Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’emploi. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de vous remercier du temps que vous consacrez à ce sujet. J’ai apprécié le caractère approfondi et nourri de vos interventions, qui ont été très précises et constructives.
Je tiens à saluer la tonalité à la fois humaniste et républicaine des propos de M. Vantomme, qui a ouvert le débat en relevant ce qu’il considère être des axes d’amélioration possibles de l’action de Pôle emploi.
Madame David, même si nous ne sommes pas toujours d’accord, tant s’en faut, j’apprécie toujours votre droiture, votre précision et votre investissement incontestable sur le thème de l’emploi.
Mme Procaccia connaît parfaitement le sujet, pour avoir été rapporteur du projet de loi qui a donné naissance à Pôle emploi. Elle a eu le souci de faire le point, avec beaucoup d’objectivité, sur l’état d’avancement de la réforme, mesurant le chemin qui reste à parcourir, et a aussi évoqué plusieurs thèmes sur lesquels je vais revenir, notamment la convention collective.
J’ai écouté avec attention M. Plancade, même si je ne partage pas toujours son point de vue, marqué à mon sens par un certain défaitisme.
M. Jeannerot a fait appel à son expérience professionnelle acquise dans l’ancien système. Il a souligné le rôle essentiel d’amortisseur social joué malgré tout par Pôle emploi dans cette crise, relativisant ainsi bien des caricatures, ainsi que l’investissement des agents sur le terrain, auxquels je souhaite à mon tour rendre hommage.
M. Fouché a consacré principalement son intervention aux maisons de l’emploi. J’y reviendrai.
Enfin, M. Demuynck, avec la précision qu’on lui connaît, a mis en exergue les avantages fondamentaux de Pôle emploi, dans cette période de crise, par rapport à l’ancien système, tout en traçant des voies possibles d’amélioration, en particulier l’instauration de réunions d’échanges d’informations au sein des agences et l’optimisation de la détection des métiers en tension en vue de l’adaptation de la formation des demandeurs d’emploi. Ces propositions sont constructives et très intéressantes.
Il convient de prendre un peu de recul pour mener notre réflexion, afin d’éviter de se tromper de cible et de diagnostic. Notre pays traverse actuellement la crise de l’emploi la plus grave qu’il ait connue depuis cinquante ans. Qui peut croire qu’un service public de l’emploi, dans quelque pays d’Europe que ce soit, soit en mesure de répondre parfaitement à une hausse de 25 % en six mois du nombre de demandeurs d’emploi accompagnés ? Comment prétendre sérieusement qu’un service public de l’emploi, quel que soit son mode d’organisation, peut s’adapter du jour au lendemain à une situation aussi difficile ? La seule vraie question est de savoir si Pôle emploi permet ou non d’améliorer la situation et quels sont les voies de progrès envisageables en cette période de crise.
De ce point de vue, il n’est pas mauvais de faire retour sur un passé récent. En 1993, les demandeurs d’emploi formaient des files d’attente devant les guichets des ANPE, jusque dans la rue. Les antennes des ASSEDIC étaient obligées de fermer un jour sur deux parce qu’elles étaient dans l’incapacité de faire face au flot des demandes d’indemnisation. Les demandeurs d’emploi devaient attendre un mois avant d’être inscrits et d’obtenir le versement de leur indemnité. Telle était la situation en 1993, avec l’ancien système de l’ANPE et des ASSEDIC.
Je ne prétends pas un seul instant que tout est parfait aujourd’hui et que les 500 000 nouveaux demandeurs d’emploi sont pris en charge sans aucun problème par le service public. Néanmoins, je ne laisserai pas dire que Pôle emploi fait moins bien que l’ancien système poussiéreux que constituaient l’ANPE et les ASSEDIC, dont les défaillances furent catastrophiques en 1993. Rappelons-nous la situation apocalyptique de cette année-là, alors que la situation de l’emploi était pourtant trois fois moins grave qu’aujourd’hui ! Grâce à la motivation des agents de Pôle emploi, grâce à leur travail quotidien, grâce aux gains d’efficacité que permet d’obtenir, mois après mois, même dans l’adversité, la nouvelle structure, nous arrivons à faire face bien mieux qu’à l’époque à une situation beaucoup plus difficile. Pour autant, cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas beaucoup de choses à améliorer.
