Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le thème de la question orale avec débat que pose notre collègue Thierry Repentin est d’une acuité chaque jour plus grande compte tenu de l’ampleur de la crise financière, qui, malheureusement, se transforme en une crise économique qui n’a rien de virtuel.
Les solutions apparaissent très peu nombreuses tant la crise semble frapper durement la construction, et donc le logement. Le ressort paraît brisé. Alors même que, le mois dernier encore, se profilait une reprise d’activité dans le secteur du bâtiment, nous nous trouvons collectivement confrontés à un ralentissement notable des mises en chantier, tandis qu’un doute profond s’installe parmi les professionnels du secteur.
L’annonce, hier, d’une chute de 23,3 % des demandes de permis de construire et de 8,1 % des mises en chantier au troisième trimestre nous le confirme.
Pour reprendre l’adage cher aux Auvergnats, qui ont en partie construit Paris, « quand le bâtiment va, tout va ! ». De fait, si les temps s’annoncent durs pour ce secteur et pour l’emploi, on peut craindre que tout aille de plus en plus mal.
Il n’en reste pas moins que, aujourd’hui et depuis plusieurs années, de nombreux Français ont du mal à se loger. Il leur est difficile de devenir non seulement propriétaire, aspiration bien légitime, mais encore de trouver une location.
L’indice du coût de la construction, qui permet d’apprécier la richesse nécessaire pour devenir propriétaire dans du neuf, entre également dans le calcul de l’indice de référence des loyers. Or cet indice a progressé de manière exceptionnelle depuis 2000 : s’il a été valorisé de 13,4 % entre le premier trimestre de 1990 et le quatrième trimestre de 1999, il a augmenté de 44,22 % depuis le premier trimestre de 2000. De ce fait, nombreux sont ceux qui n’ont pu trouver un premier logement ou un nouveau logement à un prix suffisamment raisonnable pour leur permettre de faire face à leurs autres dépenses quotidiennes, le fameux « reste à vivre ».
Cette frénésie du marché de l’immobilier s’explique par différentes raisons, les unes tenant à la confrontation naturelle de l’offre et de la demande, les autres à des paramètres que la collectivité pourrait maîtriser.
Des taux d’intérêt bas, une TVA à 5,5 % dans la rénovation, un désir d’acquérir exacerbé ont eu pour conséquence que la demande a surpassé largement une offre souvent « insuffisante et mal adaptée », pour reprendre les termes du rapport du Conseil d’analyse économique. La croissance à deux chiffres des prix et des loyers a conduit les gouvernements précédents à mettre en place des dispositifs fiscaux qui ont accéléré et amplifié ce mouvement bien au-delà du raisonnable.
Il suffit pour s’en convaincre de voir la très forte croissance de « l’indice du prix des logements rapporté au revenu disponible par ménage et des montants de transactions de logements anciens rapportés à leur tendance longue », disponible dans le rapport du Conseil d’analyse économique. S’il variait depuis les années soixante jusqu’en 2000 entre 0,9 et 1,1, il a vu sa courbe s’envoler pour atteindre 1,7.
L’immobilier d’aujourd’hui participe malheureusement au creusement des inégalités, car, faute de logements sociaux en nombre suffisant, les prix pourraient continuer encore de grimper, excluant les plus défavorisés de toute possibilité de se loger.
Paris symbolise cruellement ce mécanisme qui aboutit aujourd’hui à ce que des employés de plus en plus nombreux soient contraints de trouver des solutions de fortune, pour ne pas dire de misère.
Notre pays connaît déjà des prix supérieurs à ce qu’ils sont dans de nombreux pays de l’OCDE.
En résumé, et ce constat est partagé par tous, les plus défavorisés, ainsi que les classes moyennes, ne trouvent pas de logements correspondant à leur capacité pécuniaire.
Comme je l’expliquais ici-même, le projet de loi dont nous avons débattu dernièrement ne constitue pas une bonne réponse. Existe-t-il d’ailleurs une bonne réponse ? Je ne saurais le dire. À tout le moins, il en existe de meilleures. La réduction, par le Gouvernement, au cours des trois prochaines années, des crédits de la mission « Ville et logement » fait partie de ces mauvaises solutions.
