Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Milon, rapporteur. Je partage la position de M. le président de la commission des affaires sociales. Depuis le début de l’examen de ce projet de loi, nous tentons d’éviter les énumérations, qui entraînent inévitablement des omissions et nous contraindront par conséquent à intervenir de nouveau sur le texte pour réparer d’éventuels oublis.
C'est la raison pour laquelle la commission préfère que soit retenue une rédaction plus générale, s’arrêtant après les mots : « ou d’exclusion ».
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Valérie Létard, secrétaire d'État. Vous avez raison, il ne faut omettre aucune catégorie de la population en situation de précarité ou d’exclusion. Je rectifie donc le sous-amendement n° 1318 dans le sens exposé par M. le président de la commission et M. le rapporteur. Ce faisant, nous donnons satisfaction à Jean Desessard, qui entend mettre l’accent sur une partie de la population qui souffre plus particulièrement en ce moment et qu’il convient de protéger.
Nous voyons bien là tout l’intérêt du débat et du travail parlementaires !
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Très bien !
Mme la présidente. Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 1318 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
À la fin du second alinéa de l'amendement n° 879, remplacer les mots :
accueillies en centre d'hébergement d'urgence
par les mots :
en situation de précarité ou d'exclusion
Je le mets aux voix.
(Le sous-amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 879 rectifié, modifié.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Mme la présidente. L'amendement n° 1327, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après les mots :
actions régionales
rédiger comme suit la fin du dernier alinéa (e) du 2° du texte proposé par cet article pour l'article L. 1431-2 du code de la santé publique :
prolongeant et complétant les programmes nationaux de gestion du risque et des actions complémentaires. Ces actions portent sur le contrôle et l'amélioration des modalités de recours aux soins et des pratiques des professionnels de santé, en médecine ambulatoire et dans les établissements et services de santé et médico-sociaux.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Beaucoup se souviennent de l'amendement n° 1010 rectifié, présenté mercredi dernier par M. About, qui a recueilli un large consensus et qui prévoit à l'article L. 1434-11 du code de la santé publique que « le programme pluriannuel régional de gestion du risque de santé comprend, outre les actions nationales définies par la convention prévue à l’article L. 182-2-1-1, des actions complémentaires tenant compte des spécificités régionales ».
Cette rédaction doit être reprise à l'article L. 1431-2 du même code. Tel est l’objet de cet amendement de cohérence.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission émet un avis favorable.
Mme la présidente. L'amendement n° 209 rectifié, présenté par Mmes Morin-Desailly et Férat, M. J.L. Dupont, Mme Dini, M. Détraigne, Mme Dumas, MM. Thiollière, Pozzo di Borgo et Merceron, Mmes Mélot et Payet et MM. Amoudry et Chauveau, est ainsi libellé :
Compléter le 2° du texte proposé par cet article pour l'article L. 1431-2 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) En relation avec les directions régionales des affaires culturelles mais aussi avec les collectivités territoriales qui le souhaitent, elles encouragent et favorisent, au sein des établissements, l'élaboration et la mise en œuvre d'un volet culturel.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Mme Anne-Marie Payet. Il s’agit d’un amendement de coordination avec l'amendement n° 207 rectifié adopté à une large majorité à l'article 3, qui prévoit que les contrats d’établissement comportent non seulement un volet social mais également un volet culturel.
Depuis plusieurs années, les nombreuses expériences qui ont été menées dans les établissements de santé en matière culturelle l’ont été sur le fondement de la convention signée entre le ministère de la santé et le ministère de la culture le 4 mai 1999, qui définit un programme appelé « Culture à l’hôpital » et qui a posé les premiers jalons. Le protocole du 10 janvier 2006, signé entre les deux ministères, a renforcé cette dynamique. Ce programme s’est concrétisé par des conventions signées entre les agences régionales de l’hospitalisation et les directions régionales des affaires culturelles, les DRAC. Des programmes ont également été mis en place avec les collectivités territoriales. Comme l’a déjà expliqué ma collègue Catherine Morin-Desailly, ces dispositifs ont montré tout leur intérêt et ont pris place dans le cadre du projet d’établissement de nombreux hôpitaux.
