M. Michel Charasse. Exactement !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L’inscription de cette possibilité a fait l’objet d’un consensus au sein de la commission des lois. Plusieurs commissions pourraient d’ailleurs être saisies, mais à défaut d’accord, une commission spéciale serait constituée.
M. Michel Charasse. C’est le règlement !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cela étant dit, la commission modifie encore son amendement n° 3 rectifié, et propose maintenant la rédaction suivante : « Les règlements des assemblées peuvent prévoir qu’une proposition de résolution est envoyée à une commission permanente ou à une commission spéciale. » Le règlement précisera les conditions dans lesquelles les propositions de résolution seront envoyées à une commission.
MM. Michel Charasse et Pierre Fauchon. Très bien !
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 3 rectifié bis, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Les règlements des assemblées peuvent prévoir qu'une proposition de résolution est envoyée à une commission permanente ou une commission spéciale.
La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote.
M. Bernard Frimat. Peut-être sommes-nous en train de faire un travail de commission, mais nous apportons surtout la preuve que le débat parlementaire peut permettre de rapprocher les points de vue et être utile.
Puisque personne ici ne met en cause l’élément essentiel du dispositif, à savoir la possibilité du renvoi à une commission, nous nous rallions à l’amendement n° 3 rectifié bis. Par voie de conséquence, nous retirons l’amendement n° 148 et le sous-amendement n° 201.
Mme la présidente. L’amendement n° 148 et le sous-amendement n° 201 sont retirés.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Jean-Pierre Michel. C’est comme en commission !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. C’est ce que j’allais dire, monsieur Michel ! Vous voyez, vous refusez que le Gouvernement assiste aux réunions de commissions, mais vous faites dans l’hémicycle le travail qui aurait dû être effectué en commission, ce qui me fait particulièrement plaisir ! (Sourires.)
Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 3 rectifié bis.
Mme la présidente. Madame Boumediene-Thiery, le sous-amendement n° 57 est-il maintenu ?
Mme Alima Boumediene-Thiery. Je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 57 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 3 rectifié bis.
(L'amendement est adopté.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
Si le Premier ministre estime qu'une proposition de résolution est irrecevable en application du deuxième alinéa de l'article 34-1 de la Constitution, il le fait savoir au président de l'assemblée intéressée avant que l'inscription à l'ordre du jour de cette proposition de résolution ne soit décidée.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, sur l'article.
M. Jean-Pierre Michel. Je partage l’avis de M. le secrétaire d’État, selon lequel ces propositions de résolution constituent une innovation, qui permettra aux parlementaires de s’exprimer en dehors de l’examen des projets de loi, des séances de questions au Gouvernement et, pour l’Assemblée nationale, des procédures de mise en cause de la responsabilité du Gouvernement.
Toutefois, en lisant l’article 34-1 de la Constitution et le présent projet de loi organique, j’ai eu l’impression que le Gouvernement a tremblé en introduisant cette disposition nouvelle.
D’abord, L’article 34-1 de la Constitution dispose que « les assemblées peuvent voter des résolutions dans les conditions fixées par la loi organique ». Je ne pense donc pas, contrairement à ce que vous avez dit tout à l’heure, monsieur le secrétaire d’État, que le Conseil constitutionnel aurait jugé inconstitutionnel le fait de fixer au Gouvernement ou au Premier ministre un certain nombre de délais dans la loi organique, puisqu’ils rentrent tout à fait dans le champ des « conditions » visées par la Constitution.
Plus important, si je comprends bien que le Gouvernement pourra déclarer irrecevables des propositions de résolution qui auraient pour effet de mettre en cause sa responsabilité, puisque des procédures sont prévues à cet effet – le Sénat ne dispose pas d’une telle possibilité –, que recouvre exactement l’interdiction de voter des résolutions qui contiendraient des « injonctions » à son égard ? Que je sache, les assemblées parlementaires ne peuvent adresser des « injonctions » à l’exécutif, dont elles sont indépendantes. Elles votent des lois, que l’exécutif est chargé d’appliquer.
Imaginons qu’une proposition de résolution ait par exemple pour objet de rappeler au Gouvernement qu’il doit prendre les décrets d’application prévus dans une loi adoptée un an auparavant. S’agit-il alors d’une « injonction » ?
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Non !
M. Jean-Pierre Michel. On peut se le demander. Bien entendu, tout est dans le style ! Il n’est pas question d’ordonner quoi que ce soit au Gouvernement. Une assemblée n’en a ni le droit ni la possibilité.
