M. le président. La parole est à M. Paul Girod.
M. Paul Girod. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, à cette heure tardive, je lèverai tout de suite un insupportable suspens : le groupe UMP et moi-même voterons les crédits de la sécurité civile ! (Sourires.)
Toutefois, nous reprendrons à notre compte certaines des observations des rapporteurs, en particulier celles qui portent sur la gestion à long terme de la carrière des sapeurs-pompiers : les grilles de rémunération, de retraite et d'encadrement laissent souvent perplexes les présidents de conseils généraux, qui, pour respecter ces dispositions, se voient contraints de procéder à certaines nominations.
Madame le ministre, si vous le voulez bien, j'élargirai la réflexion : je suis de ceux qui déplorent que nous ayons scindé la sécurité en deux parties.
Ainsi, au lieu de discuter de la sécurité en général ce matin et de la sécurité civile ce soir, nous aurions pu enchaîner d'un débat à l'autre. Cela aurait peut-être permis des complémentarités utiles, d'autant que, dans le monde qui nous attend, les périls seront globaux et mobiliseront non pas seulement les services de secours, mais tous les services de sécurité, sans même parler des services hospitaliers. Du coup, les réponses qui seront apportées à ces menaces, et leurs préparations, devront elles aussi être globales. Il faut donc dépasser, me semble-t-il, le cadre quelque peu étroit des missions « Sécurité » et « Sécurité civile ».
Cela dit, madame le ministre, je souhaite vous poser quelques questions. Un livre blanc sur la défense et la sécurité se trouve actuellement en préparation, et je veux être certain qu'il prendra suffisamment en compte les aspects liés à la sécurité et à la défense civiles. En effet, à la suite d'un certain nombre de conversations, j'ai acquis le sentiment que ce livre blanc était, pour l'instant, bien plus axé sur la défense, dans son acception classique et militaire, que sur la prise en compte globale des menaces qui pèsent sur notre pays.
De même, Mme le rapporteur pour avis a évoqué tout à l'heure la sensibilisation de la population à la défense civile, en rappelant que la loi de modernisation de la sécurité civile prévoyait d'impliquer l'éduction nationale. Toutefois, je puis témoigner que cette préoccupation n'a pas encore été prise en compte sur le terrain. Madame le ministre, je vous poserai deux questions.
Tout d'abord, où en est cette collaboration interministérielle qui devait, en principe, servir de toile de fond à notre réflexion sur la défense globale de notre pays ? À ma connaissance, un seul exercice en grandeur réelle a été conduit à ce jour, à savoir le plan gouvernemental de prévention et de lutte contre la pandémie grippale. Et encore, je dois bien constater, en tant qu'élu local, que les mesures de prévention décidées par l'éducation nationale ne sont pas parvenues jusqu'aux gestionnaires des écoles, c'est-à-dire les collectivités territoriales, qui ont été largement tenues à l'écart de la préparation de ce plan. Je souhaiterais donc que l'on aille plus loin dans l'implication de la population à travers ses élus locaux.
De même, je voudrais que l'on revoie le système d'alerte de la population. Actuellement, il existe dans quelques grandes villes - mais pas dans toutes - un réseau de sirènes. Mais qui connaît leur langage ? Strictement personne ! Si elles se mettaient à sonner pendant la nuit, les gens croiraient qu'il est midi, le premier mercredi du mois, et si elles étaient modulées, ils s'imagineraient qu'une fête du genre rave party est organisée dans le secteur ! (Sourires.)
Il reste beaucoup à faire pour que la sécurité, au sens large, soit assimilée par la population, qui pourrait alors jouer un rôle, le moment venu.
Par ailleurs, les exercices organisés ne sont pas assez inter-professionnels, me semble-t-il, alors qu'ils devraient impliquer à la fois les policiers, les gendarmes, les personnels hospitaliers et les sapeurs-pompiers, et l'on néglige parfois les leçons que l'on peut en tirer en termes d'organisation. Ce qui est intéressant dans un exercice, en effet, ce n'est pas ce qui marche, c'est ce qui a échoué et les enseignements qu'on en tire.
