M. Philippe Marini, rapporteur. Oui !
M. Daniel Raoul. Je sais, mes chers collègues, que l’amendement que nous vous soumettons vise également à compenser cette perte fiscale par une dotation de l’État. Mais il est difficile de faire autrement, et nous le regrettons.
Néanmoins, contrairement à vous, nous n’aurions pas proposé une telle exonération, à tout le moins dans les montants évoqués puisqu’il n’y aurait plus de plafond, comme l’a expliqué mon collègue Richard Yung. C’est la raison pour laquelle nous vous avons suggéré de limiter cette exonération aux seuls droits perçus par l’État.
Enfin, à l’heure où le Gouvernement entend remettre en cause la contribution de l’État à la fiscalité locale dans le cadre du prochain projet de loi de finances pour 2009 – si l’on en croit les bruits de couloir et ce qui se dit dans les différents comités qui se réunissent actuellement – au motif que l’État ne peut continuer, dans un contexte budgétaire difficile – chacun sait que les caisses sont vides –, à participer à hauteur d’environ 18 milliards d’euros à la fiscalité locale en compensation des dégrèvements et des exonérations d’impôts locaux, l’article 16 du projet de loi aura pour conséquence d’accroître un peu plus cette participation. Cela ne semble pas très cohérent.
Rappelons que les associations d’élus locaux et territoriaux, dans leur rapport intitulé Pour une réforme du système fiscal local, ont fait de la restauration de cette autonomie fiscale un élément indispensable de la réforme de la fiscalité globale.
Peut-être pourriez-vous, madame la ministre, à l’occasion de cet amendement, préciser les modalités de compensation, si elles existent, de cette perte de recettes pour les collectivités territoriales ?
M. le président. L'amendement n° 349, présenté par M. Massion, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le Gouvernement présente au Parlement avant le 31 décembre 2011 un rapport d'évaluation détaillé sur l'impact de l'article 732 ter du code général des impôts.
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. Le présent amendement et l’amendement n°350 étant de même inspiration et de même nature, je les présenterai ensemble.
Nous l’avons dit, le dispositif proposé a un coût évalué à près de 27 millions d’euros à l’heure actuelle ; il sera peut-être plus élevé à l’avenir. Or, vous le savez, l’état de nos finances publiques ne permet pas l’octroi indéfini, et infini, d’exonérations fiscales.
M. Philippe Marini, rapporteur. Absolument !
M. Richard Yung. La dette publique du pays a dépassé, au premier trimestre 2008, la barre des 1 250 milliards d’euros, soit 65 % du PIB.
La situation en matière de dépenses fiscales s’est très largement détériorée. Depuis 2003, le nombre d’exonérations fiscales s’est accru de 16 %, passant de 418 à 486,...
M. Philippe Marini, rapporteur. Hélas !
M. Richard Yung. … et ce malgré les engagements de certains lors des récentes campagnes électorales.
Leur montant a également subi une augmentation, passant de 50 milliards d’euros à 73 milliards d’euros, soit 27 % des recettes fiscales nettes de l’État et près de 4 % du PIB.
M. Philippe Marini, rapporteur. Hélas !
M. Richard Yung. Cette situation ne peut perdurer ! Nous devons agir, d’autant que nous sommes sous le regard critique et la pression constante de nos partenaires européens et de Bruxelles.
Face à cette situation, madame la ministre, vous avez déclaré, en réponse à une question de notre collègue député Chantal Brunel, vouloir passer en revue ces niches fiscales pour « contrôler que leur objectif répond bien à une préoccupation de justice fiscale, afin qu’il n’y ait pas d’abus » et pour éventuellement en supprimer ou en plafonner quelques-unes. Mais, pour l’instant, nous n’avons pas vu grand-chose venir, à part un rapport en avril, qui est une simple évaluation de l’utilisation et de l’impact économique des seules niches fiscales non plafonnées.