Pour ce qui concerne le projet de loi organique, même si nous venons d’adopter une disposition visant à permettre le renvoi des propositions de résolution à une commission, ce qui me paraît bon, je ne comprends absolument pas l’ « usine à gaz » mise en place par le Gouvernement.
Le texte prévoit d’abord que n’importe quel parlementaire peut déposer, quand il le souhaite, une proposition de résolution, puis que le président de chaque assemblée « transmet sans délai toute proposition de résolution au Premier ministre ».
Ensuite, à l’article 3 bis, il est écrit que « lorsque le président d’un groupe envisage de demander l’inscription d’une proposition de résolution à l’ordre du jour d’une assemblée – on peut supposer qu’il s’agit d’une proposition de résolution que le Premier ministre n’a pas estimée irrecevable –il en informe le président de cette assemblée […] ». Le président d’un groupe doit donc informer le président de l’assemblée de son intention de demander l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution. De quoi s’agit-il exactement ? Le président d’un groupe n’a pas d’intentions ; il a des opinions et une action politiques.
Par ailleurs, comment les parlementaires qui déposent des propositions de résolution à titre personnel pourront-ils les faire inscrire à l’ordre du jour ? Ce n’est pas prévu dans le texte ! Il faudra donc qu’ils passent par un président de groupe. Dès lors, comment feront ceux qui n’appartiennent à aucun groupe ou ceux dont la proposition de résolution n’aura pas obtenu l’assentiment de l’ensemble de leur groupe ? Dans de tels cas, la proposition de résolution sera vouée à l’échec.
Toutes ces dispositions sont donc à la fois très mal rédigées et superfétatoires. Les présidents de groupe auront la possibilité de demander l’inscription à l’ordre du jour d’une proposition de résolution, ce qui, à mon avis, ne pourra pas être refusé si celle-ci n’a pas été déclarée irrecevable, mais le parlementaire qui voudra user de son droit individuel de déposer une proposition de résolution ne pourra pas solliciter son inscription à l’ordre du jour !
Par conséquent, monsieur le secrétaire d’État, on nous donne d’une main un berlingot que l’on reprend très rapidement de l’autre.
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 74 est présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 149 est présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 74.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement de suppression de l’article 3 s’inscrit bien entendu dans notre critique plus globale de la nouvelle procédure des résolutions soumise à la censure du Premier ministre.
On passe d’un système d’interdiction absolue des propositions de résolution à un système de soumission de celles-ci aux desiderata du Premier ministre. J’ai la faiblesse de penser qu’il ne s’agit pas là d’un progrès.
Dans son rapport sur le projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République, M. Warsmann a cité un éminent constitutionnaliste qui, en 1959, disait qu’« il était inévitable que [la nécessaire rupture] ne puisse être entreprise que sous un certain climat d’antiparlementarisme propice à quelques excès maladroits qu’il conviendrait maintenant de dominer ».
Pire, à l’occasion de l’examen de ce projet de loi organique, le groupe UMP de l’Assemblée nationale s’est livré à un accès d’antiparlementarisme. La polémique malsaine autour de l’obstruction et le clip vidéo ridicule de M. Copé amenaient à cette conclusion bien simple : les parlementaires sont prêts à se tirer une balle dans le pied en remettant en cause leur propre droit d’expression !
Concernant les résolutions, le fait de restreindre à ce point les capacités d’initiative en ce domaine ne met-il pas en lumière une conception antiparlementariste des institutions ? Le Parlement est ainsi incompétent, irresponsable ou « irrecevable ».
Selon nous, le présent article 3 n’a donc pas lieu d’être. Sur la forme, il est possible de s’interroger sur l’obligation d’inscrire dans la loi organique de telles dispositions, l’article 34-1 de la Constitution ne précisant que les conditions de recevabilité des propositions de résolution.
Enfin, nous notons que le Premier ministre ne s’adressera qu’au président de chaque assemblée. Quid des présidents de groupe et des auteurs des propositions de résolution ?
Pour cet ensemble de raisons, nous vous proposons, mes chers collègues, de supprimer l’article 3.
Mme la présidente. La parole est à M. Louis Mermaz, pour présenter l’amendement n° 149.
M. Louis Mermaz. L’article 3 est très révélateur de la façon dont le Gouvernement et, surtout, le Président de la République raisonnent.
Je rappelle les termes de l’article 34-1 de la Constitution, visé par le présent projet de loi organique :
« Les assemblées peuvent voter des résolutions dans les conditions fixées par la loi organique.
