M. le président. La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 373, transmise à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.
M. Richard Yung. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur les difficultés rencontrées par certains Français établis hors de France qui ont souscrit un contrat d’assurance vie ou un contrat de prévoyance avant de partir à l’étranger.
Certaines notices d’assurance comportent des clauses qui excluent les Français résidant à l’étranger et annulent l’exécution du contrat d’assurance notamment « en cas de décès » - clause pour le moins paradoxale dans un contrat d’assurance vie ! - « ou de perte totale et irréversible d’autonomie survenue hors des pays de l’Espace économique européen, de la Suisse, des États-Unis et du Canada ».
Cette situation est particulièrement pénalisante pour nombre de nos concitoyens vivant dans ces zones géographiques fort étendues puisqu’elles couvrent le reste du monde. En effet, s’ils décèdent en cours de contrat, le capital constitué ne peut pas être versé aux bénéficiaires qu’ils avaient désignés lors de la signature du contrat.
Or, pour le Français expatrié peut-être plus encore que pour tout autre, le fait d’avoir souscrit un contrat d’assurance vie ou d’assurance décès est un facteur rassurant : il sait avoir mis à l’abri du besoin ceux qui lui sont chers et qui sont restés en France..
Plusieurs expatriés dans cette situation se sont ouverts à moi de cette question, également soumise à des collègues députés. Avant de questionner un membre du Gouvernement, j’ai évidemment saisi la Fédération française de l’assurance avec laquelle je pensais pouvoir ouvrir un débat.
La réponse, de nature très administrative, ne permet pas d’aller très loin. On m’explique en effet qu’il s’agit d’une question complexe dont le règlement dépend d’un certain nombre d’éléments techniques !
Je souhaiterais donc obtenir, monsieur le secrétaire d'État, des éclaircissements sur les motifs à l’origine de cette situation vécue ou en tout cas perçue comme une discrimination à l’égard de ceux qui continuent de cotiser à de tels contrats d’assurance vie.
Quelles raisons justifient que ces contrats soient suspendus ? Ne faudrait-il pas prévenir les souscripteurs et, le cas échéant, leur reverser, avec des intérêts, les cotisations déjà payées ?
Enfin, où iront les fonds s’ils ne sont pas versés aux ayants droit après le décès du souscripteur ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Christine Lagarde, qui n’a pu être parmi nous aujourd’hui.
Vous l’interrogez sur les difficultés rencontrées par les Français établis hors de France en matière de contrats d’assurance couvrant les risques de décès, incapacité, invalidité souscrits antérieurement à leur départ à l’étranger et particulièrement sur certaines clauses d’exclusion géographique.
La réponse sera assez longue, monsieur le sénateur, car nos compatriotes en faveur de qui vous avez plaidé seront amenés à l’invoquer.
Votre question rappelle aux Français qui partent à l’étranger qu’ils doivent être attentifs aux exclusions géographiques qui sont prévues dans les contrats d’assurance.
Les assureurs sont amenés à exclure certains pays de leur champ de couverture géographique pour plusieurs raisons.
En premier lieu, lorsqu’un assuré, quelle que soit sa nationalité, réside à l’étranger, le contrat peut se trouver soumis à un droit étranger que l’assureur ne maîtrise pas.
Ce droit peut d’ailleurs exiger dans certains pays que l’assureur soit agréé par une autorité locale de contrôle. L’assureur commettrait alors une infraction au droit étranger dont il s’agit si son contrat était valide sans condition à l’étranger.
En deuxième lieu, dans certains pays, il peut être difficile d’évaluer l’état de l’assuré pour mettre en jeu les garanties incapacité, invalidité, voire décès.
En troisième lieu, compte tenu aussi des conditions sanitaires et d’accès aux soins de certains pays, les assureurs ne peuvent pas tarifer aux conditions standard les assurés en partance pour ces pays.
Prévoir les conditions standard pour ces pays conduirait à augmenter le tarif des assurances pour tous les assurés sur le territoire français. La limitation de territorialité permet ainsi aux Français et résidents européens de bénéficier des meilleures conditions d’accès à l’assurance prévoyance.