Si la fusion ayant conduit à la création de Pôle emploi était une opération facile, pourquoi, en vingt ans, aucune majorité n’a-t-elle eu le courage de s’attaquer à ce sujet épineux et délicat ? En réalité, la fusion est difficile, la mettre en œuvre nécessite du courage politique, mais nous gardons le cap et allons de l’avant. Je ne me lasse pas de le répéter, le défi que nous devons relever, c’est, mois après mois, de mieux protéger ceux de nos concitoyens qui en ont besoin et d’améliorer progressivement la situation, en lien étroit avec les agents de Pôle emploi. Vous l’avez d’ailleurs relevé, monsieur Vantomme : le problème, ce n’est pas le vaisseau, c’est la tempête. Notre travail est de faire en sorte que les voiles soient bien carguées, que le cap soit tenu afin que, progressivement, nous puissions sortir de la tempête.
Où en sommes-nous ?
Tout d’abord, la fusion des deux organismes se déroule de façon toujours plus opérationnelle. Nous avons réussi à unifier le fonctionnement interne de Pôle emploi, avec la mise en place de vingt-six directions régionales. D’ores et déjà, 430 directeurs locaux ont été nommés, l’ensemble des managers de la direction générale, les directeurs régionaux et territoriaux ont été désignés et, d’ici à la fin du mois de juillet 2009, la totalité des 930 directeurs des pôles locaux seront nommés. Un contrat de performance fixe les objectifs et les moyens assignés à chacun de ceux-ci. Je rejoins tout à fait M. Demuynck sur la nécessité de bien encadrer cette possibilité ouverte à chaque structure de s’organiser au mieux en fonction des réalités du terrain. Je sais que le Sénat est extrêmement vigilant sur ce point.
En ce qui concerne la future convention collective, sujet important abordé par Mme Procaccia, il a été décidé d’attendre la tenue des élections professionnelles, à la fin de septembre et au début d’octobre, parce qu’une négociation aussi cruciale ne peut être menée qu’avec les nouveaux représentants des agents, ceux qui feront vivre la nouvelle structure. Notre objectif, que je m’engage à atteindre, est cependant d’aboutir avant la mi-2010, car il est important pour les agents de savoir dans quel cadre ils vont travailler. Je rappelle que les agents publics de Pôle emploi auront la possibilité de choisir entre la nouvelle convention collective et leur statut actuel.
Quels gains d’efficacité tangibles a d’ores et déjà apportés la création de Pôle emploi ?
La synergie obtenue, l’élimination des doublons entre l’ANPE et les ASSEDIC nous permettront de mettre progressivement au service direct du public, demandeurs d’emploi et entreprises, l’équivalent de 3 000 conseillers. Dans les douze mois qui viennent, nous enregistrerons ainsi des gains d’efficacité très substantiels. Cela représente l’équivalent d’environ quatre conseillers par agence, chaque structure comprenant entre trente et quarante agents en moyenne. Cela s’ajoutera aux 1 840 agents supplémentaires actuellement en cours de recrutement et qui arriveront sur le terrain dans les jours à venir.
Je rappelle que la fusion, qui progresse chaque jour, débouche sur la création d’une entité comportant 45 000 agents et 1 500 implantations sur l’ensemble du territoire. Je ne suis pas de ceux qui croient qu’une telle révolution culturelle se fait en claquant des doigts. Elle s’opère progressivement, en affrontant les difficultés, mais elle avance.
Un autre point très important est l’amélioration du service rendu.
Madame David, chaque semaine, je me rends sur le terrain, dans une agence de Pôle emploi, pour dialoguer avec le personnel. Ainsi, comme l’a rappelé M. Demuynck, j’ai passé une journée complète à Saint-Ouen, où, hors la présence de caméras ou de journalistes, j’ai écouté les agents.
À cette occasion, j’ai pu me rendre compte des améliorations apportées au service rendu aux demandeurs d’emploi. Quelles sont-elles ?
