public mentionné au troisième ou au quatrième alinéa de l'article L. 321-1 du présent code ou d'un établissement public foncier local mentionné à l'article L. 324-1 agissant à la demande du département ou, avec son accord, d'une autre collectivité territoriale ou d'un établissement public de coopération intercommunale.
« 5° A l'exception de ceux acquis par préemption au titre des espaces naturels sensibles, les biens acquis au titre du présent chapitre, sont intégrés dans le domaine privé de la collectivité territoriale ou de l'établissement public ou de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural, qui les acquiert. Ils doivent être utilisés en vue de la réalisation des objectifs définis par le programme d'action. Ils peuvent être cédés de gré à gré, loués conformément aux dispositions du titre Ier du livre IV du code rural ou concédés temporairement à des personnes publiques ou privées à la condition que ces personnes les utilisent aux fins prescrites par le cahier des charges annexé à l'acte de vente, de location ou de concession temporaire. »
II. - L'article L. 3221-12 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 3221-12. - Le président du conseil général peut, par délégation du conseil général, être chargé d'exercer, au nom du département, les droits de préemption d'une part dans les espaces naturels sensibles, tels que définis à l'article L. 142-3 du code de l'urbanisme, et d'autre part, dans les périmètres de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains, tels que définis à l'article L. 143-3 du même code. Il peut également déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien dans les conditions que fixe le conseil général. »
III. - L'article L. 143-7-1 du code rural est ainsi rédigé :
« Art. L. 143-7-1. – À l'intérieur des périmètres délimités en application de l'article L. 143-1 du code de l'urbanisme, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural peut exercer, par délégation du département, le droit de préemption prévu au 9° de l'article 143-2, selon les modalités précisées à l'article L. 143-3 du code de l'urbanisme.
« Les modalités de financement des opérations conduites par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural et déléguées par le conseil général en application de ce droit de préemption, sont fixées par convention passée entre le conseil général et ladite société.
« Le conseil général demeure cosignataire des conventions passées le cas échéant entre la société d'aménagement foncier et d'établissement rural et les différents délégataires de ce droit, désignés par le département en vertu de l'article L. 143-3 du code de l'urbanisme. »
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Afin de protéger et de mettre en valeur les espaces agricoles et naturels périurbains, les départements suggèrent de revoir la procédure d'acquisition du département par préemption.
En proposant de placer ce droit de préemption spécifique sous la compétence directe du département et non plus sous celle des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural, les SAFER, les élus départementaux proposent de clarifier sa mise en œuvre à l'intérieur des périmètres d'intervention délimités en application de l'article L. 143-1 du code de l'urbanisme.
Vous l’aurez compris, mes chers collègues, cette proposition vient de l’Assemblée des départements de France, l’ADF.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Nul ne conteste le fait que la question est importante, mais elle devrait être abordée prochainement dans le cadre d’une loi consacrée à l’agriculture.
Il me paraît donc plus sage d’attendre l’examen de ce texte.
La commission demande le retrait de cet amendement, en prenant l’engagement que le sujet sera examiné à ce moment-là.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Didier, l'amendement n° 199 est-il maintenu ?
Mme Évelyne Didier. Puisque j’ai la certitude que la question sera revue prochainement, j’accepte de le retirer.
M. le président. Je rappelle que l’article 15 a été réservé jusqu’à la fin du texte.
Article 15 bis
I. - L'article L.146-4 du code de l'urbanisme est ainsi modifié :
a) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, peuvent être autorisées les constructions ou installations nécessaires aux activités agricoles et forestières, à la pêche et aux cultures marines, avec l'accord du représentant de l'État dans le département après avis de la Commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Cet accord est refusé si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux paysages. » ;
b) Le troisième alinéa est supprimé ;
II. - L'article L. 146-8 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les installations, constructions et aménagements liés à la mise aux normes des exploitations agricoles ne sont pas soumises aux dispositions du présent chapitre. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements.
L'amendement n° 159, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
L'amendement n° 255, présenté par MM. Repentin et Raoul, Mme Herviaux, MM. Raoult, Ries, Teston, Guillaume et Muller, Mme Blandin et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Compléter le I de cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
...) Le deuxième alinéa du III est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase, après le mot : « nécessaires », sont insérés les mots : « soit à la mise aux normes des exploitations agricoles soit » ;
2° Après le mot : « publique », la fin est ainsi rédigée : « réalisée conformément aux dispositions du chapitre III du titre II du livre 1er du code de l'environnement. A l'exception des destinations énoncées au présent alinéa, le changement de destination de ces constructions ou installations est prohibé. ».
II. - Supprimer le II.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour présenter l'amendement n° 159.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. Cet amendement a pour objet d’éviter que l’on ne touche à la loi littoral.
C’est une loi importante, qui a nourri beaucoup de débats dans notre pays, et nous ne souhaitons pas qu’elle soit remise en cause, tout simplement parce qu’elle nous semble bien protéger actuellement le littoral français.