Je fais mien le constat que dresse le rapport du CAE et souscris à certaines de ses préconisations, en particulier l’incitation à libérer du foncier par la captation de plus-values par les collectivités lors du changement de destination d’un terrain, le regroupement à l’échelle intercommunale des compétences « urbanismes », l’amélioration de la gestion du parc social par une adaptation du logement aux évolutions du ménage et du loyer à la rémunération de ses occupants. En revanche, ce serait faire un « cadeau empoisonné » aux ménages que de concentrer les efforts fiscaux de l’État sur le prêt à taux zéro aux dépens du plan d’épargne logement, qui contribue à la responsabilisation de chacun, de faciliter les procédures juridiques de recouvrement des actifs gagés, de permettre le développement de la titrisation hypothécaire, bref, de mettre en place des mécanismes dont les travers ont conduit à la crise des subprimes.
Dans le contexte actuel, ne devrions-nous pas nous concentrer sur des offres de location raisonnables plutôt que de proposer des crédits à des ménages qui, demain, faute de pouvoir les rembourser, seront peut-être contraints de céder leur bien, acquis trop chèrement, à leur banque, devenue seul acquéreur possible ?
L’hypothèque rechargeable et le prêt viager hypothécaire, autorisés par l’ordonnance du 23 mars 2006 relative aux sûretés, représentaient déjà un risque non négligeable. Réduire le coût d’une hypothèque et assouplir son cadre juridique, ainsi que le préconise le CAE, ce serait, à mon sens, persister dans l’erreur. Nous recréerions, cette fois-ci dans notre pays, les conditions d’une nouvelle crise. De tels changements sont inenvisageables s’ils aboutissent à une croissance de la demande telle qu’elle conduirait les prix ou les loyers à des niveaux aussi peu réalistes que déraisonnables.
Aujourd’hui, les programmes immobiliers privés basés sur les plans « Robien » ou « Borloo » sont légion. Le Gouvernement s’apprête à se substituer aux promoteurs privés qui ne trouvent plus preneurs. À quel prix ? Au profit de qui ? Madame la ministre, nous apprécierions que cette question orale avec débat vous donne l’occasion de nous apporter des précisions à ce sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je ferai une réponse globale à M. Repentin, Mme Terrade, M. Bourquin et Mme André. Quant à M. Dallier, je le remercie de son intervention. Je n’ai rien à ajouter à ce qu’il a dit du crédit hypothécaire, sinon que l’inquiétude que suscite ce dernier chez certains des orateurs qui se sont succédé à la tribune tient davantage de la propension morbide à échafauder de fausses hypothèses que de la réalité.
Voilà à peine une semaine, la Haute Assemblée s’est prononcée sur le projet de loi de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. Ce fut l’occasion d’un débat riche, dense et de qualité. Et, puisque je suis de nouveau amenée à m’exprimer dans cet hémicycle, j’en conclus que ma présence y est appréciée. (C’est vrai ! sur plusieurs travées du groupe socialiste.)
Ce projet de loi a donné lieu à plus de cinquante heures de débat, ce qui prouve l’intérêt que nous portons tous à la question du logement.
M. Daniel Raoul. Nous avons débattu jour et nuit !
Mme Christine Boutin, ministre. Le texte que vous avez adopté, qui sera examiné au mois de décembre par l’Assemblée nationale, conserve la quasi-totalité des dispositions inscrites dans le projet de loi initial. Il a été conçu pour apporter des réponses opérationnelles à la crise du logement par une mobilisation de tous les acteurs, sans opposer inutilement secteurs public et privé, logement locatif et accession. Tous les outils doivent être utilisés !
La crise financière a des effets importants sur l’immobilier. Les réponses proposées dans ce texte sont indispensables, car, pour progresser, il faut d’urgence compléter les instruments à la disposition de l’État, des bailleurs sociaux, des collectivités territoriales et des associations.
Monsieur Repentin, vous avez beaucoup insisté sur la chute du nombre des mises en chantier. Sincèrement, permettez-moi de vous dire que vous ne manquez pas de toupet ! (M. Thierry Repentin rit.) J’aurai, pour ma part, l’outrecuidance de vous montrer de nouveau la courbe des constructions de logements neufs que j’ai déjà produite la semaine dernière. (Mme la ministre brandit une feuille sur laquelle est reproduit un graphique.) L’intervalle compris entre les deux traits bleus indique la période au cours de laquelle l’actuelle opposition était au pouvoir. Vous pouvez donc voir facilement comment cette courbe a évolué après notre retour, en 2002 !