« Sont irrecevables et ne peuvent être inscrites à l’ordre du jour les propositions de résolution dont le Gouvernement estime que leur adoption ou leur rejet serait de nature à mettre en cause sa responsabilité ou qu’elles contiennent des injonctions à son égard. »
Le renvoi à la loi organique qu’opère l’article 34-1 de la Constitution ne concerne donc que les conditions de vote des propositions de résolution, et non les conditions de leur irrecevabilité. Nous ne devrions donc pas discuter de ces dernières aujourd’hui. Les conditions d’irrecevabilité sont inscrites au second alinéa de l’article 34-1, sans que soit spécifié de renvoi à une loi organique pour l’application de ses dispositions.
Dans cette affaire, le Gouvernement se livre quelque peu au jeu du chat et de la souris : on s’attend à ce que le règlement intervienne, or c’est la loi organique qui traite du sujet. On en retire l’impression que le Gouvernement se méfie même de sa propre majorité, puisqu’il n’a de cesse de se protéger de toute initiative parlementaire.
Nous considérons donc que l’article 3 est superfétatoire, sa suppression aurait le mérite d’alléger le dispositif.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. L’avis est défavorable.
Il faut bien déterminer les conditions dans lesquelles le Gouvernement informera le Parlement de sa décision quant à la recevabilité d’une proposition de résolution.
Certains auteurs d’amendements invoqueront tout à l’heure un recours au Conseil constitutionnel sur ce sujet, mais cela n’est pas possible s’agissant d’actes de gouvernement. Cela a été très clairement spécifié lors de la révision constitutionnelle.
J’en viens à me demander si l’on ne gagnerait pas un temps précieux en supprimant cet article, monsieur le secrétaire d’État ! (Sourires.) Cela ferait tomber un grand nombre d’amendements et nous épargnerait des discussions philosophiques.
M. Bernard Frimat. Excellente idée !
Mme Éliane Assassi. Nous sommes des éclaireurs !
M. Louis Mermaz. C’est révélateur !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Rassurez-vous… Il y a lieu de maintenir cet article en améliorant sa rédaction. Ce sera l’objet de l’amendement n° 4.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Cet article 3, amélioré par l’amendement de la commission, ne fera que préciser la rédaction de la révision constitutionnelle de 2008.
Je suis sincèrement étonné qu’un aussi grand nombre d’amendements aient été déposés sur un article dont l’apport n’est pas considérable, je le reconnais volontiers. (Exclamations ironiques sur les travées du groupe socialiste.)
M. Louis Mermaz. C’est un article oratoire !
M. Bernard Frimat. Superfétatoire !
M. Roger Karoutchi, secrétaire d'État. Cet article, dont la rédaction sera donc précisée par l’amendement n° 4 de la commission, vise en réalité à fixer des modalités de procédure.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 74 et 149.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je suis saisie de quinze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 75, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Lorsque le Premier ministre fait savoir au président de l'assemblée qu'une proposition de résolution contient une injonction à l'égard du Gouvernement ou que son adoption ou son rejet serait de nature à mettre en cause la responsabilité de celui-ci, la Conférence des présidents de l'assemblée concernée se réunit pour rendre un avis. Elle peut demander l'audition du Premier ministre. En cas d'avis conforme, la proposition de résolution ne peut être examinée en commission ni inscrite à l'ordre du jour de l'assemblée. En cas de désaccord, le président de l'assemblée saisit pour avis le Conseil constitutionnel dans un délai ne pouvant excéder huit jours.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Puisque cet article subsiste, il mérite débat !
Le projet de loi organique donne une interprétation très restrictive de l’article 34-1 de la Constitution en accordant au Premier ministre, en tant que représentant du Gouvernement, un véritable droit de veto contre les propositions de résolution, avant toute discussion.
Cette prérogative exorbitante, qui ne pourra faire l’objet d’aucune discussion ni contestation, a pour effet d’anéantir la portée d’un dispositif que l’on nous avait pourtant présenté comme un nouveau droit du Parlement. En l’occurrence, le Gouvernement disposera d’un droit de veto absolu.
L’article 34-1 de la Constitution se borne à assortir ce droit nouveau de certaines conditions. Or, aux termes de l’article 3, le Premier ministre estimera seul, sans débat préalable, qu’une proposition de résolution contient des injonctions à l’égard du Gouvernement ou est de nature à mettre en cause la responsabilité de celui-ci. Le mot « injonctions » peut donner lieu à des interprétations particulièrement extensives. Quant à la mise en cause de la responsabilité du Gouvernement, la notion reste floue, en particulier au Sénat où l’on ne voit pas très bien ce que ce terme recouvre, la mise en jeu de cette responsabilité ne pouvant pas, comme à l'Assemblée nationale, prendre la forme d’une motion de censure.