En quatrième lieu, enfin, la société d’assistance qui exécute les prestations d’assistance, en particulier le rapatriement, prévues au contrat peut elle-même exclure certains pays de son champ d’action.
Pour toutes ces raisons, les exclusions territoriales sont aujourd’hui nombreuses dans les contrats d’assurance. Il s’agit non pas d’une discrimination mais, en réalité, d’une différence objective de situations qui appelle des réponses adaptées.
Les solutions existent d’ailleurs.
Un assuré peut demander à son assureur l’extension des garanties prévues au contrat de base, par exemple l’inclusion d’un pays non couvert dans la police standard.
Dans ce cas, l’assureur examinera sa capacité à répondre à la demande d’extension présentée par l’assuré, en la conditionnant le cas échéant au paiement d’une surprime représentative des risques supplémentaires pris par l’assureur pour couvrir la garantie demandée par l’assuré.
Là encore, il faut dire aux Français qui partent à l’étranger d’être attentifs à faire jouer la concurrence : les personnes souhaitant souscrire de tels contrats ont tout intérêt à démarcher plusieurs assureurs et courtiers pour trouver le contrat répondant le mieux et au meilleur prix à leurs attentes.
M. le président. La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse.
Elle apporte quelques éléments qui permettront peut-être d’avancer. Nous demandons qu’il soit fait pression sur les sociétés d’assurance, d’une part, pour qu’elles fassent un véritable effort d’information afin que les Français qui partent à l’étranger n’aient plus soudain la surprise de découvrir, dans la plupart des cas de bonne foi, que le contrat qu’ils avaient souscrit n’est plus valable, d’autre part, pour qu’elles proposent davantage à leurs assurés les solutions que vous avez évoquées, y compris si nécessaire en contrepartie du paiement d’une surprime, encore qu’il y aurait sans doute à débattre du niveau que devrait atteindre celle-ci.
Distribution des jeux par La Française des jeux
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, auteur de la question n° 397, transmise à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
M. Jacques Mézard. La question que j’ai adressée à Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi concerne La Française des jeux.
Cette société d’économie mixte, dont les résultats financiers sont très positifs, fournit, sans contrat spécifique, à de très nombreux commerçants – souvent des buralistes et des papetiers, en particulier dans les zones rurales – des jeux de grattage.
Ces commerçants perçoivent une rémunération de 5 % sur le chiffre d’affaires réalisé.
Or, à la fin de l’année 2008, La Française des jeux a averti plusieurs centaines et mêmes plusieurs milliers d’entre eux qu’elle cesserait au début de l’année 2009 ses livraisons à tous ceux qui ne réalisent pas 600 euros de chiffre d’affaires par semaine, soit environ 2 500 euros par mois.
Ce sont essentiellement les commerçants des petites communes qui sont donc concernés par cette décision, dont l’effet sera de leur faire perdre un revenu souvent significatif puisqu’il peut représenter plus d’un mois de bénéfices. Ainsi, dans mon département, quinze buralistes sont touchés.
Bien évidemment, j’ai interrogé le président de la Française des jeux : dans une quasi-circulaire, il m’a été répondu que cette société était consciente du rôle que son réseau, qui est deux fois supérieur par la taille à celui de La Poste, jouait pour l’animation du commerce de proximité et que j’aurais ensuite des nouvelles.
Ces nouvelles, nous les attendons toujours et les livraisons ne sont en tout cas plus effectuées, ce qui pose, bien sûr, le problème du maintien des commerces de proximité, en particulier en zone rurale.
La raison invoquée par cette société, qui a pourtant manifestement les moyens de faire face, est la mise en place d’un système informatique dont la gestion serait, semble-t-il, trop coûteuse s’agissant des commerces faisant moins de 600 euros de chiffre d’affaires par semaine.
On peut estimer que l’addiction aux jeux de grattage de nombre de nos concitoyens n’est pas forcément positive, mais, en l’espèce, nous sommes confrontés à une décision unilatérale qui, à mon avis, institue une discrimination concurrentielle inacceptable.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence d’Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui ne pouvait être présent ce matin.
