Mme Nicole Bricq. Pas de polémique sur un sujet comme celui-là !
M. Michel Charasse. La guerre, c’est la guerre !
M. Robert Bret. Personne ne le demande, monsieur le ministre !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Vous passez du temps à dire quelque chose que personne ne demande !
M. Hervé Morin, ministre. Les opérations spéciales ne peuvent non plus faire l’objet d’une telle procédure. Par exemple, l’opération que nous avons menée en Mauritanie pour récupérer les assassins de touristes français nécessite bien entendu une certaine confidentialité, les opérations humanitaires qui n’auraient absolument aucune fin militaire également. Si nous envoyons des produits alimentaires par bateau pour secourir des populations victimes d’un cataclysme ou d’un séisme, cela n’entre pas non plus, à notre avis, dans le cadre de l’article 13.
Enfin, sont également exclus du dispositif de cet article les déplacements de nos aéronefs dans les espaces internationaux, les déplacements des bâtiments de la marine nationale ainsi que les escales dans les ports lorsqu’ils sont obligés d’en effectuer.
En revanche, toutes les opérations menées à un titre ou un autre – au titre de l’ONU, de l’Union européenne, d’un accord international, d’une décision nationale – doivent, à mon sens, relever de l’article 13.
Enfin, quel est l’acte déclencheur à partir duquel courent les délais de la procédure ? Selon nous, il s’agit du lancement effectif de l’opération, et non des discussions internationales ou des résolutions des Nations unies. Le point de déclenchement est donc, pour nous, l’envoi des forces constituées et non pas les premières forces prépositionnées, telles que les forces spéciales qui viennent d’abord baliser le terrain.
Tels sont les éléments d’information que je souhaitais apporter et compte tenu desquels le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements n° 110 et 139.
J’ai répondu indirectement à l’amendement n° 257, ainsi qu’à l’amendement n° 457, qui prévoit un débat suivi d’un vote.
J’ai également répondu à M. Charasse sur les accords de défense.
J’ajoute que, comme l’a souligné M. le rapporteur, la mise en œuvre de l’article 49 de la Constitution peut intervenir à tout moment. L’Assemblée nationale peut donc déposer une motion de censure, et le Gouvernement engager sa responsabilité devant l'Assemblée nationale en vertu de l’alinéa 1er de cet article.
M. Michel Charasse. Très bien !
M. Hervé Morin, ministre. Les opérations en Irak avaient d’ailleurs fait l’objet d’un vote en 1991 en vertu de l’article 49, puisqu’il n’existait pas d’autre dispositif permettant au Parlement de se prononcer.
M. le président. Monsieur le ministre, je vous rappelle que l’amendement n° 20 rectifié bis a été retiré.
M. Michel Charasse. Me permettez-vous de vous interrompre, monsieur le ministre, pour dire un mot sur les accords de défense ?
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, avec l’autorisation de M. le ministre.
M. Michel Charasse. Monsieur le ministre, il existe plusieurs catégories d’accords de défense, et tout ne relève pas de cette appellation.
M. Michel Charasse. Certains accords en bonne et due forme doivent être ratifiés ou approuvés conformément à l’article 53 de la Constitution. En revanche, certains textes que l’on nomme, par simplification, « accords » n’entrent pas dans le cadre de la ratification prévue par cet article. On a souvent pris l’habitude d’appeler « accords de défense » de simples échanges de lettres, qui ne sont d’ailleurs pas toujours publics pour des raisons de secret défense.
Monsieur le ministre, à la suite de ce débat, il serait souhaitable de clarifier la situation pour les commissions compétentes des deux assemblées.
M. le président. Veuillez poursuivre, monsieur le ministre.
M. Hervé Morin, ministre. S’agissant des amendements identiques nos 111 et 140, j’ai bien entendu le plaidoyer de M. de Rohan en faveur de la navette parlementaire.