Aussi nous semble-t-il utile de préciser que les nouvelles agences régionales de santé, en lien avec les DRAC, pourront, dans la continuité de ce que faisaient les ARH, jouer un rôle d’impulsion et d’initiative.
Tel est le sens de cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. Le volet culturel a déjà été introduit à l'article 3, dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, les CEPOM.
Par conséquent, la commission considère que cet amendement est satisfait et en demande le retrait. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. M. le rapporteur vient de le rappeler, nous avons répondu à cette volonté au titre Ier, dans le cadre du chapitre Ier relatif aux missions des établissements de santé.
L’accès à la culture dans les hôpitaux est tout à fait primordial. Toutefois, réintroduire cette démarche au sein des ARS entraînerait une confusion entre les missions des différents services de l’État. Une gestion conventionnelle entre les ARS et les DRAC paraît donc suffisante.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement, dont l’objet est satisfait à l'article 3 du projet de loi.
Mme la présidente. Madame Payet, l'amendement n° 209 rectifié est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet. Madame la ministre, il est vrai que nous avons décidé à l’article 3, à l’unanimité d’ailleurs, que les contrats d’établissement comporteraient un volet culturel. Pour autant, nous n’en avons pas précisé les modalités. Bien entendu, cela reste de la responsabilité de chaque établissement. Malgré tout, il nous semble important de garantir la qualité des interventions culturelles prévues. Aussi nous semble-t-il utile de préciser, en nous appuyant sur le résultat très positif des expérimentations menées depuis dix ans, que la mise en œuvre de ce volet culturel devra pouvoir être accompagné par les ARS, en association avec les DRAC et les collectivités territoriales qui le souhaitent et qui disposent elles-mêmes de savoir-faire.
C'est la raison pour laquelle nous souhaitons vivement que l'article L. 1431-2, qui porte sur les missions confiées aux ARS, puisse inclure la réflexion sur les politiques culturelles.
Tel qu’il est rédigé, cet amendement ne fait pas peser une contrainte extrême sur lesdits acteurs, puisque sont utilisés les verbes « souhaiter », « encourager », « favoriser ». Ce texte est important : son adoption permettra de garantir le sérieux et le professionnalisme des interventions dans le domaine culturel à l’hôpital.
Par conséquent, madame la présidente, je maintiens cet amendement, très cher au cœur de Catherine Morin-Desailly.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 876 rectifié, présenté par M. Desessard, Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet et M. Muller, est ainsi libellé :
Compléter le 2° du texte proposé par cet article pour l'article L. 1431-2 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Elles pilotent la mise en œuvre des registres des cancers en s'appuyant en tant que de besoins sur les observatoires régionaux de la santé ;
La parole est à M. Jean Desessard.
M. Jean Desessard. L’amendement n° 1021, déposé par M. Le Menn, étant très proche du mien, M. le rapporteur nous dira celui qu’il préfère… (Sourires.)
L’amendement n° 876 rectifié a pour objet de généraliser les registres du cancer en confiant aux agences régionales de santé le pilotage de leur mise en œuvre en coopération avec les observatoires régionaux de la santé. En effet, la mise en place des registres du cancer est une promesse du plan national santé environnement et une préconisation du groupe de travail n° 3 « Instaurer un environnement respectueux de la santé » du Grenelle de l’environnement.
Mme la présidente. L'amendement n° 1021, présenté par MM. Le Menn, Cazeau et Desessard, Mmes Alquier et Blondin, M. Botrel, Mme Campion, M. Chastan, Mme Chevé, MM. Daudigny et Daunis, Mmes Demontès et Durrieu, MM. Fauconnier et Fichet, Mme Ghali, M. Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, MM. Jeannerot et Lagauche, Mmes Printz et Le Texier, MM. Mirassou et Rebsamen, Mme Schillinger, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le 2° du texte proposé par cet article pour l'article L. 1431-2 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« f) Elle met en place un registre de cancers chargé d'effectuer le recueil continu et exhaustif des nouveaux cas de cancers de la région, en s'appuyant en tant que de besoin sur les observatoires régionaux de la santé.