Le réseau de La Française des jeux est composé, d’une part, de points de vente dits « tirage » qui commercialisent les jeux de tirage, de pronostics sportifs, de grattage et/ou le jeu Rapido et, d’autre part, de points de vente qui commercialisent exclusivement les jeux de grattage.
Les points de vente « tirage » sont tous équipés de terminaux de prises de jeux. Ils font l’objet d’un contrat signé entre La Française des jeux et le détaillant.
Le contrat stipule, entre autres dispositions, que la mise en place gratuite de matériels chez le détaillant fait peser sur La Française des jeux des coûts liés notamment à l’achat, l’installation et la maintenance de ces matériels ainsi que les coûts de télécommunications que seule la réalisation d’un chiffre d’affaires minimum par semaine permet de couvrir.
Ce chiffre d’affaires minimum est déterminé en fonction du type. Il est par exemple de 1 300 euros pour un détaillant équipé d’un terminal de prises de jeux.
Afin de ne pas aggraver la situation, parfois délicate, que connaissent actuellement certains points de vente, principalement du fait des difficultés rencontrées par les marchés du tabac et de la presse, La Française des jeux a mis en place en 2008 un moratoire sur les retraits d’agrément « tirage » liés à la non-atteinte du chiffre d’affaires contractuel du point de vente.
Depuis lors, l’entreprise a ainsi maintenu l’agrément d’environ 2 000 points de vente alors que les minima de chiffre d’affaires n’étaient pas atteints.
La gestion des points de vente qui commercialisent exclusivement des jeux de grattage relève, quant à elle, de la responsabilité des courtiers-mandataires, qui évaluent notamment leur potentiel commercial et les conditions d’exploitation qui en découlent.
Le courtier-mandataire est un professionnel lié par un contrat d’exclusivité avec La Française des jeux ; son rôle est d’approvisionner les points de vente en jeux de grattage, de mettre en place les dispositifs promotionnels et d’assurer l’encaissement des sommes provenant de la vente de ces jeux.
Toutes ces prestations ont un coût, supporté par l’entreprise de courtage, qui est rémunérée par une commission sur les mises.
Dès lors, la desserte d’un point de vente n’est économiquement viable que si celui-ci dégage un chiffre d’affaires suffisant pour couvrir les charges correspondantes. Si le point mort n’est pas le même pour tous les points de vente et pour tous les courtiers, il est généralement bas et se situe quasi systématiquement en deçà de 500 euros de chiffre d’affaires par semaine.
Même si La Française des jeux a pour mission d’assurer une proximité suffisante avec les Français qui souhaitent avoir l’accès à son offre sur l’ensemble du territoire national, dans l’accomplissement de cette mission, elle doit néanmoins prendre en compte certaines réalités économiques qui s’imposent à toute entreprise soucieuse du développement de son efficacité.
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. La réponse de M. le secrétaire d'État, qui annonce la fermeture de plusieurs points de vente dans les zones rurales, ne m’a pas paru très positive. Après les bureaux de poste, les trains, les écoles, ce sont maintenant les jeux que l’on supprime !
Vous allez donc priver nos concitoyens de l’espoir de gagner et leur laisser le droit de ne pas perdre ! (Sourires.)
Projet d'avenant à la convention fiscale franco-suisse de 1966 contre les non-doubles impositions
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, auteur de la question n° 396, adressée à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Mme Patricia Schillinger. Je souhaite attirer l’attention de M. Woerth sur les inquiétudes des frontaliers suscitées par le projet d’avenant à la convention fiscale franco-suisse de 1966 contre les non-doubles impositions.
L’article 4 de cet avenant concerne les travailleurs frontaliers et plus particulièrement la fiscalité applicable lors du rapatriement du deuxième pilier, c’est-à-dire la retraite complémentaire.
Avec cet article, la Suisse conserverait la totalité de l’impôt prélevé lors du rapatriement en France, alors que jusqu’à maintenant elle le remboursait au travailleur frontalier.
Ainsi, ledit avenant prévoit la suppression de ce remboursement, étant considéré que le capital est non imposé en France et que, à ce titre, la Suisse a le droit de conserver par subsidiarité l’impôt prélevé.