Pour sa part, le Gouvernement estime qu’il s’agit d’une procédure longue, qui débouchera éventuellement sur la constitution d’une commission mixte paritaire, et donc sur un nouvel examen du texte par les deux chambres. On peut d’ailleurs parfaitement imaginer qu’une proposition de loi vise à engager cette procédure. Même si j’ai cru comprendre que le Sénat avait décidé d’adopter cette disposition, je pense que son adoption risque de compliquer la situation à l’excès.
M. Didier Boulaud. Et la déclaration d’urgence ?
M. Hervé Morin, ministre. J’y insiste, le fait de vouloir autoriser la prolongation de l’intervention militaire par le biais du vote d’un projet de loi ou d’une proposition de loi risque d’allonger les délais.
Enfin, vouloir soumettre tous les quatre mois la prolongation d’une intervention des forces armées à l’étranger à l’autorisation du Parlement risque de conduire ce dernier à avoir un ordre du jour surchargé. Cela signifie qu’il devra organiser de quinze à vingt débats sur les quinze ou vingt opérations dans lesquelles les troupes françaises sont engagées.
M. Michel Charasse. Si la révision de la Constitution est votée, il faudra bien s’occuper ! (Sourires.)
M. Hervé Morin, ministre. Ce matin, lors de mon audition devant les commissions parlementaires de l'Assemblée nationale, j’ai proposé que le Gouvernement fasse une présentation très claire des missions de toutes les opérations extérieures et de leur coût lors de l’examen du projet de loi portant règlement définitif ou du projet de loi de finances, pour que le Parlement puisse exercer son contrôle, légitime et normal, sur chaque opération.
M. Didier Boulaud. Ce serait un vote bloqué ! Or les opérations ne sont pas traitées de la même manière !
M. Jean-Pierre Fourcade. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote sur l'amendement n° 193 rectifié.
M. Robert Bret. Mon explication de vote vaudra pour l’ensemble des amendements présentés sur cet article.
Monsieur le ministre, il n’est pire sourd que celui qui ne veut entendre. Mettons-nous d’accord, il ne s’agit pas pour nous de demander que le Parlement se prononce sur tous les types d’interventions, notamment sur celles qui présentent un caractère d’extrême urgence, comme la protection de nos ressortissants ou celles qui nécessitent confidentialité et rapidité d’action. À cet égard, vous avez évoqué l’intervention des forces spéciales ou encore les opérations qui entrent dans le cadre d’exercices à l’étranger.
De même, je l’ai indiqué tout à l'heure, nous excluons les interventions d’urgence décidées en application de l’article 51 de la charte des Nations unies relatif à l’invasion d’un pays.
En revanche – c’est tout le débat que nous avons avec vous –, lorsqu’il s’agit de l’envoi de militaires en corps constitués à des fins opérationnelles, …
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il faut que ce soit très clair !
M. Robert Bret. … qui peuvent participer à des combats dans des situations politiques souvent complexes dans le cadre d’un mandat international, nous pensons, contrairement à vous, que les élus du peuple doivent prendre leurs responsabilités…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Absolument !
M. Robert Bret. ... et se prononcer par un vote dans un délai qui reste à fixer.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Raffarin. Je voudrais moi aussi, après M. Charasse, vous faire part de mon expérience personnelle.
Je me souviens de certaines interventions militaires décidées en comité restreint par le Président de la République avec le Premier ministre et un chef d’état-major des armées dans la salle du sous-sol de l’Élysée, pour n’être ni écouté ni repéré.
Le secret de la décision dans un monde où la guerre est d’abord celle du renseignement, puis de la technologie, est essentiel. Vouloir engager les forces de notre pays après un débat parlementaire, alors que les renseignements ennemis se trouvent au sein de la société française, …
M. Alain Gournac. Tout à fait !
M. Jean-Pierre Raffarin. … revient vraiment à se paralyser les bras et à s’empêcher d’agir.
M. Michel Charasse. Le secret peut être trahi !
M. Jean-Pierre Raffarin. Sur ce sujet, je soutiendrai la position du président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Nous devons conserver notre capacité d’action, car la guerre, nous le voyons bien, n’a plus rien à voir avec ce qu’elle était.
