M. Joël Bourdin. Ce n’est pas pareil !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. Vous l’avez souligné, mesdames, messieurs les sénateurs, il s’écoule aujourd’hui souvent six semaines entre le moment où une banque constate et déclare un incident de remboursement sur un crédit à un particulier à la Banque de France et le moment où toutes les banques sont informées de cet incident. Or, en six semaines, la situation peut s’aggraver considérablement et la personne concernée peut s’être engagée dans une spirale d’endettement incontrôlée. Vous avez évoqué à juste titre, monsieur Bourdin, l’exemple d’un dossier de surendettement impliquant trente-huit crédits…
Je voudrais simplement vous préciser que les dossiers de surendettement concernent chacun en moyenne cinq crédits renouvelables.
M. Joël Bourdin. C’est beaucoup ! C’est trop !
M. Luc Chatel, secrétaire d'État. C’est déjà beaucoup trop, en effet, d’autant que ces crédits ont souvent été contractés dans des délais extrêmement réduits. Voilà de quoi nous inciter davantage encore à accélérer la réforme que je vais vous présenter.
Il y a quelques mois, Christine Lagarde a demandé à la Banque de France de piloter une réforme ambitieuse du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, le FICP, pour que celui-ci passe en « temps réel » d’ici à la fin de l’année qui vient. Cette réforme permettra d’améliorer l’efficacité du FICP dans la lutte contre le surendettement.
Nous avons souhaité qu’un nouveau droit d’accès à distance aux informations du FICP soit ouvert. S’agissant d’un fichier dans lequel figurent 2,4 millions de personnes, c’est une avancée significative pour les consommateurs. Chacun pourra ainsi interroger à distance la Banque de France pour savoir s’il est inscrit dans ce fichier et connaître la durée de son inscription.
En complément, nous avons demandé à la Banque de France de créer un guichet de traitement rapide et efficace des réclamations des personnes contestant l’information contenue dans le fichier. Il faut aujourd’hui se déplacer physiquement dans une succursale de la Banque de France pour savoir si l’on est inscrit au fichier.
Enfin, parce que les banques doivent pouvoir disposer en temps réel des informations relatives aux incidents concernant les consommateurs visés par ces dispositions, les délais seront raccourcis.
Le traitement du surendettement est le deuxième pilier de la politique du Gouvernement en matière de surendettement. Au-delà de la prévention, l’objectif est en effet que les procédures de surendettement permettent d’apporter des réponses adaptées aux difficultés rencontrées par les personnes surendettées.
Ce sont naturellement les commissions de surendettement, réparties sur l’ensemble du territoire, qui constituent la colonne vertébrale du traitement du surendettement.
Nous avons eu l’occasion, avec Christine Lagarde, de visiter des commissions de surendettement. Nous avons alors pu mesurer le savoir-faire développé localement pour rechercher les façons les plus adaptées d’accompagner les personnes en difficulté.
Certes, cette décentralisation est source de richesse, car elle permet l’innovation, et il n’est pas question de la remettre en cause, mais – je dois vous le dire, mesdames, messieurs les sénateurs – elle est aussi, dans le même temps, source d’inégalités parce que chaque commission a développé sa façon de traiter des questions importantes, par exemple, les modalités de calcul du reste à vivre.
Pour tirer le meilleur parti de cette richesse tout en contribuant à une harmonisation des pratiques sur le territoire, Christine Lagarde a demandé au gouverneur de la Banque de France de mettre en place un mécanisme de « respiration » des commissions de surendettement. La Banque de France organisera chaque année des réunions thématiques régionales avec les membres des commissions. À partir de cette remontée d’information, la Banque de France pourra dégager les meilleures pratiques – les solutions qui fonctionnent le mieux sur l’ensemble du territoire – et ainsi les diffuser à l’ensemble des commissions.
L’enquête triennale de la Banque de France publiée en septembre a réuni les premières données sur le fonctionnement de la procédure de rétablissement personnel, la PRP, instaurée par la loi du 1er août 2003. C’est la première fois que nous disposons d’un bilan de la PRP et je dois dire qu’il est encourageant.