Cette mesure injuste conduit à une double imposition des transfrontaliers et risque d’avoir de lourdes conséquences sur l’économie locale.
Les transfrontaliers ne peuvent accepter que la Suisse les impose davantage. Un bouleversement fiscal ne ferait qu’entraîner un déséquilibre supplémentaire pour nos départements frontaliers.
Notre pays n’a aucun intérêt à ratifier ce projet d’avenant : l’impôt resterait acquis à la Suisse et diminuerait le pouvoir d’achat des travailleurs frontaliers. Cette mesure est injuste !
Je souhaite souligner qu’en 2007 une pétition a été organisée par le groupement transfrontalier européen et a recueilli 14 000 signatures. De plus, M. Bernard Accoyer, président de l’Assemblée nationale, s’est engagé fermement à soutenir les frontaliers. Lors du vingt-septième congrès du groupement transfrontalier européen, il a déclaré : « Concernant la double imposition du deuxième pilier, il ne s’agit que d’un accord entre administratifs auquel je me suis farouchement opposé. J’ai décidé, affirmé et demandé que le Gouvernement sursoie à cette mesure. »
M. Accoyer a raison : il s’agit bien d’un accord entre administratifs, car ce sont les services fiscaux des deux États, la France et la Suisse, qui ont décidé d’une modification de la convention fiscale, sans aucune consultation ou même information des élus.
Monsieur le secrétaire d'État, comment la France a-t-elle pu accepter qu’une prestation versée sous forme de capital, non imposable en droit interne de la France, devienne un revenu en convention fiscale, et attribuer l’imposition à la Suisse ?
Quelle est la position du Gouvernement sur ce sujet ? Quel est l’état des discussions entre les deux pays ? Le Gouvernement envisage-t-il de ratifier ce projet d’avenant ou à tout le moins de faire retirer l’article 4, qui crée une situation injuste pour les travailleurs frontaliers ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence d’Éric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui ne peut être présent ce matin.
Vous interrogez le Gouvernement sur les modalités d’imposition des pensions de source suisse perçues par les travailleurs frontaliers résidant en France, dans le cadre du nouvel avenant à la convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966.
Vous précisez que cette convention attribue actuellement à la France l’imposition des pensions, autres que publiques, perçues par les résidents français, l’impôt prélevé à la source par la Suisse étant remboursé par celle-ci après justification par le bénéficiaire de sa résidence française.
Selon vous, le nouvel avenant à cette convention conduira à une double imposition des travailleurs frontaliers.
Je suis en mesure de vous apporter les précisions suivantes.
L’actuelle convention fiscale franco-suisse du 9 septembre 1966 prévoit une imposition exclusive des pensions, autres que les pensions publiques, dans l’État de la résidence du bénéficiaire. Or le droit fiscal français n’a pas prévu l’imposition des pensions en capital versées par des institutions de prévoyance suisses au bénéfice de résidents français. Ces pensions échappent ainsi à toute imposition, en France comme en Suisse.
Afin de mettre un terme à cette situation de double exonération, l’article 4 de l’avenant signé le 12 janvier 2009 autorise la Suisse à imposer ce type de pensions aussi longtemps que le droit interne français n’aura pas été modifié pour permettre à la France de les imposer.
En pratique, à la suite de l’entrée en vigueur du nouvel avenant, ces pensions de retraite de source suisse versées en capital à des résidents français ne seront imposées qu’en Suisse. Je peux donc vous assurer que les craintes au sujet d’éventuelles doubles impositions sont infondées.
En outre, cet avenant ne constitue en aucun cas un abandon de souveraineté de la part de la France. Si la France décidait à l’avenir d’instaurer un régime d’imposition des pensions en capital, ce qui est une décision qui dépasse le seul cas des frontaliers, la Suisse perdrait automatiquement et immédiatement le droit d’imposer les prestations en capital perçues par des résidents de France.