M. Thierry Repentin. Merci à la loi SRU !
Mme Christine Boutin, ministre. Pas uniquement, monsieur Repentin ! Vous le savez fort bien ! En 2007, 437 000 logements ont été construits, dont 108 000 logements sociaux !
M. Thierry Repentin. Grâce au dispositif « Robien », c’est vrai !
Mme Christine Boutin, ministre. Bien évidemment, le logement social a son rôle, mais faites preuve un tant soit peu de modestie et sachez reconnaître la vérité ! La seule vision de ce graphique devrait vous dispenser de tout commentaire sur les supposés désengagements de l’actuelle majorité en matière de logement !
L’effort de construction a été fortement accru, le nombre de logements réalisés passant de 308 000 en 2002 à 435 000 l’année dernière, niveau jamais atteint depuis trente ans. Ce résultat a été obtenu en raison de la remarquable mobilisation des organismes de logement social. En outre, grâce aux nouvelles aides de l’État, davantage de particuliers ont investi dans un logement, soit pour l’occuper, soit pour le mettre en location.
De même, le Gouvernement a réagi à l’impact brutal de la crise financière sur l’immobilier. En effet, celle-ci a touché en premier lieu le secteur de l’immobilier : la restriction de l’accès au crédit, tant pour les particuliers que pour les professionnels, bloque le marché.
Le ralentissement sérieux que nous subissons depuis le mois de juin, et que personne ne conteste, nous laisse à penser que nous terminerons l’année avec environ 360 000 mises en chantier. Le retournement est rapide, mais le niveau de construction reste élevé, puisque le nombre de logements mis en chantier cette année sera identique à ce qu’il était en 2004 et bien supérieur à ce qu’il était entre 1997 et 2002.
Comme vous, nous sommes très attachés à la construction de logements. Le nombre des mises en chantier baissera en 2008 en raison de la crise financière, mais, mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité et de l’opposition, nous ne devons pas avoir honte de ce résultat, car, je le répète, il est très supérieur à ce qu’il était lorsque l’opposition actuelle était au pouvoir.
Vous le savez, la non-production d’un seul logement représente deux chômeurs de plus. Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, nous sommes donc obligés de rattraper le retard qui s’est accumulé en matière de construction lorsque vous étiez au pouvoir. C’est indispensable, mais, vous le savez, cela prend du temps. J’ajoute, monsieur Repentin, que le projet de loi que j’ai eu l’honneur de défendre devant la Haute Assemblée participe à l’effort que nous accomplissons en la matière.
Ce projet de loi a trois objectifs majeurs : soutenir l’activité de construction pour la location et l’accession populaire à la propriété ; permettre aux classes moyennes et modestes d’accéder au logement ; enfin, lutter contre le mal-logement, qu’aucun d’entre vous n’a évoqué cet après-midi, bien qu’il s’agisse d’un sujet important.
Mon premier objectif a toujours été de soutenir l’activité de construction. Plusieurs mesures prévues dans le projet de loi serviront de support au plan de relance annoncé par le Président de la République, plan consistant en la mise en œuvre d’un programme d’achat de 30 000 logements en VEFA, vente en l’état futur d’achèvement, qui doit permettre à des opérateurs sociaux d’acheter des programmes n’ayant pu être lancés à ce jour par les promoteurs privés, faute d’une « pré-commercialisation » suffisante.
Des critiques ont été émises tout à l’heure sur cette opération. Mais comment pouvez-vous vous y opposer ? Actuellement, certains programmes ne sont pas lancés, parce que les banques refusent d’octroyer des prêts au promoteur au motif que tout n’est pas commercialisé !
M. Daniel Raoul. Nous n’avons jamais contesté cela !
Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Raoul, j’ai parfaitement entendu certains orateurs mettre en cause ce plan !
Ce levier est primordial, puisque, outre les 30 000 logements qui vont être réalisés par les bailleurs sociaux subventionnés par l’État, la totalité des programmes seront finalisés grâce à cette mesure. Je ne comprends pas comment on peut mettre en doute la VEFA !
M. Daniel Raoul. Mais c’est nous qui l’avons créée !
Mme Christine Boutin, ministre. Monsieur Raoul, peut-être n’étiez-vous pas en séance à ce moment-là, mais j’ai entendu quelqu’un contester le bien-fondé de la décision du Président de la République concernant les 30 000 logements. Et je ne peux pas laisser passer de tels propos !