Tout d’abord, bien entendu, le demandeur d’emploi n’a plus à se rendre qu’en un seul lieu pour obtenir l’ensemble des informations dont il a besoin. Cela change tout ! Un demandeur d’emploi n’est pas un schizophrène dont le cerveau aurait érigé une séparation mentale absolue entre sa recherche d’un emploi et son indemnisation. Dans sa démarche et dans son esprit, les deux sujets sont totalement imbriqués.
L’un de mes premiers souvenirs, en tant que secrétaire d’État à l’emploi, concerne un demandeur d’emploi de Lille, que j’avais accompagné dans son parcours d’insertion et d’indemnisation. Lors de son premier entretien, il avait expliqué à l’agent des ASSEDIC qui le recevait qu’une entreprise de logistique lui avait proposé de l’embaucher sous contrat à durée indéterminée, à condition qu’il soit titulaire d’un certificat d’aptitude à la conduite en sécurité, un CACES, et qu’il souhaitait, en conséquence, pouvoir suivre cette formation immédiatement. Il lui fut alors répondu qu’il n’était pas possible d’aborder cette question à ce stade et qu’il fallait au préalable procéder à l’inscription administrative en vue de l’indemnisation. Je vous laisse imaginer le visage de cette personne qui venait de perdre son travail et avait besoin d’être soutenue… On la renvoyait, pour présenter sa demande, à un autre guichet, située en un lieu différent ! Voilà l’un des changements qu’apporte la création de Pôle emploi : le demandeur d’emploi peut obtenir les réponses à toutes ses questions en un même lieu.
Notre objectif est de parvenir, à terme, à mettre en place un réseau cohérent de 946 sites mixtes sur l’ensemble du territoire, madame David, à partir des 1 500 implantations dont nous avons hérité. Cela constitue pour nous une priorité.
À ce sujet, j’attache la plus haute importance, comme vous tous, à l’accessibilité du service public de l’emploi. Étant élu d’un territoire rural, je sais très bien ce que représente, pour un demandeur d’emploi, le fait d’être confronté à des difficultés de déplacement. J’en prends à nouveau solennellement l’engagement devant le Sénat : non seulement la couverture territoriale assurée par la nouvelle entité ne sera nullement amoindrie, mais elle sera au contraire renforcée. Par exemple, de nouvelles antennes seront ouvertes dans la région Rhône-Alpes et dans la région Centre, notamment dans la partie sud, où une nouvelle agence de Pôle emploi sera également créée. Mon objectif n’est en aucun cas de réduire la présence sur le terrain du service public de l’emploi, il est à l’inverse de profiter du gain d’efficacité permis par la fusion de l’ANPE et des ASSEDIC pour mieux couvrir l’ensemble du territoire. Je le réaffirme, il y aura une amélioration de la couverture territoriale, en aucun cas une régression. Il s’agit d’un progrès historique.
Madame David, 150 sites mixtes étaient opérationnels à la date du 18 juin. Il est vrai que nous avons pris du retard sur le calendrier initial, en raison du processus de consultation des partenaires sociaux. En effet, nous avons choisi de prendre le temps de discuter avec eux. Maintenant que les fondations sont saines, nous allons pouvoir rattraper ce retard pendant l’été pour aboutir au chiffre de 946 sites mixtes.
L’accueil téléphonique est un autre point sur lequel nous essayons de progresser. L’objectif est de mettre en place un numéro unique d’accès au service de Pôle emploi, le 3949, pour que, là encore, le demandeur d’emploi puisse poser l’ensemble de ses questions à un même interlocuteur. Les choses se sont améliorées, mais la situation n’est pas encore satisfaisante. Le paramètre à prendre en compte pour évaluer le fonctionnement d’une plateforme téléphonique, c’est le taux de décroché, à savoir le pourcentage d’appels aboutissant à une communication. On considère, en règle générale, qu’un numéro d’appel fonctionne très bien si le taux de décroché est, au minimum, de 80 %. Pour le 3949, il est actuellement de 70 %. Ce numéro est opérationnel, mais atteindre un taux de décroché de 80 % est l’une des priorités fixées à Pôle emploi pour la rentrée.