La parole est à M. Jacky Le Menn.
M. Jacky Le Menn. Cet amendement est le frère jumeau de celui que vient de présenter Jean Desessard.
Je rappelle que, en 2003, selon le souhait du Président de la République, la lutte contre le cancer a été érigée au rang de priorité nationale de santé publique, ce qui a abouti à la mise en œuvre d’un premier plan quinquennal.
Au mois de mars dernier, madame la ministre, vous avez vous-même présenté les principales mesures du nouveau plan cancer, élaboré à partir des recommandations émises par le professeur Grünfeld dans son rapport Recommandations pour le plan cancer 2009-2013 – Pour un nouvel élan, remis au Président de la République le 27 février 2009.
Nous souhaitons fortement que soit mis en place par chacune des ARS « un registre de cancers chargé d’effectuer le recueil continu et exhaustif des nouveaux cas de cancers de la région », afin de donner à la France les moyens de conduire et d’améliorer sa politique en matière de cancer, qui reste une pathologie extrêmement lourde à traiter.
M. Jean Desessard. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La mise en œuvre des registres du cancer est effective et prise en charge par l’Institut de veille sanitaire, l’InVS, en collaboration avec l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM. Rien ne justifie de changer d’organisme.
M. Gilbert Barbier. Oui, cela se fait très bien !
M. Alain Milon, rapporteur. C'est la raison pour laquelle, au risque de décevoir nos collègues Jean Desessard et Jacky Le Menn, la commission émet un avis défavorable sur les amendements nos 876 rectifié et 1021.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’objectif de Jean Desessard et Jacky Le Menn est largement atteint.
Il existe actuellement quinze registres généraux, qui ont pour mission de couvrir 20 % de la population métropolitaine. Les registres du cancer ont une expérience fort ancienne de l’épidémiologie. Les amendements nos 876 rectifié et 1021 visent tous deux à compléter ce dispositif en plaçant les registres du cancer sous l’égide des ARS, afin de développer notamment une surveillance dans les départements non couverts. Or l’Institut de veille sanitaire met en place un système multi-sources de surveillance des cancers, qui permettra de contrôler l’émergence des nouveaux cas dans chaque région et autorisera des comparaisons interrégionales.
Ces amendements tendent également à faire en sorte que les observatoires régionaux de la santé appuient ces registres du cancer. Ces organismes contribuent à mettre à disposition des informations générales sur la santé en recherchant des données à l’échelon tant régional qu’infrarégional. Pour autant, ils ne sont pas chargés des registres du cancer et n’interviennent pas dans leur mise en place. Il ne faut pas créer de confusion entre les responsabilités.
L’amélioration des registres du cancer fera l’objet de mesures très précises, qui seront inscrites dans le plan cancer 2009-2013, publié dans quelques semaines.
S’il apparaissait, ce qui est loin d’être certain, qu’un certain nombre de ces mesures méritaient un fondement législatif, nous les inscririons dans la future loi de santé publique, dont l’examen est prévu prochainement.
Pour l’instant, monsieur Desessard, monsieur Le Menn, le dispositif de progression que vous souhaitez est d’ores et déjà à l’œuvre.
Mme la présidente. Monsieur Desessard, l'amendement n° 876 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Compte tenu des explications de Mme la ministre, je retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 876 rectifié est retiré.
Monsieur Le Menn, l'amendement n° 1021 est-il maintenu ?
M. Jacky Le Menn. Non, je le retire également, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 1021 est retiré.
L'amendement n° 920, présenté par MM. Autain et Fischer, Mmes David, Hoarau, Pasquet et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Compléter le 2° du texte proposé par cet article pour l'article L. 1431-2 du code de la santé publique par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Elles autorisent les installations dans les zones surdenses dans la limite d'un plafond fixé par décret.
La parole est à M. François Autain.