C’est pourquoi nous vous proposons, dès aujourd’hui, d’agir de façon beaucoup plus déterminée, de faire preuve de courage et de volonté, et de revoir en profondeur ces dispositifs, en commençant par évaluer l’incidence de la dépense fiscale créée par l’article 16, puis en limitant l’application de ces dispositifs – c’est l’objet de l’amendement n° 350 – à une durée de trois ans, de façon à pouvoir décider de la prolongation de la mesure ou de son arrêt si elle n’est pas appropriée.
M. le président. L'amendement n° 350, présenté par M. Massion, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - Les dispositions prévues à l'article 732 ter du code général des impôts s'appliquent aux cessions intervenues à compter de la publication de la présente loi et jusqu'au 31 décembre 2011.
Cet amendement est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur. La commission est défavorable à la suppression de l’article, donc aux amendements identiques nos 343 et 468.
La commission considère que le dispositif « anti-abus » donne largement satisfaction à l’amendement n° 344 et elle sollicite donc le retrait de ce dernier.
S’agissant de l’amendement n° 346, la commission est particulièrement sensible à la démarche de nos collègues. En ce qui concerne les ressources des collectivités territoriales, nous pensons comme eux que l’État ne peut pas en disposer aussi facilement. Cet amendement, qui vise à limiter l’abattement aux seuls droits d’enregistrement perçus par l’État, suscite de notre part un avis de sagesse, et j’oserai dire de sagesse réellement bienveillante.
Mme Bariza Khiari. De sagesse positive !
M. Philippe Marini, rapporteur. En ce qui concerne l’amendement n° 652, nous en comprenons bien l’intérêt, mais nous craignons qu’un tel élargissement de la base de la mesure ne soit quelque peu coûteux par les temps qui courent. Peut-être faciliterait-il également, à certains égards, l’optimisation fiscale. Pour ces raisons, nous apprécierions vivement que cet amendement soit retiré.
L’amendement n°345 nous semble être largement satisfait par le dispositif « anti-abus » de la commission, c'est-à-dire par l’amendement n° 8, que j’ai déjà eu le plaisir de présenter.
L’amendement n° 347 est en réalité un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 346, pour lequel j’ai déjà exprimé un avis de sagesse bienveillante. Si l’amendement n° 346 n’était pas adopté, il serait logique de reporter cette sagesse bienveillante sur l’amendement n° 347.
L’auteur de l’amendement n° 270 nous invite à créer la dernière niche pour le dernier commerce du dernier endroit. Cette initiative manifeste un grand esprit d’innovation en matière fiscale et mériterait des précisions. La qualification « dernier commerce de proximité en milieu rural » est-elle suffisamment précise ? Il me semble que la rédaction de ce dispositif pourrait être améliorée et que, en l’état actuel, comme le disent volontiers nos brillants administrateurs, cela « tournerait » difficilement. Peut-être serait-il bon, après l’avis du Gouvernement, de retirer cet amendement ?
L’amendement n° 348 est dans la même veine que ceux pour lesquels la commission s’en est remise à la sagesse bienveillante du Sénat. À la vérité, ses auteurs nous rappellent la doctrine de la commission des finances du Sénat, ce que je ne saurais leur reprocher.
L’amendement n° 349 peut s’insérer dans une démarche plus globale d’évaluation des niches fiscales. De ce point de vue, il me semble participer à une utile pédagogie.
Il en va de même de l’amendement n° 350, pour lequel la commission a émis un avis favorable puisque la proposition rejoint le principe des niches à durée déterminée, qui est l’un des combats de la commission des finances du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Christine Lagarde, ministre. Je souhaite rappeler en avant-propos les circonstances dans lesquelles nous examinons ces amendements.
Après passage à l’Assemblée nationale, l’article 16 est destiné à mettre en place un mécanisme simplifié permettant un abattement des droits de mutation à titre onéreux sur les cessions de fonds de commerce ou les cessions d’actions pour faciliter la transmission des fonds de commerce et des activités, en particulier pour les petites et moyennes entreprises.