La PRP, vous le savez, est l’équivalent d’une procédure de faillite civile. Elle concerne les personnes dont la situation financière est irrémédiablement compromise, c’est-à-dire qu’il n’existe aucune perspective pour elles de rembourser tout ou partie de leurs dettes. La PRP a permis au juge, pour la première fois, de prononcer la vente des actifs et l’effacement total des dettes restantes.
À la fin de l’année 2007, l’orientation vers la PRP aura concerné 102 470 dossiers, soit 17 % des dossiers de surendettement. Avant la réforme, les personnes allaient de commission de surendettement en commission de surendettement, de plan de remboursement impossible à honorer en plan de remboursement impossible à honorer.
La PRP fonctionne donc, il existe désormais une issue.
À la suite de la publication du rapport Guinchard, le ministère de la justice réfléchit actuellement à la meilleure répartition des compétences entre le juge et les commissions de surendettement en matière de procédure de rétablissement personnel. Toute modification de la PRP qui accélérerait les procédures pour les personnes surendettées irait dans le bon sens. Pour autant, le ministère de l’économie sera très attentif sur ces questions.
Il ne fait aucun doute que les commissions de surendettement sont les plus à même de porter un diagnostic juste sur la situation économique et sociale des personnes surendettées. Ce n’en est pas moins le juge qui apporte à la PRP sa force et sa sécurité juridique, puisque la procédure repose, je vous le rappelle, sur le principe de la vente des actifs saisissables pour couvrir les dettes et, à défaut d’actifs cessibles, l’effacement total des dettes.
Je crois, mesdames, messieurs les sénateurs, que ce débat doit se poursuivre et je suis certain qu’il nous permettra d’aboutir à des solutions concrètes qui permettront d’accompagner la montée en puissance de cette procédure.
Enfin, nous devons nous préoccuper du rebond des personnes qui ont connu des difficultés d’endettement. Avec Christine Lagarde, nous avons annoncé une réduction des durées d’inscription au FICP.
La durée d’inscription des personnes en procédure de rétablissement personnel sera réduite de huit à cinq ans. Celle des personnes engagées dans un plan de remboursement d’une commission de surendettement sera, pour sa part, réduite de dix à cinq ans si elles remboursent sans incident. En cas d’incident de remboursement du plan, l’inscription sera prolongée sans toutefois que la durée totale d’inscription puisse dépasser une durée maximale de dix ans.
Si l’inscription au FICP protège les emprunteurs, elle rend également plus difficile dans la pratique l’accès au crédit. Le raccourcissement des durées d’inscription permettra donc de retrouver plus rapidement accès au crédit, une fois les difficultés surmontées. Un incident de paiement ne doit pas condamner à l’exclusion du crédit à vie.
Dans un contexte où 75 % du surendettement résultent, comme je vous l’ai indiqué, d’accidents de la vie, il nous faut trouver un équilibre des durées d’inscription afin qu’elles jouent leur rôle de protection des emprunteurs et des prêteurs tout en permettant aux personnes ayant connu des difficultés de surendettement de retrouver, une fois leurs difficultés surmontées, un accès facilité au crédit.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les propositions que je tenais à formuler devant vous.
Comme vous le voyez, une occasion sans précédent nous est offerte. Vos analyses, les propositions que nous avons entendues aujourd’hui, la proposition de loi du sénateur Marini, les travaux concernant la transposition de la directive sur le crédit, le rapport du Comité consultatif des services financiers, document qui sera communiqué demain, les travaux que nous a demandés le Président de la République en matière de crédit revolving et de crédit à la consommation sont autant d’outils dont le Gouvernement va se servir pour avancer sur ce sujet au début de l’année 2009.
Le Parlement sera naturellement associé à ce travail. Les débats de cet après-midi nous ayant montré que le Sénat était riche de compétences, la Haute Assemblée y prendra une large place. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. En application de l'article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.