M. François Autain. Cet amendement tend, pour contribuer à mieux équilibrer la répartition des médecins sur le territoire, à s’inspirer de ce qui a été mis en place pour les infirmiers libéraux. Pour ces derniers, un arrêté ministériel a déterminé les critères communs permettant de définir les zones surdenses, afin que les missions régionales de santé puissent mener des études à l’échelon local et déterminer ainsi les zones surdotées. L’obligation réciproque de régulation de l’offre dans les zones surdenses a fait alors l’objet d’une circulaire adressée à tous les préfets de département ainsi qu’aux directeurs des unions régionales des caisses d’assurance maladie.
Mme la ministre de la santé et des sports et Mme la secrétaire d’État chargée de la solidarité ont précisé que ces nouvelles mesures seraient prolongées sans la moindre difficulté, puisque la prise en charge de la globalité de cette régulation serait confiée aux missions régionales de santé, avant que les agences régionales de santé ne se voient confiées, en plus de la définition des zones surdenses, le soin de veiller à sa mise en œuvre, en lien avec les acteurs locaux.
La disposition que nous vous soumettons n’est que le miroir, adapté aux médecins, des dispositions qui ont été prises pour les infirmiers libéraux. Il ne s’agit pas là d’une mesure à proprement parler répressive. Cette disposition vise plutôt à pondérer la cadence des installations en zones surdenses, en permettant ce faisant aux zones sous-dotées d’être un peu mieux loties.
Nous sommes en effet à la croisée des chemins. D’une part, on observe que, lors de leur installation, les médecins privilégient des critères tels que la proximité de la capitale et, en général, des centres-villes, l’ensoleillement ou la proximité de la mer, au détriment des zones rurales et des zones urbaines sensibles.
D’autre part, les projections de l’Observatoire national de la démographie des professions de santé montrent que le potentiel démographique des médecins a commencé à baisser depuis 2008, le nombre de praticiens partant à la retraite étant plus important que celui des nouveaux diplômés, et que cette situation durera jusqu’en 2025.
Si l’offre de soins est appelée à se contracter, comme le rappelle M. le député Bernier dans le récent rapport de la mission d’information sur l’offre de soins sur l’ensemble du territoire, la demande de soins risque de croître avec le vieillissement de la population et la forte prévalence des maladies chroniques.
L’amendement n° 920 vise à prendre en compte cet avertissement et à le traduire rapidement en mesures concrètes.
M. Guy Fischer. Très bien !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Milon, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, par cohérence avec ses précédentes positions. En effet, elle ne prévoit pas de soumettre à autorisation administrative l’installation des praticiens libéraux.
Une comparaison ayant été faite avec les infirmières, je rappelle que la limitation de la liberté d’installation de ces dernières a été faite par voie conventionnelle et non par voie législative.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cet amendement fondamental constitue un point de fracture, une ligne de démarcation entre la majorité et l’opposition.
La majorité est très attachée à la liberté d’installation des professionnels libéraux. Lors de l’examen du titre II, nous aborderons toute une série de mesures tendant à équilibrer la démographie médicale, à pallier la désertification que connaît notre territoire en professionnels de santé, quels qu’ils soient, mesures concernant aussi bien les études, l’installation, les modes d’exercice, le développement des coopérations entre professionnels de santé.
Nous étudierons également la création d’un corps de médecins boursiers qui seront à la disposition des agences régionales de santé afin d’étoffer l’offre de soins dans les zones sous-denses, tout cela dans le respect de la liberté d’installation.
Comme l’a fort bien indiqué M. le rapporteur, les mesures acceptées par les infirmiers et les infirmières l’ont été dans le cadre de la négociation conventionnelle, en échange de prises en charge substantielles et d’aides financières très importantes.
Si, dans le cadre de la négociation conventionnelle, les médecins souhaitaient aller dans cette voie, le Gouvernement agirait en conséquence.
M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales. Ce serait surprenant !
M. Guy Fischer. Surtout par les temps qui courent !
Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Monsieur About, je vous laisse la paternité de votre observation !
Quoi qu’il en soit, le Gouvernement émet un avis philosophiquement défavorable, si je puis dire.