Madame le ministre, je souhaite vous interroger également sur la recherche. Je suis de ceux qui pensent que bien des domaines de la défense civile sont complémentaires et que nous devrions donc développer davantage les recherches duales.
Tout à l'heure, madame le rapporteur pour avis a parlé de l'Europe ; je voudrais m'associer à ses propos. Notre ami Michel Barnier avait déposé un rapport fort intéressant et je souhaiterais savoir quelles sont les étapes envisagées par la présidence française pour le faire prospérer.
Telles sont, madame le ministre, les quelles brèves réflexions que je tenais à formuler à cette heure tardive, en souhaitant que la mission qui est la vôtre, essentielle pour notre pays, puisse se développer avec la collaboration de tous. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.
M. Yvon Collin. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, le projet de budget que nous examinons ce soir a la particularité de ne pas représenter la totalité des concours publics affectés à la sécurité civile. En effet, comme l'ont souligné mes collègues rapporteurs, plus de 50% des crédits de l'État ne sont pas compris dans le périmètre de la présente mission.
Dans ces conditions, Mme le ministre me pardonnera certainement d'être en quelque sorte « hors sujet » - somme toute relatif - en évoquant essentiellement les SDIS, dans le bref temps qui m'est imparti.
La politique de sécurité civile constitue un enjeu essentiel, puisqu'il s'agit de protéger nos concitoyens d'un certain nombre de dangers. De la lutte contre les incendies, mission traditionnelle des sapeurs-pompiers, à la lutte contre les risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques, ou risques NRBC, mission plus récente et devenue tout aussi prioritaire depuis la menace terroriste, la sécurité civile nécessite des moyens importants.
Le projet de loi de finances pour 2008 est-il en mesure, madame le ministre, de répondre aux besoins de notre pays en matière de prévention des risques, de secours et de protection des personnes ? Avec 418 millions d'euros inscrits pour 2008, contre 427 millions d'euros ouverts en loi de finances pour 2007, la baisse est de 2,2 % ; je la regrette, dans un contexte où les charges vont continuer de croître, en raison notamment des problèmes liés à la dérégulation climatique.
Il est vrai, comme je le disais en introduction, que ce budget ne reflète pas toute la politique de sécurité, qui coûte globalement à l'État 900 millions d'euros. Depuis plusieurs années, les parlementaires souhaitent que soit donnée une dimension interministérielle à la sécurité civile, pour rendre plus cohérente l'intervention de l'État. Nous aurions ainsi une meilleure visibilité sur le plan budgétaire, et, sur le terrain, cela éviterait certains dysfonctionnements que l'on a pu remarquer dans le cadre des secours à la personne.
En effet, comme le souligne régulièrement le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, le secours à la personne se trouve dans une situation alarmante. Le vieillissement de la population conjugué à la désertification médicale dans certaines zones accroît la demande de secours, alors que l'offre souffre d'un manque de coordination entre les différents acteurs. Nous avons tous eu l'écho d'une « concurrence », cela a été rappelé, entre le SAMU, les sapeurs-pompiers et les ambulanciers privés.
Une redéfinition interministérielle de la mission permettrait sans doute de garantir la synergie des différentes compétences en matière de sécurité.
En attendant, les SDIS, les principaux acteurs, mobilisent d'importants moyens financiers, puisque leurs dépenses s'élèvent à 5 milliards d'euros pour l'année 2007. Cette manne financière est en hausse constante et représente 40% de plus qu'en 2004. Ce n'est pas sans conséquence, vous vous en doutez, sur les finances départementales, et donc sur nos concitoyens, dont la contribution à la sécurité est de 82 euros par personne et par an.
Cette évolution traduit un désengagement de l'État, car ce qu'il ne fait pas est relayé par les conseils généraux. En effet, de plus en plus, le développement et la modernisation des SDIS sont laissés à la seule charge des collectivités locales.
L'évolution du fonds d'aide à l'investissement, institué par la loi de finances pour 2003, en témoigne. Ce fonds a bénéficié de 65 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2006. En 2008, il sera doté de 28 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Si l'on y ajoute 10 millions d'euros de reports de crédits et 10 millions d'euros pour le programme ANTARES, on arrive à 48 millions d'euros, soit une baisse de 25% depuis deux ans.