Actuellement, l’article 16 prévoit un abattement pour la liquidation sur les rachats d’entreprises par les salariés ou les membres du cercle familial du cédant qui s’engagent à poursuivre leur activité professionnelle dans l’entreprise pendant cinq ans. Cet abattement porte donc sur les cessions qui interviennent au bénéfice des salariés ou des membres du cercle familial du cédant. Les amendements identiques nos 343 et 468 visent tout simplement à supprimer cet article.
Quand nous savons que près de 700 000 entreprises devront être cédées et changeront de main dans les dix ans à venir, et que nous avons tout intérêt à encourager ces cessions pour éviter la viduité de toutes ces petites et moyennes entreprises, qui constituent le tissu indispensable de notre économie, nous ne pouvons qu’être défavorables à ces amendements de suppression.
L’amendement n° 344 a pour objet de transformer la taxation avec abattement de 300 000 euros en une exonération d’un montant équivalent lorsque la valeur du fonds n’excède pas 300 000 euros.
Cet amendement et tous ceux qui seront présentés ensuite visent à réduire le champ d’application de cet abattement en le restreignant aux opérations de cessions sous certains plafonds. Nous avons préféré un mécanisme ne présentant aucune difficulté d’appréciation. Il peut, certes, sembler un peu trop simple, mais il permettra certainement d’encourager et de faciliter ces modes de cessions.
Pour cette raison, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 344.
L’amendement n° 346 vise à limiter l’imputation de l’abattement de 300 000 euros aux seuls droits de mutation à titre onéreux perçus par l’État.
J’ai bien entendu l’appel à la sagesse de M. le rapporteur à propos de cet amendement. Pour les raisons de simplicité que je viens d’évoquer, dans la mesure où, entre le cédant et le cessionnaire, le taux est porté à 3,5 % et l’abattement à 300 000 euros, il ne me paraît pas souhaitable de limiter cette disposition aux seuls droits de mutation à titre onéreux perçus par l’État et d’exclure du champ d’application les droits de mutation à titre onéreux dont bénéficient les collectivités territoriales. Cela ne ferait qu’introduire de la complexité.
M. Daniel Raoul. C’est un peu court !
Mme Christine Lagarde, ministre. C’est la raison pour laquelle, s’agissant de droits de mutation à titre onéreux qui profitent aux collectivités territoriales et d’un risque de perte de recettes pour ces dernières, je souhaite vous rassurer : cette perte de recettes fera l’objet d’une mesure de compensation budgétaire qui figurera dans le projet de loi de finances rectificative pour 2008, conformément à l’article L. 1614-5 du code général des collectivités territoriales.
Il n’est surtout pas question que les collectivités territoriales subissent une perte de recettes en raison d’une mesure de simplification prévue de manière générale.
J’espère ainsi avoir pu faire évoluer votre sagesse positive vers une sagesse négative, monsieur le rapporteur !
Sur l’amendement n° 652, qui vise à étendre le bénéfice de la mesure aux activités professionnelles indépendantes, le Gouvernement a émis un avis défavorable, en raison, notamment, de l’extension du champ qui, très certainement, entraînera un accroissement important du volume des dépenses, ce qui ne nous paraît pas souhaitable en une période de finances publiques un peu contraintes.
M. Philippe Marini, rapporteur. Encore du déficit !
Mme Christine Lagarde, ministre. Sur l’amendement n° 345, qui prévoit de limiter le bénéfice de la mesure aux fonds dont la valeur n’excède pas un million d’euros, pour les raisons déjà évoquées tout à l’heure, il s’agit d’éviter de restreindre le champ d’application, même au risque de la simplicité de la mesure.
Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 8 relatif au dispositif « anti-abus ». La mesure préconisée par la commission permet, me semble-t-il, de répondre à un certain nombre des objections qui ont fait l’objet des amendements précédents concernant le champ d’application de la mesure.
Sur l’amendement n° 347, qui est un amendement de repli par rapport l’amendement n° 346, dans la mesure où j’ai essayé de faire évoluer la sagesse positive de M. le rapporteur en sagesse négative, je demande à ses auteurs de bien vouloir le retirer. Sinon, le Gouvernement émettra un avis défavorable.