M. Guy Fischer. Vive le libéralisme et la liberté !
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Cazeau, pour explication de vote.
M. Bernard Cazeau. On ne peut balayer d’un revers de main l’amendement n° 920. Néanmoins, monsieur Autain, on ne peut pas, au détour d’un amendement, prendre une décision sur un sujet aussi important.
M. Dominique Leclerc. Très bien !
M. Bernard Cazeau. Le débat aura lieu lors de l’examen du titre II, quand sera abordé le problème de la démographie.
Madame la ministre, nous disposons de certains éléments. Le rapport Bernier nous a donné différentes pistes. Les entretiens que nous avons pu avoir les uns et les autres avec les associations nationales d’étudiants en médecine ou d’internes nous ont permis de connaître l’avis des jeunes, et pas seulement celui de la Confédération des syndicats médicaux français, la CSMF, qui campe sur son conservatisme habituel.
Un débat doit avoir lieu. Il doit être plus riche que celui que vous nous proposez, madame la ministre, et qui constitue un pis-aller, un processus d’attente ou d’appel, selon la formule que vous préférerez. Vous renvoyez le traitement des problèmes à 2012, date à laquelle il sera plus facile de les régler – M. About le sait également –, après l’échéance que vous connaissez.
Il existe un véritable problème démographique auquel il faut essayer de trouver des solutions. Nous ne pourrons pas nous contenter des propositions qui sont faites, sauf à décevoir grandement nos concitoyens, particulièrement tous ceux qui, aujourd’hui, dans un certain nombre de départements, peinent à trouver le médecin généraliste de premier recours qui va être institué et qui se tournent, parfois en vain, vers les médecins de dernier recours.
Mme la présidente. La parole est à M. François Autain, pour explication de vote.
M. François Autain. N’anticipons pas sur le débat qui aura lieu lors de l’examen du titre II. Cependant, dès maintenant, je veux vous faire remarquer, monsieur le rapporteur, vous qui vous en remettez à la négociation conventionnelle pour régler le problème de l’installation des médecins, que jusqu’à présent, dans ce domaine comme dans bien d’autres, ce processus a échoué.
M. François Autain. Lors de l’examen d’un amendement défendu puis retiré par M. Vasselle, nous avons évoqué la négociation relative au secteur optionnel, aujourd'hui complètement enlisée, qui a commencé non pas il y a quelques mois, comme vous l’avez indiqué, madame la ministre, mais voilà bientôt cinq ans.
Comment faire confiance à la négociation conventionnelle pour régler des problèmes d’une grande importance, tels la répartition inégale territoriale de l’offre de soins et les dépassements d’honoraires ? Un jour ou l’autre – le plus tôt sera le mieux –, le Gouvernement devra bien prendre ses responsabilités.
D’année en année, au fil de l’examen des différentes lois de financement de la sécurité sociale, vous avez promis, madame la ministre, de faire œuvre législative si la négociation conventionnelle n’aboutissait pas. Malheureusement, aucun projet de loi n’a été déposé. Vous continuez à vous en remettre à une négociation qui n’aboutit pas.
Par ailleurs, vous faites de la liberté d’installation des médecins l’alpha et l’oméga de votre politique. Vous l’avez défendue bec et ongles, sans beaucoup de mérite puisque vous aviez à vos côtés l’ensemble de la profession. Malheureusement, cette attitude ne répond pas à la demande des patients, qui sont lésés par cette liberté.
Force est de constater que l’accessibilité géographique et tarifaire de tous à des soins de qualité, loin de s’améliorer, est en train de régresser, et que la politique que vous avez mise en œuvre a par conséquent échoué.
Le moment est venu, selon moi, de remettre en cause cette politique. Il ne suffit pas de revendiquer un attachement à la liberté d’installation des médecins pour que tous les patients soient pris en charge comme ils le devraient. Il va bien falloir un jour essayer de revoir les fondements de la médecine ambulatoire, à savoir la liberté d’installation et le conventionnement systématique, quel que soit le lieu d’installation.