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Conférence des présidents
Mme la présidente. La conférence des présidents a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
Jeudi 11 décembre 2008
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire :
1°) Projet de loi relatif à la commission prévue à l’article 25 de la Constitution et à l’élection des députés (n° 106, 2008-2009) et projet de loi organique portant application de l’article 25 de la Constitution (n° 105, 2008-2009), adoptés par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence ;
(La conférence des présidents a décidé que ces deux projets de loi feraient l’objet d’une discussion générale commune ;
La conférence des présidents a fixé :
- au mardi 9 décembre 2008, à 17 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements à ces deux textes ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale commune, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 10 décembre 2008) ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Éventuellement, vendredi 12 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi relatif à la commission prévue à l’article 25 de la Constitution et à l’élection des députés et projet de loi organique portant application de l’article 25 de la Constitution, adoptés par l’Assemblée nationale après déclaration d’urgence.
Mardi 16 décembre 2008
À 10 heures :
1°) Dix-huit questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 233 de M. Bernard Cazeau à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi ;
(Conséquences de la diminution des crédits affectés aux contrats aidés du secteur non marchand) ;
- n° 290 de Mme Josette Durrieu à M. le ministre de la défense ;
(Projet Tarmac de démantèlement d’aéronefs) ;
- n° 306 de M. Alain Fouché à M. le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ;
(Situation de l’aide à domicile en matière de politique salariale) ;
- n° 311 de M. Bernard Fournier à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
(Conséquences de la fusion des DDE – DDAF) ;
- n° 314 de Mme Fabienne Keller à M. le ministre de la défense ;
(Devenir de l’établissement public d’insertion de la défense) ;
- n° 319 de M. Jean Besson à M. le ministre d’État, ministre de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de l’aménagement du territoire ;
(Développement de la filière photovoltaïque en France) ;
- n° 323 de M. Alain Dufaut à M. le ministre de l’éducation nationale ;
(Réforme de la carte scolaire) ;
- n° 324 de M. Alain Fauconnier à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;
(Réforme de la gendarmerie nationale) ;
- n° 325 de Mme Anne-Marie Escoffier à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Desserte ferroviaire de l’Aveyron) ;
- n° 327 de M. Michel Doublet à M. le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;
(Mise en œuvre de l’exonération de la taxe foncière sur le non bâti pour les parcelles situées en zones humides et modalités de compensations financières aux communes) ;
- n° 333 de M. Yves Détraigne à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Instauration d’une évaluation médicale de l’aptitude à la conduite) ;
- n° 338 de Mme Catherine Dumas à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;
(Expérimentation du stationnement autorisé sur les places de livraison à Paris) ;
- n° 339 de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;
(Banalisation de l’utilisation du Taser X26) ;
- n° 342 de M. Bruno Gilles à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;
(Construction d’un commissariat à La Ciotat) ;
- n° 343 de M. Simon Sutour à Mme la ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales ;
(Restructuration de la gendarmerie nationale) ;
- n° 344 de M. François Marc à M. le secrétaire d’État chargé des transports ;
(Arrêt des travaux d’aménagement routier sur la RN 164) ;
- n° 345 de M. Daniel Laurent à Mme la ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative ;
(Difficultés de transport inter-hospitalier dans le secteur Charente-Maritime sud et est) ;
- n° 354 de Mme Nathalie Goulet à Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi ;
(Restitution des fonds irakiens) ;
Ordre du jour prioritaire :
À 16 heures :
2°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement (n° 464, 2007-2008) ;
3°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement (n° 465, 2007-2008) ;
4°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal et de son avenant (n° 68, 2008-2009) ;
5°) Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord-cadre relatif à la gestion concertée des migrations et au développement solidaire, du protocole relatif à la gestion concertée des migrations et du protocole en matière de développement solidaire entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne (n° 69, 2008 2009) ;
(La conférence des présidents a décidé que ces quatre projets de loi feraient l’objet d’une discussion générale commune ;
La conférence des présidents a fixé à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 15 décembre 2008) ;
6°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord de partenariat et de coopération entre les Communautés européennes et leurs États membres, d’une part, et la République du Tadjikistan, d’autre part (n° 37, 2008-2009) ;
7°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation d’un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République fédérative du Brésil relatif à la coopération dans le domaine de la défense et au statut de leurs forces (n° 122, 2008-2009) ;
8°) Projet de loi autorisant l’approbation de la déclaration de certains gouvernements européens relative à la phase d’exploitation des lanceurs Ariane, Vega et Soyouz au Centre spatial guyanais (n° 89, 2008-2009) ;
9°) Projet de loi autorisant l’approbation du protocole portant amendement de l’accord entre le Gouvernement de la République française et l’Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais (n° 90, 2008-2009) ;
10°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification de l’accord entre la République française et le Royaume d’Espagne relatif au bureau à contrôles nationaux juxtaposés de Biriatou (n° 35, 2008-2009) ;
11°) Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord sous forme d’échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse relatif à la création de bureaux à contrôles nationaux juxtaposés en gares de Pontarlier et de Vallorbe (n° 36, 2008-2009) ;
(Pour les six projets de loi ci-dessus, la conférence des présidents a décidé de recourir à la procédure simplifiée ;
Selon cette procédure simplifiée, les projets de loi sont directement mis aux voix par le président de séance. Toutefois, un groupe politique peut demander, au plus tard le vendredi 12 décembre 2008, à 17 heures, qu’un projet de loi soit débattu en séance selon la procédure habituelle) ;
À 17 heures et le soir :
12°) Projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale (Urgence déclarée) (n° 499, 2007-2008) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au lundi 15 décembre 2008, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le lundi 15 décembre 2008).