La disposition du projet de loi qui simplifie et sécurise la procédure de vente en l’état futur d’achèvement aux organismes d’HLM permettra d’accélérer et de rendre pleinement opérationnel ce plan d’achat.
Le plan de relance du Président de la République prévoit également la réalisation de 30 000 logements d’accession populaire à la propriété grâce au Pass-foncier. Là encore, la disposition du projet de loi qui permet d’étendre au logement collectif le dispositif du Pass-Foncier viendra renforcer cette ambition, en particulier en zone urbaine, là où le logement individuel est moins adapté aux besoins.
Le plan de relance vise en outre à accélérer la mise en œuvre du programme de cession de terrains publics décidé lors du Comité interministériel pour le développement de l’offre de logements du 28 mars 2008, afin d’atteindre rapidement l’objectif de production de 70 000 logements sur le foncier ainsi libéré. Ce programme sera complété par des cessions issues des restructurations militaires annoncées en juillet dernier et du plan patrimonial réactualisé de Réseau ferré de France.
Par ailleurs, la « boîte à outils » visant à faciliter les cessions des biens immobiliers de l’État sera enrichie, au-delà de la simple vente, par la possibilité de recourir à des baux permettant un intéressement ultérieur de l’État à la valeur créée.
Enfin, le foncier de l’État cédé pour réaliser des opérations en Pass-foncier pourra faire l’objet d’une décote comme pour la construction de logements locatifs sociaux afin de favoriser l’accession populaire à la propriété.
Une circulaire du 17 octobre signée par le Premier ministre a été adressée aux préfets. Elle prévoit notamment une déclinaison régionale de la mise en œuvre du rachat en VEFA de 30 000 logements. À ce titre, l’ensemble des acteurs concernés ont été réunis par les préfets de région, et des cellules de suivi local les accompagneront dans leur démarche. Comme vous pouvez le constater, nous n’avons pas perdu de temps !
Sur le plan national, un comité du pilotage se réunira dès la semaine prochaine pour faire le point sur les initiatives engagées.
Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous ont une nouvelle fois parlé des crédits budgétaires. Comme l’a fort bien dit M. Dallier, nous aurons l’occasion d’y revenir. En attendant, je vais vous répéter ce que j’ai dit la semaine dernière.
La mise en œuvre des dispositions prévues dans le projet de loi pourra s’appuyer sur un budget dont je n’ai pas à rougir. En effet, pour avoir une image exacte du budget du ministère du logement et de la ville, il faut prendre en compte les moyens des agences, qui jouent un rôle essentiel dans la conduite des politiques du logement et de la ville, en particulier l’ANRU et l’ANAH.
En prenant en compte ces moyens, les crédits du ministère passent à 8,9 milliards d’euros, ce qui représente plus de 200 millions d’euros supplémentaires par rapport à 2008. Cette augmentation provient en particulier d’une contribution, qui a été négociée avec les partenaires sociaux du 1% logement, de 800 millions d’euros au financement de l’ANRU et de l’ANAH.
Cette contribution, prévue pendant trois ans, a été rendue possible grâce à l’optimisation et à la réorientation des emplois du 1% logement vers les priorités de la politique du logement, en particulier vers les plus fragiles d’entre nous.
Je cite deux exemples : le Pass-travaux est rendu inutile par la création de l’éco-prêt pour les travaux d’amélioration énergétique, qui a été mis en œuvre dans le cadre du Grenelle de l’environnement ; les subventions à la Foncière sont rendues plus efficaces dans la mesure où il n’est pas nécessaire de subventionner à plus de 50 % les logements construits par cet organisme.
Pour être plus précise, je rappellerai que la baisse de 30 % des moyens affectés au financement du logement social, qui a été avancée par certains, n’est pas exacte. En effet, c’est le périmètre de cette ligne budgétaire – la ligne fongible – qui a fait l’objet d’une redéfinition pour 2009. Cette subtilité leur a peut-être échappé …
Certaines actions inscrites sur cette ligne fongible, tels les travaux de réhabilitation du parc existant ou les dépenses d’humanisation des structures d’hébergement, seront financées en 2009, soit par des ressources extrabudgétaires, soit par d’autres lignes. Compte tenu de ce changement de périmètre, ce sont près de 100 millions d’euros de dépenses qui ne relèveront plus de la ligne fongible en 2009. En outre, les organismes de logement social bénéficieront l’année prochaine de ressources extrabudgétaires plus importantes que par le passé.