Dans cette perspective, nous allons revoir l’organisation en mettant en place des plateformes régionales, internes et mutualisées qui nous permettront d’optimiser l’accueil téléphonique. Je ne veux plus que les conseillers de Pôle emploi perdent un temps précieux, qu’ils pourraient consacrer au contact direct avec les demandeurs d’emploi, à fixer des rendez-vous par téléphone. J’ai demandé à ce que cette situation change. M. Charpy, avec qui nous travaillons en pleine confiance, a pris ce problème à bras-le-corps.
Madame David, vous avez, à juste titre, évoqué la surtaxation des appels au 3949. Il s’agit d’un héritage du passé, puisqu’elle frappait déjà les appels aux numéros préexistants, mais le taux de décroché, notamment aux ASSEDIC, était alors apocalyptique.
M. Guy Fischer. Leur numéro était pratiquement inaccessible !
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je vous remercie de le reconnaître. De ce point de vue, grâce à l’engagement des agents sur le terrain, nous avons tout de même amélioré les choses.
Cela étant, j’ai exercé une pression infernale sur les opérateurs de téléphonie, notamment sur ceux de téléphonie mobile, qui avaient quelque peu profité de la situation, alors que les demandeurs d’emploi rencontrent déjà suffisamment de difficultés financières. Aujourd’hui, si nous avons fait le choix politique de ne pas instaurer la gratuité pour ce numéro, il est néanmoins le moins coûteux de tous les numéros de service public.
Parallèlement, monsieur Jeannerot, nous allons mettre en place un numéro court unique réservé aux employeurs, de manière que la relation entre entreprises et demandeurs d’emploi soit facilitée et plus rapide.
Voilà pour ce qui concerne l’accueil des demandeurs d’emploi. Je vais maintenant évoquer l’amélioration des prestations d’accompagnement.
Quelle était la situation initiale ? Je reprendrai, pour illustrer mon propos, l’exemple de ce demandeur d’emploi de Lille auquel je me suis déjà référé tout à l'heure. La première question qu’on lui a posée, quand il s’est ensuite rendu à l’ANPE, portait non pas sur la pertinence, dans son cas, de suivre la formation qu’il demandait, mais sur le point de savoir s’il était indemnisé par les ASSEDIC, car cela conditionnait la prise en charge de la formation. Hors indemnisation par les ASSEDIC, point de salut, même si la formation demandée doit déboucher sur la conclusion d’un CDI !
Nous sommes maintenant sortis de ce raisonnement typiquement français : aujourd’hui, le demandeur d’emploi qui est accueilli par la nouvelle structure est interrogé non plus sur son statut, mais sur les perspectives d’embauche que lui ouvrira la formation envisagée ; si elles sont réelles, la formation sera financée.
Cette attitude nouvelle nous a également amenés, en particulier, a doublé les aides à la mobilité. Nous avons pu faire exploser ce carcan inepte dont nous étions prisonniers : désormais, les aides sont apportées en fonction des besoins du demandeur d’emploi, et non de son statut. C’est là un changement majeur dans la culture de notre service public de l’emploi et une source importante de simplification. Je sais, monsieur Fouché, que c’est un point auquel vous êtes sensible.
Par ailleurs, la mise en place de l’entretien unique se poursuit. Je rappelle que, dans le système antérieur, le délai maximal d’inscription, qui était en réalité un délai moyen, était de cinq jours. Désormais, les entretiens ont lieu le même jour, l’un à la suite de l’autre, et nous allons progressivement basculer vers un système d’entretien unique personnalisé, un même conseiller s’occupant à la fois de l’indemnisation et de la mise en place d’actions de placement. C’est là le fameux projet personnalisé d’accès à l’emploi.
Mme Procaccia l’a relevé avec beaucoup de justesse, il nous reste à repenser les partenariats entre Pôle emploi et les acteurs qui l’entourent.
À cette fin, nous avons engagé un travail avec l’ensemble des parties prenantes. Je pense bien entendu à Cap emploi, qui joue un rôle essentiel dans l’insertion professionnelle des personnes handicapées, question ô combien importante. Je pense aussi aux missions locales, qui sont des partenaires extrêmement précieux, notamment pour relever les défis s’imposant à nous en matière d’emploi des jeunes. Je pense enfin aux opérateurs privés, qui peuvent, à condition que l’on ne touche pas à la colonne vertébrale du service public, apporter un renfort appréciable en matière d’accompagnement dans cette période où nous avons besoin du concours de tels intervenants, directement opérationnels.