Comprenant la nécessité de réagir aux remarques formulées par la Cour des comptes, nous sommes nombreux ce soir à déplorer le désengagement de l'État au niveau des dépenses d'investissement. Plutôt qu'une baisse des crédits au prétexte de leur sous-consommation, une simplification des procédures serait, semble-t-il, préférable.
En attendant une amélioration du fonctionnement du FAI, les collectivités locales se retrouvent au pied du mur, ce qui est regrettable, d'autant qu'elles doivent pouvoir conserver des marges de manoeuvre afin de poursuivre l'amélioration du statut des sapeurs-pompiers. En effet, les efforts engagés ces dernières années doivent continuer en direction, d'une part, d'une meilleure reconnaissance de la dangerosité et de la pénibilité de la profession et, d'autre part, de la gestion de la fin de carrière.
Nous le savons, mes chers collègues, par leur dévouement, leur courage, leur sang-froid et leur professionnalisme, les sapeurs-pompiers sont des hommes tout à fait exemplaires. C'est pourquoi, à son tour, l'État doit montrer l'exemple avec un budget donnant réellement aux « soldats de feu » les moyens d'exercer leurs missions.
C'est le message, madame le ministre, vous vous en souvenez, qu'ils avaient fait passer lors des manifestations de 2006. Je me permets d'être leur modeste porte-parole en 2007. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme le ministre.
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre présence à une heure aussi tardive, révélatrice de l'attention que vous portez à la situation des sapeurs-pompiers, et plus généralement à la protection civile de nos concitoyens.
S'agissant de cette mission, le projet de budget qui vous est soumis répond à deux objectifs principaux. Le premier est de renforcer les moyens nécessaires à l'exercice des missions de l'État. Le second, qui a été évoqué par un certain nombre d'entre vous, est d'assurer une meilleure et nécessaire coordination des différents acteurs de la sécurité.
En premier lieu, à travers ce budget, l'État renforce ses moyens. Cela correspond à son obligation de protection à l'égard de nos concitoyens, en particulier dans les situations où ils sont le plus fragilisés et où ils ont le plus besoin de soutien. C'est également la marque de la reconnaissance qui est justement due aux femmes et aux hommes qui servent dans les différents corps de pompiers, et qui exercent un métier difficile et dangereux.
Pour avoir assisté aux événements malheureux qui ont eu lieu dans le XIXe arrondissement voilà maintenant quinze jours, au cours desquels des pompiers ont tenté de dégager des décombres d'un garage automobile deux de leurs collègues, à la suite d'un violent incendie qui a provoqué l'effondrement d'une partie du bâtiment, je sais ce que l'exercice de ce métier représente en termes de compétence professionnelle, mais également de dévouement et de courage. Nous serons unanimes, j'en suis certaine, à leur rendre hommage !
En matière de sécurité civile, l'État n'est pas le seul acteur. Pour autant, son rôle, qu'il soit direct ou indirect, est majeur.
Monsieur Girod, vous avez eu raison de souligner le lien qui existe entre la sécurité, ou certains de ses aspects, la sécurité civile et la défense. Aujourd'hui, nous le savons, les problèmes de la sécurité ne connaissent plus guère de frontière, et les notions de sécurité extérieure et de sécurité intérieure, de même que celles de sécurité et de sécurité civile, se rejoignent dans un certain nombre de cas. Outre les catastrophes naturelles ou les attentats, je pense aux risques NRBC. Entre tous ces domaines, il existe une grande convergence.
Un certain nombre de ces préoccupations sont inscrites dans le livre blanc qui est en cours de préparation. Pour autant, celui-ci ne couvre pas tout et il est nécessaire, s'agissant de la sécurité civile, de se projeter dans l'avenir. C'est la raison pour laquelle - j'ai déjà eu l'occasion de le dire lors de l'examen d'une autre mission - j'ai prévu de créer une direction de la prospective et des affaires stratégiques au sein du ministère, qui couvrira l'ensemble de ses besoins de visibilité à plusieurs années. C'est aussi à cette direction que j'ai l'intention de confier la rédaction d'un livre blanc spécifique sur la sécurité civile, qui intégrera la nécessité d'anticiper sur les nouveaux besoins ainsi que sur les nouvelles technologies qui peuvent être utilisées.