À partir de 18 heures :
- Désignation des vingt-cinq membres de l’Observatoire de la décentralisation ;
(Les candidatures devront être déposées au service de la séance le même jour à 16 heures 30).
Mercredi 17 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 16 heures :
1°) Suite du projet de loi portant dispositions relatives à la gendarmerie nationale ;
À 21 heures 30 :
2°) Sous réserve de leur dépôt, conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances pour 2009.
Jeudi 18 décembre 2008
À 9 heures 30 :
Ordre du jour prioritaire :
1°) Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances rectificative pour 2008 ;
(La conférence des présidents a fixé :
- au mercredi 17 décembre 2008, à 11 heures, le délai limite pour le dépôt des amendements ;
- à une heure et demie la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ;
Les inscriptions de parole devront être faites au service de la séance, avant 17 heures, le mercredi 17 décembre 2008) ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée au service de la séance avant 11 heures) ;
Ordre du jour prioritaire :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Vendredi 19 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30, à 15 heures et le soir :
- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2008.
Éventuellement, samedi 20 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 9 heures 30 et à 15 heures :
- Suite du projet de loi de finances rectificative pour 2008.
Lundi 22 décembre 2008
Ordre du jour prioritaire :
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
- Navettes diverses.
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances ?...
Ces propositions sont adoptées.
6
Parité de financement entre les écoles élémentaires publiques et privées
Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission
(Ordre du jour réservé)
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion des conclusions du rapport de la commission des affaires culturelles sur la proposition de loi tendant à garantir la parité de financement entre les écoles primaires publiques et privées sous contrat d’association lorsqu’elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, présentée par M. Jean-Claude Carle et plusieurs de ses collègues(nos 20 rectifié et 88).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean-Claude Carle, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des affaires culturelles.
M. Jean-Claude Carle, auteur de la proposition de loi et rapporteur de la commission des affaires culturelles. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis son adoption par une nuit de juillet 2004, l’article 89 de la loi du 13 août 2004 a éveillé bien des passions et bien des inquiétudes. Certains y ont vu des attaques rampantes contre la parité, d’autres une remise en cause directe de la laïcité ; tous, ou presque, s’en sont émus à un moment ou à un autre. C’est pourquoi le temps me semble venu, mes chers collègues, d’apporter un peu de clarté et de sérénité dans ces débats qui n’ont que trop duré.
Cette volonté, je la partage avec nombre de nos collègues, en particulier M. Yves Détraigne, auteur d’une proposition de loi qui, dans ses principes, rejoint celle dont nous débattons aujourd’hui. Cela a conduit notre collègue à accepter de cosigner ce dernier texte, ce dont je le remercie.
Il est en effet nécessaire de rendre enfin un peu de sérénité à nos débats. Pour ce faire, je souhaite que certaines choses soient enfin dites et assumées par tous : la guerre scolaire est terminée et nous sommes sortis de l’époque où l’école des bons pères et celle des hussards noirs de la République se livraient un combat sans fin.