Monsieur le ministre, vous consentez des efforts importants en faveur des services de renseignement pour faire évoluer notre système de défense ; c’est bien là, mesurez-le, mes chers collègues, que sont les enjeux de l’avenir ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. –Yves Pozzo di Borgo applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Fourcade, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Fourcade. J’étais membre du gouvernement lors de l’opération Kolwesi, qui visait à protéger nos ressortissants. Une telle opération ne peut se prêter à un débat parlementaire. Nous ne pouvons donc voter l’amendement qui nous est proposé.
Je formulerai deux observations.
Premièrement, j’ai noté avec beaucoup d’intérêt que M. le ministre de la défense a proposé de nous présenter un tableau retraçant le coût des opérations extérieures lors de l’examen du projet de loi de finances ou du projet de loi de finances rectificative. Voilà une excellente idée. Mais je vous propose, monsieur le ministre, d’y ajouter le coût des opérations liées à nos accords de défense. Ainsi, le Parlement disposerait d’une information complète à la fois sur les opérations extérieures et sur les contrats extérieurs, lorsqu’ils entraînent vraiment des dépenses, telles nos bases situées en Afrique ou ailleurs.
Deuxièmement, les deux amendements identiques présentés par la commission des lois et la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées tendant à prévoir un délai de trois jours pour informer le Parlement en cas d’intervention de nos forces armées à l’étranger me semble excellent dans la mesure où seul le Gouvernement peut choisir le moment de l’information.
Je ne crois pas que, avec cette révision constitutionnelle, nous diminuions par trop les prérogatives du Gouvernement. Nous sommes dans un système équilibré des pouvoirs entre le Gouvernement et le Parlement. Le Gouvernement dispose de toute une série d’outils pour informer, outils qui vont de la réunion des commissions parlementaires à celle des chefs de groupes politiques, comme on l’a vu pour d’autres opérations. Le texte qui nous est proposé constitue donc une grande avancée. Il faut le voter sans regret, car il est essentiel pour l’information du Parlement et de ceux que nous représentons. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 110 et 139.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Frimat, pour explication de vote sur l'amendement n° 457.
M. Bernard Frimat. Mon intervention vaudra pour tous les amendements, monsieur le président.
Monsieur le ministre, nous vous avons écouté avec intérêt et saluons votre souci de ne pas engager de polémique.
Je veux simplement vous faire remarquer que les problèmes abordés sont difficiles à traiter. Nous nous réjouissons que l'Assemblée nationale ait maintenu les pouvoirs du Premier ministre ; nous aurons peut-être à en débattre à un autre moment.
Sur de nombreux points, nous ne sommes pas en désaccord avec vous, car le sens des responsabilités n’est l’apanage de personne !
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Heureusement !
M. Bernard Frimat. À des niveaux divers, les formations politiques ont montré, dans l’exercice des fonctions gouvernementales, qu’elles avaient ce sens des responsabilités.
Personne, au sein du groupe socialiste tout au moins, ne va demander que l’on prévienne par télex notre éventuel adversaire de notre arrivée ! Ne sombrons pas dans un débat de piètre qualité !
Je veux simplement vous faire remarquer, sans esprit polémique aucun, que vous êtes finalement d’accord avec vous-même.
M. Bernard Frimat. Ce n’est pas toujours chose aisée ! (Sourires.)
Par ailleurs, vous avez émis un avis favorable sur deux amendements identiques, l’un émanant de la commission des lois et l’autre de la commission des affaires étrangères. Vous avez donc réussi à être d’accord sur un point essentiel de ce texte avec votre majorité, ce qui est aussi un événement !
Toutefois, quand nous avons évoqué l’idée d’organiser un débat pouvant être suivi d’un vote, comme cela se fait ailleurs, vous avez écarté d’un revers de main, tout comme les présidents des deux commissions d’ailleurs, notre proposition. Vous manifestez votre esprit d’ouverture en nous répondant : non, pas question, circulez, il n’y a rien à voir !