Sans me projeter aussi loin, puisque nous examinons le projet de budget de l'année à venir, je tiens à dire que celui-ci comporte plusieurs avancées importantes.
La première avancée est le déploiement du projet ANTARES, dispositif d'interopérabilité des réseaux de communication qui concourent aux missions de sécurité civile. C'est un élément important, et nous avions un certain retard dans ce domaine. Ce déploiement se fera en trois ans, avec un financement qui sera lissé, lui, sur une période plus longue, puisqu'elle sera de neuf ans.
La deuxième avancée sensible est la modernisation des matériels d'intervention sur les risques naturels, technologiques et terroristes. Je pense en particulier à la mise en place, à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, la BSPP, d'une troisième chaine de décontamination armée en permanence de personnels.
La troisième avancée concerne les investissements immobiliers centrés sur des sites opérationnels. C'est le cas en particulier des services de déminage, avec la réhabilitation du site de stockage de Lyon et la construction des centres de déminage de Metz et de Châlons-en-Champagne. C'est également le cas des unités d'intervention de la sécurité civile, avec, comme vous l'avez souligné, monsieur le rapporteur spécial, trois opérations immobilières importantes au profit de l'unité de Brignoles.
Cependant, l'État, dans son effort, n'oublie pas le fonds d'aide à l'investissement des SDIS. J'ai entendu beaucoup de choses ce soir, mais, comme certains l'ont dit, il ne faut pas se contenter des mots ; il faut regarder les réalités en face !
Il est vrai que le montant des crédits inscrits au fonds d'aide à l'investissement des SDIS a fluctué, entre 2003 et 2006, de 45 millions d'euros à 64,85 millions d'euros, et que, en 2007, il a été doté de 37,5 millions d'euros. Cependant, nous nous sommes aperçus de grosses difficultés de consommation ; ainsi, même les sommes qui ont été inscrites en 2007 n'ont pas été entièrement dépensées. Dès lors, à quoi sert-il d'inscrire des crédits s'ils ne sont pas consommés ? Est-ce cela la transparence budgétaire ? Est-ce cela l'honnêteté ?
Pour 2008, un montant de 28 millions d'euros a été retenu, auquel s'ajouteront les 10 millions d'euros du programme ANTARES - vous ne me direz pas que cela ne fait pas partie de l'équipement ! - et environ 10 millions d'euros de report des crédits non consommés en 2007. C'est donc une capacité de financement total de près de 50 millions d'euros qui sera disponible en 2008 pour financer les projets d'équipement des SDIS.
Voilà la réalité, monsieur Collin, madame Assassi ! J'ajouterai que, à ce jour, seulement 76 % des crédits délégués ont été consommés, et que l'écart pluriannuel cumulé de consommation entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement est encore de 35 millions d'euros. Dès lors, serait-il sérieux de présenter des crédits tout en sachant qu'ils ne seront pas consommés ?
Madame le rapporteur pour avis, comme vous le soulignez, le FAI est en cours de réforme. Il en a besoin. Les grandes lignes de cette réforme ont déjà donné lieu à une présentation devant les élus, lors de la réunion de la conférence nationale des services d'incendie et de secours, qui s'est tenue le 26 novembre dernier.
Le projet de décret, qui comprend notamment la nécessité d'intégrer une fonction d'orientation pluriannuelle et un recentrage des projets éligibles sur les priorités nationales, est en cours d'élaboration. Il sera publié à l'issu de la concertation interministérielle et après avis formel de la conférence nationale, durant le premier semestre de 2008.
M. Girod a évoqué la modernisation de l'alerte. C'est aussi l'une de nos préoccupations. Un rapport a été établi par l'Inspection générale de l'administration à l'été 2005. À la suite de ce rapport, des expérimentations ont été décidées et mises en oeuvre entre septembre 2006 et novembre 2007, notamment dans le Haut-Rhin. J'attends un dossier complet sur la rénovation de l'alerte, qui doit m'être remis à la mi-décembre. Monsieur le sénateur, votre intervention vient donc à point nommé !