Depuis la loi Debré, il y a, non plus deux, mais trois écoles : les écoles publiques, les écoles privées sous contrat qui sont assujetties au contrôle de l’État et qui remplissent des obligations de service public et, enfin, les écoles privées hors contrat. Cela même explique que le vieil adage : « à école privée, fonds privés ; à école publique, fonds publics » n’a plus grande pertinence. En effet, si les écoles privées sous contrat perçoivent des fonds publics, c’est précisément parce qu’elles remplissent des missions de service public et qu’elles délivrent un enseignement placé sous le contrôle de l’État.
Au demeurant – qui pourrait encore en douter ? –, voilà vingt ans, l’enseignement privé était sans doute largement confessionnel, mais, aujourd’hui, nombreux sont les parents qui inscrivent leurs enfants dans les écoles privées, non plus pour des raisons philosophiques ou religieuses, mais parce qu’ils apprécient la pédagogie qui y est proposée et la qualité de l’accueil.
C’est pourquoi, mes chers collègues, je suis viscéralement attaché à ces deux principes fondamentaux que sont la liberté de l’enseignement, d’une part, et la parité entre public et privé, d’autre part.
Je tiens à la liberté de l’enseignement, car c’est elle qui offre aux parents un véritable choix entre des formes de pédagogie différentes dans le respect de la liberté de conscience. Telle est, au demeurant, l’exigence essentielle consacrée par la loi Debré en son article 1er : « L’établissement [privé sous contrat], tout en conservant son caractère propre, doit donner cet enseignement dans le respect total de la liberté de conscience. Tous les enfants sans distinction d’origine, d’opinions ou de croyance, y ont accès. »
Mais cette liberté a un corollaire, mes chers collègues : elle suppose que nous acceptions tous de prendre en charge notre part des dépenses liées à l’exercice de cette liberté.
Que nous soyons maires d’une commune de résidence, d’une commune d’accueil, qu’il y ait ou non sur notre territoire une école publique ou une école privée, nous avons tous, à un titre ou à un autre, à assumer une part des conséquences financières de cette liberté fondamentale.
Il reste toutefois, monsieur le ministre, à préciser l’étendue de ces obligations. La proposition de loi clarifie celles qui pèsent sur les communes de résidence. Je souhaite que vous nous redisiez aujourd’hui quelles dépenses entrent dans le « panier » qui sert de base au calcul du forfait. Les investissements n’y ont déjà pas, et n’y auront pas à l’avenir, leur place. Pouvez-nous, monsieur le ministre, le confirmer très explicitement ? Cela serait de nature à apaiser des débats qui ne sont pas directement liés à ce texte.
Si donc je suis viscéralement attaché au libre choix de l’école, je tiens également au principe de parité, parce qu’il garantit, au-delà des convictions politiques affichées par les gouvernements successifs, que les élèves du public et du privé sous contrat seront traités de manière égale. La jurisprudence du Conseil constitutionnel l’a prouvé, en venant garantir successivement les droits de l’enseignement privé puis de l’enseignement public.
Il est donc temps de faire prévaloir la sérénité et de cesser de nous engager à toute occasion dans des combats d’arrière-garde : le public et le privé sous contrat ont toute leur place dans notre système d’enseignement.
Oui, mes chers collègues, le temps est venu de retrouver la sérénité en apportant un peu de clarté au régime de financement des écoles élémentaires sous contrat.
Bien des choses ont été dites sur l’article 89. Je m’en tiendrai, pour ma part, aux intentions de son auteur, notre collègue Michel Charasse, qui, pour défendre son amendement, affirmait en séance : « À partir du moment où, quoi que l’on en pense sur le fond, on a voulu, à travers les conventions, aligner complètement enseignement public et enseignement privé, je suggère tout simplement que les règles de participation des communes à la scolarisation des enfants dans les écoles privées soient les mêmes que si les enfants sont scolarisés dans les écoles publiques. »
Voilà ce que déclarait en juillet 2004 notre collègue Michel Charasse, et c’est cette volonté que la Sénat a faite sienne en adoptant cet amendement avec l’avis favorable du Gouvernement, représenté à l’époque par M. Jean-François Copé.