Quant à la confirmation de l’engagement, nous nous rallions sans aucun problème à la proposition de M. de Rohan, soit un délai de quatre mois. Mais nous demandons que cet engagement soit ensuite renouvelé. Il n’est pas normal que le Parlement ne puisse plus en délibérer ; on ne peut donner au Gouvernement une autorisation pour l’éternité ! Comme l’a fait remarquer Didier Boulaud sous forme de boutade, que fera-t-on en cas de guerre de Trente Ans ou de Cent Ans ?
Je prends acte du souci que vous avez du travail parlementaire. Quant à la déclaration d’urgence, je sais avec quelle modération le Gouvernement en use pour apprécier tout le caractère sympathique de votre observation ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)
La confirmation que nous demandons n’a rien, selon nous, d’exorbitant. Pourtant, là encore, on nous oppose un refus.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Eh oui, parce que c’est logique !
M. Bernard Frimat. Sur les accords de défense, que nous répondez-vous ? Que le président a promis ! Nous avons compris…
Dans ce débat, nous apprenons maintenant que des normes dépassent celles de la Constitution. En effet, votre collègue Mme Dati nous a répondu qu’il était inutile de discuter du problème puisque le Président de la République a chargé un comité de s’en occuper. Nous devons donc être sérieux et avoir conscience de la modestie de notre rôle de parlementaires ! À partir du moment où un comité, quelle que soit la sommité qui le préside – Mme Veil ou M. Mazeaud –, a été chargé de réfléchir sur un problème, le Parlement n’a plus, bien sûr, à s’en saisir ; ce serait discourtois ! Pourquoi tous les problèmes ne seraient-ils pas traités en comité ?
La promesse du Président de la République a certainement une très grande valeur, encore que, selon un Président dont vous étiez plus proche que nous et dont je ne citerai pas le nom, « les promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent »…Nous, nous attachons plus de valeur au texte de la Constitution qu’aux promesses du Président. Mais, sur ce point encore, circulez, il n’y a rien à voir !
Monsieur le président, nous maintiendrons tous nos amendements. Dans un domaine sur lequel nous avons manifesté notre accord avec l’essentiel, vous nous avez montré votre capacité d’ouverture en refusant toutes nos propositions.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Ce n’est pas une question d’ouverture !
M. Bernard Frimat. C’est sans doute la méthode que vous avez choisie pour faire évoluer notre position !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Hervé Morin, ministre. Monsieur le sénateur, le problème réside dans la confusion des genres.
Il existe un pouvoir exécutif, un pouvoir législatif et une autorité judiciaire. Les choses sont ainsi faites car, on le sait, une démocratie fonctionne avec un système de checks and balances, un pouvoir contrôlant un autre pouvoir. Le vote immédiat sur l’ensemble des opérations et des décisions de l’exécutif relève précisément, à mon sens, de la confusion des genres.
Comme je le disais tout à l’heure à M. Charasse, rien n’empêche, à un moment ou à un autre, un gouvernement qui le souhaite d’informer le Parlement…
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Bien sûr !
M. Hervé Morin, ministre. …et de lui demander de se prononcer par un vote sur la décision qu’il a prise, estimant que celle-ci engage gravement et lourdement la nation. C’est ce qu’avait décidé le Président Mitterrand, en accord avec son Premier ministre, en 1991. On pourrait tout à fait imaginer la mise en œuvre d’une telle procédure, qui relève aussi de la Constitution.
Quant au renouvellement permanent de la décision, il existe honnêtement moult procédures !
D’abord, une partie de l’ordre du jour sera désormais aux mains du Parlement. Rien n’empêchera donc l’inscription d’une telle problématique.
Ensuite, si une loi est nécessaire à la suite de la révision définitive de la Constitution, rien n’empêchera non plus l’inscription à l’ordre du jour d’une proposition de loi, même si, personnellement, je pense que ce n’est pas la bonne solution.
Enfin, rien n’empêche le vote d’une réduction des crédits budgétaires.