Les subventions du 1% logement au logement locatif social vont croître de 33 %, conformément à ma demande, pour atteindre 300 millions d’euros.
Par ailleurs, si j’en crois les déclarations du directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, une baisse du taux du livret A pourrait intervenir au 1er février, permettant ainsi une baisse des taux des prêts au logement social, qui sont financés, vous le savez tous, sur les ressources du livret A.
En ce qui concerne le budget, je vais simplement vous indiquer quelques chiffres.
Je vous le dis clair et net, les crédits de paiement du logement locatif social augmentent de 5,63 %. Ceux de l’ANAH augmentent de 23,06 %. Dans ces conditions, est-ce le budget qui est en baisse ou est-ce que ce sont les capacités de paiement ? Je vous laisse le soin de répondre à cette question.
Pour ce qui concerne le logement locatif social, le budget pour 2009 permettra de financer 120 000 logements, soit 20 % de plus qu’en 2007. Je le rappelle, cette année, 108 000 logements sociaux ont été réalisés, ce qui correspond aux capacités des organismes sociaux.
En matière d’accession à la propriété, monsieur Repentin, je vous rappelle toutes les mesures qui ont été prises ces dernières années : l’extension à l’ancien du prêt à taux zéro, d’où 250 000 prêts au lieu de 80 000 ; la TVA à 5,5 % pour l’allocation d’accession sociale, qui est utilisée notamment par les coopératives d’HLM ; la TVA à 5,5 % pour le Pass-foncier, qui passe de 20 000 à 30 000 ; l’augmentation des plafonds de ressources des prêts d’accession sociale à la propriété, qui a été décidée par le Président de la République et dont j’ai peu entendu parler tout à l’heure.
Toutes ces aides publiques ne figurent pas dans le budget en tant que telles, mais elles favorisent bien l’accession sociale à la propriété.
Vous avez également fait allusion au recentrage du dispositif « Robien ». Je vous indique les chiffres afin que tout le monde les ait bien en tête : sur les 250 000 logements qui ont été réalisés depuis 2003, 5 000 sont vacants.
En ce qui concerne les aides publiques, puisque l’on dit toujours que cela coûte cher, je rappellerai que le dispositif « Robien » correspond à une dépense fiscale de 15 000 euros par logement, et non de 30 000 euros, comme vous l’avez indiqué, et qu’un logement construit grâce au dispositif « Robien » rapporte environ 20 000 euros à l’État par le biais de la TVA.
Il faut donc regarder les choses dans leur ensemble et non de façon sectorielle.
Plusieurs intervenants ont évoqué le rapport du Conseil d’analyse économique intitulé « Loger les classes moyennes : la demande, l’offre et l’équilibre du marché du logement », ainsi que la question du crédit hypothécaire, qui est au centre des préoccupations d’un grand nombre d’entre vous.
Le rapport du Conseil d’analyse économique m’a été remis le 30 septembre dernier. Je tiens à en souligner la qualité. Il aborde de nombreux thèmes de la politique du logement. Tous ont été examinés dans le cadre de la préparation du projet de loi et certains, comme la modernisation du monde des bailleurs sociaux, ont été retenus.
Monsieur Repentin, je n’accepte pas que vous puissiez faire un lien direct entre la crise des subprimes et celle du crédit hypothécaire. M. Dallier l’a très bien dit : les subprimes sont des prêts qui ont été octroyés sans contrôle de la capacité de remboursement des ménages. En France, vous le savez, cette capacité de remboursement est contrôlée et les prêts aux ménages modestes sont sécurisés.
Vous avez cité l’ANIL. À mon tour, je veux vous citer l’un de ses documents d’avril 2007 : « Le système français offre aux accédants à la propriété le crédit le moins cher d’Europe et dans les meilleures conditions de sécurité. » On peut lire plus loin : « … le taux de défaillance est plus faible et les saisies restent exceptionnelles ».
Si vous voulez que je vous rassure encore, voici un passage d’une enquête typologique de la Banque de France sur le surendettement : « Les situations de surendettement dit “passif” demeurent très majoritaires et augmentent de deux points. Mais la part de l’endettement immobilier se réduit. Aujourd’hui, 8 % des dossiers comportent au moins un crédit immobilier, contre 10 % en 2004 et 15 % en 2001. La tendance est à la diminution ». L’enquête typologique de la Banque de France poursuit : « L’endettement immobilier au sein de la population française orientée vers la procédure de rétablissement personnel ne représente qu’une part infime de l’endettement total ».