Le Gouvernement souhaite également le retrait de l’amendement n° 270, madame Goulet, pour des raisons d’incertitude et, en particulier, de risque d’effet d’aubaine. En effet, il ne faudrait pas, concernant ce dernier fonds de commerce, qu’il y ait, contrairement à l’objectif visé, une incitation à la cession dans la mesure où le déplafonnement pourrait favoriser des départs précipités.
L’amendement n° 348 a pour objet une compensation d’exonération par un mécanisme traditionnel, c’est-à-dire une majoration à due concurrence du prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonération relative à la fiscalité locale. C’est la mesure que j’évoquais tout à l’heure, c'est-à-dire l’engagement pris par le Gouvernement de compenser les pertes de recettes pour les collectivités territoriales.
L’amendement n° 349 prévoit que le Gouvernement présentera au Parlement, avant le 31 décembre 2011, un rapport d’évaluation détaillé sur l’impact de l’article 732 ter du code général des impôts issu de l’article 16 du présent projet de loi.
Dans son principe, cette mesure me paraît intéressante. Certes, me direz-vous, c’est un rapport de plus. Mais cette disposition s’inscrit dans une logique de vérification de la portée des mesures d’exonération que nous prenons afin d’encourager tel ou tel mécanisme de cession.
Je m’en remets donc à la sagesse de la Haute Assemblée sur cet amendement.
Enfin, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 350, qui vise à limiter le bénéfice du dispositif prévu à l’article 16 aux cessions intervenues à compter de la date de publication de la présente loi et jusqu’au 31 décembre 2011. Le principe en est toutefois intéressant.
À ce sujet, je souhaite vous indiquer, puisque vous m’avez interrogée sur les niches fiscales, que toutes les questions relatives au plafonnement, notamment en ce qui concerne les niches fiscales qui ne sont pas plafonnées, seront examinées dans le cadre du projet de loi de finances pour 2009.
Mon collègue Eric Woerth et moi-même préférons effectivement que ces dispositions figurent dans les projets de loi de finances plutôt que dans divers textes, où elles seraient dispersées sans avoir pu faire l’objet d’un examen attentif des excellents spécialistes en matière fiscale qui siègent dans cette assemblée.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 343 et 468.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur Yung, l'amendement n° 344 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Oui, monsieur le président.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 347 et 348 n’ont plus d’objet.
Madame Payet, l'amendement n° 652 est-il maintenu ?
Mme Anne-Marie Payet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 652 est retiré.
Monsieur Yung, l'amendement n° 345 est-il maintenu ?
M. Richard Yung. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 345.
(L'amendement n'est pas adopté.)
La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote sur l'amendement n° 8.
Mme Marie-France Beaufils. Après avoir entendu l’ensemble des remarques qui ont été émises sur les amendements proposés à cet article, je pense que nous partageons tous le souci de la reprise des activités dans de bonnes conditions.
L’activité commerçante, dont nous reparlerons ultérieurement, connaît aujourd'hui de grandes difficultés, en particulier les commerces de bouche, qui sont bien souvent sinistrés.
Le rapporteur Philippe Marini, comme l’ensemble de la commission spéciale, conscient de l’effet d’aubaine contenu dans le dispositif d’allégement des droits de mutation prévu par l’article 16, propose d’en « border » l’application en en limitant le recours autant que faire se peut.
Le problème est que l’application de l’article 16 porte sur une opération unique, intéressant un cédant et un acquéreur, dans les limites permises par le texte de l’article 732 ter du code général des impôts.
Vu la qualité des acquéreurs potentiels, rien n’empêche un cédant de procéder à plusieurs cessions, au mieux de ses intérêts bien compris, pour peu qu’il figure sur le rôle des contribuables de l’impôt de solidarité sur la fortune et qu’il escompte se libérer au plus tôt de ses obligations de ce point de vue, dès lors qu’il cesserait son activité professionnelle. Mme la ministre l’a d'ailleurs confirmé tout à l'heure à propos d’un autre amendement.