Ces diverses procédures permettent à tout moment au Parlement de poursuivre sa mission de contrôle et de se prononcer au bout de quatre mois sur la décision qui a été mise en œuvre et votée par le Parlement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Josselin de Rohan, rapporteur pour avis. Monsieur Frimat, si l’on était dans l’obligation de renouveler tous les quatre mois une demande d’autorisation dans une opération dure et complexe, l’adversaire le saurait. Il engagerait une offensive particulièrement meurtrière, justement dans l’espoir d’influer sur le Parlement, afin que celui-ci prenne peur et, redoutant ce qui pourrait advenir, émette un avis négatif.
Dans des cas de ce genre, vous ne pouvez pas donner un signal négatif à l’adversaire ; vous devez conserver la maîtrise du temps. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. Didier Boulaud. Ce sera vrai au bout de quatre mois ; l’argument se retourne !
M. le président. La parole est à M. Robert Bret, pour explication de vote.
M. Robert Bret. Il me semble que l’une des fonctions principales du Parlement est le contrôle de la dépense publique.
Tout à l’heure, monsieur le ministre, vous ne m’avez pas contredit lorsque j’ai cité le montant de 880 millions d'euros pour la trentaine d’opérations extérieures pour 2008. Quelle somme avait-elle été programmée dans la loi de finances ? Moins de 400 millions d'euros !
M. Robert Bret. Par conséquent, c’est le double qui a été dépensé !
Qui contrôle ? Qui prend la décision à un moment donné ? On voit bien que, de ce point de vue-là, le Parlement est tenu à l’écart, alors qu’il s’agit de l’une de ses fonctions essentielles ! Il est même mis devant le fait accompli.
C’est valable aussi pour ce type de situation, afin d’apprécier s’il faut s’engager et avec quels moyens financiers. Sinon, quel est le rôle du Parlement dans cette affaire ? Celui d’une simple chambre d’enregistrement, en lisant la presse le lendemain matin !
M. le président. La parole est à M. Didier Boulaud, pour explication de vote.
M. Didier Boulaud. S’agissant tout d’abord des opérations extérieures, j’ai bien entendu la proposition de notre collègue Jean-Pierre Fourcade, qui relaie d’ailleurs la proposition de M. le ministre, à savoir examiner globalement l’ensemble des opérations extérieures au moment de la discussion de la loi de finances rectificative ou de la loi de finances initiale.
Mais si quinze opérations extérieures ont lieu en même temps, elles ne sont pas toutes de même nature. On ne peut pas les juger globalement et faire un vote bloqué !
Pour combien de temps serons-nous en Afghanistan ? Personne ne le sait. L’opération dure depuis des années et elle continuera sans doute encore longtemps,…
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Apparemment, oui !
M. Didier Boulaud. …surtout qu’un renfort supplémentaire de 700 hommes vient d’être apporté, contre l’avis de l’opinion publique d’ailleurs. Tout cela n’a pas de sens !
Le Parlement a toujours la possibilité, avez-vous dit, de réduire les crédits budgétaires. Franchement, c’est faire porter aux parlementaires une sacrée responsabilité : ils deviendraient responsables du manque de moyens pour se battre !
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ah, c’est formidable, ça !
M. Didier Boulaud. C’est à l’exécutif d’assumer ses responsabilités !
Monsieur le ministre, puisque vous n’avez pas engagé de polémique sur l’accord d’Abu Dhabi, permettez-moi de vous rappeler qu’il a été signé le 17 janvier 1995. Le Président de la République était François Mitterrand, et le Premier ministre d’alors s’appelait Edouard Balladur !
M. Michel Charasse. Exact !
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. À l’issue de ce débat, il est donc entendu – mais je préfère que cela ait été affirmé et confirmé ! – que le Parlement a toujours la faculté de mettre en cause la responsabilité du Gouvernement par l’article 49-2 de la Constitution, ou par l’article 49-3 s’il y a un texte.
M. Josselin de Rohan, rapporteur pour avis. Évidemment !
M. Michel Charasse. Le Gouvernement peut toujours solliciter la confiance par l’article 49-1 ou par l’article 49-4, ou encore les deux.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Mais oui !