Pourtant, tel n’est pas le sens de l’article 34-1 de la Constitution, qui n’induit nullement que l’estimation à laquelle se livrera le Premier ministre puisse prendre la forme d’un veto absolu. Une « estimation » doit pouvoir être contestée par le Parlement.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Absolument pas !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Cet amendement vise précisément à ce que le Parlement puisse discuter de l’estimation du Premier ministre.
Mme la présidente. L'amendement n° 76, présenté par Mmes Borvo Cohen-Seat, Assassi, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Lorsque le Premier ministre fait savoir au président de l'assemblée qu'une proposition de résolution contient une injonction à l'égard du Gouvernement ou que son adoption ou son rejet serait de nature à mettre en cause la responsabilité de celui-ci, le président de l'assemblée saisit pour avis le Conseil constitutionnel dans un délai ne pouvant excéder huit jours.
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Dans le droit fil de l’amendement n° 75, cet amendement tend à conférer au président de l’assemblée concernée le pouvoir de contester, y compris devant le Conseil constitutionnel, l’estimation faite par le Premier ministre.
Mme la présidente. L'amendement n° 4, présenté par M. Hyest, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
Lorsque le Gouvernement estime qu'une proposition de résolution est irrecevable en application du second alinéa de l'article 34-1 de la Constitution, il informe de sa décision le président de l'assemblée intéressée avant que l'inscription à l'ordre du jour de cette proposition de résolution ne soit décidée.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet amendement vise à faire référence non au Premier ministre, mais au Gouvernement, autorité désignée par l’article 34-1 de la Constitution pour apprécier la recevabilité des propositions de résolution.
À l'article 5 du projet de loi organique, c'est d'ailleurs bien le Gouvernement qui est chargé de s'opposer éventuellement à une rectification d’une proposition de résolution.
Le dispositif proposé me semble donc cohérent. Aux termes de la Constitution, les pouvoirs du Premier ministre sont distincts de ceux du Gouvernement, et c’est bien ce dernier qui détermine et conduit la politique de la nation. Il faut conserver les termes précis employés dans la Constitution et ne pas interférer dans les modalités de prise de décision du pouvoir exécutif.
M. Michel Charasse. C’est la séparation des pouvoirs !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Absolument, et nous la respectons.
Toutefois, il va de soi que, très concrètement, c’est le Premier ministre qui annoncera la décision.
M. Patrice Gélard, vice-président de la commission des lois. Ou le ministre chargé des relations avec le Parlement…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet article a le mérite de prévoir que le Gouvernement doit informer le Parlement de sa décision avant l’inscription à l’ordre du jour de la proposition de résolution. À défaut d’une telle précision, on pourrait imaginer qu’il déclare une proposition de résolution irrecevable postérieurement à son inscription à l’ordre du jour !
Mme Éliane Assassi. Mais ce pourrait être celui de votre successeur !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Cet article ne se contente donc pas de reprendre les dispositions constitutionnelles ; il apporte aussi une précision indispensable.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 59, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 4, après le mot :
Gouvernement
insérer les mots :
, par décision motivée prise en Conseil des ministres,
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Ce sous-amendement a pour objet la motivation de la décision d’irrecevabilité.
L’article 3 du projet de loi organique fait référence à une décision prise par le Gouvernement pour déclarer une proposition irrecevable.
Quelle forme cette décision prendra-t-elle ? Quand sera-t-elle prise ? Tout le monde se pose ces questions. C’est pourquoi il est impérieux de prévoir que cette décision sera prise en conseil des ministres et, surtout, qu’elle sera motivée en fait et en droit, ce qui évitera l’arbitraire d’une décision qui, parfois, peut être prise par un collaborateur.
Il nous a été affirmé que le Gouvernement ne pourrait pas motiver valablement toutes ses décisions si les propositions de résolution sont trop nombreuses. Cet argument ne nous semble guère valable. En effet, même s’il devait y avoir 3 000 propositions de résolution, cela n’entraînera pas une surcharge de travail, car motiver une décision ne prendra pas plus de temps que répondre à une question écrite.
Si une procédure est instituée, elle doit être transparente, et nous devrons savoir pourquoi une proposition de résolution aura été déclarée irrecevable. Le fait de prévoir que la décision sera prise en conseil des ministres permettra de lui donner un cadre précis.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 202, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 4, après le mot :
estime
insérer les mots :
, par une décision motivée,
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Il est prévu que le Gouvernement « estimera » si une proposition de résolution est irrecevable. À l’instar de notre collègue Alima Boumediene-Thiery, nous souhaitons que soit précisé sur quelles considérations sera fondée la décision du Gouvernement. Il s’agit là, en fait, de porter un jugement. La décision du Gouvernement ne doit pas être discrétionnaire.