Par ailleurs, ce projet d’avenant, dont le Premier ministre avait confirmé la signature lors de son déplacement en Suisse le 28 novembre dernier, marque une avancée majeure en termes d’accès aux informations fiscales suisses, notamment bancaires, et donc dans la lutte contre la fraude fiscale. Il est à ce titre conforme aux intérêts français et aux positions défendues par la France sur la scène internationale, notamment dans le contexte actuel, où la nécessité d’assurer une meilleure transparence fiscale et de renforcer la lutte contre l’évasion fiscale prend un relief particulier.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Il est important de rassurer les associations, qui répercutent auprès des élus l’inquiétude des futurs retraités quant à leur pouvoir d'achat, en ces temps où la pauvreté ne cesse d’augmenter.
fin du recyclage des médicaments
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, auteur de la question n° 386, adressée à Mme la ministre de la santé et des sports.
Mme Marie-Thérèse Hermange. Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur la nécessité de proposer une solution de remplacement au recyclage des médicaments à envoyer à l’étranger.
En effet, en 2007, la France a légiféré sur diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament. L’une des mesures adoptées a mis fin au dispositif de collecte et de tri de médicaments inutilisés en vue de leur expédition vers les pays en voie de développement, à compter du 31 décembre 2008. À la suite de la transposition de cette directive, des centaines de milliers de malades, dans des pays où l’accès aux soins n’est pas garanti, sont privés de médicaments.
Certes, personne n’ignore que le Gouvernement a essayé de trouver des réponses adéquates à l’échelon national pour remplacer le recyclage des médicaments à destination des plus démunis par une réelle politique de soutien, avec des mesures d’accès au médicament pour tous.
Cependant, la question reste ouverte pour ce qui est de l’envoi de médicaments aux pays qui en ont besoin. Au mois de janvier 2007, ici même, au cours d’un long débat, le Gouvernement s’est formellement engagé à aider les organisations qui procédaient à la collecte des médicaments en vue de leur expédition à l’étranger et à trouver de nouvelles sources d’approvisionnement. Ainsi, le ministère des affaires étrangères et européennes, en lien avec l’Agence française de développement, tente d’élaborer des solutions à long terme.
En revanche, pour ce qui est des deux à trois prochaines années à venir, les associations, qui expédiaient jusqu’à présent des dizaines de tonnes de médicaments, ont besoin du Gouvernement pour fournir des médicaments neufs à ces pays. Si le problème du recyclage est réglé, celui de l’envoi de médicaments neufs pendant cette période ne l’est pas.
En revanche, cela ne peut se faire qu’au moyen d’une coopération étroite entre le ministère de la santé et des sports, les laboratoires pharmaceutiques et les associations, afin que ces dernières obtiennent des dons, bénéficient d’achats de génériques et obtiennent des subventions.
Comment le Gouvernement compte-t-il remédier à cette situation, afin que la France continue à œuvrer de manière solidaire pour les pays dans lesquels l’accès au médicament des populations défavorisées n’est pas assuré ?
La réponse du Gouvernement est attendue par de nombreuses associations, qui m’ont sollicitée, comme elles ont dû saisir un certain nombre de parlementaires. Elles se demandent comment elles pourront poursuivre leur mission, qui consiste à envoyer des médicaments aux pays qui en ont besoin.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Santini, secrétaire d'État chargé de la fonction publique. Madame la sénatrice, vous appelez l’attention de Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé et des sports, dont je vous prie d’excuser l’absence aujourd'hui, sur les inquiétudes des organisations non gouvernementales concernées par la mise en œuvre de l’interdiction de disposer des médicaments non utilisés, les MNU, entrée en vigueur le 1er janvier 2009.
Il faut tout d’abord rappeler que cette interdiction était nécessaire. Elle a été préconisée tant par un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, du mois de janvier 2005 que par une recommandation de l’Organisation mondiale de la santé. En effet, outre les risques liés à la rupture de la chaîne pharmaceutique, les MNU exportés constituent un danger potentiel, principalement en raison de leur inadaptation fréquente aux besoins, du risque de détournement qu’ils présentent et de l’obstacle qu’ils peuvent constituer à la mise en place des politiques nationales de santé.