Pour des raisons techniques sur lesquelles je ne reviendrai pas en détail, cette volonté s’est perdue dans des sables rédactionnels, contraignant ainsi les ministères concernés à élaborer toute une construction juridique pour redonner à l’article 89 son sens originel : celui d’une disposition paritaire, alignant le régime applicable au privé sous contrat sur celui de public.
Rapportant devant vous en février dernier une proposition de loi d’abrogation, j’affirmais que cette construction était juridiquement fondée et politiquement équilibrée.
Cette position, je la fais toujours mienne, et c’est pourquoi, mes chers collègues, je vous propose aujourd’hui de la graver dans la loi. Par nature, une construction juridique est toujours fragile ; il faut donc désormais lui assurer l’assise solide de la loi.
C’est l’objet de l’article 1er du texte, qui pose un principe simple : une commune de résidence n’aura jamais à prendre en charge les dépenses de fonctionnement liées à la scolarisation dans le privé sous contrat d’un élève dans un cas où elle n’aurait pas dû le faire pour un élève scolarisé dans le public.
Pour que les choses soient plus claires encore, les quatre cas en question sont nettement explicités. Une commune de résidence n’aura donc à acquitter cette contribution pour un élève du privé sous contrat que si l’une de ces quatre conditions suivantes est remplie.
Première condition, la commune ne dispose pas des capacités d’accueil dans l’école publique de sa commune.
Deuxième condition, les obligations professionnelles des parents sont telles qu’elles imposent la scolarisation dans une autre commune, ce qui suppose que la commune de résidence n’ait organisé ni service de garde ni service de restauration.
Troisième condition, des raisons médicales imposent la scolarisation de l’enfant dans une autre commune.
Enfin, quatrième condition, le frère ou la sœur de l’enfant est déjà scolarisé dans cette autre commune.
Ces conditions, mes chers collègues, sont les mêmes que celles qui valent pour le public, à une exception près : l’accord du maire n’a en effet pas à être recherché pour l’inscription dans le privé, alors qu’il doit l’être pour le public.
La formulation est importante : certains ont regretté que l’accord préalable du maire de la commune de résidence ne soit pas requis pour l’inscription dans le privé. Ces regrets appellent d’avance trois remarques.
Tout d’abord, cette procédure d’accord préalable ne serait pas conforme à la Constitution, le Conseil constitutionnel ayant déjà eu l’occasion de juger en 1985 que l’exercice effectif de la liberté garantie par la Constitution qu’est la liberté de l’enseignement ne pouvait être soumis à l’accord préalable d’une quelconque autorité locale.
Ensuite, il n’est pas besoin de poser le principe de l’accord du maire pour garantir l’information de ce dernier. L’article R. 131-3 du code de l’éducation consacre d’ores et déjà le principe d’une transmission par le chef d’établissement, public ou privé, de la liste de ses élèves aux maires de la commune où ceux-ci résident. Cette disposition figure dans les textes ; il conviendrait donc, monsieur le ministre, de la faire systématiquement appliquer.
Enfin, quand bien même le législateur passerait outre la Constitution, ce que personne ne peut imaginer, il se devrait de constater que l’absence d’accord préalable pour la scolarisation dans le privé n’est pas une disposition favorable en soi au privé.
La raison en est simple : dans le public, l’accord du maire est obligatoire et, si ce dernier accepte la scolarisation hors de la commune en dehors des quatre cas obligatoires, il est alors obligé de participer au financement de la scolarité de l’élève en question. Tel n’est pas le cas dans le privé, puisque, en dehors des quatre cas précités, la commune de résidence peu, si elle le souhaite, participer au financement de la scolarité, sans qu’aucune obligation pèse pour autant sur elle.
C’est donc un régime autonome, mais paritaire, que je vous propose de créer aujourd’hui. Un régime autonome, parce qu’il tient compte de la singularité de l’enseignement sous contrat. Un régime paritaire, parce que le public et le privé y sont traités de manière égale compte tenu de leurs spécificités respectives.
Chacune des parties concernées y gagnera : les maires sauront désormais dans quels cas ils auront à verser la contribution prévue par la loi. Quant aux établissements, ils se verront garantir que les financements qui leur sont dus leur seront effectivement versés, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
Jusqu’à présent, le flou régnait : si les circulaires étaient claires, leur contestation latente, entretenue de tout côté, nourrissait l’insécurité juridique.