Je voudrais revenir sur la question du partenariat entre les maisons de l’emploi et Pôle emploi, qui a été soulevée par M. Fouché. Je sais à quel point vous êtes attaché à ces structures, monsieur le sénateur. Mme Procaccia a d’ailleurs souligné que Pôle emploi ne devait pas être une citadelle fermée au monde extérieur. Je sais que ce risque peut exister, dans une période où l’énergie des personnels est absorbée dans une large mesure par les questions internes.
Nous avons donc envoyé un message clair à ce sujet : les cadres de Pôle emploi doivent être à la disposition des élus locaux pour les informer de l’évolution de la situation de l’emploi sur leur territoire. En tant que maire du Puy-en-Velay, je suis bien placé pour savoir que c’est par un travail d’équipe que l’on parvient à appliquer les dispositifs au plus près des réalités du terrain.
De ce point de vue, monsieur Fouché, les maisons de l’emploi sont des lieux importants, où peuvent se retrouver autour d’une même table l’ensemble des acteurs de la politique de l’emploi à l’échelle d’un territoire. Elles doivent également émerger en tant que forces de proposition, d’expérimentation locale et d’innovation : je pense, par exemple, à des actions opérationnelles sur le terrain en matière de lutte contre l’illettrisme, à certaines actions transfrontalières ou à la mise en place de modes de garde innovants, autant de domaines dans lesquels Pôle emploi n’est pas en mesure, particulièrement en cette période, de jouer un rôle de pionnier. Les maisons de l’emploi peuvent donc constituer un renfort extrêmement précieux.
En revanche, je le dis pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté en la matière, je ne souhaite pas que les maisons de l’emploi soient des opérateurs de placement. J’ai été amené à dénoncer le fait que, sur certains territoires, un jeu de concurrence malsain s’est établi entre les maisons de l’emploi et Pôle emploi.
M. Alain Fouché. Une complémentarité, pas une concurrence.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Je le répète, il n’est pas possible que les maisons de l’emploi et Pôle emploi accomplissent le même travail sur un même territoire.
En ce qui concerne la maison de l’emploi de Chevigny, monsieur Fouché,…
M. Alain Fouché. Chevigny et ailleurs.
M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Bien sûr, mais l’examen d’une situation locale peut nous permettre de comprendre comment les choses fonctionnent et d’en tirer des leçons à l’échelle nationale.
Il est bien évident que Pôle emploi continuera à animer une antenne dans votre maison de l’emploi, comme il le fera dans toutes celles auxquelles il est associé. Ce que je ne veux pas, c’est que, sur un territoire où coexistent une antenne de Pôle emploi et une maison de l’emploi, les deux services fassent le même travail, car ce serait réintroduire de la complexité dans le dispositif.
Mon souhait est donc que les maisons de l’emploi et Pôle emploi travaillent le plus possible dans un esprit d’association, de complémentarité – mot que vous avez employé avec raison, monsieur Fouché. Pôle emploi doit pouvoir tenir des permanences à l’intérieur des maisons de l’emploi. En revanche, je ne continuerai pas à financer des actions de placement sur des territoires où les maisons de l’emploi et Pôle emploi entreraient dans un jeu de concurrence malsain, faisant parfois l’objet d’une exploitation politique. Je le redis pour être tout à fait clair, en référence à des réalités locales que je connais très bien.
Dans ce cadre, je vous soumettrai avec plaisir, si vous le souhaitez, le cahier des charges que nous élaborons pour les maisons de l’emploi et qui sera mis en place au début de 2010. Nous avons notamment la volonté de répondre à une revendication forte des élus locaux, celle de sortir de ce système surréaliste de financement des maisons de l’emploi qui donnait lieu à une circulation complexe des dossiers, épuisante tant pour les services des maisons de l’emploi que pour la Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle. Nous allons passer à un système fondé sur la confiance et la contractualisation, avec évaluation a posteriori. Il n’y aura plus ces versements de crédits au compte-gouttes qui aboutissent à susciter de graves difficultés de trésorerie pour un trop grand nombre de maisons de l’emploi. Cette évolution vers un dispositif beaucoup plus moderne de gestion de ces structures ne pourra être que positive.