Dans le schéma de l’article 16, un commerçant disposant de cinq ou six magasins dans des zones de chalandise ou exerçant des activités différenciées peut très bien décider de céder le fonds de commerce de chacun des magasins à l’un de ses enfants, l’un de ses frères ou encore certains de ses salariés. Il pourra dès lors multiplier l’abattement de 300 000 euros par autant d’opérations qu’il le souhaite, et réaliser une fructueuse opération : une chance au grattage avec l’abattement sur les droits de mutation, et une chance au tirage avec l’allégement de la fiscalité pouvant frapper ensuite un patrimoine professionnel qui serait devenu un patrimoine privé.
D’ailleurs, rien, ensuite, ne pourra empêcher le cédant de continuer à participer au capital des entreprises ainsi créées, en procédant notamment à de judicieux et rentables - sur le plan de l’optimisation fiscale - versements en numéraire déductibles de l’impôt sur le revenu comme de la cotisation éventuelle de l’impôt de solidarité sur la fortune.
Le dispositif « anti-abus » proposé par la commission ne permettra pas d’éviter les effets d’aubaine.
Au demeurant, l’exigence de maintien en activité de l’entreprise ou du fonds cédé n’est même pas nécessaire puisque l’engagement d’une procédure collective à l’encontre de la nouvelle société exploitante n’occasionnera, en aucune manière, la déchéance du bénéfice de l’affaire.
Telles sont les remarques que nous souhaitions formuler à propos de l'amendement n° 8, qui est une proposition louable mais apparemment contournable.
M. le président. La parole est à M. Daniel Raoul.
M. Daniel Raoul. Monsieur le président, les amendements nos 347 et 348 n’ayant plus d’objet en raison de l’adoption de l’amendement n° 346, je formulerai simplement une remarque.
Madame la ministre, nous préférons régler le problème à sa source, plutôt que nous en remettre à une loi de finances rectificative, dont nous ne connaissons ni le contenu ni la date. La « prémédication », en ce qui concerne nos collectivités, nous semble préférable.
Mme Marie-France Beaufils. Absolument !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'amendement n° 270.
Mme Nathalie Goulet. Au risque de paraître entêtée - mais, ces derniers jours, nous avons souvent rectifié des textes en séance -, je me demande si l’on ne pourrait pas préciser qu’il s’agit de commerces « dont la liste est fixée par décret ». (Mme la ministre fait un signe de dénégation.)
Madame le ministre, voilà quelques années, nous avons déjà raté une occasion d’agir dans la loi relative au développement des territoires ruraux.
Dans mon beau département de l’Orne, sur 505 communes, la moitié d’entre elles n’ont aucun commerce. Quant à l’effet d’aubaine d’une cession dans une commune de l’Orne, je vous encourage chaudement à venir visiter notre département.
M. Daniel Raoul. Chaudement, dans l’Orne ? (Sourires.)
Mme Nathalie Goulet. Vous verrez que les repreneurs n’y sont pas légion ! Il faudra donc, très sérieusement, réfléchir à une solution.
Cela étant, mon amendement n’ayant séduit personne, je vais le retirer. Mais je crois qu’il sera difficile d’expliquer, dans ces territoires, l’appétence pour les grandes surfaces alors qu’aucune aide n’est prévue pour les derniers commerces en milieu rural.
M. le président. L'amendement n° 270 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 349.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Article 16 bis
Le I de l’article 790 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Pour la liquidation des droits de mutation à titre gratuit, en cas de donation en pleine propriété de fonds artisanaux, de fonds de commerce, de fonds agricoles ou de clientèles d’une entreprise individuelle ou de parts ou actions d’une société, il est appliqué, sur option du donataire, un abattement de 300 000 € sur la valeur du fonds ou de la clientèle ou sur la fraction de la valeur des titres représentative du fonds ou de la clientèle, si les conditions suivantes sont réunies : » ;
2° Le c est abrogé.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 351 est présenté par M. Massion, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L’amendement n° 469 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Richard Yung, pour présenter l’amendement n° 351.