Maintenant que j’ai apporté toutes ces précisions, je pense que nous n’aurons pas l’occasion de nous revoir la semaine prochaine à votre demande, …
M. Thierry Repentin. C’est dommage ! (Sourires.)
M. Daniel Raoul. Cela pourrait devenir une addiction !
Mme Christine Boutin, ministre. Ce n’est pas toujours une bonne chose d’avoir des habitudes, monsieur Raoul. (Nouveaux sourires.)
Comme je viens de le souligner, le système français de prêts immobiliers a un très bon suivi, avec un nombre très faible de défaillances de la part des emprunteurs. Devons-nous nous en plaindre ? Il serait hasardeux aujourd’hui de nous engager dans des montages complexes pour lesquelles nous devrions attendre le retour d’expérience.
L’urgence est de redonner de la stabilité au système financier, de redonner confiance aux acteurs. Le Président de la République a engagé des actions très fortes pour sécuriser les ressources des banques. On ne peut que le reconnaître. Même s’il est difficile à certains de l’admettre publiquement, la façon dont le Président de la République gère cette crise financière mondiale force l’admiration de tous.
M. Gérard César. Très bien !
Mme Christine Boutin, ministre. Dans le domaine plus spécifique de l’immobilier, il a été décidé, à la demande du Président de la République, d’améliorer les conditions de garantie du fonds de garantie pour l’accession sociale. Vous le savez, cela fait partie du « paquet ». Le plafond de ressources des ménages bénéficiaires du PAS a ainsi été augmenté au niveau du plafond du prêt à taux zéro jusqu’à la fin de 2009. Outre l’effet de soutien à la demande en matière d’accession, cette mesure est de nature à sécuriser davantage les banques prêteuses et donc à diminuer le coût de leurs refinancements.
Par ailleurs, à la suite de mon appel, les banques ont annoncé la mise en place d’aménagements pour les particuliers ayant souscrit un prêt relais. M. Georges Pauget s’y est engagé et des mesures sont en train d’être mises en œuvre. Il y a en effet des familles qui se trouvent aujourd’hui en grande difficulté. Les banques appliqueront donc leurs procédures en matière de crédits relais avec plus de souplesse pour répondre à mon appel à la clémence.
Je souligne aussi que les banques qui se sont associées au projet de la maison pour 15 euros par jour se sont engagées à prolonger jusqu’au 1e janvier 2009 le taux préférentiel à 5 % pour les prêts aux particuliers.
En conclusion, je vous dirai que, pour faire face aujourd’hui à la crise de l’immobilier et pour répondre en profondeur à la crise du logement qui touche nos concitoyens depuis de nombreuses années, il est nécessaire que tous les acteurs se mobilisent.
Vous avez demandé, monsieur Repentin, que le logement devienne une grande cause nationale. Pour ma part, je vous invite à une véritable union politique. Nous ne devons pas nous opposer les uns aux autres. Au contraire, nous devons être unis pour répondre à ce droit fondamental, qui est celui de chaque homme, de chaque femme et de chaque enfant, d’avoir un logement. Le projet de loi que j’ai défendu devant vous la semaine dernière poursuit cet objectif.
Mon ambition est que chacun donne le meilleur de lui-même et que toutes les énergies soient orientées vers un même objectif : donner un toit à tous en fonction de ses choix et de ses besoins. Pour y parvenir, il est nécessaire d’intervenir sur l’ensemble de la chaîne du logement, qui est une chaîne de solidarité entre tous les citoyens de notre pays.
C’est pourquoi il est essentiel d’agir tous ensemble. Chacun a son rôle à jouer et il serait contre-productif, voire dangereux, d’opposer les propriétaires aux locataires, le locatif social à l’accession populaire à la propriété, les bailleurs sociaux aux promoteurs privés. La mobilisation de tous est indispensable.
Il faut agir sur l’ensemble des leviers et avec tous les acteurs concernés. Ce n’est qu’à cette seule condition que l’on parviendra à affronter la crise que nous traversons aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste.)
Mme la présidente. En application de l’article 83 du règlement, je constate que le débat est clos.
Mes chers collègues, en attendant M. le ministre de l’agriculture et de la pêche, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinquante.)
Mme la présidente. La séance est reprise.