Le second élément, en dehors des efforts que nous consentons pour adapter le mieux possible les moyens aux besoins, tient à la nécessité de renforcer la coordination des acteurs de la sécurité civile.
Comme cela a été souligné à juste titre, l'État doit mettre au service des élus locaux les outils de pilotage qui permettent de réduire les disparités entre les départements. Je m'y emploie avec la Conférence nationale des services d'incendie et de secours, en mettant en particulier à la disposition de tous une information comparative, notamment financière.
Monsieur Othily, la spécificité de l'outre-mer, et de la Guyane en particulier, a été prise en compte de trois manières.
Premièrement, le Président de la République nous a donné jusqu'à la fin de l'année 2008 pour aboutir à une position pleinement concertée avec les élus sur l'application de la mesure visant la contribution au SDIS, pour remédier au problème des contingents communaux et des prélèvements opérés sur la DGF. Car nous voulons aussi, mesdames, messieurs les sénateurs, comme chacun d'entre vous, conserver un lien entre les communes et les pompiers.
La concertation est donc engagée et elle s'appuie sur une étude des inspections, qui intégrera des propositions spécifiques concernant la situation guyanaise.
Deuxièmement, s'agissant de l'aide apportée par l'État, la Conférence nationale des services d'incendie et de secours a acté les grandes lignes de la réforme du FAI qui sera mise en oeuvre par décret, en 2008. Les élus ont réaffirmé leur souhait d'une action spécifique de solidarité nationale au profit de l'outre-mer ; le décret finalisé intégrera donc totalement cette préoccupation.
Troisièmement, afin de favoriser le redressement des finances des collectivités territoriales de Guyane les plus fragiles, je m'apprête à les autoriser, par dérogation, à financer la section de fonctionnement par des recettes d'investissement. Cette autorisation, qui m'a été demandée, constitue une avancée considérable.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Mais ce n'est pas très « lolfien » ! (Sourires.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre. Pour légitime que soit la prise en compte du coût des interventions et leur juste répartition, chacun comprend bien que, en matière de secours, les enjeux ne s'apprécient pas uniquement en euros dépensés. Il revient aussi à l'État de mieux coordonner les intervenants. C'est, d'ailleurs, dans ce sens que le chef de l'État s'est prononcé, le 29 septembre dernier, au congrès de la fédération nationale des sapeurs-pompiers professionnels. Il nous a demandé d'assurer les moyens de cette coordination, notamment par le rapprochement entre les « rouges » et les « blancs ».
Mme le ministre de la santé, de la jeunesse et des sports et moi-même avons installé, le 26 novembre dernier, un comité quadripartite réunissant les SAMU et les sapeurs-pompiers. Ce comité est chargé de faire des préconisations pour améliorer la coordination entre les missions de secours à la personne et la prise en charge des urgences médicales, à tous niveaux.
En effet, et cela a été souligné, l'augmentation et l'évolution des demandes adressées aux services de secours et aux structures de médecine d'urgence, l'hétérogénéité des situations d'un département à l'autre, le manque de clarté dans les partages de compétences rendent nécessaire un véritable travail sur l'organisation de notre dispositif dans ce domaine
La tâche principale de ce comité sera de définir un référentiel commun sur le partage des responsabilités, en précisant notamment celles qui relèvent du prompt secours et celles qui sont du ressort de l'urgence médicale.
Le comité formulera des propositions pour améliorer l'efficience des prises en charge en urgence dans trois domaines en particulier.
Il s'agit, d'abord, de l'organisation territoriale.
Au niveau central, les deux directions devront mieux se coordonner et, à l'échelle de chaque région, il faudra rapprocher les structures compétentes afin de renforcer leur cohérence.
Par ailleurs, des recommandations relatives aux interconnexions prenant en compte le déploiement d'ANTARES seront faites.
Il s'agit, ensuite, de la graduation de la prise en charge.
Le comité devra établir un référentiel des interventions du SAMU et du SDIS en vue de préciser les cas dans lesquels le premier niveau détient une capacité de décision propre, dans un esprit de qualité des soins et de rapidité des prises en charge. Ce référentiel sera rédigé pour février 2008. Nous allons donc avancer très vite.