Dans un autre registre, la loi montagne, que nous ne souhaiterions pas voir remise en cause non plus, joue un rôle tout aussi important.
L’amendement qui a été accepté et voté en commission vise à permettre dans la zone des 100 mètres l’installation de bergeries, puisque, nous le savons tous, il s’agit des prés-salés, donc d’équipements agricoles.
Par ailleurs, cet amendement vise à autoriser la mise aux normes de bâtiments agricoles existants sans contraintes nouvelles en matière de rejets.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à cet article, adopté en commission, et en souhaite la suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Dominique Braye, rapporteur. Je regrette d’être, une fois n’est pas coutume, à la fin de l’examen de ce titre Ier, en désaccord avec la position du Gouvernement.
La loi littoral n’a pas trouvé un réel équilibre puisque subsiste le problème agricole des prés-salés et de la conchyliculture. Je laisserai à notre collègue Bizet, qui est beaucoup plus spécialisé que moi, le soin de vous expliquer que, si nous sommes favorables à la loi littoral, nous ne souhaitons pas qu’elle sanctuarise des territoires littoraux, en y interdisant toute activité.
Sanctuariser des territoires, c’est à court, à moyen ou à long terme les voir mourir. Nous souhaitons que puisse continuer à s’y développer une certaine activité. C’est pourquoi l’amendement introduisant l’article 15 bis a été adopté à l’unanimité par la commission de l’économie.
Par ailleurs, la commission fait remarquer que la dérogation qu’elle introduit dans les dispositions relatives à la loi littoral est très encadrée puisque l’autorisation de travaux est donnée avec l’accord du représentant de l’État dans le département, après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites, et que cet accord est refusé si les constructions ou installations sont de nature à porter atteinte à l’environnement ou aux paysages.
Moi qui fais beaucoup de bateau, je puis vous assurer qu’il est beaucoup plus agréable de voir un littoral parsemé de jolies bergeries, de constructions bien intégrées dans le site, que des étendues désertes ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
La commission estime que les dispositions de cet article additionnel sont en cohérence avec les amendements intégrés aux articles 6 et 9 tendant à souligner l’importance du développement rural dans les documents d’urbanisme.
Les « prés-salés » sont des territoires vivants qu’il ne faut pas « mettre sous cloche ». Le législateur doit donc concilier l’objectif de préservation de l’environnement et celui de développement rural cher à tous les sénateurs.
Voilà pourquoi je suis contraint, avec une immense peine, d’être défavorable à l’amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Jean Bizet, pour explication de vote sur l'amendement n° 159.
M. Jean Bizet. Je comprends la réaction du Gouvernement face à cet article qui a été voté, je le rappelle, à l’unanimité par la commission de l’économie, ce qui n’est pas un hasard.
Les élus locaux, qui, nous l’avons rappelé tout au long de ce débat, sont responsables et compétents, sont bien conscients de l’importance de la loi littoral et de la richesse que constitue ce patrimoine naturel que constitue le littoral pour leurs communes. Certes, la loi protège, mais, tout doucement, au fil des ans, elle a dérivé.
Petit à petit, elle a sanctuarisé des territoires, au point d’y rendre impossible toute activité économique et agricole. Cet état de fait explique la réaction des élus et le vote à l’unanimité de ce texte.
Soyons clairs, cet article n’est pas une atteinte à la loi littoral. Il s’agit tout simplement d’un toilettage, d’une amélioration, comme il y en a déjà eu à deux reprises au cours des dix dernières années.
Toute amélioration, construction ou mise aux normes, ce qui, je le rappelle, est une obligation réglementaire, se heurte actuellement à « l’étroitesse » de la loi littoral, si bien que, dans mon département, par exemple, un certain nombre d’exploitations agricoles restent dans une sorte de statu quo. On préfère laisser les choses en l’état, quitte à polluer le rivage avec toutes les conséquences qui peuvent s’ensuivre sur la prolifération des algues vertes.
M. Paul Raoult. Oh la la !
M. Jean Bizet. Mais si !
Les élus sont dans l’impossibilité d’accorder des mises aux normes en raison de la rigueur de la loi littoral.
Le texte que nous proposons prévoit deux clés de sécurité : l’accord du préfet et l’avis de la commission départementale des sites et paysages. En outre, il y a en quelque sorte inversion de la charge de la preuve et il appartiendra au préfet de dire pourquoi tel ou tel type de construction ou d’aménagement porterait, éventuellement, atteinte à l’environnement.
J’insiste bien sur le fait que ces territoires sont fragiles et que nous devons les protéger. Il n’est pas question d’imaginer pouvoir y faire n’importe quoi.
Mais, je le répète encore une fois, la loi glisse tout doucement de la protection vers la sanctuarisation, alors que se développent dans ces zones, un certain biotope, une certaine faune et une certaine flore dominantes, particulièrement indésirables tant visuellement qu’écologiquement, allant en outre à l’encontre de la biodiversité.