Le Gouvernement est tout à fait conscient de l’effet important de cette décision d’interdiction sur l’organisation des associations humanitaires s’approvisionnant en MNU pour mener, en France comme dans les pays en développement, l’aide médicale au profit des populations défavorisées qu’elles exercent habituellement. Il partage naturellement les préoccupations de ces associations.
Afin de respecter l’engagement pris par les précédents ministres de la santé, le Premier ministre a décidé de prendre des mesures comportant deux volets, l’un international, l’autre national.
Ces mesures font suite aux travaux du groupe de travail mis en place au mois de juin 2007 par la direction générale de la santé, en lien avec le ministère des affaires étrangères et européennes, la direction générale de l’action sociale, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, les entreprises du médicament et les représentants de la filière pharmaceutique – ordre des pharmaciens, grossistes et pharmaciens d’officine –, afin d’accompagner les principales associations vers de nouvelles sources d’approvisionnement en médicaments, pérennes, rationalisées, mieux adaptées et sécurisées.
À l’échelon international, il est nécessaire d’intégrer ce travail à la politique de coopération internationale de notre pays, qui a énormément évolué ces dernières années. La politique française appuie les pays en développement dans la mise en place de politiques pharmaceutiques nationales, dans le renforcement de leurs capacités à mieux acheter, notamment par un appui à l’Association africaine des centrales nationales d’achat de médicaments essentiels, qui regroupe environ vingt pays d’Afrique subsaharienne. Cette association a conduit de nombreuses actions de formation dans le but d’améliorer les procédures d’appels d’offres internationaux, la gestion de la chaîne du médicament, la logistique liée à l’approvisionnement des structures de soins, l’harmonisation des statuts des différentes centrales d’achat, de façon à promouvoir leur capacité de gestion autonome et de rendre leurs actions plus transparentes vis-à-vis des donateurs en médicaments essentiels.
Dans ce cadre, le ministère des affaires étrangères et européennes a rencontré récemment les organisations non gouvernementales concernées. Il les a invitées notamment à présenter à l’Agence française du développement, organisme sous sa tutelle, des demandes de subventions pour des projets bien identifiés, qui doivent émaner des pays demandeurs, et pouvant inclure une composante « dons de médicaments ». Ces projets devront respecter les bonnes pratiques de dons de médicaments prévues par un arrêté du 18 août 2008.
Pour ce qui est des besoins nationaux, le Premier ministre a décidé de soutenir la mise en place d’un dispositif de remplacement des MNU, afin de permettre aux organisations non gouvernementales de continuer leur travail d’aide médicale et de dispensation aux populations les plus démunies et trop désocialisées pour consulter un médecin ou entrer dans une pharmacie, nonobstant le bénéfice d’une protection sociale.
Une convention a ainsi été conclue au mois de décembre dernier entre la caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés et l’association Pharmacie humanitaire internationale, afin de financer, à hauteur de 3 millions d’euros, la mise en place par Pharmacie humanitaire internationale d’une procédure d’approvisionnement pérenne opérationnelle au 1er janvier 2009, incluant fourniture de médicaments et logistique, dans des conditions offrant un circuit pharmaceutique sécurisé de distribution et de dispensation.
Le ministère de la santé et des sports a prévu un dispositif juridique permettant d’encadrer, dans un souci de sécurité sanitaire, les modalités de délivrance de médicaments par les structures de soins aux personnes en situation de précarité gérées par des associations caritatives.
Ces structures sont autorisées par la loi du 15 avril 2008 à délivrer des médicaments, après déclaration préalable auprès du représentant de l’État dans le département. Le décret d’application du 18 août 2008 relatif à la distribution humanitaire de médicaments précise les conditions de délivrance de médicaments par ces structures de soins sous la responsabilité d’un pharmacien ou, à défaut, d’un médecin.
Enfin, le ministère de la santé et des sports a conclu une convention de partenariat avec Réseau médicaments et développement, qui s’appuie sur de nombreux partenaires dans le milieu associatif. Un financement associé a permis l’engagement d’actions d’information des petites associations françaises de solidarité internationale, utilisant occasionnellement des MNU sans être spécialisées dans le médicament.
Madame la sénatrice, j’espère que cette réponse circonstanciée vous satisfera, ainsi que les associations concernées.