Il s'agit, enfin, de la rémunération des interventions des SDIS effectuées à la demande des SAMU et qui ne font pas partie de leurs missions propres.
Ces interventions font l'objet d'études et de propositions. Un premier rapport d'étape a été demandé pour le mois de février. Pour avoir trouvé un excellent état d'esprit lors de notre première réunion, je suis persuadée que le comité saura nous présenter des propositions intéressantes.
Comme vous pouvez le constater, monsieur Peyronnet, je n'en reste ni aux intentions ni aux bonnes paroles, j'agis, et j'agis vite. Je suis convaincue que, avec l'effort de tous, nous obtiendrons des solutions rapides ; d'ailleurs, nous le devons.
Mieux coordonner les intervenants, c'est aussi pleinement intégrer les volontaires, qui représentent 84% des effectifs des SDIS et qui sont au coeur de notre dispositif.
L'enjeu des années à venir est précisément de pérenniser l'engagement des volontaires et, en renforçant le partenariat avec les employeurs, de favoriser leur disponibilité.
Au-delà de la « prestation de fidélisation et de reconnaissance », le plan d'action en faveur du volontariat, signé à la fin de 2006, offre de nombreux encouragements à tous ceux qui veulent s'engager ou soutenir leurs efforts.
J'ai moi-même signé le premier engagement national ministériel pour permettre à tous les agents du ministère de l'intérieur qui sont sapeurs-pompiers volontaires de pouvoir exercer leurs missions de manière compatible avec leur vie professionnelle. Cela peut paraître étonnant, mais un tel engagement n'existait pas !
Mieux coordonner - cela a été souligné par plusieurs intervenants, notamment par Mme Troendle - c'est aussi conforter le rôle européen et international de la France en matière de prévention et de couverture des risques.
Oui, l'Union européenne est devenue un acteur majeur, à l'échelle mondiale, dans le domaine de la sécurité et de la protection civile. Elle doit être à même d'intervenir à l'intérieur de l'Europe - elle l'a fait cet été en Italie et en Grèce - ou à l'extérieur. J'approuve sans réserve vos propos sur ce point, monsieur Othily.
Le renforcement des capacités de l'Union européenne dans le domaine de la protection civile constituera l'un des objectifs majeurs de la présidence française. Le travail que j'ai engagé avec mes collègues a permis l'émergence d'un consensus. D'ici au premier trimestre de 2008, les différents pays de l'Union devront recenser les capacités humaines et matérielles dont ils disposent, et dresser la liste des personnels et des matériels qu'ils sont susceptibles de projeter dans une opération extérieure, qu'elle soit européenne ou extraeuropéenne.
L'été 2007 a constitué un véritable test pour le mécanisme communautaire de protection civile et a mis en évidence nos lacunes.
Pendant la présidence française de l'Union européenne, à partir du recensement qui aura été réalisé par les différents pays, j'ai l'intention de répertorier les lacunes capacitaires en matière de protection civile à l'échelon européen, de déterminer les modalités selon lesquelles nous pourrons, collectivement, combler ces lacunes et de mettre en place un système nous permettant de planifier des opérations rapides.
Nous obtiendrons ainsi une amélioration considérable des capacités d'action de l'Europe, qui, en outre, seront mieux connues à l'extérieur de son espace géographique.
Enfin, mieux coordonner les intervenants, c'est répondre aussi à l'exigence de visibilité et de lisibilité que nous demandent nos compatriotes et dont vous vous êtes fait l'écho, madame le rapporteur.
La logique de coproduction de la sécurité civile par les collectivités locales et l'État, qui fonde la loi de 2004, est respectueuse du principe historique de décentralisation de la sécurité civile. Sans doute pouvons-nous aller encore plus loin dans l'association de tous. Cela rejoint le plan global que souhaite M. Paul Girod et sur lequel je m'investirai personnellement.
Monsieur le président, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, les crédits qui sont soumis à votre appréciation au titre de la mission « Sécurité civile » attestent de la volonté concrète de l'État de répondre présent face à tous les risques naturels, NRBC ou autres, qui peuvent menacer nos concitoyens.