Je ne voudrais pas qu’après avoir chassé l’animal domestique de ces territoires on coure le risque de voir l’homme à son tour les déserter.
Il n’est pas acceptable, monsieur le secrétaire d'État, qu’il ait fallu quatre années pour rédiger un cahier des charges relatif à l’implantation de bergeries dans la baie du Mont-Saint-Michel, côté breton comme côté normand, et ce tout simplement parce que les services de l’État, les services du conseil général et les services de la chambre d’agriculture se renvoient le dossier. Nous venons d’obtenir une appellation d’origine contrôlée sur ce type de filière et nous ne pouvons pas implanter les bâtiments agricoles nécessaires à son développement !
Voilà pourquoi je ne voterai pas l’amendement du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Paul Raoult, pour explication de vote sur l'amendement n° 159.
M. Paul Raoult. Il s’agit d’un sujet sensible, doté d’une force symbolique très importante.
Si vous touchez, dans le cadre du Grenelle II, à la loi littoral, imaginez les commentaires que l’on pourra lire demain dans la presse nationale ! On écrira que nous en avons profité pour donner un coup de canif à la loi littoral et faire en sorte que l’on puisse installer des activités agricoles en plus grand nombre le long de nos littoraux !
Franchement, une telle disposition n’est pas dans l’esprit du Grenelle et ne va pas dans le sens de la démarche qui a été suivie depuis deux ans.
Après les actualités du mois de juillet et du mois d’août, après les problèmes de pollution du littoral, après le scenario de prolifération des algues vu et revu à la télévision, sans parler du procès régulièrement intenté à la société de laisser faire, je me vois mal voter ce type d’article !
Je vous comprends bien, monsieur Bizet, lorsque vous parlez de votre département, la Manche. Quoi qu’il en soit, il y a une façon de maîtriser l’activité économique sans toucher aux territoires littoraux. Ils sont soumis à une grande loi qui est respectée et que l’on doit faire respecter. Troubler l’équilibre de cette loi, aujourd'hui, ne me paraîtrait pas judicieux.
Franchement, après tout ce que nous avons dit collectivement en votant à l’unanimité le Grenelle I, adopter ce soir un tel article serait aller absolument contre l’esprit de cette réforme que nous avons voulue et défendue !
Vous parlez de sanctuarisation. Oui, certains espaces doivent être sanctuarisés et protégés. On ne peut pas toucher impunément à la biodiversité. Elle est un élément de la planète et de l’équilibre entre l’homme et la planète.
Nous faisons partie de cette biodiversité. Or la frange littorale est actuellement dans une situation d’insécurité par rapport à cette biodiversité. Il s’agit de l’élément le plus fragile aujourd'hui tellement il est victime d’agressions. Je ne voudrais pas que, à l’occasion du vote de cet article, on puisse nous accuser de laisser faire des choses qui doivent être interdites !
Une telle disposition est donc inacceptable : les bras m’en tombent… Pensez à la charge symbolique du texte que vous nous proposez ! Et la façon dont vous présentez votre argumentation n’en atténue en rien la force…
M. le président. La parole est à M. Jacques Muller, pour explication de vote sur l’amendement n° 159.
M. Jacques Muller. Tout à l’heure, j’ai parlé de méthode législative, voici l’occasion d’y revenir.
J’ai participé à la réunion de la commission au cours de laquelle cet article a été adopté. J’ai entendu notre rapporteur et M. Bizet insister sur le fait que la commission avait adopté cet article à l’unanimité. Or, je me suis abstenu lors de ce vote, et le compte rendu de la réunion indique que ma collègue Évelyne Didier a indiqué qu’elle s’abstenait aussi, n’étant pas en mesure d’apprécier la portée et les conséquences de telles dispositions. En effet, lorsque l’on ne dispose pas de tous les éléments techniques sur un tel dossier, on s’abstient. Donc l’unanimité ne reflétait pas un soutien général, mais l’absence d’opposition en raison d’une incertitude.
Je l’avoue franchement, lorsque j’ai découvert l’argumentaire du Gouvernement, j’ai été convaincu et je vous invite, monsieur le secrétaire d’État, à le développer devant nos collègues afin que toute notre assemblée ait connaissance de l’ensemble des éléments du dossier. J’ai été convaincu du fait que nous prenions le risque terrible de décrédibiliser le Grenelle de l’environnement en adoptant cet article 15 bis.
Lors de la discussion générale, j’ai dit que le diable se nichait souvent dans les détails. En voici une parfaite illustration : à partir d’un amendement anodin adopté en commission, susceptible de régler un problème local – la cause des moutons de pré-salé est tellement sympathique ! –, on adopte une disposition qui risque de tuer l’esprit de la loi littoral, en tout cas de la déséquilibrer gravement.
Je n’aurai pas l’outrecuidance de lire ici le texte que les services de M. le secrétaire d’État ont rédigé mais, puisque nos collègues n’ont pas eu le temps de lire cet argumentaire très fin, détaillé, technique et précis, …