Je voudrais maintenant mettre l’accent sur un sujet qui n’a guère été abordé.
Certains outils de la politique de l’emploi font l’objet de demandes pressantes des élus locaux auprès de mes services. Je pense notamment aux contrats de transition professionnelle, désormais gérés par Pôle emploi, ce qui permet d’améliorer la situation sur le terrain, dans les territoires les plus durement frappés par la crise. Je pense également au dispositif « zéro charges », qui, à ce stade, a permis l’équivalent de 310 000 embauches dans les entreprises de moins de dix salariés. Avant la création de Pôle emploi, dans l’ancien système constitué de l’ANPE et des ASSEDIC, nous n’aurions jamais réussi à monter un dispositif d’une telle simplicité, avec un formulaire téléchargeable sur internet, très aisé à remplir. Cela représente une autre amélioration très concrète permise par la création de Pôle emploi. On peut discuter du contenu du dispositif, mais tous les acteurs de terrain s’accordent à reconnaître son utilité pour les entreprises de moins de dix salariés.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l’avez compris, je ne cherche nullement à minimiser les difficultés, ni à nier les circonstances adverses auxquelles sont confrontés les agents de Pôle emploi et les demandeurs d’emploi en cette période. Je ne cherche en aucun cas à jeter un voile pudique sur les problèmes afin de pouvoir prétendre que tout est absolument parfait.
Cependant, je pense que chacun d’entre nous doit, en son âme et conscience, se poser des questions simples : voulons-nous revenir à l’ancien dispositif à deux guichets distincts et à deux entretiens, avec un décalage pouvant dépasser trois semaines, en période de crise, entre l’inscription à l’ANPE et l’indemnisation par les ASSEDIC ? Voulons-nous réinstaurer un système où obtenir une réponse exigeait de se lancer dans un jeu hasardeux de ping-pong entre deux numéros de téléphone et deux sites internet, avant de savoir auquel des deux conseillers, celui des ASSEDIC ou celui de l’ANPE, il fallait s’adresser ? Voulons-nous rétablir un système dans lequel les aides étaient séparées et où l’on raisonnait en termes de statut, et non en fonction des besoins des demandeurs d’emploi, un système incapable de soutenir des innovations telles que les contrats de transition professionnelle ou le dispositif « zéro charges » ? Je ne le pense pas !
Nous sommes, à l’échelle de la politique de l’emploi, devant un vrai défi historique. Le choix est clair : allons-nous opter pour l’immobilisme, en revenant à l’ancien dispositif de l’ANPE et des ASSEDIC, ou allons-nous décider de nous diriger vers la modernisation du service public de l’emploi, certes soumis, dans cette période de crise, à de très fortes turbulences, et qui doit encore être amélioré ? Pour ma part, je rejette le choix du conservatisme et les combats d’arrière-garde. Nous devons au contraire nous battre pour que le nouveau système soit efficace et permette d’accompagner au mieux, de façon personnalisée, les demandeurs d’emploi et les employeurs, afin d’améliorer, mois après mois, la situation, comme s’y efforcent chaque jour les agents de Pôle emploi sur le terrain. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. La parole est à M. André Vantomme.
M. André Vantomme. J’ai le sentiment, cet après-midi, que la vérité est pluraliste. Elle s’est exprimée au travers des propos des différents intervenants, y compris bien sûr les vôtres, monsieur le secrétaire d’État.
Globalement, le jugement qui est porté sur Pôle emploi est, convenons-en, mitigé. J’espère que nos interventions, quelles que soient les travées sur lesquelles nous siégeons, contribueront à éclairer les décisions que vous serez amené à prendre pour remédier à une situation qui reste très perfectible aux yeux de bon nombre d’entre nous. C’est là votre responsabilité, et le temps presse pour agir. Nous suivrons avec attention vos propositions et votre action. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. En application de l’article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.