Vous l'avez compris, le rôle de l'État dans ce domaine est de veiller à une configuration optimale de tous les intervenants dans la chaîne de la sécurité civile. C'est son devoir, c'est la responsabilité de chacun d'entre nous et c'est ce qu'attendent les Françaises et les Français. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF.)
M. le président. Nous allons passer au vote des crédits de la mission : « Sécurité civile » figurant à l'état B.
État B
(En euros) |
||
Sécurité civile |
728 846 465 |
415 081 465 |
Intervention des services opérationnels |
563 018 091 |
239 253 091 |
Dont titre 2 |
119 479 000 |
119 479 000 |
Coordination des moyens de secours |
165 828 374 |
175 828 374 |
Dont titre 2 |
24 440 000 |
24 440 000 |
M. le président. Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix les crédits de la mission.
(Ces crédits sont adoptés.)
M. le président. J'appelle en discussion l'amendement no II-111 portant article additionnel après l'article 48 octies, rattaché pour son examen à la mission « Sécurité civile ».
Article additionnel après l'article 48 octies
M. le président. L'amendement n° II-111, présenté par M. Doligé, est ainsi libellé :
Après l'article 48 octies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le conseil d'administration de l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers est renouvelé dans les six mois suivant le renouvellement triennal des conseils généraux. Un décret en Conseil d'État fixe la composition du conseil d'administration.
II. - Le mandat des membres du conseil d'administration de l'École nationale supérieure des officiers de sapeurs-pompiers en cours au moment de la publication de la présente loi est prorogé jusqu'au 16 septembre 2008.
La parole est à M. Eric Doligé.
M. Éric Doligé. Monsieur le président, madame la ministre, une petite difficulté va me conduire à retirer cet amendement. En effet, s'il était adopté, cela risquerait de poser quelques problèmes ultérieurement, m'a-t-on dit !
Je le ferai avec regret, car, une fois encore, on modifie une loi électorale sans tirer les conséquences qui en découlent. En l'occurrence, on élira, dans chaque SDIS, des représentants dont le mandat ne durera que quelques semaines, voire quelques mois, et il faudra recommencer.
Mais avant de retirer cet amendement, permettez-moi de faire quelques observations.
Tout d'abord, madame la ministre, lorsque je m'adresse à vous, je dis « madame la ministre ». Monsieur le président de séance, lorsque je m'adresse à vous, je dis « monsieur le président » et non « Guy Fischer ». Lorsque je m'adresse à un colonel de pompier, je dis « mon colonel ». Cela me paraît tout à fait normal !
Or, dans cet hémicycle, d'aucuns ont parlé du Président de la République en le nommant « Nicolas Sarkozy ». Moi, je considère que le Président de la République s'appelle « M. le Président de la République » ou « M. le Président de la République, Nicolas Sarkozy » !
Je me permets de faire cette observation, car il y va, me semble-t-il, de la bonne tenue en société et du respect de nos institutions.
Madame la ministre Michèle Alliot-Marie, ce sont les conseils généraux et les collectivités locales qui financent les SDIS, qui en sont les patrons. Vous avez évoqué la création d'un comité sur l'urgence médicale. Je ne voudrais pas que les pompiers décident, indirectement, de ce qui est bon ; les présidents de SDIS sont les véritables autorités de financement et, à ce titre, ils doivent participer à la décision.
Enfin, il convient de revoir le financement des SDIS. On ne peut pas continuer, comme on le fait aujourd'hui, à essayer de trouver de petits arrangements pour équilibrer les comptes.
Il existe des sources de financement : la santé, les assurances, les sociétés d'autoroutes. Il faut travailler sur ce sujet. Je suis persuadé que cela évitera des débats longs, difficiles et délicats et que nous parviendrons ainsi à financer sans difficulté nos services départementaux d'incendie et de secours.
J'en viens à mon amendement. J'ai bien compris, au détour de discussions de couloir - non pas avec M. le président de la commission des finances, Jean Arthuis, que je remercie -que cet amendement risquait de ne pas passer le barrage du Conseil constitutionnel et que ce n'était pas la peine d'aller se faire battre.
C'est pourquoi, bien que je regrette que l'on n'aille jamais au fond des choses, je le retire.
M. le président. L'amendement n° II-111 est retiré.
Nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Sécurité civile ».