M. Richard Yung. Ce nouvel article 16 bis, inséré à la suite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement du rapporteur pour avis, Nicolas Forissier, puis corrigé en seconde délibération par le Gouvernement, étend exagérément la dépense fiscale en matière de droits de mutation à titre gratuit.
L’article 790 A du code général des impôts prévoit actuellement une exonération totale des droits de mutation pour les donations, effectuées au profit des salariés, de fonds de commerce, de clientèle ou de droits sociaux dont la valeur taxable est inférieure à 300 000 euros.
Au motif de neutraliser les effets de seuil – ils ont bon dos ! – le rapporteur pour avis de la commission des finances de l’Assemblée nationale a proposé, dans un premier temps, de substituer à cette exonération un dispositif d’abattement d’un montant de 300 000 euros pour toute donation d’un bien dont la valeur n’excède pas un million d’euros. Donc, comme tout à l’heure, on commence à 300 000 euros pour aboutir à un million d’euros ! Or le Gouvernement, toujours insatisfait en matière de cadeaux fiscaux, a tout simplement décidé, en seconde délibération, de supprimer le plafond pourtant élevé d’un million d’euros.
Pour faciliter l’équilibre budgétaire et préserver les recettes fiscales, nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 469.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. Comme vient de le rappeler notre collègue Richard Yung, l’article 16 bis a été ajouté au texte initial du projet de loi à la suite de l’adoption d’un amendement déposé par le rapporteur pour avis de la commission des finances de l’Assemblée nationale.
Comme en d’autres domaines et pour plusieurs mesures du projet de loi, cette situation montre, s’il en était encore besoin, que cet amendement était en quelque sorte « commandé » et que ses dispositions auraient fort bien pu figurer dans le périmètre du texte initial. Mais, bien évidemment, une telle disposition aurait posé le problème de l’égalité devant l’impôt. Car, enfin, comment ne pas relever que cet article offre la possibilité de transmettre sans frais – par le biais d’une donation, par exemple – 300 000 euros de patrimoine personnel ?
Quel est le détenteur de patrimoine qui peut, aujourd’hui, bénéficier d’une telle mesure ? Nous connaissons la réponse à cette question : pour les fonds de commerce ou les clientèles de faible valeur, l’instauration d’un seuil d’exonération élevé ne changera pas grand-chose ; mais pour les patrimoines professionnels importants, et notamment pour les patrimoines de contribuables assujettis à l’impôt de solidarité sur la fortune, le schéma est différent ! On crée ainsi une niche fiscale particulièrement profitable, en rupture évidente avec le principe d’égalité devant l’impôt.
La loi TEPA comportait déjà des mesures plus que discutables sur l’aménagement des droits de mutation. Ce dispositif va encore plus loin, alors même que le précédent n’a pas forcément aidé à la relance de l’activité économique !
Quant à la substitution du dispositif d’abattement à l’exonération, elle ne paraît pas modifier vraiment la situation. En tout état de cause, il conviendrait plutôt de se préoccuper de la mise en place d’une vraie politique d’aide à la reprise d’entreprises et de développement des activités, moyennant de véritables engagements budgétaires.
Sous le bénéfice de ces observations, nous ne pouvons donc que vous inviter à adopter la suppression de cet article 16 bis.
M. le président. L’amendement n° 9 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - L’article 790 A du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. - Les dispositions du I ne peuvent s’appliquer qu’une seule fois entre un même donateur et un même donataire. »
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements identiques nos 351 et 469.
M. Philippe Marini, rapporteur. L’amendement n° 9 rectifié est très voisin de l’amendement n° 8. Il s’agit du même dispositif « anti-abus », mais appliqué cette fois-ci aux droits de mutation à titre gratuit.
S’agissant des amendements de suppression, la commission émet un avis défavorable.