Certes, aucune décision de justice n’est venue invalider au fond la position adoptée par les ministères, la seule conforme à l’intention initiale du législateur. En effet, si le Conseil d’État a annulé la première circulaire d’application, c’est pour un motif de pure forme. Quant aux tribunaux administratifs, ils n’ont jamais eu à connaître que de délibérations manifestement illégales des conseils municipaux. Les uns refusaient en effet d’appliquer la loi ; les autres s’abritaient derrière la nécessité d’un accord préalable du maire, qui ne pouvait, à l’évidence, être requis pour le privé sous contrat.
Rien ne nous empêche donc, mes chers collègues, de dissiper l’insécurité juridique qui règne encore et de le faire en consacrant le principe d’un traitement paritaire du public et du privé.
Cela suppose toutefois de garantir aux établissements sous contrat qu’ils ne seront plus victimes, comme c’est encore parfois le cas aujourd’hui, d’un refus de paiement plus ou moins justifié.
L’article 2 de la proposition de loi pose donc le principe d’une intervention préfectorale dans un délai de trois mois : si le préfet est saisi, il devra arbitrer rapidement l’éventuel différend, permettant ainsi aux établissements et aux communes d’être rapidement fixés.
Quant à l’article 3, il procède, par coordination, à la suppression des dispositions existantes. Sur ce point, à tout le moins, nous ne pourrons que nous retrouver, mes chers collègues, puisque l’article 89 sera ainsi abrogé. De même, le premier alinéa de l’article L.442-9 du code de l’éducation sera supprimé. Il prévoyait en effet, depuis 1985, la participation de la commune de résidence aux dépenses de fonctionnement du privé sous contrat.
À cet égard, mes chers collègues, permettez-moi de faire un bref rappel historique.
L’histoire de l’article 89 ne commence pas en 2004. Ses premières racines remontent à 1985. À l’époque, le Sénat avait en effet souhaité poser le principe d’une participation de la commune de résidence au financement du privé en confiant au préfet le soin de trancher les éventuels conflits.
Notre regretté collègue Paul Séramy, alors rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, soulignait que l’absence de recours possible à un arbitrage en cas de désaccord entre les communes sur la répartition des dépenses ne pouvait qu’inciter les communes à ne pas acquitter ces contributions.
Vingt-trois ans après, les faits lui ont donné raison et tout a démontré depuis combien le gouvernement d’alors avait eu tort de refuser cet arbitrage préfectoral, ce refus revenant à vider de son sens le principe de parité.
C’est donc à un feuilleton vieux de près de vingt-trois ans que je vous propose, mes chers collègues, de mettre aujourd’hui un terme. Il revient au demeurant au Sénat de le faire, non pas parce qu’il aurait introduit de la confusion en adoptant l’article 89, mais parce que, depuis vingt-trois ans, il a su repérer les difficultés liées à ces articles et qu’il est donc à même de leur apporter enfin une réponse.
La commission des affaires culturelles a donc adopté la proposition de loi qu’elle vous soumet aujourd’hui.
Ce faisant, elle a ainsi reconnu qu’il s’agit là d’un texte équilibré, qui respecte le libre choix des familles et la stricte parité public-privé, d’un texte aisément applicable qui sera donc facilement appliqué, les préfets se voyant reconnaître toutes les prérogatives nécessaires pour ce faire, et d’un texte que je qualifierais de « gagnant-gagnant ». Les maires connaîtront leurs obligations et les possibilités que leur ouvre la loi. L’enseignement privé saura enfin sur quels financements il peut compter.
Avec Yves Détraigne et l’ensemble de mes collègues qui l’ont cosignée, je vous propose donc d’adopter cette proposition de loi, qui a fait l’objet d’une large concertation avec l’ensemble des formations représentant les maires - l’Association des maires de France, l’AMF, l’Association des maires ruraux de France, l’AMRF, ou l’Association nationale des élus de montagne, l’ANEM -, avec, bien sûr, les ministères concernés, le vôtre, monsieur le ministre, et le ministère de l’intérieur, et avec l’enseignement privé, tout particulièrement l’enseignement catholique. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)