C’est une revendication de bon sens, conforme à l’exigence de transparence démocratique. Je n’imagine pas que le Gouvernement puisse prononcer une décision d’irrecevabilité sans l’expliciter.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 203, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 4, après le mot :
estime
insérer les mots :
, par une décision rendue publique,
La parole est à M. Yannick Bodin.
M. Yannick Bodin. Le Gouvernement doit non seulement motiver sa décision, mais aussi la rendre publique. Tel est l’objet de ce sous-amendement.
Aucun secret ne doit entourer des questions de cette importance. Dans un autre domaine, même lorsqu’un procès se déroule à huis clos, la décision est toujours rendue en audience publique.
Mme la présidente. Le sous-amendement n° 204, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 4, après le mot :
intéressée
insérer les mots :
et le cas échéant, le président de groupe à l'initiative d'une demande d'inscription d'une proposition de résolution à l'ordre du jour,
La parole est à M. Bernard Frimat.
M. Bernard Frimat. Ce sous-amendement fait suite à la disposition que nous avons adoptée ce matin, tendant à reconnaître aux présidents de groupe la possibilité de déposer, au nom de leur groupe, des propositions de résolution.
Aussi estimons-nous, par parallélisme des formes et conformément à l’esprit de l’article 51-1 de la Constitution, qui reconnaît un rôle aux présidents de groupe, que le Gouvernement doit informer de sa décision d’opposer l’irrecevabilité à une proposition de résolution le président de groupe concerné.
Je concède que la rédaction du présent sous-amendement est loin d’être parfaite et qu’elle pourrait être avantageusement simplifiée, en rédigeant ainsi le dernier membre de phrase : « et le cas échéant, le président de groupe à l’initiative d’une proposition de résolution ».
L’adoption de ce sous-amendement ne dénaturerait pas l’amendement de la commission et permettrait de tirer les conséquences logiques des dispositions votées ce matin.
Mme la présidente. Il s’agit donc du sous-amendement n° 204 rectifié, présenté par MM. Frimat, Bel, Mermaz, Sueur, Rebsamen et Michel, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Anziani, Bérit-Débat, Bodin, Collombat, C. Gautier et Godefroy, Mme Klès, MM. Mahéas, Peyronnet, Povinelli et Sutour, Mme Tasca, MM. Tuheiava, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, et ainsi libellé :
Dans le second alinéa de l'amendement n° 4, après le mot :
intéressée
insérer les mots :
et le cas échéant, le président de groupe à l'initiative d'une proposition de résolution
Le sous-amendement n° 58, présenté par Mmes Boumediene-Thiery, Blandin et Voynet et MM. Desessard et Muller, est ainsi libellé :
Compléter l'amendement n° 4 par deux alinéas ainsi rédigés :
En cas de désaccord entre le ou les signataires de la proposition de résolution et le Gouvernement sur les conditions d'application du deuxième alinéa de l'article 34-1 de la Constitution, le président de l'assemblée intéressée, sur demande du ou des signataires de la proposition de résolution, ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de quatre jours.
La décision du Conseil constitutionnel est motivée et notifiée au président de l'assemblée intéressée et au Premier ministre. Elle est publiée au Journal officiel.
La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Ce sous-amendement porte sur le contrôle de l’irrecevabilité.
Après la question de la motivation de l’irrecevabilité, nous touchons là un autre point essentiel. Le Gouvernement semblant disposer d’un droit de vie ou de mort sur toute proposition de résolution, nous demandons que ses décisions d’irrecevabilité puissent être contestées.
Comment pourront-elles l’être ? Comment sera d’ailleurs prise la décision ? Qui va évaluer les critères retenus par le Gouvernement pour déclarer l’irrecevabilité ? Le projet de loi organique reste muet sur ces questions. Le Gouvernement, de manière totalement arbitraire et opaque, pourra décider qu’une proposition de résolution a pour objet de mettre en cause sa responsabilité. Aucun contrôle n’est prévu. Le Gouvernement pourra donc, à volonté, écarter toute proposition de résolution pour ce simple motif.
C’est pourquoi nous proposons de mettre en place une procédure qui permettrait de contrôler le motif d’irrecevabilité. Le Conseil constitutionnel, en cas de désaccord, pourrait être saisi, soit par le président de l’assemblée concernée, soit par le Premier ministre, aux fins de vérifier le caractère fondé ou non de la décision d’irrecevabilité.