M. Michel Charasse. Mais, au terme de tout cela – et c'est pourquoi les amendements n’étaient pas inutiles forcément –, seul le Sénat ne peut pas, sur son initiative, obtenir un vote.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Bien sûr !
M. Michel Mercier. Sauf sur une résolution !
M. Michel Charasse. Sauf sur une résolution, mais la résolution est sans vote !
Bref, pour le futur, je dis simplement que, lorsqu’on est engagé dans une opération militaire, surtout si celle-ci est difficile, le Gouvernement a toujours intérêt à s’appuyer sur la confiance et le soutien de la représentation nationale.
M. Didier Boulaud. Absolument !
M. le président. Je vais mettre aux voix les amendements identiques nos 111 et 140.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Monsieur le ministre, puis-je me permettre de rappeler à vos honorables conseillers que nous avons repris la formulation de l’article 53 de la Constitution ?
J’ai entendu parler de proposition de loi. Franchement ! Ou alors il faut modifier rapidement l’article 53 de la Constitution, ou alors, si le Sénat refusait de ratifier un traité, le Gouvernement pourrait demander à l’Assemblée nationale de statuer définitivement, et celle-ci aurait le dernier mot !
Monsieur le ministre, vous avez évoqué la navette. Mais l’urgence sera déclarée !
En tout cas, nous ne voulons pas que le Sénat soit présenté explicitement comme une assemblée de second rang ! Notre formulation correspond à l’article 53 de la Constitution de 1958. Les termes et la procédure sont les mêmes. Aucun amendement n’est recevable.
J’ajoute, monsieur le ministre, que la brièveté dans la Constitution a infiniment plus d’élégance ! Cela devrait être aussi la règle pour les lois. Je sais que vous y êtes particulièrement attaché compte tenu de votre formation initiale.
M. le président. La parole est à M. Yves Pozzo di Borgo, pour explication de vote.
M. Yves Pozzo di Borgo. Si ces amendements identiques sont adoptés, l’amendement n° 279 rectifié que j’ai déposé deviendra sans objet.
Je rejoins la position du président de la commission des lois et du président de la commission des affaires étrangères. La formulation initiale avait été jugée inélégante, d’où mon vœu, exprimé de façon quelque peu brutale, de rappeler le principe du bicamérisme.
M. le président. La parole est à M. Michel Charasse, pour explication de vote.
M. Michel Charasse. Dans ces affaires, les choses doivent être claires !
Le rapporteur de la commission des lois nous dit qu’il n’y aura pas d’amendement sur la loi d’autorisation. La Constitution est très précise. Le Parlement, en matière internationale, n’ayant pas le pouvoir de négociation, il ne peut pas voter d’amendements sur le contenu des traités et des accords.
En revanche, il peut toujours amender la loi d’autorisation, comme il l’a fait, je vous le rappelle, au moment de l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct : l’article 1er a été complété et un deuxième article a été ajouté. Je vous renvoie aux textes relatifs aux pouvoirs publics ; c’est dedans ! Par conséquent, on peut toujours amender la loi d’autorisation de ratification d’un traité ou d’un accord.
La loi d’autorisation visée dans votre amendement pourra toujours être amendée. Mais elle ne pourra l’être que pour préciser des conditions spécifiques liées par exemple au contrôle parlementaire – comptes rendus, obligations devant nos commissions,…
Il ne peut pas y avoir d’amendement sur l’autorisation elle-même. Mais la loi pourra toujours préciser que le Gouvernement s’expliquera, par exemple, devant la commission de la défense dans deux mois, dans trois mois, ou autre. Ce sont des amendements de contrôle.
L’interdiction des amendements est donc relative. Elle peut porter sur l’accessoire, mais pas sur l’essentiel.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 111 et 140.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos 258 rectifié, 459 et 279 rectifié n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° 341.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 259 rectifié et 460.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté. – Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)
(M. Guy Fischer remplace M. Christian Poncelet au fauteuil de la présidence.)