Enfin, le système applicable aux infirmiers l’est également aux pharmaciens, qui ont accepté de s’installer dans des zones complètement désertes, bien qu’ils aient eux aussi une famille. Seuls les médecins rencontrent des problèmes majeurs en matière d’installation. Sans doute existe-t-il une raison que j’ignore…
Quoi qu’il en soit, on ne peut pas se retrancher derrière une défense intangible de la liberté d’installation. Cette attitude est complètement dépassée, eu égard aux besoins actuels de la population.
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Leclerc, pour explication de vote.
M. Dominique Leclerc. Il ne serait pas judicieux de faire un débat avant l’heure sur l’installation des médecins généralistes. Mais, en cet instant, je veux formuler quelques observations.
Nous sommes attachés à la liberté d’installation et nous sommes convaincus que des mesures autoritaires et coercitives n’amèneront pas les jeunes médecins à exercer dans des zones défavorisées. Un point ne doit pas être oublié : indépendamment de toute disposition coercitive, les vocations de médecins vont se tarir. En effet, comment faire accepter à des jeunes ayant suivi une dizaine d’années d’études d’exercer dans des zones qu’ils ne considèrent pas comme attractives, pour des raisons que nous connaissons ?
M. François Autain. Et les pharmaciens ?
M. Dominique Leclerc. Par ailleurs, selon les statistiques, les médecins n’ont jamais été aussi nombreux. Mais aujourd’hui, seuls 30 % des jeunes diplômés en médecine générale s’installent,…
M. François Autain. Ils sont un peu plus nombreux !
M. Dominique Leclerc. …et ils attendent dix ans avant de le faire, quel que soit le lieu géographique choisi. Réfléchissez aux raisons pour lesquelles les jeunes hésitent à s’orienter vers un exercice libéral contraignant, n’offrant pas les garanties qu’ils seraient en droit d’attendre au bout de vingt années d’exercice professionnel, puisque doivent être pris en compte les temps de formation et de remplacement.
M. François Autain. Eh oui ! Peut-être ne sont-ils pas assez rémunérés…
M. Dominique Leclerc. La voie conventionnelle est la seule possible. Pourquoi est-elle bloquée aujourd’hui ? Posez-vous la question !
Voilà quelques jours, nous évoquions les honoraires « à un juste prix ».
M. François Autain. Eh oui !
M. Dominique Leclerc. Au nom de quelle légitimité la CNAM adopte-t-elle une position aussi bloquée sur des tarifs qui ne correspondent parfois à aucune prestation chirurgicale ?
M. François Autain. C’est un élément !
M. Dominique Leclerc. Soyons raisonnables : quelle somme nette perçoit le praticien qui touche une rémunération brute de 300 euros pour l’opération d’une hernie discale ? Ce professionnel acceptera-t-il de prendre la responsabilité d’effectuer un tel acte technique pour une rétribution qu’en votre qualité d’élus, mes chers collègues, vous n’accepteriez pas à titre d’indemnité ? N’exigez pas des autres ce que vous n’acceptez pas pour vous-mêmes !
Le système conventionnel est aujourd’hui bloqué parce qu’un partenaire campe sur des positions totalement irréalistes. De quel droit ? Telle est la question que je pose à nouveau.
Mme la présidente. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Certes, nous abordons une question qui n’aurait peut-être pas dû être examinée en cet instant. Mais je suis très surpris par l’attitude de la Haute Assemblée qui, de manière systématique, entend prendre des sanctions ou des mesures coercitives à l’encontre de professionnels dont nous essayons de corriger la pénurie extrême. Cette méthode serait excessivement dangereuse.
Comme vous, madame le ministre, je considère qu’il s’agit d’un problème philosophique de base, sur lequel nous devrons nous prononcer.
Il est curieux d’assister, dans cette enceinte, à des attaques aussi violentes que celle qu’a lancée la semaine dernière un collègue socialiste, affirmant que les internes et les chefs de clinique coûtaient à la société. Compte tenu du travail effectué par ces praticiens dans les hôpitaux publics, ce propos est proprement scandaleux !